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Décisions

CA Paris, Pôle 1 - ch. 3, 25 septembre 2025, n° 25/00008

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 25/00008

25 septembre 2025

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 3

ARRÊT DU 25 SEPTEMBRE 2025

(n° 359 , 14 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/00008 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CKRNH

Décision déférée à la cour : ordonnance du 20 novembre 2024 - président du TJ de Paris - RG n° 24/53150

APPELANTE

S.A. AXA FRANCE IARD, RCS de Nanterre n°722057460, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Laure FLORENT de l'AARPI FLORENT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : E0549

INTIMÉS

M. [L] [I]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Mme [A] [P] épouse [I]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentés par Me Anne MAS, avocat au barreau de PARIS, toque : A0286

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES [Adresse 1], représenté par son syndic en exercice, le CABINET [Localité 7] OUEST GESTION, RCS de Paris n°722055688, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représentée par Me Jacques CHEVALIER de la SELAS CHEVALIER - MARTY - PRUVOST Société d'Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : R085

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 08 septembre 2025, en audience publique, rapport ayant été fait par Michel RISPE, président de chambre, conformément aux articles 804, 805 et 906 du CPC, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Michel RISPE, président de chambre

Caroline BIANCONI-DULIN, conseillère

Valérie GEORGET, conseillère

Greffier lors des débats : Jeanne PAMBO

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Michel RISPE, président de chambre et par Jeanne PAMBO, greffier, présent lors de la mise à disposition.

********

M. [I] et Mme [P] (les époux [I]) sont propriétaires d'un appartement situé au 1er étage du bâtiment B de l'immeuble situé [Adresse 1] à [Localité 8], soumis au statut de la copropriété. Suivant un contrat signé le 19 octobre 2021, ils ont donné cet appartement à bail d'habitation à Mme [X] moyennant le paiement d'un loyer mensuel de 1.300 euros, charges comprises.

Le 20 décembre 2022, le plâtre du plancher de l'appartement situé au dessus de celui des époux [I] s'est partiellement effondré, ce qui a entraîné la rupture de deux solives du plancher de leur propre appartement. Il a été nécessaire de mettre en place aussitôt des étais dans l'une des pièces. Le 11 janvier 2023, les services de la préfecture de [Localité 7] ont estimé que le bâtiment n'offrait pas les garanties de solidité pour le maintien de la sécurité des occupants et des tiers.

Le 11 avril 2023, les copropriétaires se sont réunis en assemblée générale et ont voté des travaux de sondages, purges et étais du bâtiment ainsi que le suivi des travaux par un architecte.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 24 avril 2023, les époux [I] ont demandé au syndic de l'immeuble d'effectuer toutes les diligences nécessaires à l'indemnisation de leur préjudice, de leur adresser une copie de la déclaration de sinistre effectuée auprès de l'assureur de l'immeuble et de leur indiquer les suites données. Le 10 mai 2023, le syndic de l'immeuble leur a répondu qu'il appartenait au syndicat des copropriétaires d'accepter, en assemblée générale, la prise en charge des préjudices qu'ils invoquaient.

Par actes des 17 et 19 avril 2024, les époux [I] ont fait assigner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] à [Localité 8] (le syndicat des copropriétaires) ainsi que la société Axa France Iard par devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris.

L'affaire a fait l'objet de plusieurs renvois notamment à des fins de mise en place d'une médiation, avant d'être rappelée à l'audience du 15 octobre 2024, après la tenue le 26 juin 2024 d'une nouvelle assemblée générale de la copropriété.

Lors de cette dernière audience, les requérants ont demandé au juge des référés de :

condamner le syndicat des copropriétaires sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé le délai de six mois commençant à courir à compter de la décision, à faire procéder aux travaux de reprise structurelles votés lors de l'assemblée générale du 26 juin 2024 ;

condamner les défendeurs in solidum au paiement des sommes de :

- 34.935,04 euros à titre de provision à valoir sur la perte des loyers ;

- 1.170 euros à titre de provision à valoir sur la facture de M. [J] ;

- 4. 000 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens.

En réponse, le syndicat des copropriétaires a conclu au rejet des demandes adverses, offrant de régler une somme de 23.652,60 euros. La société Axa Iard a demandé le rejet des demandes adverses.

Par ordonnance contradictoire du 20 novembre 2024, le dit juge des référés a :

dit n'y avoir lieu à référé sur la demande d'injonction à exécuter les travaux de reprise de la structure,

condamné in solidum le syndicat des copropriétaires et la société Axa France Iard à verser aux époux [I] les sommes de :

- 25.933,92 euros à titre de provision à faire valoir sur la perte des loyers entre le 6 février 2023 et le 31 octobre 2024,

- 1.170 euros à titre de provision à valoir sur les honoraires d'architecte de M. [J],

- 3.000 euros au titre des frais irrépétibles,

condamné in solidum le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] et la société Axa France Iard au paiement des dépens,

condamné la société Axa France Iard à garantir le syndicat des copropriétaires des condamnations qui précèdent dont les dépens entraînant distraction au profit de la Selas Chevalier Marty Pruvost,

condamné la société Axa France Iard à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles,

rappelé que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.

Par déclaration du 11 décembre 2024, la société Axa France Iard a relevé appel de cette décision élevant critique à l'encontre de tous les chefs du dispositif de celle-ci, sauf en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur la demande d'injonction à exécuter les travaux de reprise de la structure.

Par ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 28 août 2025, la société Axa France Iard a demandé à la cour de :

juger l'appel formé par la société Axa France Iard recevable et bien fondé,

en conséquence,

infirmer l'ordonnance du 20 novembre 2024 en ce qu'elle a :

condamné in solidum le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] et la société Axa France Iard à verser aux époux [I]:

ola somme de 25.933,92 euros à titre de provision à faire valoir sur la perte des loyers entre le 6 février 2023 et le 31 octobre 2024,

ola somme de 1.170 euros à titre de provision à valoir sur les honoraires d'architecte de M. [J],

ola somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles,

condamné in solidum le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] et la société Axa France Iard au paiement des dépens,

condamné la société Axa France Iard à garantir le syndicat des copropriétaires des condamnations qui précèdent dont les dépens,

condamné la société Axa France Iard à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles,

rappelé que la présente décision est exécutoire à titre provisoire',

statuant à nouveau,

juger qu'il existe des contestations sérieuses et qu'il n'y a pas lieu à référé,

débouter toutes les parties de toutes leurs demandes, fins et conclusions à l'encontre de la société Axa France Iard ;

statuer ce que de droit quant aux dépens.

Par leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 18 juillet 2025, au visa des articles 835 du code de procédure civile, 14 de la loi du 10 juillet 1965, L.124-3 du code des assurances et de la théorie des troubles anormaux de voisinage, les époux [I] ont demandé à la cour de :

débouter la compagnie Axa France Iard de l'ensemble de ses demandes,

confirmer l'ordonnance du 20 novembre 2024 en ce qu'elle a condamné in solidum syndicat des copropriétaires et la société Axa France Iard à verser aux époux [I] les sommes de 1.170 euros à titre de provision à valoir sur les honoraires d'architecte de M. [J] et de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles, outre les dépens,

infirmer l'ordonnance du 20 novembre 2024 en ce qu'elle a condamné in solidum syndicat des copropriétaires et la société Axa France Iard à verser aux époux [I] la somme de 25.933,92 euros à titre de provision à valoir sur la perte des loyers entre le 6 février 2023 et le 31 octobre 2024,

statuant à nouveau :

condamner in solidum le syndicat des copropriétaires de l'immeuble et la société Axa France Iard à verser aux époux [I] la somme de 36.182,72 euros à titre de provision à valoir sur la perte des loyers entre le 20 décembre 2022 et le 31 mai 2025,

condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et la société Axa France Iard à verser aux époux [I] la somme de 520 euros à titre de provision à valoir sur le préjudice matériel causé par la différence de hauteur de faux-plafond,

condamner à titre principal la compagnie Axa France Iard et, à titre subsidiaire, in solidum le syndicat des copropriétaires et la société Axa France Iard à verser à Mme [I] une somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner les mêmes aux dépens.

Par ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 13 août 2025, le syndicat des copropriétaires a demandé à la cour de :

dire mal fondé l'appel de la société Axa France Iard,

dire mal fondé l'appel des époux [I],

confirmer l'ordonnance de référé du 20 novembre 2024 en toutes ses dispositions,

condamner la société Axa France Iard à garantir le syndicat des copropriétaires de toutes les condamnations prononcées à son encontre sur la demande des époux [I],

condamner la société Axa France Iard au paiement d'une somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens dont distraction au profit de la Selas Chevalier Marty Pruvost.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 4 septembre 2025.

Sur ce,

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

En application de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Il sera rappelé que les demandes tendant à voir donner acte, constater, juger ou encore dire et juger, ne constituent pas des prétentions au sens des articles 4 et 5 du code de procédure civile mais des moyens au soutien de celles-ci en sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer de ces chefs.

En outre, selon une jurisprudence constante, les juges ne sont pas tenus de répondre à un simple argument, ni de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, ni encore de répondre à une simple allégation dépourvue d'offre de preuve.

Sur la recevabilité de la demande provisionnelle au titre des travaux de menuiserie

Aux termes de l'article 564 du code procédure civile, 'A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait'.

Selon l'article 565 du même code, 'Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent'.

L'article 566 dispose que les 'Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire'.

Conformément à l'article 906-2 du même code, alinéa 2, 'L'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office par ordonnance du président de la chambre saisie ou du magistrat désigné par le premier président, d'un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué'.

En outre, aux termes de l'article 915-2, alinéas 2 et 3, du même code, 'A peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 906-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

Néanmoins, et sans préjudice de l'article 914-3, demeurent recevables, dans les limites des chefs du dispositif du jugement critiqués et de ceux qui en dépendent, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait'.

Au cas présent, les époux [I] sollicitent pour la première fois à hauteur d'appel la condamnation in solidum du syndicat des copropriétaires et de la société Axa France Iard au paiement d'une provision d'un montant de 520 euros au titre de travaux de menuiserie effectués dans la salle de bains de l'appartement litigieux à raison de la diminution de la hauteur de plafond, alors que le faux plafond a été posé quelques centimètres plus bas qu'auparavant. Ils précisent que cette demande serait un complément nécessaire des précédentes et qu'elle ne pouvait être formée en première instance dès lors que les travaux dont s'agit n'avaient pas encore été exécutés et que ce préjudice n'existait pas encore.

Le syndicat des copropriétaires soulève l'irrecevabilité de cette demande, comme nouvelle en appel, ajoutant qu'elle n'est pas justifiée par les époux [I] qui n'ont versé qu'une seule pièce à ce titre, mentionnant seulement l'exécution de 'travaux de menuiserie et pose'.

La cour constate que la demande de provision au titre des travaux de menuiserie a certes été sollicitée par les époux [I], pour la première fois par conclusions remises le 18 juillet 2025, mais qu'elle est fondée sur une pièce datée du 9 juin 2025, s'agissant d'une facture d'un montant de 520 euros qu'ils produisent à l'appui de leur demande. Alors que ce faisant il n'est pas discutable que les époux [I] poursuivent l'indemnisation provisionnelle du préjudice imputé au syndicat des copropriétaires, cette demande formulée afin de prendre en compte un autre chef de préjudice apparaît complémentaire à celles soumises à ce titre au premier juge.

En application des dispositions qui précèdent, il en résulte que cette demande est recevable.

Sur les demandes provisionnelles au titre des honoraires d'architecte, de la perte de loyer et des travaux de menuiserie

La cour rappelle qu'aux termes de l'article 835, alinéa 2, du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire statuant en référé peut dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier.

Le montant de la provision allouée n'a alors d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la créance alléguée.

Ainsi, s'il appartient au demandeur à une provision d'établir l'existence de la créance qu'il invoque, c'est au défendeur de prouver que cette créance est sérieusement contestable.

Une contestation sérieuse est caractérisée lorsque l'un des moyens de défense opposés aux prétentions de la partie demanderesse n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

Selon l'article 14, alinéa 5, de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, 'Le syndicat est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers ayant leur origine dans les parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires'.

Par ailleurs, en application de l'article L124-3 du code des assurances, 'Le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.

L'assureur ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui, tant que ce tiers n'a pas été désintéressé, jusqu'à concurrence de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité de l'assuré'.

La cour rappelle encore qu'il est constant que dans les rapports entre l'assureur et le souscripteur, la preuve de l'existence d'un contrat d'assurance ne saurait suffire à établir la preuve de la nature et de l'étendue de la garantie, laquelle ne peut résulter que des termes mêmes de la police, qu'il incombe à l'assuré de produire. (Cf. Cass. 2ème Civ., 13 mai 2004, pourvoi n° 03-10.964, Bull., 2004, II, n° 227).

En outre, il est acquis que si le juge des référés peut toujours tirer les conséquences des stipulations claires et précises d'un contrat ne nécessitant aucune interprétation, lorsque ces conditions ne sont pas réunies, il n'a pas le pouvoir de trancher la contestation. Ainsi, l'existence d'une contestation sérieuse sur l'obligation à garantie de l'assureur fait obstacle à l'octroi d'une provision en référé (cf. Cass. 2e'civ., 26'oct. 2017, n°'16-23.853': JurisData n°'2017-021795) et interpréter un contrat d' assurance excède le pouvoir du juge des référés (cf. Cass. 3e'civ., 17'sept. 2020, n°'19-17.784).

Au cas d'espèce, il est acquis que le règlement de copropriété prévoit que les parties communes comprennent 'le gros 'uvre des planchers (poutres, solives et hourdis)' et que le sinistre au titre duquel les époux [I] sollicitent le paiement d'une provision trouve son origine dans la rupture de solives composant un plancher. Mais, si le syndicat des copropriétaires ne conteste pas que sa responsabilité civile à l'égard des époux [I] est engagée à ce titre, les parties s'opposent sur la mise en 'uvre de la garantie par l'assureur de la copropriété.

S'agissant des demandes à l'encontre de la société Axa France Iard, le premier juge a retenu que: ' Les requérants visent l'article L. 124-3 du code des assurances qui dispose que le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.

Le syndicat des copropriétaires sollicite, quant à lui, la garantie par son assureur, des sommes mises à sa charge, ce que conteste l'assureur se prévalant d'une exclusion de garantie relative au défaut d'entretien imputable au syndicat des copropriétaires et de l'absence d'évidence à son obligation de garantie.

En l'espèce, le contrat d'assurance Atouts Immeuble souscrit par le syndicat des copropriétaires à effet à compter du 1er janvier 2022 se compose des conditions particulières et des conditions générales numérotées 972154B.

L'article Dispositions particulières des conditions particulières stipule que l'intercalaire 2090/2004 fait partie intégrante du contrat ; qu'il prévaut sur les conditions particulières et les conditions générales à l'exception des clauses indiquées dans les conditions particulières aux articles " Dispositions particulières Franchises ". L'article stipule que " En l'absence de précisions dans l'intercalaire sur le champ d'application des garanties, les exclusions générales ou spécifiques, les franchises et les plafonds d'intervention ou sous-limitation, ce sont les dispositions prévues aux conditions générales qui s'appliqueront ".

L'intercalaire stipule en son article 7-Responsabilité Civile que " Par dérogation et par extension aux dispositions des Conditions Générales, l'Assureur garantit les conséquences pécuniaires de la Responsabilité Civile pouvant incomber à l'Assuré, en raison de dommages corporels, matériels et matériels causés aux locataires, aux copropriétaires ou aux tiers (...)." LA GARANTIE S'ETEND EN OUTRE

- Aux conséquences pécuniaires de la Responsabilité Civile que peut encourir l'Assuré au titre de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis"

Dans la mesure ou cette garantie est silencieuse quant aux exclusions de garantie, il résulte de l'article Dispositions particulières précitées qu'est applicable, à tout le moins, l'article 5.1 des conditions générales, relatif aux exclusions communes à toutes les garanties, qui stipule que "ne sont pas garantis: les dommages résultant d'un défaut d'entretien ou de réparation indispensable qui vous incombe, caractérisé et connu de vous, tant avant qu'après sinistre sauf cas de force majeure.".

L'article L.113-1 du code des assurances dispose que les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police.

Cette disposition permet d'écarter les clauses d'exclusion trop générales ou trop vagues.

Sans qu'il ne soit en tout état de cause besoin d'apprécier le caractère formel et limité de la clause d'exclusion, il convient de constater que l'assureur ne démontre pas que l'état du bacula était connu du syndicat des copropriétaires et qu'il s'est volontairement abstenu de procéder aux réparations qui lui incombaient.

Dès lors, la contestation opposée par l'assureur n'apparaît pas sérieuse.

En outre, le syndicat des copropriétaires n'invoque pas la garantie de l'assureur sur le fondement de la garantie Effondrement, mais sur la garantie prévue par l'intercalaire en son article 7-Responsabilité Civile, qui s'étend à tous dommages immatériels.

Dès lors, les arguments opposés par l'assureur quant à la garantie Effondrement sont inopérants.

La perte de loyers a été souscrite par l'assuré, selon les conditions particulières, et l'article 3.3 des conditions générales stipule que "Nous prenons en charge le montant des loyers dont vous vous trouvez privé en votre qualité de copropriétaire, à la suite d'un sinistre garantie par ce contrat, affectant directement les biens sinistrés, durant le temps nécessaire à dire d'expert, pour la remise en état des lieux ".

Dès lors, les contestations opposées par l'assureur n'apparaissent pas suffisamment sérieuses pour s'opposer à l'application du contrat et de son intercalaire, dont la mise en 'uvre ne suppose aucune interprétation en l'espèce, de sorte que les défendeurs seront condamnés in solidum au paiement des sommes allouées aux requérants à titre provisionnel, et la société Axa France Iard, condamnée à garantir le syndicat des copropriétaires des condamnations précitées'.

A hauteur d'appel, l'appelante soutient dans le corps de ses conclusions que le juge des référés n'avait pas compétence pour procéder à une étude des conditions d'assurance, mais elle n'a pas formulé de demande en ce sens dans le dispositif de celles-ci. En réalité, elle se prévaut de l'existence de contestations sérieuses faisant obstacle à sa condamnation à titre provisionnel, soutenant que les pouvoirs dévolus à la juridiction des référés ne lui permettaient pas d'interpréter les stipulations du contrat d'assurance, dont l'appréciation ressortit du seul juge du fond.

Elle souligne que le juge des référés a pris la peine de lire l'entièreté des conditions d'assurance et de les citer dans son ordonnance et que 'pas moins de deux pages de motivation lui ont permis de conclure à la garantie d'Axa'.

Or, selon elle, dès lors qu'elle contestait devoir sa garantie au motif que les désordres subis étaient exclus de la garantie, à raison de la vétusté de l'immeuble due au défaut d'entretien imputable à l'assuré, il s'agissait d'une contestation sérieuse nécessitant un débat au fond.

Ainsi, s'agissant de la garantie responsabilité civile dont la mobilisation est revendiquée par les époux [I] à son encontre, elle fait observer qu'il ressort du procès-verbal de constatations contradictoires établi lors de l'expertise amiable diligentée par les assureurs des époux [I] et du syndicat des copropriétaires que les désordres n'ont pas de cause accidentelle mais relèvent d'un défaut d'entretien de l'immeuble. Elle en déduit une absence d'aléa dans la conclusion du contrat d'assurance, qui doit entraîner la nullité de celui-ci. Se référant à plusieurs jurisprudences, elle en retient que le contrat d'assurance qui stipule, au titre des conditions de mise en 'uvre de garantie de la police, que les dommages, ayant pour origine un défaut d'entretien ou de réparation incombant à l'assuré, caractérisé et connu de lui, n'entrent pas dans l'objet ni dans la nature du contrat, n'a pas vocation à s'appliquer compte tenu des manquements du bailleur antérieurs au sinistre, caractérisant l'absence de tout aléa. Elle invoque à cet égard les stipulations du contrat d'assurance en ce qu'elles prévoient dans ses conditions générales (pièce n°2, p.24) 'Outre les exclusions propres à chacune des garanties, ne sont pas garantis : - les dommages résultant d'un défaut d'entretien ou de réparation indispensable qui vous incombe, caractérisé et connu de vous, tant avant qu'après sinistre, sauf cas de force majeure'.

Elle conteste aussi que puisse être mise en 'uvre la garantie effondrement, dès lors que le désordre n'est pas consécutif à un événement extérieur au bâtiment assuré et n'est pas survenu de manière fortuite et soudaine.

Elle invoque enfin des exclusions expressément prévues dans l'intercalaire quant aux pertes de loyer et d'usage et l'existence d'une franchise qui doit être appliquée au montant de l'indemnité, à hauteur de 52.760 euros, soit 50 fois l'indice FFB (1.055,20 euros au jour de la réclamation).

Elle en déduit que le préjudice matériel d'un montant très inférieur à la franchise ne saurait donner lieu à une prise en charge et que les pertes de loyers ne donnent contractuellement lieu à aucune prise en charge.

Les époux [I] soutiennent que le sinistre qu'ils ont subi relève de la garantie de l'assureur de l'immeuble, soit la société Axa France Iard, auprès de laquelle une assurance multirisque habitation a été souscrite et à l'encontre de laquelle, en leur qualité de tiers victimes, ils disposent d'une action directe sur le fondement de l'article L 124-3 du code des assurances. Ils précisent que leurs demandes ne reposent pas sur la garantie effondrement mais sur la garantie responsabilité civile du syndicat, responsable de plein droit sur le fondement de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 des dommages causés aux copropriétaires. Ils soutiennent que l'exclusion de garantie pour défaut d'entretien ne saurait recevoir application et qu'en tout état de cause, il n'est pas démontré que le syndicat des copropriétaires avait connaissance des désordres affectant la structure de l'immeuble avant la survenue du sinistre. Ils précisent qu'avant le sinistre, il n'était pas possible de voir l'état de la structure de l'immeuble et que la chute de la poutre n'était donc pas prévisible, le risque de chute étant inconnu du syndicat des copropriétaires.

Le syndicat des copropriétaires fait sienne la motivation du premier juge alors que, selon lui, aucune contestation sérieuse n'est démontrée quant à l'application de la garantie définie par l'intercalaire, qui s'étend aux conséquences pécuniaires de la responsabilité civile que peut encourir l'assuré au titre de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, qui fonde la réclamation des époux [I].

La cour constate que, comme l'a retenu le premier juge, le contrat d'assurance Atouts Immeuble souscrit par le syndicat des copropriétaires à effet à compter du 1er janvier 2022 comporte à la fois des conditions particulières et des conditions générales (référencées 972154B) ainsi qu'un intercalaire 2090/2004.

Selon les conditions particulières, 'L'intercalaire 2090/2004 fait partie intégrante du contrat. Il prévaut sur les conditions particulières et les Conditions Générale s à l'exception des clauses indiquées aux présentes conditions particulières dans les paragraphes "Dispositions Particulières" et " Franchises ". En l'absence de précisions dans l'intercalaire sur le champ d'application des garanties, les exclusions générales ou spécifiques, les franchises et les plafonds d'intervention ou sous-limitation, ce sont les dispositions prévues aux conditions générales qui s'appliqueront'.

L'intercalaire prévoit en son article 8 que 'Par dérogation et par extension aux dispositions des Conditions Générales, l'Assureur garantit les conséquences pécuniaires de la Responsabilité Civile pouvant incomber à l'Assuré, en raison de dommages corporels, matériels et immatériels causés aux locataires, aux copropriétaires ou aux tiers (y compris les recours pouvant être exercés contre l'Assuré par tous organismes de Sécurité Sociale, de Prévoyance Sociale obligatoire et les Caisses de Mutualité Sociale Agricole) notamment du fait :

o Des dépendances de l'immeuble y compris les garages

o Des espaces verts, arbres, clôtures, appareils d'éclairage, équipements sportifs ou de jeux, voirie appartenant en propre à l'Assuré

o Des gardiens et employés d'immeubles, de leurs aides ou remplaçants et, de façon générale, de tous préposés de l'Assuré dans leurs fonctions relatives à l'entretien et à la garde de l'immeuble

o De tout matériel affecté au service de l'immeuble, à l'exclusion des véhicules terrestres à moteur

o Des animaux ou matériel appartenant au personnel attaché au service de l'immeuble ou mis à sa disposition pour sa garde ou son entretien

o Des pollutions accidentelles diverses provenant des installations de l'immeuble

La garantie s'étend en outre :

o A la responsabilité professionnelle du gardien et employés d'immeubles et plus particulièrement aux fautes imputables au concierge ou à son remplaçant dans l'exercice de ses fonctions, tels qu'un retard ou une omission dans la remise de plis, lettres, colis, exploits d'huissiers

o Aux conséquences pécuniaires de la Responsabilité Civile que peut encourir l'Assuré au titre des articles 1382, 1383, 1384, 1386, 1719 et 1721 du Code Civil, à raison des accidents causés aux tiers du fait des ascenseurs ou monte-charge de l'immeuble assuré

o Aux conséquences pécuniaires de la Responsabilité Civile que peut encourir l'Assuré au titre de l'article 14 de la Loi du 10 Juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis

o Aux conséquences pécuniaires de la Responsabilité Civile que peut en courir l'Assuré à la suite d'une faute inexcusable ou intentionnelle

o Aux conséquences civiles des infractions aux règlements de police et voirie

o A la responsabilité civile personnelle du gardien et/ou son remplaçant sur le site de l'immeuble assuré

o A la Responsabilité Civile pouvant incomber à l'Assuré, à l'égard des tiers, par suite de maladies transmises par les vide-ordures de l'immeuble

Cette dernière garantie est subordonnée au respect de l'Assuré des obligations d'entretien des vide-ordures mises à sa charge telles que définies par la Circulaire du 9 août 1978 relative à la révision du règlement sanitaire départemental du 24 mai 1963.

Responsabilité des membres du conseil syndical

Il est convenu que les garanties du présent contrat sont étendues à la responsabilité civile personnelle que chacun des membres du Conseil Syndical peut encourir, à l'égard des Tiers, dans l'exercice de ses fonctions, notamment en sa qualité de mandataire, pour faire face aux réclamations formulées à son encontre pendant la validité de la présente garantie.

Cette garantie s'applique, sous condition qu'avant sa date d'effet, le membre du Conseil Syndical n'ait pas eu connaissance d'un fait générateur ou d'un DOMMAGE susceptible d'en entraîner l'application.

Cette garantie cesse dès lors que la copropriété n'est plus gérée par un Syndic professionnel'.

L'article détermine en outre les modalités précises de prise en charge de ces garanties en fonction d'un indice affecté d'un coefficient. Il prévoit une absence de franchise pour les garanties 'RC des tiers, voisins ou locataire, RC-dommage corporels, RC-dommages matériels, RC-dommages immatériels consécutifs, RC-vol, RC-maladie à tiers causé par maladie vides ordures, RC-membres du conseil syndical, RC-pollution accidentelle, RC-Faute inexcusable'. S'agissant de la garantie couvrant les dommages matériels dans le cadre de la responsabilité civile, il est précisément stipulé une prise en charge selon un 'indice x 7600", ' SANS autre LIMITATION pour les dommages résultant d'Incendie, Explosions, Liquides ou d'Incident d'ordre Electrique'.

Il est aussi stipulé qu'à la date de l'émission du contrat, la valeur de l'indice FFB est de 1055,20 et que les montants garanties, les franchises et la cotisation évolueront en fonction de cet indice conformément aux conditions générales.

En outre, il est prévu aux conditions générales:

'5.1. Les exclusions communes à toutes les garanties

Outre les exclusions propres à chacune des garanties, ne sont pas garantis:

o les dommages résultant d'un défaut d'entretien ou de réparation indispensable qui vous incombe, caractérisé et connu de vous, tant avant qu'après sinistre, sauf cas de force majeure;

o les dommages consécutifs à des causes non réparées d'un précédent sinistre ;

o les dommages résultant d'un crime, délit ou infraction que vous aurez volontairement commis ;

o les amendes, y compris celles ayant le caractère de réparations civiles, et les astreintes ainsi que les frais judiciaires qui en sont l'accessoire;

o les obligations que vous aurez acceptées alors qu'elles ne vous incombaient pas en vertu des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur ;

o les dommages subis par les ouvrages ou travaux effectués par l'assuré, y compris ceux dont il serait responsable par application des articles 1792 à 1792-4-3 ou d'une législation étrangère de même nature;

o les dommages découlant de faits ou événements non aléatoires dont vous aviez connaissance lors de la souscription de ce contrat;

o les dégâts causés par des champignons ou des moisissures ainsi que leurs frais de traitement et d'éradication (sauf dans le cadre de la garantie Responsabilité civile dégâts des eaux) ; [...]'.

S'agissant des désordres consécutifs aux manquements reprochés par les époux [I] au syndicat des copropriétaires et au titre desquels ils recherchent la responsabilité civile de ce dernier et la garantie de la société Axa France Iard, la cour observe que selon un premier rapport daté du 23 décembre 2022, dressé par M. [Z], architecte celui-ci y relate :

'Je reviens vers vous dans le cadre des événements survenus le 20 décembre 2022 dernier dans les appartements du 1er et 2ème étage droite de la cage d'escalier D2 de l'immeuble cité en objet.

En effet, un effondrement partiel du bacula plâtre du plancher haut du 2° étage droite s'est produit vers 10h30 le 20 décembre.

Vous m'avez prévenu quelques minutes plus tard, je me suis donc immédiatement rendu sur place (vers 11h15) pour réaliser un constat et mettre en 'uvre les mesures d'urgences qui s'imposaient. Les appartements concernés ont été évacués dès mon arrivée sur place.

Arrivé sur place, voici mes observations :

- Au 2ème étage je suis reçu par Mme [B] (propriétaire) et les ouvriers. Dans la seconde pièce (chambre), les ouvriers arrachaient l'ancienne toile de verre appliquée au plafond dans le cadre de leurs travaux de rénovation. C'est à ce moment, en quelques secondes, que le bacula plâtre devant la fenêtre, s'est effondré sur environ 4 m2.

A mon arrivée, le plafond en plâtre est au sol (sol en tomettes d'origines, non protégées), laissant apparaître le solivage du plancher haut.

Ce solivage est particulièrement dégradé avec la présence de champignons et de pourriture cubique, ces observations traduisent la présence d'humidité (ancienne ou encore présente). Je n'ai pas pu relever au testeur, le taux d'humidité. L'ensemble du solivage de cette zone est à remplacer, de même, les entrevous sont à reprendre.

Dans le reste de la pièce, le bascula est encore présent. La première pièce (cuisine / pièce à vivre), n'est pas concernée.[...]

Au 1er étage chez Mme [I], à mon arrivée, une solive était au sol, une deuxième était pendante au-dessus du lit. Par chance, la locataire était dans l'autre pièce au moment de l'incident. Quelques fissures sont visibles et plusieurs assemblages semblent faibles.

Il semblerait que sous l'impact provoqué par la chute du bascula sur le plancher bas du 2ème étage, ces deux solives au plancher haut du 1er étage se soient déchaussées après éclatement.

Cela traduit manifestement plusieurs éléments, le plancher est probablement sous dimensionné et certains assemblages devaient être insuffisants. En revanche, je n'ai pas observé d'humidité dans cette zone.[...]

Observations et conclusions :

Désormais, l'étaiement d'urgence est en place et assure la stabilité des ouvrages et la sécurité dans les lots concernés.

- Le logement du 3ème étage peut de nouveau être occupé.

- Le logement du 2ème étage, en travaux, est inoccupé.

- Le logement du 1er étage est fortement impacté par l'étaiement en place qui rend inutilisable la chambre.

- Le local du RDC est occupé par la réserve de la boulangerie. L'étaiement en place est contraignant mais il permet néanmoins son exploitation.

J'attire votre attention sur le fait que cet événement met en lumière le très mauvais état du mur de droite de la trémie de l'escalier au 1er étage. A ce titre, la locataire du 1er étage évoque une évolution de la dégradation de ce mur, il nous semble désormais indispensable d'envisager son renforcement.

Pour donner suite à ce dossier, nous avons rencontré M. [V] de la société Pharmabois sur place, le 21/12/22 vers 10 h pour chiffrer les premières mesures. [...]

Remarque : Concernant la dégradation du solivage du plancher haut du 2ème étage, il apparaît évident que ce sinistre est la conséquence d'humidité. Je me permets de vous rappeler que dès 2011, nous avions alerté la copropriété sur un désordre dans l'appartement Solivaret (3ème étage droite). A l'époque il était question d'une évacuation en plomb encastrée vétuste et fuyarde. Bien que l'appartement ait fait l'objet de travaux ces dernières années, la fuite constatée à l'époque a pu entraîner ce sinistre.

Important : Fort de la connaissance que nous avons de cette copropriété et des nombreux problèmes ponctuels de structure auxquels nous avons été confrontés, il nous semble pertinent d'envisager une étude complète et globale des structures de l'immeuble.

A minima, cette étude est à prévoir pour les appartements de droite de la cage d'escalier D2'.

Dans le compte-rendu de visite des lieux du 21 décembre 2022 qu'il a établi, concernant l'origine de la rupture du plancher haut du niveau 1 survenue la veille, M. [J], architecte, expert inscrit sur la liste de cette cour d'appel indique :

' Le 20/12/2022 dans la matinée, au cours de travaux de rénovation effectués dans la chambre de l'appartement droite du niveau 2 (bâtiment D / escalier 2), l'enlèvement de la toile de verre peinte fixée en sous face du plafond a généré la chute d'une surface de l'ordre de 2,5m2 du bacula. Pour mémoire, le bacula, lattis de petits bois, cloué en sous face du solivage, est destiné à être enduit de plâtre afin de constituer la protection au feu du solivage bois; il fait donc partie intégrante du plancher.

Etant donné :

- l'absence de ventilation des planchers bois (probablement supprimée au cours des ravalements de la second moitié du XXème siècle, la proximité de la façade générant des phénomènes de parois froides avec l'apparition de condensation,

- les dégâts des eaux divers et variés suite à la création de pièces humides (cuisine, salle de bain)

Ces deux phénomènes générant donc un taux d'humidité suffisant d'une part la corrosion des clous,

et d'autre part, combinés avec l'obscurité, ont permis la colonisation d'insectes xylophages et de champignons attaquant les solives en bois et diminuant d'autant l'adhérence des clous, d'où la chute du bacula.[...]

Cet accident s'avère constituer un "sondage" permettant de se rendre compte d'un probable sous dimensionnement des solives bois et surtout de leur état sanitaire. Il s'avère donc nécessaire de purger l'intégralité du bacula de la pièce afin de permettre à ingénieur structures de faire son étude et ses calculs pour définir les préconisations nécessaires de renforcement afin d'obtenir la résistance exigée pour les logements (15 kg/m2)-

Cet audit-diagnostic structurel est à faire sur l'ensemble des planchers des bâtiments de cette parcelle, ayant été édifiés entre 1775 et 1810, donc à la fin du XVIllème siècle - début du XIXème siècle. Depuis plus de deux siècles, ces planchers bois ont subi de multiples dégâts des eaux, l'apparition de la condensation, par la suppression de leur ventilation. Parallèlement, la suppression de la respiration des pans de bois des façades par la mise 'uvre d'enduit en ciment à la place du mortier de chaux d'origine, génère également des désordres. Ces structures de pans de bois et de planchers en bois présentent de nos jours des signes d'affaiblissement et de sénescence, nécessitant des renforcements.[...]

Les murs de ce bâtiment sont en structures bois: les vicissitudes dont ils ont fait l'objet depuis deux siècles (surcharges, dégâts des eaux etc...) ont diminué leurs caractéristiques mécaniques générant des affaissements et mouvements.

Comme pour les planchers de ce bâtiment, il convient de faire un audit-diagnostic structurel des murs à ossature bois, avec purge préalable et pose de fissuromètres pour vérifier l'activité des fissures. [...]'.

Enfin, au terme de son rapport établi en date du 11 janvier 2023, la direction des transports et de la protection du public de la préfecture de police décrit la situation comme constitutive d'un risque alors que le bâtiment n'offre pas les garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité des occupants et des tiers au sens de l'article L.511-2 1° du code de construction et de l'habitation et propose les prescriptions suivantes pour y remédier :

'PRESCRIPTIONS - ville de [Localité 7]

Au titre des risques présentés par le bâtiment n'offrant pas les garanties de solidité nécessaires (L.2213-24 du CGCT et L.511-2 1° du CCH) :

Concernant le mauvais du mur d'échiffre de l'escalier du bâtiment D, escalier 2:

1. Assurer la parfaite stabilité du mur d'échiffre droit de l'escalier reliant le RDC au 1er étage. Procéder à tous travaux définitifs de renforcement ou de remplacement des éléments de structure bois potentiellement affaiblis, tels que sablières, poutres, solives, ...

Concernant le mauvais état des planchers hauts des logements du bâtiment D, escalier 2, 1er et 2ème étage, portes droites :

2. Assurer la parfaite stabilité de l'ensemble des planchers hauts des logements précités.

3. Faire procéder par un homme de l'art à la vérification régulière de l'ensemble des étaiements en place et compléter l'étaiement au droit de la poutre déformée et légèrement affaissée au droit du meuble de cuisine dans le logement du 1er étage.

En cas d'évolution significative, prendre sans délai les mesures de sécurité nécessaires en vue de conjurer l'aggravation des désordres.

Déposer les éléments de sous-face plâtre qui n'adhèrent plus à leur support.

Procéder à tous travaux de réparation ou de remplacement des éléments de structure endommagés qui ne remplissent plus leur fonction, tels que sablière, poutres, solives et chevêtres bois et reconstituer à la suite la sous-face de façon à restituer la cohésion de l'ensemble.

Exécuter tous travaux annexes qui, à titre de complément direct de ceux prescrits ci-dessus, s'avéreraient nécessaires et sans l'exécution desquels ces derniers

resteraient inefficaces afin d'assurer de manière pérenne la levée de la situation de risque bâtimentaire.

Il résulte de ce qui précède que si la condamnation du syndicat des copropriétaires est fondée sur une responsabilité de plein droit qui seule s'impose à l'évidence et ne fait d'ailleurs pas l'objet de contestation, il en est autrement s'agissant de la demande de garantie dirigée contre l'assureur.

L'appréciation du bien fondé de celle-ci suppose, en effet, de déterminer si les conditions de sa mise en 'uvre sont réunies et ce, en se livrant à une analyse approfondie des stipulations contractuelles applicables, laquelle ne relève manifestement pas ici du juge des référés mais de celle du juge du fond.

En effet, étant notamment relevé que M. [Z] fait état dans son rapport précité 'de nombreux problèmes ponctuels de structure' dont le syndicat des copropriétaires avait été informé avant la survenue du sinistre et que les professionnels appelés à examiner l'immeuble évoquent un état de vétusté lié à l'obsolescence de la structure en bois, il n'est pas acquis avec l'évidence requise en référé que la mobilisation de la garantie de l'assureur du syndicat des copropriétaires puisse être retenue, en présence d'une contestation qui apparaît sérieuse compte tenu des éléments en débat quant à l'état du bien assuré, partant de l'absence possible d'aléa et au caractère non accidentel du sinistre.

Dès lors, la décision entreprise sera infirmée de ce chef et il sera dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes des époux [I] dirigées contre la société Axa France Iard.

Concernant la provision à valoir sur les honoraires de l'architecte [J], à hauteur de 1.170 euros, allouée aux époux [I], il convient de constater qu'aucune critique n'est élevée par les époux [I] et par le syndicat des copropriétaires. Alors que la décision entreprise a mis la provision à la charge de la société Axa France Iard et du syndicat des copropriétaires in solidum, elle sera infirmée de ce chef, seul ce dernier étant condamné à ce titre.

Concernant le montant de la provision au titre des loyers, les époux [I] poursuivent l'infirmation de l'ordonnance du juge des référés au motif que celui-ci n'a pas pris en compte partie de leur préjudice. Ils précisent que l'appartement a été inhabitable du 20 décembre 2022, date de la chute de la poutre, au 31 mai 2025, date de la fin des travaux et qu'ils ont pu remettre leur bien en location à compter du 1er juin 2025. En fonction du montant du loyer mensuel de 1.247,68 euros (Soit 1.300 euros charges comprises), ils demandent à ce titre une provision de 36.182,72 euros. Cependant, comme le fait valoir le syndicat des copropriétaires, qui entend voir confirmer la décision entreprise de ce chef, il résulte du compte rendu n°21 du 5 mai 2025 que les travaux du premier étage étaient terminés au 30 avril 2025 et non pas au 31 mai 2025. Dès lors, au vu des pièces en débat, la cour infirmera la décision entreprise de ce chef et fixera le montant de la provision due à ce titre à hauteur de 34.935,04 euros (1247,68 euros x 28 mois), somme au paiement de laquelle le syndicat des copropriétaires sera condamné.

Concernant la provision au titre des travaux de menuiserie, comme le fait valoir le syndicat des copropriétaires, au vu de la seule pièce justificative produite par les époux [I] à ce titre, il ne peut être retenu avec l'évidence requise en référé que ceux-ci ont suffisamment démontré l'existence du préjudice qu'ils allèguent de ce chef. En effet, la facture ainsi produite indique sommairement qu'elle correspond à des travaux de menuiserie et pose à hauteur de 500 euros et à des matériaux (bois, quincaillerie) pour 20 euros, sans qu'il en résulte l'existence d'un lien causal permettant de la rattacher à la responsabilité civile recherchée du syndicat des copropriétaires. Par voie de conséquence, il sera dit n'y avoir lieu à référé sur cette demande.

Sur la demande de garantie formée par le syndicat des copropriétaires contre la société Axa France Iard

Pour les motifs précédemment développés, il sera dit n'y avoir lieu à référé sur la demande formée par le syndicat des copropriétaires de voir condamner la société Axa France Iard à le garantir de toutes les condamnations prononcées à son encontre sur la demande des époux [I], la décision entreprise étant infirmée de ce chef.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Il sera rappelé que la définition des dépens afférents aux instances, actes et procédures d'exécution résulte des dispositions de l'article 695 du code de procédure civile, sans qu'il appartienne au juge de la modifier ni d'y ajouter, notamment s'agissant d'y inclure tel ou tel frais.

En application de l'article 696 alinéa 1er du même code, de principe, les dépens doivent être mis à la charge de la partie perdante.

Et, en application de l'article 700 du même code, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie, la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Compte tenu du sens de l'arrêt, les dispositions de la décision entreprise relatives aux frais de procédure seront aussi infirmées.

Partie perdante, le syndicat des copropriétaires sera condamné aux dépens de première instance et d'appel, avec faculté conférée au profit des avocats en ayant fait la demande du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l'avance sans avoir reçu provision conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, le syndicat des copropriétaires sera condamné à payer à Mme [I] la somme de 3.500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Il y a lieu de rejeter les demandes du syndicat des copropriétaires sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions soumises à la cour ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes des époux [I] dirigées contre la société Axa France Iard ;

Déclare recevable la demande provisionnelle formée par les époux [I] au titre des travaux de menuiserie, mais dit n'y avoir lieu à référé de ce chef ;

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] à [Localité 8] à payer aux époux [I] à titre provisionnel les sommes de 1.170 euros au titre des honoraires de l'architecte [J] et de 34.935,04 euros au titre de la perte de loyer ;

Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de garantie formée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] à [Localité 8] contre la société Axa France Iard;

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] à [Localité 8] aux dépens de première instance et d'appel avec faculté conférée au profit des avocats en ayant fait la demande du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l'avance sans avoir reçu provision conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] à [Localité 8] à payer à Mme [I] la somme de trois mille cinq cents euros (3.500 €) au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette la demande du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] à [Localité 8] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette les demandes plus amples ou contraires.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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