CA Saint-Denis de la Réunion, ch. com., 30 septembre 2025, n° 24/00724
SAINT-DENIS DE LA RÉUNION
Arrêt
Autre
Arrêt N°25/
CB
N° RG 24/00724 - N° Portalis DBWB-V-B7I-GB7L
[V]
C/
[I]
S.E.L.A.R.L. [K]
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
ARRÊT DU 30 SEPTEMBRE 2025
Chambre commerciale
Appel d'un jugement rendu par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT-DENIS en date du 28 FEVRIER 2024 suivant déclaration d'appel en date du 14 JUIN 2024 rg n°: 22/03537
APPELANT :
Monsieur [C] [G] [Y] [V]
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentant : Me Guillaume jean hyppo DE GERY de la SELARL GERY-SCHAEPMAN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
INTIMEES :
Madame [L] [I] épouse [H]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentant : Me Thierry GANGATE de la SELARL GANGATE ET MARGERIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
S.E.L.A.R.L. [K], Mandataires judiciaires, domiciliée au [Adresse 5] à [Localité 9], prise en la personne de Maître [D] [K], Mandataire Judiciaire, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de l'association (Loi 1901) ASSOCIATION [8], dont le siège est sis [Adresse 4] à [Localité 10], déclarée à la Préfecture de la Réunion et inscrite sous le numéro Siren [N° SIREN/SIRET 2] désignée à ces fonctions par jugement rendu le 16 décembre 2019 par le Tribunal de Grande Instance de Saint Denis
[Adresse 5]
[Localité 9]
Représentant : Me Sophie LE COINTRE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉBATS : en application des dispositions des articles 778, 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 18 Juin 2025 devant la cour composée de :
Président : Madame Séverine LEGER, Conseillère
Conseiller : Madame Claire BERAUD, Conseillère
La présidente a indiqué que l'audience sera tenue en double rapporteur. Les parties ne s'y sont pas opposées.
A l'issue des débats, la présidente a indiqué que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition le 30 Septembre 2025.
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Madame Séverine LEGER, Conseillère
Conseiller : Madame Claire BERAUD, Conseillère
Conseiller : Madame Anne-Charlotte LEGROIS, Vice-présidente placée à la cour d'appel de Saint-Denis par ordonnance de Madame la Première Présidente
Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 30 Septembre 2025.
Greffiere lors des débats et de la mise à disposition : Madame Nathalie BEBEAU, Greffière.
* * *
LA COUR
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
L'association [8] a été créée en 1996 par M. [C] [V] avec pour objet la mise en place d'actions de formation pour adultes et le développement local par le biais d'actions d'accompagnement à l'éducation, respect de l'environnement à destination d'un public en difficulté.
Elle recevait des subventions de l'Etat, du Conseil général, de la Ville de [Localité 9] et de l'OPCA (organisme paritaire collecteur agréé chargé de redistribuer les obligations financières versées par les entreprises au titre de la formation professionnelle).
Par déclaration du 16 avril 2013, l'association [8] a déclaré être en état de cessation des paiements. Par jugement du 22 avril 2013, le tribunal de grande instance de Saint-Denis a ouvert une procédure de redressement judiciaire à son égard et désigné Maître [G] [Z] en qualité d'administrateur judiciaire. Le passif a été fixé à la somme de 905 926,43 euros.
Aux termes d'un contrat de travail à durée indéterminée en date du 31 juillet 2013, Mme [L] [I] épouse [H] était engagée par l'association en qualité de directrice.
Par jugement du 7 avril 2014, le tribunal de grande instance a arrêté un plan de redressement par continuation pour une durée de huit années et a désigné Maître [Z] en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
Le 4 octobre 2019, celui-ci a saisi le tribunal d'une requête aux fins de résolution du plan et, par jugement du 16 décembre 2019, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte. La date de cessation des paiements a été fixée au 1er octobre 2018 et la poursuite de l'activité autorisée jusqu'au 31 décembre 2019. Le passif était fixé à la somme de 1 512 899,66 euros.
Par acte de commissaire de justice du 14 décembre 2022, la SELARL [K] a assigné M. [V] et Mme [I] aux fins de les voir condamner solidairement à payer la somme de 1 281 000 euros au titre de l'insuffisance d'actif avec exécution provisoire à hauteur de 30% du quantum de la condamnation et voir prononcer leur faillite personnelle pour une durée de 15 ans avec exécution provisoire.
Par jugement réputé contradictoire du 28 février 2024 signifié à M. [V] le 5 juin 2024, le tribunal judiciaire de Saint-Denis a :
- débouté la SELARL [K] prise en la personne de Maître [D] [K] en qualité de mandataire-liquidateur de l'association [8] de ses demandes de condamnations au titre de l'insuffisance d'actif et au titre de la faillite personnelle ou interdiction de gérer formées à l'encontre de Mme [L] [I] épouse [H],
- condamné M. [C] [V] à payer la somme de 1 000 000 euros à la SELARL [K] prise en la personne de Maître [D] [K] ès qualité de liquidateur judiciaire de l'association [8] au titre de la responsabilité pour insuffisance d'actif, avec exécution provisoire à hauteur de 20% de ce montant,
- prononcé à l'encontre de M. [C] [V] une mesure d'interdiction de gérer d'une durée de cinq ans avec exécution provisoire,
- dit qu'en application de l'article 768-5° du Code de procédure pénale, la présente décision sera mentionnée au casier judiciaire, qu'elle fera l'objet à la diligence du greffier des publicités prévues à l'article R. 621-8 du Code de commerce et qu'elle sera adressée aux autorités mentionnées à l'article R.621-7 du même code,
- dit qu'en application de l'article R. 651-3 du Code de commerce, le présent jugement sera communiqué par le greffe à Mme la procureure de la République,
- condamné M. [C] [V] au paiement des entiers dépens
- condamné la SELARL [K] prise en la personne de Maître [D] [K] en qualité de mandataire-liquidateur de l'association [8] à payer à Mme [L] [I] épouse [H] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [C] [V] à payer à la SELARL [K] prise en la personne de Maître [D] [K] ès qualité de mandataire-liquidateur de l'association [8] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il a retenu que :
- Mme [I] n'ayant pas eu la qualité de gérante de fait de l'association, elle ne pouvait être poursuivie au titre de l'insuffisance d'actif ou de fautes de gestion justifiant une sanction personnelle,
- l'insuffisance d'actif s'élevait à la somme de 1 281 610,74 euros,
- M. [V] a commis des fautes de gestions en poursuivant abusivement une exploitation déficitaire, en retenant le précompte salarial et en ne déclarant pas l'état de cessation des paiements dans le délai légal de 45 jours,
- que les trois fautes retenues étaient significatives mais que pour fixer le montant de la sanction pécuniaire il devait être tenu compte d'une part de ce que le non-respect de ses engagements par la région Réunion à hauteur de 165 626 euros avait constitué un facteur aggravant les difficultés économiques de l'association mais également que M. [V], du fait de sa non comparution, n'avait pas transmis d'éléments sur sa situation personnelle et ses facultés contributives,
- le liquidateur judiciaire n'apportant pas la preuve de ce qu'il aurait poursuivi l'exploitation abusive dans son intérêt personnel ni qu'il aurait disposé des biens de l'association comme des siens propres il ne pouvait être prononcé une faillite personnelle, mais qu'en revanche il était établi qu'il n'avait pas déclaré la cessation des paiements dans le délai légal ce qui justifiait qu'il fasse l'objet d'une interdiction de gérer d'une durée de 5 ans.
Par déclaration du 14 juin 2024, M. [V] a interjeté appel de cette décision intimant le mandataire judiciaire et Mme [I].
Par ordonnance de référé du 3 septembre 2024, le premier président de la cour d'appel de Saint-Denis a déclaré irrecevable la demande de suspension de l'exécution provisoire attachée au jugement rendu le 28 février 2024.
L'affaire a été orientée devant la chambre civile de la cour d'appel de Saint-Denis qui l'a renvoyée à la mise en état le 17 juin 2024, avant de faire l'objet d'un renvoi devant la chambre commerciale de la même cour par ordonnance de redistribution rendue le 25 octobre 2024.
L'appelant a notifié ses conclusions par voie électronique le 13 septembre 2024, Mme [I] le 14 octobre 2024 et la SELARL [K] le 14 octobre 2024.
Par ordonnance du 17 février 2025, la procédure a été clôturée avec effet différé au 2 juin 2025 et l'affaire fixée à l'audience de circuit court du 18 juin 2025.
Par conclusions d'incident notifiées électroniquement le 2 juin 2025, la SELARL [K] a signalé que l'appelant avait conclu la veille de la date de clôture, jour chômé et veille d'un jour férié. Il a été fait droit à sa demande de révocation de l'ordonnance de clôture par une décision rendue le 5 juin 2025 qui en a fixé la nouvelle date au 16 juin 2025 et a maintenu la date d'audience de plaidoirie à l'audience du 18 juin 2025
Le dossier a été communiqué au ministère public qui, selon son avis du 13 juin 2025 communiqué aux parties par voie électronique, a requis la confirmation du jugement.
A l'issue de l'audience tenue le 18 juin 2025 la décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe le 30 septembre 2025.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET DES MOYENS
Dans ses dernières conclusions d'appelant n°5 notifiées par voie électronique le 1er juin 2025, M. [V] demande à la cour de :
- annuler la décision de première instance en qu'elle a manqué de respecter la formalité substantielle et d'ordre public de recueillir le rapport du juge-commissaire et de statuer à nouveau au vu du rapport du juge-commissaire,
Subsidiairement,
- infirmer la décision de première instance en toutes ses dispositions le concernant et statuant à nouveau débouter la SELARL [D] [K], prise en la personne de Maître [D] [K], ès qualités de liquidateur judiciaire de l'association [8] de toutes ses demandes,
- infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la mention de la sanction à son casier judiciaire de l'interdiction de gérer,
- si la cour devait le condamner pour insuffisance d'actif, ordonner la dispense d'inscription,
Subsidiairement, prenant en compte la situation de bénévole et sa situation patrimoniale personnelle, ainsi que du principe de proportionnalité ramener la sanction pécuniaire à de plus justes proportions et à cet effet :
- le condamner au paiement d'une somme n'excédant pas 2,5% du montant auquel il a été condamné en première instance,
Très subsidiairement, limiter le montant de la condamnation à la somme de 24 296,53 euros qu'il s'est vu saisir jusqu'à présent, limitation en application des principes de proportionnalité et de réalisme,
- le condamner au paiement de la somme de 24 296,53 euros.
- condamner la SELARL [F] et [D] [K], prise en la personne de Maître [D] [K], ès qualités de liquidateur judiciaire de l'association [8] au paiement de la somme de 5967,50 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
L'appelant fait valoir que :
- le jugement est nul, faute d'avoir été rendu au vu d'un rapport du juge-commissaire,
- la cour d'appel ne saurait statuer sans ce rapport sans violer la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés qui garantit le droit de propriété, alors que la règle instituée par l'article R.662-12 du code de commerce est d'ordre public en première instance et que l'effet dévolutif induit que ce rapport soit exigé en appel, que la procédure en responsabilité pour insuffisance d'actif entre dans le champ de la matière pénale ce qui justifie que des garanties procédurales accrues soient garanties à la personne mise en cause,
- il est incohérent de lui reprocher la poursuite abusive d'une exploitation déficitaire en dépit des dettes alors qu'il a été autorisé par le tribunal à poursuivre l'activité pendant 12 jours, que pendant la période d'exécution du plan il a recherché et obtenu de nouvelles sources de financement en élargissant les statuts de l'association, que le commissaire au plan démontre que la région n'a pas payé ce qui était dû, et que la dépendance de l'association vis-à-vis des subventions était connue dès l'ouverture du plan de redressement qui a été exécuté pour plus de la moitié,
- il ne peut lui être reproché de ne pas avoir envisagé une cessation d'activité au premier semestre 2018 alors que le tribunal n'a pas considéré que l'association était en cessation des paiements avant le 1er octobre 2018 et que le commissaire à l'exécution du plan, informé des difficultés, n'a pas jugé utile de l'inciter à déclarer d'état de cessation des paiements ou à saisir le tribunal d'une requête en résolution du plan,
- il n'a pas commis de faute de gestion au titre de l'octroi d'avantages injustifiés à Mme [I] ou des achats de petit équipement et dépense de réparation sans lien avec l'activité de l'association,
- tous les faits qui pourraient lui être reprochés sont constitutifs de simples négligences ou résultent de l'attitude des financeurs publics, éléments de nature à l'exonérer de sa responsabilité, - la sanction financière prononcée est disproportionnée par rapport à ses facultés contributives,
- en application de l'article L.651-2 alinéa 1 in fine du code de commerce il doit être tenu compte de sa qualité de bénévole pour apprécier les faits reprochés,
- en l'absence de faute de gestion, il ne peut être prononcé une interdiction de gérer, et, si cela était le cas la sévérité de la sanction justifierait une dispense de publication.
Dans ses seules et uniques conclusions d'intimé n°1 notifiées par voie électronique le 14 octobre 2024, Mme [I] demande à la cour de confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel et par suite de:
- rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires à son encontre,
- condamner M. [V] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [V] aux entiers dépens.
L'intimée fait valoir que :
- n'ayant pas exercé en toute indépendance des actes positifs de gestion et de direction de l'association elle n'était dès lors pas dirigeante de fait de l'association,
- elle n'a ainsi pas participé à l'insuffisance d'actif, au contraire elle a tenté recouvrer les créances de l'association et de trouver de nouveaux marchés pour en pérenniser l'activité,
- c'est le défaut de paiement par la Région Réunion qui a causé l'insuffisance d'actif dans la mesure où les seuls retards de paiement au titre de l'exercice 2018 auraient suffi à combler le passif social de l'association pour cet exercice, dont le précompte salarial et où les marchés annuels remportés par l'association pour l'année 2019 auraient suffi à assurer une stabilité financière et un bon paiement des échéances du plan si la région ne s'était pas montrée défaillante, il s'en déduit que la poursuite de l'activité de l'association ne saurait être regardée comme abusive,
- n'étant pas dirigeante de fait elle ne peut être sanctionnée par le prononcé d'une faillite personnelle, en outre elle n'a commis aucune faute de gestion ne le justifiant.
Dans ses dernières conclusions n°2 de l'intimée notifiées par voie électronique le 13 juin 2025 la SELARL [K] demande à la cour de :
- constater que l'appel est limité dans l'acte d'appel à une demande de réformation,
- constater que les conclusions de l'appelant régularisées dans le délai de l'article 905-2 du code de procédure civile se limitent également à une demande de réformation,
- dire que la cour n'est saisie d'aucune demande aux fins d'annulation du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Saint-Denis le 28 février 2024,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,
- débouter M. [V] de sa demande à ce qu'elle soit condamnée aux frais irrépétibles et aux dépens,
- débouter l'appelant de l'ensemble de toutes ses demandes, fin et prétentions,
- condamner M. [V] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, en ce compris le droit de timbre pour un montant de 225 euros.
L'intimée fait valoir que :
- la déclaration d'appel et les premières conclusions ont limité l'appel à une demande de réformation de la décision critiquée et non d'annulation, la cour n'est donc pas saisie d'une demande d'annulation, de surcroît, la demande d'annulation n'ayant pas été formulée dans le dispositif des conclusions régularisé le 30 septembre 2024, il n'a pas respecté le délai fixé par le code de procédure civile,
- l'insuffisance d'actif est certaine et s'élève à 1 282 610,74 euros,
- elle ne conteste pas l'appréciation du tribunal qui a considéré que Mme [I] n'était pas gérante de fait,
- M. [V] a, en revanche commis des fautes de gestion :
en poursuivant abusivement l'exploitation déficitaire de l'association générant un passif correspondant à 167% du passif admis à la première procédure,
en octroyant des avantages injustifiés à Mme [I] par des augmentations successives de sa rémunération pendant la période d'observation puis pendant l'exécution du plan alors que l'association ne parvenait pas à honorer ses charges courantes, outre une prime exceptionnelle correspondant à un mois de salaires, en restant passif face à l'achat de petits équipements sans utilité pour l'association, en ne déclarant pas l'état de cessation des paiements, dont la date a été fixée au 1er octobre 2018 dans le délai légal,en retenant le précompte salarial prélevé sur le salaire des employés,
- ces fautes de gestions ont contribué à l'insuffisance d'actif en creusant le passif, en alourdissant la masse salariale de manière inadaptée, en augmentant frauduleusement le passif sans avoir tiré d'enseignement de la première procédure collective en mettant en place des mesures correctives pour notamment ramener à de plus justes proportions la masse salariale, il doit dès lors être condamné au paiement d'une somme d'un million,
- l'augmentation frauduleuse du passif par l'absence de reversement des précomptes salariaux pendant plusieurs années et l'omission volontaire de déclarer de cessation des paiements dans le délai légal fondent et justifient le prononcé d'une mesure d'interdiction de gérer pendant une durée de 5 ans.
Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de la demande en annulation du jugement
A titre préliminaire il y a lieu de préciser qu'il sera fait application des dispositions du code de procédure civile dans leur version antérieure à l'entrée en vigueur du décret n°2023-1391 du 29 décembre 2023 portant simplification de la procédure d'appel en matière civile entré en vigueur le 1er septembre 2024, la déclaration d'appel ayant été interjetée le 14 juin 2024.
En application des articles 562 et 901 4° du code de procédure civile corrélés aux articles 542 et 954 du même code, la déclaration d'appel qui mentionne les chefs de dispositif du jugement critiqués délimite l'étendue de l'effet dévolutif de l'appel quand les conclusions, par l'énoncé dans leur dispositif de la demande d'infirmation ou d'annulation du jugement, déterminent, quant à elles, la finalité de l'appel, qui tend à l'annulation ou à la réformation du jugement, dans les limites de la dévolution opérée par la déclaration d'appel.
Il en découle que lorsque la déclaration d'appel vise l'ensemble des chefs de dispositif du jugement, l'appelant a la faculté de solliciter dans ses conclusions, soit la réformation, soit l'annulation de cette décision.
En l'espèce, l'appelant a mentionné l'intégralité des chefs du dispositif du jugement critiqué dans sa déclaration d'appel et, dans ses conclusions d'appelant n°3 notifiées par voie électronique le 20 janvier 2025, il a sollicité pour la première fois l'annulation de la décision de première instance au motif qu'elle avait manqué de respecter la formalité substantielle et d'ordre public de recueillir le rapport du juge-commissaire.
Au regard des textes susvisés il lui était donc possible, après avoir sollicité l'infirmation de la totalité des chefs du dispositif du jugement dans sa déclaration d'appel, de solliciter l'annulation de la décision de première instance dans ses conclusions. Néanmoins, comme le soulève l'intimée, il ne l'a pas fait dans le délai imparti par le code de procédure civile.
En effet, en application des articles 908 et 910-1 du code de procédure civile, ce sont les conclusions notifiées dans les trois mois après la déclaration d'appel qui déterminent l'objet du litige. Il s'en déduit que si l'objet de l'appel pouvait être précisé par l'appelant ultérieurement à la déclaration d'appel, dans la limite de la dévolution opérée par la déclaration d'appel, l'appelant aurait dû solliciter l'annulation du jugement avant le 14 septembre 2024. Or au terme du dispositif de ses conclusions notifiées le 13 septembre 2024, cela n'a pas été le cas.
Par conséquent, sa demande en annulation sera déclarée irrecevable et la cour d'appel est seulement saisie par l'appelant d'une demande d'infirmation du jugement critiqué, outre les demandes incidentes des intimées.
Sur la responsabilité pour insuffisance d'actif et la sanction personnelle de Mme [I]
L'appelant a intimé Mme [I] mais ne formule aucune prétention à son encontre dans le dispositif de ses conclusions. En application des dispositions de l'article 954 in fine du code de procédure civile, il est donc réputé s'approprier les motifs du jugement de première instance dont il est rappelé qu'il a débouté le liquidateur judiciaire de ses demandes de condamnation au titre de l'insuffisance d'actif, la faillite personnelle ou de l'interdiction de gérer formée à l'encontre cette dernière.
Mme [I] sollicite la confirmation de cette décision.
Le mandataire judiciaire, intimé, n'a pas formé d'appel incident sur ce point indiquant dans le corps de ses conclusions ne pas entendre remettre en cause l'appréciation du tribunal sur ce chef et sollicitant dans leur dispositif la confirmation du jugement dont appel en toutes ses dispositions.
Par conséquent, la décision de première instance sera confirmée en ce qu'elle n'a pas retenu la responsabilité de l'intimée pour insuffisance d'actif et n'a pas prononcé de sanction personnelle à son encontre.
Sur la responsabilité pour insuffisance d'actif de M. [V]
- Sur l'insuffisance d'actif
L'insuffisance d'actif s'établit à la différence entre le montant du passif admis et correspondant à des créances antérieures au jugement d'ouverture et le montant de l'actif de la personne morale débitrice tel qu'il résulte des réalisations effectuées en liquidation judiciaire. Le passif postérieur non éligible au privilège de l'article L. 622-17 et le passif social postérieur ainsi que les frais liés à la procédure collective sont exclus du calcul, de même que ceux engendrés par une poursuite d'activité provisoire.
Le liquidateur peut exercer une action en responsabilité pour insuffisance d'actif dès lors que celle-ci, même non chiffrée, est certaine en son principe et certaine pour un montant incontestable.
Le tribunal a retenu que l'insuffisance d'actif s'élevait à 1 281 610,74 euros. Le liquidateur judiciaire ne fait pas valoir d'évolution concernant le montant du passif retenu à titre définitif à la somme de 1 512 323,16 euros ni concernant l'actif chiffré à 230 712,42 euros. Aucune contestation n'étant formulée sur ces chiffres, la somme retenue par le tribunal mixte de commerce le sera également en cause d'appel.
- Sur les fautes de gestions excédant une simple négligence et le lien de causalité
La faute de gestion susceptible d'engager la responsabilité pour insuffisance d'actif doit avoir été commise dans l'administration de la société et prouvée par le demandeur. Elle peut également résulter d'une abstention. Elle doit être imputable au dirigeant poursuivi, pour des faits commis durant l'exercice de ses fonctions et ne peut résulter d'une simple négligence. Un intérêt personnel n'est pas exigé.
En vertu du principe de proportionnalité, si plusieurs fautes de gestion sont retenues, il importe que chacune d'elles soit également justifiée.
Un lien de causalité doit être établi entre la faute de gestion et l'insuffisance d'actif. Si plusieurs fautes de gestion sont reprochées, le lien de causalité doit être établi pour chacune d'elles. La faute doit avoir seulement contribué à l'insuffisance d'actif. Il n'est pas nécessaire que la faute soit la cause directe et exclusive du dommage.
En l'espèce, en application de l'article L653-4 du code de commerce le tribunal a retenu les éléments suivants caractérisant des fautes de gestion : la poursuite abusive d'une exploitation déficitaire, le retard dans la déclaration de la cessation des paiements, la retenue du précompte salarial.
L'appelant conteste avoir commis une quelconque faute de gestion.
L'intimée estime que les fautes retenues par le jugement à l'encontre de l'appelant sont constituées, outre celles d'avoir octroyé des avantages injustifiés à Mme [I], d'être resté passif face à des dépenses sans lien avec l'activité de l'association et que ces fautes ont contribué à l'insuffisance d'actif de la société. Elles seront examinées successivement.
- sur la poursuite abusive d'une exploitation déficitaire
L'association a déclaré l'état de cessation des paiements une première fois le 16 avril 2013 et a pu faire l'objet d'un plan de continuation prévu sur une durée de huit ans à compter du 7 avril 2014. Le passif était alors évalué à 949 454,35 euros. Néanmoins, les échéances de ce plan n'ont pas été honorées et il a été dénoncé par le commissaire à l'exécution du plan. Le passif avait augmenté à la somme de 1 113 094,62 euros. L'analyse des déclarations de créances met en lumière que dès le troisième trimestre après la mise en place du plan les cotisations dues à la CRR n'étaient pas payées et que celles dues à la CGSS ne l'ont plus été à compter du mois de novembre 2016.
L'activité déficitaire s'est donc poursuivie au cours du plan, l'impasse sur les cotisations dues aux organismes sociaux permettant d'en honorer les échéances et de maintenir artificiellement en vie l'association au détriment du gage commun des créanciers qui, compte tenu de l'augmentation du passif, ont perdu la possibilité de voir la totalité de leurs créances honorée. Le montant du passif suffit à démontrer le caractère abusif de la poursuite de l'activité de la société dans ce contexte. La faute de gestion reprochée à l'appelant est ainsi caractérisée.
Ce dernier ne peut se retrancher derrière le fait que la poursuite de l'activité avait été autorisée pendant une durée de douze jours par le tribunal mixte de commerce pour affirmer que la faute reprochée n'est pas constituée dans la mesure où il résulte de la requête en résolution présentée par le commissaire à l'exécution du plan qu'il s'agissait ainsi de permettre aux 3 400 bénéficiaires de l'association de ne pas être privés de manière immédiate des accompagnements dont ils profitaient, aux partenaires financiers de relancer des appels d'offres nécessaires pour terminer les prestations et aux salariés de s'organiser en vue de la recherche d'un nouvel emploi ou d'une reconversion professionnelle.
De même, il convient de rappeler que malgré l'ampleur des difficultés c'est le commissaire à l'exécution du plan qui a saisi le tribunal mixte de commerce d'une requête en résolution et non l'appelant.
En outre, si la région s'est abstenue de verser les subventions attendues pour un montant de 216 520 euros en janvier 2019, cette somme n'aurait, quoi qu'il en soit, pas permis de faire face au passif, le liquidateur judiciaire rappelant qu'une nouvelle dette de 971 591 euros avait été générée après l'adoption du plan auprès des seuls organismes sociaux et fiscaux.
L'appelant était en lien avec le commissaire à l'exécution du plan. Bien qu'étant bénévole, il était tenu de veiller au respect de l'échéancier fixé et avait accès aux documents comptables. Il était ainsi parfaitement informé de ce que l'exploitation de l'association était gravement déficitaire. Il résulte néanmoins de la requête en résolution du plan qu'il considérait encore en octobre 2019 pouvoir recouvrer des créances, percevoir des subventions et ainsi poursuivre l'activité. La date de cessation des paiements a finalement été fixée au 1er octobre 2018. L'appelant n'a pas tenu compte des éléments concrets démontrant que la situation était irrémédiablement obérée souhaitant maintenir l'activité de l'association coûte que coûte. Ce positionnement démontre que la faute commise excède la simple négligence.
Il en résulte que l'appelant a ainsi commis une faute de gestion excédant la simple négligence qui a eu pour résultat de contribuer à l'insuffisance d'actif en ce que notamment les créances des organismes sociaux ont considérablement été augmentées, aggravant le passif.
- sur l'absence de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal
L'article L.631-4 du code de commerce prévoit que l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire doit être demandée par le débiteur au plus tard dans les quarante-cinq jours qui suivent la cessation des paiements s'il n'a pas, dans ce délai, demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation.
L'appelant ne conteste pas les créances déclarées et le montant du passif définitif.
Le jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire du 16 décembre 2019 a fixé la date de cessation des paiements au 1er octobre 2018. En application du texte susvisé, la déclaration de cessation des paiements aurait dû être faite au plus tard le 15 novembre 2018. Elle a, en réalité, résulté de la saisine du tribunal mixte de commerce par le commissaire à l'exécution du plan. La faute de gestion susvisée est dès lors constituée.
Comme cela a été développé précédemment, bien qu'étant bénévole, l'appelant avait nécessairement connaissance de la situation critique de l'association, mais également conscience de la nécessité de se montrer vigilant et connaissait son obligation de déclarer la cessation des paiements si elle ne pouvait plus faire face à son passif exigible avec son actif disponible, une procédure collective étant déjà en cours. Son comportement ne peut, dès lors, être qualifié de simple négligence et constitue une faute de gestion caractérisée.
Cette faute a, enfin, contribué à l'augmentation du passif dans la mesure où entre la date à laquelle la déclaration de l'état de cessation des paiements aurait dû être déposée et celle à laquelle elle l'a réellement été l'association n'a cessé d'accumuler un passif, en particulier un passif social et fiscal.
- sur la retenue du précompte salarial
Il n'est pas contesté que les cotisations dues aux organismes sociaux et notamment à la CGSSR ne lui ont pas été reversées.
Néanmoins, si la retenue du précompte salarial constitue une faute de gestion dans la mesure où son versement aux organismes sociaux constitue une obligation légale pour le dirigeant, le lien de causalité entre ces faits et l'insuffisance d'actif n'est pas démontré car ces sommes constituaient, dès leur exigibilité, une créance participant au passif de la société quelle que soit la date de leur reversement. En l'absence de pénalités mises à la charge de la société en sanction de leur retenue, il n'est pas établi que le passif ait été augmenté.
En conséquence cette faute ne sera pas retenue comme ayant contribué à l'insuffisance d'actif, elle consiste plutôt en un élément constitutif de la faute de poursuite abusive de l'exploitation déficitaire.
- sur l'octroi d'avantages injustifiés et l'achat de matériel sans lien avec l'activité de l'association
Comme l'a relevé à juste titre le premier juge, les pièces versées au dossier suffisent à démontrer que l'augmentation de la rémunération de Mme [I] était justifiée par son investissement au sein de l'association et la nécessité d'exercer des tâches effectuées notamment par une salariée en congé maladie longue durée.
Les achats contestés qui s'élèvent à une somme de 2 201 euros sont de moindre valeur et ont été justifiés tant dans leur montant que comme étant nécessaires à l'activité de l'association, permettant aux formateurs de pouvoir être hébergés sur le lieu même de la formation en cas de nécessité du service. Mme [I] étant mise hors de cause, l'intimée reproche à ce titre une passivité de l'appelant quant à l'engagement de ces dépenses.
Néanmoins ces sommes étant justifiées par l'intérêt de l'association, aucune faute ne peut être relevée à ce titre à l'encontre de ce dernier.
Sur la sanction pécuniaire
Un dirigeant peut être condamné à supporter la totalité de l'insuffisance d'actif même si la faute commise n'en est que l'une des causes. Le tribunal dispose d'un pouvoir souverain, dans la limite de l'insuffisance d'actif, pour fixer le montant de la condamnation. Le montant de la condamnation doit être proportionné au nombre et à la gravite des fautes de gestion que le dirigeant a commises. Il doit également être tenu compte des facteurs économiques qui peuvent conduire à la défaillance des entreprises ainsi que les risques inhérents à leur exploitation et de la situation personnelle du dirigeant et ses facultés contributives en application de ce principe de proportionnalité.
En l'espèce, l'insuffisance d'actif est évaluée à une somme totale de 1 281 610,74 euros et l'appelant a commis deux fautes de gestion, ce qui justifie qu'il soit condamné à en supporter une partie sous réserve du respect des principes d'individualisation de la sanction et de proportionnalité.
Il fait valoir qu'il vit en couple, est enseignant dans la même école hôtelière depuis 32 ans. Il justifie percevoir une rémunération mensuelle de 2 744 euros. Il est locataire d'un appartement à loyer modéré pour un loyer mensuel de 533,23 euros. Il rembourse un crédit à la consommation à hauteur de 425,52 euros. Il précise qu'une saisie-attribution a été réalisée sur ses comptes bancaires et il affirme avoir ainsi déjà versé la somme de 24 296,53 euros au titre de la condamnation prononcée en première instance, assortie pour partie de l'exécution provisoire.
Il résulte de ces éléments que la condamnation au paiement d'une somme de 1 000 000 d'euros est disproportionnée au regard des ressources et charges de l'appelant, de la gravité des fautes commises, étant rappelé que seules deux fautes sur les cinq dénoncées par le liquidateur judiciaire ont été retenues, et de sa qualité de bénévole au sein de l'association.
Dès lors, M. [V] sera condamné à supporter l'insuffisance d'actif à hauteur de 24 296,53 euros, le jugement dont appel étant infirmé sur ce point.
Sur la sanction personnelle
L'article L. 653-8 du même code dispose que dans les cas prévus aux articles L. 653-3 à L. 653-6, le tribunal peut prononcer, à la place de la faillite personnelle, l'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci.
Cet article prévoit également que l'interdiction de gérer peut également être prononcée à l'encontre de toute personne mentionnée à l'article L. 653-1 qui a omis sciemment de demander l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la cessation des paiements, sans avoir, par ailleurs, demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation.
La faillite personnelle, tout comme l'interdiction de gérer, sont des sanctions professionnelles et les juges du fond disposent d'un pouvoir souverain d'option. Du fait de leur nature de sanctions, elles sont soumises aux principes de nécessité et de proportionnalité des peines, ce qui impose qu'elles soient motivées dans leur principe et leur quantum, la motivation devant prendre en compte la gravité des fautes et la situation personnelle de l'intéressé. A l'instar de ce qu'il en est de l'action pour insuffisance d'actif, si plusieurs fautes sont reprochées, chacune d'elle doit être justifiée.
Le tribunal mixte de commerce a prononcé une interdiction de gérer d'une durée de cinq ans à l'encontre de l'appelant au motif qu'il n'a pas déclaré la cessation des paiements dans le délai légal. Ce dernier demande l'infirmation de cette condamnation et l'intimée la confirmation.
Il a été démontré que l'appelant avait nécessairement connaissance de la situation critique de l'association, de ce que très rapidement après le début du plan de redressement les cotisations sociales n'étaient à nouveau plus payées alors que participant à la procédure collective ouverte en 2013 il avait conscience de la nécessité de se montrer vigilant et de l'obligation de déclarer la cessation des paiements si l'association ne pouvait plus faire face à son passif exigible avec son actif disponible. Il n'a ainsi sciemment pas déclaré l'état de cessation des paiements dans le délai légal. Il encourt de ce fait le prononcé d'une interdiction de gérer.
Néanmoins, les éléments de la procédure mettent en lumière qu'il s'est investi bénévolement dans l'activité de l'association, 'uvrant pour le bien commun. S'il a commis des fautes ayant des conséquences pour la collectivité des créanciers, les éléments de personnalité, ses antécédents et sa situation professionnelle actuelle ne témoignent pas d'une dangerosité avérée pour l'ordre public économique qui justifierait qu'une interdiction de gérer soit prononcée. En l'espèce, la sanction pécuniaire s'avérant suffisamment dissuasive de réitérer un tel comportement, il n'apparaît ni nécessaire, ni proportionné de prononcer une mesure d'interdiction de gérer à l'encontre de l'appelant.
Le jugement critiqué sera, dès lors, infirmé sur ce point.
Sur les autres demandes
Partie succombante, M. [V] sera condamné à régler les entiers dépens, de première instance et d'appel sur le fondement des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.
Il sera également condamné à régler la somme de 2 000 euros à Mme [I] au titre de l'article 700 du code de procédure civile destinée à compenser les frais irrépétibles que celle-ci a dû engager dans le cadre de l'instance d'appel à laquelle elle a été attraite par les soins de l'appelant.
L'équité commande en revanche de ne pas faire application des dispositions de ce texte au profit de la SELARL [K] qui sera déboutée de sa prétention de ce chef en cause d'appel.
M. [V] qui succombe sera également débouté de sa prétention du même chef.
Le jugement sera en revanche confirmé s'agissant des sommes allouées par le premier juge au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Déclare la demande d'annulation du jugement déféré à la cour d'appel irrecevable ;
Infirme le jugement déféré dans l'intégralité de ses dispositions sauf :
- en ce qu'il a débouté la SELARL [K] prise en la personne de Maître [D] [K] ès qualités de mandataire liquidateur de l'association [8] de ses demandes de condamnation au titre de l'insuffisance d'actif et au titre de la faillite personnelle ou interdiction de gérer formées à l'encontre de Mme [N] [I] épouse [H] ;
- en ce qu'il a condamné M. [C] [V] au paiement des entiers dépens et au paiement de la somme de 2 000 euros à la SELARL [K] ès qualités de mandataire liquidateur de l'association [8] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Condamne M. [C] [V] à payer la somme de 24 296,53 euros à la SELARL [K], prise en la personne de Maître [D] [K], en qualité de liquidateur judiciaire de l'association [8], au titre de sa responsabilité pour insuffisance d'actif ;
Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une interdiction de gérer à l'encontre de M. [C] [V] ;
Y ajoutant,
Condamne M. [C] [V] à régler les entiers dépens de l'appel ;
Condamne M. [C] [V] à payer la somme de 2 000 euros à Mme [L] [I] épouse [H] au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
Déboute la SELARL [K] ès qualités et M. [C] [V] de leur prétention respective au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Madame Séverine LEGER,Conseillère faisant fonction de Présidente de chambre, et par Madame Nathalie BEBEAU, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
CB
N° RG 24/00724 - N° Portalis DBWB-V-B7I-GB7L
[V]
C/
[I]
S.E.L.A.R.L. [K]
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
ARRÊT DU 30 SEPTEMBRE 2025
Chambre commerciale
Appel d'un jugement rendu par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT-DENIS en date du 28 FEVRIER 2024 suivant déclaration d'appel en date du 14 JUIN 2024 rg n°: 22/03537
APPELANT :
Monsieur [C] [G] [Y] [V]
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentant : Me Guillaume jean hyppo DE GERY de la SELARL GERY-SCHAEPMAN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
INTIMEES :
Madame [L] [I] épouse [H]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentant : Me Thierry GANGATE de la SELARL GANGATE ET MARGERIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
S.E.L.A.R.L. [K], Mandataires judiciaires, domiciliée au [Adresse 5] à [Localité 9], prise en la personne de Maître [D] [K], Mandataire Judiciaire, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de l'association (Loi 1901) ASSOCIATION [8], dont le siège est sis [Adresse 4] à [Localité 10], déclarée à la Préfecture de la Réunion et inscrite sous le numéro Siren [N° SIREN/SIRET 2] désignée à ces fonctions par jugement rendu le 16 décembre 2019 par le Tribunal de Grande Instance de Saint Denis
[Adresse 5]
[Localité 9]
Représentant : Me Sophie LE COINTRE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉBATS : en application des dispositions des articles 778, 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 18 Juin 2025 devant la cour composée de :
Président : Madame Séverine LEGER, Conseillère
Conseiller : Madame Claire BERAUD, Conseillère
La présidente a indiqué que l'audience sera tenue en double rapporteur. Les parties ne s'y sont pas opposées.
A l'issue des débats, la présidente a indiqué que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition le 30 Septembre 2025.
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Madame Séverine LEGER, Conseillère
Conseiller : Madame Claire BERAUD, Conseillère
Conseiller : Madame Anne-Charlotte LEGROIS, Vice-présidente placée à la cour d'appel de Saint-Denis par ordonnance de Madame la Première Présidente
Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 30 Septembre 2025.
Greffiere lors des débats et de la mise à disposition : Madame Nathalie BEBEAU, Greffière.
* * *
LA COUR
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
L'association [8] a été créée en 1996 par M. [C] [V] avec pour objet la mise en place d'actions de formation pour adultes et le développement local par le biais d'actions d'accompagnement à l'éducation, respect de l'environnement à destination d'un public en difficulté.
Elle recevait des subventions de l'Etat, du Conseil général, de la Ville de [Localité 9] et de l'OPCA (organisme paritaire collecteur agréé chargé de redistribuer les obligations financières versées par les entreprises au titre de la formation professionnelle).
Par déclaration du 16 avril 2013, l'association [8] a déclaré être en état de cessation des paiements. Par jugement du 22 avril 2013, le tribunal de grande instance de Saint-Denis a ouvert une procédure de redressement judiciaire à son égard et désigné Maître [G] [Z] en qualité d'administrateur judiciaire. Le passif a été fixé à la somme de 905 926,43 euros.
Aux termes d'un contrat de travail à durée indéterminée en date du 31 juillet 2013, Mme [L] [I] épouse [H] était engagée par l'association en qualité de directrice.
Par jugement du 7 avril 2014, le tribunal de grande instance a arrêté un plan de redressement par continuation pour une durée de huit années et a désigné Maître [Z] en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
Le 4 octobre 2019, celui-ci a saisi le tribunal d'une requête aux fins de résolution du plan et, par jugement du 16 décembre 2019, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte. La date de cessation des paiements a été fixée au 1er octobre 2018 et la poursuite de l'activité autorisée jusqu'au 31 décembre 2019. Le passif était fixé à la somme de 1 512 899,66 euros.
Par acte de commissaire de justice du 14 décembre 2022, la SELARL [K] a assigné M. [V] et Mme [I] aux fins de les voir condamner solidairement à payer la somme de 1 281 000 euros au titre de l'insuffisance d'actif avec exécution provisoire à hauteur de 30% du quantum de la condamnation et voir prononcer leur faillite personnelle pour une durée de 15 ans avec exécution provisoire.
Par jugement réputé contradictoire du 28 février 2024 signifié à M. [V] le 5 juin 2024, le tribunal judiciaire de Saint-Denis a :
- débouté la SELARL [K] prise en la personne de Maître [D] [K] en qualité de mandataire-liquidateur de l'association [8] de ses demandes de condamnations au titre de l'insuffisance d'actif et au titre de la faillite personnelle ou interdiction de gérer formées à l'encontre de Mme [L] [I] épouse [H],
- condamné M. [C] [V] à payer la somme de 1 000 000 euros à la SELARL [K] prise en la personne de Maître [D] [K] ès qualité de liquidateur judiciaire de l'association [8] au titre de la responsabilité pour insuffisance d'actif, avec exécution provisoire à hauteur de 20% de ce montant,
- prononcé à l'encontre de M. [C] [V] une mesure d'interdiction de gérer d'une durée de cinq ans avec exécution provisoire,
- dit qu'en application de l'article 768-5° du Code de procédure pénale, la présente décision sera mentionnée au casier judiciaire, qu'elle fera l'objet à la diligence du greffier des publicités prévues à l'article R. 621-8 du Code de commerce et qu'elle sera adressée aux autorités mentionnées à l'article R.621-7 du même code,
- dit qu'en application de l'article R. 651-3 du Code de commerce, le présent jugement sera communiqué par le greffe à Mme la procureure de la République,
- condamné M. [C] [V] au paiement des entiers dépens
- condamné la SELARL [K] prise en la personne de Maître [D] [K] en qualité de mandataire-liquidateur de l'association [8] à payer à Mme [L] [I] épouse [H] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [C] [V] à payer à la SELARL [K] prise en la personne de Maître [D] [K] ès qualité de mandataire-liquidateur de l'association [8] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il a retenu que :
- Mme [I] n'ayant pas eu la qualité de gérante de fait de l'association, elle ne pouvait être poursuivie au titre de l'insuffisance d'actif ou de fautes de gestion justifiant une sanction personnelle,
- l'insuffisance d'actif s'élevait à la somme de 1 281 610,74 euros,
- M. [V] a commis des fautes de gestions en poursuivant abusivement une exploitation déficitaire, en retenant le précompte salarial et en ne déclarant pas l'état de cessation des paiements dans le délai légal de 45 jours,
- que les trois fautes retenues étaient significatives mais que pour fixer le montant de la sanction pécuniaire il devait être tenu compte d'une part de ce que le non-respect de ses engagements par la région Réunion à hauteur de 165 626 euros avait constitué un facteur aggravant les difficultés économiques de l'association mais également que M. [V], du fait de sa non comparution, n'avait pas transmis d'éléments sur sa situation personnelle et ses facultés contributives,
- le liquidateur judiciaire n'apportant pas la preuve de ce qu'il aurait poursuivi l'exploitation abusive dans son intérêt personnel ni qu'il aurait disposé des biens de l'association comme des siens propres il ne pouvait être prononcé une faillite personnelle, mais qu'en revanche il était établi qu'il n'avait pas déclaré la cessation des paiements dans le délai légal ce qui justifiait qu'il fasse l'objet d'une interdiction de gérer d'une durée de 5 ans.
Par déclaration du 14 juin 2024, M. [V] a interjeté appel de cette décision intimant le mandataire judiciaire et Mme [I].
Par ordonnance de référé du 3 septembre 2024, le premier président de la cour d'appel de Saint-Denis a déclaré irrecevable la demande de suspension de l'exécution provisoire attachée au jugement rendu le 28 février 2024.
L'affaire a été orientée devant la chambre civile de la cour d'appel de Saint-Denis qui l'a renvoyée à la mise en état le 17 juin 2024, avant de faire l'objet d'un renvoi devant la chambre commerciale de la même cour par ordonnance de redistribution rendue le 25 octobre 2024.
L'appelant a notifié ses conclusions par voie électronique le 13 septembre 2024, Mme [I] le 14 octobre 2024 et la SELARL [K] le 14 octobre 2024.
Par ordonnance du 17 février 2025, la procédure a été clôturée avec effet différé au 2 juin 2025 et l'affaire fixée à l'audience de circuit court du 18 juin 2025.
Par conclusions d'incident notifiées électroniquement le 2 juin 2025, la SELARL [K] a signalé que l'appelant avait conclu la veille de la date de clôture, jour chômé et veille d'un jour férié. Il a été fait droit à sa demande de révocation de l'ordonnance de clôture par une décision rendue le 5 juin 2025 qui en a fixé la nouvelle date au 16 juin 2025 et a maintenu la date d'audience de plaidoirie à l'audience du 18 juin 2025
Le dossier a été communiqué au ministère public qui, selon son avis du 13 juin 2025 communiqué aux parties par voie électronique, a requis la confirmation du jugement.
A l'issue de l'audience tenue le 18 juin 2025 la décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe le 30 septembre 2025.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET DES MOYENS
Dans ses dernières conclusions d'appelant n°5 notifiées par voie électronique le 1er juin 2025, M. [V] demande à la cour de :
- annuler la décision de première instance en qu'elle a manqué de respecter la formalité substantielle et d'ordre public de recueillir le rapport du juge-commissaire et de statuer à nouveau au vu du rapport du juge-commissaire,
Subsidiairement,
- infirmer la décision de première instance en toutes ses dispositions le concernant et statuant à nouveau débouter la SELARL [D] [K], prise en la personne de Maître [D] [K], ès qualités de liquidateur judiciaire de l'association [8] de toutes ses demandes,
- infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la mention de la sanction à son casier judiciaire de l'interdiction de gérer,
- si la cour devait le condamner pour insuffisance d'actif, ordonner la dispense d'inscription,
Subsidiairement, prenant en compte la situation de bénévole et sa situation patrimoniale personnelle, ainsi que du principe de proportionnalité ramener la sanction pécuniaire à de plus justes proportions et à cet effet :
- le condamner au paiement d'une somme n'excédant pas 2,5% du montant auquel il a été condamné en première instance,
Très subsidiairement, limiter le montant de la condamnation à la somme de 24 296,53 euros qu'il s'est vu saisir jusqu'à présent, limitation en application des principes de proportionnalité et de réalisme,
- le condamner au paiement de la somme de 24 296,53 euros.
- condamner la SELARL [F] et [D] [K], prise en la personne de Maître [D] [K], ès qualités de liquidateur judiciaire de l'association [8] au paiement de la somme de 5967,50 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
L'appelant fait valoir que :
- le jugement est nul, faute d'avoir été rendu au vu d'un rapport du juge-commissaire,
- la cour d'appel ne saurait statuer sans ce rapport sans violer la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés qui garantit le droit de propriété, alors que la règle instituée par l'article R.662-12 du code de commerce est d'ordre public en première instance et que l'effet dévolutif induit que ce rapport soit exigé en appel, que la procédure en responsabilité pour insuffisance d'actif entre dans le champ de la matière pénale ce qui justifie que des garanties procédurales accrues soient garanties à la personne mise en cause,
- il est incohérent de lui reprocher la poursuite abusive d'une exploitation déficitaire en dépit des dettes alors qu'il a été autorisé par le tribunal à poursuivre l'activité pendant 12 jours, que pendant la période d'exécution du plan il a recherché et obtenu de nouvelles sources de financement en élargissant les statuts de l'association, que le commissaire au plan démontre que la région n'a pas payé ce qui était dû, et que la dépendance de l'association vis-à-vis des subventions était connue dès l'ouverture du plan de redressement qui a été exécuté pour plus de la moitié,
- il ne peut lui être reproché de ne pas avoir envisagé une cessation d'activité au premier semestre 2018 alors que le tribunal n'a pas considéré que l'association était en cessation des paiements avant le 1er octobre 2018 et que le commissaire à l'exécution du plan, informé des difficultés, n'a pas jugé utile de l'inciter à déclarer d'état de cessation des paiements ou à saisir le tribunal d'une requête en résolution du plan,
- il n'a pas commis de faute de gestion au titre de l'octroi d'avantages injustifiés à Mme [I] ou des achats de petit équipement et dépense de réparation sans lien avec l'activité de l'association,
- tous les faits qui pourraient lui être reprochés sont constitutifs de simples négligences ou résultent de l'attitude des financeurs publics, éléments de nature à l'exonérer de sa responsabilité, - la sanction financière prononcée est disproportionnée par rapport à ses facultés contributives,
- en application de l'article L.651-2 alinéa 1 in fine du code de commerce il doit être tenu compte de sa qualité de bénévole pour apprécier les faits reprochés,
- en l'absence de faute de gestion, il ne peut être prononcé une interdiction de gérer, et, si cela était le cas la sévérité de la sanction justifierait une dispense de publication.
Dans ses seules et uniques conclusions d'intimé n°1 notifiées par voie électronique le 14 octobre 2024, Mme [I] demande à la cour de confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel et par suite de:
- rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires à son encontre,
- condamner M. [V] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [V] aux entiers dépens.
L'intimée fait valoir que :
- n'ayant pas exercé en toute indépendance des actes positifs de gestion et de direction de l'association elle n'était dès lors pas dirigeante de fait de l'association,
- elle n'a ainsi pas participé à l'insuffisance d'actif, au contraire elle a tenté recouvrer les créances de l'association et de trouver de nouveaux marchés pour en pérenniser l'activité,
- c'est le défaut de paiement par la Région Réunion qui a causé l'insuffisance d'actif dans la mesure où les seuls retards de paiement au titre de l'exercice 2018 auraient suffi à combler le passif social de l'association pour cet exercice, dont le précompte salarial et où les marchés annuels remportés par l'association pour l'année 2019 auraient suffi à assurer une stabilité financière et un bon paiement des échéances du plan si la région ne s'était pas montrée défaillante, il s'en déduit que la poursuite de l'activité de l'association ne saurait être regardée comme abusive,
- n'étant pas dirigeante de fait elle ne peut être sanctionnée par le prononcé d'une faillite personnelle, en outre elle n'a commis aucune faute de gestion ne le justifiant.
Dans ses dernières conclusions n°2 de l'intimée notifiées par voie électronique le 13 juin 2025 la SELARL [K] demande à la cour de :
- constater que l'appel est limité dans l'acte d'appel à une demande de réformation,
- constater que les conclusions de l'appelant régularisées dans le délai de l'article 905-2 du code de procédure civile se limitent également à une demande de réformation,
- dire que la cour n'est saisie d'aucune demande aux fins d'annulation du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Saint-Denis le 28 février 2024,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,
- débouter M. [V] de sa demande à ce qu'elle soit condamnée aux frais irrépétibles et aux dépens,
- débouter l'appelant de l'ensemble de toutes ses demandes, fin et prétentions,
- condamner M. [V] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, en ce compris le droit de timbre pour un montant de 225 euros.
L'intimée fait valoir que :
- la déclaration d'appel et les premières conclusions ont limité l'appel à une demande de réformation de la décision critiquée et non d'annulation, la cour n'est donc pas saisie d'une demande d'annulation, de surcroît, la demande d'annulation n'ayant pas été formulée dans le dispositif des conclusions régularisé le 30 septembre 2024, il n'a pas respecté le délai fixé par le code de procédure civile,
- l'insuffisance d'actif est certaine et s'élève à 1 282 610,74 euros,
- elle ne conteste pas l'appréciation du tribunal qui a considéré que Mme [I] n'était pas gérante de fait,
- M. [V] a, en revanche commis des fautes de gestion :
en poursuivant abusivement l'exploitation déficitaire de l'association générant un passif correspondant à 167% du passif admis à la première procédure,
en octroyant des avantages injustifiés à Mme [I] par des augmentations successives de sa rémunération pendant la période d'observation puis pendant l'exécution du plan alors que l'association ne parvenait pas à honorer ses charges courantes, outre une prime exceptionnelle correspondant à un mois de salaires, en restant passif face à l'achat de petits équipements sans utilité pour l'association, en ne déclarant pas l'état de cessation des paiements, dont la date a été fixée au 1er octobre 2018 dans le délai légal,en retenant le précompte salarial prélevé sur le salaire des employés,
- ces fautes de gestions ont contribué à l'insuffisance d'actif en creusant le passif, en alourdissant la masse salariale de manière inadaptée, en augmentant frauduleusement le passif sans avoir tiré d'enseignement de la première procédure collective en mettant en place des mesures correctives pour notamment ramener à de plus justes proportions la masse salariale, il doit dès lors être condamné au paiement d'une somme d'un million,
- l'augmentation frauduleuse du passif par l'absence de reversement des précomptes salariaux pendant plusieurs années et l'omission volontaire de déclarer de cessation des paiements dans le délai légal fondent et justifient le prononcé d'une mesure d'interdiction de gérer pendant une durée de 5 ans.
Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de la demande en annulation du jugement
A titre préliminaire il y a lieu de préciser qu'il sera fait application des dispositions du code de procédure civile dans leur version antérieure à l'entrée en vigueur du décret n°2023-1391 du 29 décembre 2023 portant simplification de la procédure d'appel en matière civile entré en vigueur le 1er septembre 2024, la déclaration d'appel ayant été interjetée le 14 juin 2024.
En application des articles 562 et 901 4° du code de procédure civile corrélés aux articles 542 et 954 du même code, la déclaration d'appel qui mentionne les chefs de dispositif du jugement critiqués délimite l'étendue de l'effet dévolutif de l'appel quand les conclusions, par l'énoncé dans leur dispositif de la demande d'infirmation ou d'annulation du jugement, déterminent, quant à elles, la finalité de l'appel, qui tend à l'annulation ou à la réformation du jugement, dans les limites de la dévolution opérée par la déclaration d'appel.
Il en découle que lorsque la déclaration d'appel vise l'ensemble des chefs de dispositif du jugement, l'appelant a la faculté de solliciter dans ses conclusions, soit la réformation, soit l'annulation de cette décision.
En l'espèce, l'appelant a mentionné l'intégralité des chefs du dispositif du jugement critiqué dans sa déclaration d'appel et, dans ses conclusions d'appelant n°3 notifiées par voie électronique le 20 janvier 2025, il a sollicité pour la première fois l'annulation de la décision de première instance au motif qu'elle avait manqué de respecter la formalité substantielle et d'ordre public de recueillir le rapport du juge-commissaire.
Au regard des textes susvisés il lui était donc possible, après avoir sollicité l'infirmation de la totalité des chefs du dispositif du jugement dans sa déclaration d'appel, de solliciter l'annulation de la décision de première instance dans ses conclusions. Néanmoins, comme le soulève l'intimée, il ne l'a pas fait dans le délai imparti par le code de procédure civile.
En effet, en application des articles 908 et 910-1 du code de procédure civile, ce sont les conclusions notifiées dans les trois mois après la déclaration d'appel qui déterminent l'objet du litige. Il s'en déduit que si l'objet de l'appel pouvait être précisé par l'appelant ultérieurement à la déclaration d'appel, dans la limite de la dévolution opérée par la déclaration d'appel, l'appelant aurait dû solliciter l'annulation du jugement avant le 14 septembre 2024. Or au terme du dispositif de ses conclusions notifiées le 13 septembre 2024, cela n'a pas été le cas.
Par conséquent, sa demande en annulation sera déclarée irrecevable et la cour d'appel est seulement saisie par l'appelant d'une demande d'infirmation du jugement critiqué, outre les demandes incidentes des intimées.
Sur la responsabilité pour insuffisance d'actif et la sanction personnelle de Mme [I]
L'appelant a intimé Mme [I] mais ne formule aucune prétention à son encontre dans le dispositif de ses conclusions. En application des dispositions de l'article 954 in fine du code de procédure civile, il est donc réputé s'approprier les motifs du jugement de première instance dont il est rappelé qu'il a débouté le liquidateur judiciaire de ses demandes de condamnation au titre de l'insuffisance d'actif, la faillite personnelle ou de l'interdiction de gérer formée à l'encontre cette dernière.
Mme [I] sollicite la confirmation de cette décision.
Le mandataire judiciaire, intimé, n'a pas formé d'appel incident sur ce point indiquant dans le corps de ses conclusions ne pas entendre remettre en cause l'appréciation du tribunal sur ce chef et sollicitant dans leur dispositif la confirmation du jugement dont appel en toutes ses dispositions.
Par conséquent, la décision de première instance sera confirmée en ce qu'elle n'a pas retenu la responsabilité de l'intimée pour insuffisance d'actif et n'a pas prononcé de sanction personnelle à son encontre.
Sur la responsabilité pour insuffisance d'actif de M. [V]
- Sur l'insuffisance d'actif
L'insuffisance d'actif s'établit à la différence entre le montant du passif admis et correspondant à des créances antérieures au jugement d'ouverture et le montant de l'actif de la personne morale débitrice tel qu'il résulte des réalisations effectuées en liquidation judiciaire. Le passif postérieur non éligible au privilège de l'article L. 622-17 et le passif social postérieur ainsi que les frais liés à la procédure collective sont exclus du calcul, de même que ceux engendrés par une poursuite d'activité provisoire.
Le liquidateur peut exercer une action en responsabilité pour insuffisance d'actif dès lors que celle-ci, même non chiffrée, est certaine en son principe et certaine pour un montant incontestable.
Le tribunal a retenu que l'insuffisance d'actif s'élevait à 1 281 610,74 euros. Le liquidateur judiciaire ne fait pas valoir d'évolution concernant le montant du passif retenu à titre définitif à la somme de 1 512 323,16 euros ni concernant l'actif chiffré à 230 712,42 euros. Aucune contestation n'étant formulée sur ces chiffres, la somme retenue par le tribunal mixte de commerce le sera également en cause d'appel.
- Sur les fautes de gestions excédant une simple négligence et le lien de causalité
La faute de gestion susceptible d'engager la responsabilité pour insuffisance d'actif doit avoir été commise dans l'administration de la société et prouvée par le demandeur. Elle peut également résulter d'une abstention. Elle doit être imputable au dirigeant poursuivi, pour des faits commis durant l'exercice de ses fonctions et ne peut résulter d'une simple négligence. Un intérêt personnel n'est pas exigé.
En vertu du principe de proportionnalité, si plusieurs fautes de gestion sont retenues, il importe que chacune d'elles soit également justifiée.
Un lien de causalité doit être établi entre la faute de gestion et l'insuffisance d'actif. Si plusieurs fautes de gestion sont reprochées, le lien de causalité doit être établi pour chacune d'elles. La faute doit avoir seulement contribué à l'insuffisance d'actif. Il n'est pas nécessaire que la faute soit la cause directe et exclusive du dommage.
En l'espèce, en application de l'article L653-4 du code de commerce le tribunal a retenu les éléments suivants caractérisant des fautes de gestion : la poursuite abusive d'une exploitation déficitaire, le retard dans la déclaration de la cessation des paiements, la retenue du précompte salarial.
L'appelant conteste avoir commis une quelconque faute de gestion.
L'intimée estime que les fautes retenues par le jugement à l'encontre de l'appelant sont constituées, outre celles d'avoir octroyé des avantages injustifiés à Mme [I], d'être resté passif face à des dépenses sans lien avec l'activité de l'association et que ces fautes ont contribué à l'insuffisance d'actif de la société. Elles seront examinées successivement.
- sur la poursuite abusive d'une exploitation déficitaire
L'association a déclaré l'état de cessation des paiements une première fois le 16 avril 2013 et a pu faire l'objet d'un plan de continuation prévu sur une durée de huit ans à compter du 7 avril 2014. Le passif était alors évalué à 949 454,35 euros. Néanmoins, les échéances de ce plan n'ont pas été honorées et il a été dénoncé par le commissaire à l'exécution du plan. Le passif avait augmenté à la somme de 1 113 094,62 euros. L'analyse des déclarations de créances met en lumière que dès le troisième trimestre après la mise en place du plan les cotisations dues à la CRR n'étaient pas payées et que celles dues à la CGSS ne l'ont plus été à compter du mois de novembre 2016.
L'activité déficitaire s'est donc poursuivie au cours du plan, l'impasse sur les cotisations dues aux organismes sociaux permettant d'en honorer les échéances et de maintenir artificiellement en vie l'association au détriment du gage commun des créanciers qui, compte tenu de l'augmentation du passif, ont perdu la possibilité de voir la totalité de leurs créances honorée. Le montant du passif suffit à démontrer le caractère abusif de la poursuite de l'activité de la société dans ce contexte. La faute de gestion reprochée à l'appelant est ainsi caractérisée.
Ce dernier ne peut se retrancher derrière le fait que la poursuite de l'activité avait été autorisée pendant une durée de douze jours par le tribunal mixte de commerce pour affirmer que la faute reprochée n'est pas constituée dans la mesure où il résulte de la requête en résolution présentée par le commissaire à l'exécution du plan qu'il s'agissait ainsi de permettre aux 3 400 bénéficiaires de l'association de ne pas être privés de manière immédiate des accompagnements dont ils profitaient, aux partenaires financiers de relancer des appels d'offres nécessaires pour terminer les prestations et aux salariés de s'organiser en vue de la recherche d'un nouvel emploi ou d'une reconversion professionnelle.
De même, il convient de rappeler que malgré l'ampleur des difficultés c'est le commissaire à l'exécution du plan qui a saisi le tribunal mixte de commerce d'une requête en résolution et non l'appelant.
En outre, si la région s'est abstenue de verser les subventions attendues pour un montant de 216 520 euros en janvier 2019, cette somme n'aurait, quoi qu'il en soit, pas permis de faire face au passif, le liquidateur judiciaire rappelant qu'une nouvelle dette de 971 591 euros avait été générée après l'adoption du plan auprès des seuls organismes sociaux et fiscaux.
L'appelant était en lien avec le commissaire à l'exécution du plan. Bien qu'étant bénévole, il était tenu de veiller au respect de l'échéancier fixé et avait accès aux documents comptables. Il était ainsi parfaitement informé de ce que l'exploitation de l'association était gravement déficitaire. Il résulte néanmoins de la requête en résolution du plan qu'il considérait encore en octobre 2019 pouvoir recouvrer des créances, percevoir des subventions et ainsi poursuivre l'activité. La date de cessation des paiements a finalement été fixée au 1er octobre 2018. L'appelant n'a pas tenu compte des éléments concrets démontrant que la situation était irrémédiablement obérée souhaitant maintenir l'activité de l'association coûte que coûte. Ce positionnement démontre que la faute commise excède la simple négligence.
Il en résulte que l'appelant a ainsi commis une faute de gestion excédant la simple négligence qui a eu pour résultat de contribuer à l'insuffisance d'actif en ce que notamment les créances des organismes sociaux ont considérablement été augmentées, aggravant le passif.
- sur l'absence de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal
L'article L.631-4 du code de commerce prévoit que l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire doit être demandée par le débiteur au plus tard dans les quarante-cinq jours qui suivent la cessation des paiements s'il n'a pas, dans ce délai, demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation.
L'appelant ne conteste pas les créances déclarées et le montant du passif définitif.
Le jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire du 16 décembre 2019 a fixé la date de cessation des paiements au 1er octobre 2018. En application du texte susvisé, la déclaration de cessation des paiements aurait dû être faite au plus tard le 15 novembre 2018. Elle a, en réalité, résulté de la saisine du tribunal mixte de commerce par le commissaire à l'exécution du plan. La faute de gestion susvisée est dès lors constituée.
Comme cela a été développé précédemment, bien qu'étant bénévole, l'appelant avait nécessairement connaissance de la situation critique de l'association, mais également conscience de la nécessité de se montrer vigilant et connaissait son obligation de déclarer la cessation des paiements si elle ne pouvait plus faire face à son passif exigible avec son actif disponible, une procédure collective étant déjà en cours. Son comportement ne peut, dès lors, être qualifié de simple négligence et constitue une faute de gestion caractérisée.
Cette faute a, enfin, contribué à l'augmentation du passif dans la mesure où entre la date à laquelle la déclaration de l'état de cessation des paiements aurait dû être déposée et celle à laquelle elle l'a réellement été l'association n'a cessé d'accumuler un passif, en particulier un passif social et fiscal.
- sur la retenue du précompte salarial
Il n'est pas contesté que les cotisations dues aux organismes sociaux et notamment à la CGSSR ne lui ont pas été reversées.
Néanmoins, si la retenue du précompte salarial constitue une faute de gestion dans la mesure où son versement aux organismes sociaux constitue une obligation légale pour le dirigeant, le lien de causalité entre ces faits et l'insuffisance d'actif n'est pas démontré car ces sommes constituaient, dès leur exigibilité, une créance participant au passif de la société quelle que soit la date de leur reversement. En l'absence de pénalités mises à la charge de la société en sanction de leur retenue, il n'est pas établi que le passif ait été augmenté.
En conséquence cette faute ne sera pas retenue comme ayant contribué à l'insuffisance d'actif, elle consiste plutôt en un élément constitutif de la faute de poursuite abusive de l'exploitation déficitaire.
- sur l'octroi d'avantages injustifiés et l'achat de matériel sans lien avec l'activité de l'association
Comme l'a relevé à juste titre le premier juge, les pièces versées au dossier suffisent à démontrer que l'augmentation de la rémunération de Mme [I] était justifiée par son investissement au sein de l'association et la nécessité d'exercer des tâches effectuées notamment par une salariée en congé maladie longue durée.
Les achats contestés qui s'élèvent à une somme de 2 201 euros sont de moindre valeur et ont été justifiés tant dans leur montant que comme étant nécessaires à l'activité de l'association, permettant aux formateurs de pouvoir être hébergés sur le lieu même de la formation en cas de nécessité du service. Mme [I] étant mise hors de cause, l'intimée reproche à ce titre une passivité de l'appelant quant à l'engagement de ces dépenses.
Néanmoins ces sommes étant justifiées par l'intérêt de l'association, aucune faute ne peut être relevée à ce titre à l'encontre de ce dernier.
Sur la sanction pécuniaire
Un dirigeant peut être condamné à supporter la totalité de l'insuffisance d'actif même si la faute commise n'en est que l'une des causes. Le tribunal dispose d'un pouvoir souverain, dans la limite de l'insuffisance d'actif, pour fixer le montant de la condamnation. Le montant de la condamnation doit être proportionné au nombre et à la gravite des fautes de gestion que le dirigeant a commises. Il doit également être tenu compte des facteurs économiques qui peuvent conduire à la défaillance des entreprises ainsi que les risques inhérents à leur exploitation et de la situation personnelle du dirigeant et ses facultés contributives en application de ce principe de proportionnalité.
En l'espèce, l'insuffisance d'actif est évaluée à une somme totale de 1 281 610,74 euros et l'appelant a commis deux fautes de gestion, ce qui justifie qu'il soit condamné à en supporter une partie sous réserve du respect des principes d'individualisation de la sanction et de proportionnalité.
Il fait valoir qu'il vit en couple, est enseignant dans la même école hôtelière depuis 32 ans. Il justifie percevoir une rémunération mensuelle de 2 744 euros. Il est locataire d'un appartement à loyer modéré pour un loyer mensuel de 533,23 euros. Il rembourse un crédit à la consommation à hauteur de 425,52 euros. Il précise qu'une saisie-attribution a été réalisée sur ses comptes bancaires et il affirme avoir ainsi déjà versé la somme de 24 296,53 euros au titre de la condamnation prononcée en première instance, assortie pour partie de l'exécution provisoire.
Il résulte de ces éléments que la condamnation au paiement d'une somme de 1 000 000 d'euros est disproportionnée au regard des ressources et charges de l'appelant, de la gravité des fautes commises, étant rappelé que seules deux fautes sur les cinq dénoncées par le liquidateur judiciaire ont été retenues, et de sa qualité de bénévole au sein de l'association.
Dès lors, M. [V] sera condamné à supporter l'insuffisance d'actif à hauteur de 24 296,53 euros, le jugement dont appel étant infirmé sur ce point.
Sur la sanction personnelle
L'article L. 653-8 du même code dispose que dans les cas prévus aux articles L. 653-3 à L. 653-6, le tribunal peut prononcer, à la place de la faillite personnelle, l'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci.
Cet article prévoit également que l'interdiction de gérer peut également être prononcée à l'encontre de toute personne mentionnée à l'article L. 653-1 qui a omis sciemment de demander l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la cessation des paiements, sans avoir, par ailleurs, demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation.
La faillite personnelle, tout comme l'interdiction de gérer, sont des sanctions professionnelles et les juges du fond disposent d'un pouvoir souverain d'option. Du fait de leur nature de sanctions, elles sont soumises aux principes de nécessité et de proportionnalité des peines, ce qui impose qu'elles soient motivées dans leur principe et leur quantum, la motivation devant prendre en compte la gravité des fautes et la situation personnelle de l'intéressé. A l'instar de ce qu'il en est de l'action pour insuffisance d'actif, si plusieurs fautes sont reprochées, chacune d'elle doit être justifiée.
Le tribunal mixte de commerce a prononcé une interdiction de gérer d'une durée de cinq ans à l'encontre de l'appelant au motif qu'il n'a pas déclaré la cessation des paiements dans le délai légal. Ce dernier demande l'infirmation de cette condamnation et l'intimée la confirmation.
Il a été démontré que l'appelant avait nécessairement connaissance de la situation critique de l'association, de ce que très rapidement après le début du plan de redressement les cotisations sociales n'étaient à nouveau plus payées alors que participant à la procédure collective ouverte en 2013 il avait conscience de la nécessité de se montrer vigilant et de l'obligation de déclarer la cessation des paiements si l'association ne pouvait plus faire face à son passif exigible avec son actif disponible. Il n'a ainsi sciemment pas déclaré l'état de cessation des paiements dans le délai légal. Il encourt de ce fait le prononcé d'une interdiction de gérer.
Néanmoins, les éléments de la procédure mettent en lumière qu'il s'est investi bénévolement dans l'activité de l'association, 'uvrant pour le bien commun. S'il a commis des fautes ayant des conséquences pour la collectivité des créanciers, les éléments de personnalité, ses antécédents et sa situation professionnelle actuelle ne témoignent pas d'une dangerosité avérée pour l'ordre public économique qui justifierait qu'une interdiction de gérer soit prononcée. En l'espèce, la sanction pécuniaire s'avérant suffisamment dissuasive de réitérer un tel comportement, il n'apparaît ni nécessaire, ni proportionné de prononcer une mesure d'interdiction de gérer à l'encontre de l'appelant.
Le jugement critiqué sera, dès lors, infirmé sur ce point.
Sur les autres demandes
Partie succombante, M. [V] sera condamné à régler les entiers dépens, de première instance et d'appel sur le fondement des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.
Il sera également condamné à régler la somme de 2 000 euros à Mme [I] au titre de l'article 700 du code de procédure civile destinée à compenser les frais irrépétibles que celle-ci a dû engager dans le cadre de l'instance d'appel à laquelle elle a été attraite par les soins de l'appelant.
L'équité commande en revanche de ne pas faire application des dispositions de ce texte au profit de la SELARL [K] qui sera déboutée de sa prétention de ce chef en cause d'appel.
M. [V] qui succombe sera également débouté de sa prétention du même chef.
Le jugement sera en revanche confirmé s'agissant des sommes allouées par le premier juge au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Déclare la demande d'annulation du jugement déféré à la cour d'appel irrecevable ;
Infirme le jugement déféré dans l'intégralité de ses dispositions sauf :
- en ce qu'il a débouté la SELARL [K] prise en la personne de Maître [D] [K] ès qualités de mandataire liquidateur de l'association [8] de ses demandes de condamnation au titre de l'insuffisance d'actif et au titre de la faillite personnelle ou interdiction de gérer formées à l'encontre de Mme [N] [I] épouse [H] ;
- en ce qu'il a condamné M. [C] [V] au paiement des entiers dépens et au paiement de la somme de 2 000 euros à la SELARL [K] ès qualités de mandataire liquidateur de l'association [8] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Condamne M. [C] [V] à payer la somme de 24 296,53 euros à la SELARL [K], prise en la personne de Maître [D] [K], en qualité de liquidateur judiciaire de l'association [8], au titre de sa responsabilité pour insuffisance d'actif ;
Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une interdiction de gérer à l'encontre de M. [C] [V] ;
Y ajoutant,
Condamne M. [C] [V] à régler les entiers dépens de l'appel ;
Condamne M. [C] [V] à payer la somme de 2 000 euros à Mme [L] [I] épouse [H] au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
Déboute la SELARL [K] ès qualités et M. [C] [V] de leur prétention respective au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Madame Séverine LEGER,Conseillère faisant fonction de Présidente de chambre, et par Madame Nathalie BEBEAU, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE