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Décisions

CA Bastia, ch. civ. sect. 2, 24 septembre 2025, n° 22/00446

BASTIA

Arrêt

Autre

CA Bastia n° 22/00446

24 septembre 2025

Chambre civile

Section 2

ARRÊT N°

du

24 SEPTEMBRE 2025

N° RG 22/446

N° Portalis DBVE-V-B7G-CEKK VL-C

Décision déférée à la cour : jugement du tribunal de commerce de Bastia, décision attaquée du 24 mai 2021, enregistrée sous le n° 2022000577

[X]

C/

S.A.R.L. CAP 200

Copies exécutoires délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU

VINGT-QUATRE SEPTEMBRE

DEUX-MILLE-VINGT-CINQ

APPELANTE :

Mme [F] [X]

née le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 6] (Haute-Corse)

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Jean Pierre SEFFAR, avocat au barreau de BASTIA

INTIMÉE :

S.A.R.L. CAP 200

[Adresse 7]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Margaux PIERREDON, avocate au barreau de BASTIA et Me Fabrice ORLANDI de la SCP ORLANDI-MAILLARD&ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 mai 2025, devant Valérie LEBRETON, présidente de chambre, chargée du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Valérie LEBRETON, présidente de chambre

Thierry BRUNET, président de chambre

Guillaume DESGENS, conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS :

Vykhanda CHENG

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 septembre 2025

MINISTÈRE PUBLIC :

Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée le 14 octobre 2022 et qui a fait connaître son avis, dont les parties ont pu prendre connaissance.

ARRÊT :

Contradictoire.

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Valérie LEBRETON, présidente de chambre, et Mathieu ASSIOMA, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DES FAITS :

Par jugement du 24 mai 2022, le tribunal de commerce de Bastia a rejeté la demande [F] [X] divorcée [K] de constater l'état de cessation des paiements de la société Cap 200, a dit les dépens à la chage du demandeur, a liquidé les dépens à recouvrer à la somme de 68,77 euros.

Par déclaration au greffe du 5 juillet 2022, madame [X] a sollicité l'infirmation de la décision, en ce que le tribunal de commerce de Bastia a rejeté sa demande [F] [X] de constater l'état de cessation des paiements de la société Cap 200.

Dans ses dernières conclusions notifiées par Rpva le 20 février 2025, l'appelante expose qu'au titre du bail du 12 juin 1996, elle est créancière d'une somme de 16 582,20 euros au titre des loyers commerciaux et 81 698,63 euros au titre des avances et qu'elle a mis en demeure la société Cap 200 de lui régler cette somme, en vain.

Elle ajoute qu'elle a fait délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire le 15 octobre 2020 pour les loyers.

S'agissant des avances, elle indique être créancière de la société au nom de feu son père pour un montant de 40 000 euros et en son nom pour un montant de 41 698,63 euros, avances comptabilisées dans le grand livre, avances qui sont certaines et exigibles.

Elle ajoute que l'examen des comptes sociaux de la société montre que l'actif disponible est de 147 178 euros pour un passif exigible de 478 578 euros, la société est donc dans l'incapacité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, elle est en état de cessation des paiements. Elle sollicite la condamnation de la société Cap 200 à produire le grand livre fournisseurs au 30 novembre 2022, le grand livre clients et le grand livre général, ordonner le sursis à statuer dans l'attente de l'arrêt à intervenir pour fixation de la créance.

Elle sollicite de constater l'état de cessation des paiements en cas de rejet de la demande de sursis à statuer, prononcer le redressement judiciaire et condamner la société Cap 200 à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions du 13 mars 2025, l'intimée sollicite IN LIMINIS LITIS de débouter Madame [F] [J] de sa demande aux fins de sursis à statuer, et la juger infondée, pour les raisons décrites aux motifs ;

SUR L'APPEL INTERJETÉ :

CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Bastia en date du 24 mai 2022, notamment en ce qu'il a :

' DEBOUTÉ Madame [F] [J] de sa demande de constatation d'état de cessation de paiement et d'ouverture de procédure de redressement judiciaire/liquidation judiciaire à l'encontre de la S.A.R.L. CAP 200.

INFIRMER le Jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Bastia en date du 24 mai 2022, notamment en ce qu'il a : DEBOUTE la SARL CAP 200 de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive à l'encontre de Madame [F] [G] à hauteur de 15.000 €.

OMIS de statuer sur la demande de dommages-intérêts présentée par la SARL CAP 200 pour procédure abusive à l'encontre de Madame [F] [G] à hauteur de 15.000 €.

En conséquence, et statuant de nouveau :

JUGER que la prétendue créance au titre des loyers commerciaux n'est pas une créance certaine, liquide et exigible ;

JUGER que la prétendue créance au titre des avances consenties n'est pas une créance certaine, liquide et exigible ;

JUGER que la S.A.R.L. CAP 200 fait état d'un actif disponible de 64 090 euros et d'un passif exigible de 9.200 euros ;

DÉBOUTER Madame [F] [J] de sa demande de constatation d'état de cessation de paiement et d'ouverture de procédure de redressement judiciaire/ liquidation judiciaire à l'encontre de la S.A.R.L. CAP 200 ;

CONDAMNER Madame [F] [J] à verser la somme de 15 000 € à la S.A.R.L. CAP200 à titre de condamnation pour procédure abusive ;

CONDAMNER Madame [F] [J] au paiement d'une amende civile pour procédure abusive et dilatoire à hauteur de la somme de 5.000 € ;

DÉBOUTER Madame [F] [J] de sa demande de communication de pièces et la juger infondée, pour les raisons décrites aux motifs ;

CONDAMNER Madame [F] [J] au paiement de la somme de 3 000 € à la S.A.R.L. CAP200 par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile d'exécution, ainsi qu'aux entiers dépens '.

Le ministère public s'en est rapporté le 14 octobre 2022.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 janvier 2025 pour une clôture différée au 4 avril 2025.

SUR CE :

Sur la demande de sursis à statuer :

Selon l'article 377 du code de procédure civile, en dehors des cas prévus par la loi, l'instance est suspendue par la décision de sursis à statuer.

Il est acquis que les juges apprécient souverainement l'opportunité d'un sursis à statuer.

La cour relève qu'en l'espèce, il n'est pas d'une bonne administration de la justice d'ordonner un sursis à statuer, la question de l'existence ou non d'un état de cessation des paiements n'est pas conditionnée par la décision statuant sur l'appel du jugement du 23 mai 2024.

En conséquence, la demande de sursis à statuer est rejetée.

Sur la demande de communication de pièces :

La cour relève que le conseiller à la mise en état a déjà été saisi d'une demande de communication de pièces et que par décision du 12 juin 2024, l'appelante a été déboutée de cette demande.

La cour constate qu'elle dispose pour statuer des situations comptables du 30 novembre 2021 au 21 mars 2022, ainsi que du bilan actif/passif du 1er décembre 2020 au 30 novembre 2021, de la balance générale, des balances auxiliaires, du gtand livre général et des grands livres auxiliaires pour la même date et que l'expert comptable a attesté de l'impossibilité d'établir une situation comptable à la date du 7 juin 2023, les comptes annuels clos au 30 novembre 2022 ont été définitivement établis et l'exercice clôturé.

La cour ajoute que suite à l'ordonnance du conseiller à la mise en état du 9 mai 2023, la société a communiqué les pièces demandées, à l'exception de la situation comptable 2021/2022, pour laquelle, une attestation de l'expert comptable a été produite.

Selon l'article 146 du code de procédure civile, en aucun cas, une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve.

La cour relève qu'en l'espèce, madame [X] sollicite à nouveau des documents comptables, alors que des documents comptables ont été communiqués, lesquels suffisent à la cour pour apprécier les demandes.

En outre, la cour rappelle qu'il est acquis qu'il appartient à madame [X] d'apporter la preuve de ce qu'elle allègue, or manifestement, la cour considère cette demande inutile et de surcroît infondée, puisqu'elle n'a que pour seul but de suppléer la carence de madame [X] dans l'administration de la preuve.

Cette demande est rejetée.

Sur le fond :

Sur l'état de cessation des paiements :

L'appelante indique que l'examen des comptes sociaux déposés au greffe permet d'affirmer que l'actif disponible est de 147 178 et que le passif exigible est de 478 578 euros, elle conclut que la société cap 200 est en etat de cessation des paiements.

L'intimée conteste la cessation des paiements, indiquant que la créance au titre des loyers commerciaux est contestée, de même que les avances consenties qui sont des créances litigieuses, il n'y a pas de cessation des paiements.

Selon l'article L 631-1 du code de commerce, il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur, qui dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible, c'est-à-dire échu, avec son actif disponible est en état de cessation des paiements.

Il est acquis que l'état de cessation des paiements est caractérisé si le débiteur est dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible.

Il est constant que les créances litigieuses sont exclues pour déterminer le passif exigible.

La cour constate en l'espèce que madame [X] allègue d'une créance de loyers commerciaux qui est contestée, au regard du courrier de contestation du 5 novembre 2020.

La cour constate que sept personnes ont attesté et indiqué que [R] [X] n'avait jamais voulu que sa soeur paye le loyer de la station (pièces14 et 18 de l'intimée).

La cour observe qu'une procédure de contestation du nantissement est actuellement pendante devant le juge de l'exécution.

La cour relève que cette créance alléguée de loyers n'est ni certaine, ni liquide ni exigible, étant une créance litigieuse et contestée.

S'agissant de la créance au titre des avances consenties, la cour constate qu'elle dispose d'un jugement appelé qui a débouté l'appelante de ses demandes au titre de ces avances.

La cour dispose donc bien d'un jugement de débouté.

La cour constate qu'elle n'a pas à attendre les résultats d'une instance en appel pour déterminer si un état de cessation des paiements existe, ce qui a eu pour conséquence le rejet de la demande de sursis à statuer.

La cour ajoute qu'il est constant que ne peut être incluse dans le passif exigible une dette incertaine comme faisant l'objet d'un recours et que tel est le cas en l'espèce pour les créances alléguées au titre des loyers et des avances consenties.

La cour, en matière de cessation des paiement doit apprécier si le débiteur est dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible, c'est-à-dire échu, avec son actif disponible.

La cour relève qu'il est acquis que la charge de prouver que le débiteur est dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible incombe au créancier qui demande l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire.

La cour constate qu'en l'espèce, l'appelante se fonde sur les grands livres pour affirmer que depuis 6 exercices comptables, ainsi que sur le bilan de l'année 2019/2020, pour affirmer que la société Cap 200 est en état de cessation des paiements.

Or, la cour relève qu'il est constant que la cessation des paiements est appréciée au jour où statue la juridiction, même en appel.

Ainsi, la cour constate qu'elle dispose d'une attestation d'un expert comptable en date du 22 mars 2022, qui indique qu'à cette date, la société Cap 200 n'est pas en état de cessation des paiements, l'actif disponible étant de 64 090 et le paxuf exigible étant de 9200 euros, soit le passif échu.

L'expert comptable indique qu'au jour de l'attestation, l'actif disponible de la société lui permet de faire face au passif exigible.

La cour relève que cette attestation est contestée comme ne répondant pas aux critères de l'article 202 du code de procédure civile.

Selon cet article, l'attestation contient la relation des faits auxquels son auteur a assisté ou qu'il a personnellement constatés, elle mentionneles noms, prénoms, date et lieu de naissance.

La cour relève qu'il appartient au juge du fond d'apprécier souverainement si l'attestation non conforme présente les garanties suffisantes pour emporter sa conviction.

En l'espèce, la cour considère que l'absence de respect du formalisme n'est pas un obstacle, que cette attestation émanant d'un expert comptable mandaté présente des garanties suffisantes et emporte sa conviction.

En conséquence, la cour prend en compte cette attestation et constate que cette attestation, qui est critiquée mais qui n'a pas fait l'objet d'une plainte pour faux est valable.

Les éléments produits dans cette attestation montrent bien, outre les éléments comptables produits aux débats que la société Cap 200 n'est pas en état de cessation des paiements.

La cour confirme donc la décision et déboute madame [X] de toutes ses demandes.

Sur l'appel incident et la demande au titre de la procédure abusive :

La société Cap 200 sollicite une somme de 5 000 euros au titre de l'amende civile pour procédure abusive et une somme de 15 000 euros de dommages intérêts pour procédure abusive.

Selon l'article 463 du code de procédure civile,lorsque la juridiction a omis de statuer sur une chef de demande, elle peut compléter son jugement.

Selon l'article 32-1 du code de procédure civile, celui qui agit en justice de namière dilatoire ou abusive peut être condamnée à une amende civile sans préjudice des dommages et intérêts.

La cour relève que la société Cap 200 avait demandé une somme de 15 000 euros en première instance au titre de la procédure abusive, demande à laquelle il n'a pas été répondu.

La cour relève que la société Cap 200 n'a pas rapporté la preuve de l'existence d'un abus du droit d'agir en justice de madame [X], laquelle n'a fait qu'exercer les voies de droit qui lui étaient offertes sans en abuser.

La société Cap sud sera donc déboutée de sa demande d'amende civile et de sa demande de dommages et intérêts au titre de la procédure abusive..

L'équité commande que la décision de première instance au titre de l'article 700 du code de procédure civile soit confirmée.

De même, la condamnation de madame [X] qui a succombé aux dépens de première instance est confirmée.

En cause d'appel, l'équité ne commande que [F] [X] soit condamnée au paiement d'une somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

[F] [X] est également condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

REJETTE la demande de sursis à statuer de [F] [X]

REJETTE la demande de communication de pièces de [F] [X]

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Bastia du 24 mai 2022

Y AJOUTANT

DÉBOUTE [F] [X] de toutes ses demandes

DÉBOUTE la société Cap 200 de sa demande d'amende civile et de dommages et intérêts au titre de la procédure abusive

CONDAMNE [F] [X] à payer à la société Cap 200 la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel

CONDAMNE [F] [X] aux entiers dépens d'appel

LE GREFFIER

LA PRÉSIDENTE

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