CA Aix-en-Provence, ch. 1-5, 2 octobre 2025, n° 22/01034
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-5
ARRÊT AU FOND
DU 02 OCTOBRE 2025
ac
N° 2025/ 307
Rôle N° RG 22/01034 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BIXPJ
[S] [X], [U] [V]
[E] [K] épouse [V]
C/
[Z] [I] épouse [W]
[M] [W]
[J] [W]
[A] [W]
S.E.L.A.R.L. DE BOIS '[C]
S.D.C. LE JAYME'S
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Philippe-Laurent SIDER
SELARL GHM AVOCATS
SCP VARRAUD - SANTELLI - ESTRANY - BROM
SELARL [O] & ASSOCIES
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal Judiciaire de GRASSE en date du 30 Novembre 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 19/01407.
APPELANTS
Monsieur [S] [X], [U] [V]
demeurant [Adresse 5]
représenté par Me Philippe-Laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Arach HIRMANPOUR, avocat au barreau de PARIS
Madame [E] [K] épouse [V]
demeurant [Adresse 5]
représentée par Me Philippe-Laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Arach HIRMANPOUR, avocat au barreau de PARIS
INTIMES
Madame [Z] [I] épouse [W]
demeurant [Adresse 7]
représentée par Me Farouk MILOUDI de la SELARL GHM AVOCATS, avocat au barreau de NICE
Monsieur [M] [W]
demeurant [Adresse 6] / CANADA
représenté par Me Farouk MILOUDI de la SELARL GHM AVOCATS, avocat au barreau de NICE
Monsieur [J] [W]
demeurant [Adresse 7]
représenté par Me Farouk MILOUDI de la SELARL GHM AVOCATS, avocat au barreau de NICE
Monsieur [A] [W]
demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Farouk MILOUDI de la SELARL GHM AVOCATS, avocat au barreau de NICE
S.E.L.A.R.L.HERBAUT-PECOU, anciennement dénommée DE BOIS '[C], représentée par Maître [J] [C], pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SOCIETE DE COMMERCIALISATION IMMOBILIERE [S] [V], SARL
représentée par Me Marie-Line BROM de la SCP VARRAUD - SANTELLI - ESTRANY - BROM, avocat au barreau de GRASSE, assistée de Me Francis PIERREPONT de la SCP SCP PIERREPONT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, plaidant
PARTIE INTERVENANTE
Syndicat de copropriétaires '[Adresse 11]' sis [Adresse 7], représenté par son syndic en exercice, la SAS FONCIA AD IMMOBILIER dont le siège social est [Adresse 1], représenté par son représentant légal domiciliéè es-qualités audit siège
représentée par Me Claude LAUGA de la SELARL LAUGA & ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE substituée par Me Thomas JEAN, avocat au barreau de GRASSE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 17 Juin 2025 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Marc MAGNON, Président
Madame Patricia HOARAU, Conseiller
Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Danielle PANDOLFI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Octobre 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 Octobre 2025,
Signé par Monsieur Marc MAGNON, Président et Mme Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte du 6 novembre 2010, [S] [V] et [E] [K] épouse [V] ont souscrit une promesse d'achat, sans condition suspensive d'obtention d'un prêt, d'un appartement situé [Adresse 8] à [Localité 9].
Par acte authentique du 21 janvier 2011, la Société de Commercialisation Immobilière [S] [V] (ci-'après la Sciap) a acquis ledit bien.
Par acte notarié en date du 3 février 2017, la Sciap a consenti au profit de [S] [V] et [E] [K] épouse [V] une hypothèque conventionnelle avec date de publication du 6 février 2017, suivi d'un bordereau rectificatif en date du 16 octobre 2017, en contrepartie d'un compte courant d'associé détenu par [S] [V] et [E] [K] épouse [V] dans les livres de la Sciap à hauteur de la somme, de 644'323,18 euros.
Par jugement, en date du 18 mai 2017, le Tribunal de commerce de'Nanterre a prononcé la liquidation judiciaire de la société et a fixé la date de cessation des paiements au 26 janvier 2017.
Par décision du 5 décembre 2017, le Juge commissaire du Tribunal de commerce de NANTERRE a autorisé la cession de l'actif de la société, à savoir le bien immeuble objet du litige au profit des consorts [W]. [E] [K] qui a saisi la Cour d'Appel de VERSAILLES d'une tierce opposition à l'encontre de cette Ordonnance, a été déclarée irrecevable en son recours.
[S] [V] et [E] [K] épouse [V] ont procédé à une déclaration de créance entre les mains de la Selarl BoisHerbaut, ès-qualités à hauteur d'une somme de 644'323,16 euros à titre privilégié et 109'008,27 euros à titre chirographaire.
La Selard de Boisherbaut ès-qualités a saisi le tribunal de commerce de Nanterre sur le fondement des dispositions de l'article L.632-1 du Code de Commerce afin de voir déclarée nulle l'hypothèque conventionnelle consentie le 3 février 2017 soit postérieurement à la date de cessation des paiements de la Sciap au profit de [Z] [I] épouse [W], [M] [W], [J] [W], [A] [W].
Par jugement en date du 11 avril 2018, rectifié le 29 mai 2018, le tribunal de commerce de Nanterre a ordonné la radiation de l'inscription d'hypothèque conventionnelle sur le bien immobilier, décision confirmée par arrêt du 27 novembre 2018.
Considérant être propriétaires du bien en application d'un contrat de prêt consenti à la Sciap le 9 janvier 2011 comportant une clause de réserve de propriété les époux [V] ont saisi le tribunal judiciaire de Grasse qui par jugement du 30 novembre 2021 a statué en ces termes':
- Déboute les époux [V] de l'intégralité de leurs demandes';
- Condamne la Selarl [C]-Pecou à leur restituer les meubles meublants l'appartement sous astreinte de 50 euros par jour de retard à l'issue d'un délai de trois mois à compter de la signification du jugement';
- Déboute l'ensemble des défendeurs de leurs demandes indemnitaires';
- Juge qu'aucune considération d'équité ne commande de faire application des dispositions au titre des frais irrépétibles,
- Juge que chaque partie conservera ses dépens
- Ordonne l'exécution provisoire';
Le tribunal a considéré en substance que l'acte de vente du 21 janvier 2011 ne comprend aucune clause résolutoire sanctionnant le défaut de remboursement du prêt consenti par [S] [V] et [E] [K] épouse [V] à la Sarl société de commercialisation immobilière [S] [V], qu'il n'est pas fait mention d'un prêt en date du 9 janvier 2011, qui n'a pas été enregistré et n'a pas date certaine, que [S] [V] et [E] [K] épouse [V] ne détiennent donc aucun privilège pour leur créance et que la réserve de propriété n'est pas opposable à la procédure collective, que la propriété des meubles meublants n'est pas contestée.
Par acte du 24 janvier 2022 [S] [V] et [E] [K] épouse [V] ont interjeté appel de la décision.
Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 11] est intervenu volontairement à l'instance d'appel le 15 juillet 2022.
Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 27 mai 2025 [S] [V] et [E] [K] épouse [V] demandent à la cour de':
- de déclarer les époux [R] recevables en leurs demandes et les déclarer bien fondés en ces dernières;
En conséquence,
- infirmer le jugement prononcé le 30 novembre 2021 par le tribunal judiciaire de Grasse
- ordonner le retour dans le patrimoine privé des époux [R] :d'un ensemble immobilier situé à [Adresse 8]. Ledit immeuble dénommé [Adresse 11] La copropriété fait partie du lotissement du [Adresse 10] approuvé par arrêté de Monsieur le Préfet des Alpes-Maritimes en date à [Localité 12] du 13/11/1926.
Cadastré : AR no [Cadastre 4] ' Lieudit : [Adresse 8] - Surface 00 ha 26 a 70 ca, AR no [Cadastre 3] ' Lieudit : [Adresse 8] - Surface 00 ha 02 a 01 ca, Total Surface : 00 ha 28 a 71 ca, comprenant : lot n°'21 : une réserve (garage) et les 81/10000es de la propriété du sol et des parties communes générales; lot n°'46 : un jardin et les 125/10000es de la propriété du sol et des parties communes générales, observation faite que ce lot ne pourra jamais faire l'objet d'une mutation séparée des lots n°'17 et 18 avec lesquels ils forment un groupe indivisible; lot n°'47: au premier sous-sol un appartement regroupant les anciens lots n°'17, 18, 19 et 20, composé d'une entrée, trois chambres avec placard, un dégagement avec placard, une cuisine, un séjour, une salle de bains/douche et les 652/10000es de la propriété du sol et des parties communes générales, observation faite que ce lot ne pourra faire l'objet d'une mutation séparée du lot n°'46.
La superficie de la partie privative des biens soumis aux dispositions de l'article 46 de la loi du 10 juillet 1965 dite « loi Carrez » étant de 104,52m2 pour le lot n°'47. Le titre relatif à cet immeuble étant référencé comme suit aux services de la publicité foncière de GRASSE 1 : numéro d'ordre 10, date de dépôt : 10/03/2011, références d'enliassement : 2011P2356, date de l'acte : 21/01/2011, nature de l'acte : vente, rédacteur : SCP BERNARDEAUBATTAGLIA- GERVAIS-COIQUAUD, notaires associés à CANNES.
- débouter la Sciap et son liquidateur judiciaire la Selarl de Bois [C] représentée par M. [J] [C] de tout droit sur l'immeuble ci-dessus visé, et ce, depuis le 1er janvier 2017;
- débouter la Sciap et son liquidateur judiciaire la Selarl de Bois [C] représentée par M. [J] [C] de son appel incident et de toutes ses demandes, dommages et intérêts et frais irrépétibles;
- déclarer l'arrêt à intervenir opposable aux consorts [W];
- déclarer ces derniers irrecevables dans leur demande reconventionnelle en l'absence d'appel incident;
- les déclarer mal fondés en toutes leurs demandes;
- condamner la Selarl de Bois [C] représentée par M. [J] [C], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la Sciap à restituer aux époux [R] l'immeuble ci-dessus visé, ainsi que les fruits qui s'y trouvent attachés, et les meubles le meublant, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir, astreinte fixée à titre comminatoire pendant une durée de trois mois, passé lequel délai, à défaut d'exécution spontanée, il serait de nouveau fait droit;
- ordonner que l'arrêt prononcé sera publié auprès des services de publicité foncière du lieu de situation de l'immeuble;
- ordonner qu'au titre des fruits ci-dessus visés soit restituée aux époux [R] par la Selarl de Bois [C] représentée par M. [J] [C], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la Sciap, la totalité des loyers perçus à compter du 1er janvier 2017, ou en tout état de cause au plus tard à compter du mois d'août 2017;
Subsidiairement
- ordonner qu'en cas de cession de l'immeuble en cause aux consorts [W], ou à tout autre acquéreur, le prix de cession reviendra de droit aux demandeurs, les époux [R], lesquels en ont acquis la propriété depuis le 1er janvier 2017, en leur qualité d'apporteurs d'affaires, d'apporteurs de fonds et d'associés dans le cadre d'une société de fait constituée en partenariat avec la Sciap;
- ordonner également dans ce cas que toutes les sommes perçues au titre des fruits ci-dessus visés, ainsi que les meubles meublants, soient restitués aux époux [R] par la Selarl de Bois [C] représentée par M. [J] [C], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la Sciap, soit la totalité des loyers perçus à compter du 1er janvier 2017, ou en tout état de cause au plus tard à compter du mois d'août 2017;
En tout état de cause
- condamner la Selarl de Bois [C] représentée par M. [J] [C], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la Sciap au paiement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile;
- condamner les consorts [W] au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile;
- dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure.
Ils soutiennent':
- qu'ils sont les légitimes propriétaires de l'appartement,
- qu'ils bénéficient sur le bien de privilèges spéciaux issus du contrat de prêt comportant réserve de propriété du 9 janvier 2011,
- qu'en vertu de ce contrat de prêt, faute de revente de l'appartement au plus tard le 31 décembre 2016, la propriété du bien devait leur revenir';
- que le procès-verbal d'assemblée générale du 9 janvier 2011 et celui du 12 juillet 2012 font référence à l'existence d'une clause de réserve de propriété';
- que la réserve de propriété est antérieure à l'ouverture de la procédure collective et de la cessation des paiements fixée au 26 janvier 2017';
- que les fonds prêtés en vertu du contrat de prêt ont été versés en janvier'2011, qui figure au passif de la société';
- que le mandataire judiciaire ne peut pas se prévaloir des dispositions de l'article 1377 du Code civil pour prétendre que l'acte de prêt en cause n'aurait pas acquis date certaine à l'égard des créanciers de la liquidation de la Sciap et ne leur serait donc pas opposable';
- que la Cour de cassation a jugé qu'un acte sous seing privé qui n'a pas acquis date certaine est opposable à des tiers s'il est démontré que ces tiers en ont effectivement eu connaissance, ce qui est le cas car le mandataire dispose des comptes sociaux et des registres de la société qui le mentionne,
- qu'en application de l'article 1188 du code civil les époux [R] étaient les bénéficiaires d'une promesse de vente et ils ont procédé au paiement du prix';
- qu'au moment de la régularisation de l'acte de vente ils ont décidé d'exercer la clause de substitution et ont transféré la propriété du bien à la Sciap';
- que l'intention des parties comme l'économie de l'accord est claire en ce que ce bénéfice comporte l'obligation pour la Sciap de revendre le bien avant le 31 décembre 2016 et de rembourser la somme avancée, faute de quoi le bien devait retourner dans le patrimoine des époux [R]';
- que cette économie est confirmée par le fait que depuis l'origine, et jusqu'au mois de juin 2017 (ouverture de la procédure de liquidation judiciaire), ce sont les époux [R] qui ont assumé les charges diverses, impôts CFE, honoraires d'expertise comptable, travaux, etc. concernant l'immeuble en cause'dont les dépenses sont fixées à 735'331,43 euros';
- qu'ils ont conclu un contrat de location meublé de l'appartement le 1er avril 2017 au bénéfice de M. et Mme [B] [W], meubles dont ils sont propriétaires';
- que la vente du bien aux consorts [W] a été acceptée par le juge-commissaire pour la somme dérisoire de 325'000 euros, alors que le prix d'achat de ce bien était de 545 000 euros';
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 22 juin 2022 la Selarl [C]-Pecou prise en la personne de Me [J] [C] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la Sciap demande à la cour de':
CONFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a débouté Monsieur et Madame [V] de l'intégralité de leurs demandes,
En revanche,
- L'INFIRMER en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par la Selarl [C]-Pecou ès-qualités de Liquidateur Judiciaire de la société Sciap,
- En conséquence,
CONDAMNER solidairement les époux [V] à payer à la Selarl [C]-Pecou ès-qualités une somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- DEBOUTER les époux [V] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,
- DEBOUTER les consorts [W] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions dirigées contre la Selarl [C]-Pecou ès-qualités de Liquidateur Judiciaire de la société Sciap,
- CONDAMNER solidairement les époux [V] à payer à la Selarl [C] Pecou ès-qualités une somme de 10.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
- CONDAMNER solidairement les époux [V] aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par Maître Marie-Line Brom conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.
Elle réplique':
- qu'elle vient aux droits de la Selarl de BoisHerbaut,
- que les appelants ont procédé à une déclaration de créance à hauteur d'une somme de 644.323,16 € à titre privilégié et 109.008,27 € à titre chirographaire, cette somme correspondant au compte courant détenu par les époux [V] au sein de leur société et notamment au titre du prêt qu'ils ont consenti.
- qu'en procédant à une déclaration de créance au titre du prêt qu'ils ont consenti, ils ont par la même reconnu que le prétendu transfert de propriété à leur profit n'existait pas'car ils ne peuvent pas être créanciers et propriétaires';
- que le caractère privilégié de la créance déclarée résultait d'une hypothèque conventionnelle à titre personnel, et en garantie du compte courant détenu annulée par décision de justice';
- que l'inscription d'une hypothèque conventionnelle n'emporte pas sauf stipulation expresse transfert de propriété';
- que si la propriété immobilière peut se prouver par tout moyen c'est uniquement en raison de la difficulté de prouver la propriété sur un bien immobilier lorsque la chaîne de transfert de propriété depuis l'origine est impossible à établir,
- que ceci n'est pas le cas en l'espèce, car il ne peut être contesté que l'appartement a été acquis par la Sciap suivant acte notarié';
- que le fait qu'ils aient avancé les fonds comme ils l'indiquent, ne constitue évidemment pas la preuve de la propriété mais uniquement celle d'une avance de fonds';
- que les comptes de la société Sciap ne font qu'établir ce fait, à savoir que l'immeuble est entré dans le patrimoine de la société Sciap comme marchandise, dans la mesure où la société Sciap est une société de marchand de biens, et que le prêt consenti par les époux [V] apparaît en avance consentie par les associés,
- que le privilège spécial doit être constaté, par l'acte d'emprunt, ce qui n'est pas le cas en l'espèce,
- que sur l'existence d'une créance privilégiée, l'acte du 9 janvier 2011 ne peut comporter une clause de réserve de propriété';
- qu'une telle clause est une clause aux termes de laquelle le vendeur d'un bien se réserve la propriété jusqu'à paiement effectif par l'acheteur du prix de vente, que cet acte ne comportant aucune vente, il ne peut exister la moindre clause de réserve de propriété.
- que l'acte du 9 janvier 2011 n'a pas date certaine, il ne peut être invoqué à l'égard des tiers et notamment des créanciers de la liquidation judiciaire de la société Sciap représentée par son Liquidateur Judiciaire';
- qu'un acte sous seing privé est inopposable à la procédure collective dès lors qu'il n'a pas acquis date certaine antérieurement au jugement ayant entraîné le dessaisissement du débiteur de sorte que l'acte du 9 janvier 2011 ne peut être déclaré opposable à la procédure collective, dont le jugement d'ouverture est intervenu le 18 mai 2017,
- qu'en raison des différentes procédures engagées par les époux [V] la vente du bien immobilier n'est toujours pas intervenue, les consorts [W] occupent toujours les lieux en qualité de locataires, un différend est né en raison du refus de ces derniers de procéder au paiement du loyer et des charges';
- que sur la demande reconventionnelle des consorts [W] aucune condamnation ne peut être prononcée à l'encontre de la Selarl de BoisHerbaut, laquelle n'est pas présente à la présente procédure,
Dans leurs conclusions notifiées le 21 juin 2022 [Z] [I] épouse [W], [M] [W], [J] [W], [A] [W] demandent à la cour de':
CONFIRMER le jugement en ce qu'il a débouté les époux [V] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
Cependant, si par extraordinaire la restitution du bien venait à être ordonnée, il conviendrait de réparer le préjudice subi par les consorts [W].
A titre reconventionnel,
CONDAMNER in solidum la Selarl BOIS [C] et les époux [V] à payer aux consorts [W] la somme de 50 000,00 euros, correspondant aux frais liés à l'occupation des lieux depuis le 5 décembre 2017, en ce compris les frais de déménagement ;
CONDAMNER in solidum la Selarl BOIS [C] et les époux [V] à payer aux consorts [W] la somme de 50 000,00 euros en réparation du préjudice subi ;
statuant à nouveau,
CONDAMNER les époux [V] à verser aux consorts [W] la somme de 50 000,00 euros pour procédure abusive ;
CONDAMNER les époux [V] à verser aux consorts [W] la somme de 50 000,00 en réparation du préjudice moral subi ;
CONDAMNER les époux [V] à verser aux consorts [W] la somme de 10 000,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens ;
Ils arguent':
- que le Juge commissaire a tranché la question de la cession de l'actif appartenant à la société qui a été liquidée';
- que la décision ayant ordonné la cession du bien immeuble a autorité de la chose jugée et est désormais définitive,
- que la clause de réserve de propriété, pour produire, le cas échéant, ses effets, aurait dû être insérée dans l'acte de vente';
- or ladite clause a été rédigée dans un acte de prêt';
- que depuis le 5 décembre 2017, les consorts [W] ont été autorisés à acquérir le bien et se sont acquittés de divers sommes, savoir : charges de copropriété, assurance, frais divers';
- que les procédures successives ont empêché la régularisation de l'acte définitif';
Dans ses conclusions d'intervention volontaire du 28 mai 2025 le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 11] demande à la cour de':
DECLARER l'intervention volontaire au débat du syndicat de copropriétaires « [Adresse 11] » recevable et bien fondée.
CONDAMNER la partie déclarée propriétaire des lots n°21, n°46 et n°47 à payer au Syndicat des copropriétaires « [Adresse 11] » la somme de 50 273,16€ au titre des charges de copropriété impayées depuis le 1er janvier 2018 et jusqu'au 20 mai 2025.
CONDAMNER tout succombant à payer au Syndicat des copropriétaires « [Adresse 11] » la somme de 6 000 €, à parfaire, au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
LES CONDAMNER solidairement aux entiers dépens, distraits au profit de Maître Claude [O].
Il indique':
- que le syndicat de copropriétaires « [Adresse 11] » n'a pas déclaré de créances échues ni celles à échoir car le compte de la Sciap était alors à jour';
- que la dette de charges est née le 1er janvier 2018,
- que les créances postérieures ne sont pas frappées par l'interdiction des poursuites, qu'elles soient ou non mentionnées sur la liste des créances postérieures impayées';
- que la Selarl DE BOIS-[C], en qualité de liquidateur de la Sciap avait spontanément adressé à FONCIA AZUR, syndic de la copropriété, un chèque n°2010540 de 1 450,01€ crédité le 15 janvier 2018 sur le compte de la copropriété en règlement de l'appel de fonds du 1er trimestre 2018 pour 1 278,41€ et de la 1ère échéance sur fonds de travaux pour 171,60€';
La clôture de l'instruction a été prononcée le 3 juin 2025.
Par message notifié par Rpva le 18 juin 2025, la cour a transmis aux parties une demande d'observation d'avoir à répondre dans un délai de 15 jours sur le moyen soulevé d'office par la cour au titre de l'irrecevabilité de l'intervention volontaire du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 11] pour défaut d'intérêt à agir en raison de l'absence de lien suffisant avec les prétentions principales des parties.
Par courrier du 20 juin 2025 Me [O] a indiqué que ce moyen ne pouvait pas être relevé d'office et que l'intervention du syndicat des copropriétaires vise à tirer les conséquences juridiques de la reconnaissance de la propriété des lots en litige.
Par courriers des 19 et 20 juin 2025 Me [G] et Me [T] ont soutenu l'irrecevabilité soulevé.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'étendue de la saisine de la cour
Aux termes de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Il est constaté que le dispositif des conclusions des consorts [W] comporte une demande de confirmation du jugement , en ce compris par conséquent le rejet des demandes indemnitaires et alors que les intimés présentent en cause d'appel une demande reconventionnelle à cette fin.
Dans la mesure où les consorts [W] n'ont pas formé d'appel incident la cour n'est saisie que de la demande de confirmation du jugement querellé et n'a pas à statuer sur les demandes indemnitaires.
Sur l'intervention volontaire du syndicat de copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 11]
L'article 125 du code de procédure civile prévoit que les fins de non-recevoir doivent être relevées d'office lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public, notamment lorsqu'elles résultent de l'inobservation des délais dans lesquels doivent être exercées les voies de recours ou de l'absence d'ouverture d'une voie de recours.
Le juge peut relever d'office la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt, du défaut de qualité ou de la chose jugée.
L'article 325 du code de procédure civile énonce que l'intervention n'est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant.
En l'espèce par conclusions notifiées le 15 juillet 2022 le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 11] est intervenu à la procédure en cause d'appel aux fins d'obtenir le paiement d'un arriéré de charges des lots objets de la procédure.
L'objet principal du litige est de trancher la revendication de la propriété de l'appartement situé [Adresse 8] à [Localité 9], entre [Z] [I] épouse [W], [M] [W], [J] [W], [A] [W] et la Sciap désormais en liquidation judiciaire et représentée à la procédure par son mandataire liquidateur la Selarl [C]-Pecou pris en la personne de Me [J] [C].
En aucune façon le paiement d'un arriéré de charges du propriétaire, conséquence légale de la propriété de lots dans un bien soumis aux statuts de la copropriété, n'a de lien démontré avec l'instance introduite au titre de la revendication de la propriété.
L'intervention volontaire du syndicat des copropriétaires à l'instance d'appel est dès lors irrecevable.
Sur la demande principale
L'article 2367 du code civil dans sa version applicable au litige dispose que la propriété d'un bien peut être retenue en garantie par l'effet d'une clause de réserve de propriété qui suspend l'effet translatif d'un contrat jusqu'au complet paiement de l'obligation qui en constitue la contrepartie. La propriété ainsi réservée est l'accessoire de la créance dont elle garantit le paiement.
Les époux [V] sollicitent d'être déclarés propriétaires du bien situé [Adresse 8] à [Localité 9] et se fondent principalement sur les termes du contrat de prêt avec clause de réserve de propriété conclu le 9 janvier 2011 avec la Sciap.
Il est ainsi soutenu que le contrat de prêt d'une somme d'argent du 9 janvier 2011 conclu entre les époux [V] et la Sciap contient en contrepartie du financement octroyé par ceux-ci une clause de réserve de la propriété du bien ainsi acquis, que cette disposition est opposable aux tiers et notamment au liquidateur de la Sciap en ce qu'elle a été conclue avant l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la Sciap et de la date de cessation des paiements fixée au 26 janvier 2017 et avant l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 5 janvier 2017 condamnant la Sciap au paiement de la somme de 86 668,32 euros au profit de M. [H] [F], seul et unique créancier de la société au jour de l'ouverture de la procédure de liquidation.
Il est répondu principalement par la Selarl [C]-Pecou que l'acte du 9 janvier 2011 ne revêt aucune date certaine et est inopposable à la liquidation judiciaire de la Sciap, que les époux [V] qui ont déclaré leur créance à la liquidation ne peuvent se présenter à la fois en tant que créanciers de la liquidation et propriétaires du bien par l'effet d'une clause de réserve, qu'aucun acte authentique n'a enregistré le transfert de propriété au profit des époux [V].
S'agissant de la date certaine et de l'opposabilité de la clause de réserve de propriété aux créanciers, il n'est pas démontré que ce privilège spécial ait été régulièrement porté à la connaissance du liquidateur au moment de la déclaration de créance portant sur une avance en compte courant au nom des associés. Par ailleurs par jugement en date du 11 avril 2018, rectifié le 29 mai 2018, le tribunal de commerce de Nanterre a ordonné la radiation de l'inscription d'hypothèque conventionnelle sur le bien immobilier, décision confirmée par arrêt du 27 novembre 2018.
Il doit donc être considéré que l'acte du 9 janvier 2011 n'a pas date certaine.
S'agissant de l'effectivité de la clause de réserve de propriété, il s'évince du contrat litigieux intitulé «'contrat de prêt et de réserve de propriété'» que « la société Sciap est titulaire d'une promesse de vente portant sur l'acquisition d'un bien immobilier sis à [Adresse 8]. Pour financer son achat la Sciap dont l'activité est celle de marchand de biens et ne disposant pas de fonds nécessaires dans sa trésorerie souhaite recourir à un financement extérieur. Les consorts [V] se sont déclarés aptes et d'accord pour intervenir'(') Les consorts [V] s'engage ( sic) à avancer la somme de l'ordre de 560'000 euros par chèque qui sera remis à Maître [P] notaire au jour d de la signature de l'acte portant vente de cet appartement à la Sarl Sciap. La société Sciap dispose d'un délai de pratiquement cinq ans au maximum jusqu'au 31 décembre 2016 pour finaliser la revente du bien à compter de la date du 21 janvier 2011 (') le remboursement se fera en une seule fois après revente du bien (') passé le délai du 31 décembre 2016 en cas de mévente, la propriété du bien reviendra de plein droit aux consorts [V], revendication légitime compte tenu que le transfert de propriété ne peut être validé en faveur de la société Sciap en considération de la non restitution des fonds ayant servi à l'acquisition du bien ».
En l'espèce à la date du 9 janvier 2011 la société Sciap, qui énonce être titulaire d'une promesse de vente, n'en justifie pas aux débats, la seule promesse versée étant celle conclue le 6 novembre 2010 par la partie appelante. Il n'est pas davantage produit de pièces permettant de s'assurer de l'existence de la clause de substitution revendiquée par la partie appelante, l'acte authentique du 21 janvier 2011 ne l'évoquant pas par ailleurs.
Pour autant, il est constant que par acte authentique du 21 janvier 2011, la société Sciap a acquis ledit bien et que le montant de l'acquisition de 545'000 euros a été payé par chèque tiré sur le compte d'[S] [V] selon l'attestation de paiement émise par l'étude notariale.
Le fait que le remboursement des fonds ayant servi à l'acquisition du bien, provenant d'un prêt personnel consenti par la partie appelante, soit encadré par une clause de réserve de propriété libellée ci-avant n'est pas de nature à permettre pour autant le transfert de propriété tel que prévu par les parties.
En effet la clause de réserve de propriété ne peut être prévue qu'au profit du vendeur qui décide de se réserver la propriété du bien jusqu'au paiement du prix par l'acheteur, et ce, alors même que l'acheteur est entré en possession du bien. Or en l'espèce, la clause de réserve de propriété prévue au contrat de prêt, et non au contrat de vente du bien immobilier, est conclue au bénéfice de parties n'ayant pas la qualité de propriétaire.
Il s'ensuit que la clause qualifiée par les parties à l'acte du 9 janvier 2011 de réserve de propriété ne comporte aucun effet à ce titre au sens de la loi. [S] [V] et [E] [K] épouse [V] n'ont dès lors jamais eu la qualité de propriétaire du bien acquis le 21 janvier 2011 par la société Sciap.
Le seul effet juridique de cet acte est l'existence d'une créance au profit du prêteur de deniers, qui a fait l'objet d'une déclaration auprès du liquidateur de la Sciap.
Le jugement qui a rejeté la demande de revendication de la propriété du bien au profit d'[S] [V] et [E] [K] épouse [V],et rejeté les demandes formées à titre subsidiaire de restitution du prix de cession et des fruits perçus sera en conséquence confirmé.
Sur la demande de restitution des meubles
En vertu d'un contrat de bail conclu le 1er avril 2017 entre la société Sciap et les consorts [W] ceux-'ci disposent en sus du logement des meubles meublants, mentionnés dans l'inventaire établi le 31 mars 2017, dont la propriété aux époux [V] n'est pas contestée.
Il conviendra en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné les consorts [W] à restituer ces meubles meublants sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé un délai de trois mois à compter de la signification de la décision.
Sur la demande indemnitaire reconventionnelle de la Selarl [C]-Pecou au titre de la procédure abusive
Il est constant que l'exercice d'une action en justice constitue un droit, qui ne peut dégénérer en abus que s'il est démontré une volonté de nuire de la partie adverse ou sa mauvaise foi ou une erreur ou négligence blâmable équipollente au dol, ce qui suppose de rapporter la preuve de ce type de faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les deux, dans les conditions prévues par l'article 1240 du code civil.
En l'espèce, il n'est pas démontré que [S] [V] et [E] [K] épouse [V] auraient abusé de leur droit de contester la propriété du bien au détriment du règlement de la liquidation judiciaire, ce d'autant que par décision du 5 décembre 2017, le Juge commissaire du Tribunal de commerce de Nanterre a autorisé la cession du bien au profit des consorts [W].
La Selarl [C]-Pecou sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts et le jugement confirmé sur ce point.
Sur les demandes accessoires
En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient de confirmer le jugement dans ses dispositions concernant les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.
[S] [V] et [E] [K] épouse [V] qui succombent seront condamnés aux dépens distraits au profit de Maître Marie-Line Brom et aux frais irrépétibles qu'il est inéquitable de laisser à la charge de la Selarl [C]-Pecou et des consorts [W].
Aucune disposition ne prévoit la solidarité entre les personnes condamnées aux dépens et aux frais irrépétibles et aucun fondement n'est invoqué à l'appui de la demande de condamnation in solidum aux dépens, qui sera donc rejetée.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Déclare le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 11] pris en la personne de son syndic irrecevable en son intervention volontaire';
Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour';
Y ajoutant,
Condamne [S] [V] et [E] [K] épouse [V] aux entiers dépens distraits au profit de Maître Marie-Line Brom';
Condamne [S] [V] et [E] [K] épouse [V] à verser à la Selarl [C]-Pecou la somme de 5'000 euros et à [Z] [I] épouse [W], [M] [W], [J] [W], [A] [W] ensemble, la somme de 3'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile';
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Chambre 1-5
ARRÊT AU FOND
DU 02 OCTOBRE 2025
ac
N° 2025/ 307
Rôle N° RG 22/01034 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BIXPJ
[S] [X], [U] [V]
[E] [K] épouse [V]
C/
[Z] [I] épouse [W]
[M] [W]
[J] [W]
[A] [W]
S.E.L.A.R.L. DE BOIS '[C]
S.D.C. LE JAYME'S
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Philippe-Laurent SIDER
SELARL GHM AVOCATS
SCP VARRAUD - SANTELLI - ESTRANY - BROM
SELARL [O] & ASSOCIES
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal Judiciaire de GRASSE en date du 30 Novembre 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 19/01407.
APPELANTS
Monsieur [S] [X], [U] [V]
demeurant [Adresse 5]
représenté par Me Philippe-Laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Arach HIRMANPOUR, avocat au barreau de PARIS
Madame [E] [K] épouse [V]
demeurant [Adresse 5]
représentée par Me Philippe-Laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Arach HIRMANPOUR, avocat au barreau de PARIS
INTIMES
Madame [Z] [I] épouse [W]
demeurant [Adresse 7]
représentée par Me Farouk MILOUDI de la SELARL GHM AVOCATS, avocat au barreau de NICE
Monsieur [M] [W]
demeurant [Adresse 6] / CANADA
représenté par Me Farouk MILOUDI de la SELARL GHM AVOCATS, avocat au barreau de NICE
Monsieur [J] [W]
demeurant [Adresse 7]
représenté par Me Farouk MILOUDI de la SELARL GHM AVOCATS, avocat au barreau de NICE
Monsieur [A] [W]
demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Farouk MILOUDI de la SELARL GHM AVOCATS, avocat au barreau de NICE
S.E.L.A.R.L.HERBAUT-PECOU, anciennement dénommée DE BOIS '[C], représentée par Maître [J] [C], pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SOCIETE DE COMMERCIALISATION IMMOBILIERE [S] [V], SARL
représentée par Me Marie-Line BROM de la SCP VARRAUD - SANTELLI - ESTRANY - BROM, avocat au barreau de GRASSE, assistée de Me Francis PIERREPONT de la SCP SCP PIERREPONT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, plaidant
PARTIE INTERVENANTE
Syndicat de copropriétaires '[Adresse 11]' sis [Adresse 7], représenté par son syndic en exercice, la SAS FONCIA AD IMMOBILIER dont le siège social est [Adresse 1], représenté par son représentant légal domiciliéè es-qualités audit siège
représentée par Me Claude LAUGA de la SELARL LAUGA & ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE substituée par Me Thomas JEAN, avocat au barreau de GRASSE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 17 Juin 2025 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Marc MAGNON, Président
Madame Patricia HOARAU, Conseiller
Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Danielle PANDOLFI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Octobre 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 Octobre 2025,
Signé par Monsieur Marc MAGNON, Président et Mme Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte du 6 novembre 2010, [S] [V] et [E] [K] épouse [V] ont souscrit une promesse d'achat, sans condition suspensive d'obtention d'un prêt, d'un appartement situé [Adresse 8] à [Localité 9].
Par acte authentique du 21 janvier 2011, la Société de Commercialisation Immobilière [S] [V] (ci-'après la Sciap) a acquis ledit bien.
Par acte notarié en date du 3 février 2017, la Sciap a consenti au profit de [S] [V] et [E] [K] épouse [V] une hypothèque conventionnelle avec date de publication du 6 février 2017, suivi d'un bordereau rectificatif en date du 16 octobre 2017, en contrepartie d'un compte courant d'associé détenu par [S] [V] et [E] [K] épouse [V] dans les livres de la Sciap à hauteur de la somme, de 644'323,18 euros.
Par jugement, en date du 18 mai 2017, le Tribunal de commerce de'Nanterre a prononcé la liquidation judiciaire de la société et a fixé la date de cessation des paiements au 26 janvier 2017.
Par décision du 5 décembre 2017, le Juge commissaire du Tribunal de commerce de NANTERRE a autorisé la cession de l'actif de la société, à savoir le bien immeuble objet du litige au profit des consorts [W]. [E] [K] qui a saisi la Cour d'Appel de VERSAILLES d'une tierce opposition à l'encontre de cette Ordonnance, a été déclarée irrecevable en son recours.
[S] [V] et [E] [K] épouse [V] ont procédé à une déclaration de créance entre les mains de la Selarl BoisHerbaut, ès-qualités à hauteur d'une somme de 644'323,16 euros à titre privilégié et 109'008,27 euros à titre chirographaire.
La Selard de Boisherbaut ès-qualités a saisi le tribunal de commerce de Nanterre sur le fondement des dispositions de l'article L.632-1 du Code de Commerce afin de voir déclarée nulle l'hypothèque conventionnelle consentie le 3 février 2017 soit postérieurement à la date de cessation des paiements de la Sciap au profit de [Z] [I] épouse [W], [M] [W], [J] [W], [A] [W].
Par jugement en date du 11 avril 2018, rectifié le 29 mai 2018, le tribunal de commerce de Nanterre a ordonné la radiation de l'inscription d'hypothèque conventionnelle sur le bien immobilier, décision confirmée par arrêt du 27 novembre 2018.
Considérant être propriétaires du bien en application d'un contrat de prêt consenti à la Sciap le 9 janvier 2011 comportant une clause de réserve de propriété les époux [V] ont saisi le tribunal judiciaire de Grasse qui par jugement du 30 novembre 2021 a statué en ces termes':
- Déboute les époux [V] de l'intégralité de leurs demandes';
- Condamne la Selarl [C]-Pecou à leur restituer les meubles meublants l'appartement sous astreinte de 50 euros par jour de retard à l'issue d'un délai de trois mois à compter de la signification du jugement';
- Déboute l'ensemble des défendeurs de leurs demandes indemnitaires';
- Juge qu'aucune considération d'équité ne commande de faire application des dispositions au titre des frais irrépétibles,
- Juge que chaque partie conservera ses dépens
- Ordonne l'exécution provisoire';
Le tribunal a considéré en substance que l'acte de vente du 21 janvier 2011 ne comprend aucune clause résolutoire sanctionnant le défaut de remboursement du prêt consenti par [S] [V] et [E] [K] épouse [V] à la Sarl société de commercialisation immobilière [S] [V], qu'il n'est pas fait mention d'un prêt en date du 9 janvier 2011, qui n'a pas été enregistré et n'a pas date certaine, que [S] [V] et [E] [K] épouse [V] ne détiennent donc aucun privilège pour leur créance et que la réserve de propriété n'est pas opposable à la procédure collective, que la propriété des meubles meublants n'est pas contestée.
Par acte du 24 janvier 2022 [S] [V] et [E] [K] épouse [V] ont interjeté appel de la décision.
Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 11] est intervenu volontairement à l'instance d'appel le 15 juillet 2022.
Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 27 mai 2025 [S] [V] et [E] [K] épouse [V] demandent à la cour de':
- de déclarer les époux [R] recevables en leurs demandes et les déclarer bien fondés en ces dernières;
En conséquence,
- infirmer le jugement prononcé le 30 novembre 2021 par le tribunal judiciaire de Grasse
- ordonner le retour dans le patrimoine privé des époux [R] :d'un ensemble immobilier situé à [Adresse 8]. Ledit immeuble dénommé [Adresse 11] La copropriété fait partie du lotissement du [Adresse 10] approuvé par arrêté de Monsieur le Préfet des Alpes-Maritimes en date à [Localité 12] du 13/11/1926.
Cadastré : AR no [Cadastre 4] ' Lieudit : [Adresse 8] - Surface 00 ha 26 a 70 ca, AR no [Cadastre 3] ' Lieudit : [Adresse 8] - Surface 00 ha 02 a 01 ca, Total Surface : 00 ha 28 a 71 ca, comprenant : lot n°'21 : une réserve (garage) et les 81/10000es de la propriété du sol et des parties communes générales; lot n°'46 : un jardin et les 125/10000es de la propriété du sol et des parties communes générales, observation faite que ce lot ne pourra jamais faire l'objet d'une mutation séparée des lots n°'17 et 18 avec lesquels ils forment un groupe indivisible; lot n°'47: au premier sous-sol un appartement regroupant les anciens lots n°'17, 18, 19 et 20, composé d'une entrée, trois chambres avec placard, un dégagement avec placard, une cuisine, un séjour, une salle de bains/douche et les 652/10000es de la propriété du sol et des parties communes générales, observation faite que ce lot ne pourra faire l'objet d'une mutation séparée du lot n°'46.
La superficie de la partie privative des biens soumis aux dispositions de l'article 46 de la loi du 10 juillet 1965 dite « loi Carrez » étant de 104,52m2 pour le lot n°'47. Le titre relatif à cet immeuble étant référencé comme suit aux services de la publicité foncière de GRASSE 1 : numéro d'ordre 10, date de dépôt : 10/03/2011, références d'enliassement : 2011P2356, date de l'acte : 21/01/2011, nature de l'acte : vente, rédacteur : SCP BERNARDEAUBATTAGLIA- GERVAIS-COIQUAUD, notaires associés à CANNES.
- débouter la Sciap et son liquidateur judiciaire la Selarl de Bois [C] représentée par M. [J] [C] de tout droit sur l'immeuble ci-dessus visé, et ce, depuis le 1er janvier 2017;
- débouter la Sciap et son liquidateur judiciaire la Selarl de Bois [C] représentée par M. [J] [C] de son appel incident et de toutes ses demandes, dommages et intérêts et frais irrépétibles;
- déclarer l'arrêt à intervenir opposable aux consorts [W];
- déclarer ces derniers irrecevables dans leur demande reconventionnelle en l'absence d'appel incident;
- les déclarer mal fondés en toutes leurs demandes;
- condamner la Selarl de Bois [C] représentée par M. [J] [C], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la Sciap à restituer aux époux [R] l'immeuble ci-dessus visé, ainsi que les fruits qui s'y trouvent attachés, et les meubles le meublant, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir, astreinte fixée à titre comminatoire pendant une durée de trois mois, passé lequel délai, à défaut d'exécution spontanée, il serait de nouveau fait droit;
- ordonner que l'arrêt prononcé sera publié auprès des services de publicité foncière du lieu de situation de l'immeuble;
- ordonner qu'au titre des fruits ci-dessus visés soit restituée aux époux [R] par la Selarl de Bois [C] représentée par M. [J] [C], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la Sciap, la totalité des loyers perçus à compter du 1er janvier 2017, ou en tout état de cause au plus tard à compter du mois d'août 2017;
Subsidiairement
- ordonner qu'en cas de cession de l'immeuble en cause aux consorts [W], ou à tout autre acquéreur, le prix de cession reviendra de droit aux demandeurs, les époux [R], lesquels en ont acquis la propriété depuis le 1er janvier 2017, en leur qualité d'apporteurs d'affaires, d'apporteurs de fonds et d'associés dans le cadre d'une société de fait constituée en partenariat avec la Sciap;
- ordonner également dans ce cas que toutes les sommes perçues au titre des fruits ci-dessus visés, ainsi que les meubles meublants, soient restitués aux époux [R] par la Selarl de Bois [C] représentée par M. [J] [C], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la Sciap, soit la totalité des loyers perçus à compter du 1er janvier 2017, ou en tout état de cause au plus tard à compter du mois d'août 2017;
En tout état de cause
- condamner la Selarl de Bois [C] représentée par M. [J] [C], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la Sciap au paiement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile;
- condamner les consorts [W] au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile;
- dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure.
Ils soutiennent':
- qu'ils sont les légitimes propriétaires de l'appartement,
- qu'ils bénéficient sur le bien de privilèges spéciaux issus du contrat de prêt comportant réserve de propriété du 9 janvier 2011,
- qu'en vertu de ce contrat de prêt, faute de revente de l'appartement au plus tard le 31 décembre 2016, la propriété du bien devait leur revenir';
- que le procès-verbal d'assemblée générale du 9 janvier 2011 et celui du 12 juillet 2012 font référence à l'existence d'une clause de réserve de propriété';
- que la réserve de propriété est antérieure à l'ouverture de la procédure collective et de la cessation des paiements fixée au 26 janvier 2017';
- que les fonds prêtés en vertu du contrat de prêt ont été versés en janvier'2011, qui figure au passif de la société';
- que le mandataire judiciaire ne peut pas se prévaloir des dispositions de l'article 1377 du Code civil pour prétendre que l'acte de prêt en cause n'aurait pas acquis date certaine à l'égard des créanciers de la liquidation de la Sciap et ne leur serait donc pas opposable';
- que la Cour de cassation a jugé qu'un acte sous seing privé qui n'a pas acquis date certaine est opposable à des tiers s'il est démontré que ces tiers en ont effectivement eu connaissance, ce qui est le cas car le mandataire dispose des comptes sociaux et des registres de la société qui le mentionne,
- qu'en application de l'article 1188 du code civil les époux [R] étaient les bénéficiaires d'une promesse de vente et ils ont procédé au paiement du prix';
- qu'au moment de la régularisation de l'acte de vente ils ont décidé d'exercer la clause de substitution et ont transféré la propriété du bien à la Sciap';
- que l'intention des parties comme l'économie de l'accord est claire en ce que ce bénéfice comporte l'obligation pour la Sciap de revendre le bien avant le 31 décembre 2016 et de rembourser la somme avancée, faute de quoi le bien devait retourner dans le patrimoine des époux [R]';
- que cette économie est confirmée par le fait que depuis l'origine, et jusqu'au mois de juin 2017 (ouverture de la procédure de liquidation judiciaire), ce sont les époux [R] qui ont assumé les charges diverses, impôts CFE, honoraires d'expertise comptable, travaux, etc. concernant l'immeuble en cause'dont les dépenses sont fixées à 735'331,43 euros';
- qu'ils ont conclu un contrat de location meublé de l'appartement le 1er avril 2017 au bénéfice de M. et Mme [B] [W], meubles dont ils sont propriétaires';
- que la vente du bien aux consorts [W] a été acceptée par le juge-commissaire pour la somme dérisoire de 325'000 euros, alors que le prix d'achat de ce bien était de 545 000 euros';
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 22 juin 2022 la Selarl [C]-Pecou prise en la personne de Me [J] [C] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la Sciap demande à la cour de':
CONFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a débouté Monsieur et Madame [V] de l'intégralité de leurs demandes,
En revanche,
- L'INFIRMER en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par la Selarl [C]-Pecou ès-qualités de Liquidateur Judiciaire de la société Sciap,
- En conséquence,
CONDAMNER solidairement les époux [V] à payer à la Selarl [C]-Pecou ès-qualités une somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- DEBOUTER les époux [V] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,
- DEBOUTER les consorts [W] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions dirigées contre la Selarl [C]-Pecou ès-qualités de Liquidateur Judiciaire de la société Sciap,
- CONDAMNER solidairement les époux [V] à payer à la Selarl [C] Pecou ès-qualités une somme de 10.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
- CONDAMNER solidairement les époux [V] aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par Maître Marie-Line Brom conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.
Elle réplique':
- qu'elle vient aux droits de la Selarl de BoisHerbaut,
- que les appelants ont procédé à une déclaration de créance à hauteur d'une somme de 644.323,16 € à titre privilégié et 109.008,27 € à titre chirographaire, cette somme correspondant au compte courant détenu par les époux [V] au sein de leur société et notamment au titre du prêt qu'ils ont consenti.
- qu'en procédant à une déclaration de créance au titre du prêt qu'ils ont consenti, ils ont par la même reconnu que le prétendu transfert de propriété à leur profit n'existait pas'car ils ne peuvent pas être créanciers et propriétaires';
- que le caractère privilégié de la créance déclarée résultait d'une hypothèque conventionnelle à titre personnel, et en garantie du compte courant détenu annulée par décision de justice';
- que l'inscription d'une hypothèque conventionnelle n'emporte pas sauf stipulation expresse transfert de propriété';
- que si la propriété immobilière peut se prouver par tout moyen c'est uniquement en raison de la difficulté de prouver la propriété sur un bien immobilier lorsque la chaîne de transfert de propriété depuis l'origine est impossible à établir,
- que ceci n'est pas le cas en l'espèce, car il ne peut être contesté que l'appartement a été acquis par la Sciap suivant acte notarié';
- que le fait qu'ils aient avancé les fonds comme ils l'indiquent, ne constitue évidemment pas la preuve de la propriété mais uniquement celle d'une avance de fonds';
- que les comptes de la société Sciap ne font qu'établir ce fait, à savoir que l'immeuble est entré dans le patrimoine de la société Sciap comme marchandise, dans la mesure où la société Sciap est une société de marchand de biens, et que le prêt consenti par les époux [V] apparaît en avance consentie par les associés,
- que le privilège spécial doit être constaté, par l'acte d'emprunt, ce qui n'est pas le cas en l'espèce,
- que sur l'existence d'une créance privilégiée, l'acte du 9 janvier 2011 ne peut comporter une clause de réserve de propriété';
- qu'une telle clause est une clause aux termes de laquelle le vendeur d'un bien se réserve la propriété jusqu'à paiement effectif par l'acheteur du prix de vente, que cet acte ne comportant aucune vente, il ne peut exister la moindre clause de réserve de propriété.
- que l'acte du 9 janvier 2011 n'a pas date certaine, il ne peut être invoqué à l'égard des tiers et notamment des créanciers de la liquidation judiciaire de la société Sciap représentée par son Liquidateur Judiciaire';
- qu'un acte sous seing privé est inopposable à la procédure collective dès lors qu'il n'a pas acquis date certaine antérieurement au jugement ayant entraîné le dessaisissement du débiteur de sorte que l'acte du 9 janvier 2011 ne peut être déclaré opposable à la procédure collective, dont le jugement d'ouverture est intervenu le 18 mai 2017,
- qu'en raison des différentes procédures engagées par les époux [V] la vente du bien immobilier n'est toujours pas intervenue, les consorts [W] occupent toujours les lieux en qualité de locataires, un différend est né en raison du refus de ces derniers de procéder au paiement du loyer et des charges';
- que sur la demande reconventionnelle des consorts [W] aucune condamnation ne peut être prononcée à l'encontre de la Selarl de BoisHerbaut, laquelle n'est pas présente à la présente procédure,
Dans leurs conclusions notifiées le 21 juin 2022 [Z] [I] épouse [W], [M] [W], [J] [W], [A] [W] demandent à la cour de':
CONFIRMER le jugement en ce qu'il a débouté les époux [V] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
Cependant, si par extraordinaire la restitution du bien venait à être ordonnée, il conviendrait de réparer le préjudice subi par les consorts [W].
A titre reconventionnel,
CONDAMNER in solidum la Selarl BOIS [C] et les époux [V] à payer aux consorts [W] la somme de 50 000,00 euros, correspondant aux frais liés à l'occupation des lieux depuis le 5 décembre 2017, en ce compris les frais de déménagement ;
CONDAMNER in solidum la Selarl BOIS [C] et les époux [V] à payer aux consorts [W] la somme de 50 000,00 euros en réparation du préjudice subi ;
statuant à nouveau,
CONDAMNER les époux [V] à verser aux consorts [W] la somme de 50 000,00 euros pour procédure abusive ;
CONDAMNER les époux [V] à verser aux consorts [W] la somme de 50 000,00 en réparation du préjudice moral subi ;
CONDAMNER les époux [V] à verser aux consorts [W] la somme de 10 000,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens ;
Ils arguent':
- que le Juge commissaire a tranché la question de la cession de l'actif appartenant à la société qui a été liquidée';
- que la décision ayant ordonné la cession du bien immeuble a autorité de la chose jugée et est désormais définitive,
- que la clause de réserve de propriété, pour produire, le cas échéant, ses effets, aurait dû être insérée dans l'acte de vente';
- or ladite clause a été rédigée dans un acte de prêt';
- que depuis le 5 décembre 2017, les consorts [W] ont été autorisés à acquérir le bien et se sont acquittés de divers sommes, savoir : charges de copropriété, assurance, frais divers';
- que les procédures successives ont empêché la régularisation de l'acte définitif';
Dans ses conclusions d'intervention volontaire du 28 mai 2025 le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 11] demande à la cour de':
DECLARER l'intervention volontaire au débat du syndicat de copropriétaires « [Adresse 11] » recevable et bien fondée.
CONDAMNER la partie déclarée propriétaire des lots n°21, n°46 et n°47 à payer au Syndicat des copropriétaires « [Adresse 11] » la somme de 50 273,16€ au titre des charges de copropriété impayées depuis le 1er janvier 2018 et jusqu'au 20 mai 2025.
CONDAMNER tout succombant à payer au Syndicat des copropriétaires « [Adresse 11] » la somme de 6 000 €, à parfaire, au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
LES CONDAMNER solidairement aux entiers dépens, distraits au profit de Maître Claude [O].
Il indique':
- que le syndicat de copropriétaires « [Adresse 11] » n'a pas déclaré de créances échues ni celles à échoir car le compte de la Sciap était alors à jour';
- que la dette de charges est née le 1er janvier 2018,
- que les créances postérieures ne sont pas frappées par l'interdiction des poursuites, qu'elles soient ou non mentionnées sur la liste des créances postérieures impayées';
- que la Selarl DE BOIS-[C], en qualité de liquidateur de la Sciap avait spontanément adressé à FONCIA AZUR, syndic de la copropriété, un chèque n°2010540 de 1 450,01€ crédité le 15 janvier 2018 sur le compte de la copropriété en règlement de l'appel de fonds du 1er trimestre 2018 pour 1 278,41€ et de la 1ère échéance sur fonds de travaux pour 171,60€';
La clôture de l'instruction a été prononcée le 3 juin 2025.
Par message notifié par Rpva le 18 juin 2025, la cour a transmis aux parties une demande d'observation d'avoir à répondre dans un délai de 15 jours sur le moyen soulevé d'office par la cour au titre de l'irrecevabilité de l'intervention volontaire du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 11] pour défaut d'intérêt à agir en raison de l'absence de lien suffisant avec les prétentions principales des parties.
Par courrier du 20 juin 2025 Me [O] a indiqué que ce moyen ne pouvait pas être relevé d'office et que l'intervention du syndicat des copropriétaires vise à tirer les conséquences juridiques de la reconnaissance de la propriété des lots en litige.
Par courriers des 19 et 20 juin 2025 Me [G] et Me [T] ont soutenu l'irrecevabilité soulevé.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'étendue de la saisine de la cour
Aux termes de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Il est constaté que le dispositif des conclusions des consorts [W] comporte une demande de confirmation du jugement , en ce compris par conséquent le rejet des demandes indemnitaires et alors que les intimés présentent en cause d'appel une demande reconventionnelle à cette fin.
Dans la mesure où les consorts [W] n'ont pas formé d'appel incident la cour n'est saisie que de la demande de confirmation du jugement querellé et n'a pas à statuer sur les demandes indemnitaires.
Sur l'intervention volontaire du syndicat de copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 11]
L'article 125 du code de procédure civile prévoit que les fins de non-recevoir doivent être relevées d'office lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public, notamment lorsqu'elles résultent de l'inobservation des délais dans lesquels doivent être exercées les voies de recours ou de l'absence d'ouverture d'une voie de recours.
Le juge peut relever d'office la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt, du défaut de qualité ou de la chose jugée.
L'article 325 du code de procédure civile énonce que l'intervention n'est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant.
En l'espèce par conclusions notifiées le 15 juillet 2022 le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 11] est intervenu à la procédure en cause d'appel aux fins d'obtenir le paiement d'un arriéré de charges des lots objets de la procédure.
L'objet principal du litige est de trancher la revendication de la propriété de l'appartement situé [Adresse 8] à [Localité 9], entre [Z] [I] épouse [W], [M] [W], [J] [W], [A] [W] et la Sciap désormais en liquidation judiciaire et représentée à la procédure par son mandataire liquidateur la Selarl [C]-Pecou pris en la personne de Me [J] [C].
En aucune façon le paiement d'un arriéré de charges du propriétaire, conséquence légale de la propriété de lots dans un bien soumis aux statuts de la copropriété, n'a de lien démontré avec l'instance introduite au titre de la revendication de la propriété.
L'intervention volontaire du syndicat des copropriétaires à l'instance d'appel est dès lors irrecevable.
Sur la demande principale
L'article 2367 du code civil dans sa version applicable au litige dispose que la propriété d'un bien peut être retenue en garantie par l'effet d'une clause de réserve de propriété qui suspend l'effet translatif d'un contrat jusqu'au complet paiement de l'obligation qui en constitue la contrepartie. La propriété ainsi réservée est l'accessoire de la créance dont elle garantit le paiement.
Les époux [V] sollicitent d'être déclarés propriétaires du bien situé [Adresse 8] à [Localité 9] et se fondent principalement sur les termes du contrat de prêt avec clause de réserve de propriété conclu le 9 janvier 2011 avec la Sciap.
Il est ainsi soutenu que le contrat de prêt d'une somme d'argent du 9 janvier 2011 conclu entre les époux [V] et la Sciap contient en contrepartie du financement octroyé par ceux-ci une clause de réserve de la propriété du bien ainsi acquis, que cette disposition est opposable aux tiers et notamment au liquidateur de la Sciap en ce qu'elle a été conclue avant l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la Sciap et de la date de cessation des paiements fixée au 26 janvier 2017 et avant l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 5 janvier 2017 condamnant la Sciap au paiement de la somme de 86 668,32 euros au profit de M. [H] [F], seul et unique créancier de la société au jour de l'ouverture de la procédure de liquidation.
Il est répondu principalement par la Selarl [C]-Pecou que l'acte du 9 janvier 2011 ne revêt aucune date certaine et est inopposable à la liquidation judiciaire de la Sciap, que les époux [V] qui ont déclaré leur créance à la liquidation ne peuvent se présenter à la fois en tant que créanciers de la liquidation et propriétaires du bien par l'effet d'une clause de réserve, qu'aucun acte authentique n'a enregistré le transfert de propriété au profit des époux [V].
S'agissant de la date certaine et de l'opposabilité de la clause de réserve de propriété aux créanciers, il n'est pas démontré que ce privilège spécial ait été régulièrement porté à la connaissance du liquidateur au moment de la déclaration de créance portant sur une avance en compte courant au nom des associés. Par ailleurs par jugement en date du 11 avril 2018, rectifié le 29 mai 2018, le tribunal de commerce de Nanterre a ordonné la radiation de l'inscription d'hypothèque conventionnelle sur le bien immobilier, décision confirmée par arrêt du 27 novembre 2018.
Il doit donc être considéré que l'acte du 9 janvier 2011 n'a pas date certaine.
S'agissant de l'effectivité de la clause de réserve de propriété, il s'évince du contrat litigieux intitulé «'contrat de prêt et de réserve de propriété'» que « la société Sciap est titulaire d'une promesse de vente portant sur l'acquisition d'un bien immobilier sis à [Adresse 8]. Pour financer son achat la Sciap dont l'activité est celle de marchand de biens et ne disposant pas de fonds nécessaires dans sa trésorerie souhaite recourir à un financement extérieur. Les consorts [V] se sont déclarés aptes et d'accord pour intervenir'(') Les consorts [V] s'engage ( sic) à avancer la somme de l'ordre de 560'000 euros par chèque qui sera remis à Maître [P] notaire au jour d de la signature de l'acte portant vente de cet appartement à la Sarl Sciap. La société Sciap dispose d'un délai de pratiquement cinq ans au maximum jusqu'au 31 décembre 2016 pour finaliser la revente du bien à compter de la date du 21 janvier 2011 (') le remboursement se fera en une seule fois après revente du bien (') passé le délai du 31 décembre 2016 en cas de mévente, la propriété du bien reviendra de plein droit aux consorts [V], revendication légitime compte tenu que le transfert de propriété ne peut être validé en faveur de la société Sciap en considération de la non restitution des fonds ayant servi à l'acquisition du bien ».
En l'espèce à la date du 9 janvier 2011 la société Sciap, qui énonce être titulaire d'une promesse de vente, n'en justifie pas aux débats, la seule promesse versée étant celle conclue le 6 novembre 2010 par la partie appelante. Il n'est pas davantage produit de pièces permettant de s'assurer de l'existence de la clause de substitution revendiquée par la partie appelante, l'acte authentique du 21 janvier 2011 ne l'évoquant pas par ailleurs.
Pour autant, il est constant que par acte authentique du 21 janvier 2011, la société Sciap a acquis ledit bien et que le montant de l'acquisition de 545'000 euros a été payé par chèque tiré sur le compte d'[S] [V] selon l'attestation de paiement émise par l'étude notariale.
Le fait que le remboursement des fonds ayant servi à l'acquisition du bien, provenant d'un prêt personnel consenti par la partie appelante, soit encadré par une clause de réserve de propriété libellée ci-avant n'est pas de nature à permettre pour autant le transfert de propriété tel que prévu par les parties.
En effet la clause de réserve de propriété ne peut être prévue qu'au profit du vendeur qui décide de se réserver la propriété du bien jusqu'au paiement du prix par l'acheteur, et ce, alors même que l'acheteur est entré en possession du bien. Or en l'espèce, la clause de réserve de propriété prévue au contrat de prêt, et non au contrat de vente du bien immobilier, est conclue au bénéfice de parties n'ayant pas la qualité de propriétaire.
Il s'ensuit que la clause qualifiée par les parties à l'acte du 9 janvier 2011 de réserve de propriété ne comporte aucun effet à ce titre au sens de la loi. [S] [V] et [E] [K] épouse [V] n'ont dès lors jamais eu la qualité de propriétaire du bien acquis le 21 janvier 2011 par la société Sciap.
Le seul effet juridique de cet acte est l'existence d'une créance au profit du prêteur de deniers, qui a fait l'objet d'une déclaration auprès du liquidateur de la Sciap.
Le jugement qui a rejeté la demande de revendication de la propriété du bien au profit d'[S] [V] et [E] [K] épouse [V],et rejeté les demandes formées à titre subsidiaire de restitution du prix de cession et des fruits perçus sera en conséquence confirmé.
Sur la demande de restitution des meubles
En vertu d'un contrat de bail conclu le 1er avril 2017 entre la société Sciap et les consorts [W] ceux-'ci disposent en sus du logement des meubles meublants, mentionnés dans l'inventaire établi le 31 mars 2017, dont la propriété aux époux [V] n'est pas contestée.
Il conviendra en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné les consorts [W] à restituer ces meubles meublants sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé un délai de trois mois à compter de la signification de la décision.
Sur la demande indemnitaire reconventionnelle de la Selarl [C]-Pecou au titre de la procédure abusive
Il est constant que l'exercice d'une action en justice constitue un droit, qui ne peut dégénérer en abus que s'il est démontré une volonté de nuire de la partie adverse ou sa mauvaise foi ou une erreur ou négligence blâmable équipollente au dol, ce qui suppose de rapporter la preuve de ce type de faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les deux, dans les conditions prévues par l'article 1240 du code civil.
En l'espèce, il n'est pas démontré que [S] [V] et [E] [K] épouse [V] auraient abusé de leur droit de contester la propriété du bien au détriment du règlement de la liquidation judiciaire, ce d'autant que par décision du 5 décembre 2017, le Juge commissaire du Tribunal de commerce de Nanterre a autorisé la cession du bien au profit des consorts [W].
La Selarl [C]-Pecou sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts et le jugement confirmé sur ce point.
Sur les demandes accessoires
En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient de confirmer le jugement dans ses dispositions concernant les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.
[S] [V] et [E] [K] épouse [V] qui succombent seront condamnés aux dépens distraits au profit de Maître Marie-Line Brom et aux frais irrépétibles qu'il est inéquitable de laisser à la charge de la Selarl [C]-Pecou et des consorts [W].
Aucune disposition ne prévoit la solidarité entre les personnes condamnées aux dépens et aux frais irrépétibles et aucun fondement n'est invoqué à l'appui de la demande de condamnation in solidum aux dépens, qui sera donc rejetée.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Déclare le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 11] pris en la personne de son syndic irrecevable en son intervention volontaire';
Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour';
Y ajoutant,
Condamne [S] [V] et [E] [K] épouse [V] aux entiers dépens distraits au profit de Maître Marie-Line Brom';
Condamne [S] [V] et [E] [K] épouse [V] à verser à la Selarl [C]-Pecou la somme de 5'000 euros et à [Z] [I] épouse [W], [M] [W], [J] [W], [A] [W] ensemble, la somme de 3'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile';
LE GREFFIER LE PRESIDENT