Cass. 1re civ., 8 octobre 2025, n° 24-13.232
COUR DE CASSATION
Autre
Cassation
PARTIES
Défendeur :
Cofidis (Sté), Eco environnement (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Champalaune
Rapporteur :
Mme Robin-Raschel
Avocats :
Me Occhipinti, SCP Boutet et Hourdeaux, SCP Françoise Fabiani - François Pinatel
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 7 décembre 2023), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 11 janvier 2023, pourvoi n° 21-14.033), et les productions, par contrat conclu hors établissement le 28 décembre 2016, M. [Y] a commandé à la société Eco environnement (le vendeur) la fourniture et la pose de panneaux photovoltaïques et d'un chauffe-eau thermodynamique ainsi que la réalisation de démarches administratives. Le prix de cette commande a été financé par un crédit souscrit avec Mme [Y] auprès de la société Cofidis (la banque).
2. Invoquant diverses irrégularités affectant le bon de commande, M. et Mme [Y] (les emprunteurs) ont assigné le vendeur et la banque en annulation des contrats de vente et de crédit affecté.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. Les emprunteurs font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes en annulation des contrats de vente et de crédit affecté ainsi qu'en radiation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers pour les incidents de paiement, alors « que dans un contrat conclu après démarchage à domicile, le professionnel doit porter à la connaissance du consommateur les informations relatives aux garanties légales ; qu'une installation photovoltaïque pouvant être un ouvrage, la garantie des constructeurs doit être mentionnée ; qu'en estimant une telle information inutile, la cour d'appel a violé l'article L. 111-1, 5° du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et applicable au présent litige. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 242-1, L. 221-9, L. 221-5, 1°, du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2021-1734 du 22 décembre 2021, l'article L. 111-1, 5°, du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 et l'article 1792 du code civil :
4. Il résulte des quatre premiers textes que le professionnel fournit au consommateur un exemplaire du contrat conclu hors établissement comprenant, à peine de nullité, s'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en oeuvre des garanties et aux autres conditions contractuelles.
5. Selon le dernier texte, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
6. Il en résulte que lorsque l'installation est, au sens de ce texte, un ouvrage, le professionnel, tenu dans ce cas d'une garantie légale, doit en faire état sur le bon de commande.
7. Pour rejeter la demande d'annulation du contrat de vente conclu le 28 décembre 2016, l'arrêt retient que le vendeur n'est pas tenu de reproduire sur le bon de commande les dispositions relatives à la garantie prévue à l'article 1792 du code civil.
8. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
9. Les emprunteurs font le même grief à l'arrêt, alors « que dans un contrat conclu après démarchage à domicile, le professionnel doit porter à la connaissance du consommateur les informations relatives la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service, en faisant la différence entre le délai de pose de l'installation et celui de réalisation des prestations à caractère administratif ; qu'en estimant qu'un délai unique était suffisant et n'avait pas à prévoir la date de fin des opérations d'installation, quand en outre il était admis par les parties que le vendeur avait à sa charge les démarches administratives, la cour d'appel a violé l'article L 111-1, 3° du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 242-1, L. 221-9, L. 221-5, 1°, du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2021-1734 du 22 décembre 2021, et l'article L. 111-1, 3°, du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 :
10. Selon les premier et deuxième textes, le professionnel fournit au consommateur un exemplaire du contrat conclu hors établissement, signé par les parties, comprenant, à peine de nullité, toutes les informations prévues à l'article L. 221-5.
11. Selon le troisième, préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2.
12. Aux termes du dernier, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service.
13. Il résulte de ces textes que les opérations de démarchage à domicile font l'objet d'un contrat qui mentionne notamment, à peine de nullité, en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service.
14. Lorsque le contrat comporte un engagement du professionnel à livrer et installer le bien et à exécuter des démarches administratives subséquentes, la mention relative au délai doit distinguer, d'une part, le délai des opérations matérielles de livraison et d'installation des biens et, d'autre part, celui d'exécution des autres prestations auxquelles le vendeur s'est engagé.
15. Pour rejeter la demande d'annulation du contrat de vente conclu le 28 décembre 2016, après avoir constaté, d'abord, que le bon de commande mentionne dans ses conditions particulières la date du 28 février 2017 comme date de livraison et que l'article 7 des conditions générales intitulé « délai de livraison » contient une mention selon laquelle le vendeur s'efforce de livrer la commande dans les délais précisés au client au moment de la commande et au plus tard dans un délai de deux cents jours à compter de la prise d'effet du contrat de vente, l'arrêt retient, ensuite, que le contrat satisfait aux dispositions de l'article L. 111-1, 3°, lequel n'impose ni la précision des modalités, ni celle de la durée et de la fin des opérations d'installation du bien.
16. En statuant ainsi, alors que le vendeur s'était engagé à effectuer, pour le compte des emprunteurs, des démarches administratives en vue du raccordement au réseau d'électricité et que le bon de commande mentionne deux délais de livraison de durée distincte, lesquels n'indiquaient pas la nature exacte des opérations qu'ils concernaient, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Et sur le moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
17. Les emprunteurs font le même grief à l'arrêt, alors « qu'un contrat de vente conclu hors établissement doit comporter, à peine de nullité, une mention relative à la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI du code de la consommation ; qu'en estimant que la simple reproduction de l'article L. 111-1 du code de la consommation répondait à cette obligation, la cour d'appel a violé les article L. 111-1, 3°, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, L. 616-1 et R. 616-1 du code de la consommation. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 242-1, L. 221-9 et L. 221-5 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2021-1734 du 22 décembre 2021, l'article L. 111-1, 6°, du même code, dans sa version antérieure à celle issue de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 et l'article R. 111-1, 6°, de ce code, dans sa version antérieure à celle issue du décret n° 2022-946 du 29 juin 2022 :
18. Il résulte de ces textes qu'un contrat de vente conclu hors établissement doit comporter, à peine de nullité, une mention relative à la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI du code de la consommation, ainsi que les coordonnées du ou des médiateurs de la consommation compétents dont le professionnel relève en application de l'article L. 616-1 du même code.
19. Pour rejeter la demande d'annulation du contrat de vente conclu le 28 décembre 2016, l'arrêt retient que la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI du code de la consommation est bien et suffisamment mentionnée par la reprise in extenso des dispositions de l'article L. 111-1 du code de la consommation dans les conditions générales.
20. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ces constatations, desquelles il résultait que, contrairement aux dispositions légales applicables, le bon de commande n'indiquait pas les coordonnées du ou des médiateurs compétents, a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
21. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt rejetant la demande en annulation des contrats de vente et de crédit affecté, ainsi qu'en radiation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers pour les incidents de paiement, entraîne la cassation des autres chefs de dispositif qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 décembre 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne les sociétés Eco environnement et Cofidis aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par les sociétés Eco environnement et Cofidis et les condamne à payer à M. et Mme [Y] la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé publiquement le huit octobre deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.