CA Paris, Pôle 5 - ch. 3, 25 septembre 2025, n° 22/12272
PARIS
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRAN'AISE
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 3
ARRÊT DU 25 SEPTEMBRE 2025
(n° 157 /2025 , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 22/12272 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGCCQ
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 juin 2022- Tribunal judiciaire de Bobigny (chambre 5/section 2)- RG n° 22/00818
APPELANTE
S.A.R.L. RAINCY COIFFURE
Immatriculée au R.C.S. de [Localité 6] sous le n° 830 494 704
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Abdelhalim BEKEL, avocat au barreau de Seine-Saint-Denis, toque : BOB 10
INTIMÉE
S.A.R.L. SPI
Immatriculée au R.C.S. de [Localité 7] sous le n° 479 026 171
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Arnaud DUFFOUR, avocat au barreau de Paris, toque : P0043
Assistée de Me Joséphine ADDA, avocat au barreau de Paris
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 25 juin 2025, en audience publique, rapport ayant été fait par Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre, conformément aux articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre
Mme Stéphanie Dupont, conseillère
Mme Hélène Bussière, conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Sandrine Stassi-Buscqua
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre et par Mme Sandrine Stassi-Buscqua, greffière, présente lors de la mise à disposition.
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte sous seing privé en date du 30 janvier 2010, la société Saphimo, aux droits de laquelle vient la société Spi, a consenti à Monsieur [R], aux droits duquel vient la société Raincy Coiffure, un bail commercial portant sur un local situé [Adresse 3] à [Localité 8], pour une durée de 9 ans ayant commencée à courir le 9 février 2010 pour venir à échéance le 8 février 2019, moyennant le paiement d'un loyer annuel de 9.720 euros en principal hors taxes et hors charges, payable mensuellement et d'avance.
Par acte extrajudiciaire du 31 octobre 2019, la société Spi a notifié à la société Raincy Coiffure un congé à effet du 30 juin 2019, avec refus de renouvellement et offre de paiement d'une indemnité d'éviction.
Par acte du 12 décembre 2019, le bailleur a initié une action aux fins de voir fixer les indemnités d'éviction et d'occupation.
Par jugement mixte du 29 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Bobigny a :
- dit que le bail commercial consenti à la société Raincy Coiffure a pris fin le 30 juin 2019 ;
- fixé l'indemnité d'occupation annuelle hors taxes hors charges due par la société Raincy Coiffure à la société Spi à 10.895 euros à compter du 1er juillet 2019 et ce jusqu'à libération effective des lieux ;
- dit que la société Raincy Coiffure peut prétendre au paiement d'une indemnité d'éviction par la société Spi ;
- renvoyé les parties à l'expertise pour l'appréciation du montant de l'indemnité d'éviction.
M. [O] [G], désigné en qualité d'expert, a rendu son rapport en date du 16 août 2021.
Suivant jugement en date du 15 juin 2022, le tribunal judiciaire de Bobigny a :
- débouté la société Spi de ses demandes tendant à l'acquisition de la clause résolutoire ou à la résiliation judiciaire du bail conclu entre les parties ;
- prononcé la déchéance du droit à indemnité d'éviction de la société Raincy Coiffure ;
- ordonné l'expulsion de la société Raincy Coiffure ;
- rappelé la condamnation de la société Raincy Coiffure au paiement d'une indemnité d'occupation annuelle hors taxes hors charges fixée à 10.895 euros ;
- condamné la société Raincy Coiffure aux dépens, en ce compris les frais d'expertise (soit 3.935,16 euros) ;
- condamné la société Raincy Coiffure au paiement de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration en date du 2 juillet 2022, la société Raincy Coiffure a interjeté appel de ce jugement.
Le 4 août 2022 la société Raincy Coiffure a quitté les lieux et remis les clés du local à la société Spi.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 21 mai 2025.
MOYENS ET PRÉTENTIONS
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 5 octobre 2022, la société Raincy Coiffure, appelante, demande à la cour de :
- déclarer la société Raincy Coiffure recevable et bien fondée en son appel ;
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau :
- fixer à la somme de 56.000 euros l'indemnité d'éviction à la charge de la société Spi ;
- ordonner la compensation entre les créances réciproques des parties ;
- condamner la société Spi aux dépens ;
- condamner la société Spi à verser à la société Raincy Coiffure la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 22 décembre 2022, la société Spi, intimée, demande à la cour de :
- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a :
prononcé la déchéance du droit à indemnité d'éviction de la société Raincy Coiffure ;
ordonné l'expulsion de la société Raincy Coiffure dans les conditions fixées au dispositif de la décision ;
rappelé que la société Raincy Coiffure est redevable à l'égard de la société Spi d'une indemnité d'occupation annuelle hors taxes et hors charges due par la société Raincy Coiffure à la société Spi fixée à 10.895 euros à compter du 1er juillet 2019 et jusqu'à la libération effective des locaux ;
condamné la société Raincy Coiffure aux dépens, comprenant le coût de la mesure d'expertise judiciaire ordonnée par le jugement mixte du 29 septembre 2020 et taxé à un montant de 3.935,16 euros par ordonnance du juge taxateur du 15 novembre 2021 ;
condamné la société Raincy Coiffure à payer à la société Spi une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
ordonné l'exécution provisoire.
Partant,
- rejeter l'intégralité des demandes formées par la société Raincy Coiffure en cause d'appel ;
- condamner la société Raincy Coiffure au paiement de la somme de 6.135,64 euros au titre de l'indemnité d'occupation due à la société Spi jusqu'au 4 août 2022 ;
Par ailleurs,
- déclarer la société Spi recevable et bien fondée en son appel incident ;
- infirmer, le jugement dont appel en ce qu'il a débouté la société Spi de sa demande visant à voir constater l'acquisition de la clause résolutoire et à la résiliation judiciaire du bail ;
Et statuant de nouveau,
- constater l'acquisition de la clause résolutoire au 2 juillet 2020 consécutivement au commandement du 2 juin 2020 et, subsidiairement, au 26 mars 2021 en suite du commandement du 26 février 2021, plus subsidiairement, au 29 novembre 2021 en suite du commandement du 29 octobre 2021 ;
Subsidiairement,
- prononcer la résiliation judiciaire du bail bénéficiant à la société Raincy Coiffure ;
- ordonner l'expulsion de la société Raincy Coiffure des lieux loués, le cas échéant, avec le concours de la force publique ;
Plus subsidiairement,
- dire que l'indemnité d'éviction sollicitée par la société Raincy Coiffure n'est pas due ;
Très subsidiairement,
- dire que l'indemnité d'éviction se limitera à une indemnité dite de déplacement, valorisée à la somme de 10.000 euros ;
Le cas échéant,
- ordonner la compensation entre le montant de l'indemnité d'éviction et l'indemnité d'occupation dont la société Raincy Coiffure est débitrice à l'égard de la société Spi ;
Infiniment subsidiairement,
- dire que l'indemnité d'éviction de remplacement due à la société Raincy Coiffure sera limitée à 29.939 euros + 2.993 euros = 32.932 euros ;
Le cas échéant,
- ordonner la compensation entre le montant de l'indemnité d'éviction et l'indemnité d'occupation dont la société Raincy Coiffure est débitrice à l'égard de la société Spi ;
En tout état de cause,
- condamner la société Raincy Coiffure au paiement de la somme complémentaire de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société Raincy Coiffure en tous les dépens d'appel.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties.
MOTIFS DE L'ARRET
Sur la résiliation du bail
L'intimée reproche au premier juge d'avoir rejeté ses demandes d'acquisition de la clause résolutoire présente dans le bail et de résiliation judiciaire de ce dernier, comme étant sans objet, car postérieures au congé intervenu au 30 juin 2019. A l'appui de sa prétention, elle fait valoir que trois commandements visant la clause résolutoire avaient été signifiés à la société Raincy Coiffure, sans qu'ils ne soient jamais apurés dans le délai d'un mois imparti au locataire et qu'ainsi le bail s'était trouvé résilié un mois après le premier commandement datant du 2 juin 2020, soit le 2 juillet 2020. Subsidiairement, elle estime que le bail se serait trouvé résilié le 26 mars 2021 consécutivement au deuxième commandement de payer, signifié le 26 février 2021 et plus subsidiairement encore le 29 novembre 2021 consécutivement au troisième commandement de payer, signifié le 29 octobre 2021. Elle fait également valoir que la résiliation procédant du congé signifié par le bailleur serait une résiliation « en sursis », offrant au bailleur un droit de repentir et que dès lors, la mise en 'uvre de la clause résolutoire serait tout à fait possible malgré la délivrance d'un congé refus, dans la mesure où le preneur était défaillant dans le paiement de l'indemnité d'occupation. A titre subsidiaire, l'intimée estime que les défaillances répétées de la société Raincy Coiffure dans l'exécution de ses obligations justifieraient la résiliation judiciaire du bail. Il conviendrait en conséquence de réformer le jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes tendant à l'acquisition de la clause résolutoire et au prononcé de la résiliation judiciaire.
L'appelante soutient que les trois commandements de payer visaient la clause résolutoire stipulée dans le bail liant les parties, alors que ce bail était déjà résilié du fait du refus de renouvellement. Elle soutient en outre que la mise en 'uvre de la clause résolutoire suppose la réunion de deux conditions : une faute imputable au preneur et la bonne foi du bailleur. Que cette seconde condition ferait défaut, dans la mesure où le bailleur savait que l'appelante rencontrait des difficultés financières liées à la crise sanitaire et le confinement, qui auraient impacté sévèrement l'activité de son salon, lequel avait dû fermer, qu'un échéancier avait été sollicité par l'appelante et qu'à la veille du jugement, sa dette s'élevait à moins de cinq mois de loyers. Elle soutient de surcroît que la bailleresse aurait utilisé « l'arme des commandements de payer » à des fins détournées, pour faire échec à l'application de l'article L. 145-14 du code de commerce et la priver ainsi de son droit à indemnité d'éviction.
En l'espèce, le jugement mixte rendu le 29 septembre 2020 a fixé la fin du bail objet du présent litige au 30 juin 2019 suite au congé avec non renouvellement délivré par la bailleresse le 31 octobre 2019. Cette décision n'ayant fait l'objet d'aucune contestation de ce chef, elle se trouve revêtue de l'autorité de la chose jugée et est donc définitive, de l'aveu même de l'intimée, de sorte que c'est à juste titre que le premier juge a estimé que les demandes postérieures à cette décision, tendant à la constatation de l'acquisition de la clause résolutoire ou la résiliation judiciaire, sont sans objet et doivent être rejetées, le bail étant définitivement résilié depuis le 30 juin 2019, ainsi que le relève justement l'appelante.
Par conséquent, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société Spi de ses demandes tendant à voir résilié le bail conclu entre les parties.
Sur le droit à indemnité d'éviction
Selon l'article L. 145-14 du code de commerce, le bailleur peut refuser le renouvellement du bail, toutefois il doit, sauf exceptions prévues aux articles L. 145-17 et suivants du même code, payer au locataire évincé une indemnité dite d'éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement.
Aux termes de l'article L. 145-17 I, 1° du code précité, le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu du paiement d'aucune indemnité s'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du locataire sortant. Toutefois, s'il s'agit soit de l'inexécution d'une obligation, soit de la cessation sans raison sérieuse et légitime de l'exploitation du fonds, compte-tenu des dispositions de l'article L. 145-8, l'infraction commise par le preneur ne peut être invoquée que si elle s'est poursuivie ou renouvelée plus d'un mois après une mise en demeure du bailleur d'avoir à la faire cesser. Cette mise en demeure doit, à peine de nullité, être effectuée par acte extrajudiciaire, préciser le motif invoqué et reproduire les termes du présent alinéa.
Pour échapper au paiement de l'indemnité d'éviction, le bailleur doit donc justifier à l'encontre du preneur de l'existence d'un ou plusieurs motifs légitimes, notamment des manquements contractuels, et prouver outre l'existence de ce motif légitime, sa gravité et sa persistance.
Si le principe veut que le bailleur ne puisse invoquer que des motifs antérieurs au congé comportant refus de renouvellement et donc invoqués dans ce dernier, il est admis par exception que les infractions commises par le preneur au cours de la procédure peuvent constituer une cause de dénégation du droit à indemnité d'éviction après coup. Ainsi est-il admis que le droit au maintien dans les lieux s'opérant selon l'article L. 145-28 du code de commerce aux clauses et conditions du bail expiré, le preneur reste tenu jusqu'à son départ des lieux, de régler le loyer transformé en indemnité d'occupation, dont l'absence de paiement est susceptible de caractériser une faute constitutive d'un motif grave et légitime de déchéance du droit au paiement d'une indemnité d'éviction.
Il sera en outre précisé que le commandement tendant à mettre en 'uvre la clause résolutoire et la mise en demeure prévue par l'article L. 145-17.
L'appelante fait valoir que le jugement déféré serait entaché d'une erreur de droit en ce qu'il s'appuie sur l'article L. 145-28 du code de commerce au lieu de l'article L. 145-17, lequel exige une faute grave et légitime du locataire pour le déchoir de son droit à indemnité d'éviction, ainsi qu'une erreur manifeste d'appréciation en jugeant qu'il y avait déchéance du droit à indemnité d'éviction sans examiner le contexte économique entourant le litige et en l'absence de bonne foi de la bailleresse. L'appelante estime que le jugement ne caractériserait pas de faute grave et légitime de sa part et devrait ainsi être infirmé.
L'intimée estime que si le juge n'a pas expressément visé l'article L. 145-17 du code de commerce, il l'a implicitement évoqué pour motiver sa décision, de sorte que cette dernière ne saurait donc être reformée sur ce fondement. Sur la prétendue mauvaise application du droit et sur la bonne foi du bailleur, le jugement du 29 septembre 2020, devenu définitif, a statué sur l'indemnité d'occupation due par le preneur, mais aucun règlement n'est intervenu sur plusieurs périodes. L'intimée fait valoir qu'elle a donc délivré trois commandements de payer espacés, après la reprise d'activité de l'appelante et hors périodes de confinement et qu'aucun motif ne pouvait justifier le défaut de paiement des échéances, de sorte que ces manquements constituaient des motifs graves et légitimes de déchéance du droit au paiement de l'indemnité d'éviction, d'autant que les commandements étaient valides, notamment en ce qu'ils visaient expressément les dispositions de l'article L. 145-17 et leur signification ne permettait pas de caractériser sa mauvaise foi. L'intimée estime également que juge de fond n'avait pas à se prononcer sur sa bonne foi puisque cet argument n'était en réalité soulevé que dans le cadre de la mise en 'uvre de la clause résolutoire, non dans le cadre de la déchéance du droit à indemnité d'éviction, de sorte qu'il conviendrait de confirmer la décision du premier juge sur ce point.
En l'espèce, il ressort des pièces versées aux débats par l'intimée, que la société Raincy Coiffure s'est régulièrement dispensée du paiement de l'indemnité d'occupation mise définitivement à sa charge par le jugement précité du 29 septembre 2020, la bailleresse lui ayant signifié par actes extrajudiciaires trois commandements de payer les échéances dues, en dates respectives du 2 juin 2020, 26 février et 29 octobre 2021, étant précisé que lesdits commandements, en plus de lui accorder le délai d'un mois pour s'exécuter et reproduire entièrement l'article L. 145-17 I du code de commerce, comme l'exige ce dernier article, contenaient des décomptes suffisamment précis pour permettre à la preneuse de connaître le détail et la nature des sommes réclamées, qu'elle ne conteste au demeurant pas.
Il sera également ajouté que la preneuse ne conteste pas non plus, en cause d'appel, ne pas s'être acquittée des montants réclamés au titre des trois commandements de payer dans le délai d'un mois accordé, étant précisé qu'il est inopérant de sa part de soulever la mauvaise foi de la bailleresse pour échapper à la déchéance de son droit à indemnité d'éviction, dont la preuve n'est au demeurant pas rapportée.
Par conséquent, il y a lieu de considérer que le formalisme prévu à l'article L. 145-17 I, 1° du code de commerce a été respecté et que les manquements répétés de la preneuse à l'obligation de payer l'indemnité d'occupation mise à sa charge par le jugement mixte du 29 septembre 2019 constituent des motifs graves, légitimes et persistants, pour ne pas avoir été régularisés dans le délai d'un mois suivant les commandements, justifiant la déchéance de son droit à indemnité d'éviction, de sorte que le jugement déféré sera confirmé de ce chef.
Dès lors, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de compensation ni sur le quantum de l'indemnité d'éviction.
Sur la somme réclamée au titre de l'indemnité d'occupation
En vertu du jugement de première instance, le chef du jugement relatif à l'indemnité d'occupation n'étant pas soumis à la cour, il est rappelé que la société Raincy Coiffure est redevable vis-à-vis de la société Spi d'une indemnité d'occupation annuelle hors charges et hors taxes de 10.895 euros à compter du 1er juillet 2019 jusqu'à complète libération des lieux, soit jusqu'au 4 août 2022.
La société Raincy Coiffure sera condamnée à payer à la société Spi la somme de 6.135 euros au titre des indemnité d'occupation et charges échues au 4 août 2022, dont elle justifie par la production d'un relevé de compte en date du 5 septembre 2022, non contesté par l'appelante.
Sur les demandes accessoires
Le jugement attaqué sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance.
L'appelante succombant en appel, l'équité commande de la débouter de ses demandes relatives aux frais de l'article 700 du code de procédure civile et de laisser à sa charge les dépens d'appel.
Elle sera condamnée à payer la société Spi la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement rendu le 15 juin 2022 par le tribunal judiciaire de Bobigny (RG N°22/00818) en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute la SARL le Raincy Coiffure de sa demande en paiement d'une indemnité d'éviction ;
Condamne la SARL le Raincy Coiffure, à payer la somme de 6.135 euros au titre de l'indemnité d'occupation due à la société Spi jusqu'au 4 août 2022 selon décompte arrêté au 5 septembre 2022 ;
Condamne la société le Raincy Coiffure, à payer à la société Spi la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la société le Raincy Coiffure de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société Raincy Coiffure aux dépens de la procédure d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La greffière, La présidente,
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 3
ARRÊT DU 25 SEPTEMBRE 2025
(n° 157 /2025 , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 22/12272 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGCCQ
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 juin 2022- Tribunal judiciaire de Bobigny (chambre 5/section 2)- RG n° 22/00818
APPELANTE
S.A.R.L. RAINCY COIFFURE
Immatriculée au R.C.S. de [Localité 6] sous le n° 830 494 704
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Abdelhalim BEKEL, avocat au barreau de Seine-Saint-Denis, toque : BOB 10
INTIMÉE
S.A.R.L. SPI
Immatriculée au R.C.S. de [Localité 7] sous le n° 479 026 171
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Arnaud DUFFOUR, avocat au barreau de Paris, toque : P0043
Assistée de Me Joséphine ADDA, avocat au barreau de Paris
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 25 juin 2025, en audience publique, rapport ayant été fait par Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre, conformément aux articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre
Mme Stéphanie Dupont, conseillère
Mme Hélène Bussière, conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Sandrine Stassi-Buscqua
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre et par Mme Sandrine Stassi-Buscqua, greffière, présente lors de la mise à disposition.
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte sous seing privé en date du 30 janvier 2010, la société Saphimo, aux droits de laquelle vient la société Spi, a consenti à Monsieur [R], aux droits duquel vient la société Raincy Coiffure, un bail commercial portant sur un local situé [Adresse 3] à [Localité 8], pour une durée de 9 ans ayant commencée à courir le 9 février 2010 pour venir à échéance le 8 février 2019, moyennant le paiement d'un loyer annuel de 9.720 euros en principal hors taxes et hors charges, payable mensuellement et d'avance.
Par acte extrajudiciaire du 31 octobre 2019, la société Spi a notifié à la société Raincy Coiffure un congé à effet du 30 juin 2019, avec refus de renouvellement et offre de paiement d'une indemnité d'éviction.
Par acte du 12 décembre 2019, le bailleur a initié une action aux fins de voir fixer les indemnités d'éviction et d'occupation.
Par jugement mixte du 29 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Bobigny a :
- dit que le bail commercial consenti à la société Raincy Coiffure a pris fin le 30 juin 2019 ;
- fixé l'indemnité d'occupation annuelle hors taxes hors charges due par la société Raincy Coiffure à la société Spi à 10.895 euros à compter du 1er juillet 2019 et ce jusqu'à libération effective des lieux ;
- dit que la société Raincy Coiffure peut prétendre au paiement d'une indemnité d'éviction par la société Spi ;
- renvoyé les parties à l'expertise pour l'appréciation du montant de l'indemnité d'éviction.
M. [O] [G], désigné en qualité d'expert, a rendu son rapport en date du 16 août 2021.
Suivant jugement en date du 15 juin 2022, le tribunal judiciaire de Bobigny a :
- débouté la société Spi de ses demandes tendant à l'acquisition de la clause résolutoire ou à la résiliation judiciaire du bail conclu entre les parties ;
- prononcé la déchéance du droit à indemnité d'éviction de la société Raincy Coiffure ;
- ordonné l'expulsion de la société Raincy Coiffure ;
- rappelé la condamnation de la société Raincy Coiffure au paiement d'une indemnité d'occupation annuelle hors taxes hors charges fixée à 10.895 euros ;
- condamné la société Raincy Coiffure aux dépens, en ce compris les frais d'expertise (soit 3.935,16 euros) ;
- condamné la société Raincy Coiffure au paiement de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration en date du 2 juillet 2022, la société Raincy Coiffure a interjeté appel de ce jugement.
Le 4 août 2022 la société Raincy Coiffure a quitté les lieux et remis les clés du local à la société Spi.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 21 mai 2025.
MOYENS ET PRÉTENTIONS
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 5 octobre 2022, la société Raincy Coiffure, appelante, demande à la cour de :
- déclarer la société Raincy Coiffure recevable et bien fondée en son appel ;
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau :
- fixer à la somme de 56.000 euros l'indemnité d'éviction à la charge de la société Spi ;
- ordonner la compensation entre les créances réciproques des parties ;
- condamner la société Spi aux dépens ;
- condamner la société Spi à verser à la société Raincy Coiffure la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 22 décembre 2022, la société Spi, intimée, demande à la cour de :
- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a :
prononcé la déchéance du droit à indemnité d'éviction de la société Raincy Coiffure ;
ordonné l'expulsion de la société Raincy Coiffure dans les conditions fixées au dispositif de la décision ;
rappelé que la société Raincy Coiffure est redevable à l'égard de la société Spi d'une indemnité d'occupation annuelle hors taxes et hors charges due par la société Raincy Coiffure à la société Spi fixée à 10.895 euros à compter du 1er juillet 2019 et jusqu'à la libération effective des locaux ;
condamné la société Raincy Coiffure aux dépens, comprenant le coût de la mesure d'expertise judiciaire ordonnée par le jugement mixte du 29 septembre 2020 et taxé à un montant de 3.935,16 euros par ordonnance du juge taxateur du 15 novembre 2021 ;
condamné la société Raincy Coiffure à payer à la société Spi une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
ordonné l'exécution provisoire.
Partant,
- rejeter l'intégralité des demandes formées par la société Raincy Coiffure en cause d'appel ;
- condamner la société Raincy Coiffure au paiement de la somme de 6.135,64 euros au titre de l'indemnité d'occupation due à la société Spi jusqu'au 4 août 2022 ;
Par ailleurs,
- déclarer la société Spi recevable et bien fondée en son appel incident ;
- infirmer, le jugement dont appel en ce qu'il a débouté la société Spi de sa demande visant à voir constater l'acquisition de la clause résolutoire et à la résiliation judiciaire du bail ;
Et statuant de nouveau,
- constater l'acquisition de la clause résolutoire au 2 juillet 2020 consécutivement au commandement du 2 juin 2020 et, subsidiairement, au 26 mars 2021 en suite du commandement du 26 février 2021, plus subsidiairement, au 29 novembre 2021 en suite du commandement du 29 octobre 2021 ;
Subsidiairement,
- prononcer la résiliation judiciaire du bail bénéficiant à la société Raincy Coiffure ;
- ordonner l'expulsion de la société Raincy Coiffure des lieux loués, le cas échéant, avec le concours de la force publique ;
Plus subsidiairement,
- dire que l'indemnité d'éviction sollicitée par la société Raincy Coiffure n'est pas due ;
Très subsidiairement,
- dire que l'indemnité d'éviction se limitera à une indemnité dite de déplacement, valorisée à la somme de 10.000 euros ;
Le cas échéant,
- ordonner la compensation entre le montant de l'indemnité d'éviction et l'indemnité d'occupation dont la société Raincy Coiffure est débitrice à l'égard de la société Spi ;
Infiniment subsidiairement,
- dire que l'indemnité d'éviction de remplacement due à la société Raincy Coiffure sera limitée à 29.939 euros + 2.993 euros = 32.932 euros ;
Le cas échéant,
- ordonner la compensation entre le montant de l'indemnité d'éviction et l'indemnité d'occupation dont la société Raincy Coiffure est débitrice à l'égard de la société Spi ;
En tout état de cause,
- condamner la société Raincy Coiffure au paiement de la somme complémentaire de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société Raincy Coiffure en tous les dépens d'appel.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties.
MOTIFS DE L'ARRET
Sur la résiliation du bail
L'intimée reproche au premier juge d'avoir rejeté ses demandes d'acquisition de la clause résolutoire présente dans le bail et de résiliation judiciaire de ce dernier, comme étant sans objet, car postérieures au congé intervenu au 30 juin 2019. A l'appui de sa prétention, elle fait valoir que trois commandements visant la clause résolutoire avaient été signifiés à la société Raincy Coiffure, sans qu'ils ne soient jamais apurés dans le délai d'un mois imparti au locataire et qu'ainsi le bail s'était trouvé résilié un mois après le premier commandement datant du 2 juin 2020, soit le 2 juillet 2020. Subsidiairement, elle estime que le bail se serait trouvé résilié le 26 mars 2021 consécutivement au deuxième commandement de payer, signifié le 26 février 2021 et plus subsidiairement encore le 29 novembre 2021 consécutivement au troisième commandement de payer, signifié le 29 octobre 2021. Elle fait également valoir que la résiliation procédant du congé signifié par le bailleur serait une résiliation « en sursis », offrant au bailleur un droit de repentir et que dès lors, la mise en 'uvre de la clause résolutoire serait tout à fait possible malgré la délivrance d'un congé refus, dans la mesure où le preneur était défaillant dans le paiement de l'indemnité d'occupation. A titre subsidiaire, l'intimée estime que les défaillances répétées de la société Raincy Coiffure dans l'exécution de ses obligations justifieraient la résiliation judiciaire du bail. Il conviendrait en conséquence de réformer le jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes tendant à l'acquisition de la clause résolutoire et au prononcé de la résiliation judiciaire.
L'appelante soutient que les trois commandements de payer visaient la clause résolutoire stipulée dans le bail liant les parties, alors que ce bail était déjà résilié du fait du refus de renouvellement. Elle soutient en outre que la mise en 'uvre de la clause résolutoire suppose la réunion de deux conditions : une faute imputable au preneur et la bonne foi du bailleur. Que cette seconde condition ferait défaut, dans la mesure où le bailleur savait que l'appelante rencontrait des difficultés financières liées à la crise sanitaire et le confinement, qui auraient impacté sévèrement l'activité de son salon, lequel avait dû fermer, qu'un échéancier avait été sollicité par l'appelante et qu'à la veille du jugement, sa dette s'élevait à moins de cinq mois de loyers. Elle soutient de surcroît que la bailleresse aurait utilisé « l'arme des commandements de payer » à des fins détournées, pour faire échec à l'application de l'article L. 145-14 du code de commerce et la priver ainsi de son droit à indemnité d'éviction.
En l'espèce, le jugement mixte rendu le 29 septembre 2020 a fixé la fin du bail objet du présent litige au 30 juin 2019 suite au congé avec non renouvellement délivré par la bailleresse le 31 octobre 2019. Cette décision n'ayant fait l'objet d'aucune contestation de ce chef, elle se trouve revêtue de l'autorité de la chose jugée et est donc définitive, de l'aveu même de l'intimée, de sorte que c'est à juste titre que le premier juge a estimé que les demandes postérieures à cette décision, tendant à la constatation de l'acquisition de la clause résolutoire ou la résiliation judiciaire, sont sans objet et doivent être rejetées, le bail étant définitivement résilié depuis le 30 juin 2019, ainsi que le relève justement l'appelante.
Par conséquent, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société Spi de ses demandes tendant à voir résilié le bail conclu entre les parties.
Sur le droit à indemnité d'éviction
Selon l'article L. 145-14 du code de commerce, le bailleur peut refuser le renouvellement du bail, toutefois il doit, sauf exceptions prévues aux articles L. 145-17 et suivants du même code, payer au locataire évincé une indemnité dite d'éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement.
Aux termes de l'article L. 145-17 I, 1° du code précité, le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu du paiement d'aucune indemnité s'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du locataire sortant. Toutefois, s'il s'agit soit de l'inexécution d'une obligation, soit de la cessation sans raison sérieuse et légitime de l'exploitation du fonds, compte-tenu des dispositions de l'article L. 145-8, l'infraction commise par le preneur ne peut être invoquée que si elle s'est poursuivie ou renouvelée plus d'un mois après une mise en demeure du bailleur d'avoir à la faire cesser. Cette mise en demeure doit, à peine de nullité, être effectuée par acte extrajudiciaire, préciser le motif invoqué et reproduire les termes du présent alinéa.
Pour échapper au paiement de l'indemnité d'éviction, le bailleur doit donc justifier à l'encontre du preneur de l'existence d'un ou plusieurs motifs légitimes, notamment des manquements contractuels, et prouver outre l'existence de ce motif légitime, sa gravité et sa persistance.
Si le principe veut que le bailleur ne puisse invoquer que des motifs antérieurs au congé comportant refus de renouvellement et donc invoqués dans ce dernier, il est admis par exception que les infractions commises par le preneur au cours de la procédure peuvent constituer une cause de dénégation du droit à indemnité d'éviction après coup. Ainsi est-il admis que le droit au maintien dans les lieux s'opérant selon l'article L. 145-28 du code de commerce aux clauses et conditions du bail expiré, le preneur reste tenu jusqu'à son départ des lieux, de régler le loyer transformé en indemnité d'occupation, dont l'absence de paiement est susceptible de caractériser une faute constitutive d'un motif grave et légitime de déchéance du droit au paiement d'une indemnité d'éviction.
Il sera en outre précisé que le commandement tendant à mettre en 'uvre la clause résolutoire et la mise en demeure prévue par l'article L. 145-17.
L'appelante fait valoir que le jugement déféré serait entaché d'une erreur de droit en ce qu'il s'appuie sur l'article L. 145-28 du code de commerce au lieu de l'article L. 145-17, lequel exige une faute grave et légitime du locataire pour le déchoir de son droit à indemnité d'éviction, ainsi qu'une erreur manifeste d'appréciation en jugeant qu'il y avait déchéance du droit à indemnité d'éviction sans examiner le contexte économique entourant le litige et en l'absence de bonne foi de la bailleresse. L'appelante estime que le jugement ne caractériserait pas de faute grave et légitime de sa part et devrait ainsi être infirmé.
L'intimée estime que si le juge n'a pas expressément visé l'article L. 145-17 du code de commerce, il l'a implicitement évoqué pour motiver sa décision, de sorte que cette dernière ne saurait donc être reformée sur ce fondement. Sur la prétendue mauvaise application du droit et sur la bonne foi du bailleur, le jugement du 29 septembre 2020, devenu définitif, a statué sur l'indemnité d'occupation due par le preneur, mais aucun règlement n'est intervenu sur plusieurs périodes. L'intimée fait valoir qu'elle a donc délivré trois commandements de payer espacés, après la reprise d'activité de l'appelante et hors périodes de confinement et qu'aucun motif ne pouvait justifier le défaut de paiement des échéances, de sorte que ces manquements constituaient des motifs graves et légitimes de déchéance du droit au paiement de l'indemnité d'éviction, d'autant que les commandements étaient valides, notamment en ce qu'ils visaient expressément les dispositions de l'article L. 145-17 et leur signification ne permettait pas de caractériser sa mauvaise foi. L'intimée estime également que juge de fond n'avait pas à se prononcer sur sa bonne foi puisque cet argument n'était en réalité soulevé que dans le cadre de la mise en 'uvre de la clause résolutoire, non dans le cadre de la déchéance du droit à indemnité d'éviction, de sorte qu'il conviendrait de confirmer la décision du premier juge sur ce point.
En l'espèce, il ressort des pièces versées aux débats par l'intimée, que la société Raincy Coiffure s'est régulièrement dispensée du paiement de l'indemnité d'occupation mise définitivement à sa charge par le jugement précité du 29 septembre 2020, la bailleresse lui ayant signifié par actes extrajudiciaires trois commandements de payer les échéances dues, en dates respectives du 2 juin 2020, 26 février et 29 octobre 2021, étant précisé que lesdits commandements, en plus de lui accorder le délai d'un mois pour s'exécuter et reproduire entièrement l'article L. 145-17 I du code de commerce, comme l'exige ce dernier article, contenaient des décomptes suffisamment précis pour permettre à la preneuse de connaître le détail et la nature des sommes réclamées, qu'elle ne conteste au demeurant pas.
Il sera également ajouté que la preneuse ne conteste pas non plus, en cause d'appel, ne pas s'être acquittée des montants réclamés au titre des trois commandements de payer dans le délai d'un mois accordé, étant précisé qu'il est inopérant de sa part de soulever la mauvaise foi de la bailleresse pour échapper à la déchéance de son droit à indemnité d'éviction, dont la preuve n'est au demeurant pas rapportée.
Par conséquent, il y a lieu de considérer que le formalisme prévu à l'article L. 145-17 I, 1° du code de commerce a été respecté et que les manquements répétés de la preneuse à l'obligation de payer l'indemnité d'occupation mise à sa charge par le jugement mixte du 29 septembre 2019 constituent des motifs graves, légitimes et persistants, pour ne pas avoir été régularisés dans le délai d'un mois suivant les commandements, justifiant la déchéance de son droit à indemnité d'éviction, de sorte que le jugement déféré sera confirmé de ce chef.
Dès lors, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de compensation ni sur le quantum de l'indemnité d'éviction.
Sur la somme réclamée au titre de l'indemnité d'occupation
En vertu du jugement de première instance, le chef du jugement relatif à l'indemnité d'occupation n'étant pas soumis à la cour, il est rappelé que la société Raincy Coiffure est redevable vis-à-vis de la société Spi d'une indemnité d'occupation annuelle hors charges et hors taxes de 10.895 euros à compter du 1er juillet 2019 jusqu'à complète libération des lieux, soit jusqu'au 4 août 2022.
La société Raincy Coiffure sera condamnée à payer à la société Spi la somme de 6.135 euros au titre des indemnité d'occupation et charges échues au 4 août 2022, dont elle justifie par la production d'un relevé de compte en date du 5 septembre 2022, non contesté par l'appelante.
Sur les demandes accessoires
Le jugement attaqué sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance.
L'appelante succombant en appel, l'équité commande de la débouter de ses demandes relatives aux frais de l'article 700 du code de procédure civile et de laisser à sa charge les dépens d'appel.
Elle sera condamnée à payer la société Spi la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement rendu le 15 juin 2022 par le tribunal judiciaire de Bobigny (RG N°22/00818) en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute la SARL le Raincy Coiffure de sa demande en paiement d'une indemnité d'éviction ;
Condamne la SARL le Raincy Coiffure, à payer la somme de 6.135 euros au titre de l'indemnité d'occupation due à la société Spi jusqu'au 4 août 2022 selon décompte arrêté au 5 septembre 2022 ;
Condamne la société le Raincy Coiffure, à payer à la société Spi la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la société le Raincy Coiffure de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société Raincy Coiffure aux dépens de la procédure d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La greffière, La présidente,