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Décisions

Cass. crim., 8 octobre 2025, n° 24-80.760

COUR DE CASSATION

Autre

Non-lieu à statuer

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bonnal

Rapporteur :

M. Wyon

Avocat général :

M. Bougy

Paris, 2e ch. sect. 13, du 19 janv. 2024

19 janvier 2024

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces soumises à l'examen de la Cour de cassation ce qui suit.

2. [M] [G], son épouse Mme [F] [U], ainsi que leur fils étaient tous trois associés à parts égales dans la société à responsabilité limitée (Sarl) [1]. Cette société a été placée en liquidation judiciaire le 23 mars 2017, procédure clôturée pour insuffisance d'actif le 2 novembre 2017.

3. M. [K] [Z] a déposé plainte contre les époux [G], après avoir contracté avec ceux-ci pour faire réaliser des travaux de rénovation dans sa maison et accepté des devis établis à l'entête de [1].

4. M. [Z] a versé en contrepartie une somme de 25 948 euros.

5. Les travaux n'ont pas été achevés et ont provoqué un dégât des eaux. Le plaignant a découvert ultérieurement que la garantie décennale qui lui avait été produite était un faux document et que la Sarl [1] avait fait l'objet d'une liquidation judiciaire.

6. L'enquête a en outre établi que les 25 948 euros payés par M. [Z] avaient été encaissés sur le compte de la société [2], gérée par le fils des prévenus.

7. Les époux [G] ont été poursuivis par le procureur de la République pour escroquerie, usage de faux et abus de biens sociaux.

8. Par jugement du 2 juin 2022, le tribunal correctionnel de Créteil a requalifié les faits d'abus de biens sociaux reprochés à [M] [G] en banqueroute, et l'en a déclaré coupable, ainsi que d'escroquerie et d'usage de faux, a déclaré Mme [G] coupable des délits qui lui étaient reprochés, les a condamnés pour ces faits, et a prononcé sur les intérêts civils.

9. Les prévenus et le ministère public ont fait appel de ce jugement.

Examen du pourvoi formé par [M] [G]

Vu l'article 606 du code de procédure pénale :

10. Il résulte des documents régulièrement communiqués que le demandeur est décédé.

11. En application de l'article 6 du code de procédure pénale, l'action publique est éteinte à son égard.

12. Aucun de ses héritiers n'a déclaré reprendre l'instance.

13. Dès lors, le pourvoi est devenu sans objet.

Examen des moyens proposés par Mme [G]

Sur les premier et deuxième moyens

14. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Mais sur le troisième moyen

Énoncé du moyen

15. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a requalifié les faits d'abus de biens sociaux reprochés à Mme [G] en délit de banqueroute et déclaré celle-ci coupable de ce délit, alors que M. [Z] n'a pas contracté avec la Sarl [1] mais avec la Sci [1], que ce contrat a été conclu postérieurement à la liquidation judiciaire de la société [1] et que les sommes payées par la partie civile, postérieurement à la liquidation judiciaire, n'avaient pas vocation à revenir à la Sarl [1], aucune créance sur M. [Z] n'étant entrée dans le patrimoine de la Sarl [1].

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 654-2, 2°, du code de commerce et 593 du code de procédure pénale :

16. Selon le premier de ces textes, en cas d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, sont coupables de banqueroute les personnes mentionnées à l'article L. 654-1 du code de commerce contre lesquelles a été relevé le fait d'avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif du débiteur.

17. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.

18. Pour déclarer Mme [G] coupable de banqueroute, l'arrêt attaqué énonce que la Sarl [1] était en cessation de paiement depuis le 24 septembre 2015 et placée en liquidation judiciaire depuis le 23 mars 2017, ce que ses deux gérants ne pouvaient ignorer, mais que pour autant, la prévenue et son mari ont réclamé le paiement des travaux par la remise d'une pièce à entête de la société [1] mais accompagnée du relevé d'identité bancaire de la société [2] de leur fils [I].

19. Les juges en concluent qu'en procédant ainsi, la prévenue a volontairement cherché à faire échapper les sommes versées par le client aux éventuels créanciers de la Sarl [1], commettant ainsi le délit de banqueroute.

20. En se déterminant ainsi, sans rechercher, d'une part, si les travaux avaient été effectués par la Sarl [1], d'autre part, si les sommes ont été versées par M. [Z] avant la clôture de la procédure de liquidation judiciaire de cette société et sa radiation du registre du commerce, enfin si ces sommes, dont elle retient qu'elles constituent le produit de l'escroquerie reprochée par ailleurs à la prévenue, pouvaient être considérées comme faisant partie de l'actif de la Sarl [1] et constituer à ce titre le gage des créanciers de cette société, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision.

21. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.

Portée et conséquences de la cassation

22. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions relatives à la déclaration de culpabilité pour banqueroute et aux peines. Les autres dispositions, en ce compris celles relatives aux dommages-intérêts alloués à M. [Z] en réparation du préjudice résultant de l'escroquerie, seront donc maintenues.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

Sur le pourvoi formé par [M] [G] :

DIT n'y avoir lieu à statuer sur le pourvoi ;

Sur le pourvoi formé par Mme [G] :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 19 janvier 2024, mais en ses seules dispositions relatives à la déclaration de culpabilité de Mme [G] du chef de banqueroute et aux peines, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

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