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Décisions

CA Reims, ch.-1 civ. et com., 30 septembre 2025, n° 25/00368

REIMS

Arrêt

Autre

CA Reims n° 25/00368

30 septembre 2025

R.G. : N° RG 25/00368 - N° Portalis DBVQ-V-B7J-FTVZ

ARRÊT N°

du : 30 septembre 2025

Formule exécutoire le :

à :

la SCP LACOURT ET ASSOCIES

la SCP DELVINCOURT - CAULIER-RICHARD - CASTELLO AVOCATS ASSOCIES

SELARL RAFFIN ASSOCIES

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 30 SEPTEMBRE 2025

APPELANTE :

d'une ordonnance de référé rendue le 28 janvier 2025 par la présidente du tribunal judiciaire de [Localité 1] (RG 23/00199)

Madame [R] [E] entrepreneur individuel exerçant sous le nom commercial 'Soleil Exotic'

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Emeric LACOURT de la SCP LACOURT ET ASSOCIES, avocat au barreau des ARDENNES

INTIMÉES :

S.C.I. FONCIEREMENT QUARTIER au capital de 9 860 000 euros, Inscrite au RCS DE LILLE METROPOLE sous le n° 804 130 557, prise en la personne de son gérant domicilié de droit audit siège

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Mélanie CAULIER-RICHARD de la SCP DELVINCOURT - CAULIER-RICHARD - CASTELLO AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS, et Me Philippe LARIVIERE, avocat au barreau de LILLE

S.C.P. OFFICE NOTARIALE MOUZON Immatriculée au RCS de SEDAN sous le numéro 343 022 174, prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés de droit audit siège.

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Jessica RONDOT de la SELARL RAFFIN ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS, et la SCP KUHN, avocats au barreau de PARIS

DÉBATS :

A l'audience publique du 01 septembre 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 30 septembre 2025, sans opposition de la part des conseils des parties et en application de l'article 805 du code de procédure civile, Madame Anne POZZO DI BORGO, conseiller, a entendu les conseils des parties en leurs conclusions et explications, puis ce magistrat en a rendu compte à la cour dans son délibéré

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Christina DIAS DA SILVA, présidente de chambre

Mme Sandrine PILON, conseiller

Mme Anne POZZO DI BORGO, conseiller

GREFFIER D'AUDIENCE :

Mme Lucie NICLOT, greffier

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Mme DIAS DA SILVA, présidente de chambre, et par Madame NICLOT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Expose du litige

Par acte sous seing privé du 27 avril 2017, la SCI Foncièrement Quartier a conclu un bail commercial de 9 ans, à compter du 28 avril 2017, avec M. [V] [Z] portant sur un local d'une superficie de 67 m2 situé [Adresse 6] du centre commercial «'Ronde Couture'», à [Localité 1] (Ardennes).

Suivant avenant n°1 conclu le 1er mai 2018, son épouse, Mme [R] [E], est devenue preneur de ce bail.

En juin 2021, Mme [E] a fait appel à la SCP Mouzon, notaires associés, en vue de la cession de son fonds de commerce laquelle a été autorisée par le bailleur à condition que le cédant soit parfaitement à jour de ses loyers, charges et accessoires pour le jour de la signature de l'acte définitif.

Le 25 octobre 2022, la SCI Foncièrement Quartier a fait délivrer un commandement de payer la somme de 5 674,17 euros, visant la clause résolutoire du bail à la locataire.

Le 10 janvier 2023, le conseil de cette dernière a avisé le bailleur de sa volonté de céder le fonds de commerce et l'a mis en demeure de lui donner son accord pour cette cession.

Par courrier du 10 février 2023, le conseil de celui-ci lui a réitéré son accord, sous condition d'apurement de la dette locative s'élevant à la somme de 8 527,09 euros, en lui précisant que faute de paiement de celle-ci dans un délai de quinze jours, une action en acquisition de la clause résolutoire serait intentée.

Faute de règlement, par exploit du 6 septembre 2023, la SCI Foncièrement Quartier a fait assigner Mme [E] aux fins de résiliation du bail et d'expulsion.

Par exploit du 9 février 2024, Mme [E] a fait assigner la SCP Mouzon, notaires associés, afin qu'il la relève de toute condamnation pouvant être prononcée à son égard.

Par ordonnance du 28 janvier 2025, le juge des référés du tribunal judiciaire de Charleville-Mézières a':

- constaté par acquisition des effets de la clause résolutoire, la résiliation du contrat de bail commercial conclu le 27 avril 2017 et de son avenant n° 1 conclu le 1er mai 2018 liant la SCI Foncièrement Quartier, bailleur, et Mme [E], preneur, et ce à la date du 26 novembre 2022,

- ordonné l'expulsion des lieux sis [Adresse 6] du centre commercial «'ronde couture'» à [Localité 1] de Mme [E] tant de ses biens que des occupants de son chef et ce dans le délai de 1 mois à compter de la signification de l'ordonnance avec remise des clés des lieux au bailleur dans le même délai,

- condamné Mme [E] à payer à la SCI Foncièrement Quartier une indemnité provisionnelle de 6 301,56 euros au titre des loyers et charges impayés en application du bail commercial du 27 avril 2017 et de l'avenant n°1 du 1er mai 2018, dette arrêtée à la date de la résiliation du contrat le 26 novembre 2022, jusqu'à libération complète des lieux au tire du bail commercial signé le 27 avril 2017 et de l'avenant n°1 signé le 1er mai 2018,

- dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la signification de l'ordonnance,

- dit que la SCI Foncièrement Quartier conservera le dépôt de garantie à tire provisionnel,

- condamné Mme [E] à payer à la SCI Foncièrement Quartier une indemnité d'occupation provisionnelle forfaitaire et mensuelle sur la base du loyer global de l'année dernière majoré de 50 %, soit la somme de 797,37 euros, outre les charges et la TVA, à compter du 26 novembre 2022, jusqu'à la libération complète des lieux au titre du bail commercial signé le 27 avril 2017 et de l'avenant n°1 signé le 1er mai 2018,

- dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la signification de l'ordonnance,

- dit que la SCI Foncièrement Quartier conservera le dépôt de garantie à titre provisionnel,

- condamné Mme [E] à payer à la SCI Foncièrement Quartier une indemnité provisionnelle au titre de la remise en état des lieux à défaut de remise en état parfaite des lieux,

- dit que Mme [E] devra restituer le local en parfait état, et qu'à défaut, les travaux seront réalisés à l'initiative de la SCI Foncièrement Quartier et Mme [E] devra régler le coût de ces travaux sur présentation de factures dûment acquittées, et régler l'indemnité d'occupation calculée au prorata temporis pendant le temps nécessaire à la réalisation des travaux,

en tant que de besoin,

- condamné Mme [E] au paiement provisionnel des factures correspondant aux travaux réalisés à l'initiative de la SCI Foncièrement Quartier et à l'indemnité d'occupation calculée au prorata temporis pendant le temps nécessaire à la réalisation des travaux outre les charges et la TVA,

- dit que les sommes dues à leur échéance seront majorées de plein droit de 10 % à titre d'indemnité forfaitaire de frais contentieux et en tant que de besoin condamné Mme [E] au paiement provisionnel desdites sommes à la SCI Foncièrement Quartier,

- dit qu'à défaut d'une somme exigible à sa date d'échéance, celle-ci sera productive d'un intérêt au taux légal de 5 points à titre provisionnel et en tant que de besoin condamné Mme [E] au paiement provisionnel desdits intérêts à la SCI Foncièrement Quartier,

- condamné Mme [E] à payer à cette dernière la somme de 900 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [E] à payer à la SCP office notarial de Mouzon la somme de 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [E] aux dépens de l'instance y compris le coût de commandement de payer à hauteur de 157,79 euros,

- débouté la SCI Foncièrement Quartier du surplus de ses demandes,

- débouté Mme [E] du surplus de ses demandes et de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.

Par déclaration du 14 mars 2025, Mme [E] a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par la voie électronique le 23 mai 2025, elle demande à la cour de':

- infirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions,

- dire et juger la SCI Foncièrement Quartier recevable mais mal fondée en ses demandes,

à titre principal,

- rejeter ses demandes,

à titre subsidiaire,

- suspendre les effets de la clause résolutoire en application des dispositions de l'alinéa 2 de l'article L. 145-41 du code de commerce, avec proposition de règlement de la dette locative par versements mensuels de 3000 euros jusqu'à extinction de celle-ci,

à titre de demande reconventionnelle,

- condamner la SCI Foncièrement Quartier à l'indemniser à hauteur des loyers impayés,

en tout état de cause,

- condamner la SCI Foncièrement Quartier à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions communiquées par la voie électronique le 22 juillet 2025, la SCI Foncièrement Quartier demande à la cour de':

à titre principal,

- constater l'absence d'indication des chefs critiqués et l'absence de moyens de réformation,

en conséquence,

- déclarer que la cour n'est pas saisie d'une demande d'infirmation ou de réformation de la décision entreprise,

- confirmer purement et simplement l'ordonnance,

à titre subsidiaire,

- déclarer Mme [E] mal fondée en son appel et l'en débouter,

- confirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions,

en tout état de cause,

- la débouter de l'ensemble de ses demandes,

- la condamner à lui régler la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Elle soutient que Mme [E], qui a interjeté appel à titre individuel alors qu'elle ne pouvait le faire qu'en sa qualité de commerçante, est irrecevable en son action pour défaut de droit d'agir.

Elle fait valoir que l'appelante n'a pas listé précisément les chefs de l'ordonnance critiqués, privant ses conclusions de toute efficacité juridique. Elle ajoute que la cour n'étant saisie d'aucune demande d'infirmation, l'effet dévolutif de l'appel n'a pas opéré de sorte que la cour n'a pas à statuer sur l'appel interjeté.

Elle expose qu'en l'absence de discussion, de demande et de moyens dans le corps des écritures de l'appelante, elle doit être déboutée de sa demande d'infirmation de la décision en cause.

Subsidiairement, elle argue que les sommes réclamées sont valablement dues et que le commandement de payer resté sans effet a été régulièrement délivré de sorte que la clause résolutoire est incontestablement acquise. Elle ajoute que Mme [E] a paralysé la cession de son fonds par son inaction sans qu'elle puisse venir rechercher la responsabilité du bailleur.

Elle indique encore que l'ensemble de ses obligations concernant la restitution des lieux en parfait état n'est pas sérieusement contestable.

Aux termes de ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 25 juin 2025, la SCP Mouzon notaires associés demande à la cour de':

- confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a':

débouté Mme [E] du surplus de ses demandes et de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné Mme [E] à lui payer la somme de 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- juger que Mme [E] ne formule aucune demande de condamnation à son encontre en cause d'appel,

- prendre acte qu'elle s'en rapporte à justice quant aux demandes formulées par Mme [E] dès lors que lesdites demandes sont uniquement dirigées à l'encontre de la SCI Foncièrement Quartier,

- condamner Mme [E] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens sous le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle fait valoir qu'aucune demande n'est dirigée contre elle à hauteur d'appel par Mme [E].

Elle soutient par ailleurs qu'aucun des préjudices allégués par l'appelante n'est en lien avec la faute reprochée à l'étude notariale. Elle ajoute qu'aucune cession de fonds du commerce ne pouvait être opérée du fait des manquements de l'appelante à son obligation de paiement des loyers et en l'absence de production des pièces nécessaires à la constitution du dossier de sorte qu'elle ne peut soutenir avoir perdu une chance de vendre son fonds de commerce et d'apurer sa dette.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 août 2025 et l'affaire a été renvoyée pour être plaidée à l'audience du 1er septembre 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Au vu des conclusions de la SCI Foncièrement Quartier, la cour n'est pas saisie d'une demande tendant à voir déclarer irrecevable l'appel interjeté pour défaut du droit d'agir de Mme [E], cette prétention n'étant pas énoncée dans le dispositif des conclusions en cause.

L'article 542 du code de procédure civile dispose que l'appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou son annulation par la cour d'appel.

Selon l'article 954 de ce même code, «'les conclusions d'appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l'article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé.

Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.

La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées.

La partie qui conclut à l'infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu'elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance.

La partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs'».

La cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées dans le dispositif des conclusions, et uniquement si elles sont effectivement soutenues par des moyens développés dans la discussion.

L'appelant qui ne développe aucun moyen dans ses premières conclusions est réputé avoir abandonné toute contestation sur la décision de première instance, ce qui conduit au rejet de ses demandes.

En l'espèce, l'appelante demande l'infirmation de l'ordonnance querellée en toutes ses dispositions, dans le dispositif de ses conclusions notifiées par RPVA le 23 mai 2025. La cour doit donc statuer sur cet appel.

Toutefois, Mme [E] ne développe aucun moyen au soutien de ses prétentions, le paragraphe «'discussion'» en page 8 de ses conclusions étant vide de tout contenu.

Ses demandes n'étant soutenues par aucun moyen, il y a lieu de les rejeter.

L'ordonnance querellée est confirmée en toutes ses dispositions.

L'appelante, qui succombe en son recours, est condamnée aux dépens d'appel sous le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. Déboutée de ses prétentions, elle ne peut prétendre à une indemnité au titre des frais de procédure.

L'équité commande d'allouer à chacun des intimés une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés à hauteur d'appel, selon les modalités précisées au dispositif.

Par ces motifs

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

y ajoutant,

Condamne Mme [R] [E] aux dépens d'appel sous le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile';

Condamne Mme [R] [E] à payer à la SCI Foncièrement Quartier la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';

Condamne Mme [R] [E] à payer à la SCP Mouzon notaires associés la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';

La déboute de sa demande formée à ce titre.

Le greffier La présidente

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