CA Lyon, 8e ch., 24 septembre 2025, n° 20/07256
LYON
Arrêt
Autre
N° RG 20/07256 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NJWW
Décision du Tribunal de Commerce de Lyon au fond du 30 novembre 2020
RG : 2018j01965
S.A. FERBECK CHEMINEES INDUSTRIELLES
C/
S.A. LAB SA
S.A. PLASTICON FRANCE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRÊT DU 24 Septembre 2025
APPELANTE :
FERBECK CHEMINEES INDUSTRIELLES, société par actions simplifiée au capital de 201.250 € immatriculée au RCS de Versailles sous le numéro 519 567 077, ayant son siège social [Adresse 2] à [Localité 5], représentée par son représentant légal domicilié en cette qualité au dit siège
Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938
Ayant pour avocat plaidant Me Natacha SINELNIKOFF, avocat au barreau de LYON
INTIMÉES :
La société LAB, société par actions simplifiée au capital de 5.392.160,00 euros, inscrite au Registre du commerce et des sociétés de LYON sous le numéro 428 679 385, dont le siège social est [Adresse 1], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Vincent DE FOURCROY de la SELARL DE FOURCROY AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 1102
Ayant pour avocat plaidant Me Rémi HANACHOWICZ, Associé de la SCP O. RENAULT & ASSOCIES, Enseigne LAMARTINE CONSEIL, avocat au barreau de LYON
La société PLASTICON France SA, société anonyme immatriculée au RCS de LA ROCHE-SUR-YON sous le numéro 546 150 053 ayant son siège social [Adresse 7] à [Localité 3], représentée par son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Jacques DUFOUR de la SELARL DUFOUR & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 74
Ayant pour avocat plaidant Me Philippe MATHURIN de la SELARL ALERION, avocat au barreau de PARIS
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Date de clôture de l'instruction : 13 Septembre 2023
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 16 Avril 2025
Date de mise à disposition : 24 Septembre 2025
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Bénédicte BOISSELET, président
- Véronique DRAHI, conseiller
- Nathalie LAURENT, conseiller
assistés pendant les débats de William BOUKADIA, greffier
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Bénédicte BOISSELET, président, et par William BOUKADIA, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSÉ DU LITIGE
Dans le cadre de la construction d'une centrale thermique à charbon sur le site de [Localité 4] en Guadeloupe, la société Caraïbes Énergie, devenue Albioma Caraïbes, maître de l'ouvrage, a, suivant marché de travaux du 4 juillet 2008, confié à la SAS Lab le lot 12 «'traitement des fumées'», soit les études, la fourniture, le montage, les essais et la mise en service d'une installation de traitement de désulfuration des fumées et de ses auxiliaires.
Suivant «'bon de commande'» du 26 septembre 2008, la société Lab a confié à la SA Ferbeck Cheminées Industrielles d'une part, l'étude, la fourniture, la fabrication et la mise à disposition «'ex-works'» de la cheminée autoportante destinée à cette installation, et d'autre part, une assistance au montage de la cheminée autoportante «'par un superviseur du vendeur'», le tout au prix global de 300'000 € HT.
Suivant document intitulé «'contrat de sous-traitance'» du 28 octobre 2008, la société Ferbeck Cheminées Industrielles a confié à la SA Plasticon France la réalisation du fût intérieur en SVR (stratifié verre résine) de la cheminée au prix global et forfaitaire de 93'000 € HT.
La société Plasticon France s'est fournie en résine auprès de la société de droit espagnol Ashland Chemical Hispana SL.
Le 30 mars 2010, les sociétés Lab et Ferbeck ont signé un procès-verbal de réception de travaux, soit un constat provisoire de fin de montage, avec des réserves sans lien avec le présent litige.
Le 6 avril 2011, la société Caraïbes Energie et la société Lab ont signé un procès-verbal de mise en service intervenue le 8 mars 2011, date du transfert de propriété des ouvrages réalisés.
***
Par lettre recommandée du 1er août 2013, la société Albioma Caraïbes a signalé à la société Lab l'apparition de «'dégradations importantes sur la gaine de la cheminée principale et sur le by-pass dont la gravité pourrait affecter l'intégrité mécanique des équipements'», lui demandant d'y remédier dans les plus brefs délais.
Exposant que ses démarches amiables en vue de partager le coût des réparations nécessaires étaient restées vaines, la société Lab a attrait la société Ferbeck en référé-expertise et, après l'appel en cause de la société Plasticon par la société Ferbeck, le président du tribunal de commerce de Lyon a, par ordonnance du 31 mars 2014, désigné M. [E] [S] en qualité d'expert.
La société Plasticon a saisi le juge des référés afin, d'une part, que les opérations d'expertise soient rendues communes et opposables aux sociétés Hashland et Albioma Caraïbes, et d'autre part, que la mission de l'expert soit étendue aux conditions d'exploitation de la centrale. La cour d'appel de Lyon a, par un arrêt du 3 février 2015, infirmé la décision du juge consulaire qui avait rejeté ces demandes.
Par ordonnance du 7 juin 2017, le juge chargé du contrôle des expertises du tribunal de commerce de Lyon a ordonné à la société Albioma Caraïbes de communiquer à l'expert les relevés de températures des fumées introduites dans la cheminée de la centrale à charbon depuis sa mise en service jusqu'au 1er janvier 2013 et depuis la réparation de la cheminée en 2015. La société Albioma Caraïbes n'a jamais communiqué lesdits relevés.
L'expert judiciaire, qui s'était adjoint les services du Centre Technique des Industries Mécaniques (CETIM) de [Localité 6] comme sapiteur, a déposé son rapport le 22 juin 2018 aux termes duquel il conclut que les «'chocs thermiques envisagés ne sont pas à l'origine des désordres constatés'» qui résultent de «'défauts de conception et de réalisation du fût intérieur en SVR'», tenant plus précisément à une teneur en fibres de verre et à des taux de fibres incorrects.
Au vu de ce rapport et par exploit du 13 décembre 2018, la société Lab a fait assigner au fond la société Ferbeck, laquelle a, par exploit du 1er février 2019, fait appeler la société Plasticon en intervention forcée.
Par jugement du 30 novembre 2020, le Tribunal de commerce de Lyon a statué ainsi':
Prend acte de la jonction des instances enrôlées sous les numéros 2018J1965 et 2019J247 ordonnée par jugement du tribunal de commerce de Lyon en date du 21 février 2019,
Déboute la société Lab SA de sa demande d'homologation du rapport d'expertise déposé le 22 juin 2018,
Déboute la société Ferbeck Cheminées Industrielles de l'ensemble de ses demandes,
Juge que la société Ferbeck Cheminées Industrielles a manqué à son obligation de délivrance conforme, la cheminée fournie par elle ne répondant pas aux spécifications convenues,
Condamne la société Ferbeck Cheminées Industrielles à payer à la société Lab SA la somme de 513'946 € HT en réparation du préjudice subi par cette dernière suite aux désordres constatés sur la cheminée construite par elle,
Condamne la société Ferbeck Cheminées Industrielles à payer à la société Lab SA la somme de 50'000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Ferbeck Cheminées Industrielles aux dépens de l'instance, y compris les frais d'expert et d'expertises demandées par le tribunal,
Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement,
Rejette toute demande plus ample ou contraire.
Le tribunal a retenu en substance':
Sur l'homologation du rapport d'expertise': que beaucoup d'éléments sont manquants pour permettre une analyse approfondie de la situation mais qu'en tout état de cause, il n'est question d'homologuer un rapport d'expertise';
Sur la responsabilité de Plasticon':
Que le contrat passé entre Ferbeck et Plasticon, daté du 28 octobre 2008 et intitulé «'contrat de sous-traitance'», est en fait un contrat de fourniture d'un produit spécifique, fabriqué à façon et sur mesure selon un cahier des charges et livré dans un atelier appartenant à Ferbeck au Portugal'; que dès lors, Ferbeck reste responsable de la mise en 'uvre de ce fût, à savoir son transport, son assemblage et sa mise en production';
Que l'article 10 de ce contrat mentionne une garantie de parfait achèvement de 24 mois après réception et l'accusé de réception du bon de commande, signé par Ferbeck, précise que la garantie est d'un an contre tout vice de fabrication'; que les désordres signalés par Albioma datent du 1er août 2013, soit plus de deux ans après la mise en production du 6 avril 2011'; que dès lors, la responsabilité de la société Plasticon n'est pas engagée car la garantie convenue est expirée ;
Sur la responsabilité de Ferbeck':
Que la société Ferbeck est sous-traitant de Lab et elle a engagé sa responsabilité contractuelle du fait des dommages après réception, sa faute étant prouvée par le rapport d'expertise qui a, sans ambiguïté, mis en évidence les carences de la cheminée fournie et installée';
Que la société Albioma a utilisé la cheminée conformément à l'usage qui devait en être fait, laquelle cheminée ne répondait pas aux exigences normalement attendues pour un tel usage ; que la société Ferbeck a manqué à son obligation de délivrance conforme';
Sur le montant des indemnités': que les préjudices ont été analysés par l'expert et le tribunal retient comme dûment justifiés divers postes ; qu'en revanche, le coût du temps passé par le personnel de la société Lab constitue des charges fixes qui n'entrent pas dans les préjudices ; qu'il n'y a pas lieu non plus de retenir la quote-part de frais généraux sur l'administration et le traitement des factures.
Par déclaration en date du 21 décembre 2020, la SA Ferbeck Cheminées Industrielles a relevé appel de cette décision, à l'encontre des sociétés Lab et Plasticon France, en tous ses chefs.
Par ordonnance du 1er décembre 2021, le conseiller de la mise en état a déclaré la société Plasticon France, intimée, irrecevable à solliciter la radiation de l'affaire dans la mesure où elle n'est pas le bénéficiaire des condamnations non-exécutées.
Parallèlement et par déclaration en date du 10 février 2021, la SA Lab a relevé appel de cette décision, à l'encontre des sociétés Ferbeck Cheminées Industrielles et Pasticon France, en tous ses chefs.
Par ordonnance du 12 septembre 2022, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des procédures.
***
Aux termes de ses écritures remises au greffe par voie électronique le 4 février 2022 (conclusions d'appel récapitulatives après jonction), la SAS Lab demande à la cour':
Dire l'appel recevable et bien fondé,
Infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau :
A titre principal
Juger que la société Ferbeck a manqué à son obligation de délivrance conforme, le tube de cheminée en SVR fourni par elle ne répondant pas aux spécifications convenues,
Constater que les désordres trouvent leur origine dans un défaut de réalisation du tube en SVR fabriqué par la société Plasticon pour le compte de la société Ferbeck,
Juger que la société Plasticon a manqué à ses obligations contractuelles à l'égard de la société Ferbeck et que ce manquement caractérise une faute à l'encontre de la société Lab pour laquelle il en est directement découlé un important préjudice,
Par conséquent,
Condamner in solidum les sociétés Ferbeck et Plasticon à verser à la société Lab la somme de 915'551 € en réparation de son préjudice, se décomposant comme suit :
Matériels et travaux : 445'765 €
Coûts de prestations : 13'527 €
Frais de déplacement : 29'048 €
Coût des expertises comprenant les frais d'expertise supportés par Lab et les frais d'expertise judiciaire : 141'501 €
Temps passés par le personnel de la société Lab : 173'733 €
Quote-part de frais généraux 15% sur les achats : 111'977 €
Condamner in solidum les sociétés Ferbeck et Plasticon à verser à la société Lab la somme de 116'670 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais d'avocats en première instance et dans le cadre de la présente procédure d'appel, outre les entiers dépens,
Si par extraordinaire la Cour devait considérer qu'une responsabilité in solidum n'était pas justifiée, il lui sera demandé, à titre subsidiaire de :
Juger que la société Ferbeck a manqué à son obligation de délivrance conforme, le tube de cheminée en SVR fourni par elle ne répondant pas aux spécifications convenues,
Par conséquent,
Condamner la société Ferbeck à verser à la société Lab la somme de 915'551€ en réparation du préjudice qu'elle a subi, se décomposant comme suit :
Matériels et travaux : 445'765 €
Coûts de prestations : 13'527 €
Frais de déplacement : 29'048 €
Coût des expertises comprenant les frais d'expertise supportés par LAB et les frais d'expertise judiciaire : 141'501 €
Temps passés par le personnel de la société Lab : 173'733 €
Quote-part de frais généraux 15% : 111'977 €
Condamner la société Ferbeck à verser à la société Lab la somme de 116'670 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais d'avocats en première instance et dans le cadre de la présente procédure d'appel, outre les entiers dépens.
***
Aux termes de ses écritures remises au greffe par voie électronique le 12 mai 2023 (conclusions récapitulatives après jonction), la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles demande à la cour':
Rejeter l'appel incident de la société Lab,
Infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau :
A titre principal,
Juger la société Ferbeck recevable et bien fondée en ses demandes,
Rejeter l'ensemble des demandes de la société Lab,
Condamner les sociétés LAB et Plasticon à verser la somme de 112'748,00 € HT à la société Ferbeck au titre des travaux exécutés par elle à ses frais avancés outre intérêts et capitalisation,
A défaut,
Juger que la société Plasticon est seule responsable des désordres affectant l'ouvrage livré à la société Lab,
Constater la faute et la défaillance de la société Plasticon et par conséquent sa responsabilité exclusive,
Condamner la société Plasticon à relever et garantir la société Ferbeck de toute condamnation qui pourrait être prononcée contre elle en principal, intérêts et frais,
A titre plus subsidiaire,
Condamner solidairement la société Plasticon aux obligations mises à la charge de la société Ferbeck,
En tout état de cause,
Condamner in solidum les sociétés LAB et Plasticon à payer la somme de 5'000 € à la société Ferbeck au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
***
Aux termes de ses écritures remises au greffe par voie électronique le 6 janvier 2023 (conclusions récapitulatives après jonction n°2), la SA Plasticon France demande à la cour':
1/ A titre principal :
Juger irrecevables les demandes des sociétés Ferbeck et Lab et, par conséquent, rejeter toutes leurs demandes dirigées à l'encontre de la société Plasticon en principal, intérêts, frais et accessoires,
2./ A titre subsidiaire :
Juger que le rapport d'expertise est incomplet en ce que l'expert n'a pas examiné les conditions d'exploitation de la centrale et tiré les conséquences de l'obstruction de la société Albioma Caraïbes aux opérations d'expertise,
Juger que la responsabilité de la société Plasticon ne peut être engagée,
Juger que la société Ferbeck ne justifie pas des coûts des préjudices allégués,
Juger que la société Lab ne justifie pas des coûts et préjudices allégués,
En conséquence,
Rejeter toutes les demandes des sociétés Ferbeck et Lab dirigées à l'encontre de la société Plasticon en principal, frais et accessoires,
Rejeter toutes les demandes formulées à l'encontre de la société Plasticon en principal, frais et accessoires,
3./ En tout état de cause :
Condamner Ferbeck et Lab à payer chacune à la société Plasticon la somme de 10'000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamner Ferbeck et Lab à supporter les dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Me Jacques Dufour, avocat au barreau de Lyon, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
***
Il est renvoyé aux écritures des parties pour plus ample exposé des moyens venant à l'appui de leurs prétentions.
MOTIFS,
A titre liminaire, il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes des parties tendant à voir la cour «'juger'» et «'constater'» lorsqu'elles ne constituent pas des prétentions au sens des articles 4, 5, 31 et 954 du code de procédure civile mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions.
Sur la recevabilité des demandes de la société Lab contre la société Plasticon':
La société Plasticon oppose à la société Lab l'irrecevabilité de ses demandes à son encontre, d'abord parce que ces demandes n'avaient pas été formulées en première instance, ensuite parce que ces demandes sont prescrites. Concernant la prescription, elle rappelle d'abord être fournisseur et non sous-traitant de sorte qu'elle n'est pas intervenue sur le chantier de la société Lab. Sur le fondement des responsabilités contractuelles et extra-contractuelles soumises à une prescription quinquennale, elle rappelle ensuite que le point de départ des actions est la manifestation du dommage, soit le 1er août 2013. Elle en conclut que la société Lab devait agir au plus tard le 1er août 2018 et elle relève que ce n'est que le 10 mai 2021 que la société Lab a formulé pour la première fois une demande de condamnation à son encontre.
La société Lab fait valoir que ses demandes à l'encontre de Plasticon ne sont pas nouvelles puisque, conformément à l'article 565 du code de procédure civile, elles tendent aux mêmes fins que celles déjà présentées en première instance. Elle ajoute que, conformément à l'article 566, ses demandes présentent un lien direct avec ses demandes de première instance puisqu'elles visent à la condamnation nécessaire de l'ensemble des personnes responsables des désordres affectant le tube en SVR de la cheminée livrée.
Par ailleurs, elle considère que son action à l'encontre de cette société n'est pas prescrite, rappelant que les désordres sont apparus en août 2013 et affirmant que l'assignation en référé-expertise du 11 mars 2014 a interrompu le délai de prescription qui a ensuite été suspendu jusqu'à la remise de son rapport par l'expert le 22 juin 2018. Elle en conclut que son exploit du 13 décembre 2018 au fond, l'appel en intervention forcée du sous-traitant le 1er février 2019 et la jonction des instances par le tribunal de commerce par décision du 21 février 2019 sont intervenus avant l'acquisition de la prescription, de même que ses demandes dirigées contre Plasticon au sein de ses écritures du 10 mai 2021.
Sur ce,
En application des articles 547 et 564 du code de procédure civile, il est jugé que le droit d'intimer tous ceux qui ont été parties en première instance n'emporte pas celui de présenter des prétentions à l'encontre des parties contre lesquelles l'appelant n'avait pas conclu en première instance.
En l'espèce, l'exposé des prétentions des parties figurant dans la décision attaquée enseigne, et les dernières conclusions de la société Lab devant les premiers juges confirment, que cette société n'avait présenté aucune demande à l'encontre de la société Plasticon, même après que cette dernière société ait été appelée en intervention forcée par la société Ferbeck. En application de la règle précitée, le droit pour la société appelante d'intimer la société Plasticon n'emporte pas celui de diriger, pour la première fois en cause d'appel, ses demandes indemnitaires à l'encontre de cette société. La circonstance que l'objet des demandes litigieuses soit, d'un point de vue objectif, exactement le même que celles présentées en première instance ne leur fait pas perdre leur caractère nouveau d'un point de vue subjectif puisqu'elles sont dirigées pour la première fois contre la société appelée en cause par la société Ferbeck et désormais intimée. En effet, les demandes indemnitaires présentées contre la société Plasticon ne tendent pas aux mêmes fins que les demandes indemnitaires présentées contre la société Ferbeck à raison de l'absence d'identité des parties concernées. Par ailleurs, ces demandes ne sont ni l'accessoire, ni la conséquence, ni le complément nécessaire des demandes initiales de la société Lab qui n'invoque pas, et encore moins ne démontre, une évolution du litige justifiant qu'elle ajoute des demandes à ses prétentions initiales.
En conséquence, la cour déclare irrecevables les demandes indemnitaires de la société Lab dirigées contre la société Plasticon pour être nouvelles en cause d'appel, sans examen, ni de l'éventuelle prescription de ces demandes, ni de leur bien fondé.
Sur les demandes subsidiaires de la société Lab dirigées contre la société Ferbeck seule':
Sur la responsabilité de la société Ferbeck':
La société Lab invoque les manquements contractuels de la société Ferbeck dont elle considère qu'ils sont établis par le constat fait par l'expert judiciaire des défauts affectant le matériel livré, lequel ne répond pas aux spécifications convenues, ce qui caractérise selon elle un défaut de conformité.
Elle renvoie aux spécifications techniques du cahier des charges qu'elle a établies et qui ont été acceptées par la société Ferbeck, ainsi qu'à la fiche fluides prévoyant, pour tous les cas de fonctionnement, une température «'maxi-méca de 167°C et une plage de variation de 20 à 167°C'». Elle souligne que le fonctionnement en «'by-pass'» était un mode de fonctionnement normal. Or, elle relève qu'à peine deux ans après sa mise en service, la cheminée fournie par Ferbeck était à ce point dégradée qu'elle ne pouvait plus être utilisée sans compromettre la totalité de l'installation. Elle souligne que la situation était devenue dangereuse puisque des morceaux de la couche anti-corrosion sortaient par le haut de la cheminée et chutaient au sol d'une hauteur de 50 mètres.
Elle rappelle que l'analyse détaillée par l'expert judiciaire des relevés de températures communiqués par Albioma Caraïbes pour la période du 1er janvier au 5 août 2013 démontre le respect des conditions d'utilisation contractuelles.
Elle rappelle que l'expert judiciaire a écarté contradictoirement les allégations de la société Plasticon se rapportant à de prétendus dépassements de températures en démontrant que les échantillons présentant des désordres n'ont pas été soumis à des températures supérieures aux limites convenues et elle relève que la société Plasticon n'a pas sollicité de contre-expertise ou de complément d'expertise.
A l'inverse, elle considère que l'expertise judiciaire a mis en évidence des vices de conception et de fabrication du tube de cheminée, tenant à l'hétérogénéité de la composition du matériau et à un déficit de résine par rapport au taux de fibre de verre dans la couche structurelle. Elle rappelle avoir mandaté le CNEP (centre national d'évaluation de la photo-protection), spécialiste des matériaux composites et du vieillissement des matériaux polymères, qui a confirmé ces défauts.
Elle recherche la responsabilité de la société Ferbeck qui a manqué à son obligation de délivrance conforme, rappelant qu'elle a été contrainte de remplacer, à ses frais avancés, le tube de cheminée endommagé par un nouveau tube qui a été correctement conçu et fabriqué par la société NCE.
La société Ferbeck se défend d'avoir commis une inexécution contractuelle. Elle affirme n'avoir joué qu'un rôle d'intermédiaire entre les sociétés Plasticon et Lab et elle souligne qu'elle n'était d'ailleurs pas présente lors de l'inspection du 26 septembre 2013, ni lors des réunions postérieures puisque ses prestations n'étaient pas en cause. À l'inverse, elle fait valoir que la société Plasticon était quant à elle présente à ces réunions. Elle considère que la société Lab ne parvient pas à caractériser une faute à son encontre, rappelant que la société Plasticon a conçu la cheminée conformément aux spécifications techniques de Lab.
Sur ce,
En vertu de l'article 1604 du code civil, l'obligation de délivrance à la charge du vendeur emporte son obligation de répondre des non-conformités de la chose vendue aux spécifications de la commande qu'il a acceptée.
En application de ce texte, la non-conformité à la commande du bien livré suffit à caractériser le manquement contractuel du vendeur.
En l'espèce, il importe de rappeler que la société Lab était en charge du lot 12 «'traitement des fumée'» dont on comprend qu'il incluait la cheminée et le lavoir situé en amont et que, pour la réalisation desdits travaux, cette société a commandé à la société Ferbeck la conception, la fabrication et la mise à disposition de la cheminée autoportante. Le bon de commande du 26 septembre 2008 faisant état d'une mise à disposition «'ex-Works'», le contrat est une vente dite «'à la sortie d'usine'», outre une mission d'assistance confiée au «'vendeur'» pour le montage sur site. Dès lors, la garantie de conformité due par le vendeur prévue par l'article 1604 du code civil invoquée par la société Lab est effectivement applicable à ses relations avec la société Ferbeck, qui a la qualité de vendeur, et cette garantie est mobilisable si ses conditions en sont réunies.
Il importe également de rappeler que si le fût intérieur de la cheminée vendue par la société Ferbeck a été fabriqué et assemblé par la société Plasticon dans les usines françaises et portugaises de chacune des parties comme il sera vu ci-après, les prestations de cette société ne font pas perdre à la société Ferbeck sa qualité de vendeur, seul engagé contractuellement à l'égard de l'acheteur, la société Lab. Dès lors et à ce stade, la cour d'appel écarte l'argumentation de la société Ferbeck tendant à se présenter comme une simple intermédiaire entre les sociétés Lab et Plasticon, sans préjudice des éventuels recours du vendeur contre le fabricant du fût intérieur, siège des désordres.
Sous ces remarques préalables, il résulte en effet du rapport d'expertise judiciaire que les désordres consistent notamment en des délaminations entre la couche mécanique structurelle et la couche anticorrosion du fût intérieur stratifié en SVR fabriqué par la société Plasticon et intégré dans le conduit de la cheminée autoportante conçue et vendue par la société Ferbeck.
L'expert judiciaire a constaté que ces délaminations, qui peuvent atteindre plusieurs mètres de longueur, ont conduit par endroits jusqu'au détachement de plaques de la couche anticorrosion. L'expert judiciaire, qui a pu inspecter le fût intérieur de la cheminée notamment par l'ouverture de deux trappes de visite sur chacune des deux canalisations d'alimentation en fumées, précise que les endommagements se situent au niveau de la canalisation de by-pass, notamment sur la face opposée de cette canalisation et dans la zone située au-dessus. Il indique que la zone située en dessous n'est pas endommagée (pages 18 à 20 du rapport d'expertise).
Compte tenu de la localisation des désordres, le rapport d'expertise judiciaire conclut que «'les désordres proviennent du fait que le fût stratifié SVR n'a pas été capable, sans subir de dommages importants, d'assurer les conditions de service rappelées ci-dessus pour des durées de fonctionnement longues en régime by-pass » (page 68 du rapport). L'on comprend que la température des fumées qui sont introduites dans le fût stratifié en SVR différent selon qu'elles traversent d'abord le laveur situé en amont de la cheminée dans lequel elles sont préalablement refroidies ou selon qu'elles sont dérivées en mode by-pass, dérivation dans le cadre de laquelle leur température est nettement plus élevée.
Il importe dès lors de déterminer si les durées de fonctionnement longues en régime by-pass évoquées par l'expert constituaient une donnée connue du vendeur qui devait en conséquence intégrer ce mode de fonctionnement dans la conception de la cheminée et de son fût intérieur en SVR.
A cet égard, la société Lab justifie que le bon de commande du 26 septembre 2008 signé par la société Ferbeck renvoie à une série de documents contractuels portant les références 10981 OF35 001 rev B, ainsi qu'au paragraphe 3 de la «'spécification technique N°10981 LF 35 003 rév B'». Elle produit une «'spécification technique'» portant la référence 10981 LF 35 001, ainsi qu'une «'fiche fluide'» portant les références 10981 EF 00 009 (rectifiées de manière manuscrite EF 00 012). La société Ferbeck produit également le bon de commande du 26 septembre 2008, lequel comporte en annexe la spécification technique N°10981 LF 35 003 rév B dont l'article 4.3.1.1. renvoie à la fiche fluide 10981 EF 00 009. Il en résulte suffisamment que le vendeur ne conteste pas qu'il s'agit des documents techniques qui lui sont opposables.
Or, cet article 4.3.1.1. des spécifications techniques énonce': «'La fourniture du vendeur devra satisfaire aux conditions de fonctionnement de la fiche fluide Lab 10981 EF 00 009. La cheminée doit satisfaire, sans restriction, aux exigences de la présente spécification sur toute la plage comprise entre le régime mini et le régime maxi-méca de l'installation, que ce soit avec laveur (page 1/2 de la fiche fluide) ou avec by-pass (page 2/2 de la fiche fluide). Ni la configuration en «'by-pass'» ni les changements de configuration ne sont considérés comme régime transitoire.'».
La fiche fluide quant à elle comporte deux pages, la première se rapportant au fonctionnement de la cheminée «'avec laveur'», la seconde se rapportant au fonctionnement de la cheminée «'avec by-pass'». Cette fiche mentionne un fonctionnement «'continu'» avec laveur et un fonctionnement «'discontinu'» avec by-pass et elle indique que les températures de fumées sont, pour le fonctionnement avec laveur, de 52° minimum à 53° maximum et, pour le fonctionnement en by-pass, de 131° minimum à 145° maximum. Elle indique également, pour chacun des deux modes de fonctionnement, que la température maxi-méca des fumées est de 167°C et que la plage de variation est de 20° à 167°C.
L'expert judiciaire souligne à raison qu'aucune clause contractuelle ne limite la durée du fonctionnement en by-pass (page 69 du rapport), ce que la société Ferbeck ne discute d'ailleurs pas. La cour relève que la fiche fluide, si elle mentionne respectivement «'continu'» et «'discontinu'» concernant les durées de fonctionnement en mode laveur et en mode by-pass, n'apportent pas d'autres précisions concernant la durée de sorte que le mode by-pass, s'il ne constitue pas le principe, n'est pas pour autant conçu comme un mode exceptionnel. En tout état de cause, la plage de variation prévue pour chacun des deux modes de fonctionnement est de 20° à 167°.
Or et en réponse aux dires de la société Plasticon, l'expert judiciaire a écarté, sur la base des relevés de températures en sortie de cheminée communiqués par la société Albioma Caraïbes pour la période du 1er janvier au 5 août 2013, une utilisation de la cheminée par l'exploitant à des températures dépassant les limites contractuelles. Si l'exploitant n'a pas communiqué les relevés de températures antérieurs à 2013 et postérieurs aux réparations, malgré l'injonction du juge chargé du contrôle des expertises, les mesures réalisées par le CETIM (Centre technique des industries mécaniques) auquel l'expert [S] avait transmis des échantillons délaminés prélevés sur site ont établies que les durées d'expositions contractuelles sont suffisantes pour atteindre les températures de transitions mesurées sur les échantillons.
L'expert judiciaire en conclut que les désordres observés peuvent se développer en l'état des temps contractuels d'exposition aux fumées chaudes (notamment pages 30 et suivantes du rapport d'expertise).
Il en résulte que la société Lab rapporte régulièrement la preuve de la non-conformité de la cheminée vendue par la société Ferbeck aux spécifications techniques convenues puisque le délaminage du stratifié du fût intérieur constaté est compatible avec une exploitation strictement conforme aux températures contractuelles auxquelles le stratifié mis en 'uvre devait, pour être adapté au fonctionnement de la cheminée, résister sans dommage.
Le jugement attaqué, en ce qu'il a retenu que la société Ferbeck avait manqué à son obligation de délivrance conforme dans la mesure où la cheminée fournie ne répondaient pas aux spécifications convenues, est en conséquence confirmé.
Sur les préjudices':
La société Lab décompose son préjudice en sept postes qu'elle a soumis à l'expert judiciaire, justificatifs à l'appui, et elle forme appel incident de la décision du tribunal de commerce dont elle considère qu'elle ne l'a indemnisée que partiellement de son préjudice.
Elle réclame d'abord l'indemnisation des frais de remplacement de la cheminée en incluant le coût des matériels et travaux, le coût des prestations et les frais de déplacement pour un total de 488'340 € HT comme validé par l'expert judiciaire. Elle souligne que le coût est plus important que le prix initial de la commande passée à la société Ferbeck puisqu'il inclut le coût du démontage du conduit endommagé et celui de la post-cuisson du nouveau tube en SVR. Elle fait valoir que la facture se rapportant aux prestations concerne un prestataire auquel elle avait confié deux missions distinctes dont l'une est relative à la présente affaire.
Elle réclame ensuite l'indemnisation du temps passé par son personnel à hauteur de 173'733 €, ce préjudice ayant été validé par l'expert judiciaire mais écarté par les premiers juges. Or elle fait valoir que ces temps doivent être indemnisés puisqu'en l'absence de sinistre, ils auraient été engagés à la réalisation d'opérations facturables. Elle rappelle que ses évaluations ont été certifiées par son commissaire aux comptes.
Elle réclame également une indemnité de 111'977 € HT au titre d'une quote-part de frais généraux qu'elle calcule en appliquant un taux de 15 % sur les autres préjudices.
La société Ferbeck ne répond pas sur ces points.
La société Plasticon souligne que le total des travaux facturés par la société NCE dépasse largement le montant de la commande initiale de 190'000 € et elle estime que ce dépassement ne peut pas correspondre aux frais de dépose et de pose du nouveau tube puisque la société Ferbeck indique y avoir procédé à ses frais avancés, ni aux frais de post-cuisson, sauf à comprendre qu'ils n'étaient pas intégrés dans la commande de janvier 2014. Elle relève en outre que le coût global réclamé est trois fois plus élevé que la fourniture initiale du fût par ses soins.
Concernant les frais engagés, elles relèvent qu'ils ne concernent non pas la fourniture du tube mais l'après-vente, paraissant d'ailleurs en lien avec un problème de laminage.
Concernant le coût des prestations réclamé, elle relève que la facture de la société JAM Ingénieurie porte en réalité sur deux missions dont seul 8'616,25 € concerne le dossier «'Caraïbes'», sans que cette répartition ne puisse être vérifiable.
Concernant les frais de déplacement, elle relève qu'ils incluent des frais postérieurs aux travaux de remise en état. Concernant le temps passé, elle considère que les sommes réclamées ne sont pas vérifiables et qu'elles constituent en outre des charges fixes de la société Lab comme exactement retenu par les premiers juges. Elle conteste également que les frais généraux réclamés constituent un préjudice indemnisable.
Sur ce,
Les dommages-intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi, sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit.
En vertu de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
En l'espèce et concernant le coût des matériels et travaux initialement évalués à 445'765 € HT, la société Lab renvoie au rapport d'expertise judiciaire en ce qu'il a proposé de retenir la somme de 445'765 € HT au titre de ce préjudice, mais sans produire, dans le cade de la présente instance, la série de pièces justificatives numérotées 87A n°1 à 41 soumises à l'expert. En particulier, la cour d'appel ne dispose pas du devis de la société NCE qui a réalisé le fût intérieur de remplacement, ni de la facture de cette société et la cour d'appel rappelle qu'en vertu de l'article 246 du code de procédure civile, les conclusions expertales ne lient pas le juge.
Si, par déduction, l'on comprend de l'argumentation de la société Plasticon que la facture de la société NCE serait d'un montant de 267'000 € en ce qu'elle présenterait un dépassement de 77'000 € par rapport à un devis initial qui serait quant à lui de 190'000 €, ces déductions sont insuffisantes à pallier l'absence de production des justificatifs correspondants, d'autant que la société Plasticon précise qu'elle formule ses observations sans que le détail de la commande n'ait été versé au contradictoire des parties.
Par ailleurs, la société Lab verse aux débats un décompte contemporain de l'instance en référé-expertise dans le cadre duquel elle évaluait le coût des travaux de reprise, hors prestations complémentaires, à 396'000 €. Ce décompte, en ce qu'il est établi par la société Lab elle-même, n'a aucune valeur probante.
Cela étant, dans la mesure où la réalité des travaux de reprise réalisés en 2015 n'est pas contestée, la cour d'appel retient, sur la base du contrat de sous-traitance qui avait été conclu entre la société Ferbeck et la société Plasticon, que le coût de conception et de fabrication d'un fût intérieur en SVR était alors de 93'000 €, coût qu'il convient de revaloriser à 100'000 € pour tenir compte de l'évolution de l'indice BT01 entre 2008 et 2015.
En revanche, les travaux de montage et de démontage ayant été réalisés par la société Ferbeck à ses frais avancés, la société Lab ne peut réclamer aucune somme à ce titre.
En conséquence, la cour retient que le préjudice financier de la société Lab au titre du coût des travaux de reprise (matériels et travaux) est de 100'000 €.
Concernant le coût des «'prestations'» réclamées à hauteur de 13'527 €, la société Lab ne produit pas les pièces 87C numéro 64 à 66 soumises à l'expert et les extraits de la facture de la société JAM Ingénieurie que la société Plasticon a insérés dans ses écritures sont insuffisants à pallier la carence de la société Lab dans l'administration de la preuve de son préjudice financier correspondant, d'autant que, là encore, la société Plasticon précise qu'elle ne s'est pas vue communiquer la totalité desdits justificatifs. Dès lors, la société Lab échoue à rapporter la preuve d'un préjudice tenant à des frais de «'prestations'».
Concernant le frais de déplacements réclamés à hauteur de 29'048 € HT, la société Lab ne produit pas les pièces 87D numéro 67 à 119 soumises à l'expert mais elle verse aux débats une note de son directeur général exposant les modalités de calculs de ce préjudice et l'attestation de son commissaire aux comptes qui indique ne pas avoir d'observations à formuler sur la cohérence de ces évaluations avec les données internes à l'entité en lien avec la comptabilité. Ces éléments établissent suffisamment la réalité et le quantum des frais de déplacement dont il est réclamé l'indemnisation, avec cette précision que cette évaluation porte tant sur les frais de déplacement en lien avec les travaux de reprise, que de ceux se rapportant au suivi de l'expertise judiciaire comme relevé par l'expert judiciaire. Ainsi, la cour retient que le préjudice financier de la société Lab au titre des frais de déplacement de son personnel est de 29'048 €.
Concernant l'indemnisation du temps passé par son personnel évalué à 173'733 €, même certifié par le commissaire aux comptes, il ne constitue pas un préjudice financier mais des charges fixes comme exactement retenu par les premiers juges. Dès lors, la société Lab échoue à rapporter la preuve d'un préjudice indemnisable de ce chef.
Concernant la quote-part sur frais généraux réclamée à hauteur de 111'977 € HT, les explications de la société Lab concernant les modalités de calculs retenues ne convainquent dès lors qu'une telle évaluation, admissible pour fixer un prix, ne constitue pas un poste de préjudice indemnisable présentant un caractère certain.
Au final, la décision attaquée, qui a condamné la société Ferbeck à payer à la société Lab la somme de 513'946 € HT, est infirmée concernant le quantum de cette condamnation. Statuant à nouveau, la cour condamne la société Ferbeck à payer à la société Lab la somme globale de 129'048 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices financiers résultant du défaut de conformité de la cheminée fournie.
Sur la demande indemnitaire de la société Ferbeck dirigée contre la société Lab':
La société Ferbeck rappelle que la société Plasticon a conçu la cheminée conformément aux spécifications techniques de Lab et elle sollicite en conséquence la condamnation des sociétés Lab et Plasticon à l'indemniser des travaux qu'elle a exécutés afin de remédier aux désordres, soit la somme de 112'748 € hors-taxes, soulignant que l'expert a confirmé l'engagement de ces frais, ainsi que le caractère opportun des travaux ainsi opérés.
La société Lab ne répond pas sur ce point.
Sur ce,
Selon l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
En l'espèce, il ne résulte pas du rapport d'expertise, ni d'aucune des autres pièces produites, que les désordres de délamination et cloquage constatés sur le fût intérieur de la cheminée livrée par la société Ferbeck et pour lesquels elle a réalisé, à ses frais avancés, des travaux de reprise, résulteraient, même pour partie seulement, du caractère erroné des spécifications techniques établies par la société Lab. Si l'expert judiciaire mentionne, page 40 de son rapport, que pour les besoins des travaux de remplacement du fût intérieur endommagé, la société Lab a établi une nouvelle spécification technique et deux nouvelles fiches fluides indiquant une température en régime continu de 150° et des pics de température maximum de 167°, il n'en résulte pas suffisamment que les précédentes spécifications étaient erronées. Dès lors, la société Ferbeck, qui dirige pour la première fois en cause d'appel ses demandes contre la société Lab, échoue à rechercher la responsabilité de cette société dans la survenance des désordres.
La cour d'appel rejette la demande de la société Ferbeck tendant à voir condamner la société Lab, in solidum avec Plasticon, à l'indemniser de son propre préjudice financier.
Sur la demande indemnitaire de la société Ferbeck dirigée contre la société Plasticon :
Sur la recevabilité de cette demande':
La société Plasticon invoque d'abord la prescription de l'action de Ferbeck à son encontre dès lors que, comme retenu par les premiers juges, son contrat, improprement intitulé «'contrat de sous-traitance'», est en réalité un contrat de fourniture prévoyant une garantie d'un an qui est prescrite. Elle conteste être intervenue comme sous-traitant puisqu'elle affirme n'avoir eu aucune intervention sur le chantier de Lab dès lors qu'elle a, pour sa part, livré au Portugal la cheminée qui a ensuite été acheminée en Guadeloupe par Ferbeck, laquelle a participé à son montage avec une mise en service au 8 mars 2011. Elle estime qu'en se plaçant à la date de la découverte des désordres, comme à la date de l'assignation en référé-expertise par la société Lab, ou encore à la date de son appel en cause par la société Ferberck, la garantie d'un an prévue au contrat était expirée.
Elle se défend ensuite d'être tenue de la garantie de parfait achèvement invoquée par la société Ferbeck dès lors que cette garantie ne s'applique qu'aux constructeurs, ce qu'elle n'est pas, outre que cette garantie ne profite qu'au maître de l'ouvrage, ce que ni la société Lab, ni la société Ferbeck ne sont.
Elle conteste l'application de l'article 1792-4 du code civil se rapportant aux fabricants d'EPERS s'agissant d'une responsabilité qui ne peut être invoquée directement que par le maître de l'ouvrage, lequel doit prouver que l'élément a été mis en 'uvre conformément aux directives du fabricant et sans modification.
Elle conteste sa responsabilité contractuelle comme sous-traitant invoquée en même temps que l'obligation de délivrance conforme du vendeur, s'agissant de deux fondements juridiques exclusifs l'un de l'autre. Elle rappelle qu'il revient à la société Ferbeck de choisir le fondement qu'elle invoque. En tout état de cause, elle souligne que la clause contenue dans le contrat de fourniture ramène à un an le délai de prescription et elle estime que cette clause déroge à la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil.
Elle se défend d'avoir renoncé au bénéfice de la prescription en ayant participé pendant quatre ans aux opérations d'expertise, rappelant qu'une renonciation doit être non-équivoque et qu'elle a, à tous les stades de la procédure, contesté sa garantie et sa responsabilité.
Elle invoque pour finir l'irrecevabilité des demandes nouvelles en cause d'appel de la société Ferbeck qui fonde pour la première fois ses demandes sur les articles 1603 et 1792-4 du code civil.
La société Ferbeck conteste le caractère tardif de son action contre la société Plasticon. Elle fait d'abord valoir que, contrairement à ce qu'à retenu les premiers juges, la garantie conventionnelle stipulée ne se confond pas avec la garantie de parfait achèvement qui permet au maître d'ouvrage d'obtenir réparation des désordres qui ont fait l'objet de réserves à réception. Or, elle rappelle que Plasticon, qu'elle soit sous-traitante ou fournisseur, n'a jamais été liée au maître de l'ouvrage et elle estime que la garantie stipulée était purement conventionnelle.
Elle considère ensuite que la responsabilité contractuelle de Plasticon subsiste après l'expiration de la garantie conventionnelle et que sa responsabilité contractuelle de droit commun est soumise à la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil. Elle rappelle que le tribunal de commerce de Lyon a été saisi d'une demande d'expertise moins d'un an après la survenance des désordres qui sont apparus dans le délai de cinq ans à compter de la mise hors service du 8 mars 2011. Elle conteste que la garantie conventionnelle constitue une clause limitative de responsabilité venant réduire le délai de la responsabilité de droit commun.
En toute hypothèse, elle estime que Plasticon a renoncé à toute prescription en participant aux opérations d'expertise ayant mis en lumière ses malfaçons pendant près de quatre ans entre avril 2014 et juin 2018, sans jamais faire mention d'une potentielle irrecevabilité.
Elle relève que Plasticon a été présentes aux opérations diligentées sur site en Guadeloupe et a adressé de nombreux dires à l'expert.
Sur ce,
L'article 1189 ancien du code civil, dans sa rédaction en vigueur en 2008, énonçait que toutes les clauses d'un contrat s'interprètent les unes par rapport aux autres, en donnant à chacune le sens qui respecte la cohérence de l'acte tout entier et que lorsque, dans l'intention commune des parties, plusieurs contrats concourent à une même opération, ils s'interprètent en fonction de celle-ci.
En l'espèce, la cour d'appel relève d'abord, à l'instar des premiers juges, que nonobstant l'utilisation du vocable «'sous-traitant'» dans les documents contractuels liant les parties et en particulier dans les «'conditions particulières du contrat de sous-traitance'» du 28 octobre 2008, la société Plasticon s'est uniquement vu confier la réalisation d'un tubage de cheminée, d'un diamètre intérieur de 2'600 mm et d'une hauteur de 34,5 mètres, devant répondre à des conditions de service précisées dans une fiche fluides, au prix global et forfaitaire de 93'000 € HT.
Il importe de relever qu'aux termes de ce contrat, ce fût intérieur en SVR devait être réalisé dans l'usine du «'sous-traitant'» en France, puis devait être monté sur le conduit de cheminée dans l'usine au Portugal de la société Ferbeck. Ainsi, la société Plasticon est fondée à souligner que, dans le cadre de la prestation qui lui a été confiée par la société Ferbeck, elle n'a exécuté aucuns travaux sur le chantier situé en Guadeloupe et qu'elle n'a pas la qualité de sous-traitant. Si la société Ferbeck renvoie à des compte-rendus de chantier et à des échanges de courriels démontrant la présence de la société Plasticon sur ce chantier, il n'est pas pour autant établi que cette présence était en lien avec la fabrication du fût intérieur de la cheminée puisque la société Lab expose et justifie qu'elle avait conclu directement avec la société Plasticon six contrats portant sur des «'équipements plastiques chaudronnés'» et des «'tuyauteries plastiques'» d'un montant total de 990'677,10 €, hors la commande litigieuse de 93'000 € portant sur le «'tube SVR cheminée'» liant exclusivement Ferbeck et Plasticon.
Dès lors, c'est par des motifs exacts et pertinents tant en droit qu'en fait et que la cour adopte expressément que les premiers juges ont retenu que cette commande ne constitue pas un contrat de location d'ouvrage mais un contrat de fourniture portant sur une partie d'ouvrage conçu pour satisfaire, en état de service, à des exigences précises et déterminées à l'avance.
La cour relève ensuite que la garantie de parfait achèvement de 24 mois stipulée à l'article 10 du document intitulé «'conditions particulières du contrat de sous-traitance'» comme étant due «'après réception par le client ou Ferberck & [X] en vos ateliers'» n'est manifestement pas exclusive d'autres responsabilités dès lors que ce même article 10 énonce in fine': «'De façon générale, le sous-traitant fera siennes toutes les obligations de Ferbeck vis-à-vis de son client pour la part qui la concerne'».
De la même façon la garantie d'un an stipulée dans le courrier de confirmation de commande contre-signée par la société Ferbeck le 2 décembre 2008, n'est pas exclusive d'autres garanties puisqu'elle ménage expressément la garantie de parfait achèvement mentionnée au contrat de sous-traitance en ajoutant «'et au maximum de 24 mois après la réception par le client ou Ferbeck & [X] en vos ateliers suivant article 10 de votre contrat'».
Or, une telle clause ne peut faire une référence sélective aux alinéas de l'article 10 dont il a été vu ci-avant que le dernier ménage la garantie due par le «'sous-traitant'» de «'toutes les obligations de Ferbeck vis-à-vis de son client pour la part qui la concerne'».
Il s'ensuit que ces clauses de garantie d'un an et de 24 mois ne font obstacle à l'action de la société Ferbeck fondée, à titre principal, sur la responsabilité contractuelle de droit commun du fabricant soumise à une prescription quinquennale.
Dès lors, le jugement attaqué, qui a déclaré irrecevables comme étant prescrites les demandes de la société Ferbeck à l'encontre de la société Plasticon, est infirmé.
Statuant à nouveau, la cour rejette la fin de non-recevoir soulevée par la société Plasticon et en conséquence, la cour déclare la société Ferbeck recevable à rechercher la responsabilité contractuelle de droit commun du fabricant, sans qu'il ne soit nécessaire d'examiner la recevabilité des demandes présentées à titre subsidiaire sur les fondements des vices cachés ou de la responsabilité solidaire des fabricants d'EPERS.
Sur la responsabilité de la société Plasticon à l'égard de Ferbeck':
La société Ferbeck recherche la responsabilité de la société Plasticon en faisant valoir que celle-ci est seule responsable des désordres affectant le fût intérieur de la cheminée. Elle affirme que cette société est intervenue comme sous-traitant dès lors que le contrat qui les lie n'est pas un contrat de fourniture courante, ni même d'une fourniture sur-mesure d'équipements puisqu'il s'agissait de la production et de la fourniture d'un produit individualisé, façonné selon des spécifications techniques imposées par la société Lab, non substituables et sur lesquels le rapport d'expertise a particulièrement insisté. Elle rappelle que la société Plasticon était en charge de la conception et la réalisation d'un produit spécifique, renvoyant aux stipulations contractuelles concernant les études d'exécution mises à la charge du sous-traitant.
Elle affirme la société Plasticon s'est comportée comme un sous-traitant puisqu'elle était présente lors de réunion de chantier comme cela résulte des comptes-rendus de chantier produit par la société Lab. Elle renvoie également à des échanges de mails établissant la présence du sous-traitant en Guadeloupe.
En toute hypothèse, que le contrat soit qualifié de sous-traitance ou de fourniture, elle estime que la responsabilité de Plasticon est engagée du fait des manquements constatés. Elle rappelle en effet que le sous-traitant est tenu d'une obligation de résultat et que la jurisprudence applique l'article 1147 du code civil. Elle fait valoir qu'à supposer que Plasticon ne soit qu'un fournisseur, il serait tenu sur le fondement des articles 1603 et suivants du code civil d'une obligation de délivrance conforme.
Elle estime qu'il est établi par le rapport d'expertise que la société Plasticon est responsable de défauts de conception du fût intérieur réalisé, en l'absence de prise en compte des impératifs techniques inhérents à l'installation et notamment à la nécessité d'une résistance aux chocs thermiques lors des mises en by-pass.
Elle affirme que la note de calcul produite par Plasticon dans le cadre des opérations d'expertise a confirmé que ces écarts de température n'ont pas été pris en compte.
Elle rappelle que Plasticon a reconnu que si les conditions de fonctionnement en by-pass avaient été prises en compte comme des conditions de fonctionnement en continu, le design aurait été différent. Elle rappelle que l'expert a mis en cause la teneur en fibres de verre du fût fabriqué, jugée mal maîtrisée.
Elle fait valoir que l'expert a répondu aux objections de Plasticon en précisant notamment que les relevés de température du premier semestre 2013 précédant les désordres avaient été transmis par l'exploitant, lesquels relevés permettaient d'exclure des températures anormales.
A titre subsidiaire, elle recherche la responsabilité de Plasticon sur le fondement de l'article 1792-4 du code civil.
La société Plasticon conteste, à titre subsidiaire, avoir engagé sa responsabilité. Elle considère d'abord que l'expert a été partial en s'abstenant d'examiner les conditions d'exploitation de la centrale par la société Albioma, malgré ses demandes répétées, et en se contentant d'examiner les rapports établis par le CETIM et en se concentrant exclusivement sur les modalités de fabrication du fût intérieur en SVR. Elle dénonce l'obstruction de la société Albioma qui n'a opéré qu'une communication partielle et qui a fait le choix d'une politique de la chaise vide, sans que l'expert ne pousse plus loin les investigations sur ce point. En tout état de cause, elle renvoie aux notes techniques du cabinet LVS ainsi qu'à la note d'Ashland du 8 novembre 2013 qui caractérisent selon elle que les conditions d'exploitation sont à l'origine des désordres.
Concernant la cause des désordres, elle rappelle qu'il existe des fissurations dans le matériau, que ces endommagements sont accompagnés d'un brunissement du composite, qu'il existe des porosités dans le matériau et que le taux de fibres est élevé, ce qui empêche le laboratoire d'apprécier leur qualité d'imprégnation. Elle considère que les écarts de teneur en fibre de verre relevés par le CETIM ne sont pas significatifs mais conformes à la norme NF EN 13121-3 et elle critique le mode d'extraction des fibres utilisé par le laboratoire. Elle considère que l'expert judiciaire n'a pas tiré les conséquences de la non-communication par Albioma des conditions d'exploitation alors que ces éléments sont capital pour apprécier les conditions d'exposition du conduit SVR notamment pendant la période de démarrage qui nécessite de nombreux réglages, comme le démontre au demeurant selon elle le contrôle des performances deux ans après la mise en service selon une pièce 88 produite par la société Lab dans le cadre des opérations d'expertise. Elle estime qu'en réalité, le procédé ne permet pas de garantir que les températures des fumées ne dépassent pas la température du maxi-méca de 167° et elle relève que le by-pass lui-même semble avoir été endommagé et changé, ce qui démontre que les températures ont largement dépassé le cahier des charges. Elle conteste que les travaux du CETIM permettent de conclure que la température de transition vitreuse de plus de 180° puisse être atteinte avec une température de fumées de 145°, affirmant que les tg constatés peuvent s'expliquer par des excès de températures de courtes durées pendant les phases de réglage de l'installation. Elle affirme que les travaux du CETIM ont en réalité démontré que seul un choc thermique de 200°C entraîne un endommagement mécanique du matériau chimiquement altéré, lui-même par des températures excessives. Elle conteste en conséquence l'absence de dépassement des températures contractuelles, mais également le défaut de maîtrise du taux de fibres.
Sur ce,
Selon l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
En l'espèce, il a été vu ci-avant que nonobstant le vocable «'sous-traitant'» dans les documents contractuels liant les parties, le contrat du 28 octobre 2008 comme sa confirmation par la société Ferbeck le 2 décembre 2008, constitue un contrat de fourniture portant sur une partie d'ouvrage conçue pour satisfaire, en état de service, à des exigences précises et déterminées à l'avance et la cour d'appel rappelle, en tant que de besoin, que les régimes spéciaux de responsabilités des fabricants, notamment en cas de produits défectueux ou la responsabilité solidaire des fabricants d'EPERS, ne sont pas exclusifs de la mobilisation de leur responsabilité contractuelle de droit commun à l'égard de l'acheteur en cas de faute prouvée.
A cet égard, les conditions particulières du contrat de «'sous-traitance'» liant les parties renvoient notamment, en son article 2 concernant la description des travaux confiés, aux «'conditions de service suivant fiche fluides Lab n°10981 EF 00 009 page 1 et 2/2'» de sorte que la société Plasticon devait, tout comme la société Ferbeck, intégrer les conditions de fonctionnement de la cheminée pour la réalisation de son fût intérieur en SVR.
Au-delà de la non-conformité ci-avant retenue tenant au constat objectif de la seule différence matérielle entre la chose délivrée et la chose promise, il résulte du rapport d'expertise que la société Pasticon est à l'origine de défauts de conception et de réalisation du fût intérieur en SVR qui sont directement à l'origine des désordres. En effet, l'expert judiciaire a procédé à l'examen par microscope électronique à balayage (MEB) des surfaces délaminées qui a montré des fissurations dans la couche anti-corrosion mais également dans la couche structurelle, ainsi que des porosités de dimensions variables, tandis que le taux massique moyen mesuré par calcination a établi des teneurs en fibres mal maîtrisé par le fabricant. L'expert [S] en conclut que ce «'mode de fabrication crée des zones riches en fibres créant dans ces zones des conditions de nature à générer des délaminages'» (page 70 du rapport).
Par ailleurs, si la carence de la société Albioma à communiquer des relevés de températures plus complets est avérée, les études thermo-mécaniques réalisées par le CETIM ont exclu que les chocs thermiques envisagés soient seuls à l'origine des désordres. La cour d'appel relève à cet égard que l'expert judiciaire a annexé à son rapport et discuté la note technique du cabinet LVS, laquelle se réfère à la note de la société Ashland du 8 novembre 2013, et que la société Plasticon continue de discuter techniquement les conclusions de l'expert, sans pour autant solliciter de contre-expertise. Or, un débat d'une telle technicité ne peut prospérer devant la cour d'appel, d'autant moins que l'expert y a répondu de manière contradictoire et argumenté. En outre, la cour relève que la société Plasticon, qui évoque le contrôle des performances deux ans après la mise en service selon une pièce 88 produite par la société Lab dans le cadre des opérations d'expertise, ne produit pas cette pièce.
Dès lors, la société Plasticon échoue à combattre la preuve, régulièrement rapportée par la société Ferbeck, que des défauts de conception et de réalisation du fût en SVR lui sont imputables et qu'ils sont à l'origine des délaminages constatés. Dans ces conditions, tant bien même l'appelant échoue quant à lui à établir l'existence d'un contrat de sous-traitance, la cour d'appel retient qu'il est néanmoins fondé à rechercher la responsabilité contractuelle du fabricant.
Sur le préjudice':
La société Ferbeck affirme que, dans le cadre des travaux de reprise réalisés par la société NCE et financés par la société Lab, elle a, pour sa part, procédé au démontage du fût endommagé et au montage du nouveau fût suivant offre technique et financière du 12 avril 2014. Elle souligne que l'expert a confirmé l'engagement de ces frais, ainsi que le caractère opportun des travaux correspondants.
La société Plasticon estime que la société Ferbeck ne justifie pas du préjudice de 112'748 € prétendument subi puisque la validation de l'expert ne fait que reprendre les déclarations de Ferbeck qui ne produit aucun justificatif, si ce n'est un devis qui n'établit pas que la dépense a été engagée.
Sur ce,
Les dommages-intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi, sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit.
En l'espèce, la société Ferbeck verse régulièrement aux débats l'offre commerciale qu'elle a adressé le 12 avril 2014 à la société Lab au prix de 112'748 € se rapportant à un descriptif technique de travaux correspondant aux travaux de détubage et retubage de la cheminée du site Gardel. Par ailleurs, l'expert a constaté la bonne réalisation desdits travaux, sans qu'il ne puisse être reproché à l'appelant l'absence d'émission de facture puisqu'il a lui-même réalisé les travaux à ses frais avancés.
Il s'ensuit que la société Ferbeck rapporte régulièrement la preuve du principe et du quantum du préjudice financier qui est résulté du manquement contractuel du fabriquant que la cour d'appel condamne en conséquence à payer à l'appelant la somme de 112'748 €, assortie des intérêts à compter de la présente décision, avec capitalisation des intérêts échus depuis une année.
Sur l'appel en garantie de la société Ferbeck contre la société Plasticon':
Sur la recevabilité':
La société Plasticon invoque l'irrecevabilité de l'appel en garantie de Ferbeck à son encontre, dès lors que l'appelante ne précise pas à quelle instance cet appel en garantie est rattaché, ce qui le rend irrecevable.
Elle invoque encore l'irrecevabilité des demandes nouvelles en cause d'appel de la société Ferbeck qui fonde pour la première fois ses demandes sur les articles 1603 et 1792-4 du code civil.
La société Ferbeck ne répond pas sur ce point.
Sur ce,
En application de l'article 334 du code de procédure civile, une partie assignée en justice est en droit d'en appeler une autre en garantie des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle.
En l'espèce, il n'existe aucune incertitude ni ambiguïté sur le fait que la demande de la société Ferbeck tendant à être relevée indemne et garantie des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre concerne les demandes indemnitaires que la société Lab forme contre elle. La société Plasticon ayant été assignée en intervention forcée par la société Ferbeck par exploit du 1er février 2019 dans l'instance initiée au fond par la société Lab par exploit du 13 décembre 2018, elle ne peut sérieusement prétendre ignorer l'instance à laquelle se rattache l'appel en garantie dont elle fait l'objet.
Son argumentation de ce chef est en conséquence rejetée et la cour d'appel déclare recevable l'appel en garantie fondé, à titre principal sur la responsabilité contractuelle de droit commun formé par la société Ferbeck, sans qu'il ne soit nécessaire d'examiner les demandes subsidiaires de l'appelant fondées sur la garantie des vices cachées et la responsabilité solidaire des fabricants d'EPERS.
Sur le fond':
La société Ferbeck estime que la faute et la défaillance de la société Plasticon est à l'origine exclusive du dommage, sans développer d'argumentation autre que celle ci-avant rappelée concernant la recherche de la responsabilité de la société intimée.
La société Plasticon conteste devoir sa garantie, sans développer sur le fond d'argumentation autre que celle ci-avant rappelée concernant ses critiques des conclusions du rapport d'expertise judiciaire.
Sur ce,
Il est de principe que dans leurs relations entre eux, les responsables ne peuvent exercer de recours qu'à proportion de leurs fautes respectives, sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du code civil s'agissant des locateurs d'ouvrage non liés contractuellement entre eux, ou de l'article 1147 du code civil s'ils sont contractuellement liés.
En l'espèce, le manquement de la société Ferbeck à son obligation de délivrance conforme à l'égard de l'acheteur, s'il constitue un manquement contractuel dont cette société doit répondre en sa qualité de vendeur à l'égard de l'acheteur, n'a pas de rôle causal dans la survenance des désordres de délamination puisque ce manquement se confond en réalité avec le constat des désordres litigieux. A l'inverse, il a été vu ci-avant que les défauts de conception et de réalisation du fût en SVR imputables à la société Plasticon sont à l'origine des délaminages constatés, sans preuve de leur imputabilité, même partielle, à d'autres causes telles le caractère erroné des spécifications techniques établies par la société Lab ci-avant été écarté comme non-prouvé.
Dès lors, compte tenu de la faute exclusive de la société Plasticon à l'origine des délaminages, la cour condamne cette société à relever indemne et garantie la société Ferbeck de sa condamnation, ci-avant prononcée, à indemniser la société Lab de ses préjudices.
Sur les demandes accessoires':
La cour confirme la décision attaquée qui a condamné la société Ferbeck, partie perdante, aux dépens de première instance, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire de 115'895 € et les frais d'expertises privées exposés par la société Lab et dont celle-ci justifie à hauteur de 25'606 €.
La cour confirme également la décision attaquée en ce qu'elle a condamné la société Ferbeck à payer à la société Lab la somme de 50'000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Y ajoutant, la cour condamne la société Ferbeck aux dépens de l'instance d'appel et à payer à la société Lab la somme complémentaire de 10'000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Plasticon, également partie perdante à l'instance, est déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et elle est condamnée a indemniser la société Ferbeck des frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'engager à hauteur de la somme de 5'000 €.
La société Plasticon est en outre condamnée à relever indemne et garantie la société Ferbeck des condamnations aux titres des dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'aux titres des sommes allouées à la société Lab sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Déclare irrecevables les demandes indemnitaires de la SAS Lab dirigées contre la SA Plasticon France pour être nouvelles en cause d'appel,
Infirme le jugement rendu le 30 novembre 2020 par le Tribunal de commerce de Lyon en ce qu'il a':
Condamné la société Ferbeck Cheminées Industrielles à payer à la société Lab SA la somme de 513'946 € HT en réparation du préjudice subi par cette dernière suite aux désordres constatés sur la cheminée construite par elle, l'infirmation portant sur le quantum de cette condamnation,
Débouté la société Ferbeck Cheminées Industrielles de l'ensemble de ses demandes,
Statuant à nouveau sur ces points,
Condamne la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles à payer à la SAS Lab la somme de 129'048 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices financiers résultant du défaut de conformité de la cheminée fournie,
Rejette la fin de non-recevoir soulevée par la SA Plasticon France et en conséquence, déclare la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles recevable à rechercher la responsabilité contractuelle de droit commun du fabricant,
Condamne la SA Plasticon France, prise en la personne de son représentant légal, à payer à la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles la somme de la somme de 112'748 €, assortie des intérêts à compter de la présente décision, avec capitalisation des intérêts échus depuis plus d'une année à compter de la présente décision,
Rejette la fin de non-recevoir soulevée par la SA Plasticon France et déclare la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles recevable en son appel en garantie dirigée contre le fabricant,
Condamne la SA Plasticon France, prise en la personne de son représentant légal, à payer à la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles de la condamnation ci-avant prononcée à son encontre en principal et intérêts,
Confirme le jugement rendu le 30 novembre 2020 par le Tribunal de commerce de Lyon pour le surplus de ses dispositions critiquées.
Y ajoutant,
Rejette la demande indemnitaire de la SA Ferbeck Cheminées Industrielles tendant à voir condamner la SAS Lab à l'indemniser de son préjudice,
Condamne la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles aux dépens de l'instance d'appel,
Condamne la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles à payer à la SAS Lab la somme de 10'000 € à valoir sur les frais irrépétibles exposés par cette société à hauteur d'appel,
Rejette les demandes de la SA Plasticon France et de la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SA Plasticon France, prise en la personne de son représentant légal, à payer à la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles la somme de 5'000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SA Plasticon France, prise en la personne de son représentant légal, à relever et garantir la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles des condamnations prononcées à son encontre au titre des dépens de première instance et d'appel, des frais d'expertise judiciaire et privée et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Décision du Tribunal de Commerce de Lyon au fond du 30 novembre 2020
RG : 2018j01965
S.A. FERBECK CHEMINEES INDUSTRIELLES
C/
S.A. LAB SA
S.A. PLASTICON FRANCE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRÊT DU 24 Septembre 2025
APPELANTE :
FERBECK CHEMINEES INDUSTRIELLES, société par actions simplifiée au capital de 201.250 € immatriculée au RCS de Versailles sous le numéro 519 567 077, ayant son siège social [Adresse 2] à [Localité 5], représentée par son représentant légal domicilié en cette qualité au dit siège
Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938
Ayant pour avocat plaidant Me Natacha SINELNIKOFF, avocat au barreau de LYON
INTIMÉES :
La société LAB, société par actions simplifiée au capital de 5.392.160,00 euros, inscrite au Registre du commerce et des sociétés de LYON sous le numéro 428 679 385, dont le siège social est [Adresse 1], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Vincent DE FOURCROY de la SELARL DE FOURCROY AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 1102
Ayant pour avocat plaidant Me Rémi HANACHOWICZ, Associé de la SCP O. RENAULT & ASSOCIES, Enseigne LAMARTINE CONSEIL, avocat au barreau de LYON
La société PLASTICON France SA, société anonyme immatriculée au RCS de LA ROCHE-SUR-YON sous le numéro 546 150 053 ayant son siège social [Adresse 7] à [Localité 3], représentée par son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Jacques DUFOUR de la SELARL DUFOUR & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 74
Ayant pour avocat plaidant Me Philippe MATHURIN de la SELARL ALERION, avocat au barreau de PARIS
* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 13 Septembre 2023
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 16 Avril 2025
Date de mise à disposition : 24 Septembre 2025
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Bénédicte BOISSELET, président
- Véronique DRAHI, conseiller
- Nathalie LAURENT, conseiller
assistés pendant les débats de William BOUKADIA, greffier
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Bénédicte BOISSELET, président, et par William BOUKADIA, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
EXPOSÉ DU LITIGE
Dans le cadre de la construction d'une centrale thermique à charbon sur le site de [Localité 4] en Guadeloupe, la société Caraïbes Énergie, devenue Albioma Caraïbes, maître de l'ouvrage, a, suivant marché de travaux du 4 juillet 2008, confié à la SAS Lab le lot 12 «'traitement des fumées'», soit les études, la fourniture, le montage, les essais et la mise en service d'une installation de traitement de désulfuration des fumées et de ses auxiliaires.
Suivant «'bon de commande'» du 26 septembre 2008, la société Lab a confié à la SA Ferbeck Cheminées Industrielles d'une part, l'étude, la fourniture, la fabrication et la mise à disposition «'ex-works'» de la cheminée autoportante destinée à cette installation, et d'autre part, une assistance au montage de la cheminée autoportante «'par un superviseur du vendeur'», le tout au prix global de 300'000 € HT.
Suivant document intitulé «'contrat de sous-traitance'» du 28 octobre 2008, la société Ferbeck Cheminées Industrielles a confié à la SA Plasticon France la réalisation du fût intérieur en SVR (stratifié verre résine) de la cheminée au prix global et forfaitaire de 93'000 € HT.
La société Plasticon France s'est fournie en résine auprès de la société de droit espagnol Ashland Chemical Hispana SL.
Le 30 mars 2010, les sociétés Lab et Ferbeck ont signé un procès-verbal de réception de travaux, soit un constat provisoire de fin de montage, avec des réserves sans lien avec le présent litige.
Le 6 avril 2011, la société Caraïbes Energie et la société Lab ont signé un procès-verbal de mise en service intervenue le 8 mars 2011, date du transfert de propriété des ouvrages réalisés.
***
Par lettre recommandée du 1er août 2013, la société Albioma Caraïbes a signalé à la société Lab l'apparition de «'dégradations importantes sur la gaine de la cheminée principale et sur le by-pass dont la gravité pourrait affecter l'intégrité mécanique des équipements'», lui demandant d'y remédier dans les plus brefs délais.
Exposant que ses démarches amiables en vue de partager le coût des réparations nécessaires étaient restées vaines, la société Lab a attrait la société Ferbeck en référé-expertise et, après l'appel en cause de la société Plasticon par la société Ferbeck, le président du tribunal de commerce de Lyon a, par ordonnance du 31 mars 2014, désigné M. [E] [S] en qualité d'expert.
La société Plasticon a saisi le juge des référés afin, d'une part, que les opérations d'expertise soient rendues communes et opposables aux sociétés Hashland et Albioma Caraïbes, et d'autre part, que la mission de l'expert soit étendue aux conditions d'exploitation de la centrale. La cour d'appel de Lyon a, par un arrêt du 3 février 2015, infirmé la décision du juge consulaire qui avait rejeté ces demandes.
Par ordonnance du 7 juin 2017, le juge chargé du contrôle des expertises du tribunal de commerce de Lyon a ordonné à la société Albioma Caraïbes de communiquer à l'expert les relevés de températures des fumées introduites dans la cheminée de la centrale à charbon depuis sa mise en service jusqu'au 1er janvier 2013 et depuis la réparation de la cheminée en 2015. La société Albioma Caraïbes n'a jamais communiqué lesdits relevés.
L'expert judiciaire, qui s'était adjoint les services du Centre Technique des Industries Mécaniques (CETIM) de [Localité 6] comme sapiteur, a déposé son rapport le 22 juin 2018 aux termes duquel il conclut que les «'chocs thermiques envisagés ne sont pas à l'origine des désordres constatés'» qui résultent de «'défauts de conception et de réalisation du fût intérieur en SVR'», tenant plus précisément à une teneur en fibres de verre et à des taux de fibres incorrects.
Au vu de ce rapport et par exploit du 13 décembre 2018, la société Lab a fait assigner au fond la société Ferbeck, laquelle a, par exploit du 1er février 2019, fait appeler la société Plasticon en intervention forcée.
Par jugement du 30 novembre 2020, le Tribunal de commerce de Lyon a statué ainsi':
Prend acte de la jonction des instances enrôlées sous les numéros 2018J1965 et 2019J247 ordonnée par jugement du tribunal de commerce de Lyon en date du 21 février 2019,
Déboute la société Lab SA de sa demande d'homologation du rapport d'expertise déposé le 22 juin 2018,
Déboute la société Ferbeck Cheminées Industrielles de l'ensemble de ses demandes,
Juge que la société Ferbeck Cheminées Industrielles a manqué à son obligation de délivrance conforme, la cheminée fournie par elle ne répondant pas aux spécifications convenues,
Condamne la société Ferbeck Cheminées Industrielles à payer à la société Lab SA la somme de 513'946 € HT en réparation du préjudice subi par cette dernière suite aux désordres constatés sur la cheminée construite par elle,
Condamne la société Ferbeck Cheminées Industrielles à payer à la société Lab SA la somme de 50'000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Ferbeck Cheminées Industrielles aux dépens de l'instance, y compris les frais d'expert et d'expertises demandées par le tribunal,
Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement,
Rejette toute demande plus ample ou contraire.
Le tribunal a retenu en substance':
Sur l'homologation du rapport d'expertise': que beaucoup d'éléments sont manquants pour permettre une analyse approfondie de la situation mais qu'en tout état de cause, il n'est question d'homologuer un rapport d'expertise';
Sur la responsabilité de Plasticon':
Que le contrat passé entre Ferbeck et Plasticon, daté du 28 octobre 2008 et intitulé «'contrat de sous-traitance'», est en fait un contrat de fourniture d'un produit spécifique, fabriqué à façon et sur mesure selon un cahier des charges et livré dans un atelier appartenant à Ferbeck au Portugal'; que dès lors, Ferbeck reste responsable de la mise en 'uvre de ce fût, à savoir son transport, son assemblage et sa mise en production';
Que l'article 10 de ce contrat mentionne une garantie de parfait achèvement de 24 mois après réception et l'accusé de réception du bon de commande, signé par Ferbeck, précise que la garantie est d'un an contre tout vice de fabrication'; que les désordres signalés par Albioma datent du 1er août 2013, soit plus de deux ans après la mise en production du 6 avril 2011'; que dès lors, la responsabilité de la société Plasticon n'est pas engagée car la garantie convenue est expirée ;
Sur la responsabilité de Ferbeck':
Que la société Ferbeck est sous-traitant de Lab et elle a engagé sa responsabilité contractuelle du fait des dommages après réception, sa faute étant prouvée par le rapport d'expertise qui a, sans ambiguïté, mis en évidence les carences de la cheminée fournie et installée';
Que la société Albioma a utilisé la cheminée conformément à l'usage qui devait en être fait, laquelle cheminée ne répondait pas aux exigences normalement attendues pour un tel usage ; que la société Ferbeck a manqué à son obligation de délivrance conforme';
Sur le montant des indemnités': que les préjudices ont été analysés par l'expert et le tribunal retient comme dûment justifiés divers postes ; qu'en revanche, le coût du temps passé par le personnel de la société Lab constitue des charges fixes qui n'entrent pas dans les préjudices ; qu'il n'y a pas lieu non plus de retenir la quote-part de frais généraux sur l'administration et le traitement des factures.
Par déclaration en date du 21 décembre 2020, la SA Ferbeck Cheminées Industrielles a relevé appel de cette décision, à l'encontre des sociétés Lab et Plasticon France, en tous ses chefs.
Par ordonnance du 1er décembre 2021, le conseiller de la mise en état a déclaré la société Plasticon France, intimée, irrecevable à solliciter la radiation de l'affaire dans la mesure où elle n'est pas le bénéficiaire des condamnations non-exécutées.
Parallèlement et par déclaration en date du 10 février 2021, la SA Lab a relevé appel de cette décision, à l'encontre des sociétés Ferbeck Cheminées Industrielles et Pasticon France, en tous ses chefs.
Par ordonnance du 12 septembre 2022, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des procédures.
***
Aux termes de ses écritures remises au greffe par voie électronique le 4 février 2022 (conclusions d'appel récapitulatives après jonction), la SAS Lab demande à la cour':
Dire l'appel recevable et bien fondé,
Infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau :
A titre principal
Juger que la société Ferbeck a manqué à son obligation de délivrance conforme, le tube de cheminée en SVR fourni par elle ne répondant pas aux spécifications convenues,
Constater que les désordres trouvent leur origine dans un défaut de réalisation du tube en SVR fabriqué par la société Plasticon pour le compte de la société Ferbeck,
Juger que la société Plasticon a manqué à ses obligations contractuelles à l'égard de la société Ferbeck et que ce manquement caractérise une faute à l'encontre de la société Lab pour laquelle il en est directement découlé un important préjudice,
Par conséquent,
Condamner in solidum les sociétés Ferbeck et Plasticon à verser à la société Lab la somme de 915'551 € en réparation de son préjudice, se décomposant comme suit :
Matériels et travaux : 445'765 €
Coûts de prestations : 13'527 €
Frais de déplacement : 29'048 €
Coût des expertises comprenant les frais d'expertise supportés par Lab et les frais d'expertise judiciaire : 141'501 €
Temps passés par le personnel de la société Lab : 173'733 €
Quote-part de frais généraux 15% sur les achats : 111'977 €
Condamner in solidum les sociétés Ferbeck et Plasticon à verser à la société Lab la somme de 116'670 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais d'avocats en première instance et dans le cadre de la présente procédure d'appel, outre les entiers dépens,
Si par extraordinaire la Cour devait considérer qu'une responsabilité in solidum n'était pas justifiée, il lui sera demandé, à titre subsidiaire de :
Juger que la société Ferbeck a manqué à son obligation de délivrance conforme, le tube de cheminée en SVR fourni par elle ne répondant pas aux spécifications convenues,
Par conséquent,
Condamner la société Ferbeck à verser à la société Lab la somme de 915'551€ en réparation du préjudice qu'elle a subi, se décomposant comme suit :
Matériels et travaux : 445'765 €
Coûts de prestations : 13'527 €
Frais de déplacement : 29'048 €
Coût des expertises comprenant les frais d'expertise supportés par LAB et les frais d'expertise judiciaire : 141'501 €
Temps passés par le personnel de la société Lab : 173'733 €
Quote-part de frais généraux 15% : 111'977 €
Condamner la société Ferbeck à verser à la société Lab la somme de 116'670 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais d'avocats en première instance et dans le cadre de la présente procédure d'appel, outre les entiers dépens.
***
Aux termes de ses écritures remises au greffe par voie électronique le 12 mai 2023 (conclusions récapitulatives après jonction), la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles demande à la cour':
Rejeter l'appel incident de la société Lab,
Infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau :
A titre principal,
Juger la société Ferbeck recevable et bien fondée en ses demandes,
Rejeter l'ensemble des demandes de la société Lab,
Condamner les sociétés LAB et Plasticon à verser la somme de 112'748,00 € HT à la société Ferbeck au titre des travaux exécutés par elle à ses frais avancés outre intérêts et capitalisation,
A défaut,
Juger que la société Plasticon est seule responsable des désordres affectant l'ouvrage livré à la société Lab,
Constater la faute et la défaillance de la société Plasticon et par conséquent sa responsabilité exclusive,
Condamner la société Plasticon à relever et garantir la société Ferbeck de toute condamnation qui pourrait être prononcée contre elle en principal, intérêts et frais,
A titre plus subsidiaire,
Condamner solidairement la société Plasticon aux obligations mises à la charge de la société Ferbeck,
En tout état de cause,
Condamner in solidum les sociétés LAB et Plasticon à payer la somme de 5'000 € à la société Ferbeck au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
***
Aux termes de ses écritures remises au greffe par voie électronique le 6 janvier 2023 (conclusions récapitulatives après jonction n°2), la SA Plasticon France demande à la cour':
1/ A titre principal :
Juger irrecevables les demandes des sociétés Ferbeck et Lab et, par conséquent, rejeter toutes leurs demandes dirigées à l'encontre de la société Plasticon en principal, intérêts, frais et accessoires,
2./ A titre subsidiaire :
Juger que le rapport d'expertise est incomplet en ce que l'expert n'a pas examiné les conditions d'exploitation de la centrale et tiré les conséquences de l'obstruction de la société Albioma Caraïbes aux opérations d'expertise,
Juger que la responsabilité de la société Plasticon ne peut être engagée,
Juger que la société Ferbeck ne justifie pas des coûts des préjudices allégués,
Juger que la société Lab ne justifie pas des coûts et préjudices allégués,
En conséquence,
Rejeter toutes les demandes des sociétés Ferbeck et Lab dirigées à l'encontre de la société Plasticon en principal, frais et accessoires,
Rejeter toutes les demandes formulées à l'encontre de la société Plasticon en principal, frais et accessoires,
3./ En tout état de cause :
Condamner Ferbeck et Lab à payer chacune à la société Plasticon la somme de 10'000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamner Ferbeck et Lab à supporter les dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Me Jacques Dufour, avocat au barreau de Lyon, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
***
Il est renvoyé aux écritures des parties pour plus ample exposé des moyens venant à l'appui de leurs prétentions.
MOTIFS,
A titre liminaire, il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes des parties tendant à voir la cour «'juger'» et «'constater'» lorsqu'elles ne constituent pas des prétentions au sens des articles 4, 5, 31 et 954 du code de procédure civile mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions.
Sur la recevabilité des demandes de la société Lab contre la société Plasticon':
La société Plasticon oppose à la société Lab l'irrecevabilité de ses demandes à son encontre, d'abord parce que ces demandes n'avaient pas été formulées en première instance, ensuite parce que ces demandes sont prescrites. Concernant la prescription, elle rappelle d'abord être fournisseur et non sous-traitant de sorte qu'elle n'est pas intervenue sur le chantier de la société Lab. Sur le fondement des responsabilités contractuelles et extra-contractuelles soumises à une prescription quinquennale, elle rappelle ensuite que le point de départ des actions est la manifestation du dommage, soit le 1er août 2013. Elle en conclut que la société Lab devait agir au plus tard le 1er août 2018 et elle relève que ce n'est que le 10 mai 2021 que la société Lab a formulé pour la première fois une demande de condamnation à son encontre.
La société Lab fait valoir que ses demandes à l'encontre de Plasticon ne sont pas nouvelles puisque, conformément à l'article 565 du code de procédure civile, elles tendent aux mêmes fins que celles déjà présentées en première instance. Elle ajoute que, conformément à l'article 566, ses demandes présentent un lien direct avec ses demandes de première instance puisqu'elles visent à la condamnation nécessaire de l'ensemble des personnes responsables des désordres affectant le tube en SVR de la cheminée livrée.
Par ailleurs, elle considère que son action à l'encontre de cette société n'est pas prescrite, rappelant que les désordres sont apparus en août 2013 et affirmant que l'assignation en référé-expertise du 11 mars 2014 a interrompu le délai de prescription qui a ensuite été suspendu jusqu'à la remise de son rapport par l'expert le 22 juin 2018. Elle en conclut que son exploit du 13 décembre 2018 au fond, l'appel en intervention forcée du sous-traitant le 1er février 2019 et la jonction des instances par le tribunal de commerce par décision du 21 février 2019 sont intervenus avant l'acquisition de la prescription, de même que ses demandes dirigées contre Plasticon au sein de ses écritures du 10 mai 2021.
Sur ce,
En application des articles 547 et 564 du code de procédure civile, il est jugé que le droit d'intimer tous ceux qui ont été parties en première instance n'emporte pas celui de présenter des prétentions à l'encontre des parties contre lesquelles l'appelant n'avait pas conclu en première instance.
En l'espèce, l'exposé des prétentions des parties figurant dans la décision attaquée enseigne, et les dernières conclusions de la société Lab devant les premiers juges confirment, que cette société n'avait présenté aucune demande à l'encontre de la société Plasticon, même après que cette dernière société ait été appelée en intervention forcée par la société Ferbeck. En application de la règle précitée, le droit pour la société appelante d'intimer la société Plasticon n'emporte pas celui de diriger, pour la première fois en cause d'appel, ses demandes indemnitaires à l'encontre de cette société. La circonstance que l'objet des demandes litigieuses soit, d'un point de vue objectif, exactement le même que celles présentées en première instance ne leur fait pas perdre leur caractère nouveau d'un point de vue subjectif puisqu'elles sont dirigées pour la première fois contre la société appelée en cause par la société Ferbeck et désormais intimée. En effet, les demandes indemnitaires présentées contre la société Plasticon ne tendent pas aux mêmes fins que les demandes indemnitaires présentées contre la société Ferbeck à raison de l'absence d'identité des parties concernées. Par ailleurs, ces demandes ne sont ni l'accessoire, ni la conséquence, ni le complément nécessaire des demandes initiales de la société Lab qui n'invoque pas, et encore moins ne démontre, une évolution du litige justifiant qu'elle ajoute des demandes à ses prétentions initiales.
En conséquence, la cour déclare irrecevables les demandes indemnitaires de la société Lab dirigées contre la société Plasticon pour être nouvelles en cause d'appel, sans examen, ni de l'éventuelle prescription de ces demandes, ni de leur bien fondé.
Sur les demandes subsidiaires de la société Lab dirigées contre la société Ferbeck seule':
Sur la responsabilité de la société Ferbeck':
La société Lab invoque les manquements contractuels de la société Ferbeck dont elle considère qu'ils sont établis par le constat fait par l'expert judiciaire des défauts affectant le matériel livré, lequel ne répond pas aux spécifications convenues, ce qui caractérise selon elle un défaut de conformité.
Elle renvoie aux spécifications techniques du cahier des charges qu'elle a établies et qui ont été acceptées par la société Ferbeck, ainsi qu'à la fiche fluides prévoyant, pour tous les cas de fonctionnement, une température «'maxi-méca de 167°C et une plage de variation de 20 à 167°C'». Elle souligne que le fonctionnement en «'by-pass'» était un mode de fonctionnement normal. Or, elle relève qu'à peine deux ans après sa mise en service, la cheminée fournie par Ferbeck était à ce point dégradée qu'elle ne pouvait plus être utilisée sans compromettre la totalité de l'installation. Elle souligne que la situation était devenue dangereuse puisque des morceaux de la couche anti-corrosion sortaient par le haut de la cheminée et chutaient au sol d'une hauteur de 50 mètres.
Elle rappelle que l'analyse détaillée par l'expert judiciaire des relevés de températures communiqués par Albioma Caraïbes pour la période du 1er janvier au 5 août 2013 démontre le respect des conditions d'utilisation contractuelles.
Elle rappelle que l'expert judiciaire a écarté contradictoirement les allégations de la société Plasticon se rapportant à de prétendus dépassements de températures en démontrant que les échantillons présentant des désordres n'ont pas été soumis à des températures supérieures aux limites convenues et elle relève que la société Plasticon n'a pas sollicité de contre-expertise ou de complément d'expertise.
A l'inverse, elle considère que l'expertise judiciaire a mis en évidence des vices de conception et de fabrication du tube de cheminée, tenant à l'hétérogénéité de la composition du matériau et à un déficit de résine par rapport au taux de fibre de verre dans la couche structurelle. Elle rappelle avoir mandaté le CNEP (centre national d'évaluation de la photo-protection), spécialiste des matériaux composites et du vieillissement des matériaux polymères, qui a confirmé ces défauts.
Elle recherche la responsabilité de la société Ferbeck qui a manqué à son obligation de délivrance conforme, rappelant qu'elle a été contrainte de remplacer, à ses frais avancés, le tube de cheminée endommagé par un nouveau tube qui a été correctement conçu et fabriqué par la société NCE.
La société Ferbeck se défend d'avoir commis une inexécution contractuelle. Elle affirme n'avoir joué qu'un rôle d'intermédiaire entre les sociétés Plasticon et Lab et elle souligne qu'elle n'était d'ailleurs pas présente lors de l'inspection du 26 septembre 2013, ni lors des réunions postérieures puisque ses prestations n'étaient pas en cause. À l'inverse, elle fait valoir que la société Plasticon était quant à elle présente à ces réunions. Elle considère que la société Lab ne parvient pas à caractériser une faute à son encontre, rappelant que la société Plasticon a conçu la cheminée conformément aux spécifications techniques de Lab.
Sur ce,
En vertu de l'article 1604 du code civil, l'obligation de délivrance à la charge du vendeur emporte son obligation de répondre des non-conformités de la chose vendue aux spécifications de la commande qu'il a acceptée.
En application de ce texte, la non-conformité à la commande du bien livré suffit à caractériser le manquement contractuel du vendeur.
En l'espèce, il importe de rappeler que la société Lab était en charge du lot 12 «'traitement des fumée'» dont on comprend qu'il incluait la cheminée et le lavoir situé en amont et que, pour la réalisation desdits travaux, cette société a commandé à la société Ferbeck la conception, la fabrication et la mise à disposition de la cheminée autoportante. Le bon de commande du 26 septembre 2008 faisant état d'une mise à disposition «'ex-Works'», le contrat est une vente dite «'à la sortie d'usine'», outre une mission d'assistance confiée au «'vendeur'» pour le montage sur site. Dès lors, la garantie de conformité due par le vendeur prévue par l'article 1604 du code civil invoquée par la société Lab est effectivement applicable à ses relations avec la société Ferbeck, qui a la qualité de vendeur, et cette garantie est mobilisable si ses conditions en sont réunies.
Il importe également de rappeler que si le fût intérieur de la cheminée vendue par la société Ferbeck a été fabriqué et assemblé par la société Plasticon dans les usines françaises et portugaises de chacune des parties comme il sera vu ci-après, les prestations de cette société ne font pas perdre à la société Ferbeck sa qualité de vendeur, seul engagé contractuellement à l'égard de l'acheteur, la société Lab. Dès lors et à ce stade, la cour d'appel écarte l'argumentation de la société Ferbeck tendant à se présenter comme une simple intermédiaire entre les sociétés Lab et Plasticon, sans préjudice des éventuels recours du vendeur contre le fabricant du fût intérieur, siège des désordres.
Sous ces remarques préalables, il résulte en effet du rapport d'expertise judiciaire que les désordres consistent notamment en des délaminations entre la couche mécanique structurelle et la couche anticorrosion du fût intérieur stratifié en SVR fabriqué par la société Plasticon et intégré dans le conduit de la cheminée autoportante conçue et vendue par la société Ferbeck.
L'expert judiciaire a constaté que ces délaminations, qui peuvent atteindre plusieurs mètres de longueur, ont conduit par endroits jusqu'au détachement de plaques de la couche anticorrosion. L'expert judiciaire, qui a pu inspecter le fût intérieur de la cheminée notamment par l'ouverture de deux trappes de visite sur chacune des deux canalisations d'alimentation en fumées, précise que les endommagements se situent au niveau de la canalisation de by-pass, notamment sur la face opposée de cette canalisation et dans la zone située au-dessus. Il indique que la zone située en dessous n'est pas endommagée (pages 18 à 20 du rapport d'expertise).
Compte tenu de la localisation des désordres, le rapport d'expertise judiciaire conclut que «'les désordres proviennent du fait que le fût stratifié SVR n'a pas été capable, sans subir de dommages importants, d'assurer les conditions de service rappelées ci-dessus pour des durées de fonctionnement longues en régime by-pass » (page 68 du rapport). L'on comprend que la température des fumées qui sont introduites dans le fût stratifié en SVR différent selon qu'elles traversent d'abord le laveur situé en amont de la cheminée dans lequel elles sont préalablement refroidies ou selon qu'elles sont dérivées en mode by-pass, dérivation dans le cadre de laquelle leur température est nettement plus élevée.
Il importe dès lors de déterminer si les durées de fonctionnement longues en régime by-pass évoquées par l'expert constituaient une donnée connue du vendeur qui devait en conséquence intégrer ce mode de fonctionnement dans la conception de la cheminée et de son fût intérieur en SVR.
A cet égard, la société Lab justifie que le bon de commande du 26 septembre 2008 signé par la société Ferbeck renvoie à une série de documents contractuels portant les références 10981 OF35 001 rev B, ainsi qu'au paragraphe 3 de la «'spécification technique N°10981 LF 35 003 rév B'». Elle produit une «'spécification technique'» portant la référence 10981 LF 35 001, ainsi qu'une «'fiche fluide'» portant les références 10981 EF 00 009 (rectifiées de manière manuscrite EF 00 012). La société Ferbeck produit également le bon de commande du 26 septembre 2008, lequel comporte en annexe la spécification technique N°10981 LF 35 003 rév B dont l'article 4.3.1.1. renvoie à la fiche fluide 10981 EF 00 009. Il en résulte suffisamment que le vendeur ne conteste pas qu'il s'agit des documents techniques qui lui sont opposables.
Or, cet article 4.3.1.1. des spécifications techniques énonce': «'La fourniture du vendeur devra satisfaire aux conditions de fonctionnement de la fiche fluide Lab 10981 EF 00 009. La cheminée doit satisfaire, sans restriction, aux exigences de la présente spécification sur toute la plage comprise entre le régime mini et le régime maxi-méca de l'installation, que ce soit avec laveur (page 1/2 de la fiche fluide) ou avec by-pass (page 2/2 de la fiche fluide). Ni la configuration en «'by-pass'» ni les changements de configuration ne sont considérés comme régime transitoire.'».
La fiche fluide quant à elle comporte deux pages, la première se rapportant au fonctionnement de la cheminée «'avec laveur'», la seconde se rapportant au fonctionnement de la cheminée «'avec by-pass'». Cette fiche mentionne un fonctionnement «'continu'» avec laveur et un fonctionnement «'discontinu'» avec by-pass et elle indique que les températures de fumées sont, pour le fonctionnement avec laveur, de 52° minimum à 53° maximum et, pour le fonctionnement en by-pass, de 131° minimum à 145° maximum. Elle indique également, pour chacun des deux modes de fonctionnement, que la température maxi-méca des fumées est de 167°C et que la plage de variation est de 20° à 167°C.
L'expert judiciaire souligne à raison qu'aucune clause contractuelle ne limite la durée du fonctionnement en by-pass (page 69 du rapport), ce que la société Ferbeck ne discute d'ailleurs pas. La cour relève que la fiche fluide, si elle mentionne respectivement «'continu'» et «'discontinu'» concernant les durées de fonctionnement en mode laveur et en mode by-pass, n'apportent pas d'autres précisions concernant la durée de sorte que le mode by-pass, s'il ne constitue pas le principe, n'est pas pour autant conçu comme un mode exceptionnel. En tout état de cause, la plage de variation prévue pour chacun des deux modes de fonctionnement est de 20° à 167°.
Or et en réponse aux dires de la société Plasticon, l'expert judiciaire a écarté, sur la base des relevés de températures en sortie de cheminée communiqués par la société Albioma Caraïbes pour la période du 1er janvier au 5 août 2013, une utilisation de la cheminée par l'exploitant à des températures dépassant les limites contractuelles. Si l'exploitant n'a pas communiqué les relevés de températures antérieurs à 2013 et postérieurs aux réparations, malgré l'injonction du juge chargé du contrôle des expertises, les mesures réalisées par le CETIM (Centre technique des industries mécaniques) auquel l'expert [S] avait transmis des échantillons délaminés prélevés sur site ont établies que les durées d'expositions contractuelles sont suffisantes pour atteindre les températures de transitions mesurées sur les échantillons.
L'expert judiciaire en conclut que les désordres observés peuvent se développer en l'état des temps contractuels d'exposition aux fumées chaudes (notamment pages 30 et suivantes du rapport d'expertise).
Il en résulte que la société Lab rapporte régulièrement la preuve de la non-conformité de la cheminée vendue par la société Ferbeck aux spécifications techniques convenues puisque le délaminage du stratifié du fût intérieur constaté est compatible avec une exploitation strictement conforme aux températures contractuelles auxquelles le stratifié mis en 'uvre devait, pour être adapté au fonctionnement de la cheminée, résister sans dommage.
Le jugement attaqué, en ce qu'il a retenu que la société Ferbeck avait manqué à son obligation de délivrance conforme dans la mesure où la cheminée fournie ne répondaient pas aux spécifications convenues, est en conséquence confirmé.
Sur les préjudices':
La société Lab décompose son préjudice en sept postes qu'elle a soumis à l'expert judiciaire, justificatifs à l'appui, et elle forme appel incident de la décision du tribunal de commerce dont elle considère qu'elle ne l'a indemnisée que partiellement de son préjudice.
Elle réclame d'abord l'indemnisation des frais de remplacement de la cheminée en incluant le coût des matériels et travaux, le coût des prestations et les frais de déplacement pour un total de 488'340 € HT comme validé par l'expert judiciaire. Elle souligne que le coût est plus important que le prix initial de la commande passée à la société Ferbeck puisqu'il inclut le coût du démontage du conduit endommagé et celui de la post-cuisson du nouveau tube en SVR. Elle fait valoir que la facture se rapportant aux prestations concerne un prestataire auquel elle avait confié deux missions distinctes dont l'une est relative à la présente affaire.
Elle réclame ensuite l'indemnisation du temps passé par son personnel à hauteur de 173'733 €, ce préjudice ayant été validé par l'expert judiciaire mais écarté par les premiers juges. Or elle fait valoir que ces temps doivent être indemnisés puisqu'en l'absence de sinistre, ils auraient été engagés à la réalisation d'opérations facturables. Elle rappelle que ses évaluations ont été certifiées par son commissaire aux comptes.
Elle réclame également une indemnité de 111'977 € HT au titre d'une quote-part de frais généraux qu'elle calcule en appliquant un taux de 15 % sur les autres préjudices.
La société Ferbeck ne répond pas sur ces points.
La société Plasticon souligne que le total des travaux facturés par la société NCE dépasse largement le montant de la commande initiale de 190'000 € et elle estime que ce dépassement ne peut pas correspondre aux frais de dépose et de pose du nouveau tube puisque la société Ferbeck indique y avoir procédé à ses frais avancés, ni aux frais de post-cuisson, sauf à comprendre qu'ils n'étaient pas intégrés dans la commande de janvier 2014. Elle relève en outre que le coût global réclamé est trois fois plus élevé que la fourniture initiale du fût par ses soins.
Concernant les frais engagés, elles relèvent qu'ils ne concernent non pas la fourniture du tube mais l'après-vente, paraissant d'ailleurs en lien avec un problème de laminage.
Concernant le coût des prestations réclamé, elle relève que la facture de la société JAM Ingénieurie porte en réalité sur deux missions dont seul 8'616,25 € concerne le dossier «'Caraïbes'», sans que cette répartition ne puisse être vérifiable.
Concernant les frais de déplacement, elle relève qu'ils incluent des frais postérieurs aux travaux de remise en état. Concernant le temps passé, elle considère que les sommes réclamées ne sont pas vérifiables et qu'elles constituent en outre des charges fixes de la société Lab comme exactement retenu par les premiers juges. Elle conteste également que les frais généraux réclamés constituent un préjudice indemnisable.
Sur ce,
Les dommages-intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi, sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit.
En vertu de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
En l'espèce et concernant le coût des matériels et travaux initialement évalués à 445'765 € HT, la société Lab renvoie au rapport d'expertise judiciaire en ce qu'il a proposé de retenir la somme de 445'765 € HT au titre de ce préjudice, mais sans produire, dans le cade de la présente instance, la série de pièces justificatives numérotées 87A n°1 à 41 soumises à l'expert. En particulier, la cour d'appel ne dispose pas du devis de la société NCE qui a réalisé le fût intérieur de remplacement, ni de la facture de cette société et la cour d'appel rappelle qu'en vertu de l'article 246 du code de procédure civile, les conclusions expertales ne lient pas le juge.
Si, par déduction, l'on comprend de l'argumentation de la société Plasticon que la facture de la société NCE serait d'un montant de 267'000 € en ce qu'elle présenterait un dépassement de 77'000 € par rapport à un devis initial qui serait quant à lui de 190'000 €, ces déductions sont insuffisantes à pallier l'absence de production des justificatifs correspondants, d'autant que la société Plasticon précise qu'elle formule ses observations sans que le détail de la commande n'ait été versé au contradictoire des parties.
Par ailleurs, la société Lab verse aux débats un décompte contemporain de l'instance en référé-expertise dans le cadre duquel elle évaluait le coût des travaux de reprise, hors prestations complémentaires, à 396'000 €. Ce décompte, en ce qu'il est établi par la société Lab elle-même, n'a aucune valeur probante.
Cela étant, dans la mesure où la réalité des travaux de reprise réalisés en 2015 n'est pas contestée, la cour d'appel retient, sur la base du contrat de sous-traitance qui avait été conclu entre la société Ferbeck et la société Plasticon, que le coût de conception et de fabrication d'un fût intérieur en SVR était alors de 93'000 €, coût qu'il convient de revaloriser à 100'000 € pour tenir compte de l'évolution de l'indice BT01 entre 2008 et 2015.
En revanche, les travaux de montage et de démontage ayant été réalisés par la société Ferbeck à ses frais avancés, la société Lab ne peut réclamer aucune somme à ce titre.
En conséquence, la cour retient que le préjudice financier de la société Lab au titre du coût des travaux de reprise (matériels et travaux) est de 100'000 €.
Concernant le coût des «'prestations'» réclamées à hauteur de 13'527 €, la société Lab ne produit pas les pièces 87C numéro 64 à 66 soumises à l'expert et les extraits de la facture de la société JAM Ingénieurie que la société Plasticon a insérés dans ses écritures sont insuffisants à pallier la carence de la société Lab dans l'administration de la preuve de son préjudice financier correspondant, d'autant que, là encore, la société Plasticon précise qu'elle ne s'est pas vue communiquer la totalité desdits justificatifs. Dès lors, la société Lab échoue à rapporter la preuve d'un préjudice tenant à des frais de «'prestations'».
Concernant le frais de déplacements réclamés à hauteur de 29'048 € HT, la société Lab ne produit pas les pièces 87D numéro 67 à 119 soumises à l'expert mais elle verse aux débats une note de son directeur général exposant les modalités de calculs de ce préjudice et l'attestation de son commissaire aux comptes qui indique ne pas avoir d'observations à formuler sur la cohérence de ces évaluations avec les données internes à l'entité en lien avec la comptabilité. Ces éléments établissent suffisamment la réalité et le quantum des frais de déplacement dont il est réclamé l'indemnisation, avec cette précision que cette évaluation porte tant sur les frais de déplacement en lien avec les travaux de reprise, que de ceux se rapportant au suivi de l'expertise judiciaire comme relevé par l'expert judiciaire. Ainsi, la cour retient que le préjudice financier de la société Lab au titre des frais de déplacement de son personnel est de 29'048 €.
Concernant l'indemnisation du temps passé par son personnel évalué à 173'733 €, même certifié par le commissaire aux comptes, il ne constitue pas un préjudice financier mais des charges fixes comme exactement retenu par les premiers juges. Dès lors, la société Lab échoue à rapporter la preuve d'un préjudice indemnisable de ce chef.
Concernant la quote-part sur frais généraux réclamée à hauteur de 111'977 € HT, les explications de la société Lab concernant les modalités de calculs retenues ne convainquent dès lors qu'une telle évaluation, admissible pour fixer un prix, ne constitue pas un poste de préjudice indemnisable présentant un caractère certain.
Au final, la décision attaquée, qui a condamné la société Ferbeck à payer à la société Lab la somme de 513'946 € HT, est infirmée concernant le quantum de cette condamnation. Statuant à nouveau, la cour condamne la société Ferbeck à payer à la société Lab la somme globale de 129'048 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices financiers résultant du défaut de conformité de la cheminée fournie.
Sur la demande indemnitaire de la société Ferbeck dirigée contre la société Lab':
La société Ferbeck rappelle que la société Plasticon a conçu la cheminée conformément aux spécifications techniques de Lab et elle sollicite en conséquence la condamnation des sociétés Lab et Plasticon à l'indemniser des travaux qu'elle a exécutés afin de remédier aux désordres, soit la somme de 112'748 € hors-taxes, soulignant que l'expert a confirmé l'engagement de ces frais, ainsi que le caractère opportun des travaux ainsi opérés.
La société Lab ne répond pas sur ce point.
Sur ce,
Selon l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
En l'espèce, il ne résulte pas du rapport d'expertise, ni d'aucune des autres pièces produites, que les désordres de délamination et cloquage constatés sur le fût intérieur de la cheminée livrée par la société Ferbeck et pour lesquels elle a réalisé, à ses frais avancés, des travaux de reprise, résulteraient, même pour partie seulement, du caractère erroné des spécifications techniques établies par la société Lab. Si l'expert judiciaire mentionne, page 40 de son rapport, que pour les besoins des travaux de remplacement du fût intérieur endommagé, la société Lab a établi une nouvelle spécification technique et deux nouvelles fiches fluides indiquant une température en régime continu de 150° et des pics de température maximum de 167°, il n'en résulte pas suffisamment que les précédentes spécifications étaient erronées. Dès lors, la société Ferbeck, qui dirige pour la première fois en cause d'appel ses demandes contre la société Lab, échoue à rechercher la responsabilité de cette société dans la survenance des désordres.
La cour d'appel rejette la demande de la société Ferbeck tendant à voir condamner la société Lab, in solidum avec Plasticon, à l'indemniser de son propre préjudice financier.
Sur la demande indemnitaire de la société Ferbeck dirigée contre la société Plasticon :
Sur la recevabilité de cette demande':
La société Plasticon invoque d'abord la prescription de l'action de Ferbeck à son encontre dès lors que, comme retenu par les premiers juges, son contrat, improprement intitulé «'contrat de sous-traitance'», est en réalité un contrat de fourniture prévoyant une garantie d'un an qui est prescrite. Elle conteste être intervenue comme sous-traitant puisqu'elle affirme n'avoir eu aucune intervention sur le chantier de Lab dès lors qu'elle a, pour sa part, livré au Portugal la cheminée qui a ensuite été acheminée en Guadeloupe par Ferbeck, laquelle a participé à son montage avec une mise en service au 8 mars 2011. Elle estime qu'en se plaçant à la date de la découverte des désordres, comme à la date de l'assignation en référé-expertise par la société Lab, ou encore à la date de son appel en cause par la société Ferberck, la garantie d'un an prévue au contrat était expirée.
Elle se défend ensuite d'être tenue de la garantie de parfait achèvement invoquée par la société Ferbeck dès lors que cette garantie ne s'applique qu'aux constructeurs, ce qu'elle n'est pas, outre que cette garantie ne profite qu'au maître de l'ouvrage, ce que ni la société Lab, ni la société Ferbeck ne sont.
Elle conteste l'application de l'article 1792-4 du code civil se rapportant aux fabricants d'EPERS s'agissant d'une responsabilité qui ne peut être invoquée directement que par le maître de l'ouvrage, lequel doit prouver que l'élément a été mis en 'uvre conformément aux directives du fabricant et sans modification.
Elle conteste sa responsabilité contractuelle comme sous-traitant invoquée en même temps que l'obligation de délivrance conforme du vendeur, s'agissant de deux fondements juridiques exclusifs l'un de l'autre. Elle rappelle qu'il revient à la société Ferbeck de choisir le fondement qu'elle invoque. En tout état de cause, elle souligne que la clause contenue dans le contrat de fourniture ramène à un an le délai de prescription et elle estime que cette clause déroge à la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil.
Elle se défend d'avoir renoncé au bénéfice de la prescription en ayant participé pendant quatre ans aux opérations d'expertise, rappelant qu'une renonciation doit être non-équivoque et qu'elle a, à tous les stades de la procédure, contesté sa garantie et sa responsabilité.
Elle invoque pour finir l'irrecevabilité des demandes nouvelles en cause d'appel de la société Ferbeck qui fonde pour la première fois ses demandes sur les articles 1603 et 1792-4 du code civil.
La société Ferbeck conteste le caractère tardif de son action contre la société Plasticon. Elle fait d'abord valoir que, contrairement à ce qu'à retenu les premiers juges, la garantie conventionnelle stipulée ne se confond pas avec la garantie de parfait achèvement qui permet au maître d'ouvrage d'obtenir réparation des désordres qui ont fait l'objet de réserves à réception. Or, elle rappelle que Plasticon, qu'elle soit sous-traitante ou fournisseur, n'a jamais été liée au maître de l'ouvrage et elle estime que la garantie stipulée était purement conventionnelle.
Elle considère ensuite que la responsabilité contractuelle de Plasticon subsiste après l'expiration de la garantie conventionnelle et que sa responsabilité contractuelle de droit commun est soumise à la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil. Elle rappelle que le tribunal de commerce de Lyon a été saisi d'une demande d'expertise moins d'un an après la survenance des désordres qui sont apparus dans le délai de cinq ans à compter de la mise hors service du 8 mars 2011. Elle conteste que la garantie conventionnelle constitue une clause limitative de responsabilité venant réduire le délai de la responsabilité de droit commun.
En toute hypothèse, elle estime que Plasticon a renoncé à toute prescription en participant aux opérations d'expertise ayant mis en lumière ses malfaçons pendant près de quatre ans entre avril 2014 et juin 2018, sans jamais faire mention d'une potentielle irrecevabilité.
Elle relève que Plasticon a été présentes aux opérations diligentées sur site en Guadeloupe et a adressé de nombreux dires à l'expert.
Sur ce,
L'article 1189 ancien du code civil, dans sa rédaction en vigueur en 2008, énonçait que toutes les clauses d'un contrat s'interprètent les unes par rapport aux autres, en donnant à chacune le sens qui respecte la cohérence de l'acte tout entier et que lorsque, dans l'intention commune des parties, plusieurs contrats concourent à une même opération, ils s'interprètent en fonction de celle-ci.
En l'espèce, la cour d'appel relève d'abord, à l'instar des premiers juges, que nonobstant l'utilisation du vocable «'sous-traitant'» dans les documents contractuels liant les parties et en particulier dans les «'conditions particulières du contrat de sous-traitance'» du 28 octobre 2008, la société Plasticon s'est uniquement vu confier la réalisation d'un tubage de cheminée, d'un diamètre intérieur de 2'600 mm et d'une hauteur de 34,5 mètres, devant répondre à des conditions de service précisées dans une fiche fluides, au prix global et forfaitaire de 93'000 € HT.
Il importe de relever qu'aux termes de ce contrat, ce fût intérieur en SVR devait être réalisé dans l'usine du «'sous-traitant'» en France, puis devait être monté sur le conduit de cheminée dans l'usine au Portugal de la société Ferbeck. Ainsi, la société Plasticon est fondée à souligner que, dans le cadre de la prestation qui lui a été confiée par la société Ferbeck, elle n'a exécuté aucuns travaux sur le chantier situé en Guadeloupe et qu'elle n'a pas la qualité de sous-traitant. Si la société Ferbeck renvoie à des compte-rendus de chantier et à des échanges de courriels démontrant la présence de la société Plasticon sur ce chantier, il n'est pas pour autant établi que cette présence était en lien avec la fabrication du fût intérieur de la cheminée puisque la société Lab expose et justifie qu'elle avait conclu directement avec la société Plasticon six contrats portant sur des «'équipements plastiques chaudronnés'» et des «'tuyauteries plastiques'» d'un montant total de 990'677,10 €, hors la commande litigieuse de 93'000 € portant sur le «'tube SVR cheminée'» liant exclusivement Ferbeck et Plasticon.
Dès lors, c'est par des motifs exacts et pertinents tant en droit qu'en fait et que la cour adopte expressément que les premiers juges ont retenu que cette commande ne constitue pas un contrat de location d'ouvrage mais un contrat de fourniture portant sur une partie d'ouvrage conçu pour satisfaire, en état de service, à des exigences précises et déterminées à l'avance.
La cour relève ensuite que la garantie de parfait achèvement de 24 mois stipulée à l'article 10 du document intitulé «'conditions particulières du contrat de sous-traitance'» comme étant due «'après réception par le client ou Ferberck & [X] en vos ateliers'» n'est manifestement pas exclusive d'autres responsabilités dès lors que ce même article 10 énonce in fine': «'De façon générale, le sous-traitant fera siennes toutes les obligations de Ferbeck vis-à-vis de son client pour la part qui la concerne'».
De la même façon la garantie d'un an stipulée dans le courrier de confirmation de commande contre-signée par la société Ferbeck le 2 décembre 2008, n'est pas exclusive d'autres garanties puisqu'elle ménage expressément la garantie de parfait achèvement mentionnée au contrat de sous-traitance en ajoutant «'et au maximum de 24 mois après la réception par le client ou Ferbeck & [X] en vos ateliers suivant article 10 de votre contrat'».
Or, une telle clause ne peut faire une référence sélective aux alinéas de l'article 10 dont il a été vu ci-avant que le dernier ménage la garantie due par le «'sous-traitant'» de «'toutes les obligations de Ferbeck vis-à-vis de son client pour la part qui la concerne'».
Il s'ensuit que ces clauses de garantie d'un an et de 24 mois ne font obstacle à l'action de la société Ferbeck fondée, à titre principal, sur la responsabilité contractuelle de droit commun du fabricant soumise à une prescription quinquennale.
Dès lors, le jugement attaqué, qui a déclaré irrecevables comme étant prescrites les demandes de la société Ferbeck à l'encontre de la société Plasticon, est infirmé.
Statuant à nouveau, la cour rejette la fin de non-recevoir soulevée par la société Plasticon et en conséquence, la cour déclare la société Ferbeck recevable à rechercher la responsabilité contractuelle de droit commun du fabricant, sans qu'il ne soit nécessaire d'examiner la recevabilité des demandes présentées à titre subsidiaire sur les fondements des vices cachés ou de la responsabilité solidaire des fabricants d'EPERS.
Sur la responsabilité de la société Plasticon à l'égard de Ferbeck':
La société Ferbeck recherche la responsabilité de la société Plasticon en faisant valoir que celle-ci est seule responsable des désordres affectant le fût intérieur de la cheminée. Elle affirme que cette société est intervenue comme sous-traitant dès lors que le contrat qui les lie n'est pas un contrat de fourniture courante, ni même d'une fourniture sur-mesure d'équipements puisqu'il s'agissait de la production et de la fourniture d'un produit individualisé, façonné selon des spécifications techniques imposées par la société Lab, non substituables et sur lesquels le rapport d'expertise a particulièrement insisté. Elle rappelle que la société Plasticon était en charge de la conception et la réalisation d'un produit spécifique, renvoyant aux stipulations contractuelles concernant les études d'exécution mises à la charge du sous-traitant.
Elle affirme la société Plasticon s'est comportée comme un sous-traitant puisqu'elle était présente lors de réunion de chantier comme cela résulte des comptes-rendus de chantier produit par la société Lab. Elle renvoie également à des échanges de mails établissant la présence du sous-traitant en Guadeloupe.
En toute hypothèse, que le contrat soit qualifié de sous-traitance ou de fourniture, elle estime que la responsabilité de Plasticon est engagée du fait des manquements constatés. Elle rappelle en effet que le sous-traitant est tenu d'une obligation de résultat et que la jurisprudence applique l'article 1147 du code civil. Elle fait valoir qu'à supposer que Plasticon ne soit qu'un fournisseur, il serait tenu sur le fondement des articles 1603 et suivants du code civil d'une obligation de délivrance conforme.
Elle estime qu'il est établi par le rapport d'expertise que la société Plasticon est responsable de défauts de conception du fût intérieur réalisé, en l'absence de prise en compte des impératifs techniques inhérents à l'installation et notamment à la nécessité d'une résistance aux chocs thermiques lors des mises en by-pass.
Elle affirme que la note de calcul produite par Plasticon dans le cadre des opérations d'expertise a confirmé que ces écarts de température n'ont pas été pris en compte.
Elle rappelle que Plasticon a reconnu que si les conditions de fonctionnement en by-pass avaient été prises en compte comme des conditions de fonctionnement en continu, le design aurait été différent. Elle rappelle que l'expert a mis en cause la teneur en fibres de verre du fût fabriqué, jugée mal maîtrisée.
Elle fait valoir que l'expert a répondu aux objections de Plasticon en précisant notamment que les relevés de température du premier semestre 2013 précédant les désordres avaient été transmis par l'exploitant, lesquels relevés permettaient d'exclure des températures anormales.
A titre subsidiaire, elle recherche la responsabilité de Plasticon sur le fondement de l'article 1792-4 du code civil.
La société Plasticon conteste, à titre subsidiaire, avoir engagé sa responsabilité. Elle considère d'abord que l'expert a été partial en s'abstenant d'examiner les conditions d'exploitation de la centrale par la société Albioma, malgré ses demandes répétées, et en se contentant d'examiner les rapports établis par le CETIM et en se concentrant exclusivement sur les modalités de fabrication du fût intérieur en SVR. Elle dénonce l'obstruction de la société Albioma qui n'a opéré qu'une communication partielle et qui a fait le choix d'une politique de la chaise vide, sans que l'expert ne pousse plus loin les investigations sur ce point. En tout état de cause, elle renvoie aux notes techniques du cabinet LVS ainsi qu'à la note d'Ashland du 8 novembre 2013 qui caractérisent selon elle que les conditions d'exploitation sont à l'origine des désordres.
Concernant la cause des désordres, elle rappelle qu'il existe des fissurations dans le matériau, que ces endommagements sont accompagnés d'un brunissement du composite, qu'il existe des porosités dans le matériau et que le taux de fibres est élevé, ce qui empêche le laboratoire d'apprécier leur qualité d'imprégnation. Elle considère que les écarts de teneur en fibre de verre relevés par le CETIM ne sont pas significatifs mais conformes à la norme NF EN 13121-3 et elle critique le mode d'extraction des fibres utilisé par le laboratoire. Elle considère que l'expert judiciaire n'a pas tiré les conséquences de la non-communication par Albioma des conditions d'exploitation alors que ces éléments sont capital pour apprécier les conditions d'exposition du conduit SVR notamment pendant la période de démarrage qui nécessite de nombreux réglages, comme le démontre au demeurant selon elle le contrôle des performances deux ans après la mise en service selon une pièce 88 produite par la société Lab dans le cadre des opérations d'expertise. Elle estime qu'en réalité, le procédé ne permet pas de garantir que les températures des fumées ne dépassent pas la température du maxi-méca de 167° et elle relève que le by-pass lui-même semble avoir été endommagé et changé, ce qui démontre que les températures ont largement dépassé le cahier des charges. Elle conteste que les travaux du CETIM permettent de conclure que la température de transition vitreuse de plus de 180° puisse être atteinte avec une température de fumées de 145°, affirmant que les tg constatés peuvent s'expliquer par des excès de températures de courtes durées pendant les phases de réglage de l'installation. Elle affirme que les travaux du CETIM ont en réalité démontré que seul un choc thermique de 200°C entraîne un endommagement mécanique du matériau chimiquement altéré, lui-même par des températures excessives. Elle conteste en conséquence l'absence de dépassement des températures contractuelles, mais également le défaut de maîtrise du taux de fibres.
Sur ce,
Selon l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
En l'espèce, il a été vu ci-avant que nonobstant le vocable «'sous-traitant'» dans les documents contractuels liant les parties, le contrat du 28 octobre 2008 comme sa confirmation par la société Ferbeck le 2 décembre 2008, constitue un contrat de fourniture portant sur une partie d'ouvrage conçue pour satisfaire, en état de service, à des exigences précises et déterminées à l'avance et la cour d'appel rappelle, en tant que de besoin, que les régimes spéciaux de responsabilités des fabricants, notamment en cas de produits défectueux ou la responsabilité solidaire des fabricants d'EPERS, ne sont pas exclusifs de la mobilisation de leur responsabilité contractuelle de droit commun à l'égard de l'acheteur en cas de faute prouvée.
A cet égard, les conditions particulières du contrat de «'sous-traitance'» liant les parties renvoient notamment, en son article 2 concernant la description des travaux confiés, aux «'conditions de service suivant fiche fluides Lab n°10981 EF 00 009 page 1 et 2/2'» de sorte que la société Plasticon devait, tout comme la société Ferbeck, intégrer les conditions de fonctionnement de la cheminée pour la réalisation de son fût intérieur en SVR.
Au-delà de la non-conformité ci-avant retenue tenant au constat objectif de la seule différence matérielle entre la chose délivrée et la chose promise, il résulte du rapport d'expertise que la société Pasticon est à l'origine de défauts de conception et de réalisation du fût intérieur en SVR qui sont directement à l'origine des désordres. En effet, l'expert judiciaire a procédé à l'examen par microscope électronique à balayage (MEB) des surfaces délaminées qui a montré des fissurations dans la couche anti-corrosion mais également dans la couche structurelle, ainsi que des porosités de dimensions variables, tandis que le taux massique moyen mesuré par calcination a établi des teneurs en fibres mal maîtrisé par le fabricant. L'expert [S] en conclut que ce «'mode de fabrication crée des zones riches en fibres créant dans ces zones des conditions de nature à générer des délaminages'» (page 70 du rapport).
Par ailleurs, si la carence de la société Albioma à communiquer des relevés de températures plus complets est avérée, les études thermo-mécaniques réalisées par le CETIM ont exclu que les chocs thermiques envisagés soient seuls à l'origine des désordres. La cour d'appel relève à cet égard que l'expert judiciaire a annexé à son rapport et discuté la note technique du cabinet LVS, laquelle se réfère à la note de la société Ashland du 8 novembre 2013, et que la société Plasticon continue de discuter techniquement les conclusions de l'expert, sans pour autant solliciter de contre-expertise. Or, un débat d'une telle technicité ne peut prospérer devant la cour d'appel, d'autant moins que l'expert y a répondu de manière contradictoire et argumenté. En outre, la cour relève que la société Plasticon, qui évoque le contrôle des performances deux ans après la mise en service selon une pièce 88 produite par la société Lab dans le cadre des opérations d'expertise, ne produit pas cette pièce.
Dès lors, la société Plasticon échoue à combattre la preuve, régulièrement rapportée par la société Ferbeck, que des défauts de conception et de réalisation du fût en SVR lui sont imputables et qu'ils sont à l'origine des délaminages constatés. Dans ces conditions, tant bien même l'appelant échoue quant à lui à établir l'existence d'un contrat de sous-traitance, la cour d'appel retient qu'il est néanmoins fondé à rechercher la responsabilité contractuelle du fabricant.
Sur le préjudice':
La société Ferbeck affirme que, dans le cadre des travaux de reprise réalisés par la société NCE et financés par la société Lab, elle a, pour sa part, procédé au démontage du fût endommagé et au montage du nouveau fût suivant offre technique et financière du 12 avril 2014. Elle souligne que l'expert a confirmé l'engagement de ces frais, ainsi que le caractère opportun des travaux correspondants.
La société Plasticon estime que la société Ferbeck ne justifie pas du préjudice de 112'748 € prétendument subi puisque la validation de l'expert ne fait que reprendre les déclarations de Ferbeck qui ne produit aucun justificatif, si ce n'est un devis qui n'établit pas que la dépense a été engagée.
Sur ce,
Les dommages-intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi, sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit.
En l'espèce, la société Ferbeck verse régulièrement aux débats l'offre commerciale qu'elle a adressé le 12 avril 2014 à la société Lab au prix de 112'748 € se rapportant à un descriptif technique de travaux correspondant aux travaux de détubage et retubage de la cheminée du site Gardel. Par ailleurs, l'expert a constaté la bonne réalisation desdits travaux, sans qu'il ne puisse être reproché à l'appelant l'absence d'émission de facture puisqu'il a lui-même réalisé les travaux à ses frais avancés.
Il s'ensuit que la société Ferbeck rapporte régulièrement la preuve du principe et du quantum du préjudice financier qui est résulté du manquement contractuel du fabriquant que la cour d'appel condamne en conséquence à payer à l'appelant la somme de 112'748 €, assortie des intérêts à compter de la présente décision, avec capitalisation des intérêts échus depuis une année.
Sur l'appel en garantie de la société Ferbeck contre la société Plasticon':
Sur la recevabilité':
La société Plasticon invoque l'irrecevabilité de l'appel en garantie de Ferbeck à son encontre, dès lors que l'appelante ne précise pas à quelle instance cet appel en garantie est rattaché, ce qui le rend irrecevable.
Elle invoque encore l'irrecevabilité des demandes nouvelles en cause d'appel de la société Ferbeck qui fonde pour la première fois ses demandes sur les articles 1603 et 1792-4 du code civil.
La société Ferbeck ne répond pas sur ce point.
Sur ce,
En application de l'article 334 du code de procédure civile, une partie assignée en justice est en droit d'en appeler une autre en garantie des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle.
En l'espèce, il n'existe aucune incertitude ni ambiguïté sur le fait que la demande de la société Ferbeck tendant à être relevée indemne et garantie des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre concerne les demandes indemnitaires que la société Lab forme contre elle. La société Plasticon ayant été assignée en intervention forcée par la société Ferbeck par exploit du 1er février 2019 dans l'instance initiée au fond par la société Lab par exploit du 13 décembre 2018, elle ne peut sérieusement prétendre ignorer l'instance à laquelle se rattache l'appel en garantie dont elle fait l'objet.
Son argumentation de ce chef est en conséquence rejetée et la cour d'appel déclare recevable l'appel en garantie fondé, à titre principal sur la responsabilité contractuelle de droit commun formé par la société Ferbeck, sans qu'il ne soit nécessaire d'examiner les demandes subsidiaires de l'appelant fondées sur la garantie des vices cachées et la responsabilité solidaire des fabricants d'EPERS.
Sur le fond':
La société Ferbeck estime que la faute et la défaillance de la société Plasticon est à l'origine exclusive du dommage, sans développer d'argumentation autre que celle ci-avant rappelée concernant la recherche de la responsabilité de la société intimée.
La société Plasticon conteste devoir sa garantie, sans développer sur le fond d'argumentation autre que celle ci-avant rappelée concernant ses critiques des conclusions du rapport d'expertise judiciaire.
Sur ce,
Il est de principe que dans leurs relations entre eux, les responsables ne peuvent exercer de recours qu'à proportion de leurs fautes respectives, sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du code civil s'agissant des locateurs d'ouvrage non liés contractuellement entre eux, ou de l'article 1147 du code civil s'ils sont contractuellement liés.
En l'espèce, le manquement de la société Ferbeck à son obligation de délivrance conforme à l'égard de l'acheteur, s'il constitue un manquement contractuel dont cette société doit répondre en sa qualité de vendeur à l'égard de l'acheteur, n'a pas de rôle causal dans la survenance des désordres de délamination puisque ce manquement se confond en réalité avec le constat des désordres litigieux. A l'inverse, il a été vu ci-avant que les défauts de conception et de réalisation du fût en SVR imputables à la société Plasticon sont à l'origine des délaminages constatés, sans preuve de leur imputabilité, même partielle, à d'autres causes telles le caractère erroné des spécifications techniques établies par la société Lab ci-avant été écarté comme non-prouvé.
Dès lors, compte tenu de la faute exclusive de la société Plasticon à l'origine des délaminages, la cour condamne cette société à relever indemne et garantie la société Ferbeck de sa condamnation, ci-avant prononcée, à indemniser la société Lab de ses préjudices.
Sur les demandes accessoires':
La cour confirme la décision attaquée qui a condamné la société Ferbeck, partie perdante, aux dépens de première instance, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire de 115'895 € et les frais d'expertises privées exposés par la société Lab et dont celle-ci justifie à hauteur de 25'606 €.
La cour confirme également la décision attaquée en ce qu'elle a condamné la société Ferbeck à payer à la société Lab la somme de 50'000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Y ajoutant, la cour condamne la société Ferbeck aux dépens de l'instance d'appel et à payer à la société Lab la somme complémentaire de 10'000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Plasticon, également partie perdante à l'instance, est déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et elle est condamnée a indemniser la société Ferbeck des frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'engager à hauteur de la somme de 5'000 €.
La société Plasticon est en outre condamnée à relever indemne et garantie la société Ferbeck des condamnations aux titres des dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'aux titres des sommes allouées à la société Lab sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Déclare irrecevables les demandes indemnitaires de la SAS Lab dirigées contre la SA Plasticon France pour être nouvelles en cause d'appel,
Infirme le jugement rendu le 30 novembre 2020 par le Tribunal de commerce de Lyon en ce qu'il a':
Condamné la société Ferbeck Cheminées Industrielles à payer à la société Lab SA la somme de 513'946 € HT en réparation du préjudice subi par cette dernière suite aux désordres constatés sur la cheminée construite par elle, l'infirmation portant sur le quantum de cette condamnation,
Débouté la société Ferbeck Cheminées Industrielles de l'ensemble de ses demandes,
Statuant à nouveau sur ces points,
Condamne la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles à payer à la SAS Lab la somme de 129'048 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices financiers résultant du défaut de conformité de la cheminée fournie,
Rejette la fin de non-recevoir soulevée par la SA Plasticon France et en conséquence, déclare la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles recevable à rechercher la responsabilité contractuelle de droit commun du fabricant,
Condamne la SA Plasticon France, prise en la personne de son représentant légal, à payer à la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles la somme de la somme de 112'748 €, assortie des intérêts à compter de la présente décision, avec capitalisation des intérêts échus depuis plus d'une année à compter de la présente décision,
Rejette la fin de non-recevoir soulevée par la SA Plasticon France et déclare la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles recevable en son appel en garantie dirigée contre le fabricant,
Condamne la SA Plasticon France, prise en la personne de son représentant légal, à payer à la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles de la condamnation ci-avant prononcée à son encontre en principal et intérêts,
Confirme le jugement rendu le 30 novembre 2020 par le Tribunal de commerce de Lyon pour le surplus de ses dispositions critiquées.
Y ajoutant,
Rejette la demande indemnitaire de la SA Ferbeck Cheminées Industrielles tendant à voir condamner la SAS Lab à l'indemniser de son préjudice,
Condamne la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles aux dépens de l'instance d'appel,
Condamne la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles à payer à la SAS Lab la somme de 10'000 € à valoir sur les frais irrépétibles exposés par cette société à hauteur d'appel,
Rejette les demandes de la SA Plasticon France et de la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SA Plasticon France, prise en la personne de son représentant légal, à payer à la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles la somme de 5'000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SA Plasticon France, prise en la personne de son représentant légal, à relever et garantir la SAS Ferbeck Cheminées Industrielles des condamnations prononcées à son encontre au titre des dépens de première instance et d'appel, des frais d'expertise judiciaire et privée et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT