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Décisions

CA Aix-en-Provence, retention administrative, 1 octobre 2025, n° 25/01927

AIX-EN-PROVENCE

Ordonnance

Autre

CA Aix-en-Provence n° 25/01927

1 octobre 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

CHAMBRE 1-11, Rétention Administrative

ORDONNANCE

DU 1er OCTOBRE 2025

N° RG 25/01927 - N° Portalis DBVB-V-B7J-BPGSJ

Copie conforme

délivrée le 01 Octobre 2025 par courriel à :

- l'avocat

- le préfet

- le CRA

- le JLD/TJ

- le retenu

- le MP

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le magistrat désigné pour le contrôle des mesures d'éloignement et de rétention du tribunal judiciaire de Marseille en date du 30 septembre 2025 à 12h36.

APPELANT

Monsieur [G] [O]

né le 14 avril 2003 à [Localité 6] (Tunisie)

de nationalité tunisienne

Non comparant

Représenté par Maître Myriam ETTORI,

avocate au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, commise d'office.

et de Madame [H] [L], interprète en langue arabe, inscrite sur la liste des experts de la cour d'appel d'Aix-en-Provence.

INTIMÉE

MONSIEUR LE PREFET DU VAR

Représentée par Madame [Y] [X]

MINISTÈRE PUBLIC

Avisé, non représenté

******

DÉBATS

L'affaire a été débattue en audience publique le 1er octobre 2025 devant M. Frédéric DUMAS, Conseiller à la cour d'appel délégué par le premier président par ordonnance, assisté de Mme Himane EL FODIL, Greffière,

ORDONNANCE

Par décision contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 1er octobre 2025 à 14h00,

Signée par M. Frédéric DUMAS, Conseiller et Mme Himane EL FODIL, Greffière,

PROCÉDURE ET MOYENS

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

Vu l'arrêté portant obligation de quitter le territoire national pris le 21 juillet 2024 par le PREFET DU VAR, notifié le même jour à 15h05 ;

Vu la décision de placement en rétention prise le 26 septembre 2025 par le PREFET DU VAR, notifiée le même jour à 20h07;

Vu la requête déposée le 27 septembre 2025 à 14 heures 58 au greffe du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Marseille par Monsieur [G] [O] aux fins de contestation de l'arrêté de placement en rétention ;

Vu la requête préfectorale en prolongation déposée le 29 septembre 2025 à 14 heures 25 au greffe du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Marseille ;

Vu l'ordonnance du 30 septembre 2025 rendue par le magistrat désigné pour le contrôle des mesures d'éloignement et de rétention du tribunal judiciaire de Marseille rejetant la requête en contestation de l'arrêté de placement en rétention et décidant le maintien de Monsieur [G] [O] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;

Vu l'appel interjeté le 30 septembre 2025 à par Monsieur [G] [O] ;

Monsieur [G] [O] ne comparaît pas.

Son avocate, régulièrement entendue et dont les observations ont été consignées dans le procès-verbal d'audience, reprend les termes de la déclaration d'appel et demande l'infirmation de l'ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire ainsi que la mainlevée du placement en rétention.

La représentante de la préfecture, dont les déclarations sont également consignées dans le procès-verbal d'audience, sollicite la confirmation de l'ordonnance du premier juge et le maintien de l'appelant en rétention. Elle souligne notamment que l'intéressé n'a pas communiqué d'adresse ni de document relatif à sa situation personnelle avant la décision de placement de la préfecture et qu'il a une audition fixée le 2 octobre 2025 avec le consulat de Tunisie.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La recevabilité de l'appel contre l'ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d'éloignement et de rétention n'est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d'irrégularité.

Pour autant , aux termes de l'article R743-11 alinéa 1 du CESEDA, à peine d'irrecevabilité la déclaration d'appel est motivée.

En l'occurrence l'appelant demande à la cour d'infirmer la décision du premier juge et, en liminaire de la partie discussion, précise que 's'ajoutent aux moyens développés dans la présente déclaration d'appel, tous éventuels autres moyens déjà développés dans les conclusions de première instance qui ont pu être déposés ou plaidés devant le JLD, et auxquels la présente déclaration se réfère nécessairement'.

Toutefois la juridiction du second degré étant saisie par une déclaration d'appel motivée et la procédure suivie étant orale les moyens soulevés devant le premier juge et non repris dans la déclaration d'appel ou devant le premier président dans le délai d'appel ne peuvent qu'être déclarés irrecevables.

1) - Sur la régularité de la saisine du magistrat du siège du tribunal judiciaire

L'article R.742-1 du CESEDA dispose que le magistrat du siège du tribunal judiciaire est saisi aux fins de prolongation de la rétention par simple requête de l'autorité administrative, dans les conditions prévues au chapitre III, avant l'expiration, selon le cas, de la période de quarante-huit heures mentionnée à l'article L.742-1 ou de la période de prolongation ordonnée en application des articles L.742-4, L.742-5, L.742-6 ou L.742-7.

A cette fin et à peine d'irrecevabilité, selon l'article R.743-2 du même code, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l'étranger ou son représentant ou par l'autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention, à savoir le préfet de département ou de police à [Localité 9] en application de l'article R.741-1. Dans ce cas la requête est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l'article L.744-2.

Ce dernier énonce qu'il est tenu, dans tous les lieux de rétention, un registre mentionnant l'état civil des personnes retenues, ainsi que les conditions de leur placement ou de leur maintien en rétention. Le registre mentionne également l'état civil des enfants mineurs accompagnant ces personnes ainsi que les conditions de leur accueil. L'autorité administrative tient à la disposition des personnes qui en font la demande les éléments d'information concernant les date et heure du début du placement de chaque étranger en rétention, le lieu exact de celle-ci ainsi que les date et heure des décisions de prolongation.

Selon les dispositions de l'article L. 743-9 du CESEDA le magistrat du siège du tribunal judiciaire, saisi aux fins de prolongation de la rétention, rappelle à l'étranger les droits qui lui sont reconnus et s'assure, d'après les mentions figurant au registre prévu à l'article L. 744-2 émargé par l'intéressé, que celui-ci a été, dans les meilleurs délais suivant la notification de la décision de placement en rétention, pleinement informé de ses droits et placé en état de les faire valoir à compter de son arrivée au lieu de rétention. Le juge tient compte des circonstances particulières liées notamment au placement en rétention simultané d'un nombre important d'étrangers pour l'appréciation des délais relatifs à la notification de la décision, à l'information des droits et à leur prise d'effet.

Il résulte de la combinaison de ces textes que le registre doit être mis à jour et que la non-production d'une copie actualisée, permettant un contrôle de l'effectivité de l'exercice des droits reconnus à l'étranger au cours de la mesure de rétention, constitue une fin de non-recevoir. Celle-ci doit être accueillie sans que celui qui l'invoque ait à justifier d'un grief dès lors que le juge ne peut s'assurer que l'étranger a été en mesure d'exercer les droits qui lui sont reconnus par les articles L. 744-4 et suivants du CESEDA.

Le paragraphe IV de l'annexe de l'arrêté du 6 mars 2018 portant autorisation du registre de rétention et d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé «logiciel de gestion individualisée des centres de rétention administrative» (LOGICRA) prévoit notamment que sont enregistrées dans les traitements au titre des données à caractère personnel concernant la fin de la rétention et l'éloignement les informations suivantes :

1° Demande de laissez-passer consulaire, consulat saisi, date de la demande d'identification ou de présentation consulaire, type de présentation, motif de non-présentation, date de I'entretien, moyen de transport utilisé, résultat de I'entretien, délivrance du laissez-passer consulaire, date de délivrance, date et fin de validité du laissez-passer consulaire;

2° Réservation du moyen de transport national et international: date prévisionnelle de départ, moyen de transport utilisé, pays de destination, demande de routing, escorte;

3° Fin de la rétention: date et motif de la fin de rétention.

En l'espèce l'appelant soulève le défaut d'actualisation du registre de rétention dans la mesure où les diligences consulaires n'y sont pas mentionnées.

Toutefois les diligences consulaires effectuées par l'administration ne constituent nullement des droits au sens des articles L. 744-4 et suivants du CESEDA, dont le défaut de mention dans le registre de rétention rendrait irrecevable la requête en prolongation de la mesure de rétention, s'agissant au surplus d'une question de fond en application de l'article L741-3 du même code.

En conséquence il y aura lieu de rejeter la fin de non recevoir tirée du défaut de mention des diligences consulaires dans le registre de rétention et de production de pièces utiles.

2) - Sur la contestation de l'arrêté de placement en rétention relative à l'insuffisance de motivation de l'arrêté et à l'erreur d'appréciation sur les garanties de représentation

En vertu de l'article L741-6 du CESEDA, selon lequel la décision de placement en rétention est écrite et motivée, l'arrêté préfectoral doit mentionner les considérations de fait de nature à justifier le placement en rétention administrative, et notamment la réalité de la nécessité absolue de maintenir l'intéressé dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire et ne peut se contenter d'une motivation stéréotypée; à défaut de quoi il est insuffisamment motivé.

L'appelant reproche à l'administration une motivation insuffisante en ce que le préfet n'a pas pris en compte sa situation personnelle dans la mesure où il est le compagnon d'une ressortissante française, Mme [E] [U], et qu'il est hébergé par cette dernière. Il indique qu'ils vivent ensemble au [Adresse 4] à [Localité 7]. Selon l'intéressé l'administration était nécessairement informée de cette adresse dès lors que le juge judiciaire l'a laissé libre afin de pouvoir s'y rendre.

Toutefois l'arrêté de placement en rétention est notamment fondé sur le fait qu'au moment de son interpellation M. [O] ne pouvait présenter un document d'identité ou de voyage en cours de validité ni justifier d'une adresse personnelle ou affectée à son habitation principale. De plus il ne justifie aucunement avoir fourni à l'administration des pièces relatives à sa situation personnelle avant que le préfet ne prenne la décision contestée.

Enfin il ressort de son audition en garde à vue que l'intéressé ne présente pas de garanties de représentation dans la mesure où il a reconnu s'être enfui à la vue des policiers parce qu'il faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, qu'il n'a d'ailleurs pas respectée depuis sa notification le 21 juillet 2024. Par ailleurs il a indiqué ne pas vouloir rentrer dans son pays, affirmant qu'il se suiciderait dans cette hypothèse.

Au vu de ces éléments aucune erreur manifeste d'appréciation sur les garanties de représentation de l'intéressé ne saurait être reprochée à l'administration.

3) - Sur la demande de première prolongation

L'article L. 741-1 du CESEDA dispose que l'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quatre jours, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision. Ce risque est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3 ou au regard de la menace pour l'ordre public que l'étranger représente.

Aux termes de l'article L. 742-1 du même code le maintien en rétention au-delà de quatre jours à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé, dans les conditions prévues au présent titre, par magistrat du siège du tribunal judiciaire saisi à cette fin par l'autorité administrative. Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court pour une période de vingt-six jours selon l'article L. 742-3 à compter de l'expiration du délai de quatre jours mentionné à l'article L. 741-1.

En l'espèce la demande de prolongation de la mesure de rétention est notamment fondée sur la soustraction à la mesure d'éloignement et l'absence de garanties de représentation, lesquelles sont avérées pour les motifs précédemment exposés.

La requête préfectorale en première prolongation sera donc validée pour les motifs précédemment exposés.

Pour l'ensemble des motifs précédemment exposés il conviendra de confirmer l'ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,

Déclarons recevable l'appel interjeté à l'encontre de l'ordonnance du 30 septembre 2025 du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Marseille,

Confirmons l'ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d'éloignement et de rétention du tribunal judiciaire de Marseille en date du 30 septembre 2025.

Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.

Le greffier Le président

Reçu et pris connaissance le :

Monsieur [G] [O]

Assisté d'un interprète

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11, Rétentions Administratives

[Adresse 8]

Téléphone : [XXXXXXXX02] - [XXXXXXXX03] - [XXXXXXXX01]

Courriel : [Courriel 5]

Aix-en-Provence, le 1er octobre 2025

À

- PREFET DU VAR

- Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de [Localité 7]

- Monsieur le procureur général

- Monsieur le greffier du Magistrat du siège du tribunal judiciaire chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de libertés de MARSEILLE

- Maître Myriam ETTORI

NOTIFICATION D'UNE ORDONNANCE

J'ai l'honneur de vous notifier l'ordonnance ci-jointe rendue le 1er octobre 2025, suite à l'appel interjeté par :

Monsieur [G] [O]

né le 14 Avril 2003 à [Localité 6]

de nationalité Tunisienne

Je vous remercie de m'accuser réception du présent envoi.

Le greffier,

VOIE DE RECOURS

Nous prions Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de bien vouloir indiquer au retenu qu'il peut se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation.

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