CA Colmar, ch. 2 a, 3 octobre 2025, n° 24/02739
COLMAR
Arrêt
Autre
MINUTE N° 445/2025
Copie exécutoire
aux avocats
Le 3 octobre 2025
Le cadre-greffier,
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
DEUXIEME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 03 OCTOBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 24/02739 - N° Portalis DBVW-V-B7I-ILC3
Décision déférée à la cour : 13 Juin 2024 par le juge de la mise en état de [Localité 5]
APPELANTE :
La S.A.R.L. CHARPENTE ARTISANALE BINKERT, prise en la personne de son représentant légal
ayant son siège social [Adresse 3]
représentée par Me Christine LAISSUE-STRAVOPODIS de la SELARL ACVF ASSOCIES, avocat à la cour.
INTIMÉE :
Madame [L] [H]
demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Valérie SPIESER-DECHRISTE de la SELARL V² AVOCATS, avocat à la cour.
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 02 Mai 2025, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente de chambre
Madame Murielle ROBERT-NICOUD, conseillère
Madame Nathalie HERY, conseillère
qui en ont délibéré.
Greffière lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN
ARRÊT contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Sylvie SCHIRMANN, cadre-greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
Selon devis n° D2017/00346 daté du 15 septembre 2017 et accepté le 16 janvier 2018, Mme [L] [H] a confié à la SARL Binkert des travaux de rénovation de toiture portant sur l'immeuble à usage d'habitation dont elle est propriétaire, sis [Adresse 2] à [Localité 4] (68).
Un acompte de 6 350 euros HT a été versé par Mme [H] avant le démarrage des travaux.
Le 5 février 2019, la société Binkert a établi une facture de solde d'un montant de 15 137,18 euros TTC.
Les travaux ont ensuite été réceptionnés le 20 février 2019 avec des réserves.
Deux rapports d'expertise « Protection juridique » ont été établis le 4 juin 2019 et le 17 décembre 2019.
Le 11 décembre 2019, les parties ont régularisé un protocole d'accord transactionnel portant sur les désordres constatés et le paiement du solde de la facture.
Le 9 janvier 2020, le conseil de Mme [H] a mis en demeure la société Binkert de s'acquitter de la somme de 14 985 euros correspondant au montant versé au titre de l'acompte et à des dommages et intérêts.
Le 13 février 2020, Mme [H] a fait assigner la société Binkert devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Mulhouse à fin d'expertise, laquelle a été ordonnée le 23 octobre 2020, confiée à M. [I] qui a établi son rapport le 16 novembre 2021.
Le même jour, elle a fait assigner la même société devant le tribunal judiciaire de Mulhouse à fin de reprise des travaux tels que prévus dans le protocole d'accord.
Par jugement du 12 juillet 2022, le tribunal judiciaire de Mulhouse a renvoyé l'affaire devant la première chambre civile.
Sur saisine de la société Charpente Artisanale Binkert, le juge de la mise en état, par ordonnance du 13 juin 2024, a notamment :
rejeté les fins de non-recevoir tirées de la prescription et de l'autorité de la chose jugée soulevées par la SARL Charpente Artisanale Binkert ;
condamné la SARL Charpente Artisanale Binkert au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
rejeté la demande de la SARL Charpente Artisanale Binkert au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamné la SARL Charpente Artisanale Binkert aux dépens de l'incident.
Le juge a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription retenant qu'au jour de l'introduction de la présente instance le 24 février 2020, le délai pour agir avait été interrompu et n'avait pas expiré puisque :
selon le jugement en date du 22 juillet 2022, Mme [H] avait assigné la société Binkert le 24 février 2020 devant le tribunal judiciaire de Mulhouse sur le fondement de l'article 1792-6 du code civil et de la garantie de parfait achèvement,
le procès-verbal de réception avait été signé avec réserves le 20 février 2019,
l'instance introduite en référés le 13 février 2020 avait eu pour effet d'interrompre la prescription qui avait recommencé à courir à compter du 23 octobre 2020, date de l'ordonnance désignant l'expert judiciaire.
Le juge a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée faisant état de ce que Mme [H] avait saisi le tribunal judiciaire en référés et au fond, arguant de ce que les obligations contractuelles n'avaient pas été respectées et ce, conformément aux dispositions du protocole d'accord.
La SARL Charpente Artisanale Binkert a formé appel à l'encontre de cette ordonnance par voie électronique le 16 juillet 2024.
Selon ordonnance du 10 septembre 2024, la présidente de la chambre, en application de l'article 905 du code de procédure civile, a fixé d'office l'affaire à l'audience de plaidoirie du 2 mai 2025.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 16 août 2024, la société Charpente Artisanale Binkert demande à la cour de :
juger son appel recevable et bien fondé ;
Y faire droit et en conséquence,
infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle :
a rejeté les fins de non-recevoir tirées de la prescription et de l'autorité de la chose jugée qu'elle a soulevées,
l'a condamnée au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
a rejeté sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
l'a condamnée aux dépens de l'incident ;
Statuant à nouveau,
déclarer recevable sa fin de non-recevoir tirée de la prescription ;
déclarer recevable sa fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée ;
En conséquence,
déclarer les demandes de Mme [L] [H] irrecevables ;
débouter Mme [L] [H] de ses demandes formulées à son encontre ;
condamner Mme [L] [H] à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamner Mme [L] [H] aux dépens des deux instances.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription, la société Charpente Artisanale Binkert, se prévalant des dispositions de l'article 1792-6 alinéa 2 du code civil, soutient que :
la garantie de parfait achèvement doit être mise en 'uvre judiciairement dans son délai d'exercice qui est d'un an à compter de la réception des travaux,
le délai de la garantie de parfait achèvement a été interrompu par l'action en référé introduite par Mme [H] le 13 février 2020 puis a recommencé à courir à compter de la date de l'ordonnance prescrivant la mesure d'expertise, soit le 23 octobre 2020, jusqu'au 23 octobre 2021,
ce n'est que par conclusions datées du 2 mai 2023 que Mme [H] a sollicité, pour la première fois, sa condamnation sur le fondement de la garantie de parfait achèvement.
Elle en déduit que la demande introduite au fond par assignation du 13 février 2020 n'a pas valablement interrompu la prescription dès lors que les demandes qui y sont formulées ne sont pas claires.
Elle souligne que, tel que cela ressort du jugement du 12 juillet 2022, Mme [H] n'a sollicité dans son dispositif ni la reprise de désordres relevés à l'occasion du procès-verbal de réception des travaux, ni, s'agissant des réserves non levées, sa condamnation selon le chiffrage de l'expert, lequel avait pourtant déposé son rapport depuis le 16 février 2021.
Sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée, se prévalant des dispositions de l'article 2052 du code civil, la société Charpente Artisanale Binkert indique que les parties ont régularisé un protocole d'accord transactionnel le 11 décembre 2019 mais dès le 9 janvier 2020, le conseil de Mme [H] l'a mise en demeure non pas d'exécuter le protocole d'accord mais de s'acquitter de la somme de 14 985 euros correspondant au montant versé au titre de l'acompte et à des dommages et intérêts.
Elle considère que Mme [H] a ainsi fait fi du protocole d'accord signé entre les parties en ne lui permettant pas d'exécuter ses obligations contractuelles et s'est affranchie de l'autorité de la chose jugée reconnue au protocole d'accord en saisissant le tribunal judiciaire de Mulhouse en référé et au fond, ne lui laissant pas le temps de réagir à sa mise en demeure.
Elle souligne qu'une transaction peut exceptionnellement être remise en cause par l'un des cocontractants en dépit de l'autorité de la chose jugée qu'à la condition de démontrer une violation par l'une des parties de son engagement ; or, Mme [H] a, sans aucun motif légitime, refusé de manière injustifiée et réitérée de la laisser effectuer les travaux de reprise convenus au protocole d'accord, ce qui doit être analysé comme un refus d'exécution de ses propres obligations.
Elle en déduit que Mme [H] n'est pas fondée à rechercher sa responsabilité ni à la poursuivre pour non-respect du protocole et que, par conséquent, l'action en justice intentée par Mme [H] est irrecevable.
Elle indique encore que c'est par une inexacte appréciation qu'il a été considéré, en première instance, que l'action de Mme [H] est recevable en ce qu'elle a saisi en référé et au fond, les 13 et 24 février 2020, le tribunal judiciaire, soit à la mi-février, conformément aux dispositions du protocole d'accord, ce qui est erroné puisque les assignations ont toutes deux étés signifiées le 13 février 2020.
Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 13 septembre 2024, Mme [H] demande à la cour de :
déclarer l'appel interjeté recevable mais mal fondé ;
confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;
débouter la société Charpente Artisanale Binkert de l'ensemble de ses demandes, fins et moyens ;
condamner la société Charpente Artisanale Binkert au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens des deux instances.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription, Mme [H] fait valoir que l'action n'est pas prescrite. En effet :
elle a introduit la procédure dans les délais par assignation du 24 février 2020 laquelle constitue une demande claire et explicite de nature à interrompre la prescription puisqu'elle a agi sur le fondement de la garantie de parfait achèvement, sollicitant que la SARL Binkert soit condamnée à effectuer les travaux tels que prévu dans le protocole d'accord sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir ; le protocole d'accord se réfère aux réserves énumérées dans le procès-verbal de réception, énumère et décrit de façon précise les différents travaux devant être réalisés par la SARL Binkert pour remédier aux désordres constatés dans le procès-verbal de réception,
les conclusions du 2 mai 2023 n'ont eu pour objet que d'actualiser la demande en tenant compte des conclusions du rapport d'expertise.
Sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée, Mme [H] expose que :
l'ordonnance entreprise doit être confirmée pour les motifs adoptés par le premier juge qui relève qu'elle a saisi la juridiction des référés et au fond le 13 février 2020, soit à la mi-février, conformément aux dispositions du protocole d'accord,
le 9 janvier 2020 la SARL Binkert ne l'avait toujours pas contactée et ne lui avait pas proposé un calendrier d'intervention, ce qui signifie qu'elle n'a jamais eu l'intention d'exécuter les obligations à sa charge découlant du protocole d'accord,
elle a attendu l'issue du délai imparti à la SARL Binkert pour effectuer les travaux avant de l'assigner le 13 février 2020,
si le protocole d'accord prévoit une clause selon laquelle « la partie la plus diligente pourra porter l'affaire sur le plan judiciaire en vue de contraindre la partie défaillante à exécuter le protocole sous astreinte sans préjudice de dommages-intérêts éventuels », il s'agit d'une simple éventualité, mais non d'une obligation procédurale,
le protocole d'accord n'ayant pas été exécuté, elle retrouvait sa pleine liberté d'action,
le rapport d'expertise judiciaire a relevé d'autres désordres et a finalement chiffré les travaux de reprise à la somme de 39 711,28 euros TTC.
Selon ordonnance du 10 septembre 2024, la présidente de la chambre, en application de l'article 905 du code de procédure civile, a fixé d'office l'affaire à l'audience de plaidoirie du 2 mai 2025.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la fin de non-recevoir tirée de la chose jugée
Aux termes du protocole d'accord du 11 décembre 2019, la société Binkert s'est engagée à exécuter avant la mi-février 2020, une liste de travaux pour remédier aux désordres constatés afférents à des travaux qu'elle devait réaliser pour Mme [H].
Le 9 janvier 2020, Mme [H] a mis en demeure la société Binkert de lui payer la somme de 8 000 euros correspondant à la dégradation de la cheminée et du volet et au remboursement de l'acompte versé à hauteur de 6 350 euros HT faisant état de ce qu'elle ne souhaitait plus qu'elle intervienne pour le chantier du fait d'une perte de confiance.
Le 13 février 2020, Mme [H] a fait assigner la société Binkert, d'une part, devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Mulhouse, à fin d'expertise et, d'autre part, devant le tribunal judiciaire de Mulhouse à fin de condamnation à réaliser les travaux listés dans le protocole d'accord, cette assignation ayant été placée au tribunal le 24 février 2020.
Le protocole d'accord susvisé indique que la présente transaction est régie par les dispositions de l'article 2044 du code civil et fait donc obstacle à l'introduction ou la poursuite entre les parties d'une action en justice ayant le même objet conformément aux termes de l'article 2052 du même code.
Il prévoit, cependant, que :
sous réserve de sa bonne exécution, les parties renoncent mutuellement à tout recours concernant les points objets du présent accord,
à défaut d'exécution par l'une ou l'autre des parties des engagements mentionnés, la partie la plus diligente pourra porter l'affaire sur le plan judiciaire en vue de contraindre la partie défaillante à exécuter le présent protocole sous astreinte sans préjudice de dommages et intérêts éventuels.
La transaction, qui ne met fin au litige que sous réserve de son exécution, ne peut être opposée par l'une des parties que si celle-ci en a respecté les conditions.
En l'espèce, la société Binkert avait jusqu'à la mi-février pour s'exécuter. Elle ne justifie pas l'avoir fait avant cette date, la mise en demeure que lui a adressée Mme [H] le 9 janvier 2020, évoquant sa perte de confiance, n'ayant, au demeurant, été suivie d'aucune réponse, ni réaction de sa part.
En outre, le tribunal judiciaire de Mulhouse a été saisi au fond par assignation du 13 février 2020, placée le 24 février 2020, soit au-delà de la mi-février.
Dès lors, les clauses du procès-verbal de transaction relatives à sa non-exécution trouvent à s'appliquer, de sorte que Mme [H], à défaut d'exécution de la transaction par la société Binkert a retrouvé son droit d'agir à l'encontre de cette dernière, l'autorité de la chose jugée ne lui étant, de ce fait, plus opposable.
Il y a donc lieu de rejeter la fin de non-recevoir soulevée de ce chef et de confirmer l'ordonnance entreprise.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription
Aux termes des dispositions de l'article 1792-6 du code civil, l'entrepreneur est tenu pendant un délai d'un an à compter de la réception à la garantie de parfait achèvement, laquelle responsabilité s'étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l'ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux révélés postérieurement à la réception.
L'assignation du 13 février 2020 devant le tribunal judiciaire de Mulhouse tend à voir condamner la société Binkert à effectuer les travaux prévus dans le protocole d'accord au visa des articles 1792-6 et suivants du code civil, Mme [H] y développant des moyens relatifs à la garantie de parfait achèvement.
Cette assignation renvoie clairement au protocole transactionnel établi le 11 décembre 2019, soit dans le délai d'un an à compter du procès-verbal de réception établi le 20 février 2019, lequel protocole porte sur huit désordres incluant certains des désordres énumérés au procès-verbal de réception qui fait état de quatorze réserves.
Considérant que ladite assignation a été délivrée dans le délai d'un an suivant tant le procès-verbal de réception, il apparaît que, s'agissant des huit désordres visés au protocole transactionnel, l'action de Mme [H] n'est pas prescrite et que ses demandes sont donc recevables.
En revanche, aux termes de ses conclusions datées du 2 mai 2023 déposées devant le tribunal judiciaire de Mulhouse, dans le cadre de la présente affaire, Mme [H], au visa des dispositions de l'article 1792-6 du code civil sollicite la condamnation de la société Charpente Artisanale Binkert à lui payer la somme de 39 711,28 euros TTC correspondant au chiffrage des travaux de reprise fait par l'expert judiciaire, l'analyse de son rapport établi le 16 novembre 2021 permettant de constater qu'il liste quinze désordres, malfaçons et non-conformités déjà mis en exergue et dans le procès-verbal de réception et dans les rapports d'expertise du 4 juin 2019 et du 17 décembre 2019 lesquels sont des rapports d'expertise « Protection juridique ».
S'agissant de ces sept désordres supplémentaires, Mme [H] ayant fait assigner la société Charpente Artisanale Binkert en référé expertise le 13 février 2020, le délai d'un an pour agir, lequel est de forclusion, a été interrompu jusqu'à la date du 23 octobre 2020, date de l'ordonnance ayant ordonné une expertise ; Mme [H] avait donc jusqu'au 23 octobre 2021 pour formuler des demandes au titre de la garantie de parfait achèvement ; or, ses conclusions datant du 2 mai 2023, son action est prescrite et ses demandes relatives à ces sept désordres sont irrecevables.
L'ordonnance entreprise est donc infirmée de ce chef.
Sur les dépens et les frais de procédure non compris dans les dépens
L'ordonnance entreprise est infirmée en ce qu'elle a condamné la société Charpente Artisanale Binkert au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'elle l'a condamnée aux dépens de l'incident. Elle est confirmée pour le surplus.
Chaque partie est condamnée à supporter la charge de ses propres dépens tant en premier ressort dans la procédure d'incident qu'à hauteur d'appel.
Les demandes d'indemnités fondées sur l'article 700 du code de procédure civile formulées par les parties pour leurs frais de procédure non compris dans les dépens exposés tant en premier ressort qu'à hauteur d'appel sont rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant, publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré :
INFIRME l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Mulhouse du 13 juin 2024 en ce qu'elle a :
rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la SARL Charpente Artisanale Binkert ;
condamné la SARL Charpente Artisanale Binkert au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamné la SARL Charpente Artisanale Binkert aux dépens de l'incident ;
LE CONFIRME pour le surplus, dans les limites de l'appel ;
Statuant de nouveau sur les seuls points infirmés et y ajoutant :
DECLARE recevable l'action de Mme [L] [H] au titre de la garantie de parfait achèvement portant sur les huit désordres visés dans le protocole d'accord régularisé par elle et la SARL Charpente Artisanale Binkert le 11 décembre 2019 ;
DECLARE irrecevable l'action de Mme [L] [H] sur le fondement de la garantie de parfait achèvement concernant les autres désordres visés dans ses conclusions datées du 2 mai 2023 soutenues devant le tribunal judiciaire de Mulhouse dans le cadre de la procédure RG n°22/00527 ;
CONDAMNE Mme [L] [H] à supporter la charge de ses propres dépens exposés dans la procédure d'incident en premier ressort et à hauteur d'appel ;
CONDAMNE la SARL Charpente Artisanale Binkert à supporter la charge de ses propres dépens exposés dans la procédure d'incident en premier ressort et à hauteur d'appel ;
REJETTE les demandes de Mme [L] [H] fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais de procédure non compris dans les dépens exposés en première instance et à hauteur d'appel ;
REJETTE la demande de la SARL Charpente Artisanale Binkert fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais de procédure non compris dans les dépens exposés à hauteur d'appel.
Le cadre-greffier, La présidente,
Copie exécutoire
aux avocats
Le 3 octobre 2025
Le cadre-greffier,
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
DEUXIEME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 03 OCTOBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 24/02739 - N° Portalis DBVW-V-B7I-ILC3
Décision déférée à la cour : 13 Juin 2024 par le juge de la mise en état de [Localité 5]
APPELANTE :
La S.A.R.L. CHARPENTE ARTISANALE BINKERT, prise en la personne de son représentant légal
ayant son siège social [Adresse 3]
représentée par Me Christine LAISSUE-STRAVOPODIS de la SELARL ACVF ASSOCIES, avocat à la cour.
INTIMÉE :
Madame [L] [H]
demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Valérie SPIESER-DECHRISTE de la SELARL V² AVOCATS, avocat à la cour.
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 02 Mai 2025, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente de chambre
Madame Murielle ROBERT-NICOUD, conseillère
Madame Nathalie HERY, conseillère
qui en ont délibéré.
Greffière lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN
ARRÊT contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Sylvie SCHIRMANN, cadre-greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
Selon devis n° D2017/00346 daté du 15 septembre 2017 et accepté le 16 janvier 2018, Mme [L] [H] a confié à la SARL Binkert des travaux de rénovation de toiture portant sur l'immeuble à usage d'habitation dont elle est propriétaire, sis [Adresse 2] à [Localité 4] (68).
Un acompte de 6 350 euros HT a été versé par Mme [H] avant le démarrage des travaux.
Le 5 février 2019, la société Binkert a établi une facture de solde d'un montant de 15 137,18 euros TTC.
Les travaux ont ensuite été réceptionnés le 20 février 2019 avec des réserves.
Deux rapports d'expertise « Protection juridique » ont été établis le 4 juin 2019 et le 17 décembre 2019.
Le 11 décembre 2019, les parties ont régularisé un protocole d'accord transactionnel portant sur les désordres constatés et le paiement du solde de la facture.
Le 9 janvier 2020, le conseil de Mme [H] a mis en demeure la société Binkert de s'acquitter de la somme de 14 985 euros correspondant au montant versé au titre de l'acompte et à des dommages et intérêts.
Le 13 février 2020, Mme [H] a fait assigner la société Binkert devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Mulhouse à fin d'expertise, laquelle a été ordonnée le 23 octobre 2020, confiée à M. [I] qui a établi son rapport le 16 novembre 2021.
Le même jour, elle a fait assigner la même société devant le tribunal judiciaire de Mulhouse à fin de reprise des travaux tels que prévus dans le protocole d'accord.
Par jugement du 12 juillet 2022, le tribunal judiciaire de Mulhouse a renvoyé l'affaire devant la première chambre civile.
Sur saisine de la société Charpente Artisanale Binkert, le juge de la mise en état, par ordonnance du 13 juin 2024, a notamment :
rejeté les fins de non-recevoir tirées de la prescription et de l'autorité de la chose jugée soulevées par la SARL Charpente Artisanale Binkert ;
condamné la SARL Charpente Artisanale Binkert au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
rejeté la demande de la SARL Charpente Artisanale Binkert au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamné la SARL Charpente Artisanale Binkert aux dépens de l'incident.
Le juge a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription retenant qu'au jour de l'introduction de la présente instance le 24 février 2020, le délai pour agir avait été interrompu et n'avait pas expiré puisque :
selon le jugement en date du 22 juillet 2022, Mme [H] avait assigné la société Binkert le 24 février 2020 devant le tribunal judiciaire de Mulhouse sur le fondement de l'article 1792-6 du code civil et de la garantie de parfait achèvement,
le procès-verbal de réception avait été signé avec réserves le 20 février 2019,
l'instance introduite en référés le 13 février 2020 avait eu pour effet d'interrompre la prescription qui avait recommencé à courir à compter du 23 octobre 2020, date de l'ordonnance désignant l'expert judiciaire.
Le juge a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée faisant état de ce que Mme [H] avait saisi le tribunal judiciaire en référés et au fond, arguant de ce que les obligations contractuelles n'avaient pas été respectées et ce, conformément aux dispositions du protocole d'accord.
La SARL Charpente Artisanale Binkert a formé appel à l'encontre de cette ordonnance par voie électronique le 16 juillet 2024.
Selon ordonnance du 10 septembre 2024, la présidente de la chambre, en application de l'article 905 du code de procédure civile, a fixé d'office l'affaire à l'audience de plaidoirie du 2 mai 2025.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 16 août 2024, la société Charpente Artisanale Binkert demande à la cour de :
juger son appel recevable et bien fondé ;
Y faire droit et en conséquence,
infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle :
a rejeté les fins de non-recevoir tirées de la prescription et de l'autorité de la chose jugée qu'elle a soulevées,
l'a condamnée au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
a rejeté sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
l'a condamnée aux dépens de l'incident ;
Statuant à nouveau,
déclarer recevable sa fin de non-recevoir tirée de la prescription ;
déclarer recevable sa fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée ;
En conséquence,
déclarer les demandes de Mme [L] [H] irrecevables ;
débouter Mme [L] [H] de ses demandes formulées à son encontre ;
condamner Mme [L] [H] à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamner Mme [L] [H] aux dépens des deux instances.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription, la société Charpente Artisanale Binkert, se prévalant des dispositions de l'article 1792-6 alinéa 2 du code civil, soutient que :
la garantie de parfait achèvement doit être mise en 'uvre judiciairement dans son délai d'exercice qui est d'un an à compter de la réception des travaux,
le délai de la garantie de parfait achèvement a été interrompu par l'action en référé introduite par Mme [H] le 13 février 2020 puis a recommencé à courir à compter de la date de l'ordonnance prescrivant la mesure d'expertise, soit le 23 octobre 2020, jusqu'au 23 octobre 2021,
ce n'est que par conclusions datées du 2 mai 2023 que Mme [H] a sollicité, pour la première fois, sa condamnation sur le fondement de la garantie de parfait achèvement.
Elle en déduit que la demande introduite au fond par assignation du 13 février 2020 n'a pas valablement interrompu la prescription dès lors que les demandes qui y sont formulées ne sont pas claires.
Elle souligne que, tel que cela ressort du jugement du 12 juillet 2022, Mme [H] n'a sollicité dans son dispositif ni la reprise de désordres relevés à l'occasion du procès-verbal de réception des travaux, ni, s'agissant des réserves non levées, sa condamnation selon le chiffrage de l'expert, lequel avait pourtant déposé son rapport depuis le 16 février 2021.
Sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée, se prévalant des dispositions de l'article 2052 du code civil, la société Charpente Artisanale Binkert indique que les parties ont régularisé un protocole d'accord transactionnel le 11 décembre 2019 mais dès le 9 janvier 2020, le conseil de Mme [H] l'a mise en demeure non pas d'exécuter le protocole d'accord mais de s'acquitter de la somme de 14 985 euros correspondant au montant versé au titre de l'acompte et à des dommages et intérêts.
Elle considère que Mme [H] a ainsi fait fi du protocole d'accord signé entre les parties en ne lui permettant pas d'exécuter ses obligations contractuelles et s'est affranchie de l'autorité de la chose jugée reconnue au protocole d'accord en saisissant le tribunal judiciaire de Mulhouse en référé et au fond, ne lui laissant pas le temps de réagir à sa mise en demeure.
Elle souligne qu'une transaction peut exceptionnellement être remise en cause par l'un des cocontractants en dépit de l'autorité de la chose jugée qu'à la condition de démontrer une violation par l'une des parties de son engagement ; or, Mme [H] a, sans aucun motif légitime, refusé de manière injustifiée et réitérée de la laisser effectuer les travaux de reprise convenus au protocole d'accord, ce qui doit être analysé comme un refus d'exécution de ses propres obligations.
Elle en déduit que Mme [H] n'est pas fondée à rechercher sa responsabilité ni à la poursuivre pour non-respect du protocole et que, par conséquent, l'action en justice intentée par Mme [H] est irrecevable.
Elle indique encore que c'est par une inexacte appréciation qu'il a été considéré, en première instance, que l'action de Mme [H] est recevable en ce qu'elle a saisi en référé et au fond, les 13 et 24 février 2020, le tribunal judiciaire, soit à la mi-février, conformément aux dispositions du protocole d'accord, ce qui est erroné puisque les assignations ont toutes deux étés signifiées le 13 février 2020.
Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 13 septembre 2024, Mme [H] demande à la cour de :
déclarer l'appel interjeté recevable mais mal fondé ;
confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;
débouter la société Charpente Artisanale Binkert de l'ensemble de ses demandes, fins et moyens ;
condamner la société Charpente Artisanale Binkert au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens des deux instances.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription, Mme [H] fait valoir que l'action n'est pas prescrite. En effet :
elle a introduit la procédure dans les délais par assignation du 24 février 2020 laquelle constitue une demande claire et explicite de nature à interrompre la prescription puisqu'elle a agi sur le fondement de la garantie de parfait achèvement, sollicitant que la SARL Binkert soit condamnée à effectuer les travaux tels que prévu dans le protocole d'accord sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir ; le protocole d'accord se réfère aux réserves énumérées dans le procès-verbal de réception, énumère et décrit de façon précise les différents travaux devant être réalisés par la SARL Binkert pour remédier aux désordres constatés dans le procès-verbal de réception,
les conclusions du 2 mai 2023 n'ont eu pour objet que d'actualiser la demande en tenant compte des conclusions du rapport d'expertise.
Sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée, Mme [H] expose que :
l'ordonnance entreprise doit être confirmée pour les motifs adoptés par le premier juge qui relève qu'elle a saisi la juridiction des référés et au fond le 13 février 2020, soit à la mi-février, conformément aux dispositions du protocole d'accord,
le 9 janvier 2020 la SARL Binkert ne l'avait toujours pas contactée et ne lui avait pas proposé un calendrier d'intervention, ce qui signifie qu'elle n'a jamais eu l'intention d'exécuter les obligations à sa charge découlant du protocole d'accord,
elle a attendu l'issue du délai imparti à la SARL Binkert pour effectuer les travaux avant de l'assigner le 13 février 2020,
si le protocole d'accord prévoit une clause selon laquelle « la partie la plus diligente pourra porter l'affaire sur le plan judiciaire en vue de contraindre la partie défaillante à exécuter le protocole sous astreinte sans préjudice de dommages-intérêts éventuels », il s'agit d'une simple éventualité, mais non d'une obligation procédurale,
le protocole d'accord n'ayant pas été exécuté, elle retrouvait sa pleine liberté d'action,
le rapport d'expertise judiciaire a relevé d'autres désordres et a finalement chiffré les travaux de reprise à la somme de 39 711,28 euros TTC.
Selon ordonnance du 10 septembre 2024, la présidente de la chambre, en application de l'article 905 du code de procédure civile, a fixé d'office l'affaire à l'audience de plaidoirie du 2 mai 2025.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la fin de non-recevoir tirée de la chose jugée
Aux termes du protocole d'accord du 11 décembre 2019, la société Binkert s'est engagée à exécuter avant la mi-février 2020, une liste de travaux pour remédier aux désordres constatés afférents à des travaux qu'elle devait réaliser pour Mme [H].
Le 9 janvier 2020, Mme [H] a mis en demeure la société Binkert de lui payer la somme de 8 000 euros correspondant à la dégradation de la cheminée et du volet et au remboursement de l'acompte versé à hauteur de 6 350 euros HT faisant état de ce qu'elle ne souhaitait plus qu'elle intervienne pour le chantier du fait d'une perte de confiance.
Le 13 février 2020, Mme [H] a fait assigner la société Binkert, d'une part, devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Mulhouse, à fin d'expertise et, d'autre part, devant le tribunal judiciaire de Mulhouse à fin de condamnation à réaliser les travaux listés dans le protocole d'accord, cette assignation ayant été placée au tribunal le 24 février 2020.
Le protocole d'accord susvisé indique que la présente transaction est régie par les dispositions de l'article 2044 du code civil et fait donc obstacle à l'introduction ou la poursuite entre les parties d'une action en justice ayant le même objet conformément aux termes de l'article 2052 du même code.
Il prévoit, cependant, que :
sous réserve de sa bonne exécution, les parties renoncent mutuellement à tout recours concernant les points objets du présent accord,
à défaut d'exécution par l'une ou l'autre des parties des engagements mentionnés, la partie la plus diligente pourra porter l'affaire sur le plan judiciaire en vue de contraindre la partie défaillante à exécuter le présent protocole sous astreinte sans préjudice de dommages et intérêts éventuels.
La transaction, qui ne met fin au litige que sous réserve de son exécution, ne peut être opposée par l'une des parties que si celle-ci en a respecté les conditions.
En l'espèce, la société Binkert avait jusqu'à la mi-février pour s'exécuter. Elle ne justifie pas l'avoir fait avant cette date, la mise en demeure que lui a adressée Mme [H] le 9 janvier 2020, évoquant sa perte de confiance, n'ayant, au demeurant, été suivie d'aucune réponse, ni réaction de sa part.
En outre, le tribunal judiciaire de Mulhouse a été saisi au fond par assignation du 13 février 2020, placée le 24 février 2020, soit au-delà de la mi-février.
Dès lors, les clauses du procès-verbal de transaction relatives à sa non-exécution trouvent à s'appliquer, de sorte que Mme [H], à défaut d'exécution de la transaction par la société Binkert a retrouvé son droit d'agir à l'encontre de cette dernière, l'autorité de la chose jugée ne lui étant, de ce fait, plus opposable.
Il y a donc lieu de rejeter la fin de non-recevoir soulevée de ce chef et de confirmer l'ordonnance entreprise.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription
Aux termes des dispositions de l'article 1792-6 du code civil, l'entrepreneur est tenu pendant un délai d'un an à compter de la réception à la garantie de parfait achèvement, laquelle responsabilité s'étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l'ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux révélés postérieurement à la réception.
L'assignation du 13 février 2020 devant le tribunal judiciaire de Mulhouse tend à voir condamner la société Binkert à effectuer les travaux prévus dans le protocole d'accord au visa des articles 1792-6 et suivants du code civil, Mme [H] y développant des moyens relatifs à la garantie de parfait achèvement.
Cette assignation renvoie clairement au protocole transactionnel établi le 11 décembre 2019, soit dans le délai d'un an à compter du procès-verbal de réception établi le 20 février 2019, lequel protocole porte sur huit désordres incluant certains des désordres énumérés au procès-verbal de réception qui fait état de quatorze réserves.
Considérant que ladite assignation a été délivrée dans le délai d'un an suivant tant le procès-verbal de réception, il apparaît que, s'agissant des huit désordres visés au protocole transactionnel, l'action de Mme [H] n'est pas prescrite et que ses demandes sont donc recevables.
En revanche, aux termes de ses conclusions datées du 2 mai 2023 déposées devant le tribunal judiciaire de Mulhouse, dans le cadre de la présente affaire, Mme [H], au visa des dispositions de l'article 1792-6 du code civil sollicite la condamnation de la société Charpente Artisanale Binkert à lui payer la somme de 39 711,28 euros TTC correspondant au chiffrage des travaux de reprise fait par l'expert judiciaire, l'analyse de son rapport établi le 16 novembre 2021 permettant de constater qu'il liste quinze désordres, malfaçons et non-conformités déjà mis en exergue et dans le procès-verbal de réception et dans les rapports d'expertise du 4 juin 2019 et du 17 décembre 2019 lesquels sont des rapports d'expertise « Protection juridique ».
S'agissant de ces sept désordres supplémentaires, Mme [H] ayant fait assigner la société Charpente Artisanale Binkert en référé expertise le 13 février 2020, le délai d'un an pour agir, lequel est de forclusion, a été interrompu jusqu'à la date du 23 octobre 2020, date de l'ordonnance ayant ordonné une expertise ; Mme [H] avait donc jusqu'au 23 octobre 2021 pour formuler des demandes au titre de la garantie de parfait achèvement ; or, ses conclusions datant du 2 mai 2023, son action est prescrite et ses demandes relatives à ces sept désordres sont irrecevables.
L'ordonnance entreprise est donc infirmée de ce chef.
Sur les dépens et les frais de procédure non compris dans les dépens
L'ordonnance entreprise est infirmée en ce qu'elle a condamné la société Charpente Artisanale Binkert au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'elle l'a condamnée aux dépens de l'incident. Elle est confirmée pour le surplus.
Chaque partie est condamnée à supporter la charge de ses propres dépens tant en premier ressort dans la procédure d'incident qu'à hauteur d'appel.
Les demandes d'indemnités fondées sur l'article 700 du code de procédure civile formulées par les parties pour leurs frais de procédure non compris dans les dépens exposés tant en premier ressort qu'à hauteur d'appel sont rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant, publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré :
INFIRME l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Mulhouse du 13 juin 2024 en ce qu'elle a :
rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la SARL Charpente Artisanale Binkert ;
condamné la SARL Charpente Artisanale Binkert au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamné la SARL Charpente Artisanale Binkert aux dépens de l'incident ;
LE CONFIRME pour le surplus, dans les limites de l'appel ;
Statuant de nouveau sur les seuls points infirmés et y ajoutant :
DECLARE recevable l'action de Mme [L] [H] au titre de la garantie de parfait achèvement portant sur les huit désordres visés dans le protocole d'accord régularisé par elle et la SARL Charpente Artisanale Binkert le 11 décembre 2019 ;
DECLARE irrecevable l'action de Mme [L] [H] sur le fondement de la garantie de parfait achèvement concernant les autres désordres visés dans ses conclusions datées du 2 mai 2023 soutenues devant le tribunal judiciaire de Mulhouse dans le cadre de la procédure RG n°22/00527 ;
CONDAMNE Mme [L] [H] à supporter la charge de ses propres dépens exposés dans la procédure d'incident en premier ressort et à hauteur d'appel ;
CONDAMNE la SARL Charpente Artisanale Binkert à supporter la charge de ses propres dépens exposés dans la procédure d'incident en premier ressort et à hauteur d'appel ;
REJETTE les demandes de Mme [L] [H] fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais de procédure non compris dans les dépens exposés en première instance et à hauteur d'appel ;
REJETTE la demande de la SARL Charpente Artisanale Binkert fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais de procédure non compris dans les dépens exposés à hauteur d'appel.
Le cadre-greffier, La présidente,