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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-7, 25 septembre 2025, n° 22/09039

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 22/09039

25 septembre 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AU FOND

DU 25 SEPTEMBRE 2025

N°2025/339

Rôle N° RG 22/09039 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJT24

Syndic. de copro. SDC [Adresse 6]

C/

[D] [B]

Copie exécutoire délivrée le :

à :

Me Romain CHERFILS

Me Sandra JUSTON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 29 Avril 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 21/00390.

APPELANTE

Le Syndicat des Copropriétaires de la Résidence [Adresse 6], sis [Adresse 3], représenté par son Syndic en exercice, la SAS FONCIA AD IMMOBILIER, immatriculée au RCS de CANNES sous le n° 322 212 168, dont le siège social est [Adresse 1], poursuites et diligences de son gérant en exercice domicilié en cette qualité audit siège

représenté par Me Romain CHERFILS de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Lili RAVAUX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté de Me Franck GHIGO, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me Margaux VERAN-PIAZZESI, avocat au barreau de NICE, plaidant

INTIMEE

Madame [D] [B]

née le 17 Mai 1946 à [Localité 5], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée de Me Philippe MARIA de l'ASSOCIATION MARIA - RISTORI-MARIA, avocat au barreau de GRASSE substituée par Me Sandrine TURRIN, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Juin 2025 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre, et Madame Carole MENDOZA, Conseillère, chargées du rapport.

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère

Madame Florence PERRAUT, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Septembre 2025.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Septembre 2025.

Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [B] est propriétaire des lots n°41 (appartement au 4ème étage) et n°14 au sein de l'ensemble immobilier en copropriété dénommé « [Adresse 6] » à [Localité 4].

Une assemblée générale des copropriétaires s'est tenue le 10 décembre 2020, au cours de laquelle une résolution n°28 portant sur la demande des époux [N] (appartement au 5ème étage) les autorisant à installer des stores bannes sur leur terrasse, a été adoptée à la majorité.

Suivant acte de commissaire de justice du 27 janvier 2021, Madame [B] a fait assigner le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] » devant le tribunal judiciaire de Grasse aux fins de voir annuler la résolution n°28 de l'assemblée générale du 10 décembre 2020 et condamner ce dernier au paiement de la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

L'affaire a été évoquée à l'audience du 17 février 2022.

Madame [B] demandait au tribunal de lui allouer le bénéfice de son exploit introductif d'instance.

Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] » concluait au débouté des demandes de Madame [B] et sollicitait la condamnation de cette dernière au paiement de la somme de 5.000 € à titre de dommages-intérêts, de celle de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Suivant jugement contradictoire du 29 avril 2022, le tribunal judiciaire de Grasse a :

* constaté la recevabilité de l'action en annulation de résolution d'assemblée générale engagée par Madame [B] à l'encontre du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] »

* prononcé l'annulation de la résolution n°28 de l'assemblée générale des copropriétaires du 10 décembre 2020 pour une erreur de majorité ;

* rejeté la demande de dommages et intérêts présentée par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] »

* rejeté le surplus des demandes ;

* condamné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] » au paiement à Madame [B] de la somme de 1.800 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

* condamné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] » aux dépens ;

* dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Suivant déclaration en date du 23 juin 2022, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] » a relevé appel total à titre conservatoire de ladite décision.

Aux termes des dernières conclusions notifiées par voie électronique le 14 mai 2025, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé de ses moyens et de ses prétentions, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] » demande à la cour de :

* réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Et, statuant à nouveau,

* juger que les demandes formulées par Madame [B] sont infondées,

* juger que la résolution n°28 de l'assemblée générale du 10 décembre 2020 est parfaitement régulière,

* juger qu'en tout état de cause l'autorisation de travaux objet de la résolution n°28 de l'assemblée générale du 10 décembre 2020, a été à nouveau accordée dans le cadre de la résolution n°17 de l'assemblée générale du 30 novembre 2021,

* juger que l'autorisation de travaux objet de la résolution n°28 a été à nouveau accordée dans le cadre de la résolution n°22 de l'assemblée générale du 14 décembre 2022,

* juger que le règlement de copropriété prévoit et autorise la pose de stores et fermetures extérieures,

* juger que le règlement de copropriété prévaut sur une décision d'assemblée générale,

* juger que Madame [B] fait preuve de la plus parfaite mauvaise foi et obère la trésorerie de la copropriété par son acharnement procédural,

En conséquence,

* débouter Madame [B] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

A titre reconventionnel,

* condamner Madame [B] au paiement de la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts,

* condamner Madame [B] au paiement de la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

* condamner Madame [B] aux entiers dépens de l'instance, distraits au profit de Maître CHERFILS, sous sa due affirmation de droit.

* dire n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de droit.

Au soutien de ses demandes, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] » explique que le projet consiste en la mise en place de stores transparents comportant une fermeture par zip, soit une structure démontable, à peine visible de l'extérieur.

Il rappelle que le règlement de copropriété fait mention d'obturation et de panneaux fixes ou mobiles en façade de l'immeuble, ce qui n'est pas le cas du projet querellé. Au contraire, ledit règlement autorise les installations de stores et de fermetures extérieures à la condition que la teinte et la forme puissent être choisies et contrôlées par le syndic.

Il considère que si le procès-verbal comporte une indication erronée de la majorité applicable, telle que par exemple, la majorité de l'article 24 au lieu de la majorité de l'article 25, cette erreur est sans incidence dès lors que la majorité légalement requise a été effectivement obtenue.

En l'espèce, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] » estime que le projet ne porte ni atteinte au règlement de copropriété, ni à l'aspect extérieur de l'immeuble si bien que c'est la majorité de l'article 24 qui trouve à s'appliquer, mais peu importe puisque la majorité des copropriétaires ont voté « pour ».

Il relève que si la cour devait considérer que la résolution n°28 devait être votée à la majorité de l'article 25, plus d'un tiers des voix des copropriétaires sont en faveur du projet et puisque les votes ont eu lieu par correspondance, les votes lors du second vote auraient été strictement identiques au premier.

Il indique qu'une nouvelle résolution a été votée lors de l'assemblée générale des copropriétaires du 14 décembre 2022, de sorte qu'il n'existe plus de contestation possible.

Il ajoute que le projet de travaux présenté en vue de l'assemblée générale démontre parfaitement qu'il ne sera porté aucune atteinte à l'étanchéité de l'immeuble, seul un pilier sera boulonné dans une dalle sur plot, la charge au sol étant ainsi particulièrement faible.

Il considère que Madame [B] opère une résistance incompréhensible à la réalisation de travaux impératifs, et que la voisine en-dessous de cette dernière subit un préjudice en raison d'écoulements d'eau importants et anormaux en cas d'intempérie, écoulements qui nécessiteraient des travaux auxquels s'opposent l'intimée.

Il ajoute que cette dernière a contesté les résolutions n°17 de l'assemblée du 30 novembre 2021 et n°22 et 23 de l'assemblée du 14 décembre 2022, et qu'elle n'a pourtant pas voté contre la résolution visant à solliciter l'installation de stores qui concernait d'autres copropriétaires lors des assemblées du 13 juin 2013 et du 21 décembre 2023.

Aux termes des dernières conclusions notifiées par voie électronique le 20 mai 2025, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé de ses moyens et de ses prétentions, Madame [B] demande à la cour de :

* rejeter les demandes du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] »,

* confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

* condamner le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] » au paiement de la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

* condamner le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] » en outre aux entiers dépens, en ce compris les dépens de première instance, les dépens d'appel étant distraits au profit de la SCP BADIE ' SIMON ' THIBAUD ' JUSTON, avocats aux offres de droit.

Au soutien de ses demandes, Madame [B] maintient que les travaux sollicités contreviennent aux dispositions du règlement de copropriété qui fait la loi des parties, les panneaux étant fixés sur la structure de l'immeuble et étant parfaitement visibles de l'extérieur, qu'ils soient transparents ou non

Elle fait valoir qu'il s'agit de panneaux fixes, fixés dans la structure du gros 'uvre de l'immeuble et qui ont vocation à obturer les surfaces ouvertes.

Elle indique que les résolutions n°17 et 23 des assemblées générales ultérieures sont relatives à la pose d'un store en façade ouest alors que la cour est saisie de l'installation de stores qui ont pour effet d'obturer la terrasse des époux [N] située en façade sud.

Elle considère que la résolution contestée a été proposée au vote selon la règle de majorité de l'article 24 alors qu'elle ne pouvait à tout le moins relever que des règles de majorité de l'article 25, les travaux projetés affectant indiscutablement les parties communes.

Elle relève que l'exécution des travaux, qui nécessite qu'un pilier soit boulonné sur une dalle, reposant sur un plot, reposant lui-même sur l'étanchéité, portera indiscutablement atteinte aux parties communes.

Madame [B] estime avoir simplement constaté que les époux [N] ne respectaient ni le règlement de copropriété, ni les règles issues de la loi du 10 juillet 1965 et du décret de 1967 et avoir ainsi légitimement agi pour contester ce comportement.

******

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 mai 2025.

L'affaire a été appelée à l'audience du 11 juin 2025 et mise en délibéré au 25 septembre 2025.

******

A titre liminaire la cour rappelle qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions des parties.
Que par prétention, il faut entendre une demande en justice tendant à ce qu'il soit tranché un point litigieux.

Que par voie de conséquence, les expressions telles que « dire et juger », « déclarer » ou « constater » ne constituent pas de véritables prétentions, mais en réalité des moyens qui ont leur place dans le corps des écritures, plus précisément dans la partie consacrée à l'examen des griefs formulés contre la décision entreprise et dans la discussion des prétentions et moyens, mais pas dans le dispositif même des conclusions.

1°) Sur la résolution n°28 de l'assemblée générale du 10 décembre 2020

Attendu que la résolution n° 28 de l'assemblée générale du 10 décembre 2020 est libellée comme suit :

« Demande des époux [W]/[N] . Installation de stores bannes Zip verticaux ( article 24.)

Proposition de résolution :

L'assemblée générale prend connaissance du dossier ci-joint de Monsieur [S] [J] et décide d'autoriser leur demande d'installation de stores bannes zip verticaux sur leur terrasse.

Se sont abstenus : 650/7779.

Ont voté contre 2386/7129.

Ont voté pour 4743/7129.

Résolution adoptée à la majorité des copropriétaires présents et représentés »

Attendu que Madame [B] invoque trois motifs d'annulation de la résolution n°28 à savoir que :

- cette résolution a été adoptée en violation des dispositions du règlement de copropriété.

- les règles de majorité applicable en vertu de la loi du 10 juillet 1965 ont également été violées.

- les installations souhaitées par les époux [N] , dans le cadre de la résolution n°28 porte atteinte aux parties communes,

ces trois motifs d'annulation étant contestés par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] »

Sur la violation des dispositions du règlement de copropriété.

Attendu que Madame [B] fait valoir que les stores que souhaitent installer les époux [N] sont dans la conception et leur aspect contraires aux dispositions spécifiques du règlement de copropriété qui comporte des règles précises quant à la protection notamment de l'aspect extérieur et de la particularité architecturale de cet immeuble.

Attendu qu'il résulte du paragraphe 3°) Harmonie et aspect des bâtiments de la section II intitulée ' Usage des parties privatives - de l'état descriptif de division et règlement de copropriété du 24 octobre 2011 que « ( ') La pose de stores et fermetures extérieures est autorisée sous réserve que la teinte et la forme soient celles choisies par le syndic de copropriété sous contrôle du syndic et le cas échéant de l'architecte de l'immeuble.

Sous toutes les réserves qui précèdent et autorisations nécessaire, aucun aménagement, ni aucune décoration ne pourront être apportés par un copropriétaire aux balcons, loggias, terrasses qui extérieurement rompraient l'harmonie de l'immeuble.

Notamment en aucun cas les balcons, terrasses et d'une manière générale toutes surfaces ouvertes ne pourront être obturées au moyen de panneaux fixes ou mobiles en façade de l'immeuble .

(')»

Que le paragraphe 8°) Balcons- Terrasses-Jardins de la dite section énonce également que « (')Les copropriétaires pourront procéder à des aménagements et décorations mais à condition que ceux-ci ne portent en rien atteinte à l'aspect extérieur ou à l'harmonie de l'immeuble et sous contrôle du syndic.

Notamment en aucun cas les balcons, terrasses et d'une manière générale toutes surfaces ouvertes ne pourront être obturées au moyen de panneaux fixes ou mobiles en façade de l'immeuble ».

Attendu que le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] » soutient que le projet des époux [N] ne contrevient pas au règlement de copropriété.

Qu'il fait valoir qu'il s'agit de la mise en place de stores transparents comportant une fermeture par zip.

Qu'il s'agit d'une structure démontable qui ne porte pas atteinte aux parties commues, soulignant que ces panneaux sont à peine visibles de l'extérieur dans la mesure où ils sont totalement transparents et de ce fait ne modifient en rien l'aspect extérieur de l'immeuble.

Que ces derniers n'obstruent rien puisqu'il ne s'agit pas de panneaux fixes ou mobiles mais des stores transparents.

Attendu que les travaux projetés par les époux [N] consistent en la pose de trois coffres fixés au plafond sous le toit dans lesquelles s'enroulent des toiles cristal en PVC.

Que cette installation suppose de mettre en place six coulisses fixées horizontalement aux coffres et verticalement pour 4 d'entre elles vissées sur deux des poteaux de la terrasse, pour une autre sur la façade du séjour côté ouest, la dernière étant vissée sur un pilier qui sera fixé au sol par une platine dans une dalle sur plot côté du claustra de séparation.

Qu'ainsi la mise en place de ces panneaux permet d'assurer une protection contre les courants d'air froids et autres intempéries et ainsi d'offrir une isolation thermique suffisante pour permettre de profiter de l'espace extérieur de l'appartement en dehors des saisons estivales.

Qu'il convient d'observer que les appartements du toit terrasse de « la [Adresse 6] » dont celui des époux [N] sont particulièrement remarquables et identifiables par les colonnes colorées qui ornent l'extérieur et qui leur donnent ainsi qu'à l'immeuble en son entier un cachet unique.

Que l'appelant ne peut valablement soutenir que ces panneaux, fussent-ils transparents, sont à peine visibles de l'extérieur alors qu'il est constant que des travaux définitifs sont nécessaires, affectant les parties communes et incontestablement l'aspect du gros 'uvre de l'immeuble dans la mesure où un encadrement est nécessaire à son enroulement et son déploiement, parfaitement visible depuis l'extérieur.

Que la simple comparaison entre les photos de l'état actuel de la terrasse des époux [N] versées aux débats par Madame [B] avec la photo en page 8 des conclusions du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] » figurant la terrasse des époux [N] après pose de panneaux suffit à démontrer la modification de l'aspect extérieur.

Qu'un tel aménagement en façade est forcément visible et ce d'autant plus s'il supporte des panneaux certes mobiles et transparents dont la vocation, une fois baissés, est de fermer la terrasse, donc d'obturer cette dernière, l'obturation synonyme d'obstruction se définissant comme l'action de boucher quelque chose ce qui est interdit par le règlement de copropriété.

Qu'il convient dès lors de constater qu'un tel aménagement est de nature à rompre l'harmonie de l'immeuble telle qu'elle a été voulue par ses constructeurs et protégée par le règlement de copropriété.

Qu'il y a lieu de confirmer le jugement déféré sur ce point et de prononcer l'annulation de la résolution n°28 de l'assemblée générale des copropriétaires du 10 décembre 2020

Sur la majorité

Attendu que la résolution n°28 de l'assemblée générale du 10 décembre 2020 a été proposée au vote des copropriétaires selon la règle de majorité de l'article 24 de la loi du 10 juillet 1965.

Que Madame [B] soutient qu'une telle résolution ne pouvait en aucun cas relever de la majorité de cet article, ne pouvant à tout le moins relever que des règles de la majorité de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965 puisque l'autorisation sollicitée par les époux [N] affectait, par la fixation des panneaux sur la structure de l'immeuble, les parties communes.

Que le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] » fait valoir que la majorité de l'article 24 trouvait à s'appliquer dans la mesure où il n'y avait ni atteinte au règlement de copropriété, ni à l'aspect extérieur de l'immeuble

Qu'il ajoutait que si par extraordinaire la cour devait considérer que le projet des travaux portait atteinte à l'aspect extérieur de l'immeuble, il conviendra de relever que l'erreur de majorité n'a entraîné aucune conséquence, rappelant qu'il importe peu que la majorité requise était celle de l'article 24 ou celle de l'article 25 dans la mesure où la majorité des copropriétaires ont voté pour.

Attendu que l'article 24 de la loi du 10 juillet 1965 dans sa version applicable au cas d'espèce dispose que « I.-Les décisions de l'assemblée générale sont prises à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance, s'il n'en est autrement ordonné par la loi.

II.-Sont notamment approuvés dans les conditions de majorité prévues au I :

a) Les travaux nécessaires à la conservation de l'immeuble ainsi qu'à la préservation de la santé et de la sécurité physique des occupants, qui incluent les travaux portant sur la stabilité de l'immeuble, le clos, le couvert ou les réseaux et les travaux permettant d'assurer la mise en conformité des logements avec les normes de salubrité, de sécurité et d'équipement définies par les dispositions prises pour l'application de l'article 1er de la loi n° 67-561 du 12 juillet 1967 relative à l'amélioration de l'habitat ;

b) Les modalités de réalisation et d'exécution des travaux rendus obligatoires en vertu de dispositions législatives ou réglementaires ou d'un arrêté de police administrative relatif à la sécurité ou à la salubrité publique, notifié au syndicat des copropriétaires pris en la personne du syndic ;

c) Les modalités de réalisation et d'exécution des travaux notifiés en vertu de l'article L.313-4-2 du code de l'urbanisme, notamment la faculté pour le syndicat des copropriétaires d'assurer la maîtrise d'ouvrage des travaux notifiés portant sur les parties privatives de tout ou partie des copropriétaires et qui sont alors réalisés aux frais du copropriétaire du lot concerné ;

d) Les travaux d'accessibilité aux personnes handicapées ou à mobilité réduite, sous réserve qu'ils n'affectent pas la structure de l'immeuble ou ses éléments d'équipement essentiels ;

e) La suppression des vide-ordures pour des impératifs d'hygiène ;

f) Les adaptations du règlement de copropriété rendues nécessaires par les modifications législatives et réglementaires intervenues depuis son établissement. La publication de ces modifications du règlement de copropriété est effectuée au droit fixe ;

g) La décision d'engager le diagnostic prévu à l'article L. 731-1 du code de la construction et de l'habitation ainsi que ses modalités de réalisation ;

h) L'autorisation permanente accordée à la police ou à la gendarmerie nationale de pénétrer dans les parties communes ;

i) La décision d'équiper les emplacements de stationnement d'accès sécurisé à usage privatif avec des bornes de recharge pour véhicules électriques et hybrides rechargeables et de réaliser l'étude mentionnée au III de l'article 24-5 ;

j) L'autorisation donnée à un ou plusieurs copropriétaires d'effectuer à leurs frais les travaux permettant le stationnement sécurisé des vélos dans les parties communes, sous réserve que ces travaux n'affectent pas la structure de l'immeuble, sa destination ou ses éléments d'équipement essentiels et qu'ils ne mettent pas en cause la sécurité des occupants.

Qu'il résulte de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965 dans sa version applicable au cas d'espèce que « ne sont adoptées qu'à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant :

a) Toute délégation du pouvoir donnée au syndic, au conseil syndical ou à toute personne de prendre un acte ou une décision mentionné à l'article 24. Lorsque l'assemblée autorise le délégataire à décider de dépenses, elle fixe le montant maximum des sommes allouées à ce titre ;

b) L'autorisation donnée à certains copropriétaires d'effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble, et conformes à la destination de celui-ci ;

c) La désignation ou la révocation du ou des syndics et des membres du conseil syndical ;

d) Les conditions auxquelles sont réalisés les actes de disposition sur les parties communes ou sur des droits accessoires à ces parties communes, lorsque ces actes résultent d'obligations légales ou réglementaires telles que celles relatives à l'établissement de cours communes, d'autres servitudes ou à la cession de droits de mitoyenneté ;

e) La modification de la répartition des charges visées à l'alinéa 1er de l'article 10 ci-dessus rendue nécessaire par un changement de l'usage d'une ou plusieurs parties privatives ;

f) Les travaux d'économies d'énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Ces travaux peuvent comprendre des travaux d'intérêt collectif réalisés sur les parties privatives et aux frais du copropriétaire du lot concerné, sauf dans le cas où ce dernier est en mesure de produire la preuve de la réalisation de travaux équivalents dans les dix années précédentes.

Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent f.

g) Les modalités d'ouverture des portes d'accès aux immeubles. En cas de fermeture totale de l'immeuble, celle-ci doit être compatible avec l'exercice d'une activité autorisée par le règlement de copropriété ;

h) L'installation d'une station radioélectrique nécessaire au déploiement d'un réseau radioélectrique ouvert au public ou l'installation ou la modification d'une antenne collective ou d'un réseau de communications électroniques interne à l'immeuble dès lors qu'elles portent sur des parties communes ;

i) La délégation de pouvoir au président du conseil syndical d'introduire une action judiciaire contre le syndic en réparation du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires ;

j) L'installation ou la modification des installations électriques intérieures ou extérieures permettant l'alimentation des emplacements de stationnement d'accès sécurisé à usage privatif pour permettre la recharge des véhicules électriques ou hybrides rechargeables, ainsi que la réalisation des installations de recharge électrique permettant un comptage individuel pour ces mêmes véhicules ;

k) L'installation de compteurs d'eau froide divisionnaires.

l) L'installation de compteurs d'énergie thermique ou de répartiteurs de frais de chauffage ;

m) L'autorisation de transmettre aux services chargés du maintien de l'ordre les images réalisées en vue de la protection des parties communes, dans les conditions prévues à l'article L.272-2 du code de la sécurité intérieure ;

n) L'ensemble des travaux comportant transformation, addition ou amélioration ;

o) La demande d'individualisation des contrats de fourniture d'eau et la réalisation des études et travaux nécessaires à cette individualisation. »

Attendu que dans la mesure où les travaux envisagés par les époux [N] affectaient les parties communes et l'aspect extérieur de l'immeuble, Madame [B] était fondée à solliciter que la résolution n°28 de l'assemblée générale du 10 décembre 2020 soit proposée au vote des copropriétaires selon la règle de majorité de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965.

Attendu qu'il résulte du procès-verbal de l'assemblée générale du 10 décembre 2020 que :

Se sont abstenus : 650/7779.

Ont voté contre 2386/7129.

Ont voté pour 4743/7129.

Qu'ainsi le total général des tantièmes de l'ensemble des copropriétaires s'élève à 10000/10000

Que dés lors pour que la résolution n° 28 ait pu respecter, pour être approuvée, la majorité des voix de tous les copropriétaires, elle aurait dû enregistrer 5001/10000 tantièmes

Que tel n'est pas le cas, la majorité des voix de tous les copropriétaires s'élevant à 4743

Qu'il convient au vu de l'ensemble de ces éléments de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a prononcé l'annulation de la résolution n°28 de l'assemblée générale des copropriétaires du 10 décembre 2020 pour une erreur de majorité ;

Attendu que le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] » soutient qu'en tout état de cause l'autorisation de travaux, objet de la résolution n°28 de l'assemblée générale du 10 décembre 2020, a été à nouveau accordée dans le cadre de la résolution n°17 de l'assemblée générale du 30 novembre 2021, ajoutant que deux nouvelles résolutions autorisant les travaux ( la résolution n°22 et la résolution n°23) ont été votées lors de l'assemblée générale des copropriétaires du 14 décembre 2022 à la majorité de l'article 25 puis de l'article 25-1 de sorte qu'il a plus aucune contestation possible de la part de Madame [B].

Qu'il convient toutefois d'observer que les résolutions n°17 et n°18 de l'assemblée générale du 30 novembre 2021 ont été annulées par jugement du 26 janvier 2024 du tribunal judiciaire de Grasse, ce dernier ayant également au terme d'un jugement rendu le 27 août 2024 prononcé l'annulation des résolutions n°22 et n°23 de l'assemblée générale des copropriétaires de la résidence « [Adresse 6] » en date du 14 décembre 2022.

Que dés lors ce moyen ne saurait valablement prospérer.

3°) Sur la demande en dommages et intérêts du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] »

Attendu que le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] » demande à la cour de condamner Madame [B] à lui payer la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts au motif que cette dernière fait preuve de la plus parfaite mauvaise foi et obère la trésorerie de la copropriété par son acharnement procédural,

Attendu que l'exercice d'une action en justice constitue par principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à des dommages et intérêts qu'en cas de faute susceptible d'engager la responsabilité civile de son auteur.

Que l'appréciation erronée qu'une partie peut faire de ses droits n'est pas en elle-même constitutive d'un abus et l'action en justice ne dégénère en abus que s'il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi.

Qu'en l'espèce, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] sera débouté de sa demande à ce titre, à défaut de rapporter la preuve d'une quelconque faute de la part de Madame [B] qui avait intérêt à ester en justice puisqu'il a été fait droit à ses demandes à plusieurs reprises

Qu'il convient par conséquent de confirmer le jugement déféré sur ce point.

4° ) Sur les dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Attendu que l'article 696 alinéa 1 du code de procédure civile dispose que 'la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.'

Qu'il convient de confirmer le jugement déféré sur ce point et de condamner le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] au paiement des entiers dépens en cause d'appel.

Attendu que l'article 700 du code de procédure civile prévoit que le tribunal condamne la partie tenue aux dépens à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens en tenant compte de l'équité et de la situation économique des parties.

Qu'il y a lieu de confirmer le jugement déféré sur ce point et de condamner le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] au paiement de la somme de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement du 29 avril 2022 du tribunal judiciaire de Grasse en toutes ses dispositions,

Y AJOUTANT,

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] à payer à Madame [B] la somme de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé « [Adresse 6] au paiement des entiers dépens en cause d'appel.

LA GRÉFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

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