CA Paris, Pôle 6 - ch. 2, 2 octobre 2025, n° 25/03139
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 2
ARRÊT DU 02 OCTOBRE 2025
(n° , 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/03139 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CLHJC
Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Janvier 2025 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRÉTEIL - RG n° 23/01001
APPELANT :
Monsieur [J] [C]
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représenté par Me Eric ALLERIT, avocat postulant, inscrit au barreau de PARIS, toque : P0241 et par Me Michel MINÉ, avocat plaidant, inscrit au barreau de PARIS,
INTIMÉS :
Monsieur [I] [F], ès qualités de liquidateur amiable de l'Association des Organisations Syndicales de la Bourse du travail de [Localité 7] (ASO-BT),
domicilié [Adresse 3]
[Localité 4]
Monsieur [T] [E], ès qualités de liquidateur amiable de l'Association des Organisations Syndicales de la Bourse du Travail de [Localité 7] (ASO-BT)
domicilié [Adresse 3]
[Localité 4]
Madame [D] [Y], ès qualités de liquidateur amiable de l'Association des Organisations Syndicales de la Bourse du Travail de [Localité 7] (ASO-BT)
domiciliée [Adresse 3]
[Localité 4]
Association DES ORGANISATIONS SYNDICALES DE LA BOURSE DU TRAVAIL DE [Localité 7] (ASO-BT), prise en la personne de tous représentants légaux domiciliés
en cette qualité audit siège,
[Adresse 3]
[Localité 4]
Etablissement Public BOURSE DU TRAVAIL DE [Localité 7] - COMMISSION ADMINISTRATIVE, prise en la personne de tous représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
[Adresse 2]
[Localité 4]
Tous représentés par Me Christophe PACHALIS, avocat postulant, inscrit au barreau de PARIS, toque : K148 et par Me Stéphane KADRI, avocat plaidant, inscrit au barreau de PARIS, toque : B0316
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Septembre 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Eric LEGRIS, président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Eric LEGRIS, président
Christine LAGARDE, conseillère
Didier MALINOSKY, magistrat honoraire
Greffière lors des débats : Madame Sophie CAPITAINE
ARRÊT :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
- signé par Eric LEGRIS, président et par Sophie CAPITAINE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE :
Monsieur [C] et la Commission administrative de la Bourse du travail de [Localité 7] ont conclu un contrat à durée indéterminé le 1er juillet 2008.
L'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de [Localité 7] (ci-après 'ASO-BT') est une association soumise à la loi de 1901.
A l'occasion de l'assemblée générale fondatrice et constitutive de l'ASO-BT le 18 avril 2019,
Monsieur [C] a été élu d'une part, membre du conseil d'administration et au surplus, membre du bureau du conseil d'administration. Monsieur [C] exerçait également un mandat d'élu pour le compte de l'organisation syndicale CFE-CGC aux fonctions de secrétaire général adjoint de la Bourse du Travail de [Localité 7] depuis le 15 janvier 2010.
Par délibération de la Commission administrative de la Bourse du Travail du 04 avril 2019, et selon une décision du 03 juin 2019, les contrats de travail des salariés ont été transférés sur le fondement de l'article L.1224-3-1 du code du travail à l'association ASO-BT, à compter du 1er janvier 2020.
Par lettre manuscrite du 13 décembre 2019, Monsieur [C] a accepté le transfert de son contrat de travail.
Par un jugement définitif, en date du 12 octobre 2021, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 03 juin 2019 de la Commission administrative de la Bourse du travail de Paris par laquelle elle avait décidé du transfert à l'association « ASO-BT » des contrats de travail de tous les salariés de la Bourse du travail.
Le 22 juin 2022, en présence des organisations syndicales, des personnels de la Bourse du travail de [Localité 7] et des représentants de la Ville de [Localité 7], il a été exposé les conditions et les modalités de mise en place de l'établissement public administratif « Bourse du travail de [Localité 7] » :
- les conditions de mise en 'uvre d'avenants aux contrats de travail reconnaissant aux personnels de la Bourse du travail de [Localité 7] le statut d'agents contractuels de droit public,
- les conditions d'application du droit public en ce qui concerne les personnels et notamment l'impossibilité juridique de proposer un contrat de droit public aux personnes atteintes par la limite d'âge, en l'occurrence 67 ans, conformément à l'article 556-11 du code de la fonction publique.
Le 03 octobre 2022, Monsieur [C], concerné par cette limite d'âge, a sollicité une rupture conventionnelle auprès de l'ASO-BT.
Le 14 novembre 2022, M. [J] [C] est convoqué à une nouvelle réunion préalable sur les conditions d'une éventuelle rupture conventionnelle fixé au 24 novembre 2022.
Par lettre du 1er décembre 2022, l'Établissement Bourse du travail de [Localité 7] indique à Monsieur [C] que la Bourse du travail doit « procéder à son licenciement selon les règles du droit privé».
L'établissement public administratif Bourse du travail de [Localité 7] a été officiellement mis en place le 1er janvier 2023.
Le 10 juillet 2023, Monsieur [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Créteil, aux fins de juger la nullité du licenciement, d'obtenir la condamnation de l'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de [Localité 7] (ASO-BT) et l'Etablissement public de la Bourse du travail de [Localité 7] à une indemnité pour licenciement illicite, et à des dommages et intérêts pour violation du statut protecteur couvrant la rémunération non-perçue pendant la période de protection (décembre 2022 à juin 2026), ainsi qu'une indemnité au titre de l'article 700.
L'ASO-BT a été dissoute le 15 janvier 2024.
Le 10 janvier 2025, le conseil de prud'hommes de Créteil a rendu le jugement contradictoire suivant :
'DECLARE le Conseil de prud'hommes de Créteil incompétent pour statuer sur le litige opposant Monsieur [J] [C] à l'Etablissement public de la Bourse du travail de Paris - Commission administrative.
ORDONNE le renvoi de l'affaire devant le Tribunal Administratif de Paris.
DIT que, à1'expiration du délai d'appel de 15 jours prévu à l'article 84 du code de procédure civile, sauf justification par l'une des parties d'un appel régularisé auprès du premier président de la cour d`appel de Paris sur la question de compétence, les parties seront convoquées à la diligence du greffe du Tribunal Administratif de Paris.
RESERVE l'ensemble des demandes.
MET les dépens à la charge de Monsieur [J] [C].'
Monsieur [C] a interjeté appel de ce jugement le 18 avril 2025.
Il a été autorisé à assigner les intimés à jour fixe selon une ordonnance du 20 mai 2025.
L'assignation a été déposée le 28 juin 2025.
PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par dernières conclusions transmises par RPVA le 26 août 2025, Monsieur [C] demande à la cour de :
'DÉCLARER recevable et bien fondée Monsieur [J] [C] en ses demandes, fins et conclusions ;
Sur la compétence,
INFIRMER le jugement prud'homal en ce qu'il :
DECLARE le Conseil de prud'hommes de Créteil incompétent pour statuer sur le litige opposant Monsieur [J] [C] à l'Établissement public de al Bourse du travail de Paris - Commission administrative.
ORDONNE le renvoi de l'affaire devant le Tribunal Administratif de Paris.
RESERVE l'ensemble des demandes.
MET les dépens à la charge de Monsieur [J] [C].
JUGER le Conseil de prud'hommes compétent pour statuer sur les demandes de Monsieur [J] [C] à l'encontre de son employeur, l'ASO-BT ;
Sur le fond,
CONDAMNER l'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de [Localité 7] (ASO-BT) pour licenciement nul de Monsieur [J] [C] ;
FIXER la créance de Monsieur [J] [C] au passif de l'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de [Localité 7] (ASO-BT) comme reposant sur les sommes suivantes :
- à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul (douze mois)'''''10.351,08 €
- à titre de dommages et intérêts pour violation du statut protecteur couvrant la rémunération non perçue pendant la période de protection - décembre 2022 à juin 2026 (42 mois)''''''''''''''''''''''''36.228,78 €
- à titre d'indemnités de congés payés''''''''''''''''''3.622,87 €
- à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral (six mois)'''''''5.175,54 €
- Indemnité de préavis'''''''''''''''''''''''' 1 725,18 €
- Indemnité de congés payés afférents''''''''''''''''''. 1 72,51 €
- une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile''''''3.000,00 €
- les dépens ;
- les intérêts de droit à compter du dépôt de la demande, lesquels porteront eux-mêmes intérêts;
Condamner l'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de [Localité 7] (ASO-BT) à remettre à Monsieur [J] [C] un certificat de travail conforme aux prescriptions légales indiquant sa qualification exacte (Conseiller en Droit du Travail), sous astreinte de 50,00 euros par jour de retard, à compter de la notification de la décision ;
Subsidiairement condamner l'EPA Bourse du travail de [Localité 7] à payer à Monsieur [J] [C] les sommes suivantes :
- à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul (douze mois)'''''10.351,08 €
- à titre de dommages et intérêts pour violation du statut protecteur couvrant la rémunération non perçue pendant la période de protection - décembre 2022 à juin 2026 (42 mois)''''''''''''''''''''''''36.228,78 €
- à titre d'indemnités de congés payés''''''''''''''''''3.622,87 €
- à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral (six mois)'''''''5.175,54 €
- Indemnité de préavis'''''''''''''''''''''''' 1 725,18 €
- Indemnité de congés payés afférents''''''''''''''''''. 1 72,51 €
- une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile''''''3.000,00 €
- les dépens ;
- les intérêts de droit à compter du dépôt de la demande, lesquels porteront eux-mêmes intérêts;
Subsidiairement condamner l'EPA Bourse du travail de [Localité 7] à remettre à Monsieur [J] [C] un certificat de travail conforme aux prescriptions légales indiquant sa qualification exacte (Conseiller en Droit du Travail), sous astreinte de 50,00 euros par jour de retard, à compter de la notification de la décision ;
EN TOUT ETAT DE CAUSE
Dire que les sommes ci-dessus porteront intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de Paris (ASO-BT) de la convocation devant la Cour de céans,à compter de la date de la saisine du conseil de prud'hommes,
DÉCLARER la décision à intervenir opposable aux AGS,
Porter au passif de l'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de [Localité 7]
(ASO-BT) la somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de
procédure civile,
Subsidiairement condamner l'EPA Bourse du travail de [Localité 7] à la somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Porter au passif de l'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de [Localité 7]
(ASO-BT) les entiers dépens,
Subsidiairement condamner l'EPA Bourse du travail de [Localité 7] aux entiers dépens.'
Par dernières conclusions transmises par RPVA le 21 juillet 2025, les intimés (M. [T] [E], M. [I] [F], Madame [D] [Y], es qualité de liquidateurs amiables de l'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de [Localité 7] (ASO-BT) et l'établissement public administratif Bourse du travail de [Localité 7] (Commission Administrative), demandent à la cour de :
'Vu la décision du Conseil d'Etat du 7 mars 2018,
Vu la décision (définitive) du Tribunal administratif de Paris du 12 octobre 2021,
Vu les articles L 1411-1 et L 1411-2 du Code du travail,
Dire et juger les juridictions prud'homales incompétentes pour connaître des demandes de M. [J] [C].
En conséquence,
Confirmer en toutes ses dispositions la décision du Conseil des prud'hommes de [Localité 6] du 10 janvier 2025.
Dire et juger mal fondé l'appel sur compétence de M. [J] [C] et le débouter de toutes
ses demandes.
Le renvoyer devant le Tribunal administratif de Paris.
Si par extraordinaire la Cour de céans devait infirmer le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Créteil du 10 janvier 2025 et retenir la compétence de ce dernier pour connaître des demandes de M. [J] [C],
Juger qu'il n'est pas de bonne justice de voir la Cour de céans évoquer les demandes
indemnitaires de Monsieur [J] [C] en violation du principe du double degré de juridiction,
En tout état de cause,
Débouter Monsieur [J] [C] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Le condamner à payer aux intimés une indemnité de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Le condamner aux entiers dépens de la présente procédure, dont distraction dans les
conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.'
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Monsieur [C] fait valoir, sur la compétence du conseil de prud'hommes, que :
- Le contrat de travail du 1er janvier 2020, issu de la procédure de transfert, a été conclu entre une personne physique et une personne morale de droit privé, l'ASO-BT, selon les règles du code du travail. Il reste donc salarié de droit privé.
- La décision du tribunal administratif du 12 octobre 2021 est distincte du contrat de travail. Le tribunal s'est prononcé sur l'incompétence de la commission administrative de la Bourse du travail de Paris pour décider du transfert de ses activités. Cette décision ne rendait donc pas l'emploi illégal.
- L'application des règles de transfert de l'article L.1224-3 du code du travail démontre clairement que l'association ASO-BT et l'EPA Bourse du travail reconnaissent l'existence de contrats de travail de droit privé entre le 1er janvier 2020 et le 31 décembre 2022. La procédure de transfert du privé vers le public, à la date du 1er janvier 2023, a avalisé l'existence des contrats de travail de droit privé jusqu'à cette date.
- Contrairement à ce qu'affirme le jugement de première instance, Monsieur [C] n'était donc pas 'agent contractuel de droit public'.
- L'ASO-BT est restée l'employeur de Monsieur [C], dès lors qu'elle a exécuté le contrat selon les règles du code du travail du 1er janvier au 03 février 2020, et qu'elle envisageait une rupture conventionnelle selon les mêmes règles, même si c'est la Commission administrative de la Bouse du travail qui est intervenue pour son licenciement.
Monsieur [C] fait ensuite valoir, sur le fond de l'affaire, qu'il demande à la cour d'évoquer pour une bonne administration de la justice, que :
- L'ASO-BT n'a pas respecté les modalités de licenciement applicables : défaut d'entretien préalable à un licenciement, défaut de demande d'autorisation de licenciement à l'Inspecteur du travail, alors qu'il était conseiller prud'hommes depuis le 03 décembre 2008 de manière ininterrompue, et défaut d'effort de reclassement.
- Le signataire de la lettre de licenciement est le Secrétaire général de la Commission administrative représentant de la Bourse du travail de [Localité 7], agissant comme employeur de Monsieur [C], alors qu'il était employé par l'ASO-BT.
- Son contrat n'a jamais été transféré à compter du 1er janvier 2023. Le versement de son salaire, à son insu, par la Commission administrative de la Bourse du travail de [Localité 7] résulte d'un manquement de l'employeur.
Les liquidateurs amiables de l'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de Paris (ASO-BT) et l'EPA Bourse du travail de Paris opposent, pour contester la compétence du conseil de prud'hommes, que :
- la rupture des relations entre M. [J] [C] et la Bourse du travail est intervenue par lettre notifiée à M. [J] [C] le 1er décembre 2022, lettre de rupture établie et signée par le secrétaire général de la Commission Administrative de la Bourse du travail de [Localité 7], établissement public administratif. Or, par nature et par définition, toute décision émanant d'un établissement public administratif ne peut être contestée que devant la juridiction administrative, en l'occurrence le tribunal administratif de Paris ; il ne peut en aucun cas relever des juridictions de l'ordre judiciaire d'exercer un contrôle et/ou une censure sur les décisions administratives et/ou émanant d'établissements publics.
- Les juridictions administratives ont considéré que depuis 1970, la Bourse du travail de [Localité 7] était une EPA, indépendamment des relations contractuelles de droit privé qui ont pu exister entre ses agents vis-à-vis de la Bourse du travail de [Localité 7] et/ou de l'ASO-BT.
- Monsieur [C] a donc été un agent contractuel de droit public. Sa contestation doit donc être portée devant les juridictions administratives
- Les fonctions de M. [C] de dirigeant de la structure « employeur excluaient aussi par nature tout lien de subordination.
Les intimés s'opposent, subsidiairement, à une évocation au fond des demandes indemnitaires de Monsieur [C], afin de ne pas être privée d'un double degré de juridiction. Ils font notamment valoir, dans le cas contraire, outre les observations précédentes, que Monsieur [C] n'a informé de son statut de conseiller prud'homme que le 04 janvier 2023, soit postérieurement à la rupture du contrat intervenue le 1er décembre 2022.
Pour un plus ample exposé des faits de la cause et des prétentions des parties, il est fait expressément référence aux pièces du dossier et aux écritures déposées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code procédure civile.
sur ce,
Sur la compétence :
L'article L. 1411-1 du code du travail dispose en son alinéa premier que :
'Le conseil de prud'hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu'ils emploient'.
L'article L. 1411-2 du même code prévoit que :
'Le conseil de prud'hommes règle les différends et litiges des personnels des services publics, lorsqu'ils sont employés dans les conditions du droit privé.'
Selon l'article L. 1411-4 du code du travail, 'le conseil de prud'hommes est seul compétent, quel que soit le montant de la demande, pour connaître des différends mentionnés au présent chapitre. Toute convention contraire est réputée non écrite.
Le conseil de prud'hommes n'est pas compétent pour connaître des litiges attribués à une autre juridiction par la loi, notamment par le code de la sécurité sociale en matière d'accidents du travail et maladies professionnelles.'
La relation salariée suppose en la fourniture d'un travail en contrepartie du versement d'une rémunération, ainsi que l'existence d'un lien de subordination entre l'employeur et le salarié.
En l'espèce, Monsieur [C] se réfère dans ses écritures à un contrat de travail du 1er janvier 2020 conclu avec l'association ASO-BT.
Il ressort de la pièce qu'il verse aux débats que contrat de travail entre l'ASO-BT et Monsieur [C] énonce dans son article 1 que 'l'ASO-BT et conformément à l'article L.1224-1 reprend le contrat de travail à durée indéterminée signé par Monsieur [J] [C] le 1er octobre 2019, sous réserve de son accord express'.
Ce précédent contrat du 1er octobre 2019 avait été conclu entre la commission administrative de la Bourse du travail de [Localité 7] et Monsieur [C].
Tous deux visent des foncions de 'conseiller en droit du travail', avec une rémunération correspondant à un horaire de 30,33 heures par mois.
Toutefois, par un jugement du 12 octobre 2021 le tribunal administratif de Paris, après avoir relevé notamment que 'eu égard à son objet, aux modalités de son organisation et de son fonctionnement et à l'origine de ses ressources , (...), la bourse du travail de Paris doit être regardée comme exerçant une mission de service public à caractère administratif' et que ' la commission administrative (...) n'était pas compétente pour transférer les activités en cause à l'association ASO-BT', a décidé que :
« Article 1er : la décision du 4 avril 2019 de la Commission administrative de la Bourse du travail de [Localité 7] par laquelle il a été décidé le transfert à l'association « ASO-BT » des activités de réservation des salles et de consultation en droit du travail est annulée.
Article 2 : la décision du 3 juin 2019 de la Commission administrative de la Bourse du travail de [Localité 7] par laquelle il a été décidé du transfert à l'association « ASO-BT » des contrats de tous les salariés de la Bourse du travail, est annulée.(') ».
Déjà, le Conseil d'Etat, par un arrêt du 07 mars 2018, en se fondant particulièrement sur les dispositions du décret en date du 03 avril 1970 portant réforme du statut de la Bourse du travail de [Localité 7] dont il résultait que celle-ci est « un établissement public de caractère municipal doté de la personnalité morale », en soulignant qu'elle a pour objet de concourir à la promotion économique et sociale des travailleurs, notamment par l'organisation d'activités d'enseignement et la fourniture de services de consultation ou d'information et rappelant son objet, les modalités de son organisation et de son fonctionnement et l'origine de ses ressources, avait décidé que 'la Bourse du travail de [Localité 7] doit être regardée comme exerçant une mission de service public à caractère administratif' ; elle avait ainsi retenu 'qu'en jugeant que M. [G], employé en qualité de conseiller en droit du travail par la Bourse du travail de [Localité 7], était un agent contractuel de droit public, le juge des référés du Tribunal administratif de Paris n'a[vait] pas commis d'erreur de droit'.
Si aucune de ces décisions n'ont rendu l'emploi de conseiller en droit du travail illégal, celles-ci conduisent à faire échec au transfert des contrats de travail au sein de l'association ASO-BT et analysent l'emploi de conseiller en droit du travail au sein de la Bourse du travail de [Localité 7] comme celui d'un agent contractuel de droit public, nonobstant les qualifications et mentions apparentes ayant pu être formulées par les parties au contrat susvisé de Monsieur [C].
La mise en place ultérieure d'un établissement public administratif, qui interviendra finalement le 1er janvier 2023, n'a pas avalisé l'existence et la validité des contrats de droit privé apparents mais plutôt tiré conséquences de droit de ces décisions juridictionnelles.
Comme le relèvent les intimés, lors d'une réunion d'information collective organisée le 22 juin 2022, en présence des organisations syndicales, des personnels de la Bourse du travail de [Localité 7] et des représentants de la Ville de [Localité 7], il a été exposé les conditions et les modalités de mise en place de l'établissement public administratif « Bourse du travail de [Localité 7] », les conditions de mise en 'uvre d'avenants aux contrats de travail reconnaissant aux personnels de la Bourse du travail de [Localité 7] le statut d'agents contractuels de droit public et les conditions d'application du droit public en ce qui concerne les personnels et notamment l'impossibilité juridique de proposer un contrat de droit public aux personnes atteintes, - comme Monsieur [C] -, par la limite d'âge de 67 ans.
Il était ainsi précisé au cours de cette réunion que ' (...) les salariés de l'association se verront proposer par la Commission administrative au nom de l'EPA Bourse du travail une solution en fonction de leur situation : contrat de travail de droit public à durée indéterminée ou mise à la retraite pour ceux des agents ayant atteint l'âge limite pour exercer dans la Fonction Publique.(...)'
Il ne se déduit pas de la circonstance que Monsieur [C] était atteint par limite d'âge que son contrat était celui d'un agent contractuel de droit privé.
Les intimés relèvent d'ailleurs et justifient que d'autres salariés qui exerçaient comme lui les fonctions de « conseillers du travail » au sein de la Bourse du travail ont saisi le tribunal administratif et non pas le conseil des prud'hommes pour contester les conditions dans lesquelles leur contrat de travail a été rompu au motif que compte-tenu de leur âge ils ne pouvaient légalement continuer l'exercice de leurs fonctions.
En tout état de cause, et quand bien même l'ASO-BT et Monsieur [C] avaient un temps envisagé une rupture conventionnelle, à la demande de ce dernier, lequel la refusera finalement, force est de constater que c'est la Commission administrative de la Bouse du travail qui est intervenue pour son licenciement.
Compte tenu de ces éléments, il y a lieu de retenir que la juridiction prud'homale est incompétente pour juger du présent litige et d'inviter Monsieur [C] à mieux se pourvoir.
Le jugement est en conséquence confirmé, sauf en ce qu'il 'ordonne' le renvoi de l'affaire devant le tribunal administratif de Paris et dit que les parties seront convoquées à la diligence du greffe du tribunal administratif de Paris, la présente juridiction ne pouvant qu'inviter, dans la présente hypothèse, à renvoyer les parties à mieux se pourvoir.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :
Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera confirmée de ces deux chefs et par application de l'article 696 du code de procédure civile, les dépens d'appel seront mis à la charge de Monsieur [C].
Il est conforme à l'équité de laisser à la charge de chacune des parties les frais par elles exposés en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
CONFIRME le jugement entrepris, sauf en ce qu'il 'ordonne' le renvoi de l'affaire devant le tribunal administratif de Paris et dit que les parties seront convoquées à la diligence du greffe du tribunal administratif de Paris,
RENVOIE les parties à mieux se pourvoir,
CONDAMNE Monsieur [J] [C] aux dépens d'appel,
LAISSE à la charge de chacune des parties les frais par elles exposés en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens.
La Greffière Le Président
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 2
ARRÊT DU 02 OCTOBRE 2025
(n° , 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/03139 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CLHJC
Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Janvier 2025 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRÉTEIL - RG n° 23/01001
APPELANT :
Monsieur [J] [C]
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représenté par Me Eric ALLERIT, avocat postulant, inscrit au barreau de PARIS, toque : P0241 et par Me Michel MINÉ, avocat plaidant, inscrit au barreau de PARIS,
INTIMÉS :
Monsieur [I] [F], ès qualités de liquidateur amiable de l'Association des Organisations Syndicales de la Bourse du travail de [Localité 7] (ASO-BT),
domicilié [Adresse 3]
[Localité 4]
Monsieur [T] [E], ès qualités de liquidateur amiable de l'Association des Organisations Syndicales de la Bourse du Travail de [Localité 7] (ASO-BT)
domicilié [Adresse 3]
[Localité 4]
Madame [D] [Y], ès qualités de liquidateur amiable de l'Association des Organisations Syndicales de la Bourse du Travail de [Localité 7] (ASO-BT)
domiciliée [Adresse 3]
[Localité 4]
Association DES ORGANISATIONS SYNDICALES DE LA BOURSE DU TRAVAIL DE [Localité 7] (ASO-BT), prise en la personne de tous représentants légaux domiciliés
en cette qualité audit siège,
[Adresse 3]
[Localité 4]
Etablissement Public BOURSE DU TRAVAIL DE [Localité 7] - COMMISSION ADMINISTRATIVE, prise en la personne de tous représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
[Adresse 2]
[Localité 4]
Tous représentés par Me Christophe PACHALIS, avocat postulant, inscrit au barreau de PARIS, toque : K148 et par Me Stéphane KADRI, avocat plaidant, inscrit au barreau de PARIS, toque : B0316
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Septembre 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Eric LEGRIS, président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Eric LEGRIS, président
Christine LAGARDE, conseillère
Didier MALINOSKY, magistrat honoraire
Greffière lors des débats : Madame Sophie CAPITAINE
ARRÊT :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
- signé par Eric LEGRIS, président et par Sophie CAPITAINE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE :
Monsieur [C] et la Commission administrative de la Bourse du travail de [Localité 7] ont conclu un contrat à durée indéterminé le 1er juillet 2008.
L'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de [Localité 7] (ci-après 'ASO-BT') est une association soumise à la loi de 1901.
A l'occasion de l'assemblée générale fondatrice et constitutive de l'ASO-BT le 18 avril 2019,
Monsieur [C] a été élu d'une part, membre du conseil d'administration et au surplus, membre du bureau du conseil d'administration. Monsieur [C] exerçait également un mandat d'élu pour le compte de l'organisation syndicale CFE-CGC aux fonctions de secrétaire général adjoint de la Bourse du Travail de [Localité 7] depuis le 15 janvier 2010.
Par délibération de la Commission administrative de la Bourse du Travail du 04 avril 2019, et selon une décision du 03 juin 2019, les contrats de travail des salariés ont été transférés sur le fondement de l'article L.1224-3-1 du code du travail à l'association ASO-BT, à compter du 1er janvier 2020.
Par lettre manuscrite du 13 décembre 2019, Monsieur [C] a accepté le transfert de son contrat de travail.
Par un jugement définitif, en date du 12 octobre 2021, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 03 juin 2019 de la Commission administrative de la Bourse du travail de Paris par laquelle elle avait décidé du transfert à l'association « ASO-BT » des contrats de travail de tous les salariés de la Bourse du travail.
Le 22 juin 2022, en présence des organisations syndicales, des personnels de la Bourse du travail de [Localité 7] et des représentants de la Ville de [Localité 7], il a été exposé les conditions et les modalités de mise en place de l'établissement public administratif « Bourse du travail de [Localité 7] » :
- les conditions de mise en 'uvre d'avenants aux contrats de travail reconnaissant aux personnels de la Bourse du travail de [Localité 7] le statut d'agents contractuels de droit public,
- les conditions d'application du droit public en ce qui concerne les personnels et notamment l'impossibilité juridique de proposer un contrat de droit public aux personnes atteintes par la limite d'âge, en l'occurrence 67 ans, conformément à l'article 556-11 du code de la fonction publique.
Le 03 octobre 2022, Monsieur [C], concerné par cette limite d'âge, a sollicité une rupture conventionnelle auprès de l'ASO-BT.
Le 14 novembre 2022, M. [J] [C] est convoqué à une nouvelle réunion préalable sur les conditions d'une éventuelle rupture conventionnelle fixé au 24 novembre 2022.
Par lettre du 1er décembre 2022, l'Établissement Bourse du travail de [Localité 7] indique à Monsieur [C] que la Bourse du travail doit « procéder à son licenciement selon les règles du droit privé».
L'établissement public administratif Bourse du travail de [Localité 7] a été officiellement mis en place le 1er janvier 2023.
Le 10 juillet 2023, Monsieur [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Créteil, aux fins de juger la nullité du licenciement, d'obtenir la condamnation de l'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de [Localité 7] (ASO-BT) et l'Etablissement public de la Bourse du travail de [Localité 7] à une indemnité pour licenciement illicite, et à des dommages et intérêts pour violation du statut protecteur couvrant la rémunération non-perçue pendant la période de protection (décembre 2022 à juin 2026), ainsi qu'une indemnité au titre de l'article 700.
L'ASO-BT a été dissoute le 15 janvier 2024.
Le 10 janvier 2025, le conseil de prud'hommes de Créteil a rendu le jugement contradictoire suivant :
'DECLARE le Conseil de prud'hommes de Créteil incompétent pour statuer sur le litige opposant Monsieur [J] [C] à l'Etablissement public de la Bourse du travail de Paris - Commission administrative.
ORDONNE le renvoi de l'affaire devant le Tribunal Administratif de Paris.
DIT que, à1'expiration du délai d'appel de 15 jours prévu à l'article 84 du code de procédure civile, sauf justification par l'une des parties d'un appel régularisé auprès du premier président de la cour d`appel de Paris sur la question de compétence, les parties seront convoquées à la diligence du greffe du Tribunal Administratif de Paris.
RESERVE l'ensemble des demandes.
MET les dépens à la charge de Monsieur [J] [C].'
Monsieur [C] a interjeté appel de ce jugement le 18 avril 2025.
Il a été autorisé à assigner les intimés à jour fixe selon une ordonnance du 20 mai 2025.
L'assignation a été déposée le 28 juin 2025.
PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par dernières conclusions transmises par RPVA le 26 août 2025, Monsieur [C] demande à la cour de :
'DÉCLARER recevable et bien fondée Monsieur [J] [C] en ses demandes, fins et conclusions ;
Sur la compétence,
INFIRMER le jugement prud'homal en ce qu'il :
DECLARE le Conseil de prud'hommes de Créteil incompétent pour statuer sur le litige opposant Monsieur [J] [C] à l'Établissement public de al Bourse du travail de Paris - Commission administrative.
ORDONNE le renvoi de l'affaire devant le Tribunal Administratif de Paris.
RESERVE l'ensemble des demandes.
MET les dépens à la charge de Monsieur [J] [C].
JUGER le Conseil de prud'hommes compétent pour statuer sur les demandes de Monsieur [J] [C] à l'encontre de son employeur, l'ASO-BT ;
Sur le fond,
CONDAMNER l'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de [Localité 7] (ASO-BT) pour licenciement nul de Monsieur [J] [C] ;
FIXER la créance de Monsieur [J] [C] au passif de l'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de [Localité 7] (ASO-BT) comme reposant sur les sommes suivantes :
- à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul (douze mois)'''''10.351,08 €
- à titre de dommages et intérêts pour violation du statut protecteur couvrant la rémunération non perçue pendant la période de protection - décembre 2022 à juin 2026 (42 mois)''''''''''''''''''''''''36.228,78 €
- à titre d'indemnités de congés payés''''''''''''''''''3.622,87 €
- à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral (six mois)'''''''5.175,54 €
- Indemnité de préavis'''''''''''''''''''''''' 1 725,18 €
- Indemnité de congés payés afférents''''''''''''''''''. 1 72,51 €
- une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile''''''3.000,00 €
- les dépens ;
- les intérêts de droit à compter du dépôt de la demande, lesquels porteront eux-mêmes intérêts;
Condamner l'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de [Localité 7] (ASO-BT) à remettre à Monsieur [J] [C] un certificat de travail conforme aux prescriptions légales indiquant sa qualification exacte (Conseiller en Droit du Travail), sous astreinte de 50,00 euros par jour de retard, à compter de la notification de la décision ;
Subsidiairement condamner l'EPA Bourse du travail de [Localité 7] à payer à Monsieur [J] [C] les sommes suivantes :
- à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul (douze mois)'''''10.351,08 €
- à titre de dommages et intérêts pour violation du statut protecteur couvrant la rémunération non perçue pendant la période de protection - décembre 2022 à juin 2026 (42 mois)''''''''''''''''''''''''36.228,78 €
- à titre d'indemnités de congés payés''''''''''''''''''3.622,87 €
- à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral (six mois)'''''''5.175,54 €
- Indemnité de préavis'''''''''''''''''''''''' 1 725,18 €
- Indemnité de congés payés afférents''''''''''''''''''. 1 72,51 €
- une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile''''''3.000,00 €
- les dépens ;
- les intérêts de droit à compter du dépôt de la demande, lesquels porteront eux-mêmes intérêts;
Subsidiairement condamner l'EPA Bourse du travail de [Localité 7] à remettre à Monsieur [J] [C] un certificat de travail conforme aux prescriptions légales indiquant sa qualification exacte (Conseiller en Droit du Travail), sous astreinte de 50,00 euros par jour de retard, à compter de la notification de la décision ;
EN TOUT ETAT DE CAUSE
Dire que les sommes ci-dessus porteront intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de Paris (ASO-BT) de la convocation devant la Cour de céans,à compter de la date de la saisine du conseil de prud'hommes,
DÉCLARER la décision à intervenir opposable aux AGS,
Porter au passif de l'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de [Localité 7]
(ASO-BT) la somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de
procédure civile,
Subsidiairement condamner l'EPA Bourse du travail de [Localité 7] à la somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Porter au passif de l'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de [Localité 7]
(ASO-BT) les entiers dépens,
Subsidiairement condamner l'EPA Bourse du travail de [Localité 7] aux entiers dépens.'
Par dernières conclusions transmises par RPVA le 21 juillet 2025, les intimés (M. [T] [E], M. [I] [F], Madame [D] [Y], es qualité de liquidateurs amiables de l'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de [Localité 7] (ASO-BT) et l'établissement public administratif Bourse du travail de [Localité 7] (Commission Administrative), demandent à la cour de :
'Vu la décision du Conseil d'Etat du 7 mars 2018,
Vu la décision (définitive) du Tribunal administratif de Paris du 12 octobre 2021,
Vu les articles L 1411-1 et L 1411-2 du Code du travail,
Dire et juger les juridictions prud'homales incompétentes pour connaître des demandes de M. [J] [C].
En conséquence,
Confirmer en toutes ses dispositions la décision du Conseil des prud'hommes de [Localité 6] du 10 janvier 2025.
Dire et juger mal fondé l'appel sur compétence de M. [J] [C] et le débouter de toutes
ses demandes.
Le renvoyer devant le Tribunal administratif de Paris.
Si par extraordinaire la Cour de céans devait infirmer le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Créteil du 10 janvier 2025 et retenir la compétence de ce dernier pour connaître des demandes de M. [J] [C],
Juger qu'il n'est pas de bonne justice de voir la Cour de céans évoquer les demandes
indemnitaires de Monsieur [J] [C] en violation du principe du double degré de juridiction,
En tout état de cause,
Débouter Monsieur [J] [C] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Le condamner à payer aux intimés une indemnité de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Le condamner aux entiers dépens de la présente procédure, dont distraction dans les
conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.'
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Monsieur [C] fait valoir, sur la compétence du conseil de prud'hommes, que :
- Le contrat de travail du 1er janvier 2020, issu de la procédure de transfert, a été conclu entre une personne physique et une personne morale de droit privé, l'ASO-BT, selon les règles du code du travail. Il reste donc salarié de droit privé.
- La décision du tribunal administratif du 12 octobre 2021 est distincte du contrat de travail. Le tribunal s'est prononcé sur l'incompétence de la commission administrative de la Bourse du travail de Paris pour décider du transfert de ses activités. Cette décision ne rendait donc pas l'emploi illégal.
- L'application des règles de transfert de l'article L.1224-3 du code du travail démontre clairement que l'association ASO-BT et l'EPA Bourse du travail reconnaissent l'existence de contrats de travail de droit privé entre le 1er janvier 2020 et le 31 décembre 2022. La procédure de transfert du privé vers le public, à la date du 1er janvier 2023, a avalisé l'existence des contrats de travail de droit privé jusqu'à cette date.
- Contrairement à ce qu'affirme le jugement de première instance, Monsieur [C] n'était donc pas 'agent contractuel de droit public'.
- L'ASO-BT est restée l'employeur de Monsieur [C], dès lors qu'elle a exécuté le contrat selon les règles du code du travail du 1er janvier au 03 février 2020, et qu'elle envisageait une rupture conventionnelle selon les mêmes règles, même si c'est la Commission administrative de la Bouse du travail qui est intervenue pour son licenciement.
Monsieur [C] fait ensuite valoir, sur le fond de l'affaire, qu'il demande à la cour d'évoquer pour une bonne administration de la justice, que :
- L'ASO-BT n'a pas respecté les modalités de licenciement applicables : défaut d'entretien préalable à un licenciement, défaut de demande d'autorisation de licenciement à l'Inspecteur du travail, alors qu'il était conseiller prud'hommes depuis le 03 décembre 2008 de manière ininterrompue, et défaut d'effort de reclassement.
- Le signataire de la lettre de licenciement est le Secrétaire général de la Commission administrative représentant de la Bourse du travail de [Localité 7], agissant comme employeur de Monsieur [C], alors qu'il était employé par l'ASO-BT.
- Son contrat n'a jamais été transféré à compter du 1er janvier 2023. Le versement de son salaire, à son insu, par la Commission administrative de la Bourse du travail de [Localité 7] résulte d'un manquement de l'employeur.
Les liquidateurs amiables de l'Association des organisations syndicales de la Bourse du travail de Paris (ASO-BT) et l'EPA Bourse du travail de Paris opposent, pour contester la compétence du conseil de prud'hommes, que :
- la rupture des relations entre M. [J] [C] et la Bourse du travail est intervenue par lettre notifiée à M. [J] [C] le 1er décembre 2022, lettre de rupture établie et signée par le secrétaire général de la Commission Administrative de la Bourse du travail de [Localité 7], établissement public administratif. Or, par nature et par définition, toute décision émanant d'un établissement public administratif ne peut être contestée que devant la juridiction administrative, en l'occurrence le tribunal administratif de Paris ; il ne peut en aucun cas relever des juridictions de l'ordre judiciaire d'exercer un contrôle et/ou une censure sur les décisions administratives et/ou émanant d'établissements publics.
- Les juridictions administratives ont considéré que depuis 1970, la Bourse du travail de [Localité 7] était une EPA, indépendamment des relations contractuelles de droit privé qui ont pu exister entre ses agents vis-à-vis de la Bourse du travail de [Localité 7] et/ou de l'ASO-BT.
- Monsieur [C] a donc été un agent contractuel de droit public. Sa contestation doit donc être portée devant les juridictions administratives
- Les fonctions de M. [C] de dirigeant de la structure « employeur excluaient aussi par nature tout lien de subordination.
Les intimés s'opposent, subsidiairement, à une évocation au fond des demandes indemnitaires de Monsieur [C], afin de ne pas être privée d'un double degré de juridiction. Ils font notamment valoir, dans le cas contraire, outre les observations précédentes, que Monsieur [C] n'a informé de son statut de conseiller prud'homme que le 04 janvier 2023, soit postérieurement à la rupture du contrat intervenue le 1er décembre 2022.
Pour un plus ample exposé des faits de la cause et des prétentions des parties, il est fait expressément référence aux pièces du dossier et aux écritures déposées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code procédure civile.
sur ce,
Sur la compétence :
L'article L. 1411-1 du code du travail dispose en son alinéa premier que :
'Le conseil de prud'hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu'ils emploient'.
L'article L. 1411-2 du même code prévoit que :
'Le conseil de prud'hommes règle les différends et litiges des personnels des services publics, lorsqu'ils sont employés dans les conditions du droit privé.'
Selon l'article L. 1411-4 du code du travail, 'le conseil de prud'hommes est seul compétent, quel que soit le montant de la demande, pour connaître des différends mentionnés au présent chapitre. Toute convention contraire est réputée non écrite.
Le conseil de prud'hommes n'est pas compétent pour connaître des litiges attribués à une autre juridiction par la loi, notamment par le code de la sécurité sociale en matière d'accidents du travail et maladies professionnelles.'
La relation salariée suppose en la fourniture d'un travail en contrepartie du versement d'une rémunération, ainsi que l'existence d'un lien de subordination entre l'employeur et le salarié.
En l'espèce, Monsieur [C] se réfère dans ses écritures à un contrat de travail du 1er janvier 2020 conclu avec l'association ASO-BT.
Il ressort de la pièce qu'il verse aux débats que contrat de travail entre l'ASO-BT et Monsieur [C] énonce dans son article 1 que 'l'ASO-BT et conformément à l'article L.1224-1 reprend le contrat de travail à durée indéterminée signé par Monsieur [J] [C] le 1er octobre 2019, sous réserve de son accord express'.
Ce précédent contrat du 1er octobre 2019 avait été conclu entre la commission administrative de la Bourse du travail de [Localité 7] et Monsieur [C].
Tous deux visent des foncions de 'conseiller en droit du travail', avec une rémunération correspondant à un horaire de 30,33 heures par mois.
Toutefois, par un jugement du 12 octobre 2021 le tribunal administratif de Paris, après avoir relevé notamment que 'eu égard à son objet, aux modalités de son organisation et de son fonctionnement et à l'origine de ses ressources , (...), la bourse du travail de Paris doit être regardée comme exerçant une mission de service public à caractère administratif' et que ' la commission administrative (...) n'était pas compétente pour transférer les activités en cause à l'association ASO-BT', a décidé que :
« Article 1er : la décision du 4 avril 2019 de la Commission administrative de la Bourse du travail de [Localité 7] par laquelle il a été décidé le transfert à l'association « ASO-BT » des activités de réservation des salles et de consultation en droit du travail est annulée.
Article 2 : la décision du 3 juin 2019 de la Commission administrative de la Bourse du travail de [Localité 7] par laquelle il a été décidé du transfert à l'association « ASO-BT » des contrats de tous les salariés de la Bourse du travail, est annulée.(') ».
Déjà, le Conseil d'Etat, par un arrêt du 07 mars 2018, en se fondant particulièrement sur les dispositions du décret en date du 03 avril 1970 portant réforme du statut de la Bourse du travail de [Localité 7] dont il résultait que celle-ci est « un établissement public de caractère municipal doté de la personnalité morale », en soulignant qu'elle a pour objet de concourir à la promotion économique et sociale des travailleurs, notamment par l'organisation d'activités d'enseignement et la fourniture de services de consultation ou d'information et rappelant son objet, les modalités de son organisation et de son fonctionnement et l'origine de ses ressources, avait décidé que 'la Bourse du travail de [Localité 7] doit être regardée comme exerçant une mission de service public à caractère administratif' ; elle avait ainsi retenu 'qu'en jugeant que M. [G], employé en qualité de conseiller en droit du travail par la Bourse du travail de [Localité 7], était un agent contractuel de droit public, le juge des référés du Tribunal administratif de Paris n'a[vait] pas commis d'erreur de droit'.
Si aucune de ces décisions n'ont rendu l'emploi de conseiller en droit du travail illégal, celles-ci conduisent à faire échec au transfert des contrats de travail au sein de l'association ASO-BT et analysent l'emploi de conseiller en droit du travail au sein de la Bourse du travail de [Localité 7] comme celui d'un agent contractuel de droit public, nonobstant les qualifications et mentions apparentes ayant pu être formulées par les parties au contrat susvisé de Monsieur [C].
La mise en place ultérieure d'un établissement public administratif, qui interviendra finalement le 1er janvier 2023, n'a pas avalisé l'existence et la validité des contrats de droit privé apparents mais plutôt tiré conséquences de droit de ces décisions juridictionnelles.
Comme le relèvent les intimés, lors d'une réunion d'information collective organisée le 22 juin 2022, en présence des organisations syndicales, des personnels de la Bourse du travail de [Localité 7] et des représentants de la Ville de [Localité 7], il a été exposé les conditions et les modalités de mise en place de l'établissement public administratif « Bourse du travail de [Localité 7] », les conditions de mise en 'uvre d'avenants aux contrats de travail reconnaissant aux personnels de la Bourse du travail de [Localité 7] le statut d'agents contractuels de droit public et les conditions d'application du droit public en ce qui concerne les personnels et notamment l'impossibilité juridique de proposer un contrat de droit public aux personnes atteintes, - comme Monsieur [C] -, par la limite d'âge de 67 ans.
Il était ainsi précisé au cours de cette réunion que ' (...) les salariés de l'association se verront proposer par la Commission administrative au nom de l'EPA Bourse du travail une solution en fonction de leur situation : contrat de travail de droit public à durée indéterminée ou mise à la retraite pour ceux des agents ayant atteint l'âge limite pour exercer dans la Fonction Publique.(...)'
Il ne se déduit pas de la circonstance que Monsieur [C] était atteint par limite d'âge que son contrat était celui d'un agent contractuel de droit privé.
Les intimés relèvent d'ailleurs et justifient que d'autres salariés qui exerçaient comme lui les fonctions de « conseillers du travail » au sein de la Bourse du travail ont saisi le tribunal administratif et non pas le conseil des prud'hommes pour contester les conditions dans lesquelles leur contrat de travail a été rompu au motif que compte-tenu de leur âge ils ne pouvaient légalement continuer l'exercice de leurs fonctions.
En tout état de cause, et quand bien même l'ASO-BT et Monsieur [C] avaient un temps envisagé une rupture conventionnelle, à la demande de ce dernier, lequel la refusera finalement, force est de constater que c'est la Commission administrative de la Bouse du travail qui est intervenue pour son licenciement.
Compte tenu de ces éléments, il y a lieu de retenir que la juridiction prud'homale est incompétente pour juger du présent litige et d'inviter Monsieur [C] à mieux se pourvoir.
Le jugement est en conséquence confirmé, sauf en ce qu'il 'ordonne' le renvoi de l'affaire devant le tribunal administratif de Paris et dit que les parties seront convoquées à la diligence du greffe du tribunal administratif de Paris, la présente juridiction ne pouvant qu'inviter, dans la présente hypothèse, à renvoyer les parties à mieux se pourvoir.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :
Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera confirmée de ces deux chefs et par application de l'article 696 du code de procédure civile, les dépens d'appel seront mis à la charge de Monsieur [C].
Il est conforme à l'équité de laisser à la charge de chacune des parties les frais par elles exposés en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
CONFIRME le jugement entrepris, sauf en ce qu'il 'ordonne' le renvoi de l'affaire devant le tribunal administratif de Paris et dit que les parties seront convoquées à la diligence du greffe du tribunal administratif de Paris,
RENVOIE les parties à mieux se pourvoir,
CONDAMNE Monsieur [J] [C] aux dépens d'appel,
LAISSE à la charge de chacune des parties les frais par elles exposés en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens.
La Greffière Le Président