Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 1 - ch. 8, 26 septembre 2025, n° 24/19868

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 24/19868

26 septembre 2025

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 8

ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2025

(n° ,5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/19868 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CKN2N

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 30 Août 2024 -Président du TJ de [Localité 8] - RG n° 24/00775

APPELANTS

M. [H] [G]

[Adresse 5]

[Localité 7]

S.A.S. MARTIGNY AUTOMOBILE, RCS de [Localité 8] sous le n°893 857 888, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentés par Me François MEUNIER, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque :R022

INTIMÉE

S.C.I. AGMA, RCS de [Localité 9] sous le n°428 421 408, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 6]

Défaillante - Signification de la déclaration d'appel le 20 février 2025 - à l'Etude

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 juillet 2025, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Marie-Catherine GAFFINEL, Conseiller, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Florence LAGEMI, Président,

Marie-Catherine GAFFINEL, Conseiller,

Patrick BIROLLEAU, Magistrat honoraire,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Lydia BEZZOU

ARRÊT :

- Par défaut

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Florence LAGEMI, Président de chambre et par Catherine CHARLES, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

Par acte non daté prenant effet à compter du 1er janvier 2021, la SCI Agma a donné à bail commercial à M. [G] des locaux situés [Adresse 3] et/ou [Adresse 4], moyennant un loyer annuel de 14.400 euros, hors charges et hors taxes, payable mensuellement et d'avance.

Par un avenant du 17 décembre 2020, la société Martigny Automobile est devenue preneuse à bail aux cotés de M. [G].

Des loyers étant demeurés impayés, la SCI Agma a fait délivrer à la société Martigny Automobile et à M. [G], le 20 mars 2024, un commandement de payer visant la clause résolutoire pour la somme de 6.366,72 euros au titre de l'arriéré locatif dû au 1er mars 2024.

Par acte du 22 mai 2024, la SCI Agma a assigné, devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Créteil, la société Martigny Automobile et M. [G] aux fins, notamment, de constatation de l'acquisition de la clause résolutoire et condamnation solidaire des défendeurs au paiement, par provision, de l'arriéré locatif et d'une indemnité d'occupation.

Par ordonnance réputée contradictoire du 30 août 2024, le premier juge a :

- constaté l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 21 avril 2024 ;

- ordonné l'expulsion de la société Martigny Automobile, de M. [G] et de tout occupant de leur chef des lieux situés à [Adresse 3] et/ou [Adresse 4] avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d'un serrurier ;

- dit en cas de besoin que les meubles se trouvant dans les lieux seront remis, aux frais des personnes expulsées, dans un lieu désigné par elles et qu'à défaut ils seront laissés sur place ou dans un autre lieu approprié et décrits avec précision par l'huissier chargé de l'exécution, avec sommation aux personnes expulsées d'avoir à les retirer dans un délai fixé par voie réglementaire à l'expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques ce conformément à ce que prévoient les dispositions du code des procédures civiles d'exécution sur ce point ;

- dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte ;

- fixé à titre provisionnel l'indemnité d'occupation due par la société Martigny Automobile et M. [G], à compter de la résiliation du bail et jusqu'à la libération effective des lieux, à une somme égale au montant du loyer contractuel, outre les taxes, charges et accessoires et condamné la société Martigny Automobile et M. [G] à la payer ;

- condamné solidairement, par provision, la société Martigny Automobile et M. [G] à payer à la SCI Agma la somme de 4.775,04 euros au titre du solde des loyers, charges, accessoires et indemnités d'occupation arriérés au 24 juin 2024, avec intérêts au taux légal à compter du 20 mars 2024, ainsi que les indemnités d'occupation postérieures ;

- dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes formées au titre de la clause pénale et du dépôt de garantie ;

- condamné solidairement la société Martigny Automobile et M. [G] aux dépens, en ce compris le coût du commandement ;

- condamné solidairement la société Martigny Automobile et M. [G] à payer à la SCI Agma la somme de 1.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 25 novembre 2024, la société Martigny Automobile et M. [G] ont relevé appel de cette décision en critiquant ses chefs de dispositif relatifs à l'acquisition de la clause résolutoire et ses conséquences et à la condamnation au paiement d'une provision, des dépens et d'une indemnité procédurale.

Dans leurs conclusions remises le 31 mars 2025 et signifiées le 30 avril 2025 à l'intimée, la société Martigny Automobile et M. [G] demandent à la cour de :

- les recevoir en leur appel et le déclarer bien fondé ;

- infirmer l'ordonnance entreprise et statuant à nouveau des chefs infirmés ;

- leur accorder un délai de paiement jusqu'au 30 mars 2025 pour s'acquitter de leur dette locative et suspendre les effets de la clause résolutoire pendant ce délai ;

- constater qu'ils se sont acquittés de leur dette locative pendant ce délai ;

- dire en conséquence que la clause résolutoire est réputée ne pas avoir joué ;

- condamner la SCI Agma à leur payer une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La SCI Agma à qui la déclaration d'appel a été signifiée le 20 février 2025 par acte remis à l'étude du commissaire de justice, n'a pas constitué avocat.

La clôture de la procédure a été prononcée le 11 juin 2025.

Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée ainsi qu'aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Sur les conditions d'acquisition de la clause résolutoire

Selon l'article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

Selon l'article 835 du même code, le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

En application de ces textes, il est possible, en référé, de constater la résiliation de plein droit d'un bail en application d'une clause résolutoire lorsque celle-ci est mise en oeuvre régulièrement et qu'il n'est pas opposé de contestation sérieuse susceptible d'y faire obstacle.

Selon l'article L. 145-41 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.

Au cas présent, la SCI Agma a fait délivrer aux appelants, le 20 mars 2024, un commandement, visant la clause résolutoire stipulée dans le bail, pour avoir paiement de la somme en principal de 6.366,72 euros correspondant aux loyers et provisions sur charges des mois d'août, novembre, décembre 2023, et mars 2024. Les appelants ne contestent pas que les causes de ce commandement n'ont pas été réglées dans le délai d'un mois qui leur était imparti de sorte qu'il convient de constater la réunion des conditions d'acquisition de la clause résolutoire à la date du 21 avril 2024.

Sur la demande de délais de paiement et de suspension des effets de la clause résolutoire

Selon l'article 1343-5, alinéa 1, du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années le paiement des sommes dues.

Les appelants, qui expliquent les difficultés de paiement rencontrées par le comportement du bailleur ayant loué à la même adresse d'autres locaux à une société concurrente, ce qui a, selon eux, créé une confusion auprès de la clientèle à l'origine d'une gêne dans le développement de leur activité, indiquent avoir réglé, le 5 mars 2025, la somme de 4.775,04 euros au titre de la provision mise à leur charge par le premier juge et avoir repris le paiement des loyers courants. Ils versent aux débats un échange de mails des 5 et 6 mars 2025 entre M. [G] et la société Aurajuris, commissaire de justice, le premier faisant état du dépôt par le preneur d'un chèque de 4.775,04 euros et de trois autres règlements de 1.591,68 euros en date des 20, 21 et 22 février 2025 effectués auprès du CIC, banque du bailleur, et le second, émanant du commissaire de justice, qui accuse réception du mail et du chèque remis par M. [G] et fait état de leur transmission à son mandant.

S'il est regrettable qu'il n'ait pas été versé aux débats un décompte locatif actualisé, il sera toutefois retenu que le bailleur, à qui les conclusions ont été régulièrement signifiées, n'a pas estimé utile de constituer avocat pour les contester, ce qui tend à établir que la dette locative ayant justifié le constat de l'acquisition de la clause résolutoire, a été réglée en mars 2025 de sorte qu'il convient, conformément à la demande des appelants, de considérer que ceux-ci se sont acquittés de leur dette en ce compris les causes du commandement de payer à la date du 30 mars 2025.

Saisie de l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel, la cour doit examiner la situation au jour où elle statue et peut accorder des délais de paiement rétroactifs et constater, le cas échéant, leur respect par le locataire.

Il résulte des éléments qui précèdent que le paiement de la dette locative et, notamment, des causes du commandement, est intervenu au plus tard le 30 mars 2025.

Il convient donc d'accorder aux appelants un délai de paiement rétroactif jusqu'au 30 mars 2025 et de constater que celui-ci ayant été respecté, la clause résolutoire est réputée n'avoir jamais joué.

Ainsi, l'ordonnance entreprise sera infirmée en ce qu'elle a constaté l'acquisition de la clause résolutoire, ordonné l'expulsion de la société Martigny automobile et de M. [G] et condamné ces derniers au paiement d'une indemnité d'occupation.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le sort des dépens de première instance et l'application de l'article 700 du code de procédure civile ont été exactement appréciés par le premier juge dès lors que la société Martigny automobile et M. [G] étaient débiteurs envers leur bailleur.

Pour le même motif, ces derniers supporteront les dépens d'appel. Aucune considération d'équité ne commande de les faire bénéficier des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de cour.

PAR CES MOTIFS

Statuant dans les limites de l'appel,

Confirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné solidairement la société Martigny Automobile et M. [G] à payer à la SCI Agma la somme provisionnelle de 4.775,04 euros au titre de la dette locative au 24 juin 2024 ;

L'infirme en ses autres dispositions dont il a été fait appel ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Constate que les conditions de l'acquisition de la clause résolutoire sont réunies à la date du 21 avril 2024 ;

Accorde à la société Martigny Automobile et M. [G] un délai expirant le 30 mars 2025 pour s'acquitter de la dette locative arrêtée par l'ordonnance entreprise et suspend les effets de la clause résolutoire pendant ce délai ;

Constate que la société Martigny Automobile et M. [G] se sont intégralement acquittés de leur dette dans ce délai ;

Dit en conséquence que la clause résolutoire est réputée n'avoir pas joué et rejette les demandes du bailleur tendant à l'expulsion des preneurs et au paiement d'une indemnité d'occupation provisionnelle ;

Condamne in solidum la société Martigny Automobile et M. [G] aux dépens d'appel ;

Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de cour.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

© LIVV - 2025

 

[email protected]

CGUCGVMentions légalesPlan du site