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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 3-4, 2 octobre 2025, n° 24/10776

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 24/10776

2 octobre 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-4

ARRÊT AU FOND

DU 2 OCTOBRE 2025

Rôle N° RG 24/10776 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BNTXV

[L] [E]

C/

[O] [G] épouse [M]

[H] [E]

[N] [M]

SCI OSTREA

Copie exécutoire délivrée

le : 2 Octobre 2025

à :

Me Agnès ERMENEUX

Me [N] DURAND

Me Nicolas SIROUNIAN

Me Olivier AVRAMO

Décision déférée à la Cour :

Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 14] en date du 04 Juillet 2023 enregistré au répertoire général sous le n° 19/03656.

APPELANTE

Madame [L] [E]

née le [Date naissance 4] 1972 à [Localité 13], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Agnès ERMENEUX de la SCP SCP ERMENEUX - CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Jean-baptiste BELLON, avocat au barreau de TOULON

INTIMES

Madame [O] [G] épouse [M]

es qualité d'héritière de Monsieur [X] [M] décédé le [Date décès 6] 2023

née le [Date naissance 2] 1954 à [Localité 11], demeurant [Adresse 8]

représentée par Me Isabelle DURAND, avocat au barreau de TOULON et ayant pour avocat plaidant Me Christine SAINT GERMAIN PENY de la SELARL SAINT GERMAIN PENY, avocat au barreau de BORDEAUX

Madame [H] [E]

née le [Date naissance 7] 1970 à [Localité 13], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Nicolas SIROUNIAN de la SELARL PROVANSAL D'JOURNO GUILLET & ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Madame [N] [M]

es qualité d'héritière de Monsieur [X] [M] décédé le [Date décès 6] 2023

née le [Date naissance 3] 1972 à [Localité 10], demeurant [Adresse 9]

représentée par Me Pascal ZECCHINI, avocat au barreau de TOULON et ayant pour avocat plaidant Me Maxence WATERLOT de la SELARL WATERLOT-BRUNIER, avocat au barreau de BORDEAUX

SCI OSTREA

, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Olivier AVRAMO, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Pierre-françois STUART, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 806 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Juin 2025 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président Rapporteur,

et Madame Laetitia VIGNON, conseiller- rapporteur,

chargés du rapport qui en ont rendu compte dans le délibéré de la cour composée de :

Madame Anne-Laurence CHALBOS, Présidente

Madame Laetitia VIGNON, Conseillère

Madame Gaëlle MARTIN, Conseillère

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Septembre 2025, puis avisées par message le 25 Septembre 2025, que la décision était prorogée au 2 Octobre 2025.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 2 Octobre 2025.

Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

La SCI Ostrea, a été constituée par acte sous seing privé en date du 19 mars 1993 et immatriculée au RCS de Toulon, entre M. [X] [M] et Mme [O] [G], chacun titulaire de dix parts sociales sur les vingt que comportait le capital social.

La SCI Ostrea a pour objet social l'acquisition et la gestion d'un immeuble à usage de restaurant, édifié sur une parcelle de terrain et de rochers en bord de mer, sis au lieudit ' [Adresse 12].

Mme [O] [G] a été désignée gérante statutaire pour une durée indéterminée.

Par acte sous seing privé du 12 avril 2005, M. [X] [M] a cédé à Mme [H] [E] ses dix parts sociales, et Mme [O] [G] a cédé à Mme [L] [E] ses dix parts sociales.

Par ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Toulon en date du 14 juin 2011, rendue sur assignation de Mme [L] [E] et Mme [H] [E], il a été donné acte à Mme [O] [G] et à la SCI Ostrea de ce qu'elles s'en rapportaient à justice quant à la désignation d'un administrateur provisoire, ordonné une expertise et désigné Mme [A] [S] en qualité d'expert, avec mission de convoquer l'assemblée générale ordinaire annuelle pour l'approbation des comptes de l'année 2009, de convoquer une assemblée générale extraordinaire en vue de la désignation d'un nouveau gérant et d'autoriser le dépôt au greffe des statuts modifiés relatifs à la cession des parts sociales.

Par ordonnance du président du tribunal de grande instance de Toulon en date du 15 février 2013, rendue sur assignation de [L] et [H] [E], il a été ordonné à Mme [O] [G], en qualité de gérante de la SCI Ostrea, de communiquer à Mme [A] [S], en qualité d'administrateur provisoire de la SCI Ostrea, les comptes de l'année 2009, la déclaration fiscale de 2009 ainsi que tout document utile, dans un délai de quinze jours à compter de la signification de la décision, sous astreinte de cent euros par jour de retard.

Par assemblée générale extraordinaire du 27 juin 2013, Mme [L] [E] et Mme [H] [E] ont été désignées co-gérantes de la SCI Ostrea, avec autorisation de déposer au greffe les statuts modifiés visant la cession des parts sociales du 12 avril 2005, conformément à l'ordonnance de référé du 14 juin 2011.

Mme [A] [S], en qualité d'administrateur provisoire de la SCI Ostrea, a déposé son rapport de mission auprès du président du tribunal de grande instance de Toulon.

Par acte d'huissier du 20 août 2019, M. [X] [M] et Mme [O] [G] ont assigné devant le tribunal de grande instance de Toulon Mme [L] [E], Mme [H] [E] et la SCI Ostrea, sollicitant, avant dire droit, la désignation d'un expert graphologue en vue de vérifier l'authenticité des signatures figurant sur l'acte de cession de parts sociales en date du 12 avril 2005 et sur les statuts modifiés datés du 11 avril 2005, puis, au fond, la nullité de la cession de parts prétendument consentie par M. [M] à Mme [H] [E] pour défaut de signature ou, à titre subsidiaire, pour vileté du prix, celle consentie par Mme [G] à Mme [L] [E] pour vileté du prix ou, subsidiairement, pour dol, ainsi que la nullité des statuts modifiés déposés au RCS le 20 novembre 2012 au profit du maintien des statuts initiaux du 19 mars 1993, la condamnation solidaire de Mmes [E] à restituer à la SCI Ostrea les sommes perçues au titre du loyer depuis le 1er septembre 2014, à verser aux demandeurs la somme de 40'000 euros à titre de dommages-intérêts et 5'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la désignation d'un administrateur provisoire chargé de convoquer une assemblée générale pour rétablir les demandeurs dans leurs fonctions de gérants, sous astreinte de 500 euros par jour de retard en cas de non-remise de l'ensemble des pièces sociales, comptables et administratives par les défenderesses, ainsi que la désignation d'un second expert graphologue, hors ressort du Var, aux fins d'analyse comparative des signatures et d'authentification des documents litigieux.

M. [X] [M] et Mme [O] [G] ont saisi le juge de la mise en état d'une demande tendant à ce qu'il soit ordonné à Mmes [H] et [L] [E] de leur communiquer l'original de l'acte de cession de parts signé entre les parties le 12 avril 2005 et à la désignation d'un expert graphologue avec mission d'analyser la signature apposée sous le nom de [X] [M] sur l'acte de cession et celle portée sur les statuts datés du 11 avril 2005 et mis à jour le 20 novembre 2012 et dire si ces signatures et paraphes sont ceux de [X] [M] et [O] [G].

Mme [L] [E] a sollicité du juge de la mise en état qu'il constate la prescription de l'action de Mme [G] et de M. [M] et déclare irrecevables et, en tout état de cause, infondées, toutes les demandes présentées par Mme [O] [G] et M. [X] [M].

Mme [H] [E] a également conclu à l'irrecevabilité des demandes des consorts [M] et subsidiairement, à ce que la mission de l'expert soit complétée.

La SCI Ostrea a conclu à l'irrecevabilité des demandes de Mme [O] [G] et de M. [X] [M].

M. [X] [M] est décédé le [Date décès 5] 2023, postérieurement à la clôture des débats devant le juge de la mise en état.

Par une ordonnance du 4 juillet 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Toulon a :

- Rejeté la fin de non-recevoir portant sur la prescription de l'action de [X] [M] et de [H] [G] ;

Vu l'article 145 du code de procédure civile,

- Ordonné une expertise judiciaire confiée à Mme [V] [I] avec mission, après s'être fait remettre tous documents utiles à la solution du litige, notamment l'acte de cession du 11 avril 2005 litigieux, les statuts de la société SCI Ostrea datés du 11 avril 2005 mis à jour le 20 novembre 2012, et le procès-verbal d'assemblée extraordinaire du 20 novembre 2012 portant sur le transfert de siège de la société SCI Ostrea à Biscarrosse, les documents d'identité ou tous documents portant l'écriture et la signature de la main de [X] [M] et de [H] [G], à différentes périodes de leur vie et plus spécifiquement aux dates les plus proches possibles de la date des actes litigieux, de :

- lister les pièces en précisant leur date et la partie les ayant remises ;

- examiner les pièces précitées et en comparer l'écriture, la signature et les paraphes avec celles des pièces communiquées et dont l'authenticité n'est contestée par aucune des parties ; en indiquer les points de ressemblance et de dissemblance ;

- indiquer la probabilité qu'ils aient été établis par une seule et même personne ;

- indiquer la probabilité que les documents en cause aient été établis à la date y figurant;

- comparer notamment les caractères typographiques des statuts du 11 avril 2005 et ceux du 20 novembre 2012, et déterminer s'ils ont une origine commune ;

- donner tous éléments d'information permettant à la juridiction du fond qui sera éventuellement saisie de déterminer raisonnablement si les documents litigieux en cause ont pu, ou non, être signés et paraphés de la main de [X] [M] et de [H] [G] aux dates desdits actes; plus généralement, faire toutes observations utiles à la solution du litige ;

- Ordonné à [L] [E] et [H] [E] de remettre à [X] [M] et [O] [G], dans un délai d'un mois à compter de la signification de la présente ordonnance, l'original de l'acte de cession de parts sociales de la SCI Ostrea du 12 avril 2005 par lequel [X] [M] et [H] [G] ont cédé la totalité de leurs parts sociales à [L] [E] et [H] [E], sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard pendant 5 mois,

- Rejeté les autres demandes,

- Renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état électronique du mardi 6 février 2024 à 9h00,

- Dit que les dépens suivront le sort de la procédure au fond.

Le juge de la mise en état a retenu à cet effet :

- que l'article 789 du code de procédure dans sa rédaction issue du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 ne donne compétence au juge de la mise en état pour statuer sur les fins de non-recevoir que dans les instances introduites à compter du 1er janvier 2020, de sorte que la fin de non-recevoir soulevée dans l'instance introduite antérieurement à cette date doit être rejetée,

- qu'en application de l'article 788 du code de procédure civile, le juge de la mise en état exerce, jusqu'à son dessaisissement, tous les pouvoirs nécessaires à la communication, l'obtention et la production des pièces par les parties pour garantir le déroulement loyal de la procédure ; que les consorts [M], qui prétendent que l'acte de cession du 12 avril 2005 est un faux et qui produisent un avis technique d'écriture et une note expertale à l'appui de leur allégation, ont un intérêt légitime à sa communication ; que Mme [H] [E], co-gérante, qui ne conteste pas avoir procédé à l'enregistrement de cet acte de cession en 2014 doit être en mesure d'en produire un original,

- qu'au vu des éléments versés aux débats, et notamment des avis techniques déjà produits et des différents documents portant sur la gestion de la société, la désignation d'un expert en écriture présente un intérêt probatoire pour la résolution du litige.

Par déclaration du 26 juillet 2023, Mme [L] [E] a interjeté appel de cette décision.

L'ordonnance dont appel a fait l'objet d'une rectification d'erreur matérielle par décision du 19 octobre 2023, substituant le nom '[O] [G]' au nom '[H] [G]' dans le dispositif de la décision rectifiée.

Par une ordonnance d'incident du 22 mai 2024, le conseiller de la mise en état près de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a prononcé la radiation de l'instance pour défaut de mise en cause des héritiers de M. [M].

L'affaire a été réinscrite le 30 août 2024 sur production par Mme [O] [G] veuve [M] d'un acte de notoriété après décès.

Par conclusions déposées et notifiées le 6 juin 2025, Mme [L] [E] demande à la cour, vu les articles 138, 146, 789 du code de procédure civile, 1837, 2224 du code civil, R.123-54, R.123-105 et R.221-9 du code de commerce de :

- Réformer l'ordonnance d'incident du 4 juillet 2023 en ce qu'elle a ordonné une expertise judiciaire;

- Débouter les consorts [K] de toutes leurs fins, demandes, moyens et conclusions au titre de cette expertise, ainsi que de leurs écritures d'intimés.

Subsidiairement, et pour le cas où la décision de première instance ne serait pas intégralement réformée :

- Juger que l'expertise ne concernera que la signature figurant sous le nom de M. [X] [M] dans l'acte de cession, ainsi que les paraphes attribués à celui-ci, et que l'expert aura également pour mission de rechercher s'il est possible de déterminer si Mme [G] est l'auteure de la signature et des paraphes attribués dans l'acte de cession à M. [M].

À titre infiniment subsidiaire, et toujours dans le cas où la décision de première instance ne serait pas intégralement réformée :

- Donner acte à Mme [L] [E] de ce qu'elle s'en rapporte à justice sur les mérites de la demande de complément d'expertise formulée à titre subsidiaire dans ses écritures d'intimée par Mme [H] [E], dès lors que cette demande n'est pas de nature à remettre en cause les droits que la concluante détient de l'acte de cession en date du 12 avril 2005 ;

- Condamner tout succombant à la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions déposées et notifiées le 16 mai 2025, Mme [H] [E] demande à la cour, vu les articles 138, 146, 789 du code de procédure civile, 1837, 2224 du code civil, R.123-54, R.123-105 et R.221-9 du code de commerce de :

- Infirmer l'ordonnance rendue le 4 juillet 2023 par Mme le juge de la mise en état de la 1ère chambre du tribunal judiciaire de Toulon (RG n°19/03656), rectifiée par jugement du 19 octobre 2023 (RG n°23/06215), sauf en ce que le premier juge a débouté les époux [M] de leur demande tendant à voir déclarer recevables leurs prétentions.

Et statuant à nouveau des chefs infirmés,

- Débouter Mme [O] [G] ainsi que les héritiers de M. [X] [M] de l'ensemble de leurs demandes.

À titre subsidiaire :

- Ordonner le complément de la mission confiée à l'expert judiciaire graphologue sur les chefs suivants :

- examiner les signatures apposées sous les noms de Mme [O] [G] et [X] [M] dans le procès-verbal d'assemblée générale de la société Ostrea du 20 novembre 2012, ainsi que sur les statuts modifiés le 11 avril 2005, mis à jour le 20 novembre 2012 et publiés le 1er mars 2013 au registre du commerce et des sociétés de Mont-de-Marsan, et se prononcer sur leur authenticité ;

- comparer les caractères typographiques des statuts du 11 avril 2005 d'une part, et ceux du 20 novembre 2012 d'autre part, et déterminer s'ils ont une origine commune ;

- examiner les signatures apposées sous les noms de Mme [O] [G] et [X] [M] dans les 4 exemplaires de l'acte de cession du 12 avril 2005 et se prononcer sur leur authenticité;

- comparer ces signatures, notamment avec la signature des contrats de travail de M. [M] du mois d'avril 2015 ;

- dire si les mentions manuscrites figurant sur le contrat de travail du 1er avril 2005 de M. [X] [M], sur le certificat de travail du 30 avril 2005 de M. [X] [M], sur le certificat de travail du 30 avril 2005 de Mme [O] [G], et sur le contrat de travail du 1er avril 2005 de Mme [O] [G], peuvent être attribuées à Mme [O] [G] ;

- dire si les mentions manuscrites figurant au bas de l'avis d'imposition du 3 juin 2010 peuvent être attribuées à Mme [O] [G] pour l'une, et à M. [X] [M] pour l'autre.

En toute hypothèse :

- Condamner in solidum les consorts [M] à verser à Mme [H] [E] la somme de 5 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamner in solidum les consorts [M] aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Me Nicolas Sirounian, avocat au barreau d'Aix-en-Provence, sous son affirmation de droit.

Par conclusions déposées et notifiées le 11 octobre 2024, la SCI Ostrea demande à la cour, vu les articles 30, 31, 32, 32-1, 53 et suivants, 146 du code de procédure civile, 2224, 1108 et suivants du code civil de :

À titre principal :

- Déclarer recevable et fondé l'appel interjeté par Mme [L] [E].

En faisant droit,

- Infirmer l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état en date du 4 juillet 2024, statuant à nouveau,

- Déclarer Mme [O] [G] et M. [X] [M] irrecevables et mal fondés en toutes leurs demandes, et les en débouter ;

En tout état de cause :

- Condamner tout succombant à payer à la SCI Ostrea la somme de 2 400 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de Maître Olivier Avramo, avocat.

Par conclusions déposées et notifiées le 4 juin 2025, Mme [O] [M] demande à la cour, vu les articles 788, 138, 132 et suivants, 11, 789, 771 ancien, 287 à 295 du code de procédure civile, de :

- Déclarer et juger recevables les demandes présentées par [O] [G], tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritière de [X] [M], et y faire droit ;

- Confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance d'incident rendue par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Toulon le 4 juillet 2023,

Et y ajoutant :

- Débouter Mmes [Y] [E], [H] [E] et la SCI Ostrea de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

- Juger qu'il y a lieu de modifier dans le dispositif [O] [G] aux lieu et place de [H] [G] ;

- Condamner Mme [Y] [E], [H] [E] et la SCI Ostrea à payer à Mme [O] [G], veuve [M], la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

Par conclusions déposées et notifiées le 3 juin 2025, Mme [N] [M] demande à la cour, vu les articles 145 et suivants du code de procédure civile de :

- Juger Mme [N] [M] bien fondée et recevable en ses entières demandes, fins et prétentions;

En faisant droit :

- Confirmer l'ordonnance entreprise ;

- Condamner Mme [L] [E], Mme [H] [E] et la SCI Ostrea, ensemble, aux entiers dépens et au versement de la somme de 5 000 euros au profit de Mme [N] [M] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'instruction du dossier a été clôturée le 10 juin 2025 avant l'ouverture des débats.

MOTIFS

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action :

L'article 789, 6° du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019, donne compétence au juge de la mise en état pour statuer sur les fins de non-recevoir.

Selon l'article 55 du décret cette disposition n'est applicable qu'aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020.

La présente instance ayant été introduite le 20 août 2019, le 6° de l'article 789 n'est pas applicable et le juge de la mise en état n'est pas compétent pour statuer sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action.

L'ordonnance sera confirmée sur ce point.

Sur la demande de transmission de pièces et d'expertise :

Aux termes de l'article 788 du code de procédure civile, le juge de la mise en état exerce tous les pouvoirs nécessaires à la communication, l'obtention et la production des pièces.

Selon l'article 11 du même code, les parties sont tenues d'apporter leur concours aux mesures d'instruction et si une partie détient un élément de preuve, le juge peut, à la requête de l'autre partie, lui enjoindre de le produire, au besoin à peine d'astreinte.

C'est par une interprétation a contrario erronée de l'article 138 du code de procédure civile que Mme [H] [E] affirme que la demande de communication d'un contrat ne pourrait être formée contre une partie que par un tiers à ce contrat.

L'article 789, 5° donne par ailleurs compétence au juge de la mise en état pour ordonner, même d'office, toute mesure d'instruction.

Devant le juge de la mise en état, aux termes de leurs conclusions d'incident n°4, M. [X] [M] et Mme [O] [G] prétendaient avoir découvert l'existence de la cession de parts litigieuse en 2019, contestaient en être les signataires, se disant victime d'une fraude.

Mme [O] [G] conserve devant la cour la même position, précisant que la signature portée sous son nom sur l'acte de cession semble ressembler à la sienne, sur la copie obtenue auprès du greffe du tribunal de commerce et sous réserve de l'examen de l'original, mais que cette signature a pu être extraite de documents signés pour la gestion administrative de la société apposée par un montage frauduleux.

Mmes [G] et [M] produisent une copie de l'acte de cession délivrée par le greffe.

Mme [H] [E] produit pour sa part 4 copies différentes, dont l'une identique à celle produite par la partie adverse, étant précisé que l'acte mentionne l'établissement de 5 originaux.

Au regard de l'objet du litige, Mmes [G] et [M], qui poursuivent l'annulation de la cession en invoquant une fraude et versent notamment aux débats une note expertale privée établie le 5 novembre 2021 par Mme [B], expert en écriture près de la cour d'appel de Bordeaux, concluant à une imitation de la signature de M. [M], justifient d'un intérêt légitime à se faire remettre par Mmes [E], apparaissant sur l'acte litigieux comme cessionnaires, et co-gérantes de la SCI Ostrea, l'exemplaire original en leur possession, afin de procéder ou faire procéder à toutes vérifications.

La décision du juge de la mise en état sera confirmée en ce qu'elle a ordonné la communication de l'original de l'acte de cession du 12 avril 2005 par Mme [L] [E] et Mme [H] [E].

Les consorts [M] justifient également d'un intérêt légitime à l'institution d'une expertise en écriture portant sur les actes dont les signatures et paraphes sont déniés, dont le premier juge a justement caractérisé l'intérêt probatoire pour la résolution du litige.

Les fins de non-recevoir et contestations au fond opposées par les autres parties, dont l'appréciation excède les pouvoirs du juge de la mise en état, ne sauraient remettre en cause l'utilité de la mesure d'expertise, qui peut au contraire apporter des éléments de fait utiles à la détermination du point de départ de la prescription opposée.

S'agissant de la mission à confier à l'expert, c'est à tort que l'appelante reproche au juge de la mise en état d'avoir statué ultra petita en demandant à l'expert d'examiner les signatures et paraphes de Mme [G], la détermination de la mission de l'expert relevant du pouvoir discrétionnaire du juge qui n'est pas lié par la mission proposée par le demandeur à l'expertise.

En tout état de cause, le dispositif des conclusions d'incident des consorts [M] faisait bien référence à la signature de Mme [G].

La demande subsidiaire formée par Mme [L] [E], aux fins d'entendre juger que l'expert aura également pour mission de rechercher s'il est possible de déterminer si Mme [G] est l'auteure de la signature et des paraphes attribués dans l'acte de cession à M. [M], est recevable bien que présentée pour la première fois en cause d'appel, s'agissant d'une demande reconventionnelle se rattachant directement à la demande d'expertise formée par les consorts [M].

Telle que déterminée par le premier juge, la mission qui comporte notamment celle de donner tous éléments d'information permettant à la juridiction du fond de déterminer raisonnablement si les documents litigieux en cause ont pu, ou non, être signés et paraphés de la main de [X] [M] et de [H] [G] et d'indiquer la probabilité qu'ils aient été établis par une seule et même personne, conduit déjà l'expert à se prononcer sur l'hypothèse évoquée par Mme [L] [E], sans qu'il soit nécessaire de compléter sa mission.

Les compléments de mission sollicités subsidiairement par Mme [H] [E] ont déjà été pris en compte dans la mission telle que rédigée par le premier juge, en ce qui concerne les statuts de la SCI et le procès-verbal d'assemblée générale du 20 novembre 2012.

S'agissant des documents de comparaison, la formulation de la mission autorise l'expert à se faire remettre 'tous documents portant l'écriture et la signature de la main de [X] [M] et de [O] [G]', ce qui rend inutiles les précisions sollicitées par Mme [H] [E] concernant le contrat de travail de M. [M] en date du 1er avril 2005 qui comporte la signature de M. [M] et l'avis d'imposition comportant la signature des deux époux au 3 juin 2010.

Il apparaît cependant pertinent de demander à l'expert de faire porter ses analyses, concernant l'acte de cession du 12 avril 2005, tant sur l'original ou les originaux qui seront produits par les consorts [E] que sur les différentes copies produites par Mme [H] [E], étant rappelé que l'acte mentionne l'établissement de 5 originaux.

Parties succombantes au principal, Mme [L] [E], Mme [H] [E] et la SCI Ostrea seront condamnées in solidum aux entiers dépens et au versement de la somme de 2000 euros au profit de Mme [N] [M] et de celle de 2000 euros au profit de Mme [O] [G], en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance du 4 juillet 2023, rectifiée par décision du 19 octobre 2023,

Y ajoutant,

Dit que l'expert désigné fera porter ses travaux, concernant l'acte de cession du 12 avril 2005,tant sur l'original ou les originaux qui seront produits par les consorts [E] que sur les différentes copies produites par Mme [H] [E],

Condamne Mme [L] [E], Mme [H] [E] et la SCI Ostrea in solidum à payer la somme de 2000 euros à Mme [N] [M] et celle de 2000 euros à Mme [O] [G], en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [L] [E], Mme [H] [E] et la SCI Ostrea in solidum aux dépens d'appel.

Le Greffier, La Présidente,

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