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Décisions

CA Pau, ch. soc., 25 septembre 2025, n° 23/01633

PAU

Arrêt

Autre

CA Pau n° 23/01633

25 septembre 2025

AC/EL

Numéro 25/2641

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 25/09/2025

Dossier : N° RG 23/01633 - N° Portalis DBVV-V-B7H-IRUY

Nature affaire :

Contestation du motif économique de la rupture du contrat de travail

Affaire :

[M] [B]

C/

S.A.S. PG2M

Grosse délivrée le

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 25 Septembre 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 19 Février 2025, devant :

Madame CAUTRES, Présidente

Madame SORONDO, Conseiller

Mme PACTEAU, Conseiller

assistées de Madame LAUBIE, Greffière.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

Madame [M] [B]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Laurent KLEIN, avocat au barreau de BAYONNE

INTIMEE :

S.A.S. PG2M

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Karine POTHIN-CORNU de la SELARL KARINE POTHIN-CORNU, avocat au barreau de PAU, et Me Jean-charles GUILLARD de la SELARL SELARL MARRE & GUILLARD, avocat au barreau de PARIS

sur appel de la décision

en date du 11 MAI 2023

rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE BAYONNE

RG numéro : F21/00136

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 17 juin 2008, Mme [M] [B] a été embauchée par la société Alambic en qualité de vendeuse, suivant contrat à durée indéterminée.

Par avenant du 21 octobre 2016, elle a été promue au poste de responsable de magasin, non cadre.

Son salaire de base mensuel comportait une rémunération fixe, une prime mensuelle variable équivalente à 1% du chiffre d'affaires TTC global du magasin et une prime d'objectif de 230 euros mensuels.

En septembre 2020, la société Alpha 53 a repris le bail de la société Alambic avec le contrat de travail de Mme [B].

Par acte du 21 octobre 2020, la société Alpha 53 a cédé son fonds de commerce à la société PG2M. Le contrat de travail de Mme [B] a été repris.

Par courrier du 8 novembre 2020, la société PG2M a proposé à Mme [B] un avenant au contrat de travail portant modification de la structure de sa rémunération.

Par mail du 9 novembre 2020, Mme [B] a refusé de souscrire à cet avenant.

Le 3 décembre 2020, la société PG2M a signé un contrat de franchise avec la marque Max Mara.

Par courrier du 20 décembre 2020, la société PG2M a renouvelé auprès de la salariée sa proposition relative à la modification de la structure de sa rémunération.

Par courrier du 12 janvier 2021, la salariée a de nouveau refusé de souscrire à cet avenant.

Le 29 janvier 2021, Mme [B] a été convoquée à un entretien préalable au licenciement économique, fixé au 8 février 2021 et reporté au 11 février suivant.

A compter du 3 février 2021, Mme [B] a été placée en arrêt de travail.

Mme [B] ne s'est pas présentée à l'entretien.

Le 5 février 2021, l'employeur lui a adressée une liste de postes à pourvoir dans les boutiques gérées par la société PG2M, accompagnée d'un délai de réflexion de 4 jours.

Le 20 février 2021, l'employeur lui a adressés les documents relatifs au contrat de sécurisation professionnelle.

Le 26 février 2021, Mme [B] a été licenciée pour motif économique.

Le 17 mai 2021, Mme [B] a saisi la juridiction prud'homale au fond

Par jugement du 11 mai 2023, le juge départiteur du conseil de prud'hommes de Bayonne a':

- Dit que le licenciement pour motif économique de Mme [M] [B] est bien fondé sur une cause réelle et sérieuse, en raison de son refus de voir modifier la structure de sa rémunération, cette réorganisation étant nécessaire pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise,

- Dit que la société SAS PG2M a satisfait à son obligation de reclassement,

- Rejeté les demandes de Mme [M] [B] en paiement d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- Condamné Mme [M] [B] aux dépens,

- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 9 juin 2023, Mme [B] a interjeté appel du jugement dans des conditions de forme et délai qui ne sont pas contestées.

Dans ses conclusions adressées au greffe par voie électronique le 1er septembre 2023 auxquelles il y a lieu de se référer pour l'exposé des faits et des moyens, Mme [M] [B] demande à la cour de':

- Réformer le jugement rendu le 11 mai 2023 par le conseil de prud'hommes de Bayonne dans toutes ses dispositions,

Statuant de nouveau,

> A titre principal,

- Condamner la société PG2M à verser à Mme [M] [B] la somme nette de CSG et CRDS de 50.000 euros au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

> A titre subsidiaire,

- Condamner la société PG2M à verser à Mme [M] [B] la somme de 29.345,14 euros au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

> En tout état de cause,

- Condamner la SAS PG2M à remettre à Mme [M] [B] son dernier bulletin de salaire et ses documents de fin de contrat rectifiés dans un délai de 15 jours à compter de la décision à intervenir,

- Condamner la SAS PG2M à verser à Mme [M] [B] la somme de 3.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

- Débouter la SAS PG2M de toutes demandes contraires,

- Condamner la SAS PG2M aux entiers dépens.

Dans ses conclusions adressées au greffe par voie électronique le 1er décembre 2023 auxquelles il y a lieu de se référer pour l'exposé des faits et des moyens, la SAS PG2M demande à la cour de':

- Dire et juger qu'est intervenu pour une cause réelle et sérieuse le licenciement de Mme [B],

En conséquence,

- Débouter Mme [B] de sa demande de dommages et intérêts,

- Confirmer la décision entreprise,

- Dire et juger que la société PG2M a satisfait à son obligation de reclassement dans le contexte résultant du refus de Mme [B] de voir modifier la structure de sa rémunération,

- Confirmer la décision entreprise,

En conséquence, là encore,

- Débouter Mme [B] de sa demande de dommages et intérêts,

- Débouter Mme [B] de sa demande en complément d'indemnité de licenciement,

- Confirmer la décision entreprise.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 20 janvier 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I ' Sur le licenciement

Aux termes de l'article L.1222-6 du code du travail, lorsque l'employeur envisage la modification d'un élément essentiel du contrat de travail pour l'un des motifs économiques énoncés à l'article L.1233-3, il en fait la proposition au salarié par lettre recommandée avec avis de réception.

La lettre de notification informe le salarié qu'il dispose d'un mois à compter de sa réception pour faire connaître son refus.

A défaut de réponse dans le délai d'un mois, le salarié est réputé avoir accepté la modification proposée.

Selon l'article L.1233-2 du code du travail, tout licenciement pour motif économique doit être motivé et justifié par une cause réelle et sérieuse.

Aux termes de l'article L.1233-3 du code du travail':

«'Constitue un licenciement pour motif économique'le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment':

(')

3°) A une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;

(')

Les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise s'apprécient au niveau de cette entreprise si elle n'appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d'activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national, sauf fraude. (')'».

Par courrier du 29 février 2021, Mme [B] a été licenciée en ces termes':

«'(') Par acte en date du 21 octobre 2020, la société PG2M, dont je suis le Président, a acquis la société Alpha 53, un fonds de commerce de vente de prêt-à-porter et accessoires.

Y était exploitée la marque Repeat à laquelle va se substituer celle de la marque Max Mara.

Votre contrat de travail a été repris en application des dispositions de l'article L.1224-1 du code du travail.

Vous exercez les fonctions de Responsable de magasin, étant précisé que vous êtes par ailleurs la seule salariée.

Vous bénéficiez d'une prime mensuelle variable équivalente à 1% du chiffre d'affaires global du magasin, toutes taxes comprises.

Le mode d'exploitation de la marque Max Mara requiert l'embauche de deux salariés complémentaires afin d'assurer une amplitude d'ouverture plus conforme à son positionnement.

Ceci amène à remettre en cause la prime variable dont vous bénéficiez et qui ne se justifie plus.

En effet, vous ne serez plus la seule responsable du chiffre d'affaires puisque d'autres salariés y concourront.

Par ailleurs, maintenir une telle prime instituerait une discrimination entre les salariés alors que rien ne justifie que chacun d'entre eux bénéficie de la même prime dont l'assiette serait le chiffre d'affaires global.

Au surplus, cette prime a pour assiette le chiffre d'affaires TTC, ce qui est dépourvu de toute rationalité économique.

(') compte tenu des nouvelles conditions d'exploitation de ce fonds, de l'adaptation nécessaires à ces nouvelles conditions et afin de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise, je vous ai proposé de pérenniser votre rémunération en intégrant à votre rémunération de base, la prime mensuelle variable que vous perceviez'; votre niveau de rémunération vous était donc ainsi garanti.

Vous avez refusé cette évolution (')'».

Il résulte tant de la lettre de licenciement ainsi rédigée que des écritures de l'intimé que le motif économique du licenciement de Mme [B] réside dans la réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité.

Mme [B] sollicite la réformation du jugement déféré, estimant que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Elle expose que la suppression de sa rémunération variable n'est pas justifiée par la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise et que société PG2M appartient à un groupe de sorte que le motif économique invoqué doit être apprécié dans le cadre de ce périmètre.

Au soutien de son argumentaire, elle produit au dossier notamment les éléments suivants':

- Le courrier du 21 octobre 2016 prévoyant sa nomination au poste de responsable de magasin et le versement d'une prime mensuelle variable équivalente à 1% du chiffre d'affaires TTC global du magasin';

- Ses bulletins de salaire';

- Un extrait de l'accord du 12 octobre 2006 relatif aux classifications de la convention collective nationale du commerce de détail de l'habillement et des articles textiles du 2 novembre 2987'ainsi que l'avenant n°24 du 8 février 2018 relatif aux salaires minima 2018';

- Le contrat de franchise conclu entre la société Max Mara et la société PG2M ;

- Les deux propositions de modification de la rémunération de la société PG2M des 8 novembre et 20 décembre 2020 ainsi que les deux mail et courrier refus de la salariée'des 9 novembre et 12 janvier 2021';

- Un courrier du 5 février 2021 de la société PG2M comportant la liste des postes à pourvoir';

- Des attestations de son ancien employeur et de clients';

- Les statuts des sociétés PG2M, PG007, PGHP, Hiruzkia et Berfil';

- Les registres du commerce et des sociétés des sociétés PG2M et PGHP.

L'employeur sollicite la confirmation du jugement déféré.

Il expose que la signature d'un contrat de franchise avec la marque Max Mara allait entraîner de nouvelles conditions d'exploitation (modification des méthodes et de la répartition du travail, embauche de personnel), ainsi qu'une majoration du chiffre d'affaires.

Il précise que ces nouvelles embauches rendaient nécessaires la modification de la structure de la rémunération de Mme [B] afin qu'elle ne perçoive pas une rémunération dont l'assiette serait le travail de ses collègues, et que cette modification n'entraînait pas de baisse de sa rémunération.

Il ajoute enfin que la société PG2M n'appartient pas à un groupe.

Au soutien de son argumentaire, l'employeur produit au dossier notamment les éléments suivants':

- La lettre de licenciement du 29 janvier 2021';

- La cession de fonds de commerce conclue entre la société Alpha 53 et la société PG2M';

- Le bail commercial conclu entre la société Alma et la société PG2M';

- Le contrat de franchise conclu entre la société Max Mara et la société PG2M';

- Un courrier du 21 octobre 2016 de la SARL Alambic informant notamment Mme [B] du versement d'une prime mensuelle variable équivalente à 1% du chiffre d'affaires TTC global du magasin';

- Le bulletin de paie de la salariée d'avril 2019';

- Les deux propositions de modification de la rémunération de la société PG2M des 8 novembre et 20 décembre 2020 ainsi que les deux mail et courrier de refus de la salariée des 9 novembre et 12 janvier 2021 ;

- Un courrier du 3 février 2021 de la société PG2M informant la salariée de la modification de la date de convocation à l'entretien préalable au licenciement';

- Un courrier du 5 février 2021 de la société PG2M informant la salariée des postes à pourvoir au sein des différentes boutiques gérées par la société';

- Un courrier du 20 février 2021 de la société PG2M proposant à la salariée l'adhésion au contrat de sécurisation professionnelle';

- Le registre du personnel de la boutique de Biarritz sur la période du 1er octobre 2020 au 31 décembre 2021';

- Une impression écran d'un logiciel interne de la société PG2M faisant état d'un chiffre d'affaires de 335.905 euros réalisé dans le magasin Max Mara de [Localité 5] sur la période du 1er juin 2021 et 7 janvier 2022';

- Un tableau recensent les chiffres d'affaires réalisés par la boutique «'Repeat'» sur les années 2015, 2016, 2017, 2018 et 2019';

- Un mail du 7 janvier 2022 de Mme [R], salariée de la société Max Mara, adressé au président de la société PG2M concernant l'ouverture de la boutique Max Mara [Localité 5] en franchise': «'Suite à l'ouverture de la boutique (') et conformément à nos accords pour l'ouverture de ce point de ventes, nous sommes convenus qu'une Directrice de boutique est requise pour la bonne gestion du point de vente ('). De plus, il est impératif que deux personnes soient présentes de façon permanente sur la surface de vente, compte tenu de sa configuration et pour une gestion toujours optimale du passage (')'».

La cour relève que les parties sont contraires sur l'appartenance de la société PG2M à un groupe.

Conformément à l'article L.1233-3 du code du travail susvisé, il appartient d'abord à la cour de déterminer le périmètre d'appréciation du motif économique du licenciement (A) avant d'analyser le bien-fondé du motif économique du licenciement invoqué (B).

A) Sur le périmètre d'appréciation du motif économique

Selon l'article L.1233-3 du code du travail, la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise s'apprécie au niveau de cette entreprise si elle n'appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d'activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national, sauf fraude.

La notion de groupe désigne le groupe formé par l'entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L.233-1, aux I et II de l'article L.233-3 et à l'article L.233-16 du code du commerce.

Il est admis que le groupe est défini par l'existence de liens capitalistiques entre les sociétés qui le compose, l'une d'elles devant posséder plus de la moitié du capital d'une autre société.

Le secteur d'activité permettant d'apprécier la cause économique du licenciement est caractérisé, notamment, par la nature des produits biens ou services délivrés, la clientèle ciblée, ainsi que les réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché.

En l'espèce, il résulte des statuts produits par la salariée que la société PG2M a pour objet, en France et à l'étranger, directement ou indirectement, toutes activités de vente au détail, de dépôt-vente, d'achat, de revente, de prêt-à-porter de tous textiles, vêtements, maillots de bains, chaussures et autres articles chaussantes, d'accessoires de mode.

La société PG2M est détenue à 24,50% par la société Hiruzkia et à 75,50% par la société Berfil.

La société Hiruzkia a notamment pour objet l'animation, le contrôle, la direction, la gestion, l'administration et le financement des sociétés dans lesquelles elle détient une participation.

La société Berfil a quant a elle pour objet l'exploitation de fonds de commerce de détail et de gros, l'importation, l'exportation et la vente en gros et détail de biens de consommations, produits de luxe et bijoux, le conseil en entreprise, opérations commerciales et immobilières.

Ces deux sociétés détiennent également les sociétés PG007 et PGHP, lesquelles ont le même secteur d'activité que la société PG2M.

Ces éléments ne sont pas utilement contredits par l'employeur, lequel se contente de réfuter l'existence d'un groupe sans communiquer à la cour d'éléments permettant d'apprécier le périmètre de l'entreprise.

Il résulte de ces constatations que la société PG2M appartient à un groupe.

En conséquence, le motif économique tenant à la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise invoqué par l'employeur doit s'apprécier au niveau du secteur d'activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient.

B) Sur la cause économique du licenciement

En application de l'article L.1233-3 du code du travail, toute réorganisation de l'entreprise constitue un motif de licenciement si elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe dont elle relève en prévenant les difficultés économiques à venir et leurs conséquences sur l'emploi.

La réorganisation de l'entreprise suppose pour l'employeur de démontrer':

- l'existence de signes concrets et objectifs d'une menace pesant sur l'avenir de l'entreprise ou du secteur d'activité,

- et que les mesures de réorganisation sont décidées dans le but exclusif d'assurer la'sauvegarde'de la'compétitivité'de l'entreprise ou du secteur d'activité.

Pour mémoire, le groupe auquel appartient la société PG2M a pour secteur d'activité toutes activités de vente au détail, de dépôt-vente, d'achat, de revente, de prêt-à-porter de tous textiles, vêtements, maillots de bains, chaussures et autres articles chaussantes, d'accessoires de mode.

En l'espèce, il apparaît qu'aucune des pièces produites par la société PG2M ne permet d'établir que le maintien de la rémunération variable de la salariée constituait une menace pesant sur le secteur d'activité du groupe.

La société PG2M ne justifie pas d'avantage que la mesure de réorganisation employée, à savoir la modification de la structure de sa rémunération, ait été décidée

dans le but exclusif d'assurer la sauvegarde de la compétitivité de ce secteur d'activité.

Elle se contente d'invoquer des arguments relatifs aux nouvelles conditions d'exploitation du fonds de commerce en lien avec l'exploitation de la marque Max Mara.

Au surplus, les arguments soulevés par l'employeur afférents au maintien de la rémunération de Mme [B] et aux prétendues contraintes auxquelles il était soumis du fait de l'exploitation de la marque Max Mara sont inopérants.

A ce titre, la cour relève que contrairement à ce que soutient l'employeur, le contrat de franchise conclu avec la société Max Mara ne faisait peser sur la société PG2M aucune contrainte liée au recrutement ou aux conditions de rémunération du personnel.

Par conséquent, le motif économique tenant à la réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité n'est pas caractérisé.

Le licenciement de Mme [B] est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

Dans ces conditions, il n'y a pas lieu d'examiner les demandes afférentes à l'obligation de reclassement.

II ' Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Selon l'article L.1235-3 du code du travail, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse et à défaut d'accord des parties sur la réintégration du salarié, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés dans le tableau prévu par ce texte.

Dans ces conditions, le salarié disposant d'une ancienneté de 12 années a droit a une indemnité comprise entre 3 et 11 mois de salaire.

Mme [B] demande à la cour, à titre principal, d'écarter le barème Macron et de lui allouer la somme de 50.000 euros. A défaut, elle sollicite la somme de 29.345,14 euros correspondant à 11 mois de salaire en application de l'article susvisé. Elle précise être en recherche d'emploi.

La société PG2M sollicite le débouté de cette prétention. Elle soutient que la situation de chômage de la salariée résulte de son refus d'accepter la modification contractuelle proposée et que le nombre de candidatures ne démontre pas un empressement de sa part à retrouver un emploi.

En l'espèce, le licenciement de Mme [B] est dépourvu de cause réelle et sérieuse et celle-ci justifie d'une ancienneté de 12 ans et 10 mois à date de la rupture de son contrat de travail.

Au vu des pièces et des explications fournies, de l'âge de Mme [B], de son ancienneté, et des conséquences du licenciement à son égard, il lui sera alloué, sans qu'il y ait lieu d'écarter le barème Macron, la somme de 29.345,14 euros correspondant à 11 mois de salaire.

Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

III ' Sur la remise des documents rectifiés

Le licenciement économique de Mme [B] étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, la société PG2M sera condamnée à lui remettre son dernier bulletin de salaire et ses documents de fin de contrat rectifiés.

IV ' Sur les frais irrépétibles et les dépens

Mme [B] sollicite la condamnation de la société PG2M à lui verser la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'équité commande de ne pas laisser à la charge de la salariée les frais non compris dans les dépens qu'elle a engagés en appel.

La société PG2M sera donc condamnée lui verser la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

En application de l'article 696, la société PG2M, qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS':

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu par le conseil des prud'hommes de [Localité 4] le 11 mai 2023.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que le licenciement de Mme [B] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la société PG2M à verser à Mme [B] la somme de 29.345,14 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la société PG2M à remettre à Mme [B] son dernier bulletin de salaire et les documents de fin de contrat rectifiés,

Condamne la société PG2M à payer à Mme [B] la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société PG2M aux dépens de première instance et d'appel.

Arrêt signé par Madame CAUTRES, Présidente, et par Madame LAUBIE, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

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