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Décisions

CA Montpellier, 5e ch. civ., 30 septembre 2025, n° 22/03474

MONTPELLIER

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Syndic de copropriétaire de la résidence Belle Ile (Sté)

Défendeur :

Syndic de copropriétaire de la résidence Belle Ile

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Fillieux

Conseiller :

M. Garcia

Conseiller :

Mme Strunk

Conseiller :

Mme Sylvie Sabaton

Avocat :

Me Estelle Conquet

TJ Narbonne, du 12 mai 2022, n° 20/00208

12 mai 2022

EXPOSE DU LITIGE

M. [O] [R] et Mme [X] [V], copropriétaires d'un lot représentant 64/10000 tantièmes au sein de la résidence Belle Ile, située [Adresse 11] à Gruissan (11), respectivement en leur qualité d'usufruitier et de nue-propriétaire dudit lot, ont assigné le syndicat des copropriétaires de la résidence en annulation des décisions n°8 et n°9 de l'assemblée générale des copropriétaires du 6 août 2019, renouvelant comme syndic l'Agence Alizés pour une durée d'un an, alléguant que les dispositions de l'article 19 du décret du 17 mars 1967 relatives au vote de contrat mettant en concurrence plusieurs candidats s'appliquait à la désignation du syndic par l'assemblée générale des copropriétaires et, qu'en conséquence, constatant que ladite copropriété était dépourvue de syndic, que tout intéressé était invité à saisir le président du tribunal pour faire désigner un administrateur provisoire au visa de l'article 47 du décret susvisé, sauf à la juridiction de le nommer directement, ainsi qu'en annulation de toutes les décisions et actes de l'Agence Alizés pris depuis son élection.

Le jugement contradictoire rendu le 12 mai 2022 par le tribunal judiciaire de Narbonne :

Rejetant toutes conclusions ou demandes plus amples ou contraires comme injustes ou non fondées ;

Donne acte aux requérants de ce qu'ils ne contestent pas la désignation de l'Agence Alizés comme syndic du [Adresse 15], sis [Adresse 13], tenant sa désignation régulière et non contestée, lors de l'assemblée du 3 août 2020 et, qu'en conséquence, il n'est plus demandé la désignation d'un administrateur provisoire ;

Dit et juge que la désignation de l'Agence Alizés lors de l'assemblée du 6 août 2019 n'est entachée d'aucun vice et la déclare parfaitement régulière ;

Valide en conséquence les actes subséquents ;

Déboute en conséquence M. [O] [R] et Mme [X] [W] [N] [V] de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

Constate que M. [O] [R] et Mme [X] [W] [N] [V] ont commis des fautes, caractérisées par leur volonté malveillante de dénigrement et de déstabilisation injustifiée de la vie syndicale, à l'origine de difficultés multiples troublant la sérénité de la gestion quotidienne de la copropriété ;

Condamne en conséquence M. [O] [R] et Mme [X] [W] [N] [V] au paiement de la somme de 5 000 euros au syndicat des copropriétaires de la résidence Belle Ile, sis [Adresse 12] ;

Déboute pour le surplus ;

Condamne M. [O] [R] et Mme [X] [W] [N] [V] à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence Belle Ile, sis [Adresse 12], la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement.

Le premier juge a relevé que M. [O] [R] et Mme [X] [V] renonçaient dans leurs dernières écritures à solliciter la désignation d'un administrateur provisoire, tenant pour régulière la confirmation de la désignation renouvelée au bout d'un an de la SARL Agence Alizés, lors de l'assemblée générale du 20 août 2020.

Il a rejeté la demande des consorts [R] et [V] tendant à l'annulation, d'une part, des résolutions n°8 et n°9 de l'assemblée générale des copropriétaires du 6 août 2019, renouvelant comme syndic l'Agence Alizés, d'autre part, des actes subséquents, rappelant que la désignation d'un syndic nécessitait la majorité de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965, soit la majorité absolue des voix de tous les copropriétaires, alors que l'article 25-1 de ladite loi prévoyait que lorsqu'une résolution n'avait pas recueilli le seuil prévu à l'article 25, ou d'une autre disposition, mais que le projet avait recueilli au moins le tiers de ces voix, la même assemblée se prononçait à la majorité prévue à l'article 24, soit à la majorité relative des suffrages exprimés en présentiel ou représentés ou par correspondance, en procédant immédiatement à un second vote.

A ce titre, le premier juge a relevé que chacune des deux candidatures avait fait l'objet d'un vote distinct, que seule la SARL Agence Alizés avait dépassé le seuil du tiers lui permettant de se présenter aux suffrages du second vote, alors qu'il n'était pas démontré en quoi un ordre différent aurait modifié l'issue finale de la candidature du cabinet Vialan, soulignant que même dans l'ordre des scrutins retenus, ayant privilégié le double vote en faveur de l'Agence Alizés d'abord à la majorité qualifiée puis à la majorité simple de l'article 24 avant de consulter l'assemblée sur la candidature concurrente, rien n'empêchait le cabinet Vialan d'obtenir un tiers des voix étant donné que l'Agence Alizés n'avait pas obtenu les deux tiers lors du premier tour. Il a ajouté qu'en cas de participation au second tour du cabinet Vialan, la majorité relative se serait de toute façon dégagée en faveur du cabinet Alizés.

Le premier juge a condamné les consorts [R] et [V] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de leur responsabilité délictuelle propre, constatant qu'ils avaient été auteurs de certains agissements injustifiés, excessif et abusifs, n'ayant d'autres desseins que d'empoisonner la vie de la copropriété, notamment en multipliant des reproches injustifiés, en mandatant une association de consommateurs sur des informations superficielles à des fins intrusives et péremptoires en violation de l'expression démocratique des assemblées de copropriétaires ou encore en refusant de désigner, voir simplement de confirmer le mandataire désigné pour représenter leurs lots du fait du démantèlement de leur droit de propriété.

M. [O] [R] et Mme [X] [V] ont relevé appel de la décision par déclaration au greffe du 29 juin 2022.

Dans leurs dernières conclusions du 4 janvier 2025, M. [O] [R] et Mme [X] [V] demandent à la cour de :

Réformer le jugement dont appel en ce qu'il a dit et jugé les copropriétaires [R]/[V] ne contestent pas la désignation de l'Agence Alizés comme syndic du [Adresse 15] lors de l'assemblée d'aout 2020, en ce qu'il a dit et jugé régulière non entachée de vice la désignation de l'Agence Alizés lors de l'assemblée du 6 août 2019 et a déclaré la validité des actes subséquents ;

Réformer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné les copropriétaires [R]/[V] à indemniser le [Adresse 15] à la somme de 5 000 euros pour préjudice moral en raison des fautes caractérisées par leur volonté malveillante de dénigrement et de déstabilisation injustifiée de la vie syndicale, à l'origine de difficultés multiples troublant la sérénité de la gestion quotidienne de la copropriété et en ce qu'il a condamné les copropriétaires [R]/[V] à la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ;

Dire et juger irrégulière la désignation de l'Agence Alizés comme syndic du [Adresse 15] par l'assemblée du 6 août 2019 entachée de vice et prononcer son irrégularité et l'invalidité de tous les actes subséquents ;

Dire et juger qu'il n'existe aucune faute commise par les copropriétaires [R]/[V] propre à permettre l'indemnisation du préjudice moral soutenu par le syndicat des copropriétaires de la résidence Belle Ile et rejeter leur demande indemnitaire à ce titre ;

Condamner le [Adresse 15] à payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Pour l'essentiel, M. [O] [R] et Mme [X] [V] avancent que le premier juge a occulté le fait qu'il n'y a pas eu, selon eux, de votes distincts pour la désignation du syndic puisque le président de séance se serait contenté de reprendre les votes de la résolution n° 8, qui a désigné l'Agence Alizés, en considérant que les votes « POUR » de cette résolution valaient vote « [Localité 7] » pour la résolution n° 9, qui soumettait la candidature du Cabinet Vialan, et inversement, et que les représentants de ce dernier syndic, qui avaient fait le déplacement sur les lieux de l'assemblée, se seraient vu refuser l'accès par le syndic et les membres du bureau de l'assemblée générale, qu'ainsi, ils auraient et mis dans l'impossibilité de présenter leur projet aux copropriétaires.

Sur leur condamnation au paiement de dommages-intérêts, M. [O] [R] et Mme [X] [V] estiment démontrer que leurs interrogations sur la mise en concurrence effective et factuelle étaient parfaitement fondées puisque, selon eux, le second candidat, Cabinet Vialan, n'aurait pas pu présenter ses actions envisagées au motif qu'il aurait été arrêté devant la porte des locaux où était organisée l'assemblée générale du 6 août 2019.

Ils considèrent n'avoir fait qu'exercer leurs droits et avancent que les quelques événements exposés par l'Agence Alizés sont insuffisants à dire qu'ils auraient été au-delà de l'exercice de leurs droits de copropriétaires.

Au final, ils estiment qu'en réalité, le syndic de copropriété n'a pas supporté que M. [O] [R] puisse demander des renseignements et d'avoir été mis en cause par certains des copropriétaires, notamment à l'occasion de la tornade du 15 octobre 2018, après laquelle c'est, selon eux M. [O] [R] qui a dû prendre les mesures d'urgence en ses lieu et place, compte tenu de son absence de réactivité, et que c'est tant l'Agence Alizés que M. [K], président du conseil syndical, après sa démission, qui se seraient livrés à un véritable dénigrement à son égard à destination des copropriétaires, dans le seul but d'assurer, selon eux, les réélections de l'Agence Alizés.

Pour le surplus, pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, il est renvoyé aux conclusions susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions du 20 mai 2025, le [Adresse 15], pris en la personne de son syndic en exercice, demande à la cour de :

Déclarer irrecevables les demandes de M. [O] [R] et Mme [X] [V] tirées de la fin de non-recevoir pour défaut d'intérêt à agir ;

Confirmer en toutes ces dispositions le jugement entrepris ;

Rejeter l'ensemble des demandes fins et conclusions des consorts [R]/[V] ;

Condamner M. [O] [R] et Mme [X] [V] à verser au syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] Ile [Adresse 10], la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner M. [O] [R] et Mme [X] [V] aux entiers dépens.

Pour l'essentiel, in limine litis, le syndicat des copropriétaires communique un acte notarié en date du 29 avril 2025, par lequel M. [O] [R] et Mme [X] [V] ont vendu leur bien immobilier à M. [U] et Mme [S], et souligne que l'acte comportait une mention qui les subrogeait de leurs droits dans le cadre de la procédure en cours, de sorte qu'ils n'ont plus, selon l'intimé, ni qualité ni intérêt à agir, de sorte que leurs demandent doivent être déclarées irrecevables.

Pour le surplus, pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, il est renvoyé aux conclusions susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 4 juin 2025.

MOTIFS

1. Sur la recevabilité des demandes de M. [O] [R] et Mme [X] [V]

L'article 31 du code de procédure civile dispose que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

L'article 122 du code de procédure civile dispose que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Il est constant que le demandeur doit avoir la qualité de copropriétaire au jour de l'assemblée qui a pris la décision, plus précisément au moment où le vote a été formulé, même s'il a vendu son lot ultérieurement, dès lors qu'il justifie d'un intérêt légitime au support de sa prétention.

Or, au cas d'espèce, il doit être relevé de l'acte notarié du 29 avril 2025, versé au débat, la mention suivante : « Le VENDEUR déclare et l'ACQUEREUR reconnait avoir été informé qu'il existe actuellement une procédure en cours : condamnation d'un copropriétaire ' en attente d'appel. L'ACQUEREUR s'oblige à faire son affaire personnelle de cette procédure à compter de ce jour, à l'effet de quoi le VENDEUR le subroge dans tous ses droits et obligations et à cet égard ('). En outre, l'ACQUEREUR sera subrogé dans tous les droits et obligations du VENDEUR dans les procédures courantes concernant la copropriété, sauf si ces procédures sont le résultat d'une faute du VENDEUR. En conséquence, le VENDEUR déclare se désister en faveur de l'ACQUEREUR du bénéfice de toutes sommes qui pourraient lui être ultérieurement allouées ou remboursées à ce titre, relativement aux BIENS dont il s'agit », qu'ainsi, M. [O] [R] et Mme [X] [V] ont subrogé les acquéreurs dans leurs droits relatifs à la procédure en cours, de sorte qu'ils n'ont plus qualité à agir.

Il s'ensuit que leurs demandes seront déclarées irrecevables et le jugement dont ils ont relevé appel sera confirmé en toutes ses dispositions.

2. Sur les dépens et les frais non remboursables

Le jugement sera également confirmé en ce qui concerne les dépens et l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [O] [R] et Mme [X] [V] seront condamnés aux dépens de l'appel.

M. [O] [R] et Mme [X] [V] seront en outre condamnés à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe ;

DECLARE irrecevables les demandes M. [O] [R] et Mme [X] [V], pour défaut de qualité à agir ;

En conséquence,

CONFIRME le jugement contradictoire rendu le 12 mai 2022 par le tribunal judiciaire de Narbonne, en toutes ses dispositions ;

CONDAMNE M. [O] [R] et Mme [X] [V] à payer au [Adresse 15] la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais non remboursables d'appel ;

CONDAMNE M. [O] [R] et Mme [X] [V] aux dépens de l'appel.

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