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Décisions

CA Paris, Pôle 1 - ch. 3, 2 octobre 2025, n° 24/19007

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 24/19007

2 octobre 2025

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 3

ARRÊT DU 02 OCTOBRE 2025

(n° 366 , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/19007 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CKLIU

Décision déférée à la cour : ordonnance du 31 octobre 2024 - président du TJ de [Localité 7] - RG n° 24/51264

APPELANT

M. [L] [B]

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représenté par Me Jacques BELLICHACH, avocat au barreau de PARIS, toque : G0334

Ayant pour avocat plaidant Me Philippe TOSI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMÉE

S.A.S.U. TRANSART INTERNATIONAL, RCS de [Localité 7] n°413141631, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Stéphanie SCHWEITZER du LLP HOLMAN FENWICK WILLAN France LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : J040

PARTIE INTERVENANTE

Société [Z] & CO. INC, société de droit américain, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 1] - ETATS-UNIS

Représentée par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753

Ayant pour avocat plaidant Me Henri D'ARMAGNAC de l'AARPI AUBLE ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 1er sepembre 2025, en audience publique, rapport ayant été fait par Valérie GEORGET, conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 906 du CPC, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Michel RISPE, président de chambre

Caroline BIANCONI-DULIN, conseillère

Valérie GEORGET, conseillère

Greffier lors des débats : Jeanne PAMBO

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Michel RISPE, président de chambre et par Jeanne PAMBO, greffier, présent lors de la mise à disposition.

********

[I] [Z] exerçait une activité de marchand d'art. Il est décédé en 2001.

La société américaine [Z] & Co. Inc., dirigée par M. [F] [Z] - fils de [I] [Z] - a également une activité de marchand d'art.

La société TransArt International est spécialisée dans le transport d'oeuvres d'art et de biens mobiliers précieux.

M. [B], qui exerce une activité de courtier en art, soutient que, par son intermédiaire, [I] [Z] a, le 17 novembre 1999, fait l'acquisition d'un tableau de DiegoVelazquez, représentant le roi d'Espagne [X] [U], pour un prix de 3 600 000 francs, l'authenticité de l'oeuvre ayant été confirmée par un expert.

Par acte extrajudiciaire du 5 août 2020, M. [B] a fait assigner la société [Z] & Co. Inc. devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris afin d'obtenir la désignation d'un expert avec mission de se prononcer sur la valeur de ce tableau. Par ordonnance de référé du 24 décembre 2020, le président du tribunal judiciaire de Paris s'est déclaré territorialement incompétent.

Courant 2023, le conseil de M. [B] a pris contact avec celui de M. [F] [Z] pour l'informer que son client, à défaut de recevoir la commission qui lui était due en contrepartie de la découverte du tableau de [G] [N], ferait citer M. [F] [Z] devant le tribunal correctionnel pour infraction aux règles relatives au contrôle des exportations des biens culturels et pour recel de détention d'un bien culturel soumis à la législation sur les trésors nationaux ayant franchi irrégulièrement les frontières nationales.

Par acte extrajudiciaire du 21 juillet 2023, M. [F] [Z] a fait délivrer une citation directe à M. [B] et à son avocat devant le tribunal correctionnel de Paris pour tentative de chantage. Un appel a été interjeté contre le jugement du tribunal correctionnel de Paris du 12 décembre 2024.

Par acte extrajudiciaire du 31 janvier 2024, M. [B] a fait assigner la société TransArt International devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris aux fins notamment de :

condamner la société TransArt International à lui communiquer sous astreinte l'intégralité des pièces et documents en sa possession concernant le tableau de [N] et notamment le certificat d'exportation, les bons de sortie et d'entrée du tableau sur le territoire français ;

condamner la société Transart International aux dépens ;

condamner la société Transart International et la société [Z] & Co. Inc. à lui payer respectivement les sommes de 5 000 euros et de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance contradictoire du 31 octobre 2024, le juge des référés a :

débouté M. [B] de l'intégralité de ses demandes ;

déclaré la société [Z] & Co. Inc. irrecevable en son intervention volontaire ;

débouté la société TransArt International de sa demande en paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 code de procédure civile formée à l'encontre de la société [Z] & Co. Inc. ;

condamné M. [B] aux dépens et à payer à la société TransArt International la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 8 novembre 2024, M. [B] a relevé appel de cette décision en ce qu'elle l'a débouté de l'intégralité de ses demandes, l'a condamné aux dépens et à payer à la société TransArt International la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 8 janvier 2025, M.[B] demande à la cour de :

infirmer l'ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire de Paris du31octobre 2024 en ce qu'elle a :

débouté M. [B] de l'intégralité de ses demandes ;

condamné M.[B] aux dépens et à payer à la société TransArt International la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

déclarer M. [B] recevable et bien fondé en ses demandes, fins et conclusions, avant toutes procédures au fond ;

condamner la société TransArt International à communiquer les pièces et documents en sa possession concernant le tableau représentant le roi d'Espagne [X] [U] de la main de [G] [N] et notamment :

le certificat d'exportation du tableau représentant le roi d'Espagne [X] [U] de la main de [G] [N] ;

les bons de sortie et d'entrée sur le territoire français du tableau représentant le roi d'Espagne [X] [U] de la main de [G] [N] ;

condamner la société TransArt International, à défaut de production et de communication des pièces et documents mentionnés, à une astreinte de 1 000 euros par jour de retard, dans un délai d'un mois à compter de la signification de l'ordonnance à intervenir ;

condamner la société TransArt International à verser la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner la société TransArt international aux dépens.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 7 mars 2025, la société TransArt International demande à la cour de :

confirmer l'ordonnance rendue par le tribunal judiciaire de Paris en ce qu'il a débouté M. [B] de l'intégralité de ses demandes ;

statuant à nouveau :

condamner M. [B] à payer à la société TransArt International la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner le même aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 7 mars 2025, la société [Z] & Co. Inc. demande à la cour de :

déclarer recevable l'appel provoqué de la société [Z] & Co. Inc. ;

infirmer l'ordonnance de référé du 31 octobre 2024 en ce qu'elle a débouté la société [Z] & Co. Inc de son intervention volontaire accessoire et en ce que le président du tribunal judiciaire de Paris ne s'est pas déclaré incompétent ;

et statuant à nouveau :

déclarer recevable l'intervention volontaire accessoire de la société [Z] & Co. Inc. au soutien des prétentions de la société TransArt International en sa qualité de cliente de la société TransArt international, d'une part, de potentielle défenderesse au fond, d'autre part ;

dire et juger que le président du tribunal judiciaire était incompétent matériellement au profit du président tribunal des activités économiques de Paris, l'action future de M. [B] ayant pour objet un litige entre commerçants et/ou concernant une société créée de fait commerciale ;

renvoyer les parties à mieux se pourvoir ;

à titre principal :

constater qu'une action civile ou pénale à l'encontre de M. [F] [Z] et/ou la société [Z] & Co. Inc. est manifestement vouée à l'échec, les faits étant prescrits quelle que soit l'action envisagée, les conditions d'une société créée de fait n'étant pas réunies et les documents demandés étant inutiles faute de démontrer un droit sur le tableau de [N], privant ainsi la demande de mesure d'instruction de M. [B] de motif légitime ;

confirmer l'ordonnance de référé du 31 octobre 2024 en ce qu'elle a débouté M. [B] de sa demande d'une mesure d'instruction in futurum ;

en tout état de cause :

condamner M. [B] à payer à [Z] & Co. Inc. la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner M. [B] aux entiers dépens.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 12 juin 2025.

Sur ce,

Sur la recevabilité de l'intervention volontaire de la société [Z] & Co. Inc

Selon l'article 325 du code de procédure civile, 'l'intervention n'est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant'.

L'article 328 du même code dispose que 'l'intervention volontaire est principale ou accessoire'.

Selon l'article 330, l'intervention est accessoire lorsqu'elle appuie les prétentions d'une partie. Elle est recevable si son auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie.

Au cas présent, la société [Z] & Co. Inc., poursuivant l'infirmation de l'ordonnance entreprise de ce chef, demande à la cour de recevoir son intervention volontaire accessoire au soutien des prétentions de la société TransArt International dont elle est cliente. Elle considère que la demande de communication de pièces formée par M. [B] porte sur des informations protégées par le secret des affaires. Elle ajoute que M. [B], ayant déjà agi à son encontre dans une précédente instance relative au tableau en cause et ne cessant de modifier son argumentation au soutien de sa demande de communication de pièces, est susceptible d'engager une action judiciaire contre elle.

M. [B] ne présente pas d'observations sur ce point.

La cour relève que la demande de M. [B] tend à obtenir de la société TransArt International la communication d'un certificat d'exportation du tableau représentant le roi d'Espagne [X] [U] de la main de [G] [N] ainsi que des bons de sortie et d'entrée sur le territoire français de ce tableau.

La société [Z] & Co. Inc a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir la société TransArt International. En effet, M. [B] l'a déjà assignée devant le juge des référés aux fins de voir ordonner une expertise ayant pour objet la détermination de la valeur du tableau litigieux. Cette action a donné lieu à une ordonnance d'incompétence territoriale prononcée le 24 décembre 2020 par le président du tribunal judiciaire de Paris.

La société [Z] & Co. Inc. est donc fondée à considérer que la présente action de M. [B] a pour objectif l'établissement de preuve à son encontre dans le cadre d'un procès futur.

L'intervention volontaire accessoire de la société [Z] & Co. Inc est donc recevable.

L'ordonnance sera infirmée de ce chef.

Sur l'exception d'incompétence matérielle

La société [Z] & Co. Inc. soulève l'incompétence du tribunal judiciaire au profit du tribunal des affaires économiques de Paris en soutenant que, à l'époque des faits invoqués par M. [B], ce dernier avait la qualité de commerçant de même que M. [F] [Z] et la société [Z] & Co. Inc.

Cependant, en sa qualité d'intervenante volontaire accessoire, la société [Z] & Co Inc n'est pas fondée à soulever l'incompétence matérielle de la juridiction de première instance au regard de critères qui lui sont propres.

Ajoutant à l'ordonnance entreprise, la cour rejettera l'exception d'incompétence soulevée par la société [Z] & Co. Inc.

A titre surabondant, la cour rappelle que, selon l'article 90 du code de procédure civile, lorsque le juge s'est déclaré compétent et a statué sur le fond du litige dans un même jugement rendu en premier ressort, celui-ci peut être frappé d'appel dans l'ensemble de ses dispositions. Lorsque la cour infirme du chef de la compétence, elle statue néanmoins sur le fond du litige si la cour est juridiction d'appel relativement à la juridiction qu'elle estime compétente.

Sur la demande fondée sur l'article 145 du code de procédure civile

Selon les dispositions de l'article 145 du code de procédure civile, 's'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution du litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête en référé'.

Il entre dans les pouvoirs du juge des référés d'ordonner, sur le fondement de ce texte, une communication de pièces, sous réserve pour le demandeur de justifier d'un motif légitime, à savoir, l'existence d'un procès potentiel entre les parties, possible et non manifestement voué à l'échec, dont la solution peut dépendre de la mesure d'instruction sollicitée.

Il peut être ordonné à des tiers de produire tous documents qu'ils détiennent, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige et si aucun empêchement légitime ne s'oppose à cette production par le tiers détenteur.

Au cas présent, M. [B] demande d'enjoindre à la société TransArt International de lui communiquer le certificat d'exportation du tableau représentant le roi d'Espagne [X] [U] de la main de [G] [N] outre les bons de sortie et d'entrée sur le territoire français du tableau représentant le roi d'Espagne [X] [U] de la main de [G] [N].

Il soutient qu'il a été le collaborateur de [I] [Z] pendant plus d'une dizaine d'années, qu'il avait pour mission d'enrichir la collection d'art de ce dernier et que cette relation de confiance prenait la forme de contrats verbaux.

Il explique que, en 1999, il a été contacté par Mme [M] qui était mandatée pour vendre 'une huile sur toile du XVIIe siècle mesurant 56,5 cm x 56 cm, représentant le portrait de [X] [E], portant en haut à droite la marque XX et en bas à droite le chiffre 20.' Il relate qu'il a invité [I] [Z] à acquérir ce tableau en vue de son authentification comme oeuvre du maître espagnol [G] [N]. Il soutient qu'un accord a été passé entre [I] [Z] et lui -même prévoyant qu'il percevrait une rémunération à hauteur de 25 % du prix de revente du tableau après authentification, ou, à défaut de cession, 25 % de sa valeur marchande évaluée conjointement, déduction faite du prix d'achat. Il explique que, courant 2000, [I] [Z] a acquis le tableau, après son authentification par un expert, M. [C] [A].

M. [B] affirme que, après le décès de [I] [Z], son fils M. [F] [Z] lui a adressé le 21 mars 2003 un courrier caractérisant l'existence d'une société créée de fait entre eux, démontrant une volonté d'agir comme associés et de partager les fruits de leur travail après authentification définitive du tableau. Il explique qu'une activité pour compte commun a été mise en oeuvre par les associés, en particulier s'agissant de la détermination de la stratégie à adopter pour l'authentification du tableau. Il s'attribue un apport en industrie consistant en l'accomplissement des démarches nécessaires destinées à ladite authentification du tableau qui s'est révélée fructueuse.

Il précise que sa demande vise à obtenir des pièces nécessaires portant sur la gestion et la répartition des actifs communs de la société créée de fait avec M. [Z] afin de clarifier les conditions de la disparition du tableau de [X] [E] peint par [G] [N] et engager un procès civil ou pénal.

Pour leur part, les sociétés TransArt International et [Z] & Co. Inc. concluent au rejet de la demande de M. [B] en l'absence de motif légitime au sens de l'article 145 du code de procédure civile.

Elles soulignent que M. [B] n'a cessé de modifier le motif légitimant sa demande.

La société [Z] & Co. Inc. conteste l'existence d'une société créée de fait. Elle ajoute que les faits invoqués par M. [B] sont prescrits par application de l'article L. 110-4 I du code de commerce, M. [B] invoquant pour la première fois l'existence d'une société créée de fait 22 ans après la rédaction du courrier du 21 mars 2003. Elle ajoute que les supposés associés ne sont pas correctement identifiés dès lors que le courrier précité est rédigé sur papier à entête de la société [Z] & Co. Inc dont M. [F] [Z] n'est que le mandataire. Elle souligne l'absence de démonstration de:

- l'existence d'apports,

- l'intention de collaborer sur un pied d'égalité à la réalisation d'un projet commun,

- l'intention de participer aux bénéfices ou aux économies ainsi qu'aux pertes pouvant en découler.

La cour relève, comme le premier juge, que l'argumentation juridique de M. [J] ne cesse de varier depuis la saisine du juge des référés.

Dans son assignation délivrée le 31 janvier 2024, il expliquait avoir été cité par M. [Z] devant le tribunal correctionnel de Paris pour y répondre de l'infraction de chantage, mais que l'affaire se révélait 'en réalité plus complexe et gravement préjudiciable. ' Il ajoutait qu'il était nécessaire de définir les transferts du tableau ayant pu intervenir entre la France, la Suisse et les Etats-Unis, en méconnaissance des dispositions du code du patrimoine, en vue de le dissimuler à l'administration fiscale et qu'à cette fin il avait, le 19 décembre 2023, vainement signifié une sommation de communiquer à la société TransArt International. Pour justifier son intérêt et sa qualité à agir, il indiquait que 'le litige futur est qu'une vente ait eu lieu, voire plusieurs autres ventes, de manière dissimulée à l'étranger et en violation de l'obligation de reverser une commission sur ladite vente. De plus, la découverte d'un fait nouveau à partir de la communication exigée à la compagnie TransArt International des documents de transports du tableau litigieux de Velasquez fait ouvrir de nouveaux délais d'action, notamment en matière civile en responsabilité personnelle à l'encontre de Monsieur [F] [Z].'

Le premier juge a relevé que, à l'audience, M. [B] avait modifié son argumentation juridique et fait valoir qu'il justifiait d'un motif légitime à obtenir la communication des pièces auprès de la société TransArt International en ce que :

- la preuve du déplacement illicite du tableau était de nature à concourir à la manifestation de la vérité dans le cadre des procédures pénale et civile l'opposant à M. [F] [Z];

- un procès au fond éventuel l'opposant à la société TransArt International était envisageable sur le fondement de la responsabilité extracontractuelle en ce que cette dernière se serait rendue selon toute vraisemblance auteur de l'acte matériel d'exportation de l'oeuvre en violation de la législation applicable et de ses droits sur ledit tableau ;

Le premier juge a rejeté la demande de communication de pièces formée par M. [J] en retenant notamment que celui-ci ne détenait aucun droit sur le tableau de sorte que l'utilité de la mesure d'instruction in futurum n'était pas établie.

A hauteur d'appel, M. [B] invoque, pour la première fois, l'existence d'une société créée de fait avec M. [F] [Z] dont l'actif comprendrait le tableau litigieux. Il soutient que la mesure d'instruction a pour objectif d'établir la preuve d'un manquement de son associé dans la gestion du tableau litigieux à son détriment.

Ces changements répétés de fondements à l'appui de la demande de mesure d'instruction tendent à remettre en cause l'existence de litige plausible, crédible, bien qu'éventuel et futur, dont le contenu et le fondement seraient cernés, approximativement au moins.

De surcroît, la cour rappelle que si le juge saisi sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile n'a pas à se prononcer sur le bien fondé ou même l'opportunité d'un procès éventuel, la demande de mesure d'instruction doit reposer sur des éléments sérieux.

Selon l'article 1873 du code civil, la société créée de fait est soumise aux dispositions applicables à la société en participation. Il incombe à celui qui se prétend l'associé d'une société créée de fait d'en prouver les différents éléments constitutifs, à savoir l'existence d'apports, l'intention commune de participer au résultat de l'entreprise et l'affectio societatis.

Or, M. [B] se borne à produire un courrier du 21 mars 2003 rédigé sur papier à entête de la société [Z] & Co., Inc. (pièce 5 de l'appelant) que M. [F] [Z] lui adresse et dont les termes sont les suivants : '... En ce qui concerne le tableau de [N], il semble quelque peu prématuré de le proposer maintenant. Il est en effet reconnu par [C] [A] mais [C] [A] seulement ne suffit pas ; il faut le reconnaître par [W] [R], par [K] [D], autant d'experts importants dont il faut l'approbation. Je sais que vous êtes impatient mais, mais dans votre intérêt comme dans le nôtre, il faut être patient.'

Ce courrier, ancien et isolé, dont les termes sont vagues, est insuffisant à rendre crédibles les allégations de M. [B].

Sont par ailleurs versés :

- un article du journal 'le Monde' du 22 septembre 2021 intitulé '[N] Incognito', qui relate pour l'essentiel la genèse du contentieux qui oppose la famille [Z] à M. [B] et la version de ce dernier ;

- la copie d'un protocole d'accord conclu entre [I] [Z] et Mme [M] le 24 novembre 1999 concernant l'achat par le premier d'un tableau ainsi décrit : 'toile de [N] représentant le portrait du Roi [X] [E]' ;

- un article en langue espagnole (non traduit en français) écrit par M. [C] [A] et intitulé 'Novedas Velazquenas';

- un courrier en langue anglaise (non traduit en français) adressé à Mme [M] par MM. [V] [T] et [S] le 7 juillet 2000.

Ces documents ne contiennent aucun fait précis et vérifiable en lien avec les affirmations de M. [B] concernant l'existence de la société créée de fait avec M. [F] [Z] et de ses droits sur le tableau attribué à [G] [N].

Il se déduit de l'ensemble de ces motifs que M. [B] ne justifie ni d'un motif légitime ni d'un intérêt personnel à l'obtention des documents détenus par la société TransArt International.

Sa demande sera rejetée.

L'ordonnance sera confirmée de ce chef.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Le sens de l'arrêt commande de confirmer l'ordonnance entreprise en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

Succombant en appel, M. [B] sera condamné aux dépens et à payer, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 3 000 euros à la société TransArt International et celle de 3 000 euros à la société [Z] Co. Inc.

PAR CES MOTIFS

Infirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle dit irrecevable l'intervention volontaire de la société [Z] Co. Inc. ;

La confirme pour le surplus des dispositions soumises à la cour ;

Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Rejette l'exception d'incompétence soulevée par la société [Z] Co. Inc. ;

Condamne M. [B] aux dépens d'appel ;

Condamne M. [B] à payer à la société TransArt International la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [B] à payer à la société [Z] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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