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Décisions

CA Bordeaux, 4e ch. com., 7 octobre 2025, n° 25/01770

BORDEAUX

Arrêt

Autre

CA Bordeaux n° 25/01770

7 octobre 2025

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE

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ARRÊT DU : 07 OCTOBRE 2025

N° RG 25/01770 - N° Portalis DBVJ-V-B7J-OHKB

Monsieur [Z] [H]

c/

S.E.L.A.R.L. EKIP'

Nature de la décision : AU FOND

Notifié aux parties par LRAR le :

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 avril 2025 (R.G. 2023P00550) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 07 avril 2025

APPELANT :

Monsieur [Z] [H], exerçant sous l'enseigne 'NOSY BE IMPORTS', né le [Date naissance 3] 1979 à [Localité 8] (91), de nationalité Française, demeurant [Adresse 4]

Représenté par Maître Patrick TRASSARD de la SELARL TRASSARD & ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

S.E.L.A.R.L. EKIP', prise en la personne de Maître [B] [O], ès qualités de liquidateur judiciaire de Monsieur [Z] [H], domicilié en cette qualité [Adresse 1]

Représentée par Maître Olivier BOURU, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 septembre 2025 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président,

Madame Sophie MASSON, Conseiller,

Madame Bérengère VALLEE, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE

1- M. [Z] [H], entrepreneur individuel, a exploité un magasin d'aquariophilie au [Adresse 5] [Localité 7], spécialisé dans l'importation et la vente de coraux et poissons tropicaux.

Une procédure de redressement judiciaire a été ouverte au bénéfice de M. [H] par jugement du 13 avril 2016.

Par jugement du 12 septembre 2018, le tribunal de commerce de Bordeaux a arrêté le plan de redressement de M. [H], en désignant la SELARL Ekip' prise en la personne de Maître [O] en qualité de commissaire à l'exécution du plan.

Dans le cadre d'une modification substantielle des modalités d'apurement du passif, le tribunal a, par jugement du 9 juin 2021, fixé de nouvelles échéances de paiement à compter du 12 décembre 2021.

Par requête du 6 avril 2023, la SELARL Ekip' en qualité de commissaire à l'exécution du plan a sollicité la conversion de la procédure en liquidation judiciaire, en raison du non-paiement de l'échéance du plan exigible le 12 décembre 2022, et de la création de dettes postérieures professionnelles.

2. Par jugement du 2 avril 2025, le tribunal de commerce de Bordeaux a notamment :

- constaté l'état de cessation des paiements de M. [H],

- prononcé la résolution du plan de redressement de M. [H] arrêté par jugement du 12 septembre 2018,

- ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de M. [H],

- dit que la procédure visera le patrimoine professionnel et personnel de l'entrepreneur,

- autorisé le maintien de l'activité pour une durée de 3 mois à compter de la présente décision,

- fixé provisoirement au 2 avril 2025 la date de cessation des paiements,

- nommé [V] [J], en qualité de juge-commissaire, et [B] [Y], en

qualité de juge-commissaire suppléant,

- nommé la SELARL Ekip' en qualité de liquidateur,

- imparti aux créanciers pour la déclaration de leur créance, un délai de deux mois à compter de la publication au Bodacc du jugement,

- dit que les créanciers soumis au plan sont dispensés, conformément à l'article L.626-2 du code de commerce, de déclarer leurs créances et sûretés et que les créances inscrites au plan sont admises de plein droit, déduction faite des sommes déjà perçues,

- fixé à 4 mois à compter du terme du délai imparti aux créanciers pour déclarer leur créance, le délai pour l'établissement de la liste des créances déclarées, conformément à l'article L. 624-1 et L. 624-2 du code de commerce,

- dit que le tribunal prononcera la clôture de la liquidation judiciaire au plus tard dans le délai de six mois à compter de la présente décision,

- ordonné la communication de la présente décision aux autorités citées à l'article R.641-6 du code de commerce,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit,

- dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire. »

3. Par déclaration au greffe du 7 avril 2025, M. [H] a relevé appel du jugement énonçant les chefs expressément critiqués, intimant la SELARL Ekip' ès qualités.

L'affaire a été fixée à bref délai à l'audience du 2 septembre 2025.

Par avis du 4 août 2025, le Ministère public s'est montré favorable à la confirmation du jugement prononçant la liquidation judiciaire.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

4. Par dernières écritures notifiées par message électronique le 20 juin 2025, auxquelles la cour se réfère expressément, M. [H] demande à la cour de :

- déclarer recevable et bien fondée son appel,,

- réformer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux du 2 avril 2025 en ce qu'il :

Constate l'état de cessation des paiements de M. [Z] [H] ,

Prononce la résolution du plan de redressement de M. [Z] [H] arrêté par jugement en date du 12 septembre 2018,

Ouvre une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de M. [Z] [H],entrepreneur individuel, identifié sous le n°437 995 988 RCS [Localité 7] (2001 A 911), exerçant une activité d'importation et vente de poissons tropicaux et coraux vivants pour les professionnels et particuliers et vente de matériel, au [Adresse 6], conformément au chapitre 1 du titre IV du livre VI du code de commerce,

Dit que la procédure visera le patrimoine professionnel et personnel de l'entrepreneur,

Autorise le maintien de l'activité pour une durée de trois mois à compter de la présente décision, en application des dispositions de l'article L. 641-10 du code de commerce,

Fixe provisoirement à ce jour la date de cessation des paiements,

Nomme [V] [J], en qualité de juge-commissaire, et [B] [Y], en qualité de juge-commissaire suppléant,

Nomme la SELARL EKIP', [Adresse 2], en qualité de liquidateur, et dit que cette mission sera suivie par Maître [B] [O],

Impartit aux créanciers, conformément à l'article R. 622-24 du code de commerce, pour la déclaration de leur créance, un délai de deux mois à compter de la publication au BODACC du présent jugement,

Dit que les créanciers soumis au plan sont dispensés, conformément à l'article L. 626-2 du code de commerce, de déclarer leurs créances et sûretés et que les créances inscrites au plan sont admises de plein droit, déduction faite des sommes déjà perçues,

Fixe à 4 mois à compter du terme du délai imparti aux créanciers pour déclarer leur créance, le délai pour l'établissement de la liste des créances déclarées, conformément à l'article L. 624-1 et L. 624-2 du code de commerce,

Dit que le tribunal prononcera la clôture de la liquidation judiciaire au plus tard dans le délai de six mois à compter de la présente décision,

Ordonne la communication de la présente décision aux autorités citées à l'article R. 641-6 du code de commerce,

Rappelle que l'exécution provisoire est de droit,

Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

- renvoyer devant le tribunal de commerce de Bordeaux pour l'examen d'une proposition de plan de redressement par continuation,

- dire que les dépens seront employés en frais de procédure collective

5. Par dernières écritures notifiées par message électronique le 6 août 2025, auxquelles la cour se réfère expressément, la SELARL Ekip' es-qualité demande à la cour de :

Vu les dispositions de l'article L.640-1 du code de commerce,

Vu la jurisprudence citée,

- constater l'état de cessation des paiements de M. [H] ainsi que l'impossibilité manifeste de poursuivre une quelconque procédure de redressement judiciaire ;

- débouter l'appelant de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux le 2 avril 2025 en toutes ses dispositions ;

- ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

Par avis du 4 aout 2025, le Ministère public s'est déclaré favorable à la confirmation du jugement,en l'absence d'alternative envisageable, et a déclaré s'en rapporter sur le maintien de l'activité pour une durée de trois mois.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 19 août 2025.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens des parties, il est, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, expressément renvoyé à la décision déférée et aux derniers conclusions écrites déposées.

MOTIFS DE LA DECISION:

Sur la recevabilité:

6. L'appel est recevable car formé dans le délai de dix jours prévu par l'article R.661-3 du code de commerce.

Sur le fond:

Moyens des parties:

7. M. [H] expose qu'il a été victime d'un accident de la circulation le 18 juin 2024 alors qu'il circulait en scooter, ce qui a entraîné pour lui des conséquences importantes et des séquelles permanentes, pour lesquelles il n'a pu pour l'instant obtenir d'indemnisation, alors qu'il ne peut plus poursuivre son activité.

Il indique qu'une procédure judiciaire est en cours, avec une première audience fixée au 7 octobre 2025.

8. La SELARL Ekip' es qualité réplique que M. [H] se trouve en état de cessation des paiement; qu'il n'existe aucun actif disponible et que l'indemnisation du préjudice corporel sollicitée en justice est incertaine en son principe, son montant et les délais de versement, de sorte qu'il n'existe pas de perspective de redressement.

Réponse de la cour:

9. Selon les dispositions de l'article L.640-1 du code de commerce, il est institué une procédure de liquidation judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné à l'article L. 640-2 en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible.

La procédure de liquidation judiciaire est destinée à mettre fin à l'activité de l'entreprise ou à réaliser le patrimoine du débiteur par une cession globale ou séparée de ses droits et de ses biens.

10. Il résulte par ailleurs de l'article L.631-1 du code de commerce que la cessation de paiement se définit par l'impossibilité pour le débiteur de faire face au passif exigible avec son actif disponible.

11. Par des motifs pertinents qui ne sont pas utilement critiqués en cause d'appel et que la cour fait siens, le tribunal a constaté l'état de cessation des paiements de M. [H], dès lors que l'annuité du plan exigible pour l'année 2024 (soit 13129.28 euros) n'a pas été réglée, et que de nouvelles dettes fiscales sont apparues en cours de plan, non réglées par le débiteur.

Le 12 mai 2025, le Pole de recouvrement spécialisé de la Gironde a ainsi déclaré une créance fiscale de 58805.32 euros à titre définitif, au titre de cotisations foncières des entreprises, et taxes sur la valeur ajoutée (période d'imposition de janvier 2021 à avril 2025) et de 32950 euros à titre provisionnel.

L'appelant ne justifie d'aucun actif disponoble et il convient de relever le caractère incertain des provisions à percevoir au titre de l'indemnisation de son préjudice corporel à la suite de l'accident de circulation du 18 juin 2024, au moins quant à leur montant et quant à la date de leur versement, en l'absence de transaction avec l'assureur adverse qui propose une indemnité provisionnelle de 3000 euros trés éloignée du montant du passif exigible.

12. Par ailleurs, le tribunal a relevé à juste titre que M. [H] était dans l'impossibilité manifeste d'exécuter ses engagements dans les délais fixés par le plan, et par ailleurs, l'appelant a dû interrompre son activité commerciale, du fait de sa situation médicale.

Il n'existe donc pas de perspective de redressement.

13. Enfin, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que les conditions d'application prévues aux 1° et 2° de l'article L.681-1 du code de commerce ne s'appliquent pas en l'espèce, dès lors que les dettes de M. [H] ayant donné lieu au plan de redressement sont antérieures au 15 mai 2022, date d'entrée en vigueur de la loi n°2022-172 du 14 février 2022 relative au statut de l'entrepreneur individuel.

14. Il convient dès lors de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré.

15. Il y a lieu d'ordonner l'emploi des dépens en frais privélégiés de liquidation judiciaire.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort:

Déclare l'appel recevable,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux le 2 avril 2025,

Y ajoutant,

Ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jean-Pierre FRANCO, président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président

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