CA Paris, Pôle 6 - ch. 4, 24 septembre 2025, n° 21/09555
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 4
ARRET DU 24 SEPTEMBRE 2025
(n° /2025, 1 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/09555 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEV5O
Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Octobre 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° 20/01156
APPELANT
Monsieur [O] [G]
[Adresse 5]
[Localité 1] / BELGIQUE
Représenté par Me Caroline LETELLIER, avocat au barreau de LILLE, toque : 0372
INTIMEE
Société CROWN PACKAGING EUROPEAN DIVISION SERVICES (CPEDS) prise en la personne de son Président, représentant légal en exercice, domicilié es qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Florent MILLOT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0066
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Mai 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Sonia NORVAL-GRIVET, conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Mme MEUNIER Guillemette, présidente de chambre
Mme MARQUES Florence, conseillère
Mme NORVAL-GRIVET Sonia, conseillère rédactrice
Greffier, lors des débats : Madame Clara MICHEL
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre, et par Clara MICHEL, Greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
La société Crown packaging european group services (ci-après la société CPEGS) est une société française du groupe américain Crown, spécialisé dans la fabrication d'emballages métalliques (canettes, boites de conserves, aérosols, couvercles).
Par un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein prenant effet le 1er mars 1973, M. [O] [G] a été embauché par la société CPEGS, en qualité de technicien d'atelier sur le site de [Localité 6].
La relation contractuelle était soumise à la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972.
M. [G] a évolué à différents postes. Du mois de novembre 1998 au mois de mai 2000, il a exercé des fonctions en Belgique, à [Localité 4], en tant que responsable qualité, avant de rejoindre le siège de [Localité 8] jusqu'en mai 2001 en tant que « quality development manager » pour la division Food Europe.
A compter du 14 mai 2001, M. [G] a accepté une mutation en qualité de « Manufacturing Manager-Aerosols &food cans [Localité 7] » (Responsable de production - Aérosols et boîtes de conserve [Localité 7]) au sein de l'usine d'[Localité 4] en Belgique, en vertu d'un avenant du 7 mai 2001 prévoyant une première période de détachement du 14 mai 2001 au 30 juin 2002 et une seconde période d'expatriation à compter du 1er juillet 2002.
Un second avenant du 17 juillet 2002 a formalisé son expatriation de la CarnaudMetalbox vers la Crown Cork Company Belgium NV à compter du 1er août 2002,
Cet avenant précisait notamment : « A compter de cette date, vous serez basé à [Localité 4] (Belgique) et établirez votre résidence principale dans cette région. Vos relations professionnelles avec notre société seront régies par les principales dispositions de la politique de mobilité européenne du Groupe pour une durée maximale de cinq ans.
Il en découle que :
« a) Votre contrat de travail existant dans votre pays d'origine (France) est suspendu et vous relèverez du statut de cadre expatrié qui maintient un lien juridique avec la France.
b) Vous conservez dans votre pays d'origine une rémunération de référence fixe de base que vous percevriez pour une fonction équivalente à celle occupée dans votre pays d'affectation (') Votre rémunération annuelle fixe de référence française s'établit à 61 011 euros.
c) Pendant la durée de votre collaboration avec Crown Cork Company Belgium NV : (') Votre salaire de base brut annuel belge sera déterminé à partir de votre salaire de référence France, afin que vous perceviez en Belgique un salaire net équivalent à celui que vous auriez perçu en France après déduction des charges sociales et fiscales françaises ; ce calcul sera fait chaque année en janvier ou à toute autre augmentation salariale (') ».
A compter du 30 octobre 2010, M. [G] a été placé en arrêt de travail en raison d'une grave pathologie, jusqu'à son départ à la retraite le 1er décembre 2018.
Par un courrier du 29 mai 2018, le salarié a, par l'intermédiaire de son conseil, fait grief à son employeur d'avoir omis d'organiser son retour sur le territoire français à l'issue de la période quinquennale qui prenait fin le 1er août 2007 et l'a mis en demeure de lui faire connaître sa position sur différents chefs de préjudice dont il réclamait réparation.
Par courrier du 26 juillet 2018, M. [G] a informé la société CPEGS de son souhait de faire valoir des droits à la retraite. Par courrier du 3 août suivant, la société a pris acte de ce que le contrat de travail prenait fin le 30 novembre 2018. M. [G] a liquidé ses droits à la retraite le 1er décembre 2018.
Par acte du 2 juillet 2020, M. [G] a assigné la société Crown packaging european division services (CPEDS) devant le conseil de prud'hommes de Bobigny aux fins de voir, notamment, dire et juger que son employeur a manqué à ses obligations légales, contractuelles et conventionnelles en le maintenant sur le territoire belge à l'expiration de son expatriation contractuellement définie par avenant du 17 juillet 2002 et condamner son employeur à lui verser diverses sommes relatives à l'exécution et à la rupture de la relation contractuelle.
Par jugement du 6 octobre 2021, le conseil de prud'hommes de Bobigny a statué en ces termes :
- Dit que l'action prud'homale de M. [O] [G] est prescrite au sens de l'article L.1471-1 du code du travail ;
- Déclaré que l'ensemble des demandes de M. [O] [G] sont irrecevables ;
- Débouté la Société Crown packaging european division services de la demande reconventionnelle de frais irrépétibles ;
- Condamné M. [O] [G] aux entiers dépens ;
Par déclaration du 18 novembre 2021, M. [G] a interjeté appel de ce jugement, intimant la société Crown packaging european division services.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 13 mai 2025.
EXPOSE DES PRETENTIONS DES PARTIES
Par conclusions notifiées par voie électronique le 18 février 2022, M. [G] demande à la cour de :
Réformant le jugement rendu le 6 octobre 2021 par le conseil de prud'hommes de Bobigny,
- Dire et juger que M. [O] [G] est recevable et bien-fondé en ses demandes, fins et conclusions et que l'action engagée à l'encontre de la Société Crown packaging european division services n'est pas prescrite ;
- Dire et juger que la Société Crown packaging european division services a manqué à ses obligations légales, contractuelles et conventionnelles à l'égard de M. [O] [G] en le maintenant sur le territoire belge à l'expiration de son expatriation contractuellement définie par avenant du 17 juillet 2002 ;
- Condamner la Société Crown packaging european division services à indemniser le préjudice subi par M. [O] [G] se décomposant comme suit :
Absence de primes d'intéressement 64 484,00 euros
Absence de participation aux bénéfices Mémoire
Absence de « bonus » 46 564,00 euros
Diminution de la prime de départ en retraite 26 028,51 euros
Diminution de la pension de retraite 32 146,20 euros
Surcoût de l'assurance de santé complémentaire 275 760,00 euros
Surcoût de l'imposition sur le revenu 188 340,00 euros
Surcoût des frais de logement 232 300,00 euros
Surcoût des frais de véhicule automobile 28 626,61 euros
Incidence du coût de la vie 68 745,00 euros
Reconstitution de salaire de base ' perte de salaire 28 662,00 euros
Incidence de l'inflation 70 253,18 euros
Incidence de la taxe sur la valeur ajoutée 8 886,80 euros
Dégradation niveau de vie ' perte emploi Mme 45 751,86 euros
Soit un total sauf mémoire de : 1 116 548,16 euros
- Condamner la Société Crown packaging european division services à payer à M. [O] [G] la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
- Dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 29 mai 2018, date de la mise en demeure adressée par M. [O] [G] à la Société Crown packaging european division services ;
Condamner la Société Crown packaging european division services à payer à M. [O] [G] la somme de 20 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers frais et dépens d'instance ;
Par conclusions notifiées par voie électronique le 11 mai 2022, la société Crown packaging european division services demande à la cour de :
1/ A titre principal
Confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Bobigny en ce qu'il a :
- Dit que l'action prud'homale de M. [O] [G] est prescrite au sens de l'article L.1471-1 du code du travail
- Déclaré que l'ensemble des demandes de M. [O] [G] sont irrecevables ;
- Condamné M. [O] [G] aux entiers dépens.
2/ A titre subsidiaire :
- Juger que la société CPEDS n'a commis aucun manquement contractuel à l'égard de M. [G] dans la gestion de son expatriation ;
- Le débouter de l'ensemble de ses demandes ;
3/ A titre infiniment subsidiaire
- Juger que les demandes en rappel d'intéressement et participation sont prescrites entièrement ou depuis l'année 2015 et irrecevables ;
- Juger que les demandes de rappel de Bonus antérieures à juillet 2017 sont prescrites et irrecevables ;
- Juger que la demande en rappel d'indemnité de départ en retraite est prescrite et irrecevable ;
- Juger que la demande indemnitaire liée à une diminution de la pension de retraite est prescrite et irrecevable ;
- Juger que la demande indemnitaire liée à un surcout d'assurance santé est prescrite et irrecevable ;
- Juger que la demande indemnitaire liée à un surcoût d'imposition est prescrite et irrecevable ;
- Juger que la demande indemnitaire liée à l'incidence de l'inflation est prescrite et irrecevable ;
- Juger que la demande indemnitaire liée à l'incidence de la TVA est prescrite et irrecevable ;
- Juger que la demande indemnitaire liée à une dégradation du niveau de vie est prescrite et irrecevable ;
- Juger que la demande indemnitaire pour inexécution contractuelle est prescrite et irrecevable ;
- Juger que les demandes de rappel d'indemnité logement antérieures à juillet 2017 sont prescrites ou intégralement prescrites et irrecevables ;
- Juger que les demandes liées à l'avantage véhicule sont prescrites depuis juillet 2017 ou entièrement prescrites et irrecevables ;
Juger que les demandes de rappel de prime coût de la vie antérieures à juillet 2017 sont prescrites et irrecevables ;
- Juger que les demandes liées à la reconstitution du salaire de base antérieures à juillet 2017 sont prescrites et irrecevables ;
- Juger que les préjudices invoqués par M. [G] sont sans rapport avec les manquements contractuels qu'il invoque ;
- Juger que M. [G] n'apporte la preuve d'aucun des préjudices qu'il invoque ;
- Juger qu'aucun des préjudices n'est imputable à la société CPEDS ;
- Débouter M. [G] de l'ensemble de ses demandes ;
4/ En tout état de cause
- Débouter M. [G] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner M. [G] à une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions transmises par la voie électronique, en application de l'article 455 du code de procédure civile.
Par message adressé via le réseau RPVA le 2 septembre 2025, la cour a invité les parties à présenter leurs observations sur le moyen relevé d'office tiré de l'existence éventuelle d'une perte de chance de M. [G] d'éviter les dommages, dès lors que le juge peut, sans méconnaître l'objet du litige, rechercher l'existence d'une telle perte de chance alors que lui est demandée la réparation de l'entier préjudice (Ass. plén., 27 juin 2025, pourvoi n° 22-21.812).
La société Crown packaging european division services a présenté des observations notifiées par RPVA les 4 et 12 septembre 2025.
M. [G] a présenté des observations notifiées par RPVA le 22 septembre 2025.
MOTIVATION
Sur la prescription :
M. [G] soutient que c'est à tort que la juridiction prud'homale a retenu la prescription de ses demandes. Il indique que le courrier de son avocat du 29 mai 2018 faisait état de ses interrogations, mais ne peut servir de point de départ à la prescription, et que ce n'est que dans le cadre de la première instance que la société a enfin clarifié sa position en affirmant qu'il avait bénéficié d'un régime de protection pendant une durée limitée de 5 années. Il précise que son employeur n'a versé aux débats que le 29 mai 2021 un document (en anglais) intitulé « guide relatif à la politique de transfert en Europe Occidentale » qui constitue en réalité le document régissant les relations contractuelles entre les parties et dont il n'avait pas connaissance. Il fait valoir que le délai de prescription n'a commencé à courir que le 1er avril 2019, date à laquelle la société a formalisé le terme des relations contractuelles en confirmant sa volonté de ne pas assumer les conséquences financières de ses manquements contractuels.
La société CPEDS réplique que l'ensemble des demandes se heurtent à la prescription, qui a commencé à courir dès 2012-2013 et en tout état de cause le 29 mai 2018, date à laquelle le salarié avait connaissance des faits lui permettant d'exercer ses droits et était même capable de fixer et chiffrer les préjudices en résultant par l'intermédiaire de son avocat et de la mise en demeure adressée à la société.
A titre subsidiaire, elle soutient que sont partiellement prescrites les demandes afférentes à l'intéressement et à la participation, au bonus, au surcoût des frais de logement, de véhicule, au coût de la vie, et la reconstitution de salaire et la perte de salaire, les autres demandes étant totalement prescrites.
La durée de la prescription est déterminée par la nature de la créance objet de la demande.
En premier lieu, le délai de prescription des salaires court à compter de la date à laquelle la créance salariale est devenue exigible, à condition que le salarié ait connaissance des éléments ouvrant droit à une rémunération.
Une indemnité qui compense une sujétion particulière de l'emploi du salarié constitue un complément de salaire. Dans le cas contraire, elle s'analyse en une indemnité représentative de frais professionnels que doit exposer le salarié en raison des conditions d'exécution de son contrat de travail.
S'agissant des demandes relatives au bonus, au surcoût des frais de logement - en compensation de la baisse puis de la suppression des indemnités de logement - et des frais de véhicule automobile, qui compensent une sujétion particulière de l'emploi du salarié, à l'incidence du coût de la vie -indice « Cost of Living » -, à la perte de salaire et à la privation d'une augmentation de salaire basée sur l'inflation, ces demandes concernent, ainsi que le fait valoir l'employeur, des créances qui sont de nature salariale.
Aux termes de l'article L. 3245-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.
En ce qui concerne le point de départ de ce délai, il sera relevé que si l'avenant du 17 juillet 2002 mentionnait l'application des principales dispositions de la politique de mobilité européenne du groupe pour une durée maximale de cinq ans, et l'application du statut de cadre expatrié durant la suspension du contrat de travail, ses stipulations n'étaient pas suffisamment claires pour permettre à l'intéressé de connaître l'étendue des obligations de l'employeur ni la durée de son expatriation et d'en tirer en conséquence des conclusions quant aux faits lui permettant d'exercer ses droits, comme en témoignent les échanges de courriels intervenus entre les parties sur l'interprétation de cet avenant.
Il ressort de l'examen de l'ensemble des pièces produites aux débats qu'à l'issue de nombreux échanges de courriels, M. [G] a adressé à la société Crown europe, par l'intermédiaire de son conseil, une mise en demeure du 29 mai 2018 dont le contenu, très détaillé, fait clairement ressortir que le salarié avait connaissance des faits lui permettant l'exercice de ses droits, son employeur ayant estimé que sa soumission au statut d'expatrié pour une durée maximale de cinq ans ne signifiait pas pour autant que sa mission à l'étranger avait une durée déterminée.
Il en résulte que le délai de prescription des créances salariales n'a pu courir qu'à compter de cette date et que la saisine de la juridiction prud'homale le 2 juillet 2020 est intervenue dans ce délai.
Le contrat de travail ayant été rompu le 30 novembre 2018, les demandes de rappel de créances salariales pour la période antérieure au 30 novembre 2015 sont prescrites.
Le jugement sera infirmé sur ce point.
S'agissant de la demande relative à la diminution de la prime de départ en retraite, et contrairement à ce qu'allègue l'employeur, celle-ci a le caractère d'un complément de salaire et se trouve donc également soumise à la prescription triennale de l'article L. 3245-1 du code du travail.
Il en résulte que cette demande ne se heurte pas à la prescription.
En deuxième lieu, selon l'article L. 1471-1 du même code, toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.
D'une part, les demandes en paiement de sommes au titre de l'intéressement et de la participation aux résultats de l'entreprise, qui constitue une rémunération complémentaire n'ayant pas une nature salariale, relèvent de l'exécution du contrat de travail et sont soumises à la prescription biennale de l'article L. 1471-1 du code du travail.
D'autre part, les demandes tendant au paiement de dommages-intérêts au titre de la dégradation du niveau de vie résultant de la perte d'emploi de son épouse, de l'incidence de la taxe sur la valeur ajoutée et en réparation du préjudice moral causé au salarié par les manquements de l'employeur, qui portent sur l'exécution du contrat de travail, se prescrivent par deux ans.
Il résulte des développements qui précèdent que l'appelant a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit le 29 mai 2018, de sorte que la saisine de la juridiction prud'homale le 2 juillet 2020 est intervenue après l'expiration du délai prévu par l'article L. 1471-1 et que ces demandes se heurtent à la prescription.
Enfin, l'action portant sur l'indemnisation du préjudice résultant de la minoration des droits à la retraite relève de la prescription biennale, dont le délai n'a commencé à courir qu'à la date de la liquidation des droits, à savoir le 1er décembre 2018, le préjudice n'ayant été révélé qu'à cette date. Cette demande n'est donc pas prescrite.
En troisième lieu, aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
En l'espèce, M. [G] sollicite des dommages et intérêts correspondant aux sommes qu'il estime devoir exposer pour les quinze années à venir, au titre du surcoût de l'assurance santé complémentaire et de l'augmentation du taux d'imposition sur le revenu liés à sa domiciliation en Belgique en raison du manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles.
Ces demandes ne tendent pas à obtenir l'exécution d'une obligation née du contrat de travail mais relèvent d'une action en responsabilité contre l'employeur qui se prescrit par cinq ans en application des dispositions précitées de l'article 2224 du code civil, de sorte que la société n'est pas fondée à opposer la prescription.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a dit l'action prud'homale prescrite.
Sur les manquements de l'employeur à ses obligations contractuelles :
M. [G] soutient que son employeur a manqué à ses obligations en ne précisant pas les conditions de son rapatriement dans l'avenant du 17 juillet 2002 et en ne réexaminant pas sa situation à l'issue de la période de 5 ans suivant son départ en Belgique, alors que les modalités d'exécution de son expatriation auraient dû être à nouveau discutées et le cas échéant modifiées.
Il fait valoir qu'il a été « oublié » par son employeur. Il indique que sa pathologie a nécessité des soins lourds et donné lieu à un arrêt de travail de longue durée à compter du 30 octobre 2010, et que l'usine située à [Localité 4] ayant fait l'objet d'une fermeture au cours de l'année 2012, il a été le seul salarié dont la situation n'a pas été examinée, la plupart de ses collègues étant licenciés, reclassés ou mutés en France ou ailleurs. Il se prévaut de la méconnaissance de l'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail prévue par l'article L.1222-1 du code du travail, des dispositions des articles R.1221-34 et R.1221-11 du code du travail et de la convention collective qui impliquent que la durée de l'expatriation et les conditions de rapatriement du salarié doivent impérativement être déterminées à l'avance. Il ajoute que la société n'a pas pris la peine d'examiner sa position dans l'entreprise compte tenu de son arrêt maladie.
La société conteste tout manquement et réplique que le salarié n'a nullement été oublié en Belgique dès lors que les échanges avec la société CPEDS ont été réguliers du début de sa mission jusqu'à son départ en retraite, soit sur une période d'environ 17 ans, et que c'est en raison de ses problèmes de santé et de son arrêt maladie de 2010 à 2018 qu'elle n'a pas pris contact avec lui au moment de la fermeture de l'usine d'[Localité 4]. Elle précise que le premier avenant du 7 mai 2001 distinguait deux périodes, la première, du 14 mai 2001 au 30 juin 2002, étant une période de détachement durant laquelle il restait soumis au système français de sécurité sociale et résident fiscal français, et la seconde, à compter du 1er juillet 2002, une période d'expatriation durant laquelle il relevait du système de sécurité sociale belge et bénéficiait, pour une période maximale de 5 ans, des principales dispositions de la politique de mobilité européenne du groupe. Elle indique que le second avenant daté du 17 juillet 2002 est un avenant d'application du premier et complétait les principes qui prévus par celui-ci concernant la période d'expatriation, laquelle était à durée indéterminée.
Aux termes de l'article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi.
La bonne foi étant présumée, il appartient à la partie qui s'en prévaut de rapporter la preuve de l'exécution déloyale du contrat de travail.
Par ailleurs, l'obligation de bonne foi prend fin avec le contrat de travail.
En outre, s'agissant du dispositif d'expatriation, selon l'article R.320-5 du code du travail, dans sa version en vigueur du 2 septembre 1994 au 1er mai 2008 applicable à la date de signature des avenants, l'employeur doit fournir au salarié lors de son embauche un document sur lequel sont reproduites les informations contenues dans la déclaration préalable et prévues à l'article R. 320-2. Ce document doit en outre mentionner, en cas d'expatriation du salarié excédant une période d'un mois, la durée de l'expatriation, la devise servant au paiement de la rémunération et, le cas échéant, les avantages en espèces et en nature liés à l'expatriation ainsi que les conditions de rapatriement du salarié. Toute modification d'une ou plusieurs de ces informations doit faire l'objet d'un document qui est remis par l'employeur au salarié au plus tard un mois après la date de la prise d'effet de cette modification.
Aucune disposition légale ou réglementaire ne fait toutefois obstacle à ce que la mission exercée à l'étranger par le salarié expatrié soit à durée indéterminée.
Par ailleurs, à cet égard, l'accord du 12 septembre 1983 relatif à l'affectation à l'étranger constituant l'annexe II de la convention collective applicable ne prévoit la détermination, par écrit, avant le départ du salarié, de la durée prévisible de l'affectation, que « s'il est possible d'envisager une durée approximative », possibilité qui n'apparaît pas établie en l'espèce à la date de l'expatriation de M. [G].
En revanche, l'absence de durée déterminée de l'expatriation ne dispense pas l'employeur de délivrer des informations sur les conditions dans lesquelles le salarié peut bénéficier d'un rapatriement, l'accord collectif prévoyant à cet égard que doivent être précisées par écrit les conditions de résiliation et de rapatriement des salariés.
Il ressort de l'examen des documents contractuels que l'expatriation de M. [G] n'était pas assortie d'un terme déterminé, la durée maximale de cinq ans mentionnée par le contrat ne visant qu'à limiter dans le temps le bénéfice au profit du salarié des dispositions prévues par la politique de mobilité européenne du Groupe.
La mention de cette politique de mobilité européenne renvoie au guide relatif à la politique de transfert en Europe Occidentale, qui constitue, ainsi que le soutient la société, un engagement unilatéral liant l'employeur.
Or ce guide prévoit en page 1 b) que : « La durée d'une affectation n'est normalement pas inférieure à deux (2) ans. Si la mutation se prolonge au-delà de cinq ans, le poste sera réexaminé au cas par cas mais la personne mutée s'intègrera pleinement dans la structure d'accueil. ».
Il en résulte que même en l'absence de demande expresse de sa part, l'employeur était tenu de réexaminer la situation du salarié à l'issue d'une période de cinq ans suivant son départ en Belgique, soit à compter du mois de mai 2006.
Il ressort des pièces du dossier que la situation de M. [G] n'a pas fait l'objet d'un réexamen à compter de cette date.
La société n'est pas fondée à se prévaloir de l'état de santé du salarié, qui se trouvait en arrêt maladie depuis le 30 octobre 2010, pour justifier cette absence de réexamen. Il sera également relevé qu'aucune démarche n'a été davantage entreprise par la société à la suite de la fermeture, au cours de l'année 2012, de l'usine d'[Localité 4] à laquelle le salarié était resté affecté.
En outre, l'avenant litigieux ne comportait que quelques précisions sur la prise en charge des frais de déménagement ainsi que de voyage de fin de contrat, sans aucune précision sur les modalités de résiliation et de rapatriement.
Il en résulte que le salarié est fondé à se prévaloir d'un manquement de l'employeur à son obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail.
Sur les demandes financières :
En ce qui concerne la demande relative au bonus :
Le salarié fait valoir que le bonus ne lui a pas été versé à compter de son arrêt de travail intervenu en novembre 2010, alors que l'avenant du 17 juillet 2002 prévoyait son versement.
La société réplique que le contrat ne comporte aucune garantie de versement du bonus, même en cas de suspension du contrat de travail.
Il résulte de l'article L. 1226-1 du code du travail que la suspension du contrat de travail dispense l'employeur de son obligation de rémunération du salarié.
Il résulte de l'article 1103 du code civil qu'un salarié, sauf clause contractuelle ou conventionnelle contraire, ne peut prétendre recevoir une prime, lorsque la gratification a été instituée afin de rémunérer une activité ou récompenser les services rendus, que dans la mesure du travail effectivement accompli.
En l'espèce, l'avenant du 17 juillet 2002 prévoyait, ainsi que le soutient l'appelant, que « D'une façon générale, le montant du « bonus » est servi le plus rapidement possible dans le courant du premier semestre de l'année suivante, à condition d'avoir été inscrit dans les effectifs le 31 décembre de l'année de référence et de ne pas avoir été à cette date en cours de préavis pour une raison quelconque, sauf en cas de départ en préretraite ou en retraite. ».
Aucune stipulation ne prévoit toutefois le versement de ce bonus, qui dépendait de la réalisation d'objectifs, en cas de suspension du contrat de travail par un arrêt de travail pour maladie.
La demande sera donc rejetée.
En ce qui concerne la demande relative à la diminution de la prime de départ en retraite :
L'appelant soutient qu'à son départ en retraite, la société lui a versé à une prime de départ d'un montant de 37 176,02 euros bruts, soit 29 913 euros nets, qui repose sur une ancienneté de 29 années et 153 jours représentant le temps de travail exécuté en France à l'exception des années travaillées en Belgique. Il fait valoir que son employeur n'a pas comptabilisé les années de travail exécutées en Belgique pour le calcul du montant de la prime de départ à la retraite, en violation des dispositions contractuelles de l'avenant du 17 juillet 2002.
La société réplique que le bulletin de paye du mois de novembre 2018 fait apparaitre que la prime de retraite versée s'élève en réalité à la somme de 74 000, 95 euros brut. Elle ajoute que le calcul effectué par l'appelant est erroné, notamment en ce qu'il intègre le bonus.
Il ressort des éléments du dossier que la société était, ainsi que le soutient le salarié, tenue d'intégrer pour le calcul de cette indemnité les années de travail exécutées en Belgique.
En outre, la société, en se bornant à se prévaloir du montant figurant sur un bulletin de salaire, ne justifie pas du paiement de la somme alléguée de 74 000, 95 euros brut.
Il y a lieu, en revanche, et compte tenu des considérations énoncées plus haut, de déduire du montant de la somme réclamée la partie afférente au bonus.
Au regard de ces éléments, l'employeur sera condamné au versement d'une somme de 16 556,34 euros.
En ce qui concerne la demande relative à la diminution de la pension de retraite :
L'appelant soutient qu'il ne peut pas bénéficier d'une majoration du montant de sa pension de retraite appliquée par le régime français, ce que conteste l'intimée.
M. [G] n'est pas fondé à se prévaloir d'un calcul basé sur l'hypothèse dans laquelle il serait resté en France, dès lors qu'il avait, au terme des deux avenants litigieux, consenti à son expatriation qui lui assurait au demeurant certains avantages financiers.
En outre, il n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait, à compter du 31 décembre 2012, bénéficié d'une majoration pour tout trimestre supplémentaire, dès lors qu'il se trouvait à compter du 30 octobre 2010 en arrêt maladie, et que la période d'arrêt pour maladie n'est pas prise en compte pour le décompte de la surcote.
Enfin, l'appelant n'intègre pas au calcul de ses droits à la retraite allégués l'application des règles de coordination européenne des régimes de retraite en vigueur.
Dans ces conditions, sa demande ne peut être accueillie.
En ce qui concerne la demande relative au surcoût de l'assurance de santé complémentaire :
M. [G] sollicite l'allocation d'une somme de 275 760,00 euros au titre du surcoût d'assurance de santé complémentaire qu'il sera contraint d'engager sur les 15 années à venir, correspondant à son espérance de vie, à raison de sa domiciliation en Belgique.
Les éléments produits ne permettent toutefois pas d'établir que le surcoût dont il se prévaut, qui résulte de son maintien en Belgique, serait lié à un manquement de l'employeur, alors que la relation de travail a pris fin le 30 novembre 2018.
Cette demande ne peut donc être accueillie.
En ce qui concerne la demande relative au surcoût de l'imposition sur le revenu :
Les éléments produits ne permettent pas d'avantage d'établir que le surcoût dont M. [G] se prévaut, qui résulte de son maintien en Belgique, serait lié à un manquement de l'employeur, alors que la relation de travail a pris fin le 30 novembre 2018. Cette demande doit donc être également rejetée.
En ce qui concerne la demande relative au surcoût des frais de logement :
L'appelant fait valoir qu'à compter du 1er juillet 2008, l'employeur a décidé unilatéralement de supprimer de manière progressive le versement de l'indemnité de logement, ce qu'il a été contraint d'accepter en raison de sa position de subordination hiérarchique. Il ajoute qu'en tout état de cause, en ne précisant pas les « conditions du rapatriement » à l'issue de son expatriation, la société n'a pas anticipé la difficulté à laquelle il serait confronté pour faire face au paiement de cette charge mensuelle.
La société conteste ces allégations et fait valoir que le salarié a en outre choisi d'habiter une commune belge dans laquelle le logement est onéreux.
D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que la dégressivité puis la suppression de l'indemnité de logement aurait été imposée au salarié. Ce moyen sera donc écarté.
D'autre part, le préjudice dont se prévaut le salarié à raison du surcoût de logement, qu'il lie également au manquement de l'employeur tiré de l'absence de précisions sur les conditions de rapatriement, ne peut résulter que d'une perte de chance d'éviter le surcoût allégué, dès lors qu'il n'est pas établi que l'intéressé aurait effectivement été rapatrié en France s'il avait été mieux informé ou s'il en avait fait la demande, ni à quel moment.
Enfin, le salarié justifie de ses frais de logement sur les années 2018, à hauteur de 2 300 euros par mois, soit 27 600 euros par an, et 2019, à hauteur de 1 850 par mois, soit 22 200 euros par an.
Au regard des éléments produits, le préjudice résultant de la perte de chance de M. [G] de supporter des frais de logement moindre sera évalué à la somme de 20 000 euros.
En ce qui concerne la demande relative à la reconstitution de salaire de base :
L'appelant soutient que la diminution de son salaire de base en 2007 a engendré une perte de revenu qu'il évalue à la somme de 28 662 euros jusqu'en 2018.
La société réplique que l'allocation 'coût de la vie' n'est versée que s'il existe des surcoûts de dépenses quotidiennes dans le pays, ce dont M. [G] ne justifie pas, et soutient que les calculs effectués par le salarié sont erronés et contradictoires, aucune évolution automatique et annuelle du salaire de base n'ayant été garantie par l'employeur.
Aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Au regard des éléments produits, l'employeur ne justifie pas du bien-fondé de l'évolution du salaire de référence de M. [G].
Compte tenu de la prescription, qui porte le montant des sommes en litige pour la période postérieure au 30 novembre 2015 à un total de 7 498 euros, et des développements qui précèdent, il lui sera alloué une somme de 2 000 euros à ce titre.
En ce qui concerne la demande relative à l'incidence de l'inflation :
L'appelant se prévaut de la privation d'une augmentation de salaire basée sur l'inflation.
Il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que sur la période non prescrite à compter du 30 novembre 2015, le salarié, qui se trouvait en arrêt maladie depuis 2010, et qui a bénéficié d'un maintien de rémunération, d'indemnités journalières de l'assurance maladie et d'une indemnité complémentaire, aurait si sa situation avait été réexaminée par l'employeur et en cas de retour en France, perçu une indemnisation supérieure.
Cette demande sera dès lors rejetée.
En ce qui concerne la demande relative aux frais de véhicule automobile :
Un véhicule de fonction, dont, sauf stipulation contraire, le salarié conserve l'usage dans sa vie personnelle, ne peut lui être retiré pendant une période de suspension du contrat de travail.
Commet en conséquence une faute, justifiant l'allocation de dommages-intérêts, l'employeur qui, lors d'un arrêt de travail, prive le salarié du véhicule de fonction qui lui avait été attribué.
En l'espèce, l'article VI de l'avenant litigieux intitulé « Véhicule de société » précisait : « Dans le cadre de vos responsabilités en Belgique, vous disposerez d'une voiture de société selon les modalités applicables aux cadres de votre niveau au sein de Crown Cork Company Belgium NV ».
Il ne ressort pas des pièces produites que le salarié aurait eu interdiction d'utiliser ce véhicule à des fins personnelles.
En outre, il n'est pas établi que la politique des véhicules dont fait état la société, qui ne prévoyait le maintien de cet avantage en cas de maladie que durant la période de maintien de salaire, aurait été portée à la connaissance du salarié, de sorte qu'il est fondé à soutenir qu'elle ne lui est pas opposable.
Il est constant que M. [G] a, au mois de juillet 2015 et à la demande de son employeur, restitué le véhicule de fonction dont il disposait.
Il en résulte que le retrait unilatéral de cet avantage en nature par l'employeur est fautif et que l'appelant est fondé, au regard des pièces produites et pour la période non prescrite, à réclamer une indemnisation de 25 135,56 euros.
Sur les intérêts :
Il sera rappelé que les créances salariales portent intérêt au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de jugement et les créances indemnitaires portent intérêt au taux légal à compter de la décision qui les ordonne.
Sur les frais du procès :
Au regard de ce qui précède, le jugement sera infirmé sur les dépens et sur l'article 700 du code de procédure civile.
La société Crown packaging european division services sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, et au paiement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
INFIRME le jugement en ses dispositions soumises à la cour, sauf en ce qu'il juge prescrites les demandes de M. [O] [G] au titre de l'intéressement et de la participation aux résultats de l'entreprise, de la dégradation du niveau de vie résultant de la perte d'emploi de son épouse, de l'incidence de la taxe sur la valeur ajoutée et du préjudice moral ;
STATUANT A NOUVEAU sur les chefs infirmés et Y AJOUTANT :
ECARTE la fin de non-recevoir tirée de la prescription s'agissant des demandes au titre de la minoration des droits à la retraite, de la prime de départ en retraite, du surcoût de l'assurance santé complémentaire et de l'augmentation du taux d'imposition sur le revenu ;
DECLARE prescrites les demandes de M. [O] [G] au titre de l'intéressement et de la participation aux résultats de l'entreprise, des dommages-intérêts pour dégradation du niveau de vie résultant de la perte d'emploi de son épouse, de l'incidence de la taxe sur la valeur ajoutée et du préjudice moral ;
DECLARE prescrites, pour la période antérieure au 30 novembre 2015, les demandes de M. [O] [G] relatives au bonus, au surcoût des frais de logement et des frais de véhicule automobile, à l'incidence du coût de la vie, à la perte de salaire et à la privation d'une augmentation de salaire basée sur l'inflation ;
CONDAMNE la société Crown packaging european division services à payer à M. [O] [G] les sommes de :
- 16 556,34 euros au titre du reliquat de la prime de départ en retraite ;
- 20 000 euros au titre du surcoût des frais de logements ;
- 2 000 euros au titre de l'évolution du salaire de référence ;
- 25 135,56 euros au titre des frais de véhicule automobile ;
REJETTE la demande de M. [O] [G] au titre du bonus ;
REJETTE la demande de M. [O] [G] au titre de la diminution de la pension de retraite ;
REJETTE la demande de M. [O] [G] au titre du surcoût de l'assurance de santé complémentaire ;
REJETTE la demande de M. [O] [G] au titre de l'incidence de l'inflation ;
RAPPELLE que les créances salariales portent intérêt au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de jugement et que les créances indemnitaires portent intérêt au taux légal à compter de la décision qui les ordonne ;
CONDAMNE la société Crown packaging european division services aux dépens de première instance et d'appel ;
CONDAMNE la société Crown packaging european division services à payer à M. [O] [G] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE le surplus des demandes.
La greffière La présidente
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 4
ARRET DU 24 SEPTEMBRE 2025
(n° /2025, 1 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/09555 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEV5O
Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Octobre 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° 20/01156
APPELANT
Monsieur [O] [G]
[Adresse 5]
[Localité 1] / BELGIQUE
Représenté par Me Caroline LETELLIER, avocat au barreau de LILLE, toque : 0372
INTIMEE
Société CROWN PACKAGING EUROPEAN DIVISION SERVICES (CPEDS) prise en la personne de son Président, représentant légal en exercice, domicilié es qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Florent MILLOT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0066
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Mai 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Sonia NORVAL-GRIVET, conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Mme MEUNIER Guillemette, présidente de chambre
Mme MARQUES Florence, conseillère
Mme NORVAL-GRIVET Sonia, conseillère rédactrice
Greffier, lors des débats : Madame Clara MICHEL
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre, et par Clara MICHEL, Greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
La société Crown packaging european group services (ci-après la société CPEGS) est une société française du groupe américain Crown, spécialisé dans la fabrication d'emballages métalliques (canettes, boites de conserves, aérosols, couvercles).
Par un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein prenant effet le 1er mars 1973, M. [O] [G] a été embauché par la société CPEGS, en qualité de technicien d'atelier sur le site de [Localité 6].
La relation contractuelle était soumise à la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972.
M. [G] a évolué à différents postes. Du mois de novembre 1998 au mois de mai 2000, il a exercé des fonctions en Belgique, à [Localité 4], en tant que responsable qualité, avant de rejoindre le siège de [Localité 8] jusqu'en mai 2001 en tant que « quality development manager » pour la division Food Europe.
A compter du 14 mai 2001, M. [G] a accepté une mutation en qualité de « Manufacturing Manager-Aerosols &food cans [Localité 7] » (Responsable de production - Aérosols et boîtes de conserve [Localité 7]) au sein de l'usine d'[Localité 4] en Belgique, en vertu d'un avenant du 7 mai 2001 prévoyant une première période de détachement du 14 mai 2001 au 30 juin 2002 et une seconde période d'expatriation à compter du 1er juillet 2002.
Un second avenant du 17 juillet 2002 a formalisé son expatriation de la CarnaudMetalbox vers la Crown Cork Company Belgium NV à compter du 1er août 2002,
Cet avenant précisait notamment : « A compter de cette date, vous serez basé à [Localité 4] (Belgique) et établirez votre résidence principale dans cette région. Vos relations professionnelles avec notre société seront régies par les principales dispositions de la politique de mobilité européenne du Groupe pour une durée maximale de cinq ans.
Il en découle que :
« a) Votre contrat de travail existant dans votre pays d'origine (France) est suspendu et vous relèverez du statut de cadre expatrié qui maintient un lien juridique avec la France.
b) Vous conservez dans votre pays d'origine une rémunération de référence fixe de base que vous percevriez pour une fonction équivalente à celle occupée dans votre pays d'affectation (') Votre rémunération annuelle fixe de référence française s'établit à 61 011 euros.
c) Pendant la durée de votre collaboration avec Crown Cork Company Belgium NV : (') Votre salaire de base brut annuel belge sera déterminé à partir de votre salaire de référence France, afin que vous perceviez en Belgique un salaire net équivalent à celui que vous auriez perçu en France après déduction des charges sociales et fiscales françaises ; ce calcul sera fait chaque année en janvier ou à toute autre augmentation salariale (') ».
A compter du 30 octobre 2010, M. [G] a été placé en arrêt de travail en raison d'une grave pathologie, jusqu'à son départ à la retraite le 1er décembre 2018.
Par un courrier du 29 mai 2018, le salarié a, par l'intermédiaire de son conseil, fait grief à son employeur d'avoir omis d'organiser son retour sur le territoire français à l'issue de la période quinquennale qui prenait fin le 1er août 2007 et l'a mis en demeure de lui faire connaître sa position sur différents chefs de préjudice dont il réclamait réparation.
Par courrier du 26 juillet 2018, M. [G] a informé la société CPEGS de son souhait de faire valoir des droits à la retraite. Par courrier du 3 août suivant, la société a pris acte de ce que le contrat de travail prenait fin le 30 novembre 2018. M. [G] a liquidé ses droits à la retraite le 1er décembre 2018.
Par acte du 2 juillet 2020, M. [G] a assigné la société Crown packaging european division services (CPEDS) devant le conseil de prud'hommes de Bobigny aux fins de voir, notamment, dire et juger que son employeur a manqué à ses obligations légales, contractuelles et conventionnelles en le maintenant sur le territoire belge à l'expiration de son expatriation contractuellement définie par avenant du 17 juillet 2002 et condamner son employeur à lui verser diverses sommes relatives à l'exécution et à la rupture de la relation contractuelle.
Par jugement du 6 octobre 2021, le conseil de prud'hommes de Bobigny a statué en ces termes :
- Dit que l'action prud'homale de M. [O] [G] est prescrite au sens de l'article L.1471-1 du code du travail ;
- Déclaré que l'ensemble des demandes de M. [O] [G] sont irrecevables ;
- Débouté la Société Crown packaging european division services de la demande reconventionnelle de frais irrépétibles ;
- Condamné M. [O] [G] aux entiers dépens ;
Par déclaration du 18 novembre 2021, M. [G] a interjeté appel de ce jugement, intimant la société Crown packaging european division services.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 13 mai 2025.
EXPOSE DES PRETENTIONS DES PARTIES
Par conclusions notifiées par voie électronique le 18 février 2022, M. [G] demande à la cour de :
Réformant le jugement rendu le 6 octobre 2021 par le conseil de prud'hommes de Bobigny,
- Dire et juger que M. [O] [G] est recevable et bien-fondé en ses demandes, fins et conclusions et que l'action engagée à l'encontre de la Société Crown packaging european division services n'est pas prescrite ;
- Dire et juger que la Société Crown packaging european division services a manqué à ses obligations légales, contractuelles et conventionnelles à l'égard de M. [O] [G] en le maintenant sur le territoire belge à l'expiration de son expatriation contractuellement définie par avenant du 17 juillet 2002 ;
- Condamner la Société Crown packaging european division services à indemniser le préjudice subi par M. [O] [G] se décomposant comme suit :
Absence de primes d'intéressement 64 484,00 euros
Absence de participation aux bénéfices Mémoire
Absence de « bonus » 46 564,00 euros
Diminution de la prime de départ en retraite 26 028,51 euros
Diminution de la pension de retraite 32 146,20 euros
Surcoût de l'assurance de santé complémentaire 275 760,00 euros
Surcoût de l'imposition sur le revenu 188 340,00 euros
Surcoût des frais de logement 232 300,00 euros
Surcoût des frais de véhicule automobile 28 626,61 euros
Incidence du coût de la vie 68 745,00 euros
Reconstitution de salaire de base ' perte de salaire 28 662,00 euros
Incidence de l'inflation 70 253,18 euros
Incidence de la taxe sur la valeur ajoutée 8 886,80 euros
Dégradation niveau de vie ' perte emploi Mme 45 751,86 euros
Soit un total sauf mémoire de : 1 116 548,16 euros
- Condamner la Société Crown packaging european division services à payer à M. [O] [G] la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
- Dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 29 mai 2018, date de la mise en demeure adressée par M. [O] [G] à la Société Crown packaging european division services ;
Condamner la Société Crown packaging european division services à payer à M. [O] [G] la somme de 20 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers frais et dépens d'instance ;
Par conclusions notifiées par voie électronique le 11 mai 2022, la société Crown packaging european division services demande à la cour de :
1/ A titre principal
Confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Bobigny en ce qu'il a :
- Dit que l'action prud'homale de M. [O] [G] est prescrite au sens de l'article L.1471-1 du code du travail
- Déclaré que l'ensemble des demandes de M. [O] [G] sont irrecevables ;
- Condamné M. [O] [G] aux entiers dépens.
2/ A titre subsidiaire :
- Juger que la société CPEDS n'a commis aucun manquement contractuel à l'égard de M. [G] dans la gestion de son expatriation ;
- Le débouter de l'ensemble de ses demandes ;
3/ A titre infiniment subsidiaire
- Juger que les demandes en rappel d'intéressement et participation sont prescrites entièrement ou depuis l'année 2015 et irrecevables ;
- Juger que les demandes de rappel de Bonus antérieures à juillet 2017 sont prescrites et irrecevables ;
- Juger que la demande en rappel d'indemnité de départ en retraite est prescrite et irrecevable ;
- Juger que la demande indemnitaire liée à une diminution de la pension de retraite est prescrite et irrecevable ;
- Juger que la demande indemnitaire liée à un surcout d'assurance santé est prescrite et irrecevable ;
- Juger que la demande indemnitaire liée à un surcoût d'imposition est prescrite et irrecevable ;
- Juger que la demande indemnitaire liée à l'incidence de l'inflation est prescrite et irrecevable ;
- Juger que la demande indemnitaire liée à l'incidence de la TVA est prescrite et irrecevable ;
- Juger que la demande indemnitaire liée à une dégradation du niveau de vie est prescrite et irrecevable ;
- Juger que la demande indemnitaire pour inexécution contractuelle est prescrite et irrecevable ;
- Juger que les demandes de rappel d'indemnité logement antérieures à juillet 2017 sont prescrites ou intégralement prescrites et irrecevables ;
- Juger que les demandes liées à l'avantage véhicule sont prescrites depuis juillet 2017 ou entièrement prescrites et irrecevables ;
Juger que les demandes de rappel de prime coût de la vie antérieures à juillet 2017 sont prescrites et irrecevables ;
- Juger que les demandes liées à la reconstitution du salaire de base antérieures à juillet 2017 sont prescrites et irrecevables ;
- Juger que les préjudices invoqués par M. [G] sont sans rapport avec les manquements contractuels qu'il invoque ;
- Juger que M. [G] n'apporte la preuve d'aucun des préjudices qu'il invoque ;
- Juger qu'aucun des préjudices n'est imputable à la société CPEDS ;
- Débouter M. [G] de l'ensemble de ses demandes ;
4/ En tout état de cause
- Débouter M. [G] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner M. [G] à une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions transmises par la voie électronique, en application de l'article 455 du code de procédure civile.
Par message adressé via le réseau RPVA le 2 septembre 2025, la cour a invité les parties à présenter leurs observations sur le moyen relevé d'office tiré de l'existence éventuelle d'une perte de chance de M. [G] d'éviter les dommages, dès lors que le juge peut, sans méconnaître l'objet du litige, rechercher l'existence d'une telle perte de chance alors que lui est demandée la réparation de l'entier préjudice (Ass. plén., 27 juin 2025, pourvoi n° 22-21.812).
La société Crown packaging european division services a présenté des observations notifiées par RPVA les 4 et 12 septembre 2025.
M. [G] a présenté des observations notifiées par RPVA le 22 septembre 2025.
MOTIVATION
Sur la prescription :
M. [G] soutient que c'est à tort que la juridiction prud'homale a retenu la prescription de ses demandes. Il indique que le courrier de son avocat du 29 mai 2018 faisait état de ses interrogations, mais ne peut servir de point de départ à la prescription, et que ce n'est que dans le cadre de la première instance que la société a enfin clarifié sa position en affirmant qu'il avait bénéficié d'un régime de protection pendant une durée limitée de 5 années. Il précise que son employeur n'a versé aux débats que le 29 mai 2021 un document (en anglais) intitulé « guide relatif à la politique de transfert en Europe Occidentale » qui constitue en réalité le document régissant les relations contractuelles entre les parties et dont il n'avait pas connaissance. Il fait valoir que le délai de prescription n'a commencé à courir que le 1er avril 2019, date à laquelle la société a formalisé le terme des relations contractuelles en confirmant sa volonté de ne pas assumer les conséquences financières de ses manquements contractuels.
La société CPEDS réplique que l'ensemble des demandes se heurtent à la prescription, qui a commencé à courir dès 2012-2013 et en tout état de cause le 29 mai 2018, date à laquelle le salarié avait connaissance des faits lui permettant d'exercer ses droits et était même capable de fixer et chiffrer les préjudices en résultant par l'intermédiaire de son avocat et de la mise en demeure adressée à la société.
A titre subsidiaire, elle soutient que sont partiellement prescrites les demandes afférentes à l'intéressement et à la participation, au bonus, au surcoût des frais de logement, de véhicule, au coût de la vie, et la reconstitution de salaire et la perte de salaire, les autres demandes étant totalement prescrites.
La durée de la prescription est déterminée par la nature de la créance objet de la demande.
En premier lieu, le délai de prescription des salaires court à compter de la date à laquelle la créance salariale est devenue exigible, à condition que le salarié ait connaissance des éléments ouvrant droit à une rémunération.
Une indemnité qui compense une sujétion particulière de l'emploi du salarié constitue un complément de salaire. Dans le cas contraire, elle s'analyse en une indemnité représentative de frais professionnels que doit exposer le salarié en raison des conditions d'exécution de son contrat de travail.
S'agissant des demandes relatives au bonus, au surcoût des frais de logement - en compensation de la baisse puis de la suppression des indemnités de logement - et des frais de véhicule automobile, qui compensent une sujétion particulière de l'emploi du salarié, à l'incidence du coût de la vie -indice « Cost of Living » -, à la perte de salaire et à la privation d'une augmentation de salaire basée sur l'inflation, ces demandes concernent, ainsi que le fait valoir l'employeur, des créances qui sont de nature salariale.
Aux termes de l'article L. 3245-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.
En ce qui concerne le point de départ de ce délai, il sera relevé que si l'avenant du 17 juillet 2002 mentionnait l'application des principales dispositions de la politique de mobilité européenne du groupe pour une durée maximale de cinq ans, et l'application du statut de cadre expatrié durant la suspension du contrat de travail, ses stipulations n'étaient pas suffisamment claires pour permettre à l'intéressé de connaître l'étendue des obligations de l'employeur ni la durée de son expatriation et d'en tirer en conséquence des conclusions quant aux faits lui permettant d'exercer ses droits, comme en témoignent les échanges de courriels intervenus entre les parties sur l'interprétation de cet avenant.
Il ressort de l'examen de l'ensemble des pièces produites aux débats qu'à l'issue de nombreux échanges de courriels, M. [G] a adressé à la société Crown europe, par l'intermédiaire de son conseil, une mise en demeure du 29 mai 2018 dont le contenu, très détaillé, fait clairement ressortir que le salarié avait connaissance des faits lui permettant l'exercice de ses droits, son employeur ayant estimé que sa soumission au statut d'expatrié pour une durée maximale de cinq ans ne signifiait pas pour autant que sa mission à l'étranger avait une durée déterminée.
Il en résulte que le délai de prescription des créances salariales n'a pu courir qu'à compter de cette date et que la saisine de la juridiction prud'homale le 2 juillet 2020 est intervenue dans ce délai.
Le contrat de travail ayant été rompu le 30 novembre 2018, les demandes de rappel de créances salariales pour la période antérieure au 30 novembre 2015 sont prescrites.
Le jugement sera infirmé sur ce point.
S'agissant de la demande relative à la diminution de la prime de départ en retraite, et contrairement à ce qu'allègue l'employeur, celle-ci a le caractère d'un complément de salaire et se trouve donc également soumise à la prescription triennale de l'article L. 3245-1 du code du travail.
Il en résulte que cette demande ne se heurte pas à la prescription.
En deuxième lieu, selon l'article L. 1471-1 du même code, toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.
D'une part, les demandes en paiement de sommes au titre de l'intéressement et de la participation aux résultats de l'entreprise, qui constitue une rémunération complémentaire n'ayant pas une nature salariale, relèvent de l'exécution du contrat de travail et sont soumises à la prescription biennale de l'article L. 1471-1 du code du travail.
D'autre part, les demandes tendant au paiement de dommages-intérêts au titre de la dégradation du niveau de vie résultant de la perte d'emploi de son épouse, de l'incidence de la taxe sur la valeur ajoutée et en réparation du préjudice moral causé au salarié par les manquements de l'employeur, qui portent sur l'exécution du contrat de travail, se prescrivent par deux ans.
Il résulte des développements qui précèdent que l'appelant a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit le 29 mai 2018, de sorte que la saisine de la juridiction prud'homale le 2 juillet 2020 est intervenue après l'expiration du délai prévu par l'article L. 1471-1 et que ces demandes se heurtent à la prescription.
Enfin, l'action portant sur l'indemnisation du préjudice résultant de la minoration des droits à la retraite relève de la prescription biennale, dont le délai n'a commencé à courir qu'à la date de la liquidation des droits, à savoir le 1er décembre 2018, le préjudice n'ayant été révélé qu'à cette date. Cette demande n'est donc pas prescrite.
En troisième lieu, aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
En l'espèce, M. [G] sollicite des dommages et intérêts correspondant aux sommes qu'il estime devoir exposer pour les quinze années à venir, au titre du surcoût de l'assurance santé complémentaire et de l'augmentation du taux d'imposition sur le revenu liés à sa domiciliation en Belgique en raison du manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles.
Ces demandes ne tendent pas à obtenir l'exécution d'une obligation née du contrat de travail mais relèvent d'une action en responsabilité contre l'employeur qui se prescrit par cinq ans en application des dispositions précitées de l'article 2224 du code civil, de sorte que la société n'est pas fondée à opposer la prescription.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a dit l'action prud'homale prescrite.
Sur les manquements de l'employeur à ses obligations contractuelles :
M. [G] soutient que son employeur a manqué à ses obligations en ne précisant pas les conditions de son rapatriement dans l'avenant du 17 juillet 2002 et en ne réexaminant pas sa situation à l'issue de la période de 5 ans suivant son départ en Belgique, alors que les modalités d'exécution de son expatriation auraient dû être à nouveau discutées et le cas échéant modifiées.
Il fait valoir qu'il a été « oublié » par son employeur. Il indique que sa pathologie a nécessité des soins lourds et donné lieu à un arrêt de travail de longue durée à compter du 30 octobre 2010, et que l'usine située à [Localité 4] ayant fait l'objet d'une fermeture au cours de l'année 2012, il a été le seul salarié dont la situation n'a pas été examinée, la plupart de ses collègues étant licenciés, reclassés ou mutés en France ou ailleurs. Il se prévaut de la méconnaissance de l'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail prévue par l'article L.1222-1 du code du travail, des dispositions des articles R.1221-34 et R.1221-11 du code du travail et de la convention collective qui impliquent que la durée de l'expatriation et les conditions de rapatriement du salarié doivent impérativement être déterminées à l'avance. Il ajoute que la société n'a pas pris la peine d'examiner sa position dans l'entreprise compte tenu de son arrêt maladie.
La société conteste tout manquement et réplique que le salarié n'a nullement été oublié en Belgique dès lors que les échanges avec la société CPEDS ont été réguliers du début de sa mission jusqu'à son départ en retraite, soit sur une période d'environ 17 ans, et que c'est en raison de ses problèmes de santé et de son arrêt maladie de 2010 à 2018 qu'elle n'a pas pris contact avec lui au moment de la fermeture de l'usine d'[Localité 4]. Elle précise que le premier avenant du 7 mai 2001 distinguait deux périodes, la première, du 14 mai 2001 au 30 juin 2002, étant une période de détachement durant laquelle il restait soumis au système français de sécurité sociale et résident fiscal français, et la seconde, à compter du 1er juillet 2002, une période d'expatriation durant laquelle il relevait du système de sécurité sociale belge et bénéficiait, pour une période maximale de 5 ans, des principales dispositions de la politique de mobilité européenne du groupe. Elle indique que le second avenant daté du 17 juillet 2002 est un avenant d'application du premier et complétait les principes qui prévus par celui-ci concernant la période d'expatriation, laquelle était à durée indéterminée.
Aux termes de l'article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi.
La bonne foi étant présumée, il appartient à la partie qui s'en prévaut de rapporter la preuve de l'exécution déloyale du contrat de travail.
Par ailleurs, l'obligation de bonne foi prend fin avec le contrat de travail.
En outre, s'agissant du dispositif d'expatriation, selon l'article R.320-5 du code du travail, dans sa version en vigueur du 2 septembre 1994 au 1er mai 2008 applicable à la date de signature des avenants, l'employeur doit fournir au salarié lors de son embauche un document sur lequel sont reproduites les informations contenues dans la déclaration préalable et prévues à l'article R. 320-2. Ce document doit en outre mentionner, en cas d'expatriation du salarié excédant une période d'un mois, la durée de l'expatriation, la devise servant au paiement de la rémunération et, le cas échéant, les avantages en espèces et en nature liés à l'expatriation ainsi que les conditions de rapatriement du salarié. Toute modification d'une ou plusieurs de ces informations doit faire l'objet d'un document qui est remis par l'employeur au salarié au plus tard un mois après la date de la prise d'effet de cette modification.
Aucune disposition légale ou réglementaire ne fait toutefois obstacle à ce que la mission exercée à l'étranger par le salarié expatrié soit à durée indéterminée.
Par ailleurs, à cet égard, l'accord du 12 septembre 1983 relatif à l'affectation à l'étranger constituant l'annexe II de la convention collective applicable ne prévoit la détermination, par écrit, avant le départ du salarié, de la durée prévisible de l'affectation, que « s'il est possible d'envisager une durée approximative », possibilité qui n'apparaît pas établie en l'espèce à la date de l'expatriation de M. [G].
En revanche, l'absence de durée déterminée de l'expatriation ne dispense pas l'employeur de délivrer des informations sur les conditions dans lesquelles le salarié peut bénéficier d'un rapatriement, l'accord collectif prévoyant à cet égard que doivent être précisées par écrit les conditions de résiliation et de rapatriement des salariés.
Il ressort de l'examen des documents contractuels que l'expatriation de M. [G] n'était pas assortie d'un terme déterminé, la durée maximale de cinq ans mentionnée par le contrat ne visant qu'à limiter dans le temps le bénéfice au profit du salarié des dispositions prévues par la politique de mobilité européenne du Groupe.
La mention de cette politique de mobilité européenne renvoie au guide relatif à la politique de transfert en Europe Occidentale, qui constitue, ainsi que le soutient la société, un engagement unilatéral liant l'employeur.
Or ce guide prévoit en page 1 b) que : « La durée d'une affectation n'est normalement pas inférieure à deux (2) ans. Si la mutation se prolonge au-delà de cinq ans, le poste sera réexaminé au cas par cas mais la personne mutée s'intègrera pleinement dans la structure d'accueil. ».
Il en résulte que même en l'absence de demande expresse de sa part, l'employeur était tenu de réexaminer la situation du salarié à l'issue d'une période de cinq ans suivant son départ en Belgique, soit à compter du mois de mai 2006.
Il ressort des pièces du dossier que la situation de M. [G] n'a pas fait l'objet d'un réexamen à compter de cette date.
La société n'est pas fondée à se prévaloir de l'état de santé du salarié, qui se trouvait en arrêt maladie depuis le 30 octobre 2010, pour justifier cette absence de réexamen. Il sera également relevé qu'aucune démarche n'a été davantage entreprise par la société à la suite de la fermeture, au cours de l'année 2012, de l'usine d'[Localité 4] à laquelle le salarié était resté affecté.
En outre, l'avenant litigieux ne comportait que quelques précisions sur la prise en charge des frais de déménagement ainsi que de voyage de fin de contrat, sans aucune précision sur les modalités de résiliation et de rapatriement.
Il en résulte que le salarié est fondé à se prévaloir d'un manquement de l'employeur à son obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail.
Sur les demandes financières :
En ce qui concerne la demande relative au bonus :
Le salarié fait valoir que le bonus ne lui a pas été versé à compter de son arrêt de travail intervenu en novembre 2010, alors que l'avenant du 17 juillet 2002 prévoyait son versement.
La société réplique que le contrat ne comporte aucune garantie de versement du bonus, même en cas de suspension du contrat de travail.
Il résulte de l'article L. 1226-1 du code du travail que la suspension du contrat de travail dispense l'employeur de son obligation de rémunération du salarié.
Il résulte de l'article 1103 du code civil qu'un salarié, sauf clause contractuelle ou conventionnelle contraire, ne peut prétendre recevoir une prime, lorsque la gratification a été instituée afin de rémunérer une activité ou récompenser les services rendus, que dans la mesure du travail effectivement accompli.
En l'espèce, l'avenant du 17 juillet 2002 prévoyait, ainsi que le soutient l'appelant, que « D'une façon générale, le montant du « bonus » est servi le plus rapidement possible dans le courant du premier semestre de l'année suivante, à condition d'avoir été inscrit dans les effectifs le 31 décembre de l'année de référence et de ne pas avoir été à cette date en cours de préavis pour une raison quelconque, sauf en cas de départ en préretraite ou en retraite. ».
Aucune stipulation ne prévoit toutefois le versement de ce bonus, qui dépendait de la réalisation d'objectifs, en cas de suspension du contrat de travail par un arrêt de travail pour maladie.
La demande sera donc rejetée.
En ce qui concerne la demande relative à la diminution de la prime de départ en retraite :
L'appelant soutient qu'à son départ en retraite, la société lui a versé à une prime de départ d'un montant de 37 176,02 euros bruts, soit 29 913 euros nets, qui repose sur une ancienneté de 29 années et 153 jours représentant le temps de travail exécuté en France à l'exception des années travaillées en Belgique. Il fait valoir que son employeur n'a pas comptabilisé les années de travail exécutées en Belgique pour le calcul du montant de la prime de départ à la retraite, en violation des dispositions contractuelles de l'avenant du 17 juillet 2002.
La société réplique que le bulletin de paye du mois de novembre 2018 fait apparaitre que la prime de retraite versée s'élève en réalité à la somme de 74 000, 95 euros brut. Elle ajoute que le calcul effectué par l'appelant est erroné, notamment en ce qu'il intègre le bonus.
Il ressort des éléments du dossier que la société était, ainsi que le soutient le salarié, tenue d'intégrer pour le calcul de cette indemnité les années de travail exécutées en Belgique.
En outre, la société, en se bornant à se prévaloir du montant figurant sur un bulletin de salaire, ne justifie pas du paiement de la somme alléguée de 74 000, 95 euros brut.
Il y a lieu, en revanche, et compte tenu des considérations énoncées plus haut, de déduire du montant de la somme réclamée la partie afférente au bonus.
Au regard de ces éléments, l'employeur sera condamné au versement d'une somme de 16 556,34 euros.
En ce qui concerne la demande relative à la diminution de la pension de retraite :
L'appelant soutient qu'il ne peut pas bénéficier d'une majoration du montant de sa pension de retraite appliquée par le régime français, ce que conteste l'intimée.
M. [G] n'est pas fondé à se prévaloir d'un calcul basé sur l'hypothèse dans laquelle il serait resté en France, dès lors qu'il avait, au terme des deux avenants litigieux, consenti à son expatriation qui lui assurait au demeurant certains avantages financiers.
En outre, il n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait, à compter du 31 décembre 2012, bénéficié d'une majoration pour tout trimestre supplémentaire, dès lors qu'il se trouvait à compter du 30 octobre 2010 en arrêt maladie, et que la période d'arrêt pour maladie n'est pas prise en compte pour le décompte de la surcote.
Enfin, l'appelant n'intègre pas au calcul de ses droits à la retraite allégués l'application des règles de coordination européenne des régimes de retraite en vigueur.
Dans ces conditions, sa demande ne peut être accueillie.
En ce qui concerne la demande relative au surcoût de l'assurance de santé complémentaire :
M. [G] sollicite l'allocation d'une somme de 275 760,00 euros au titre du surcoût d'assurance de santé complémentaire qu'il sera contraint d'engager sur les 15 années à venir, correspondant à son espérance de vie, à raison de sa domiciliation en Belgique.
Les éléments produits ne permettent toutefois pas d'établir que le surcoût dont il se prévaut, qui résulte de son maintien en Belgique, serait lié à un manquement de l'employeur, alors que la relation de travail a pris fin le 30 novembre 2018.
Cette demande ne peut donc être accueillie.
En ce qui concerne la demande relative au surcoût de l'imposition sur le revenu :
Les éléments produits ne permettent pas d'avantage d'établir que le surcoût dont M. [G] se prévaut, qui résulte de son maintien en Belgique, serait lié à un manquement de l'employeur, alors que la relation de travail a pris fin le 30 novembre 2018. Cette demande doit donc être également rejetée.
En ce qui concerne la demande relative au surcoût des frais de logement :
L'appelant fait valoir qu'à compter du 1er juillet 2008, l'employeur a décidé unilatéralement de supprimer de manière progressive le versement de l'indemnité de logement, ce qu'il a été contraint d'accepter en raison de sa position de subordination hiérarchique. Il ajoute qu'en tout état de cause, en ne précisant pas les « conditions du rapatriement » à l'issue de son expatriation, la société n'a pas anticipé la difficulté à laquelle il serait confronté pour faire face au paiement de cette charge mensuelle.
La société conteste ces allégations et fait valoir que le salarié a en outre choisi d'habiter une commune belge dans laquelle le logement est onéreux.
D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que la dégressivité puis la suppression de l'indemnité de logement aurait été imposée au salarié. Ce moyen sera donc écarté.
D'autre part, le préjudice dont se prévaut le salarié à raison du surcoût de logement, qu'il lie également au manquement de l'employeur tiré de l'absence de précisions sur les conditions de rapatriement, ne peut résulter que d'une perte de chance d'éviter le surcoût allégué, dès lors qu'il n'est pas établi que l'intéressé aurait effectivement été rapatrié en France s'il avait été mieux informé ou s'il en avait fait la demande, ni à quel moment.
Enfin, le salarié justifie de ses frais de logement sur les années 2018, à hauteur de 2 300 euros par mois, soit 27 600 euros par an, et 2019, à hauteur de 1 850 par mois, soit 22 200 euros par an.
Au regard des éléments produits, le préjudice résultant de la perte de chance de M. [G] de supporter des frais de logement moindre sera évalué à la somme de 20 000 euros.
En ce qui concerne la demande relative à la reconstitution de salaire de base :
L'appelant soutient que la diminution de son salaire de base en 2007 a engendré une perte de revenu qu'il évalue à la somme de 28 662 euros jusqu'en 2018.
La société réplique que l'allocation 'coût de la vie' n'est versée que s'il existe des surcoûts de dépenses quotidiennes dans le pays, ce dont M. [G] ne justifie pas, et soutient que les calculs effectués par le salarié sont erronés et contradictoires, aucune évolution automatique et annuelle du salaire de base n'ayant été garantie par l'employeur.
Aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Au regard des éléments produits, l'employeur ne justifie pas du bien-fondé de l'évolution du salaire de référence de M. [G].
Compte tenu de la prescription, qui porte le montant des sommes en litige pour la période postérieure au 30 novembre 2015 à un total de 7 498 euros, et des développements qui précèdent, il lui sera alloué une somme de 2 000 euros à ce titre.
En ce qui concerne la demande relative à l'incidence de l'inflation :
L'appelant se prévaut de la privation d'une augmentation de salaire basée sur l'inflation.
Il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que sur la période non prescrite à compter du 30 novembre 2015, le salarié, qui se trouvait en arrêt maladie depuis 2010, et qui a bénéficié d'un maintien de rémunération, d'indemnités journalières de l'assurance maladie et d'une indemnité complémentaire, aurait si sa situation avait été réexaminée par l'employeur et en cas de retour en France, perçu une indemnisation supérieure.
Cette demande sera dès lors rejetée.
En ce qui concerne la demande relative aux frais de véhicule automobile :
Un véhicule de fonction, dont, sauf stipulation contraire, le salarié conserve l'usage dans sa vie personnelle, ne peut lui être retiré pendant une période de suspension du contrat de travail.
Commet en conséquence une faute, justifiant l'allocation de dommages-intérêts, l'employeur qui, lors d'un arrêt de travail, prive le salarié du véhicule de fonction qui lui avait été attribué.
En l'espèce, l'article VI de l'avenant litigieux intitulé « Véhicule de société » précisait : « Dans le cadre de vos responsabilités en Belgique, vous disposerez d'une voiture de société selon les modalités applicables aux cadres de votre niveau au sein de Crown Cork Company Belgium NV ».
Il ne ressort pas des pièces produites que le salarié aurait eu interdiction d'utiliser ce véhicule à des fins personnelles.
En outre, il n'est pas établi que la politique des véhicules dont fait état la société, qui ne prévoyait le maintien de cet avantage en cas de maladie que durant la période de maintien de salaire, aurait été portée à la connaissance du salarié, de sorte qu'il est fondé à soutenir qu'elle ne lui est pas opposable.
Il est constant que M. [G] a, au mois de juillet 2015 et à la demande de son employeur, restitué le véhicule de fonction dont il disposait.
Il en résulte que le retrait unilatéral de cet avantage en nature par l'employeur est fautif et que l'appelant est fondé, au regard des pièces produites et pour la période non prescrite, à réclamer une indemnisation de 25 135,56 euros.
Sur les intérêts :
Il sera rappelé que les créances salariales portent intérêt au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de jugement et les créances indemnitaires portent intérêt au taux légal à compter de la décision qui les ordonne.
Sur les frais du procès :
Au regard de ce qui précède, le jugement sera infirmé sur les dépens et sur l'article 700 du code de procédure civile.
La société Crown packaging european division services sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, et au paiement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
INFIRME le jugement en ses dispositions soumises à la cour, sauf en ce qu'il juge prescrites les demandes de M. [O] [G] au titre de l'intéressement et de la participation aux résultats de l'entreprise, de la dégradation du niveau de vie résultant de la perte d'emploi de son épouse, de l'incidence de la taxe sur la valeur ajoutée et du préjudice moral ;
STATUANT A NOUVEAU sur les chefs infirmés et Y AJOUTANT :
ECARTE la fin de non-recevoir tirée de la prescription s'agissant des demandes au titre de la minoration des droits à la retraite, de la prime de départ en retraite, du surcoût de l'assurance santé complémentaire et de l'augmentation du taux d'imposition sur le revenu ;
DECLARE prescrites les demandes de M. [O] [G] au titre de l'intéressement et de la participation aux résultats de l'entreprise, des dommages-intérêts pour dégradation du niveau de vie résultant de la perte d'emploi de son épouse, de l'incidence de la taxe sur la valeur ajoutée et du préjudice moral ;
DECLARE prescrites, pour la période antérieure au 30 novembre 2015, les demandes de M. [O] [G] relatives au bonus, au surcoût des frais de logement et des frais de véhicule automobile, à l'incidence du coût de la vie, à la perte de salaire et à la privation d'une augmentation de salaire basée sur l'inflation ;
CONDAMNE la société Crown packaging european division services à payer à M. [O] [G] les sommes de :
- 16 556,34 euros au titre du reliquat de la prime de départ en retraite ;
- 20 000 euros au titre du surcoût des frais de logements ;
- 2 000 euros au titre de l'évolution du salaire de référence ;
- 25 135,56 euros au titre des frais de véhicule automobile ;
REJETTE la demande de M. [O] [G] au titre du bonus ;
REJETTE la demande de M. [O] [G] au titre de la diminution de la pension de retraite ;
REJETTE la demande de M. [O] [G] au titre du surcoût de l'assurance de santé complémentaire ;
REJETTE la demande de M. [O] [G] au titre de l'incidence de l'inflation ;
RAPPELLE que les créances salariales portent intérêt au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de jugement et que les créances indemnitaires portent intérêt au taux légal à compter de la décision qui les ordonne ;
CONDAMNE la société Crown packaging european division services aux dépens de première instance et d'appel ;
CONDAMNE la société Crown packaging european division services à payer à M. [O] [G] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE le surplus des demandes.
La greffière La présidente