CA Colmar, ch. 2 a, 26 septembre 2025, n° 20/03729
COLMAR
Arrêt
Autre
MINUTE N° 441/2025
Copie exécutoire
aux avocats
Le 26 septembre 2025
La greffière
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
DEUXIEME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/03729 -
N° Portalis DBVW-V-B7E-HONA
Décision déférée à la cour : 17 Novembre 2020 par le tribunal judiciaire de MULHOUSE
APPELANTS :
Monsieur [W] [U]
Madame [E] [R] épouse [U]
demeurant ensemble [Adresse 1]
représentés par Me Valérie SPIESER-DECHRISTÉ de la SELARL V² AVOCATS, avocat à la cour.
INTIMÉES :
S.A. MAAF ASSURANCES, représentée par son représentant légal
ayant son siège social [Adresse 3]
représentée par Me Stéphanie ROTH, avocat à la cour.
S.E.L.A.R.L. MJM - [Y] ET ASSOCIES prise en la personne de son représentant légal, agissant par Maître [Y] es qualité de « Mandataire liquidateur » de la « SARL CMI BATIMENT »
sise [Adresse 2]
désistement partiel du 7 avril 2021
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Avril 2025, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre et Madame Nathalie HERY,
chargées du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre
Madame Nathalie HERY, Conseiller
Madame Murielle ROBERT-NICOUD, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffière lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN
ARRÊT contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Corinne ARMSPACH-SENGLE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCÉDURE
Mme [E] [R], épouse [U] et M. [W] [U] ont confié à M. [P] [M], architecte, la réalisation d'une extension à leur maison d'habitation sise à [Localité 4] (Haut-Rhin).
Selon devis accepté du 18 juillet 2009, les travaux de gros oeuvre et de maçonnerie ont été confiés à la SARL CMI bâtiment qui était assurée pour ce qui est de la responsabilité encourue au titre des articles 1792 et suivants du code civil auprès de la SA MAAF Assurances.
Les travaux ont été facturés le 7 octobre 2009, pour un montant TTC de 21 533,55 euros, et n'ont pas fait l'objet d'une réception formelle. La prise de possession des lieux a eu lieu en 2010.
M. [U] a réalisé lui-même la pose des cloisons et les finitions intérieures.
Début 2012, les époux [U] ont constaté divers désordres (affaissement des dalles du rez-de-chaussée et fissures). Ils ont assigné, le 14 décembre 2015, la société MAAF Assurances et la société CMI Bâtiment, en liquidation judiciaire, représentée par Me [A] [Y], liquidateur judiciaire, en référé aux fins d'expertise.
Par ordonnance du 5 janvier 2016, le juge des référés a ordonné l'expertise sollicitée dont les opérations ont été étendues à l'architecte, M. [M], par une seconde ordonnance rendue le 14 février 2017.
L'expert judiciaire, M. [B], a déposé son rapport définitif le 1er décembre 2017, après dépôt d'un pré-rapport et de six notes aux parties.
Contestant les conclusions du rapport d'expertise judiciaire, les époux [U] ont saisi le tribunal de grande instance de Mulhouse, par acte introductif d'instance déposé au greffe le 4 avril 2019, signifié le 2 mai 2019, d'une demande dirigée contre la société CMI bâtiment représentée par son liquidateur, et la société MAAF Assurances aux fins de contre-expertise, et de condamnation de cette dernière à supporter le coût de travaux de remise en état.
Par jugement réputé contradictoire du 17 novembre 2020, la société CMI bâtiment représentée par Me [Y] n'ayant pas constitué avocat, le tribunal judiciaire de Mulhouse a :
- rejeté la demande de contre-expertise judiciaire de M. [U] et Mme [R], épouse [U],
- homologué purement et simplement le rapport d'expertise judiciaire de M. [B] du 1er décembre 2017,
- dit que la SARL CMI Bâtiment, en liquidation judiciaire, est responsable du non-respect des règles parasismiques,
- en ce qui concerne les déformations et fissurations des cloisons, dit qu'il y a lieu de partager la responsabilité, par parts égales, entre M. [U], maître d'ouvrage, maître d'oeuvre et exécutant des cloisons, d'une part, et la SARL CMI Bâtiment, entreprise de gros (sic), d'autre part.
- condamné la SA MAAF Assurances à payer aux époux [U] les sommes de 3 000 euros au titre du non-respect des règles parasismiques et de 22 500 euros au titre des fissures des cloisons,
- rejeté les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens y compris, ceux des deux procédures de référé expertise,
- dit que les frais d'expertise seraient partagés par parts égales entre les parties,
- rejeté toutes autres demandes des parties.
Les époux [U] ont interjeté appel de ce jugement le 7 décembre 2020, en toutes ses dispositions, intimant la société MAAF et la SELARL MMJ [Y] et associés, en qualité de mandataire liquidateur de la société CMI Bâtiment.
Par ordonnance du 7 avril 2021, le magistrat chargé de la mise en état a donné acte du désistement d'appel partiel des appelants à l'égard de la SELARL MJM - [Y] et associés, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société CMI Bâtiment.
Par arrêt mixte du 3 février 2023, la cour a :
- constaté que le désistement d'appel partiel des époux [U] vaut acquiescement aux dispositions du jugement concernant la société CMI Bâtiment, représentée par son liquidateur, à savoir en ce qu'il a dit que la SARL CMI Bâtiment, en liquidation judiciaire, est responsable du non-respect des règles parasismiques et pour moitié en ce qui concerne les déformations et fissurations des cloisons ;
- déclaré en conséquence irrecevables les demandes des époux [U] tendant à voir :
' dire et juger que la société CMI Bâtiment, couverte en responsabilité décennale par la société MAAF Assurances, est seule et entièrement responsable de l'ensemble des désordres constatés par M. [B] dans son rapport du 1er décembre 2017,
' dire et juger que M. [U] n'a à supporter aucune responsabilité quant aux conséquences des dommages constatés sur le second oeuvre,
' condamner la MAAF à supporter l'intégralité du coût de réfection des ouvrages,
- infirmé le jugement du tribunal judiciaire de Mulhouse en date du 17 novembre 2020 en ce qu'il a rejeté la demande de contre-expertise ;
Statuant à nouveau dans cette limite,
- ordonné une mesure d'expertise et commis M. [F] [S] pour y procéder ;
- sursis à statuer pour le surplus.
M. [S] a déposé le 13 septembre 2023, un rapport daté du 9 septembre 2023, aux termes duquel il conclut qu'il n'y a eu aucune évolution depuis le dépôt du rapport de M. [B] du 1er décembre 2017, les flèches mesurées étant parfaitement identiques, que les planchers ayant été réalisés depuis 14 ans le fluage était consommé, et qu'il n'y avait aucune raison que le comportement de l'ouvrage évolue, l'aggravation alléguée résultant d'une erreur contenue dans le rapport de M. [K], reprise par l'Apave.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 1er avril 2025.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 28 mars 2025, les époux [U] demandent à la cour de :
- déclarer recevable et fondé leur appel,
- infirmer le jugement rendu le 17 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Mulhouse, en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau, de :
- juger que la société CMI Bâtiment, couverte en responsabilité décennale par la société MAAF Assurances, est seule et entièrement responsable de l'ensemble des désordres constatés par M. [B] dans son rapport du 1er décembre 2017,
- juger que M. [U] n'a jamais joué le rôle de maître d'oeuvre et qu'il n'a à supporter aucune responsabilité quant aux conséquences des dommages constatés sur le second oeuvre,
- juger par ailleurs que le défaut de respect des normes antisismiques s'étend au défaut de pose des épingles tel que constaté par le rapport de l'Apave daté du 30 août 2018,
- condamner la MAAF, ès-qualités, à supporter l'intégralité du coût de réfection des ouvrages, à savoir selon le rapport [K], le démontage complet du plancher bas du rez-de-chaussée et le remplacement des poutrelles, ainsi que la réfection du plancher suivant les normes parasismiques en reprenant le chaînage périphérique et en faisant de même sur la partie haute du rez-de-chaussée, la reprise des poutraisons,
- condamner la MAAF, ès-qualités, à supporter l'intégralité du coût des travaux détaillés pages 9 et 10 du rapport de M. [K] du 1er octobre 2017, soit au total le montant de 161 972 euros, augmenté des intérêts au taux légal à compter du dépôt des présentes,
- débouter l'intimée de toutes ses fins et prétentions,
- subsidiairement,
- condamner la MAAF à payer la somme de 31 772 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du dépôt des présentes,
- la condamner d'ores et déjà au règlement des frais d'expertise RG 16/00390, outre les entiers frais et dépens des présentes et de la procédure entreprise et payer en sus un montant de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les époux [U] indiquent qu'ils n'acceptent pas les conclusions de M. [S], et considèrent qu'il ne peut être soutenu que tant M. [K] que l'Apave se seraient trompés en intervertissant les mesures des dalles haute et basse.
Ils rappellent le système constructif de l'immeuble, que M. [B] a distingué plusieurs flèches et a considéré que les déformations des deux dalles haute et basse étaient stabilisées, ce qui n'est pas le cas, et ce au surplus en contradiction avec sa propre affirmation selon laquelle la troisième flèche qui correspond à la somme de la flèche instantanée provoquée par le propre poids de la dalle et de la flèche instantanée de surcharge permanente résultant des éléments posés sur la dalle se développerait surtout pendant les premières années mais ne prendrait théoriquement jamais fin. Ils critiquent également le rapport en ce qu'il a retenu que la résistance de la dalle était suffisante et que seules les déformations dépassaient les limites autorisées, alors qu'il admettait pourtant que la section des poutres était insuffisante.
Les appelants reprochent également à M. [B] de n'avoir pas tiré les conséquences du dépassement de la tolérance réglementaire de 1,06 cm et soutiennent que les déformations constatées dépassent les normes de 14 %, et surtout que le moment effectif est supérieur au moment résistant, ce qu'ils estiment inacceptable pour une construction neuve. Ils soulignent qu'en considérant les charges permanentes, ainsi que celles d'exploitation, de mobiliers et de personnes, un risque de rupture serait encouru, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal.
Ils reprochent également au tribunal d'avoir retenu la responsabilité de M. [U], qui n'est ni ingénieur béton, ni ingénieur structure, et ne peut se voir reprocher une acceptation du support, n'ayant pu concevoir que la flèche maximale dépasserait les normes, et considèrent que les désordres trouvent leur origine dans une insuffisance de section des poutrelles mises en oeuvre par la société CMI Bâtiment dont la responsabilité est patente et exclusive. Ils se disent en désaccord avec la position de la cour dans son arrêt du 3 février 2023 et maintiennent leur demande visant à voir déclarer la société CMI Bâtiment seule et entièrement responsable.
S'agissant du non-respect des règles parasismiques, ils font valoir que la proposition de M. [B] de renforcement par une bande TFC de résistance, n'est pas validée par leur expert, M. [K], ni par la société Freyssinet, spécialisée dans ce type de procédé, qui a même refusé de se déplacer, et reprochent à M. [S] d'avoir affirmé que ce refus serait imputable au comportement des appelants, 'tirant des plans sur la comète', alors qu'en réalité, aucune entreprise ne veut procéder aux réparations en raison de la présence de poutrelles discontinues présentant un cintrage important, ce qui empêcherait l'intervention laquelle suppose une certaine planéité.
Ils font grief au premier juge d'avoir homologué le rapport d'expertise judiciaire et retenu que le processus était stabilisé, alors qu'un rapport d'inspection de l'Apave, postérieur au dépôt du rapport d'expertise, démontrait au contraire que les désordres continuaient de s'aggraver, sans que les appelants n'aient modifié leur mode de vie.
Ils estiment que les préconisations de l'expert judiciaire sont inadaptées quant au remède à apporter au défaut de respect des normes parasismiques, et que les réparations des dommages doivent être chiffrées selon les solutions préconisées de M. [K] qui sont seules de nature à mettre un terme définitif aux désordres, et demandent, subsidiairement, la majoration du montant alloué par le premier juge en fonction de la variation de l'indice du coût de la construction.
Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 7 mars 2025, la société MAAF Assurances demande à la cour de :
- juger les époux [U] irrecevables, respectivement mal fondés en leur contestation du partage de responsabilité retenu en première instance,
- confirmer le jugement entrepris,
- débouter les époux [U] de toutes demandes, fins et prétentions,
- condamner les époux [U] aux entiers dépens de la procédure d'appel en ce compris les frais d'expertise judiciaire, ainsi qu'au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La société MAAF approuve l'arrêt qui a déclaré irrecevables les demandes des époux [U] tendant à remettre en cause le jugement de première instance s'agissant du partage de responsabilité par suite du désistement, sans réserves, des époux [U] de leur appel dirigé à l'encontre de la société CMI bâtiment, respectivement de son liquidateur, et soutient qu'ils ne peuvent maintenir cette demande qui a été tranchée.
Elle relève que M. [S] a validé les conclusions du précédent rapport et la mesure à mettre en oeuvre s'agissant du non-respect des règles parasismiques, consistant en la mise en oeuvre de plats carbone TFC qui est de technique courante.
S'agissant de la déformation de la cloison de séparation de la chambre à coucher et de la salle de bains, il a conclu qu'il s'agissait d'un dommage consécutif à l'absence de bande résiliente qui aurait dû être posée sous la cloison, et à la flèche de la dalle basse de l'extension ; il a procédé à des mesures précises qui n'ont pas mis en évidence d'aggravation ; il a estimé qu'en l'absence d'aggravation il n'y avait pas lieu de chiffrer à nouveau les travaux.
Elle relève enfin que les époux [U] ont produit tardivement, à la veille de la clôture, 3 devis pour chiffrer le coût des travaux, or cette demande se heurte aux conclusions concordantes des deux rapports d'expertise judiciaire et considère que l'évaluation de M. [B] non contestée par M. [S] doit être retenue.
Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées et transmises par voie électronique aux dates susvisées.
MOTIFS
Sur la recevabilité des demandes des époux [U] tendant à remettre en cause le partage de responsabilité
Par arrêt du 3 février 2023, la cour a déclaré irrecevables les demandes des époux [U] tendant à voir :
' dire et juger que la société CMI Bâtiment, couverte en responsabilité décennale par la société MAAF Assurances, est seule et entièrement responsable de l'ensemble des désordres constatés par M. [B] dans son rapport du 1er décembre 2017,
' dire et juger que M. [U] n'a à supporter aucune responsabilité quant aux conséquences des dommages constatés sur le second oeuvre,
' condamner la MAAF à supporter l'intégralité du coût de réfection des ouvrages.
Les époux [U] formulent, à nouveau, ces mêmes demandes qui sont irrecevables comme se heurtant à l'autorité de chose jugée de l'arrêt précité.
Sur le préjudice
La question des responsabilités ayant été définitivement tranchée, seule reste en litige l'évaluation du préjudice subi par les époux [U].
Les appelants reprennent les griefs précédemment développés à l'encontre du rapport de M. [B] et se réfèrent sur ce point au rapport établi non contradictoirement à leur demande par M. [K], ainsi qu'à un rapport de l'Apave du 30 août 2018, lesquels ont été soumis à l'expert judiciaire.
S'agissant de la déformation de la cloison de séparation de la chambre à coucher et de la salle de bains, M. [S] indique que le dommage est consécutif à l'absence de bande résiliente qui aurait dû être posée sous la cloison, et à la flèche de la dalle basse de l'extension.
Après avoir procédé à ses propres mesures, M. [S] a constaté que les valeurs des flèches mesurées étaient strictement identiques à celles mesurées en 2017 par M. [B], à savoir 2,05 pour la dalle haute et 2,40 pour la dalle basse, et en a déduit l'absence d'aggravation, soulignant que 14 ans après la construction de l'ouvrage le fluage était consommé et qu'il n'y avait aucune raison que le comportement de l'ouvrage évolue.
Il ressort par ailleurs clairement du rapport de M. [S] que le rapport de M. [K], qui conclut à une aggravation de la flèche affectant la dalle basse, est affecté d'une erreur par suite d'une inversion des valeurs relevées par M. [B] pour les planchers haut et bas. Cette inversion des valeurs est d'autant plus manifeste que la comparaison des valeurs prétendument relevées par M. [B] et de celles mesurées par M. [K] a pour effet d'aboutir à un redressement de la dalle haute, ce qui est strictement impossible. La même erreur a été reproduite dans le rapport de l'Apave qui a repris les valeurs des flèches respectivement mesurées par M. [B] et M. [K] telles que figurant dans le rapport de ce dernier.
M. [S] parvenant, sur la base de ses propres constatations, aux mêmes conclusions, que M. [B], et n'ayant mis en évidence aucune aggravation, les critiques formulées à l'encontre du rapport de M. [B] sont donc inopérantes.
M. [S] n'a pas non plus remis en cause les préconisations de M. [B] pour remédier aux désordres constatés qu'il conviendra de retenir.
En ce qui concerne le non-respect des normes parasismiques, M. [S] relève que s'agissant du non-respect d'une disposition constructive qui n'induit aucun dommage consécutif, la situation n'est pas susceptible de s'aggraver et qu'il convient de mettre l'ouvrage en conformité par la mise en oeuvre d'un plat carbone TFC qui est une technique courante.
Les époux [U] affirment que cette solution ne peut être mise en oeuvre et que la société Freyssinet, qui est titulaire de l'avis technique, a refusé de se déplacer et qu'aucune autre entreprise n'accepte d'intervenir. Ils ne produisent toutefois aucun élément de preuve au soutien de ces affirmations et ne démontrent nullement une impossibilité de mise en oeuvre de cette technique.
Il n'est dès lors pas établi que la solution de mise en oeuvre d'un plat carbone préconisée par M. [B], validée par M. [S], ne soit pas envisageable.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a évalué le coût des travaux de reprise conformément aux préconisation de l'expert, les époux [U] n'ayant produit aucun devis en première instance.
Le jugement étant confirmé tant sur les responsabilités que sur les remèdes à apporter, il n'y a pas lieu de procéder à une réévaluation des montants, les époux [U], qui ne démontrent pas avoir été dans l'impossibilité de faire réaliser les travaux préconisés par M. [B] au coût évalué par celui-ci, ne pouvant faire supporter à l'assureur de l'entreprise partiellement responsable les conséquences de leurs choix procéduraux.
Le jugement entrepris étant confirmé en ses dispositions principales, il le sera également en celles dispositions relatives aux dépens et frais exclus des dépens. Les dépens d'appel seront supportés in solidum par les époux [U] qui succombent, et il sera alloué à la MAAF une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la demande présentée par les appelants sur ce fondement étant rejetée.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,
Vu l'arrêt mixte du 3 février 2023,
DECLARE irrecevables les demandes des époux [U] tendant à voir :
' dire et juger que la société CMI Bâtiment, couverte en responsabilité décennale par la société MAAF Assurances, est seule et entièrement responsable de l'ensemble des désordres constatés par M. [B] dans son rapport du 1er décembre 2017,
' dire et juger que M. [U] n'a à supporter aucune responsabilité quant aux conséquences des dommages constatés sur le second oeuvre,
' condamner la MAAF à supporter l'intégralité du coût de réfection des ouvrages.
CONFIRME le jugement entrepris en ses dispositions frappées d'appel autres que celles ci-dessus et que le rejet de la demande d'expertise ;
Y ajoutant,
CONDAMNE in solidum M. [W] [U] et Mme [E] [R], épouse [U] aux entiers dépens d'appel ainsi qu'à payer à la SA MAAF Assurances la somme de 2 000 € (deux mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE la demande présentée par M. [W] [U] et Mme [E] [R], épouse [U] sur ce fondement.
La greffière, La présidente,
Copie exécutoire
aux avocats
Le 26 septembre 2025
La greffière
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
DEUXIEME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/03729 -
N° Portalis DBVW-V-B7E-HONA
Décision déférée à la cour : 17 Novembre 2020 par le tribunal judiciaire de MULHOUSE
APPELANTS :
Monsieur [W] [U]
Madame [E] [R] épouse [U]
demeurant ensemble [Adresse 1]
représentés par Me Valérie SPIESER-DECHRISTÉ de la SELARL V² AVOCATS, avocat à la cour.
INTIMÉES :
S.A. MAAF ASSURANCES, représentée par son représentant légal
ayant son siège social [Adresse 3]
représentée par Me Stéphanie ROTH, avocat à la cour.
S.E.L.A.R.L. MJM - [Y] ET ASSOCIES prise en la personne de son représentant légal, agissant par Maître [Y] es qualité de « Mandataire liquidateur » de la « SARL CMI BATIMENT »
sise [Adresse 2]
désistement partiel du 7 avril 2021
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Avril 2025, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre et Madame Nathalie HERY,
chargées du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre
Madame Nathalie HERY, Conseiller
Madame Murielle ROBERT-NICOUD, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffière lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN
ARRÊT contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Corinne ARMSPACH-SENGLE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCÉDURE
Mme [E] [R], épouse [U] et M. [W] [U] ont confié à M. [P] [M], architecte, la réalisation d'une extension à leur maison d'habitation sise à [Localité 4] (Haut-Rhin).
Selon devis accepté du 18 juillet 2009, les travaux de gros oeuvre et de maçonnerie ont été confiés à la SARL CMI bâtiment qui était assurée pour ce qui est de la responsabilité encourue au titre des articles 1792 et suivants du code civil auprès de la SA MAAF Assurances.
Les travaux ont été facturés le 7 octobre 2009, pour un montant TTC de 21 533,55 euros, et n'ont pas fait l'objet d'une réception formelle. La prise de possession des lieux a eu lieu en 2010.
M. [U] a réalisé lui-même la pose des cloisons et les finitions intérieures.
Début 2012, les époux [U] ont constaté divers désordres (affaissement des dalles du rez-de-chaussée et fissures). Ils ont assigné, le 14 décembre 2015, la société MAAF Assurances et la société CMI Bâtiment, en liquidation judiciaire, représentée par Me [A] [Y], liquidateur judiciaire, en référé aux fins d'expertise.
Par ordonnance du 5 janvier 2016, le juge des référés a ordonné l'expertise sollicitée dont les opérations ont été étendues à l'architecte, M. [M], par une seconde ordonnance rendue le 14 février 2017.
L'expert judiciaire, M. [B], a déposé son rapport définitif le 1er décembre 2017, après dépôt d'un pré-rapport et de six notes aux parties.
Contestant les conclusions du rapport d'expertise judiciaire, les époux [U] ont saisi le tribunal de grande instance de Mulhouse, par acte introductif d'instance déposé au greffe le 4 avril 2019, signifié le 2 mai 2019, d'une demande dirigée contre la société CMI bâtiment représentée par son liquidateur, et la société MAAF Assurances aux fins de contre-expertise, et de condamnation de cette dernière à supporter le coût de travaux de remise en état.
Par jugement réputé contradictoire du 17 novembre 2020, la société CMI bâtiment représentée par Me [Y] n'ayant pas constitué avocat, le tribunal judiciaire de Mulhouse a :
- rejeté la demande de contre-expertise judiciaire de M. [U] et Mme [R], épouse [U],
- homologué purement et simplement le rapport d'expertise judiciaire de M. [B] du 1er décembre 2017,
- dit que la SARL CMI Bâtiment, en liquidation judiciaire, est responsable du non-respect des règles parasismiques,
- en ce qui concerne les déformations et fissurations des cloisons, dit qu'il y a lieu de partager la responsabilité, par parts égales, entre M. [U], maître d'ouvrage, maître d'oeuvre et exécutant des cloisons, d'une part, et la SARL CMI Bâtiment, entreprise de gros (sic), d'autre part.
- condamné la SA MAAF Assurances à payer aux époux [U] les sommes de 3 000 euros au titre du non-respect des règles parasismiques et de 22 500 euros au titre des fissures des cloisons,
- rejeté les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens y compris, ceux des deux procédures de référé expertise,
- dit que les frais d'expertise seraient partagés par parts égales entre les parties,
- rejeté toutes autres demandes des parties.
Les époux [U] ont interjeté appel de ce jugement le 7 décembre 2020, en toutes ses dispositions, intimant la société MAAF et la SELARL MMJ [Y] et associés, en qualité de mandataire liquidateur de la société CMI Bâtiment.
Par ordonnance du 7 avril 2021, le magistrat chargé de la mise en état a donné acte du désistement d'appel partiel des appelants à l'égard de la SELARL MJM - [Y] et associés, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société CMI Bâtiment.
Par arrêt mixte du 3 février 2023, la cour a :
- constaté que le désistement d'appel partiel des époux [U] vaut acquiescement aux dispositions du jugement concernant la société CMI Bâtiment, représentée par son liquidateur, à savoir en ce qu'il a dit que la SARL CMI Bâtiment, en liquidation judiciaire, est responsable du non-respect des règles parasismiques et pour moitié en ce qui concerne les déformations et fissurations des cloisons ;
- déclaré en conséquence irrecevables les demandes des époux [U] tendant à voir :
' dire et juger que la société CMI Bâtiment, couverte en responsabilité décennale par la société MAAF Assurances, est seule et entièrement responsable de l'ensemble des désordres constatés par M. [B] dans son rapport du 1er décembre 2017,
' dire et juger que M. [U] n'a à supporter aucune responsabilité quant aux conséquences des dommages constatés sur le second oeuvre,
' condamner la MAAF à supporter l'intégralité du coût de réfection des ouvrages,
- infirmé le jugement du tribunal judiciaire de Mulhouse en date du 17 novembre 2020 en ce qu'il a rejeté la demande de contre-expertise ;
Statuant à nouveau dans cette limite,
- ordonné une mesure d'expertise et commis M. [F] [S] pour y procéder ;
- sursis à statuer pour le surplus.
M. [S] a déposé le 13 septembre 2023, un rapport daté du 9 septembre 2023, aux termes duquel il conclut qu'il n'y a eu aucune évolution depuis le dépôt du rapport de M. [B] du 1er décembre 2017, les flèches mesurées étant parfaitement identiques, que les planchers ayant été réalisés depuis 14 ans le fluage était consommé, et qu'il n'y avait aucune raison que le comportement de l'ouvrage évolue, l'aggravation alléguée résultant d'une erreur contenue dans le rapport de M. [K], reprise par l'Apave.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 1er avril 2025.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 28 mars 2025, les époux [U] demandent à la cour de :
- déclarer recevable et fondé leur appel,
- infirmer le jugement rendu le 17 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Mulhouse, en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau, de :
- juger que la société CMI Bâtiment, couverte en responsabilité décennale par la société MAAF Assurances, est seule et entièrement responsable de l'ensemble des désordres constatés par M. [B] dans son rapport du 1er décembre 2017,
- juger que M. [U] n'a jamais joué le rôle de maître d'oeuvre et qu'il n'a à supporter aucune responsabilité quant aux conséquences des dommages constatés sur le second oeuvre,
- juger par ailleurs que le défaut de respect des normes antisismiques s'étend au défaut de pose des épingles tel que constaté par le rapport de l'Apave daté du 30 août 2018,
- condamner la MAAF, ès-qualités, à supporter l'intégralité du coût de réfection des ouvrages, à savoir selon le rapport [K], le démontage complet du plancher bas du rez-de-chaussée et le remplacement des poutrelles, ainsi que la réfection du plancher suivant les normes parasismiques en reprenant le chaînage périphérique et en faisant de même sur la partie haute du rez-de-chaussée, la reprise des poutraisons,
- condamner la MAAF, ès-qualités, à supporter l'intégralité du coût des travaux détaillés pages 9 et 10 du rapport de M. [K] du 1er octobre 2017, soit au total le montant de 161 972 euros, augmenté des intérêts au taux légal à compter du dépôt des présentes,
- débouter l'intimée de toutes ses fins et prétentions,
- subsidiairement,
- condamner la MAAF à payer la somme de 31 772 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du dépôt des présentes,
- la condamner d'ores et déjà au règlement des frais d'expertise RG 16/00390, outre les entiers frais et dépens des présentes et de la procédure entreprise et payer en sus un montant de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les époux [U] indiquent qu'ils n'acceptent pas les conclusions de M. [S], et considèrent qu'il ne peut être soutenu que tant M. [K] que l'Apave se seraient trompés en intervertissant les mesures des dalles haute et basse.
Ils rappellent le système constructif de l'immeuble, que M. [B] a distingué plusieurs flèches et a considéré que les déformations des deux dalles haute et basse étaient stabilisées, ce qui n'est pas le cas, et ce au surplus en contradiction avec sa propre affirmation selon laquelle la troisième flèche qui correspond à la somme de la flèche instantanée provoquée par le propre poids de la dalle et de la flèche instantanée de surcharge permanente résultant des éléments posés sur la dalle se développerait surtout pendant les premières années mais ne prendrait théoriquement jamais fin. Ils critiquent également le rapport en ce qu'il a retenu que la résistance de la dalle était suffisante et que seules les déformations dépassaient les limites autorisées, alors qu'il admettait pourtant que la section des poutres était insuffisante.
Les appelants reprochent également à M. [B] de n'avoir pas tiré les conséquences du dépassement de la tolérance réglementaire de 1,06 cm et soutiennent que les déformations constatées dépassent les normes de 14 %, et surtout que le moment effectif est supérieur au moment résistant, ce qu'ils estiment inacceptable pour une construction neuve. Ils soulignent qu'en considérant les charges permanentes, ainsi que celles d'exploitation, de mobiliers et de personnes, un risque de rupture serait encouru, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal.
Ils reprochent également au tribunal d'avoir retenu la responsabilité de M. [U], qui n'est ni ingénieur béton, ni ingénieur structure, et ne peut se voir reprocher une acceptation du support, n'ayant pu concevoir que la flèche maximale dépasserait les normes, et considèrent que les désordres trouvent leur origine dans une insuffisance de section des poutrelles mises en oeuvre par la société CMI Bâtiment dont la responsabilité est patente et exclusive. Ils se disent en désaccord avec la position de la cour dans son arrêt du 3 février 2023 et maintiennent leur demande visant à voir déclarer la société CMI Bâtiment seule et entièrement responsable.
S'agissant du non-respect des règles parasismiques, ils font valoir que la proposition de M. [B] de renforcement par une bande TFC de résistance, n'est pas validée par leur expert, M. [K], ni par la société Freyssinet, spécialisée dans ce type de procédé, qui a même refusé de se déplacer, et reprochent à M. [S] d'avoir affirmé que ce refus serait imputable au comportement des appelants, 'tirant des plans sur la comète', alors qu'en réalité, aucune entreprise ne veut procéder aux réparations en raison de la présence de poutrelles discontinues présentant un cintrage important, ce qui empêcherait l'intervention laquelle suppose une certaine planéité.
Ils font grief au premier juge d'avoir homologué le rapport d'expertise judiciaire et retenu que le processus était stabilisé, alors qu'un rapport d'inspection de l'Apave, postérieur au dépôt du rapport d'expertise, démontrait au contraire que les désordres continuaient de s'aggraver, sans que les appelants n'aient modifié leur mode de vie.
Ils estiment que les préconisations de l'expert judiciaire sont inadaptées quant au remède à apporter au défaut de respect des normes parasismiques, et que les réparations des dommages doivent être chiffrées selon les solutions préconisées de M. [K] qui sont seules de nature à mettre un terme définitif aux désordres, et demandent, subsidiairement, la majoration du montant alloué par le premier juge en fonction de la variation de l'indice du coût de la construction.
Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 7 mars 2025, la société MAAF Assurances demande à la cour de :
- juger les époux [U] irrecevables, respectivement mal fondés en leur contestation du partage de responsabilité retenu en première instance,
- confirmer le jugement entrepris,
- débouter les époux [U] de toutes demandes, fins et prétentions,
- condamner les époux [U] aux entiers dépens de la procédure d'appel en ce compris les frais d'expertise judiciaire, ainsi qu'au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La société MAAF approuve l'arrêt qui a déclaré irrecevables les demandes des époux [U] tendant à remettre en cause le jugement de première instance s'agissant du partage de responsabilité par suite du désistement, sans réserves, des époux [U] de leur appel dirigé à l'encontre de la société CMI bâtiment, respectivement de son liquidateur, et soutient qu'ils ne peuvent maintenir cette demande qui a été tranchée.
Elle relève que M. [S] a validé les conclusions du précédent rapport et la mesure à mettre en oeuvre s'agissant du non-respect des règles parasismiques, consistant en la mise en oeuvre de plats carbone TFC qui est de technique courante.
S'agissant de la déformation de la cloison de séparation de la chambre à coucher et de la salle de bains, il a conclu qu'il s'agissait d'un dommage consécutif à l'absence de bande résiliente qui aurait dû être posée sous la cloison, et à la flèche de la dalle basse de l'extension ; il a procédé à des mesures précises qui n'ont pas mis en évidence d'aggravation ; il a estimé qu'en l'absence d'aggravation il n'y avait pas lieu de chiffrer à nouveau les travaux.
Elle relève enfin que les époux [U] ont produit tardivement, à la veille de la clôture, 3 devis pour chiffrer le coût des travaux, or cette demande se heurte aux conclusions concordantes des deux rapports d'expertise judiciaire et considère que l'évaluation de M. [B] non contestée par M. [S] doit être retenue.
Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées et transmises par voie électronique aux dates susvisées.
MOTIFS
Sur la recevabilité des demandes des époux [U] tendant à remettre en cause le partage de responsabilité
Par arrêt du 3 février 2023, la cour a déclaré irrecevables les demandes des époux [U] tendant à voir :
' dire et juger que la société CMI Bâtiment, couverte en responsabilité décennale par la société MAAF Assurances, est seule et entièrement responsable de l'ensemble des désordres constatés par M. [B] dans son rapport du 1er décembre 2017,
' dire et juger que M. [U] n'a à supporter aucune responsabilité quant aux conséquences des dommages constatés sur le second oeuvre,
' condamner la MAAF à supporter l'intégralité du coût de réfection des ouvrages.
Les époux [U] formulent, à nouveau, ces mêmes demandes qui sont irrecevables comme se heurtant à l'autorité de chose jugée de l'arrêt précité.
Sur le préjudice
La question des responsabilités ayant été définitivement tranchée, seule reste en litige l'évaluation du préjudice subi par les époux [U].
Les appelants reprennent les griefs précédemment développés à l'encontre du rapport de M. [B] et se réfèrent sur ce point au rapport établi non contradictoirement à leur demande par M. [K], ainsi qu'à un rapport de l'Apave du 30 août 2018, lesquels ont été soumis à l'expert judiciaire.
S'agissant de la déformation de la cloison de séparation de la chambre à coucher et de la salle de bains, M. [S] indique que le dommage est consécutif à l'absence de bande résiliente qui aurait dû être posée sous la cloison, et à la flèche de la dalle basse de l'extension.
Après avoir procédé à ses propres mesures, M. [S] a constaté que les valeurs des flèches mesurées étaient strictement identiques à celles mesurées en 2017 par M. [B], à savoir 2,05 pour la dalle haute et 2,40 pour la dalle basse, et en a déduit l'absence d'aggravation, soulignant que 14 ans après la construction de l'ouvrage le fluage était consommé et qu'il n'y avait aucune raison que le comportement de l'ouvrage évolue.
Il ressort par ailleurs clairement du rapport de M. [S] que le rapport de M. [K], qui conclut à une aggravation de la flèche affectant la dalle basse, est affecté d'une erreur par suite d'une inversion des valeurs relevées par M. [B] pour les planchers haut et bas. Cette inversion des valeurs est d'autant plus manifeste que la comparaison des valeurs prétendument relevées par M. [B] et de celles mesurées par M. [K] a pour effet d'aboutir à un redressement de la dalle haute, ce qui est strictement impossible. La même erreur a été reproduite dans le rapport de l'Apave qui a repris les valeurs des flèches respectivement mesurées par M. [B] et M. [K] telles que figurant dans le rapport de ce dernier.
M. [S] parvenant, sur la base de ses propres constatations, aux mêmes conclusions, que M. [B], et n'ayant mis en évidence aucune aggravation, les critiques formulées à l'encontre du rapport de M. [B] sont donc inopérantes.
M. [S] n'a pas non plus remis en cause les préconisations de M. [B] pour remédier aux désordres constatés qu'il conviendra de retenir.
En ce qui concerne le non-respect des normes parasismiques, M. [S] relève que s'agissant du non-respect d'une disposition constructive qui n'induit aucun dommage consécutif, la situation n'est pas susceptible de s'aggraver et qu'il convient de mettre l'ouvrage en conformité par la mise en oeuvre d'un plat carbone TFC qui est une technique courante.
Les époux [U] affirment que cette solution ne peut être mise en oeuvre et que la société Freyssinet, qui est titulaire de l'avis technique, a refusé de se déplacer et qu'aucune autre entreprise n'accepte d'intervenir. Ils ne produisent toutefois aucun élément de preuve au soutien de ces affirmations et ne démontrent nullement une impossibilité de mise en oeuvre de cette technique.
Il n'est dès lors pas établi que la solution de mise en oeuvre d'un plat carbone préconisée par M. [B], validée par M. [S], ne soit pas envisageable.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a évalué le coût des travaux de reprise conformément aux préconisation de l'expert, les époux [U] n'ayant produit aucun devis en première instance.
Le jugement étant confirmé tant sur les responsabilités que sur les remèdes à apporter, il n'y a pas lieu de procéder à une réévaluation des montants, les époux [U], qui ne démontrent pas avoir été dans l'impossibilité de faire réaliser les travaux préconisés par M. [B] au coût évalué par celui-ci, ne pouvant faire supporter à l'assureur de l'entreprise partiellement responsable les conséquences de leurs choix procéduraux.
Le jugement entrepris étant confirmé en ses dispositions principales, il le sera également en celles dispositions relatives aux dépens et frais exclus des dépens. Les dépens d'appel seront supportés in solidum par les époux [U] qui succombent, et il sera alloué à la MAAF une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la demande présentée par les appelants sur ce fondement étant rejetée.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,
Vu l'arrêt mixte du 3 février 2023,
DECLARE irrecevables les demandes des époux [U] tendant à voir :
' dire et juger que la société CMI Bâtiment, couverte en responsabilité décennale par la société MAAF Assurances, est seule et entièrement responsable de l'ensemble des désordres constatés par M. [B] dans son rapport du 1er décembre 2017,
' dire et juger que M. [U] n'a à supporter aucune responsabilité quant aux conséquences des dommages constatés sur le second oeuvre,
' condamner la MAAF à supporter l'intégralité du coût de réfection des ouvrages.
CONFIRME le jugement entrepris en ses dispositions frappées d'appel autres que celles ci-dessus et que le rejet de la demande d'expertise ;
Y ajoutant,
CONDAMNE in solidum M. [W] [U] et Mme [E] [R], épouse [U] aux entiers dépens d'appel ainsi qu'à payer à la SA MAAF Assurances la somme de 2 000 € (deux mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE la demande présentée par M. [W] [U] et Mme [E] [R], épouse [U] sur ce fondement.
La greffière, La présidente,