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CA Caen, 2e ch. civ., 25 septembre 2025, n° 23/02370

CAEN

Arrêt

Autre

CA Caen n° 23/02370

25 septembre 2025

AFFAIRE :N° RG 23/02370

ARRÊT N°

NLG

ORIGINE : DECISION en date du 08 Septembre 2023 du Tribunal de Commerce de LISIEUX

RG n° 2021701

COUR D'APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 25 SEPTEMBRE 2025

APPELANTE :

S.A.S. INTERNATIONAL PROD SIGN COMPAGNY 'IPSC FRANCE'

N° SIRET : 792 608 143

[Adresse 3]

[Localité 1]

prise en la personne de son représentant légal

Représentée par Me Jérémie PAJEOT, substitué par Me Noëmie REICHLING, avocats au barreau de CAEN,

Assistée de Me Adrienne MICHEL-CORSO, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE :

E.U.R.L. NICOM

N° SIRET : 510 606 684

[Adresse 6]

[Localité 2]

prise en la personne de son représentant légal

Représentée et assistée par Me Franck THILL, substitué par Me Marie PINGUET, avocats au barreau de CAEN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame EMILY, Président de Chambre,

Mme COURTADE, Conseillère,

M. GOUARIN, Conseiller,

DÉBATS : A l'audience publique du 05 juin 2025

GREFFIER : Mme LE GALL, greffier

ARRET prononcé publiquement le 25 septembre 2025 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme COURTADE, Conseillère, pour le président empêché et Mme LE GALL, greffier

L'EURL Nicom conçoit des outils de communication à destination de professionnels, et réalise ou sous-traite la fabrication des produits : 'lettres adhésives, décoration de véhicules, de vitrines, signalétique intérieure et extérieure, calicots, banderoles, imprimerie, impression numérique, marquage textile tuning home stickers.'

La SAS International prod sign compagny 'IPSC France' est fabricant d'enseignes pour les professionnels.

Suivant devis du 21 juin 2019, la société Nicom a commandé auprès de la société IPSC France, deux enseignes commerciales extérieures en inox, destinées à une agence immobilière à [Localité 4], pour le prix de 3.760,80 euros.

L'EURL Nicom a posé les enseignes chez sa cliente courant 2019.

Le 23 août 2021, la société Nicom a signalé à la société IPSC France la présence de rouille sur lesdites enseignes, faisant valoir que l'inox commandé, exposé à l'air salin, ne devait pas s'oxyder.

Considérant que la société IPSC France avait manqué à son obligation de conseil, en s'abstenant en qualité de professionnelle de prendre en considération l'oxydation des enseignes au contact de l'air marin, et qu'elle avait méconnu son obligation de résultat dans la fabrication des ouvrages confiés, la société Nicom l'a assignée, par acte d'huissier de justice du 11 avril 2022, devant le tribunal de commerce de Lisieux aux fins, notamment, de voir engager sa responsabilité contractuelle et de la voir condamner au paiement des différentes sommes exposées pour les frais de remplacement et de pose de nouvelles enseignes.

Par jugement du 8 septembre 2023, le tribunal de commerce de Lisieux a :

- condamné la SAS IPSC France à payer à la SARL Nicom la somme de 5.622 euros ;

- débouté la SARL Nicom en sa demande de dommages et intérêts ;

- condamné la SAS IPSC France à payer à la SARL Nicom la somme de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens comprenant la somme de 407,20 euros au titre du constat d'huissier du 15 mars 2002 ainsi que les frais de la présente procédure ;

- liquidé les frais de greffe à la somme de 118,02 euros.

Par déclaration du 12 octobre 2023, la société International prod sign compagny 'IPSC France' a interjeté appel de ce jugement.

Par dernières conclusions déposées le 24 juin 2024, l'appelante demande à la cour de :

A titre principal,

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il débouté la SARL Nicom en sa demande de dommages et intérêts,

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

* condamné la SAS IPSC France à payer à la SARL Nicom la somme de 5.622 euros ;

* condamné la SAS IPSC France à payer à la SARL Nicom la somme de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens comprenant la somme de 407,20 euros au titre du constat d'huissier du 15 mars 2002 ainsi que les frais de la présente procédure ;

Et statuant à nouveau :

- Rejeter toutes fins, moyens et conclusions contraires,

- Débouter la société à responsabilité limitée Nicom de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

Reconventionnellement,

- Condamner la société Nicom à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et attitude dilatoire,

- Condamner la société Nicom à lui payer la somme de 5.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la société Nicom aux entiers dépens,

A titre subsidiaire,

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il débouté la SARL Nicom en sa demande de dommages et intérêts,

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

* condamné la SAS IPSC France à payer à la SARL Nicom la somme de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens comprenant la somme de 407,20 euros au titre du constat d'huissier du 15 mars 2022 ainsi que les frais de la présente procédure,

- Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

* condamné la SAS IPSC France à payer à la SARL Nicom la somme de 5.622 euros,

Et statuant à nouveau,

- Ramener à de plus justes proportions la condamnation de la société IPSC France à la somme de 2.640 euros TTC, montant du devis d' IPSC France des enseignes à prix courant,

- Débouter la société Nicom pour le surplus,

- Condamner la société Nicom à lui payer la somme de 5.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la société Nicom aux entiers dépens.

Par dernières conclusions déposées le 25 mars 2024, l'EURL Nicom demande à la cour de :

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il :

* condamné la société IPSC France à payer à la SARL Nicom a somme de 5.622 euros,

* condamné la SAS IPSC France à payer à la SARL Nicom la somme de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens comprenant la somme de 407,20 euros au titre du constat d'huissier du 15 mars 2002 ainsi que les frais de la présente procédure .

- Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

* débouté la SARL NICOM en sa demande de dommages et intérêts,

* et débouté sinon omis de statuer sur la demande formée du chef de la pose des nouvelles enseignes et du changement des lettres.

Et statuant à nouveau,

- Condamner la société IPSC France à verser à la société Nicom Pao [Localité 4] le coût de la pose des nouvelles enseignes et du changement des lettres pour un montant 900 euros HT,

- Condamner la société IPSC France à verser à la société Nicom Pao [Localité 4] la somme de 5.000 euros à titre d'indemnité en réparation des préjudices d'atteinte à l'image et à la réputation,

- Débouter la société IPSC France de l'ensemble de ses demandes,

En tout état de cause,

- Condamner la société IPSC France à verser à la société Nicom une indemnité qu'il n'apparaît pas inéquitable de fixer à 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture de l'instruction a été rendue le 7 mai 2025.

Il est expressément renvoyé aux écritures précitées pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

MOTIFS

Il est constant que les enseignes litigieuses acquises par L'EURL Nicom ont été fabriquées par la SAS IPSC France en acier inoxydable classique 304 L, qu'elle ont été posées par l'intimée sur la façade du local professionnel appartenant à sa cliente situé à [Localité 4], et qu'elles ont rapidement rouillé.

La SAS IPSC France, qui savait que les enseignes étaient destinées à être installées en extérieur, avait une obligation de résultat de livrer un produit non oxydable.

L'EURL soutient mais ne démontre pas que l'inox 304 L était inadapté à une pose d'enseigne extérieure.

En revanche, il est acquis que seul un inox marin (316 L) était résistant à l'air marin.

A cet égard, la SAS IPSC France fait valoir qu'aucune précision ne lui a été donnée quant à la localisation des enseignes commandées et que leur destination géographique, à proximité de la mer, n'est pas entrée dans le champ contractuel. Elle ajoute que l'intimée est une spécialiste de l'enseigne.

L'EURL Nicom réplique qu'elle n'a pas de compétence en matière d'inox, que la SAS IPSC France ne pouvait sérieusement ignorer le lieu de pose des enseignes et qu'elle a manqué notamment à son devoir d'information pré-contractuelle (article 1112-1 du code civil) et de conseil (articles 1217 et 1231-1 du code civil).

L'obligation d'information et de conseil du vendeur à l'égard de son client sur l'adaptation du matériel vendu à l'usage auquel il est destiné n'existe à l'égard de l'acheteur professionnel que dans la mesure où sa compétence ne lui donne pas les moyens d'apprécier la portée exacte des caractéristiques techniques du dispositif en cause.

En l'espèce, aucun des échanges intervenus entre les parties ne permet d'établir que l'appelante savait ou aurait dû savoir que le chantier litigieux se situait à [Localité 4], le seul fait que l'EURL Nicom avait son établissement à [Localité 7], dans une cité balnéaire, et que le libellé de son adresse électronique était '[Courriel 5]' étant à cet égard insuffisant.

Par ailleurs, il ressort de l'extrait RCS Pappers de l'EURL Nicom et du logo figurant sur ses mails, que cette dernière est une professionnelle de l'enseigne.

Sur son site internet, elle se présente comme une professionnelle pour la conception, la fabrication et la pose des enseignes, indiquant notamment qu'elle conseille 'sur les matériaux à utiliser', sans exclure l'inox de son champ d'activité.

Apte à renseigner ses clients sur le type de matériaux à mettre en oeuvre, elle ne peut être considérée comme une profane dans le domaine des enseignes, y compris en inox.

Elle avait ainsi la compétence pour apprécier la portée exacte des caractéristiques techniques du produit à utiliser pour son chantier situé à [Localité 4] et il lui appartenait de spécifier lors de la commande, que les enseignes étaient destinées à être posées en bord de mer et que le métal devait donc présenter une résistance à l'air marin.

En conséquence, l'EURL Nicom échoue à caractériser un manquement de la SAS IPSC France à ses obligations d'information, de conseil et de résultat susceptible d'engager sa responsabilité du fait de l'oxydation des enseignes litigieuses.

Il convient donc de la débouter de toutes ses demandes.

L'action engagée par L'EURL Nicom, quoique mal fondée, ne procède pas d'un comportement fautif de sa part, de nature à faire dégénérer en abus le droit d'agir en justice.

Il convient donc de débouter la SAS IPSC France de sa demande indemnitaire pour procédure abusive sur laquelle le tribunal a omis de statuer.

L'EURL Nicom succombant, est condamnée aux dépens de première instance et d'appel, à payer à la SAS IPSC France la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et est déboutée de sa demande formée à ce titre.

Les dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles sont infirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a débouté l'EURL Nicom de sa demande de dommages et intérêts ;

Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées et y ajoutant,

Déboute l'EURL Nicom de toutes ses demandes ;

Déboute la SAS IPSC France de sa demande indemnitaire pour procédure abusive ;

Condamne l'EURL Nicom à payer à la SAS IPSC France la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne l'EURL Nicom aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT

EMPECHE

N. LE GALL L. COURTADE

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