CA Toulouse, 2e ch., 23 septembre 2025, n° 23/01383
TOULOUSE
Arrêt
Autre
23/09/2025
ARRÊT N°2025/
N° RG 23/01383 - N° Portalis DBVI-V-B7H-PMH7
MN CG
Décision déférée du 13 Décembre 2022
Tribunal de Commerce de TOULOUSE
( 2021J00344)
M. PUJOS
SAS WILLIAM SAURIN PRODUCTION
C/
Société SOCAMIL
INFIRMATION TOTALE
Grosse délivrée
le
à Me Olivier PIQUEMAL
Me Gilles [Localité 5]
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
2ème chambre
***
ARRÊT DU VINGT TROIS SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ
***
APPELANTE
SAS WILLIAM SAURIN PRODUCTION
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Olivier PIQUEMAL de la SCP PIQUEMAL & ASSOCIES, avocat postulant au barreau de TOULOUSE
Représentée par Me Stéphane FOUCAULT de la SELEURL CABINET FOUCAULT AVOCATS, avocat plaidant au barreau de PARIS
INTIMEE
SOCAMIL société coopérative de commerçants détaillants à forme anonyme prise en la personne de son représentant légal domicilié
en sa qualité au dit siège social
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Stéphane RUFF de la SCP RSG AVOCATS, avocat plaidant au barreau de TOULOUSE
Représentée par Me Gilles SOREL, avocat postulant au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Mai 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. NORGUET, conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
V. SALMERON, présidente
M. NORGUET, conseillère
S. MOULAYES, conseillère
Greffier, lors des débats : N.DIABY
ARRET :
- Contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par V. SALMERON, président, et par I. ANGER, greffier
Faits et procédure :
La Sacop Socamil est la centrale d'achat des magasins du réseau E. Leclerc pour le Sud de la France et notamment la région Occitanie.
La Sas William Saurin est une société de commerce de produits alimentaires de diverses marques notamment William Saurin, Panzani ou Garbit.
Les deux sociétés ont été régulièrement en relation d'affaire pendant de nombreuses années et fonctionnaient notamment par compensation régulière de leurs créances réciproques.
Par jugement du 12 juin 2017, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la Sas William Saurin et désigné Me [C] [G] et Me [X] [L] en qualité d'administrateurs judiciaires ainsi que Me [T] [F] et Me [B] [K] en qualité de mandataires judiciaires.
La Sacop Socamil a régulièrement déclaré sa créance entre les mains des mandataires judiciaires désignés pour un montant de 249 422,50 euros à titre chirographaire. Sa créance a été admise pour un montant de 138 462,29 euros.
Dans le cadre d'une offre de reprise, une Sas William Saurin Production, a été créée le 9 juin 2017 par la société Financière Cofigéo pour reprendre les actifs de la Sas William Saurin et notamment son fonds de commerce.
Le 13 juin 2017, dans l'attente de la cession et avec l'accord du juge-commissaire, la Sas William Saurin Production a signé un contrat de location-gérance avec la Sas William Saurin, prévoyant des loyers mensuels de 20 000 euros HT, afin de débuter son activité. Le contrat a prévu une rétroactivité de son entrée en vigueur à la date du 12 juin 2017, dite « date d'effet » et un terme au 30 septembre 2017.
Les clients et partenaires de la Sas William Saurin ont été informés de la reprise de l'activité et des nouvelles modalités de facturation par courriers adressés par la Sas William Saurin Production le 14 juin 2017.
Dans ce contexte, du 15 juin au 7 juillet 2017, la Sas William Saurin Production a effectué 10 livraisons auprès de la Sacop Socamil et émis 10 factures correspondantes représentant un montant total de 150 956,69 euros TTC.
La Sacop Socamil n'a réglé aucune de ces 10 factures. Cependant, elle a réglé en suivant les factures émises postérieurement par la Sas William Saurin Production.
Par jugement en date du 4 octobre 2017, le tribunal de commerce de Paris a arrêté le plan de cession des actifs de la Sas William Saurin.
Par jugement du 4 avril 2018, le tribunal de commerce de Paris a converti la procédure de redressement judiciaire de la Sas William Saurin en liquidation judiciaire.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 2 juillet 2020, la Sas William Saurin Production a mis en demeure la Sacop Socamil de procéder au règlement des dix factures restées impayées, réitérée par courrier de son conseil en date du 6 janvier 2021.
Par courrier recommandé du 19 janvier 2021, la Sacop Socamil a contesté l'exigibilité de ces 10 factures en affirmant qu'il s'agissait de reprises de factures émises antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective et qui s'étaient compensées automatiquement avec des créances qu'elle-même détenait sur la Sas William Saurin.
Par courrier du 25 janvier 2021, la Sas William Saurin Production a réaffirmé qu'il s'agissait de factures postérieures à la signature du contrat de location-gérance et donc à l'ouverture de la procédure collective et qu'elle était fondée à en demander le paiement à la Sacop Socamil.
Malgré plusieurs échanges entre les parties, aucun accord amiable n'a pu être trouvé.
Dès lors, par acte d'huissier de justice en date du 30 avril 2021, la Sas William Saurin Production a assigné la Sacop Socamil devant le tribunal de commerce de Toulouse aux fins de la voir condamnée au paiement de la somme de 150 956,69 euros au titre des factures impayées.
Par jugement du 13 décembre 2022, le tribunal de commerce de Toulouse a :
débouté la Sacop Socamil de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
condamné la Sacop Socamil à payer à la Sas William Saurin Production la somme de 176,11 euros assortie des intérêts au taux légal, à compter du 2 juillet 2020, ainsi qu'à la somme de 40 euros au titre des frais forfaitaires de recouvrement et déboute la Sas William Saurin Production du surplus de sa demande,
ordonné la capitalisation des intérêts,
débouté la Sas William Saurin Production du reste de ses demandes, fins et conclusions,
débouté la Sacop Socamil de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
ordonné la capitalisation des intérêts,
dit que chacune des parties supportera la charge des frais irrépétibles qu'elle aura du engager du fait de la présente procédure,
dit l'exécution provisoire de plein droit.
Par déclaration en date du 17 avril 2023, la Sas William Saurin Production a relevé appel du jugement du tribunal de commerce aux fins de le voir réformé en intégralité.
La clôture devait intervenir le 6 mai 2025. Sur demande de l'appelante, elle a été reportée au 13 mai. L'affaire a été fixée à l'audience du 14 mai 2025.
Prétentions et moyens des parties :
Vu les conclusions d'appelant n°4 notifiées le 2 mai 2025 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, et dans lesquelles la Sas William Saurin Production demande au visa des articles 1104, 1240, 1303 et suivants et 1321 et suivants du code civil :
l'infirmation du jugement du 13 décembre 2022 du tribunal de commerce de Toulouse en ce qu'il a :
- débouté la société William Saurin Production de l'ensemble de ses demandes à l'exception de sa demande concernant la facture n° 90059971 du 07/07/2017, d'un montant de 176,11 euros, et de la capitalisation des intérêts relative à cette facture ;
- dit que chacune des parties supportera la charge des frais irrépétibles qu'elle aura dû engager du fait de la procédure ;
statuant à nouveau, à titre principal, la condamnation de la Société Socamil à payer à la Sas William Saurin Production, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, la somme de 150 956,69 euros au titre des factures impayées, majorée selon les dispositions contractuelles d'intérêts de retard et des indemnités forfaitaires de retard de 40 euros pour chacune des factures impayées,
à titre infiniment subsidiaire, la condamnation de la société Socamil à payer à la Sas William Saurin Production, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, la somme de 150 956,69 euros au titre des factures impayées majorée des intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 2 juillet 2020,
à titre encore plus subsidiaire, la condamnation de la société Socamil à payer à la Sas William Saurin Production, sur le fondement de l'enrichissement injustifié, la somme de 150 956,69 euros au titre des factures impayées majorée des intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 2 juillet 2020,
en tout état de cause, que soit ordonnée la capitalisation des intérêts échus dus au moins pour une année entière à compter de la date de l'assignation soit le 30 avril 2021, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil,
la condamnation de la société Socamil à payer à la Sas William Saurin Production, sur le fondement de l'article 1240 du Code civil, la somme de 15 000 euros pour résistance abusive,
la condamnation de la société Socamil à payer à la Sas William Saurin Production la somme de 8 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en première instance,
la condamnation de la société Socamil à payer à la société William Saurin Production la somme de 8 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel,
sa condamnation aux entiers dépens de première instance et d'appel.
En réponse, vu les conclusions d'intimé n°4 notifiées le 5 mai 2025 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, et dans lesquelles la Sacop Socamil demande au visa des articles 1103 et suivants, 1216 et suivants, 1324, 1604 et suivants du Code civil, L144-1 et suivants, R144-1 du code de commerce, 910-4 ancien du Code de procédure civile :
la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a débouté la Sas William Saurin Production du surplus de ses demandes,
l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a :
débouté la Sacop Socamil de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
condamné la Sacop Socamil à payer à la Sas William Saurin Production la somme de 176,11 euros assortie des intérêts au taux légal, à compter du 2 juillet 2020, ainsi qu'à la somme de 40 euros au titre des frais forfaitaires de recouvrement,
ordonné la capitalisation des intérêts,
dit que chacune des parties supportera la charge des frais irrépétibles qu'elle aura dû engager du fait de la présente procédure,
condamné la Sacop Socamil aux entiers dépens,
en conséquence, statuant à nouveau, le rejet de l'appel et de l'ensemble des demandes de la Sas William Saurin Production,
à titre infiniment subsidiaire, la limitation de la condamnation de la Sacop Socamil au paiement d'une somme de 12 494,40 euros, tenant compte de la compensation entre la créance alléguée par la Sas William Saurin Production de 150 956,69 euros et la créance de la Sa Socamil admise au passif de la liquidation judiciaire de la Sas William Saurin pour un montant de 138 462,29 euros,
le rejet de la demande de la Sas William Saurin Production tendant à voir appliquer des intérêts de retard,
en tout état de cause, la condamnation de la Sas William Saurin Production à payer à la Sacop Socamil une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en première instance,
sa condamnation à lui payer une somme complémentaire de 6 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en appel,
que la Sas William Saurin Production soit déclarée irrecevable en sa demande d'infirmation du jugement en ce qu'il a dit que chacune des parties supportera la charge des frais irrépétibles qu'elle aura dû engager du fait de la présente procédure, et en sa demande tendant à voir condamner la Sa Socamil au paiement d'une somme de 8 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance, s'agissant de demandes qui n'ont pas été formées dans ses premières conclusions d'appelant,
sa condamnation au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction des dépens d'appel au profit de Maître Gilles Sorel, avocat, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
MOTIFS
Sur la recevabilité des demandes de la Sas William Saurin Production relatives aux frais irrépétibles de première instance
La Sacop Socamil soutient que la demande de la Sas William Saurin Production visant à voir infirmé le jugement de première instance en ce qu'il a dit que chacune des parties supporterait la charge des frais irrépétibles qu'elle aura du engager du fait de la présente procédure et à voir l'intimée condamnée à une somme de 8 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance est irrecevable, faute pour l'appelante de l'avoir formulée dans le dispositif de ses premières conclusions notifiées dans le délai de l'article 908 du code de procédure civile.
La Sas William Saurin n'oppose aucun argument sur la recevabilité de sa demande.
La cour rappelle qu'en appel, le bénéfice de l'article 700 du code de procédure civile peut être demandé pour l'ensemble des sommes exposées à la fois en seconde et en première instance et le montant sollicité à ce titre peut être modifié jusqu'à la clôture pour tenir compte des frais réellement avancés dans la procédure.
Dès lors, en se limitant à préciser dans ses dernières conclusions le montant exact qu'elle demandait pour les frais exposés en première instance et pour ceux exposés en appel, quand bien même ce montant était supérieur à celui sollicité globalement de ces deux chefs dans ses premières conclusions, l'appelante n'a pas manqué à la concentration des prétentions exigée par l'article 910-4 du code de procédure civile.
Sa demande formulée à ce titre est donc recevable.
Sur la demande en paiement de ses factures par la Sas William Saurin Production et sa qualité de créancière de la Sacop Socamil
La Sas William Saurin Production soutient que la Sacop Socamil a manqué à ses obligations contractuelles en refusant le paiement des factures présentées. Elle affirme que l'intimée conteste en vain l'opposabilité du contrat de location-gérance avant la date du 25 juin 2017, alors que l'appelante rapporte la preuve qu'elle l'en a informée le 14 juin 2017 par courrier et que les annonces légales parues les 25, 28 et 30 juin 2017 ont toutes mentionné le caractère rétroactif de l'entrée en vigueur du contrat. Elle maintient que l'intimée ne peut valablement s'opposer au paiement des factures présentées, ce d'autant plus qu'elle a réglé sans contestation les factures postérieures émises avant le terme du contrat de location-gérance.
La Sacop Socamil conteste tout manquement contractuel en soulignant que les factures produites ne matérialisent aucune relation contractuelle directe entre l'appelante et elle. Elle affirme ainsi n'avoir été en relation contractuelle qu'avec la seule Sa William Saurin, le contrat de location-gérance lui étant inopposable avant sa publication le 25 juin 2017. Elle rappelle que l'appelante ne peut rapporter la preuve de ce qu'elle lui a bien adressé le courrier d'information du 14 juin 2017. Dès lors, elle affirme, comme l'a jugé le tribunal de commerce, que seul le paiement de la dernière facture de 176,11 euros, émise le 7 juillet 2017, peut lui être réclamé par l'appelante. Si le contrat de location-gérance devait lui être déclaré opposable, la Sacop Socamil affirme qu'il a opéré non une simple cession de créance entre les deux sociétés William Saurin mais une véritable cession de contrats laquelle nécessitait, pour être valide, son accord en tant que cocontractant.
- sur l'opposabilité du contrat de location-gérance
L'article 1200 du code civil dispose que les tiers doivent respecter la situation juridique créée par le contrat. Cela implique cependant que le tiers ait eu connaissance du contrat qu'on veut lui opposer.
En l'espèce, les parties s'accordent pour reconnaître qu'en application des dispositions de l'article R144-1 du code de commerce, les contrats de location-gérance doivent être publiés dans la quinzaine de leur date sous forme d'extraits ou d'avis dans un support habilité à recevoir les annonces légales et qu'ils sont opposables aux tiers à compter de cette publication.
Les parties s'opposent néanmoins sur la date d'effet du contrat ainsi publié, l'appelante soutenant son entrée en vigueur rétroactive et l'intimée soutenant l'impossibilité de lui opposer les effets du contrat avant le jour de sa publication.
En l'espèce, la Sacop Socamil produit, en pièce 3, la reproduction des 3 annonces légales des 25, 28 et 30 juin 2017 annonçant la reprise du fonds de commerce de la Sas William Saurin par le bais d'un contrat de location-gérance dans les trois établissements détenus par la société en procédure collective. Comme le soutient à juste titre la Sas William Saurin Production, chacune de ses annonces indique expressément que le fonds est « donné en location-gérance pour une période qui commencera à courir rétroactivement à compter du 12/06/2017 pour prendre fin le 30/09/2017 ['] l'entrée en jouissance a été fixée au 12/06/2017 ».
Dès lors, le contrat de location-gérance ayant été valablement publié est bien opposable aux tiers et les annonces légales ayant informé ces tiers de l'entrée en vigueur rétroactive de ses dispositions au 12 juin 2017, il y a lieu de reconnaître que le contrat signé le 13 juin 2017 s'impose à la Sacop Socamil à compter du 12 juin 2017, peu important que l'appelante ne rapporte pas la preuve que l'intimée a bien été informée le 14 juin 2017 par courrier de l'entrée en vigueur rétroactive du contrat.
- sur la qualification de cession de contrats ou de créances
En réplique, la Sacop Socamil soutient que les dispositions du contrat de location-gérance contenues dans les articles 3.2 « facturation » et 4 « créances sur les clients » ont organisé entre le loueur et le locataire-gérant non une simple cession de créances mais une véritable cession de contrats, laquelle nécessite pour son plein effet l'accord du contractant cédé. Ainsi, à l'émission de ses commandes auprès de la Sas William Saurin, la Sacop Socamil a conclu des contrats de vente successifs avec cette dernière qui ne pouvaient être valablement transmis à l'appelante sans son accord. N'ayant donné aucun accord, l'intimée n'est aucunement liée contractuellement à la Sas William Saurin Production et se dit donc fondée à refuser le paiement des factures réclamées.
La Sas William Saurin Production affirme que les dispositions du contrat de location-gérance ont organisé non des cessions de contrats mais de simples cessions de créances entre le loueur et le locataire, lesquelles ne nécessitent pas l'accord du débiteur cédé pour lui être pleinement opposables.
En l'espèce, le contrat de location-gérance a prévu, dans son article 3.2 « facturation », que les commandes passées et livrées après le 12 juin 2017 seraient facturées par la Sas William Saurin Production et réglées auprès d'elle mais que les commandes passées avant le 12 juin 2017, non encore livrées, seraient livrées et facturées par elle. Enfin, il a prévu que les commandes passées avant le 12 juin 2017 et non livrées mais déjà facturées par la Sas William Saurin feraient l'objet d'une annulation comptable de la facture émise, laquelle serait rééditée au nom du locataire-gérant ou rééditée directement par ce dernier. Dans son article 4, le contrat a prévu que les créances déjà acquises sur les clients à la date d'effet du contrat seraient encaissées par le locataire-gérant mais reversées au loueur.
Les articles 1321 et 1323 du code civil disposent que la cession de créance est un contrat par lequel le créancier cédant transmet, à titre onéreux ou gratuit, tout ou partie de sa créance contre le débiteur cédé à un tiers appelé le cessionnaire. Elle peut porter sur une ou plusieurs créances présentes ou futures, déterminées ou déterminables. Elle s'étend aux accessoires de la créance. Le consentement du débiteur n'est pas requis, à moins que la créance ait été stipulée incessible. ['] Entre les parties, le transfert de la créance, présente ou future, s'opère à la date de l'acte. Il est opposable aux tiers dès ce moment.
La relation contractuelle entre la centrale d'achat et ses fournisseurs, en l'absence de production au dossier d'un contrat cadre originel visant à encadrer leurs prestations réciproques, est constituée par une répétition de contrats de vente successifs. Le lien contractuel entre les parties se noue donc de manière répétée mais séquencée de sorte qu'une transmission globale de cette relation contractuelle dans le contrat de location-gérance n'est pas possible.
Dès lors, les dispositions précitées du contrat de location-gérance doivent s'analyser en une simple organisation de cessions de créances entre le loueur et le locataire, certaines déjà existantes et d'autres futures. Partant, le consentement de la Sacop Socamil n'était pas requis pour la validité du transfert des créances la concernant.
Néanmoins, il doit être rappelé qu'aux termes des dispositions de l'article 1324 du code civil, la cession n'est opposable au débiteur, s'il n'y a déjà consenti, que si elle lui a été notifiée ou s'il en a pris acte.
En l'espèce, les annonces légales relatives au contrat de location-gérance ne comportent aucune mention explicitant l'organisation de ce transfert de créances, de sorte que la Sacop Socamil ne pouvait en être informée par leur seule lecture.
Si la Sas William Saurin Production produit le courrier informatif du 14 juin 2017, lequel explicite clairement les modalités du transfert des créances, elle ne produit aucune pièce de nature à prouver l'envoi de ce courrier à la Sacop Socamil et encore moins sa réception.
Cependant, la cour constate qu'il résulte des correspondances échangées entre les parties et produites au dossier, que la Sacop Socamil a eu connaissance du transfert des créances au bénéfice de la Sas William Saurin Production par la réception de la mise en demeure du 6 janvier 2021.
Le fait que l'intimée conteste le droit pour l'appelante de lui réclamer le paiement de ces créances n'invalide pas la notification ainsi faite par le nouveau créancier du transfert des créances la concernant et son opposabilité.
La qualité de créancière de la Sas William Saurin Production envers la Sacop Socamil pour les factures présentées est donc reconnue.
- sur les factures dont le paiement est réclamé par l'appelante
La Sas William Saurin Production produit, pour justifier de ses demandes, les 10 factures réclamées ainsi que les bons de commande afférents, les lettres de voiture signées par l'intimée et les compte-rendus de livraison lesquels attestent tous, sauf le dernier, d'une livraison acceptée sans réserve par la Sacop Socamil.
Dans les factures dont le paiement est réclamé, il doit être relevé que les factures N°90059783 du 16 juin 2017 pour un montant de 42 769,73 euros et N°90059971 du 7 juillet 2017 d'un montant de 176,11 euros correspondent à deux commandes passées le 13 et le 22 juin 2017. Aux termes du contrat de location-gérance, ces commandes étant postérieures à son entrée en vigueur, c'est à juste titre que l'appelante, qui a réalisé toute l'opération de vente, a facturé ces prestations en son nom et qu'elle en réclame personnellement le paiement.
L'ensemble des autres factures produites correspond à des commandes passées par l'intimée les 6 et 9 juin 2017, donc antérieurement à l'entrée en vigueur du contrat, mais à des livraisons réalisées les 15, 16 et 23 juin 2017, postérieurement à cette date. Elles entrent donc dans le cadre de la cession de créance future organisée par le contrat de location-gérance.
La Sas William Saurin justifiant des sommes demandées et la Sacop Socamil n'étant pas fondée à lui en refuser le paiement, l'intimée sera condamnée à verser à l'appelante la somme de 150 956,69 euros à ce titre, le jugement de première instance étant infirmé en intégralité.
- sur les intérêts majorés, les indemnités forfaitaire de retard et la capitalisation des intérêts
La Sas William Saurin Production sollicite l'adjonction à cette somme des intérêts majorés et des indemnités forfaitaires de recouvrement prévus par les dispositions de l'article L441-6 du code de commerce.
La Sacop Socamil conteste la possibilité de se voir appliquer ces intérêts et indemnités en affirmant qu'elle n'a jamais accepté contractuellement de telles stipulations.
L'article L441-6 du code de commerce, dans sa version applicable aux factures en cause, dispose qu'entre professionnels les factures sont payables à échéance maximale de 60 jours et que passé ce délai, des intérêts majorés, au moins équivalents à trois fois le taux légal, ainsi qu'une indemnité forfaitaire de 40 euros pour frais de recouvrement, s'appliquent de plein droit, sans avoir à être communiqués dans un contrat ou par des conditions générales de vente.
En l'espèce, les intérêts majorés comme l'indemnité de recouvrement étant bien mentionnés sur les factures envoyées par l'appelante, il y a lieu de faire droit à sa demande, en fixant le point de départ des intérêts majorés à la date à laquelle la débitrice a eu connaissance de la cession de ces créances soit le 6 janvier 2021, et en fixant le montant de l'indemnité forfaitaire de recouvrement, pour les 10 factures, à la somme totale de 400 euros.
La Sacop Socamil est donc condamnée à verser la somme de 150 956,69 euros avec intérêts majorés équivalent à trois fois le taux de l'intérêt légal à compter de l 'échéance de chacune des factures ainsi que la somme de 400 euros au titre de l'indemnité de recouvrement.
Enfin, la Sas William Production demande que soit ordonnée la capitalisation des intérêts en application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil.
Il est jugé que la pénalité de retard prévue par l'article L. 441-6 du code de commerce, constituant un intérêt moratoire, peut être assortie de la capitalisation prévue à l'article 1343-2 du code civil. Dès lors, il sera fait droit à la demande de l'appelante et la capitalisation des intérêts sera ordonnée.
Sur l'exception de compensation
En cas de condamnation en paiement, la Sacop Socamil demande qu'il soit fait droit à son exception de compensation entre les créances détenues sur elle et celles qu'elle détient elle-même sur la Sas William Saurin et qui ont fait l'objet de sa déclaration de créance dans la procédure collective. Elle affirme que ces créances réciproques se sont compensées automatiquement avant l'ouverture de la procédure collective et qu'il y a donc lieu de limiter le montant global de sa condamnation à la somme de 12 494,40 euros.
La Sas William Saurin Production s'y oppose en mettant en avant que les factures dont elle réclame le paiement n'ont aucun lien avec les factures sur lesquelles la Sacop Socamil souhaite voir la compensation appliquée et qui ont été émises par la Sas William Saurin avant l'entrée en vigueur de la location-gérance.
Conformément aux dispositions de l'article 1324 du code civil, la Sacop Socamil, débitrice cédée, est fondée à opposer au cessionnaire les exceptions inhérentes à la dette, telles la compensation des dettes connexes. Il lui appartient cependant de démontrer le caractère connexe des créances pour lesquelles elle demande la compensation.
L'analyse de la déclaration de créance de la Sacop Socamil démontre qu'elle sollicite la compensation des créances détenues par la Sas William Saurin Production avec des créances qu'elle-même détient sur la Sas William Saurin et qui correspondent à des factures et avoirs antérieurs au 12 juin 2017. Comme le soutient justement l'appelante, ces créances ne sont pas connexes aux 10 factures dont le paiement est réclamé dans le présent litige, lesquelles ne sont pas concernées par la procédure collective ouverte au bénéfice de la Sas William Saurin.
La Sacop Socamil ne rapportant pas la preuve de la connexité des créances, il convient de la débouter de son exception de compensation.
Sur la résistance abusive
La Sas William Saurin Production sollicite enfin l'indemnisation du préjudice qu'elle allègue avoir subi du fait de la résistance abusive de la Sacop Socamil et , en réparation, demande l'allocation d'une somme de 15 000 euros.
La Sacop Socamil conteste toute résistance abusive de sa part, ayant toujours contesté la qualité de créancière de la Sas William Saurin Production.
En application des dispositions de l'article 1231-6 du code civil, les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l'intérêt moratoire.
Ainsi, le préjudice de la Sas William Saurin Production découlant du simple retard dans l'exécution de l'obligation contractuelle a déjà été indemnisé par l'allocation des intérêts majorés à compter de la date d'échéance. En l'absence de justification par l'appelante d'un préjudice distinct, sa demande en dommages et intérêts pour résistance abusive sera rejetée.
Sur les demandes accessoires,
Infirmé intégralement, le jugement de première instance le sera également sur ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance.
La Sacop Socamil, partie succombante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Les circonstances de l'espèce justifient que la Sacop Socamil soit condamnée à verser à la Sas William Saurin Production la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, elle-même étant déboutée de sa demande formulée sur ce fondement.
PAR CES MOTIFS,
La Cour,
Déclare la demande de la Sas William Saurin relative aux frais irrépétibles telle que formulée dans ses dernières conclusions, recevable,
Au fond, infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Et, statuant à nouveau, des chefs infirmés,
Condamne la Sacop Socamil à verser à la Sas William Saurin Production la somme de 150 956,69 euros avec intérêts majorés à trois fois le taux de l'intérêt légal à compter du 6 janvier 2021,
Condamne la Sacop Socamil à verser à la Sas William Saurin Production la somme de 400 euros au titre des indemnités forfaitaires de recouvrement prévues à l'article L441-6 du code de commerce,
Ordonne la capitalisation des intérêts,
Rejette la demande d'indemnisation formulée par la Sas William Saurin Production au titre de la résistance abusive,
Y ajoutant,
Condamne la Sacop Socamil aux dépens de première instance et d'appel,
Condamne la Sacop Socamil à verser à la Sas William Saurin Production la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute la Sacop Socamil de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le greffier La présidente
.
ARRÊT N°2025/
N° RG 23/01383 - N° Portalis DBVI-V-B7H-PMH7
MN CG
Décision déférée du 13 Décembre 2022
Tribunal de Commerce de TOULOUSE
( 2021J00344)
M. PUJOS
SAS WILLIAM SAURIN PRODUCTION
C/
Société SOCAMIL
INFIRMATION TOTALE
Grosse délivrée
le
à Me Olivier PIQUEMAL
Me Gilles [Localité 5]
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
2ème chambre
***
ARRÊT DU VINGT TROIS SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ
***
APPELANTE
SAS WILLIAM SAURIN PRODUCTION
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Olivier PIQUEMAL de la SCP PIQUEMAL & ASSOCIES, avocat postulant au barreau de TOULOUSE
Représentée par Me Stéphane FOUCAULT de la SELEURL CABINET FOUCAULT AVOCATS, avocat plaidant au barreau de PARIS
INTIMEE
SOCAMIL société coopérative de commerçants détaillants à forme anonyme prise en la personne de son représentant légal domicilié
en sa qualité au dit siège social
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Stéphane RUFF de la SCP RSG AVOCATS, avocat plaidant au barreau de TOULOUSE
Représentée par Me Gilles SOREL, avocat postulant au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Mai 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. NORGUET, conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
V. SALMERON, présidente
M. NORGUET, conseillère
S. MOULAYES, conseillère
Greffier, lors des débats : N.DIABY
ARRET :
- Contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par V. SALMERON, président, et par I. ANGER, greffier
Faits et procédure :
La Sacop Socamil est la centrale d'achat des magasins du réseau E. Leclerc pour le Sud de la France et notamment la région Occitanie.
La Sas William Saurin est une société de commerce de produits alimentaires de diverses marques notamment William Saurin, Panzani ou Garbit.
Les deux sociétés ont été régulièrement en relation d'affaire pendant de nombreuses années et fonctionnaient notamment par compensation régulière de leurs créances réciproques.
Par jugement du 12 juin 2017, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la Sas William Saurin et désigné Me [C] [G] et Me [X] [L] en qualité d'administrateurs judiciaires ainsi que Me [T] [F] et Me [B] [K] en qualité de mandataires judiciaires.
La Sacop Socamil a régulièrement déclaré sa créance entre les mains des mandataires judiciaires désignés pour un montant de 249 422,50 euros à titre chirographaire. Sa créance a été admise pour un montant de 138 462,29 euros.
Dans le cadre d'une offre de reprise, une Sas William Saurin Production, a été créée le 9 juin 2017 par la société Financière Cofigéo pour reprendre les actifs de la Sas William Saurin et notamment son fonds de commerce.
Le 13 juin 2017, dans l'attente de la cession et avec l'accord du juge-commissaire, la Sas William Saurin Production a signé un contrat de location-gérance avec la Sas William Saurin, prévoyant des loyers mensuels de 20 000 euros HT, afin de débuter son activité. Le contrat a prévu une rétroactivité de son entrée en vigueur à la date du 12 juin 2017, dite « date d'effet » et un terme au 30 septembre 2017.
Les clients et partenaires de la Sas William Saurin ont été informés de la reprise de l'activité et des nouvelles modalités de facturation par courriers adressés par la Sas William Saurin Production le 14 juin 2017.
Dans ce contexte, du 15 juin au 7 juillet 2017, la Sas William Saurin Production a effectué 10 livraisons auprès de la Sacop Socamil et émis 10 factures correspondantes représentant un montant total de 150 956,69 euros TTC.
La Sacop Socamil n'a réglé aucune de ces 10 factures. Cependant, elle a réglé en suivant les factures émises postérieurement par la Sas William Saurin Production.
Par jugement en date du 4 octobre 2017, le tribunal de commerce de Paris a arrêté le plan de cession des actifs de la Sas William Saurin.
Par jugement du 4 avril 2018, le tribunal de commerce de Paris a converti la procédure de redressement judiciaire de la Sas William Saurin en liquidation judiciaire.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 2 juillet 2020, la Sas William Saurin Production a mis en demeure la Sacop Socamil de procéder au règlement des dix factures restées impayées, réitérée par courrier de son conseil en date du 6 janvier 2021.
Par courrier recommandé du 19 janvier 2021, la Sacop Socamil a contesté l'exigibilité de ces 10 factures en affirmant qu'il s'agissait de reprises de factures émises antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective et qui s'étaient compensées automatiquement avec des créances qu'elle-même détenait sur la Sas William Saurin.
Par courrier du 25 janvier 2021, la Sas William Saurin Production a réaffirmé qu'il s'agissait de factures postérieures à la signature du contrat de location-gérance et donc à l'ouverture de la procédure collective et qu'elle était fondée à en demander le paiement à la Sacop Socamil.
Malgré plusieurs échanges entre les parties, aucun accord amiable n'a pu être trouvé.
Dès lors, par acte d'huissier de justice en date du 30 avril 2021, la Sas William Saurin Production a assigné la Sacop Socamil devant le tribunal de commerce de Toulouse aux fins de la voir condamnée au paiement de la somme de 150 956,69 euros au titre des factures impayées.
Par jugement du 13 décembre 2022, le tribunal de commerce de Toulouse a :
débouté la Sacop Socamil de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
condamné la Sacop Socamil à payer à la Sas William Saurin Production la somme de 176,11 euros assortie des intérêts au taux légal, à compter du 2 juillet 2020, ainsi qu'à la somme de 40 euros au titre des frais forfaitaires de recouvrement et déboute la Sas William Saurin Production du surplus de sa demande,
ordonné la capitalisation des intérêts,
débouté la Sas William Saurin Production du reste de ses demandes, fins et conclusions,
débouté la Sacop Socamil de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
ordonné la capitalisation des intérêts,
dit que chacune des parties supportera la charge des frais irrépétibles qu'elle aura du engager du fait de la présente procédure,
dit l'exécution provisoire de plein droit.
Par déclaration en date du 17 avril 2023, la Sas William Saurin Production a relevé appel du jugement du tribunal de commerce aux fins de le voir réformé en intégralité.
La clôture devait intervenir le 6 mai 2025. Sur demande de l'appelante, elle a été reportée au 13 mai. L'affaire a été fixée à l'audience du 14 mai 2025.
Prétentions et moyens des parties :
Vu les conclusions d'appelant n°4 notifiées le 2 mai 2025 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, et dans lesquelles la Sas William Saurin Production demande au visa des articles 1104, 1240, 1303 et suivants et 1321 et suivants du code civil :
l'infirmation du jugement du 13 décembre 2022 du tribunal de commerce de Toulouse en ce qu'il a :
- débouté la société William Saurin Production de l'ensemble de ses demandes à l'exception de sa demande concernant la facture n° 90059971 du 07/07/2017, d'un montant de 176,11 euros, et de la capitalisation des intérêts relative à cette facture ;
- dit que chacune des parties supportera la charge des frais irrépétibles qu'elle aura dû engager du fait de la procédure ;
statuant à nouveau, à titre principal, la condamnation de la Société Socamil à payer à la Sas William Saurin Production, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, la somme de 150 956,69 euros au titre des factures impayées, majorée selon les dispositions contractuelles d'intérêts de retard et des indemnités forfaitaires de retard de 40 euros pour chacune des factures impayées,
à titre infiniment subsidiaire, la condamnation de la société Socamil à payer à la Sas William Saurin Production, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, la somme de 150 956,69 euros au titre des factures impayées majorée des intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 2 juillet 2020,
à titre encore plus subsidiaire, la condamnation de la société Socamil à payer à la Sas William Saurin Production, sur le fondement de l'enrichissement injustifié, la somme de 150 956,69 euros au titre des factures impayées majorée des intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 2 juillet 2020,
en tout état de cause, que soit ordonnée la capitalisation des intérêts échus dus au moins pour une année entière à compter de la date de l'assignation soit le 30 avril 2021, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil,
la condamnation de la société Socamil à payer à la Sas William Saurin Production, sur le fondement de l'article 1240 du Code civil, la somme de 15 000 euros pour résistance abusive,
la condamnation de la société Socamil à payer à la Sas William Saurin Production la somme de 8 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en première instance,
la condamnation de la société Socamil à payer à la société William Saurin Production la somme de 8 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel,
sa condamnation aux entiers dépens de première instance et d'appel.
En réponse, vu les conclusions d'intimé n°4 notifiées le 5 mai 2025 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, et dans lesquelles la Sacop Socamil demande au visa des articles 1103 et suivants, 1216 et suivants, 1324, 1604 et suivants du Code civil, L144-1 et suivants, R144-1 du code de commerce, 910-4 ancien du Code de procédure civile :
la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a débouté la Sas William Saurin Production du surplus de ses demandes,
l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a :
débouté la Sacop Socamil de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
condamné la Sacop Socamil à payer à la Sas William Saurin Production la somme de 176,11 euros assortie des intérêts au taux légal, à compter du 2 juillet 2020, ainsi qu'à la somme de 40 euros au titre des frais forfaitaires de recouvrement,
ordonné la capitalisation des intérêts,
dit que chacune des parties supportera la charge des frais irrépétibles qu'elle aura dû engager du fait de la présente procédure,
condamné la Sacop Socamil aux entiers dépens,
en conséquence, statuant à nouveau, le rejet de l'appel et de l'ensemble des demandes de la Sas William Saurin Production,
à titre infiniment subsidiaire, la limitation de la condamnation de la Sacop Socamil au paiement d'une somme de 12 494,40 euros, tenant compte de la compensation entre la créance alléguée par la Sas William Saurin Production de 150 956,69 euros et la créance de la Sa Socamil admise au passif de la liquidation judiciaire de la Sas William Saurin pour un montant de 138 462,29 euros,
le rejet de la demande de la Sas William Saurin Production tendant à voir appliquer des intérêts de retard,
en tout état de cause, la condamnation de la Sas William Saurin Production à payer à la Sacop Socamil une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en première instance,
sa condamnation à lui payer une somme complémentaire de 6 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en appel,
que la Sas William Saurin Production soit déclarée irrecevable en sa demande d'infirmation du jugement en ce qu'il a dit que chacune des parties supportera la charge des frais irrépétibles qu'elle aura dû engager du fait de la présente procédure, et en sa demande tendant à voir condamner la Sa Socamil au paiement d'une somme de 8 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance, s'agissant de demandes qui n'ont pas été formées dans ses premières conclusions d'appelant,
sa condamnation au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction des dépens d'appel au profit de Maître Gilles Sorel, avocat, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
MOTIFS
Sur la recevabilité des demandes de la Sas William Saurin Production relatives aux frais irrépétibles de première instance
La Sacop Socamil soutient que la demande de la Sas William Saurin Production visant à voir infirmé le jugement de première instance en ce qu'il a dit que chacune des parties supporterait la charge des frais irrépétibles qu'elle aura du engager du fait de la présente procédure et à voir l'intimée condamnée à une somme de 8 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance est irrecevable, faute pour l'appelante de l'avoir formulée dans le dispositif de ses premières conclusions notifiées dans le délai de l'article 908 du code de procédure civile.
La Sas William Saurin n'oppose aucun argument sur la recevabilité de sa demande.
La cour rappelle qu'en appel, le bénéfice de l'article 700 du code de procédure civile peut être demandé pour l'ensemble des sommes exposées à la fois en seconde et en première instance et le montant sollicité à ce titre peut être modifié jusqu'à la clôture pour tenir compte des frais réellement avancés dans la procédure.
Dès lors, en se limitant à préciser dans ses dernières conclusions le montant exact qu'elle demandait pour les frais exposés en première instance et pour ceux exposés en appel, quand bien même ce montant était supérieur à celui sollicité globalement de ces deux chefs dans ses premières conclusions, l'appelante n'a pas manqué à la concentration des prétentions exigée par l'article 910-4 du code de procédure civile.
Sa demande formulée à ce titre est donc recevable.
Sur la demande en paiement de ses factures par la Sas William Saurin Production et sa qualité de créancière de la Sacop Socamil
La Sas William Saurin Production soutient que la Sacop Socamil a manqué à ses obligations contractuelles en refusant le paiement des factures présentées. Elle affirme que l'intimée conteste en vain l'opposabilité du contrat de location-gérance avant la date du 25 juin 2017, alors que l'appelante rapporte la preuve qu'elle l'en a informée le 14 juin 2017 par courrier et que les annonces légales parues les 25, 28 et 30 juin 2017 ont toutes mentionné le caractère rétroactif de l'entrée en vigueur du contrat. Elle maintient que l'intimée ne peut valablement s'opposer au paiement des factures présentées, ce d'autant plus qu'elle a réglé sans contestation les factures postérieures émises avant le terme du contrat de location-gérance.
La Sacop Socamil conteste tout manquement contractuel en soulignant que les factures produites ne matérialisent aucune relation contractuelle directe entre l'appelante et elle. Elle affirme ainsi n'avoir été en relation contractuelle qu'avec la seule Sa William Saurin, le contrat de location-gérance lui étant inopposable avant sa publication le 25 juin 2017. Elle rappelle que l'appelante ne peut rapporter la preuve de ce qu'elle lui a bien adressé le courrier d'information du 14 juin 2017. Dès lors, elle affirme, comme l'a jugé le tribunal de commerce, que seul le paiement de la dernière facture de 176,11 euros, émise le 7 juillet 2017, peut lui être réclamé par l'appelante. Si le contrat de location-gérance devait lui être déclaré opposable, la Sacop Socamil affirme qu'il a opéré non une simple cession de créance entre les deux sociétés William Saurin mais une véritable cession de contrats laquelle nécessitait, pour être valide, son accord en tant que cocontractant.
- sur l'opposabilité du contrat de location-gérance
L'article 1200 du code civil dispose que les tiers doivent respecter la situation juridique créée par le contrat. Cela implique cependant que le tiers ait eu connaissance du contrat qu'on veut lui opposer.
En l'espèce, les parties s'accordent pour reconnaître qu'en application des dispositions de l'article R144-1 du code de commerce, les contrats de location-gérance doivent être publiés dans la quinzaine de leur date sous forme d'extraits ou d'avis dans un support habilité à recevoir les annonces légales et qu'ils sont opposables aux tiers à compter de cette publication.
Les parties s'opposent néanmoins sur la date d'effet du contrat ainsi publié, l'appelante soutenant son entrée en vigueur rétroactive et l'intimée soutenant l'impossibilité de lui opposer les effets du contrat avant le jour de sa publication.
En l'espèce, la Sacop Socamil produit, en pièce 3, la reproduction des 3 annonces légales des 25, 28 et 30 juin 2017 annonçant la reprise du fonds de commerce de la Sas William Saurin par le bais d'un contrat de location-gérance dans les trois établissements détenus par la société en procédure collective. Comme le soutient à juste titre la Sas William Saurin Production, chacune de ses annonces indique expressément que le fonds est « donné en location-gérance pour une période qui commencera à courir rétroactivement à compter du 12/06/2017 pour prendre fin le 30/09/2017 ['] l'entrée en jouissance a été fixée au 12/06/2017 ».
Dès lors, le contrat de location-gérance ayant été valablement publié est bien opposable aux tiers et les annonces légales ayant informé ces tiers de l'entrée en vigueur rétroactive de ses dispositions au 12 juin 2017, il y a lieu de reconnaître que le contrat signé le 13 juin 2017 s'impose à la Sacop Socamil à compter du 12 juin 2017, peu important que l'appelante ne rapporte pas la preuve que l'intimée a bien été informée le 14 juin 2017 par courrier de l'entrée en vigueur rétroactive du contrat.
- sur la qualification de cession de contrats ou de créances
En réplique, la Sacop Socamil soutient que les dispositions du contrat de location-gérance contenues dans les articles 3.2 « facturation » et 4 « créances sur les clients » ont organisé entre le loueur et le locataire-gérant non une simple cession de créances mais une véritable cession de contrats, laquelle nécessite pour son plein effet l'accord du contractant cédé. Ainsi, à l'émission de ses commandes auprès de la Sas William Saurin, la Sacop Socamil a conclu des contrats de vente successifs avec cette dernière qui ne pouvaient être valablement transmis à l'appelante sans son accord. N'ayant donné aucun accord, l'intimée n'est aucunement liée contractuellement à la Sas William Saurin Production et se dit donc fondée à refuser le paiement des factures réclamées.
La Sas William Saurin Production affirme que les dispositions du contrat de location-gérance ont organisé non des cessions de contrats mais de simples cessions de créances entre le loueur et le locataire, lesquelles ne nécessitent pas l'accord du débiteur cédé pour lui être pleinement opposables.
En l'espèce, le contrat de location-gérance a prévu, dans son article 3.2 « facturation », que les commandes passées et livrées après le 12 juin 2017 seraient facturées par la Sas William Saurin Production et réglées auprès d'elle mais que les commandes passées avant le 12 juin 2017, non encore livrées, seraient livrées et facturées par elle. Enfin, il a prévu que les commandes passées avant le 12 juin 2017 et non livrées mais déjà facturées par la Sas William Saurin feraient l'objet d'une annulation comptable de la facture émise, laquelle serait rééditée au nom du locataire-gérant ou rééditée directement par ce dernier. Dans son article 4, le contrat a prévu que les créances déjà acquises sur les clients à la date d'effet du contrat seraient encaissées par le locataire-gérant mais reversées au loueur.
Les articles 1321 et 1323 du code civil disposent que la cession de créance est un contrat par lequel le créancier cédant transmet, à titre onéreux ou gratuit, tout ou partie de sa créance contre le débiteur cédé à un tiers appelé le cessionnaire. Elle peut porter sur une ou plusieurs créances présentes ou futures, déterminées ou déterminables. Elle s'étend aux accessoires de la créance. Le consentement du débiteur n'est pas requis, à moins que la créance ait été stipulée incessible. ['] Entre les parties, le transfert de la créance, présente ou future, s'opère à la date de l'acte. Il est opposable aux tiers dès ce moment.
La relation contractuelle entre la centrale d'achat et ses fournisseurs, en l'absence de production au dossier d'un contrat cadre originel visant à encadrer leurs prestations réciproques, est constituée par une répétition de contrats de vente successifs. Le lien contractuel entre les parties se noue donc de manière répétée mais séquencée de sorte qu'une transmission globale de cette relation contractuelle dans le contrat de location-gérance n'est pas possible.
Dès lors, les dispositions précitées du contrat de location-gérance doivent s'analyser en une simple organisation de cessions de créances entre le loueur et le locataire, certaines déjà existantes et d'autres futures. Partant, le consentement de la Sacop Socamil n'était pas requis pour la validité du transfert des créances la concernant.
Néanmoins, il doit être rappelé qu'aux termes des dispositions de l'article 1324 du code civil, la cession n'est opposable au débiteur, s'il n'y a déjà consenti, que si elle lui a été notifiée ou s'il en a pris acte.
En l'espèce, les annonces légales relatives au contrat de location-gérance ne comportent aucune mention explicitant l'organisation de ce transfert de créances, de sorte que la Sacop Socamil ne pouvait en être informée par leur seule lecture.
Si la Sas William Saurin Production produit le courrier informatif du 14 juin 2017, lequel explicite clairement les modalités du transfert des créances, elle ne produit aucune pièce de nature à prouver l'envoi de ce courrier à la Sacop Socamil et encore moins sa réception.
Cependant, la cour constate qu'il résulte des correspondances échangées entre les parties et produites au dossier, que la Sacop Socamil a eu connaissance du transfert des créances au bénéfice de la Sas William Saurin Production par la réception de la mise en demeure du 6 janvier 2021.
Le fait que l'intimée conteste le droit pour l'appelante de lui réclamer le paiement de ces créances n'invalide pas la notification ainsi faite par le nouveau créancier du transfert des créances la concernant et son opposabilité.
La qualité de créancière de la Sas William Saurin Production envers la Sacop Socamil pour les factures présentées est donc reconnue.
- sur les factures dont le paiement est réclamé par l'appelante
La Sas William Saurin Production produit, pour justifier de ses demandes, les 10 factures réclamées ainsi que les bons de commande afférents, les lettres de voiture signées par l'intimée et les compte-rendus de livraison lesquels attestent tous, sauf le dernier, d'une livraison acceptée sans réserve par la Sacop Socamil.
Dans les factures dont le paiement est réclamé, il doit être relevé que les factures N°90059783 du 16 juin 2017 pour un montant de 42 769,73 euros et N°90059971 du 7 juillet 2017 d'un montant de 176,11 euros correspondent à deux commandes passées le 13 et le 22 juin 2017. Aux termes du contrat de location-gérance, ces commandes étant postérieures à son entrée en vigueur, c'est à juste titre que l'appelante, qui a réalisé toute l'opération de vente, a facturé ces prestations en son nom et qu'elle en réclame personnellement le paiement.
L'ensemble des autres factures produites correspond à des commandes passées par l'intimée les 6 et 9 juin 2017, donc antérieurement à l'entrée en vigueur du contrat, mais à des livraisons réalisées les 15, 16 et 23 juin 2017, postérieurement à cette date. Elles entrent donc dans le cadre de la cession de créance future organisée par le contrat de location-gérance.
La Sas William Saurin justifiant des sommes demandées et la Sacop Socamil n'étant pas fondée à lui en refuser le paiement, l'intimée sera condamnée à verser à l'appelante la somme de 150 956,69 euros à ce titre, le jugement de première instance étant infirmé en intégralité.
- sur les intérêts majorés, les indemnités forfaitaire de retard et la capitalisation des intérêts
La Sas William Saurin Production sollicite l'adjonction à cette somme des intérêts majorés et des indemnités forfaitaires de recouvrement prévus par les dispositions de l'article L441-6 du code de commerce.
La Sacop Socamil conteste la possibilité de se voir appliquer ces intérêts et indemnités en affirmant qu'elle n'a jamais accepté contractuellement de telles stipulations.
L'article L441-6 du code de commerce, dans sa version applicable aux factures en cause, dispose qu'entre professionnels les factures sont payables à échéance maximale de 60 jours et que passé ce délai, des intérêts majorés, au moins équivalents à trois fois le taux légal, ainsi qu'une indemnité forfaitaire de 40 euros pour frais de recouvrement, s'appliquent de plein droit, sans avoir à être communiqués dans un contrat ou par des conditions générales de vente.
En l'espèce, les intérêts majorés comme l'indemnité de recouvrement étant bien mentionnés sur les factures envoyées par l'appelante, il y a lieu de faire droit à sa demande, en fixant le point de départ des intérêts majorés à la date à laquelle la débitrice a eu connaissance de la cession de ces créances soit le 6 janvier 2021, et en fixant le montant de l'indemnité forfaitaire de recouvrement, pour les 10 factures, à la somme totale de 400 euros.
La Sacop Socamil est donc condamnée à verser la somme de 150 956,69 euros avec intérêts majorés équivalent à trois fois le taux de l'intérêt légal à compter de l 'échéance de chacune des factures ainsi que la somme de 400 euros au titre de l'indemnité de recouvrement.
Enfin, la Sas William Production demande que soit ordonnée la capitalisation des intérêts en application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil.
Il est jugé que la pénalité de retard prévue par l'article L. 441-6 du code de commerce, constituant un intérêt moratoire, peut être assortie de la capitalisation prévue à l'article 1343-2 du code civil. Dès lors, il sera fait droit à la demande de l'appelante et la capitalisation des intérêts sera ordonnée.
Sur l'exception de compensation
En cas de condamnation en paiement, la Sacop Socamil demande qu'il soit fait droit à son exception de compensation entre les créances détenues sur elle et celles qu'elle détient elle-même sur la Sas William Saurin et qui ont fait l'objet de sa déclaration de créance dans la procédure collective. Elle affirme que ces créances réciproques se sont compensées automatiquement avant l'ouverture de la procédure collective et qu'il y a donc lieu de limiter le montant global de sa condamnation à la somme de 12 494,40 euros.
La Sas William Saurin Production s'y oppose en mettant en avant que les factures dont elle réclame le paiement n'ont aucun lien avec les factures sur lesquelles la Sacop Socamil souhaite voir la compensation appliquée et qui ont été émises par la Sas William Saurin avant l'entrée en vigueur de la location-gérance.
Conformément aux dispositions de l'article 1324 du code civil, la Sacop Socamil, débitrice cédée, est fondée à opposer au cessionnaire les exceptions inhérentes à la dette, telles la compensation des dettes connexes. Il lui appartient cependant de démontrer le caractère connexe des créances pour lesquelles elle demande la compensation.
L'analyse de la déclaration de créance de la Sacop Socamil démontre qu'elle sollicite la compensation des créances détenues par la Sas William Saurin Production avec des créances qu'elle-même détient sur la Sas William Saurin et qui correspondent à des factures et avoirs antérieurs au 12 juin 2017. Comme le soutient justement l'appelante, ces créances ne sont pas connexes aux 10 factures dont le paiement est réclamé dans le présent litige, lesquelles ne sont pas concernées par la procédure collective ouverte au bénéfice de la Sas William Saurin.
La Sacop Socamil ne rapportant pas la preuve de la connexité des créances, il convient de la débouter de son exception de compensation.
Sur la résistance abusive
La Sas William Saurin Production sollicite enfin l'indemnisation du préjudice qu'elle allègue avoir subi du fait de la résistance abusive de la Sacop Socamil et , en réparation, demande l'allocation d'une somme de 15 000 euros.
La Sacop Socamil conteste toute résistance abusive de sa part, ayant toujours contesté la qualité de créancière de la Sas William Saurin Production.
En application des dispositions de l'article 1231-6 du code civil, les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l'intérêt moratoire.
Ainsi, le préjudice de la Sas William Saurin Production découlant du simple retard dans l'exécution de l'obligation contractuelle a déjà été indemnisé par l'allocation des intérêts majorés à compter de la date d'échéance. En l'absence de justification par l'appelante d'un préjudice distinct, sa demande en dommages et intérêts pour résistance abusive sera rejetée.
Sur les demandes accessoires,
Infirmé intégralement, le jugement de première instance le sera également sur ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance.
La Sacop Socamil, partie succombante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Les circonstances de l'espèce justifient que la Sacop Socamil soit condamnée à verser à la Sas William Saurin Production la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, elle-même étant déboutée de sa demande formulée sur ce fondement.
PAR CES MOTIFS,
La Cour,
Déclare la demande de la Sas William Saurin relative aux frais irrépétibles telle que formulée dans ses dernières conclusions, recevable,
Au fond, infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Et, statuant à nouveau, des chefs infirmés,
Condamne la Sacop Socamil à verser à la Sas William Saurin Production la somme de 150 956,69 euros avec intérêts majorés à trois fois le taux de l'intérêt légal à compter du 6 janvier 2021,
Condamne la Sacop Socamil à verser à la Sas William Saurin Production la somme de 400 euros au titre des indemnités forfaitaires de recouvrement prévues à l'article L441-6 du code de commerce,
Ordonne la capitalisation des intérêts,
Rejette la demande d'indemnisation formulée par la Sas William Saurin Production au titre de la résistance abusive,
Y ajoutant,
Condamne la Sacop Socamil aux dépens de première instance et d'appel,
Condamne la Sacop Socamil à verser à la Sas William Saurin Production la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute la Sacop Socamil de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le greffier La présidente
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