CA Aix-en-Provence, ch. 1-2, 25 septembre 2025, n° 24/12587
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-2
ARRÊT
DU 25 SEPTEMBRE 2025
N°2025/507
Rôle N° RG 24/12587 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BN2SX
EURL CORAIL MAINTENANCE
C/
SCI MATHIVA
Copie exécutoire délivrée le :
à :
Me Maud DAVAL-GUEDJ
Me Sandra JUSTON
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance de référé rendue par le TJ de [Localité 5] en date du 14 Octobre 2024 enregistrée au répertoire général sous le n° 24/01477.
APPELANTE
EURL CORAIL MAINTENANCE
dont le siège social est [Adresse 2]
représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Edouard SEKLY, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
INTIMEE
SCI MATHIVA
dont le siège social est sis [Adresse 3] et encore domicilié chez son mandataire la SARL FLEUROT IMMOBILIER sis [Adresse 4]
représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Dora MEESSEN, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Juin 2025 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Angélique NETO, Présidente, chargée du rapport, et M. Laurent DESGOUIS, Conseiller.
Mme Angélique NETO, Présidente, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Angélique NETO, Présidente
Mme Séverine MOGILKA, Conseillère
M. Laurent DESGOUIS, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Caroline VAN-HULST.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Septembre 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Septembre 2025,
Signé par Mme Angélique NETO, Présidente et Mme Caroline VAN-HULST, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte sous seing privé en date du 13 septembre 2018, la société civile immobilière (SCI) Mathiva a consenti à l'entreprise unipersonnelle responsabilité limitée (EURL) Corail Maintenance un bail professionnel portant sur des locaux situés [Adresse 1] à La Ciotat (13 600) moyennant un loyer mensuel de base de 950 euros hors taxes et une provision mensuelle sur charges de 50 euros.
Le 14 décembre 2023, la SCI Mathiva a donné congé à la société Corail Maintenance à effet au 30 septembre 2024.
Le 28 décembre 2023, la SCI Mathiva a fait délivrer à la société Corail maintenance un commandement de payer la somme principale de 5 763,96 euros au titre d'un arriéré locatif en visant la clause résolutoire.
Estimant que le commandement de payer est resté infructueux, la SCI Mathiva a, par exploit de commissaire de justice en date du 28 mars 2024, assigné la société Corail maintenance devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Marseille aux fins de voir constater la résiliation du bail, d'ordonner son expulsion et de la voir condamner à lui verser diverses sommes.
Par ordonnance du 14 octobre 2024, ce magistrat a :
- constaté la résiliation du bail commercial à effet au 29 janvier 2024 ;
- ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux dans le mois de la signification de l'ordonnance, l'expulsion de la société Corail maintenance des locaux ainsi que de tous occupants de biens de son chef avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d'un serrurier ;
- dit que les meubles et objets mobiliers se trouvant sur place donneraient lieu à l'application des dispositions des articles L 433-1 et R 433-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
- rejeté la demande de suspension des effets de la clause résolutoire formée par le preneur ;
- condamné la société Corail maintenance à payer à la SCI Mathiva une indemnité d'occupation mensuelle, à compter du 29 janvier 2024, d'un montant de 1 327,15 euros et jusqu'à la libération effective des lieux ;
- rejeté la demande de provision présentée par la SCI Mathiva ;
- condamné la société Corail maintenance à verser à la SCI Mathiva la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la société Corail maintenance aux dépens, comprenant le coût du commandement de payer du 28 décembre 2023.
Suivant déclaration transmise au greffe le 16 octobre 2024, la société Corail maintenance a interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions dûment reprises.
Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 27 mai 2025, auxquelles il convient de se référer pour un exposé plus ample des moyens et prétentions, la société Corail maintenance sollicite de la cour qu'elle infirme l'ordonnance entreprise et statuant à nouveau :
Avant le procès-verbal de reprise des lieux en date du 25 mars 2025,
- lui donne acte qu'elle était à jour de ses loyers avant l'ordonnance entreprise ;
- rejette la demande de résiliation du bail ;
- ordonne la suspension des effets de la clause résolutoire ;
- rejette la demande en paiement d'une indemnité d'occupation ;
- rejette la demande d'expulsion et le concours de la force publique et d'un serrurier ;
- lui accorde des délais de paiement rétroactifs et constate que les délais ont été respectés et que la clause résolutoire du bail n'a pas joué ;
- dise et juge que la résiliation du bail n'a pas été prononcée par une décision de justice ayant autorité de chose jugée ;
Après le procès-verbal de reprise des lieux en date du 25 mars 2025,
- rejette la demande d'astreinte de 100 euros par jour de retard compte tenu de son expulsion des lieux ;
- rejette la demande de condamnation à une indemnité de 1 327,15 euros par mois jusqu'à la libération effective des lieux dès lors qu'elle a remis spontanément les clés ;
- rejette la demande de paiement pour la période allant du 1er au 24 mars 2025 ;
- ordonne à l'intimée de lui restituer la caution de 2 634,30 euros ;
- condamne l'intimée à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
- condamne l'intimée à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- la condamne aux dépens, avec distraction au profit de la SCP Cohen-Guedj-Montero-Daval-Guedj, avocats, sur leur affirmation de droit.
Elle expose avoir rencontré des difficultés passagères pour régler ses échéances et que si, elle reconnaît de ne pas avoir réglé les causes du commandement de payer dans le délai d'un mois qui lui était imparti, elle a apuré sa dette au moment où le premier juge a statué, ce qui justifiait sa demande de délais de paiement avec suspension des effets de la clause rsolutoire voire sa demande de délais de paiement rétroactifs en application des articles L 145-41 du code de commerce et 1343-5 du code civil. Elle indique que, malgré cela, un commandement de quitter les lieux lui a été signifié en exécution de l'ordonnance entreprise, suite à quoi elle a quitté les lieux le 22 mars 2025, à la suite de quoi un procès-verbal de reprise sera dressé le 25 mars 2025. Elle relève que le logement a été rendu en bon état, de sorte que l'intimée doit lui restituer le montant de la caution.
Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 30 mai 2025, auxquelles il convient de se référer pour un exposé plus ample des moyens et prétentions, la SCI Mathiva sollicite de la cour qu'elle :
à titre principal,
- confirme l'ordonnance entreprise ;
- déboute l'appelante de ses demandes ;
- statuant à nouveau,
- condamne l'appelante à lui verser la somme de 1 088,70 euros au titre du solde de l'indemnité d'occupation de mars 2025 ;
- la condamne à lui verser la somme de 1 137,46 euros au titre des frais de procédure pour la résiliation du bail et la reprise du local litigieux ;
à titre subsidiaire, dans le cas où l'ordonnance entreprise serait infirmée,
- dise et juge que le congé en résiliation du bail professionnel délivré le 14 décembre 2023 est valable et qu'il doit s'appliquer ;
- déboute l'appelante de ses demandes ;
- prononce la résiliation du bail professionnel à son terme au 30 septembre 2024 ;
- constate que l'appelante est occupante sans droit ni titre depuis le 1er octobre 2024 ;
- constate son départ des lieux depuis le 24 mars 2025 ;
- la condamne à lui verser la somme de 1 276,16 euros au titre du solde de l'indemnité d'occupation de mars 2025 et aux frais de procédure, déduction faite du dépôt de gerantie de 950 euros ;
en tout état de cause,
- condamne l'appelante à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Elle insiste sur le fait que le bail en question est un bail professionnel et non un bail commercial, de sorte que l'article L 145-41 du code de commerce est inapplicable. Elle relève que les causes du commandement de payer n'ont été réglées que quelques jours avant l'audience. En tout état de cause, elle souligne que le bail est arrivé à expiration le 30 septembre 2024 suite au congé qui a été délivré. Elle expose avoir repris les lieux le 24 mars 2025 en exécution de l'ordonnance entreprise, aucune suspension de l'exécution provisoire n'ayant été demandée, de sorte que les sommes sont dues jusqu'au 24 mars 2025 inclus, ce qui représente un solde de 1 088,70 euros pour la période allant du 1er au 24 mars 2025 inclus. En outre, elle relève que le dépôt de garantie est de 950 euros et non de 2 634,30 euros comme le soutient l'appelante, faisant observer que le bail stipule que cette somme restera acquise au bailleur en cas de résiliation judiciaire ou de plein droit du bail. Enfin, elle indique avoir exposé des frais lors de la procédure d'expulsion d'un montant de 1 137,46 euros dont elle sollicite le remboursement.
A titre subsidiaire, elle expose que le bail est arrivé à expiration le 30 septembre 2024 suite au congé qui a été délivré le 14 décembre 2023, faisant observer que sa validité n'est pas discutée. Elle indique donc que l'appelante est occupante sans droit ni titre depuis le 1er octobre 2024.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 2 juin 2025.
Par soit-transmis du 27 août 2025, la cour a indiqué aux parties qu'elle s'interrogeait sur l'irrecevabilité des demandes formées tant par la société Corail maintenance tendant à la condamnation de l'intimée à lui verser la somme de 2 634,30 euros au titre de la caution et celle de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts que par la société Mathiva tendant à la condamnation de l'appelante à lui verser la somme de 1 088,70 euros au titre du solde de l'indemnité d'occupation de mars 2025 et celle 1 137,46 euros au titre des frais de procédure et, à titre subsidiaire, celle de 1 276,16 euros déduction faite de la caution de 950 euros versée, s'agissant de condamnations sollicitées à titre définitif (et non provisionnel), au regard des dispositions de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile.
Elle leur a imparti un délai expirant le mardi 2 septembre 2025 à minuit pour lui transmettre leurs éventuelles observations sur ce point précis, par une note en délibéré (articles 444 et 445 du code de procédure civile).
Par note en délibéré transmise le 1er septembre 2025, le conseil de la société Mathiva indique qu'il appartient à la cour, en application de l'article 12 du code de procédure civile, de requalifier d'office le fondement de ses demandes qui sont nécessairement formées à titre provisionnel, s'agissant d'une procédure de référé et, à défaut, de réouvrir les débats afin de lui permettre, ainsi qu'à la partie adverse, de prendre de nouvelles conclusions afin d'éviter une nouvelle saisine de juridiction.
Par note en délibéré transmise le 29 août 2025, le conseil de la société Corail maintenance s'en rapporte à l'appréciation de la cour, sauf à déclarer les demandes de la partie adverse également irrecevables et à considérer que sa demande portant sur la caution n'est pas une demande de condamnation mais de restitution qui ne devait pas être formée à titre provisionnel.
MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire, dès lors que la société Mathiva n'a formé aucun appel incident à l'encontre des chefs de l'ordonnance entreprise ayant rejeté ses demandes d'astreinte et de provision, il n'y a lieu de statuer que dans les limites de l'appel.
Sur l'acquisition de la clause résolutoire
Il résulte de l'article 834 du code de procédure civile que, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
L'article 835 du même code dispose que le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Aux termes de l'article L 145-41 alinéa 1 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.
En application de ces textes, il est possible, en référé, de constater la résiliation de plein droit d'un contrat de bail en application d'une clause résolutoire lorsque celle-ci est mise en 'uvre régulièrement.
En l'espèce, le contrat de bail à usage exclusif professionnel signé par les parties stipule (en page 8 article 22) qu'à défaut de paiement d'un seul terme de loyer ou à défaut de remboursement à leur échéance exacte de toutes sommes accessoires audit loyer ou en cas d'inexécution de l'une quelconque des clauses et conditions du bail, celui-ci sera résilié de plein droit un mois après un commandement de payer ou de faire demeuré infructueux.
Le commandement de payer visant la clause résolutoire insérée dans le contrat de bail délivré le 28 décembre 2023 porte sur la somme principale de 5 605,06 euros correspondant à un arriéré locatif, échéance de décembre 2023 incluse.
La société Corail maintenance ne discute pas le décompte annexé au commandement de payer.
Si elle justifie avoir effectué plusieurs virements, il convient de relever que le premier virement de 2 602,16 euros a été réalisé le 2 février 2024, soit postérieurement à l'expiration du délai d'un mois qui lui était imparti pour régler les causes du commandement de payer, l'arriéré locatif s'élevant alors à la somme de 8 259,36 euros le 1er février 2024.
Dans ces conditions, les conditions d'acquisition de la clause résolutoire insérée dans le contrat de bail étaient réunies à la date du 29 janvier 2024.
L'ordonnance entreprise sera donc confirmée en ce qu'elle a constaté la résiliation du bail commercial liant les parties par suite de l'acquisition de la clause résolutoire contenue dans le contrat de bail à compter du 29 janvier 2024.
Sur les délais de paiement rétroactifs et la suspension des effets de la clause résolutoire
L'alinéa 2 de l'article L 145-41 du code de commerce dispose que les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil, peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation des effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant l'autorité de chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas si locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.
Aux termes de l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, dans la limite deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues.
Il en résulte qu'en matière de baux commerciaux, tant qu'aucune décision constatant la résolution du bail n'est passée en force de chose jugée, le juge saisi d'une demande de suspension des effets de la clause résolutoire peut accorder au locataire, à jour du paiement de ses loyers, des délais de façon rétroactive.
En l'espèce, la société Corail maintenance n'a pas été condamnée par le premier juge à verser une provision à valoir sur l'arriéré locatif. A la date où le premier juge a statué, le 14 octobre 2024, elle avait, en plus de reprendre le paiement de ses échéances courantes à compter du mois de février 2024, réglé le solde de sa dette locative d'un montant de 2 848,51 euros par virement effectué le 4 septembre 2024.
Si ces éléments auraient pu justifier les délais de paiement rétroactifs sollicités par la société Corail maintenance entre le 28 décembre 2023 et le 4 septembre 2024 et, par suite du règlement de l'arriéré locatif avec reprise du paiement des échéances courantes, de considérer la clause résolutoire comme n'ayant jamais joué, il n'en demeure pas moins que d'autres éléments conduisent à ne pas y faire droit.
En effet, alors même que la bailleresse se prévaut, en plus du commandement de payer visant la clause résolutoire, du congé qu'elle a délivré le 14 décembre 2023, notifié par lettre recommandée le 18 décembre suivant, à effet au 30 septembre 2024, date d'expiration du bail professionnel consenti pour une durée de six années allant du 1er octobre 2018 au 30 septembre 2024, la société Corail maintenance ne discute pas de la validité de ce congé tant sur la forme que sur le fond.
Si ce congé n'avait pas produit ses effets au moment de l'audience de plaidoirie devant le premier juge le 9 septembre 2024, tel n'est plus le cas à hauteur d'appel.
La société Corail maintenance étant, dans tous les cas, occupante sans droit ni titre depuis le 30 septembre 2024, ses demandes de délais de paiement rétroactifs avec suspension des effets de la clause résolutoire ne se justifient plus.
Dans ces conditions, l'ordonnance entreprise sera confirmée, bien que pour d'autres motifs que ceux retenus, en ce qu'elle a rejeté les demandes de délais de paiement et de suspension des effets de la clause résolutoire de la société Corail maintenance. Elle sera également confirmée en ce qu'elle a ordonné son expulsion.
Sur les autres demandes
Aux termes de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence peuvent accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
Ils ne peuvent donc accorder qu'une provision au créancier, à l'exclusion du prononcé de toute condamnation définitive.
En l'espèce, les parties entendent, à hauteur d'appel, tirer les conséquences de l'évolution du litige, à savoir la reprise des lieux par la société Mathilva, suivant procès-verbal en date du 24 mars 2025, à la suite de l'exécution de la mesure d'expulsion prononcée par le premier juge et des paiements effectués par la société Corail maintenance.
C'est ainsi que l'appelante sollicite la condamnation de l'intimée à lui restituer la caution de 2 634,30 euros et à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice causé résultant de son expulsion avant même que la cour de céans ne se prononce.
L'intimée, quant à elle, demande à la cour de condamner l'appelante à lui verser, non plus une indemnité d'occupation mensuelle de 1 327,15 euros du 29 janvier 2024 jusqu'à la libération effective des lieux, mais les sommes de 1 088,70 euros au titre du solde de l'indemnité d'occupation de mars 2025 et celle de 1 137,46 euros au titre des frais de procédure et, à titre subsidiaire, la somme de 1 276,16 euros pour tenir compte de la caution de 950 euros qui a été réglée (soit 1 088,70 euros + 1 137,46 euros - 950 euros).
Or, ces demandes de condamnations et de restitution excèdent les pouvoirs du juge des référés, tels que définis par l'article précité, comme n'étant pas formée à titre provisionnel.
Il n'y a donc pas lieu à référé sur ces demandes.
De plus, dès lors que la société Mathiva a entendu actualiser sa créance en la limitant au solde de l'indemnité d'occupation qu'elle estime restant dû au titre du mois de mars 2025, sans pour autant le demander à titre provisionnel, l'ordonnance entreprise sera infirmée, compte tenu de l'évolution du litige, en ce qu'elle a condamné la société Corail maintenance à payer à la société Mathiva une indemnité d'occupation mensuelle de 1 327,15 euros du 29 janvier 2024 jusqu'à la libération effective des lieux.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
La société Corail maintenance n'obtenant pas gain de cause en appel, il convient de confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle l'a condamnée aux dépens de première instance, en ce compris le coût du commandement de payer du 28 décembre 2023, et à verser à la SCI Mathiva la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle sera également condamnée aux dépens de la procédure d'appel.
L'équité commande en outre de la condamner à verser à la SCI Mathiva la somme de 2 000 euros pour les frais exposés en appel non compris dans les dépens en application de l'article 700 du code de procédure civile.
En tant que partie tenue aux dépens, la société Corail maintenance sera déboutée de sa demande formée sur le même fondement.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant dans les limites de l'appel,
Infirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné l'EURL Corail maintenance à payer à la SCI Mathiva une indemnité d'occupation mensuelle d'un montant de 1 327,15 euros à compter du 29 janvier 2024 et jusqu'à la libération des lieux ;
La confirme en toutes ses autres dispositions critiquées ;
Statuant à nouveau et ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de condamnations formées par l'EURL Corail maintenance à l'encontre de la SCI Mathiva au titre de la caution et à titre de dommages et intérêts ;
Dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de condamnations formées par la SCI Mathiva à l'encontre de l'EURL Corail maintenance, tant à titre principal qu'à titre subsidiaire, au titre du solde de l'indemnité d'occupation de mars 2025 et des frais de procédure ;
Condamne l'EURL Corail maintenance à verser à la SCI Mathiva la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel non compris dans les dépens ;
Déboute l'EURL Corail maintenance de sa demande formée sur le même fondement ;
Condamne l'EURL Corail maintenance aux dépens de la procédure d'appel.
La greffière La présidente
Chambre 1-2
ARRÊT
DU 25 SEPTEMBRE 2025
N°2025/507
Rôle N° RG 24/12587 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BN2SX
EURL CORAIL MAINTENANCE
C/
SCI MATHIVA
Copie exécutoire délivrée le :
à :
Me Maud DAVAL-GUEDJ
Me Sandra JUSTON
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance de référé rendue par le TJ de [Localité 5] en date du 14 Octobre 2024 enregistrée au répertoire général sous le n° 24/01477.
APPELANTE
EURL CORAIL MAINTENANCE
dont le siège social est [Adresse 2]
représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Edouard SEKLY, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
INTIMEE
SCI MATHIVA
dont le siège social est sis [Adresse 3] et encore domicilié chez son mandataire la SARL FLEUROT IMMOBILIER sis [Adresse 4]
représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Dora MEESSEN, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Juin 2025 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Angélique NETO, Présidente, chargée du rapport, et M. Laurent DESGOUIS, Conseiller.
Mme Angélique NETO, Présidente, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Angélique NETO, Présidente
Mme Séverine MOGILKA, Conseillère
M. Laurent DESGOUIS, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Caroline VAN-HULST.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Septembre 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Septembre 2025,
Signé par Mme Angélique NETO, Présidente et Mme Caroline VAN-HULST, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte sous seing privé en date du 13 septembre 2018, la société civile immobilière (SCI) Mathiva a consenti à l'entreprise unipersonnelle responsabilité limitée (EURL) Corail Maintenance un bail professionnel portant sur des locaux situés [Adresse 1] à La Ciotat (13 600) moyennant un loyer mensuel de base de 950 euros hors taxes et une provision mensuelle sur charges de 50 euros.
Le 14 décembre 2023, la SCI Mathiva a donné congé à la société Corail Maintenance à effet au 30 septembre 2024.
Le 28 décembre 2023, la SCI Mathiva a fait délivrer à la société Corail maintenance un commandement de payer la somme principale de 5 763,96 euros au titre d'un arriéré locatif en visant la clause résolutoire.
Estimant que le commandement de payer est resté infructueux, la SCI Mathiva a, par exploit de commissaire de justice en date du 28 mars 2024, assigné la société Corail maintenance devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Marseille aux fins de voir constater la résiliation du bail, d'ordonner son expulsion et de la voir condamner à lui verser diverses sommes.
Par ordonnance du 14 octobre 2024, ce magistrat a :
- constaté la résiliation du bail commercial à effet au 29 janvier 2024 ;
- ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux dans le mois de la signification de l'ordonnance, l'expulsion de la société Corail maintenance des locaux ainsi que de tous occupants de biens de son chef avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d'un serrurier ;
- dit que les meubles et objets mobiliers se trouvant sur place donneraient lieu à l'application des dispositions des articles L 433-1 et R 433-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
- rejeté la demande de suspension des effets de la clause résolutoire formée par le preneur ;
- condamné la société Corail maintenance à payer à la SCI Mathiva une indemnité d'occupation mensuelle, à compter du 29 janvier 2024, d'un montant de 1 327,15 euros et jusqu'à la libération effective des lieux ;
- rejeté la demande de provision présentée par la SCI Mathiva ;
- condamné la société Corail maintenance à verser à la SCI Mathiva la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la société Corail maintenance aux dépens, comprenant le coût du commandement de payer du 28 décembre 2023.
Suivant déclaration transmise au greffe le 16 octobre 2024, la société Corail maintenance a interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions dûment reprises.
Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 27 mai 2025, auxquelles il convient de se référer pour un exposé plus ample des moyens et prétentions, la société Corail maintenance sollicite de la cour qu'elle infirme l'ordonnance entreprise et statuant à nouveau :
Avant le procès-verbal de reprise des lieux en date du 25 mars 2025,
- lui donne acte qu'elle était à jour de ses loyers avant l'ordonnance entreprise ;
- rejette la demande de résiliation du bail ;
- ordonne la suspension des effets de la clause résolutoire ;
- rejette la demande en paiement d'une indemnité d'occupation ;
- rejette la demande d'expulsion et le concours de la force publique et d'un serrurier ;
- lui accorde des délais de paiement rétroactifs et constate que les délais ont été respectés et que la clause résolutoire du bail n'a pas joué ;
- dise et juge que la résiliation du bail n'a pas été prononcée par une décision de justice ayant autorité de chose jugée ;
Après le procès-verbal de reprise des lieux en date du 25 mars 2025,
- rejette la demande d'astreinte de 100 euros par jour de retard compte tenu de son expulsion des lieux ;
- rejette la demande de condamnation à une indemnité de 1 327,15 euros par mois jusqu'à la libération effective des lieux dès lors qu'elle a remis spontanément les clés ;
- rejette la demande de paiement pour la période allant du 1er au 24 mars 2025 ;
- ordonne à l'intimée de lui restituer la caution de 2 634,30 euros ;
- condamne l'intimée à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
- condamne l'intimée à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- la condamne aux dépens, avec distraction au profit de la SCP Cohen-Guedj-Montero-Daval-Guedj, avocats, sur leur affirmation de droit.
Elle expose avoir rencontré des difficultés passagères pour régler ses échéances et que si, elle reconnaît de ne pas avoir réglé les causes du commandement de payer dans le délai d'un mois qui lui était imparti, elle a apuré sa dette au moment où le premier juge a statué, ce qui justifiait sa demande de délais de paiement avec suspension des effets de la clause rsolutoire voire sa demande de délais de paiement rétroactifs en application des articles L 145-41 du code de commerce et 1343-5 du code civil. Elle indique que, malgré cela, un commandement de quitter les lieux lui a été signifié en exécution de l'ordonnance entreprise, suite à quoi elle a quitté les lieux le 22 mars 2025, à la suite de quoi un procès-verbal de reprise sera dressé le 25 mars 2025. Elle relève que le logement a été rendu en bon état, de sorte que l'intimée doit lui restituer le montant de la caution.
Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 30 mai 2025, auxquelles il convient de se référer pour un exposé plus ample des moyens et prétentions, la SCI Mathiva sollicite de la cour qu'elle :
à titre principal,
- confirme l'ordonnance entreprise ;
- déboute l'appelante de ses demandes ;
- statuant à nouveau,
- condamne l'appelante à lui verser la somme de 1 088,70 euros au titre du solde de l'indemnité d'occupation de mars 2025 ;
- la condamne à lui verser la somme de 1 137,46 euros au titre des frais de procédure pour la résiliation du bail et la reprise du local litigieux ;
à titre subsidiaire, dans le cas où l'ordonnance entreprise serait infirmée,
- dise et juge que le congé en résiliation du bail professionnel délivré le 14 décembre 2023 est valable et qu'il doit s'appliquer ;
- déboute l'appelante de ses demandes ;
- prononce la résiliation du bail professionnel à son terme au 30 septembre 2024 ;
- constate que l'appelante est occupante sans droit ni titre depuis le 1er octobre 2024 ;
- constate son départ des lieux depuis le 24 mars 2025 ;
- la condamne à lui verser la somme de 1 276,16 euros au titre du solde de l'indemnité d'occupation de mars 2025 et aux frais de procédure, déduction faite du dépôt de gerantie de 950 euros ;
en tout état de cause,
- condamne l'appelante à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Elle insiste sur le fait que le bail en question est un bail professionnel et non un bail commercial, de sorte que l'article L 145-41 du code de commerce est inapplicable. Elle relève que les causes du commandement de payer n'ont été réglées que quelques jours avant l'audience. En tout état de cause, elle souligne que le bail est arrivé à expiration le 30 septembre 2024 suite au congé qui a été délivré. Elle expose avoir repris les lieux le 24 mars 2025 en exécution de l'ordonnance entreprise, aucune suspension de l'exécution provisoire n'ayant été demandée, de sorte que les sommes sont dues jusqu'au 24 mars 2025 inclus, ce qui représente un solde de 1 088,70 euros pour la période allant du 1er au 24 mars 2025 inclus. En outre, elle relève que le dépôt de garantie est de 950 euros et non de 2 634,30 euros comme le soutient l'appelante, faisant observer que le bail stipule que cette somme restera acquise au bailleur en cas de résiliation judiciaire ou de plein droit du bail. Enfin, elle indique avoir exposé des frais lors de la procédure d'expulsion d'un montant de 1 137,46 euros dont elle sollicite le remboursement.
A titre subsidiaire, elle expose que le bail est arrivé à expiration le 30 septembre 2024 suite au congé qui a été délivré le 14 décembre 2023, faisant observer que sa validité n'est pas discutée. Elle indique donc que l'appelante est occupante sans droit ni titre depuis le 1er octobre 2024.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 2 juin 2025.
Par soit-transmis du 27 août 2025, la cour a indiqué aux parties qu'elle s'interrogeait sur l'irrecevabilité des demandes formées tant par la société Corail maintenance tendant à la condamnation de l'intimée à lui verser la somme de 2 634,30 euros au titre de la caution et celle de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts que par la société Mathiva tendant à la condamnation de l'appelante à lui verser la somme de 1 088,70 euros au titre du solde de l'indemnité d'occupation de mars 2025 et celle 1 137,46 euros au titre des frais de procédure et, à titre subsidiaire, celle de 1 276,16 euros déduction faite de la caution de 950 euros versée, s'agissant de condamnations sollicitées à titre définitif (et non provisionnel), au regard des dispositions de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile.
Elle leur a imparti un délai expirant le mardi 2 septembre 2025 à minuit pour lui transmettre leurs éventuelles observations sur ce point précis, par une note en délibéré (articles 444 et 445 du code de procédure civile).
Par note en délibéré transmise le 1er septembre 2025, le conseil de la société Mathiva indique qu'il appartient à la cour, en application de l'article 12 du code de procédure civile, de requalifier d'office le fondement de ses demandes qui sont nécessairement formées à titre provisionnel, s'agissant d'une procédure de référé et, à défaut, de réouvrir les débats afin de lui permettre, ainsi qu'à la partie adverse, de prendre de nouvelles conclusions afin d'éviter une nouvelle saisine de juridiction.
Par note en délibéré transmise le 29 août 2025, le conseil de la société Corail maintenance s'en rapporte à l'appréciation de la cour, sauf à déclarer les demandes de la partie adverse également irrecevables et à considérer que sa demande portant sur la caution n'est pas une demande de condamnation mais de restitution qui ne devait pas être formée à titre provisionnel.
MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire, dès lors que la société Mathiva n'a formé aucun appel incident à l'encontre des chefs de l'ordonnance entreprise ayant rejeté ses demandes d'astreinte et de provision, il n'y a lieu de statuer que dans les limites de l'appel.
Sur l'acquisition de la clause résolutoire
Il résulte de l'article 834 du code de procédure civile que, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
L'article 835 du même code dispose que le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Aux termes de l'article L 145-41 alinéa 1 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.
En application de ces textes, il est possible, en référé, de constater la résiliation de plein droit d'un contrat de bail en application d'une clause résolutoire lorsque celle-ci est mise en 'uvre régulièrement.
En l'espèce, le contrat de bail à usage exclusif professionnel signé par les parties stipule (en page 8 article 22) qu'à défaut de paiement d'un seul terme de loyer ou à défaut de remboursement à leur échéance exacte de toutes sommes accessoires audit loyer ou en cas d'inexécution de l'une quelconque des clauses et conditions du bail, celui-ci sera résilié de plein droit un mois après un commandement de payer ou de faire demeuré infructueux.
Le commandement de payer visant la clause résolutoire insérée dans le contrat de bail délivré le 28 décembre 2023 porte sur la somme principale de 5 605,06 euros correspondant à un arriéré locatif, échéance de décembre 2023 incluse.
La société Corail maintenance ne discute pas le décompte annexé au commandement de payer.
Si elle justifie avoir effectué plusieurs virements, il convient de relever que le premier virement de 2 602,16 euros a été réalisé le 2 février 2024, soit postérieurement à l'expiration du délai d'un mois qui lui était imparti pour régler les causes du commandement de payer, l'arriéré locatif s'élevant alors à la somme de 8 259,36 euros le 1er février 2024.
Dans ces conditions, les conditions d'acquisition de la clause résolutoire insérée dans le contrat de bail étaient réunies à la date du 29 janvier 2024.
L'ordonnance entreprise sera donc confirmée en ce qu'elle a constaté la résiliation du bail commercial liant les parties par suite de l'acquisition de la clause résolutoire contenue dans le contrat de bail à compter du 29 janvier 2024.
Sur les délais de paiement rétroactifs et la suspension des effets de la clause résolutoire
L'alinéa 2 de l'article L 145-41 du code de commerce dispose que les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil, peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation des effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant l'autorité de chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas si locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.
Aux termes de l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, dans la limite deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues.
Il en résulte qu'en matière de baux commerciaux, tant qu'aucune décision constatant la résolution du bail n'est passée en force de chose jugée, le juge saisi d'une demande de suspension des effets de la clause résolutoire peut accorder au locataire, à jour du paiement de ses loyers, des délais de façon rétroactive.
En l'espèce, la société Corail maintenance n'a pas été condamnée par le premier juge à verser une provision à valoir sur l'arriéré locatif. A la date où le premier juge a statué, le 14 octobre 2024, elle avait, en plus de reprendre le paiement de ses échéances courantes à compter du mois de février 2024, réglé le solde de sa dette locative d'un montant de 2 848,51 euros par virement effectué le 4 septembre 2024.
Si ces éléments auraient pu justifier les délais de paiement rétroactifs sollicités par la société Corail maintenance entre le 28 décembre 2023 et le 4 septembre 2024 et, par suite du règlement de l'arriéré locatif avec reprise du paiement des échéances courantes, de considérer la clause résolutoire comme n'ayant jamais joué, il n'en demeure pas moins que d'autres éléments conduisent à ne pas y faire droit.
En effet, alors même que la bailleresse se prévaut, en plus du commandement de payer visant la clause résolutoire, du congé qu'elle a délivré le 14 décembre 2023, notifié par lettre recommandée le 18 décembre suivant, à effet au 30 septembre 2024, date d'expiration du bail professionnel consenti pour une durée de six années allant du 1er octobre 2018 au 30 septembre 2024, la société Corail maintenance ne discute pas de la validité de ce congé tant sur la forme que sur le fond.
Si ce congé n'avait pas produit ses effets au moment de l'audience de plaidoirie devant le premier juge le 9 septembre 2024, tel n'est plus le cas à hauteur d'appel.
La société Corail maintenance étant, dans tous les cas, occupante sans droit ni titre depuis le 30 septembre 2024, ses demandes de délais de paiement rétroactifs avec suspension des effets de la clause résolutoire ne se justifient plus.
Dans ces conditions, l'ordonnance entreprise sera confirmée, bien que pour d'autres motifs que ceux retenus, en ce qu'elle a rejeté les demandes de délais de paiement et de suspension des effets de la clause résolutoire de la société Corail maintenance. Elle sera également confirmée en ce qu'elle a ordonné son expulsion.
Sur les autres demandes
Aux termes de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence peuvent accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
Ils ne peuvent donc accorder qu'une provision au créancier, à l'exclusion du prononcé de toute condamnation définitive.
En l'espèce, les parties entendent, à hauteur d'appel, tirer les conséquences de l'évolution du litige, à savoir la reprise des lieux par la société Mathilva, suivant procès-verbal en date du 24 mars 2025, à la suite de l'exécution de la mesure d'expulsion prononcée par le premier juge et des paiements effectués par la société Corail maintenance.
C'est ainsi que l'appelante sollicite la condamnation de l'intimée à lui restituer la caution de 2 634,30 euros et à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice causé résultant de son expulsion avant même que la cour de céans ne se prononce.
L'intimée, quant à elle, demande à la cour de condamner l'appelante à lui verser, non plus une indemnité d'occupation mensuelle de 1 327,15 euros du 29 janvier 2024 jusqu'à la libération effective des lieux, mais les sommes de 1 088,70 euros au titre du solde de l'indemnité d'occupation de mars 2025 et celle de 1 137,46 euros au titre des frais de procédure et, à titre subsidiaire, la somme de 1 276,16 euros pour tenir compte de la caution de 950 euros qui a été réglée (soit 1 088,70 euros + 1 137,46 euros - 950 euros).
Or, ces demandes de condamnations et de restitution excèdent les pouvoirs du juge des référés, tels que définis par l'article précité, comme n'étant pas formée à titre provisionnel.
Il n'y a donc pas lieu à référé sur ces demandes.
De plus, dès lors que la société Mathiva a entendu actualiser sa créance en la limitant au solde de l'indemnité d'occupation qu'elle estime restant dû au titre du mois de mars 2025, sans pour autant le demander à titre provisionnel, l'ordonnance entreprise sera infirmée, compte tenu de l'évolution du litige, en ce qu'elle a condamné la société Corail maintenance à payer à la société Mathiva une indemnité d'occupation mensuelle de 1 327,15 euros du 29 janvier 2024 jusqu'à la libération effective des lieux.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
La société Corail maintenance n'obtenant pas gain de cause en appel, il convient de confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle l'a condamnée aux dépens de première instance, en ce compris le coût du commandement de payer du 28 décembre 2023, et à verser à la SCI Mathiva la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle sera également condamnée aux dépens de la procédure d'appel.
L'équité commande en outre de la condamner à verser à la SCI Mathiva la somme de 2 000 euros pour les frais exposés en appel non compris dans les dépens en application de l'article 700 du code de procédure civile.
En tant que partie tenue aux dépens, la société Corail maintenance sera déboutée de sa demande formée sur le même fondement.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant dans les limites de l'appel,
Infirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné l'EURL Corail maintenance à payer à la SCI Mathiva une indemnité d'occupation mensuelle d'un montant de 1 327,15 euros à compter du 29 janvier 2024 et jusqu'à la libération des lieux ;
La confirme en toutes ses autres dispositions critiquées ;
Statuant à nouveau et ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de condamnations formées par l'EURL Corail maintenance à l'encontre de la SCI Mathiva au titre de la caution et à titre de dommages et intérêts ;
Dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de condamnations formées par la SCI Mathiva à l'encontre de l'EURL Corail maintenance, tant à titre principal qu'à titre subsidiaire, au titre du solde de l'indemnité d'occupation de mars 2025 et des frais de procédure ;
Condamne l'EURL Corail maintenance à verser à la SCI Mathiva la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel non compris dans les dépens ;
Déboute l'EURL Corail maintenance de sa demande formée sur le même fondement ;
Condamne l'EURL Corail maintenance aux dépens de la procédure d'appel.
La greffière La présidente