CA Montpellier, 2e ch. de la famille, 3 octobre 2025, n° 23/03643
MONTPELLIER
Arrêt
Autre
ARRÊT n°
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre de la famille
ARRET DU 03 OCTOBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 23/03643 - N° Portalis DBVK-V-B7H-P4SY
Décision déférée à la Cour :
Jugement du [Date décès 5] 2023
JUGE AUX AFFAIRES FAMILIALES DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RODEZ
N° RG 20/00893
APPELANTE :
Madame [E] [F]
née le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 30]
de nationalité Française
[Adresse 20]
[Adresse 10]
[Localité 6]
Représentée à l'instance et à l'audience par Me Christelle CLEMENT, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMES :
Madame [I], [Z] [N]
née le [Date naissance 8] 1970 à [Localité 24] (75),
de nationalité française,
[Adresse 14]
[Localité 15]
Monsieur [L] [B] [Y] [N]
né le [Date naissance 9] 1967 à [Localité 24] (75),
de nationalité française,
[Adresse 2]
[Localité 16]
Venant tous deux aux droits de leur père, Monsieur [C] [N], intimé, décédé le [Date décès 5] 2025 à [Localité 18] (63)
Représentés à l'instance par Me Sophie DEBERNARD JULIEN substituée par Me Mehdi BENAMEUR de la SCP PALIES - DEBERNARD-JULIEN - MARTIN-VELEINE - CLAISE - PJDA, avocats au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 05 Juin 2025
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 JUIN 2025, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :
Mme Karine ANCELY, Conseillère faisant fonction de présidente de chambre
Mme Sandrine FEVRIER, Conseillère
M. Yoan COMBARET, Conseiller
qui en ont délibéré.
En présence de Mme [D] [P] et Mme [J] [S] [H], auditrices de justice
Greffier lors des débats : Mme Marion CIVALE
ARRET :
- contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Karine ANCELY, Conseillère faisant fonction de présidente de chambre, et par Mme Marion CIVALE, Greffier.
*
* *
EXPOSÉ DU LITIGE
Mme [E] [F] et M. [C] [N] ont contracté mariage le [Date mariage 12] 1991 devant l'officier d'état civil de la commune de [Localité 28] (12), en ayant précédemment conclu un contrat de mariage de séparation de biens devant Me [A], notaire à [Localité 28].
Aucun enfant n'est issu de cette union.
Selon requête reçue au greffe le 6 mai 2013, M. [N] a saisi le juge aux affaires familiales de [Localité 28] d'une demande en divorce.
Suivant ordonnance de non-conciliation rendue le 28 juin 2013, le juge a'notamment désigné Me [T] [U], notaire à [Localité 21] (12), en vue d'élaborer un projet de liquidation et de formation des lots à partager.
Par acte d'huissier de justice du 8 avril 2015, M. [N] a fait assigner son épouse en divorce sur le fondement de l'article 242 du code civil.
Suivant jugement rendu le 12 septembre 2017, le juge aux affaires familiales de [Localité 28] a':
- débouté M. [N] de sa demande en divorce sur le fondement de l'article 242 du code civil
- prononcé sur le fondement de l'article 238 du code civil le divorce de M. [N] et Mme [F]
- condamné M. [N] à verser à Mme [F] une prestation compensatoire en capital d'un montant de 70 000 €
- ordonné, en tant que besoin, la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux du divorce et désigné Me [U], notaire, pour procéder aux opérations de liquidation
- attribué à titre préférentiel à M. [N] les biens immobiliers sis [Adresse 3] et [Adresse 11] à charge de verser une soulte à Mme [F].
Un procès-verbal de difficultés a été dressé par Me [U] le 19 septembre 2018.
Par acte d'huissier de justice du 3 janvier 2019, M. [N] a fait assigner Mme [F] devant le tribunal de grande instance de Rodez aux fins de prononcer le partage des biens indivis existant entre eux.
Suivant ordonnance rendue le 9 mai 2019, le juge de la mise en état a déclaré le tribunal de grande instance de Rodez incompétent pour connaître de la demande en liquidation des intérêts patrimoniaux des parties et a renvoyé la cause et les parties devant le juge aux affaires familiales de Rodez, seul compétent pour en connaître.
En raison du défaut de diligence des parties, une ordonnance de radiation de l'affaire au rang des procédures en cours a été rendue le 18 juin 2020.
M. [N] a déposé des conclusions de réinscription au rang des procédures en cours le 14 septembre 2020.
Par jugement du 18 novembre 2021, le juge aux affaires familiales de [Localité 28] a :
- ordonné le partage de l'indivision existant entre Mme [F] et M. [N] à la suite de la rupture de leur vie commune,
Avant dire droit,
- renvoyé à l'audience de mise en état du 16 décembre 2021 aux fins de recueillir l'accord des parties sur l'opportunité d'ordonner une mesure de médiation civile ainsi qu'une mesure d'expertise,
- réservé les demandes,
- réservé les dépens.
Par jugement du 13 décembre 2022, le juge aux affaires familiales de [Localité 28] a :
- ordonné la réouverture des débats,
- invité les parties à produire la copie du second procès-verbal de difficultés établi le 19 septembre 2018 par Me [U], avec la participation de Me [R] [X], notaire,
- invité les parties à déposer des conclusions qui respectent scrupuleusement les dispositions de l'article 768 du code de procédure civile,
- renvoyé la cause et les parties à l'audience de mise en état électronique du 16 février 2022 à 9 heures,
- réservé les dépens.
Par jugement contradictoire du [Date décès 5] 2023, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Rodez, a :
- déclaré recevables les demandes de M. [N],
- constaté le refus des parties de mettre en place une mesure de médiation,
- dit que, compte-tenu de l'attribution préférentielle décidée dans le jugement de divorce du 12 septembre 2017, les appartements sis à [Localité 33] (94) et de [Localité 23] (94) seront attribués à M. [N] à charge pour lui de verser une soulte égale à la moitié de leur valeur à Mme [F],
- dit que Mme [F] est débitrice envers M. [N] d'une dette égale à la moitié de la valeur des appartements sis à [Localité 33] (94) et de [Localité 23] (94) au titre du financement de leurs acquisitions,
- fixé la valeur de l'appartement sis à [Localité 33] (94) à la somme de 690'000 €,
- fixé la valeur de l'appartement sis à [Localité 23] (94) à la somme de 305 000 €,
- dit que Mme [F] est débitrice envers M. [N] d'une dette d'un montant de 130 000 € pour le versement sur son contrat d'assurance-vie [17] numéro 90009222101688 d'une telle somme par le demandeur,
- commis le juge délégué aux affaires familiales chargé des liquidations au tribunal judiciaire de Rodez pour surveiller les opérations de partage,
- renvoyé les parties devant Me [U], notaire à [Localité 21] (12)
- condamné Mme [F] à payer à M. [N] la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté Mme [F] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de toute(s) éventuelle(s) autre(s) demande(s),
- condamné Mme [F] aux entiers dépens de la présente instance qui seront recouvrés directement par Me Pierrette Feloux-Teran, avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Par déclaration au greffe du 13 juillet 2023, Mme [F] a interjeté appel de la décision.
M. [N] est décédé le [Date décès 7] 2025.
Mme [F], dans ses conclusions du 3 juin 2025, demande à la cour de :
- infirmer le jugement rendu le [Date décès 5] 2023 par le juge aux affaires familiales de [Localité 28] en ce qu'il a dit que Mme [F] est débitrice envers M. [N] d'une dette égale à la moitié de la valeur de l'appartement sis à [Localité 33] (94),
- infirmer le jugement rendu le [Date décès 5] 2023 par le juge aux affaires familiales de [Localité 28] en ce qu'il a dit que Mme [F] est débitrice envers M. [N] d'une dette d'un montant de 130 000€ pour le versement sur son contrat d'assurance-vie [17] numéro 90009222101688 d'une telle somme par le demandeur,
- infirmer le jugement rendu le [Date décès 5] 2023 par le juge aux affaires familiales de [Localité 28] en ce qu'il a condamné Mme [F] à payer à M. [N] la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens,
- infirmer le jugement rendu le [Date décès 5] 2023 par le juge aux affaires familiales de [Localité 28] en ce qu'il a débouté Mme [F] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Statuant à nouveau,
- juger que les remboursements des crédits immobiliers contractés lors de l'acquisition de l'appartement sis à [Adresse 35] relèvent de la contribution aux charges du mariage,
- juger que M. [N] est débiteur d'une soulte à l'égard de Mme [F] à hauteur de 134 166,90 € s'agissant de l'appartement dont ils sont propriétaires indivis à [Localité 33] [Adresse 4],
En conséquence,
- condamner M. [N] à régler à Mme [F] la somme de 134 166,90 €,
- juger que l'abondement à hauteur de 130 000 € du contrat d'assurance vie [17] n° 90009222101688 de Mme [F] par M. [N] le 15 mars 2001 constitue une donation rémunératoire.
En conséquence,
- juger que Mme [F] n'est redevable d'aucune somme à l'égard de M. [N] au titre de l'abondement de son contrat d'assurance vie [17] n° 90009222101688,
- commettre le juge délégué aux affaires familiales charge des liquidations au tribunal judiciaire de Rodez pour surveiller les opérations de partage,
- renvoyer les parties devant Me [U], notaire à [Localité 21],
- condamner M. [N] à régler à Mme [F] la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [N] aux entiers dépens.
Mme [F] revient sur la procédure de divorce et le montant de la prestation compensatoire qui lui a été allouée faisant remarquer que le montant retenu par le juge aux affaires familiales a été apprécié en fonction du règlement des intérêts patrimoniaux, que M. [K] ne lui avait jamais versé la prestation compensatoire de sorte que les intérêts de retard courent.
Sur le bien indivis acquis en 1994 situé à [Localité 33], elle affirme que leur résidence principale a été fixée dans cet appartement acquis en l'état futur d'achèvement et livré en 1998. Elle fait également valoir une jurisprudence de la Cour de cassation faisant application de la notion de contribution aux charges du mariage à une résidence secondaire et sollicite l'application de cette notion au remboursement du crédit affecté sur ce bien par M. [K]. Elle reprend la clause relative à la contribution aux charges du mariage stipulé dans leur contrat de mariage signé le 6 août 1991 adoptant le régime de la séparation de biens, pour rappeler son caractère irréfragable. Si toutefois la cour retenait que cette clause bénéficie d'une présomption simple et non irréfragable, elle ajoute qu'il incomberait aux intimés de démontrer que le remboursement du crédit immobilier excède largement la part contributive qui était celle de M. [K]. Eu égard à la valeur de l'appartement non contesté par les intimés, et à l'attribution préférentielle, elle se considère dès lors titulaire d'une soulte à hauteur de 134'166,90 €.
Sur l'abondement du contrat d'assurance-vie ouverte à son nom, elle souligne la relaxe prononcée par le tribunal correctionnel de Rodez le 23 mars 2021 sur le prétendu faux et usage de faux avancés par M. [K] selon lequel elle aurait signé elle-même l'abondement. Elle explique le montant de la somme versée sur le contrat d'assurance-vie comme provenant de la vente d'un fonds de commerce dont M. [K] était propriétaire pour un prix de plus de 3 millions de francs en 1999 et dans lequel elle s'était beaucoup investie au-delà de ce qu'elle était rémunérée. La concomitance entre l'abondement et la vente est selon elle un indice sur la volonté de son ex-mari de la « rémunérer » pour son investissement constant et important à ses côtés dans l'exploitation du fonds. Elle ajoute que le choix de ce placement tend à considérer que M. [K] a voulu l'indemniser de l'absence de cotisations retraite, précisant qu'elle était rémunérée au [31] de l'époque pour un travail allant au-delà de la durée légale. Elle en déduit que la demande à hauteur de 130'000 € de son contrat d'assurance vie par son mari constitue une donation rémunératoire.
M. [L] [N] et Mme [I] [N], venant aux droits de leur père M. [C] [K], dans leurs conclusions du 30 mai 2025, demandent à la cour de :
- déclarer la reprise d'instance et d'action par les héritiers de M. [N]
Sur le fond,
- confirmer le jugement du [Date décès 5] 2023 en ce qu'il a :
- dit que Mme [F] est débitrice envers M. [N] d'une dette égale à la moitié de la valeur de l'appartement sis à [Localité 33] (94) au titre du financement de son acquisition,
- dit que Mme [F] est débitrice envers M. [N] d'une dette d'un montant de 130 000 € pour le versement sur le contrat d'assurance vie [17] numéro 90009222101688 d'une telle somme par le demandeur,
- condamné Mme [F] à payer à M. [N] la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens,
- débouté Mme [F] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En conséquence,
- débouter Mme [F] de ses demandes tendant à :
- juger que les remboursements des crédits immobiliers contractés lors de l'acquisition de l'appartement sis à [Adresse 34] relèvent de la contribution aux charges du mariage,
- juger que M. [N] est débiteur d'une soulte à l'égard de Mme [F] à hauteur de 134.166,90 € s'agissant de l'appartement dont ils sont propriétaires indivis à [Adresse 34],
- condamner M. [N] à régler à Mme [F] la somme de 134 166,90€
- juger que l'abondement à hauteur de 130 000 € du contrat d'assurance vie [17] n° 90009222101688 de Mme [F] par M. [N] le 15 mars 2001 constitue une donation rémunératoire,
- juger que Mme [F] n'est redevable d'aucune somme à l'égard de M. [N] au titre de l'abondement de son contrat d'assurance vie [17] n° 90009222101688
- condamner M. [N] à régler à Mme [F] la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [N] aux entiers dépens.
Y ajoutant,
- condamner Mme [F] aux intérêts au taux légal entre particuliers ayant couru depuis le 6 mars 2001 sur la somme de 130 000 € due à M. [N],
- la condamner à verser 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens.
M. et Mme [N] rappellent les modalités de financement de l'appartement situé à [Localité 33] à savoir exclusivement financé par leur père ce qui n'est pas contesté par la partie adverse. S'agissant du remboursement des trois prêts immobiliers d'un montant global de 700'000 Fr. (106'714,65 €) consenti par le [19] [Localité 27] [Localité 29] au seul nom de M. [N] dont les échéances étaient prélevées exclusivement sur le compte personnel de leur père, ils reconnaissent que le paiement par un seul des époux de l'intégralité du prix ayant permis l'acquisition d'un bien indivis pour moitié tel que figurant dans l'acte, constitue une donation en raison de l'intention libérale qui animait leur père lors de l'achat du bien mais ils ajoutent que conformément à l'ancien article 1096 du code civil, la donation était révocable ce que leur père a bien pris soin de faire avant même que le divorce ne soit prononcé. En réponse à l'argument adverse opposant l'obligation contributive, ils répliquent que l'appartement de [Localité 33] n'a jamais constitué la résidence principale des ex époux qui vivaient à [Localité 25]. Ils rappellent que la jurisprudence relative à la contribution aux charges du mariage écarte les apports réalisés par un des époux, de sorte que seuls les prêts remboursés entrent dans la discussion. Ils ajoutent que leur père a souscrit seuls les prêts, que son ex-épouse n'était pas engagée, qu'il n'a donc pas remboursé des échéances communes mais une dette personnelle, que cette dette trouve son origine dans le financement de la quotité du bien qu'il a donnée à son épouse, qu'il a donc uniquement réglé la quotité acquise par son épouse et qu'il s'agit incontestablement d'une donation révocable. S'agissant de l'hypothèse selon laquelle leur père aurait voulu rémunérer son épouse, ils expliquent que Mme [V] travaillait au sein du bar tabac de leur père en qualité de salarié, qu'elle a ainsi cotisé pleinement pour sa retraite. Ils excluent la qualification de donation rémunératoire pour l'appartement de [Localité 33].
Sur l'abondement par M. [K] à l'aide de fond personnel le 6 mars 2001 du contrat d'assurance-vie ouvert au nom de Mme [F], à hauteur de 130'000 €, ils soulignent que le tribunal correctionnel n'a pas condamné Mme [F] uniquement en raison de l'extinction de l'action publique pour prescription, et ajoutent que l'appelante n'apporte pas la démonstration du caractère rémunératoire de cette donation telle qu'elle la qualifie. Ils demandent la restitution de cette somme au visa des dispositions de l'article 1240 du code civil considérant que l'appelant a commis une faute par le faux en écriture, ou au visa des dispositions de l'article 955 du code civil pour ingratitude en l'état du délit grave commis par l'appelante, ou au visa de l'article 1096 ancien du code civil à défaut de justifier de sacrifice professionnel ou financier susceptible de conférer un caractère rémunératoire à cette donation.
Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 juin 2025.
SUR CE LA COUR
Sur la reprise d'instance par les héritiers de M. [K]
Selon l'article 370 alinéa 1er du code de procédure civile, à compter de la notification qui en est faite à l'autre partie, l'instance est interrompue par, le décès d'une partie dans les cas où l'action est transmissible.
Selon l'article 376 du code de procédure civile, l'interruption de l'instance ne dessaisit pas le juge.
Selon l'article 373 du même code, l'instance peut être volontairement reprise dans les formes prévues pour la présentation des moyens de défense.
A défaut de reprise volontaire, elle peut l'être par voie de citation.
En l'espèce, M. [C] [K] est décédé le [Date décès 7] 2025 en cours d'instance, laissant pour lui succéder ses deux enfants issus d'une première union (pièce 16 intimé attestation de dévolution successorale). La présente action étant une action transmissible, ses héritiers ont conclu afin que l'instance interrompue soit reprise.
Il convient donc de constater la reprise d'instance et d'action par les héritiers de M. [C] [K].
Sur l'appartement de [Localité 33]
Aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
En l'espèce, le premier juge a retenu, s'agissant des appartements de [Localité 33] mais également de [Localité 23], que':
- ces appartements avaient été acquis par les époux en indivision mais financés par l'époux seul, ce qui n'était pas contesté par les parties
- le financement intégral par M. [N] constitue à hauteur de la part financée une donation de biens présents
- ces donations ayant été consenties 1994 et 1999, elles sont révocables
- M. [N] les a révoquées dans le cadre de la procédure de divorce.
A hauteur d'appel, Mme [F] fait valoir un moyen nouveau s'agissant de l'appartement de [Localité 33] à savoir la contribution aux charges du mariage et la clause du contrat de mariage.
Il résulte des débats que l'appartement de [Localité 33] a été acquis le 3 mars 1994, en l'état futur d'achèvement au prix de 1'800'000 Fr. soit 274'408,60 €. L'acte de propriété fait ressortir que les deux époux sont désignés acquéreur sans précision des quotités respectives. Ils sont dès lors propriétaires pour moitié indivise chacun. Les modalités de financement sont les suivants': à la signature de l'acte notarié, M. [K] a versé comptant la somme de 630'000 Fr. (540'000 Fr. et 90'000 Fr. à la réservation), soit 96'042,88 €. Le solde a été réglé par un autre apport personnel de M. [K] et par le remboursement des trois prêts consentis par la banque au seul nom de M. [K] dont les échéances ont été exclusivement prélevées sur le compte personnel de M. [K].
En première instance, Mme [F] soutenait que l'acquisition en indivision des deux appartements, celui de [Localité 33] mais également de [Localité 23], était la marque de l'intention libérale de son mari. C'est en ce sens que les intimés concluent en cause d'appel.
Il est donc démontré l'obligation de restitution résultant de la preuve de l'intention libérale, et de la révocation de la donation conformément à l'article 1096 dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 2005, révocation figurant dans le jugement de divorce du 12 septembre 2017.
Il appartient donc à Mme [F] d'établir que son activité excédait la contribution aux charges du mariage intervenue au bénéfice de son conjoint, comme elle le prétend et que le paiement de la totalité des mensualité des crédits par le mari avait un caractère rémunératoire.
La cour relève qu'il n'est pas démontré que l'appartement de [Localité 33] a été la résidence principale des époux [F] [N]. En effet, aucunes pièces produites aux débats ne fait figurer comme adresse celle de [Localité 33]. Au contraire, les documents de financement du [19] en date du 21 mars 1995 sont adressés au « [Adresse 13] » qui était la résidence principale des ex époux selon les intimés. Néanmoins, il est désormais retenu en jurisprudence (Cass Civ, 18 décembre 2013) que le champ de l'obligation contributive peut être étendu à l'acquisition d'une résidence secondaire, comme le signale l'appelante.
Mais, la cour constate que cette dernière n'apporte également aucune démonstration de ce que son activité a excédé sa contribution aux charges du mariage. Les intimés font justement remarquer sur ce point que Mme [F] n'était pas femme au foyer, qu'elle travaillait au sein du bar tabac de son époux au titre de salariée, de sorte qu'elle a perçu un salaire correspondant à son activité et a cotisé pleinement pour sa retraite (pièce 7), qu'au moment de son divorce elle était propriétaire de son logement, qu'elle a bénéficié d'une prestation compensatoire à hauteur de 70'000 € alors même que leur père avait fait valoir dans la procédure de divorce qu'il entendait révoquer toute créance entre époux.
Dès lors, Mme [F] ne démontre pas que les sommes correspondant à la donation révoquée, auraient servi à rémunérer son activité qui aurait excédé sa contribution aux charges du mariage. Elle ne peut donc non pas se prévaloir de la clause du contrat de séparation de biens relatifs à la contribution aux charges du mariage qui n'a pas vocation à s'appliquer.
En conséquence, la décision dont appel doit être confirmée sur ce point.
Sur l'abondement par M. [N] de la somme de 130 000 euros sur le contrat d'assurance vie appartenant à Mme [F]
Pour retenir que Mme [F] était débitrice envers M. [N] de la somme de 130'000 € correspondant au versement par ce dernier sur le contrat d'assurance-vie de son épouse, le 6 mars 2001, de fonds provenant d'un contrat ouvert à son nom, le premier juge a repris le raisonnement relatif aux appartements de [Localité 33] et de [Localité 22] et a considéré qu'il s'agissait d'une donation de bien présent révocable pour avoir été consentie avant le 1er janvier 2005.
En cause d'appel, l'appelante soutient que cette donation à valeur rémunératoire pour tenir compte de l'investissement par elle fourni au sein du fonds de commerce de son mari dont elle a permis la valorisation et qu'il a ainsi voulu l'indemniser de l'absence de cotisations retraite correspondant à la réalité de son investissement. Pour apporter la preuve de ce qu'elle argue, elle produit ses pièces 8, 9 et 10 correspondant à ses notifications de droits à la retraite du 5 mai 2009, un décompte de paiement retraite du 20 avril 2009 et ses notifications de retraite principale du 13 février 2009. Il en résulte une période travail salarié entre le 1er septembre 1998 et le 14 septembre 1998 au «'[32] [Adresse 26]'», puis une période du 15 septembre au 10 janvier 1999 non validable et à partir du 11 janvier 1999, elle a bénéficié du régime général d'indemnisation du chômage, étant précisé qu'à compter de cette date M. [N] avait vendu son fonds de commerce. En outre, la donation a eu lieu le 6 mars 2001 et n'est dès lors pas concomitante, contrairement à ce qu'affirme l'appelante, à la période alléguée de «'sur investissement'» dans l'activité du fonds de commerce du mari.
Ainsi, Mme [F] est défaillante dans l'administration de la preuve qui lui incombe et la décision dont appel ayant considéré que le versement de cette somme était une donation révoquée doit être confirmée.
Il sera précisé que la condamnation à verser la somme de 130'000 € est assortie des intérêts au taux légal à compter de la décision du [Date décès 5] 2023 et non à compter du 6 mars 2001 comme le sollicite les intimés.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Constatant la succombance de Mme [F] en première instance, la première juridiction l'a condamnée aux dépens ainsi qu'à payer à M. [C] [N] la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Ces condamnations seront confirmées à cause d'appel.
Mme [F], qui succombe également en cause d'appel, sera condamnée à supporter les dépens d'appel et à payer la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
DIT la présente action et instance reprise par Mme [I] [N] et M. [L] [N], héritiers de M. [C] [K] ;
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions critiquées ;
Y ajoutant,
DIT que la condamnation de Mme [E] [F] à verser la somme de 130'000 euros est assortie des intérêts au taux légal à compter de la décision du [Date décès 5] 2023 ;
CONDAMNE Mme [E] [F] aux dépens de l'instance d'appel ;
CONDAMNE Mme [E] [F] à payer à Mme [I] [N] et M. [L] [N] venant aux droits de M. [C] [N], la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière La conseillère faisant fonction de présidente,
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre de la famille
ARRET DU 03 OCTOBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 23/03643 - N° Portalis DBVK-V-B7H-P4SY
Décision déférée à la Cour :
Jugement du [Date décès 5] 2023
JUGE AUX AFFAIRES FAMILIALES DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RODEZ
N° RG 20/00893
APPELANTE :
Madame [E] [F]
née le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 30]
de nationalité Française
[Adresse 20]
[Adresse 10]
[Localité 6]
Représentée à l'instance et à l'audience par Me Christelle CLEMENT, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMES :
Madame [I], [Z] [N]
née le [Date naissance 8] 1970 à [Localité 24] (75),
de nationalité française,
[Adresse 14]
[Localité 15]
Monsieur [L] [B] [Y] [N]
né le [Date naissance 9] 1967 à [Localité 24] (75),
de nationalité française,
[Adresse 2]
[Localité 16]
Venant tous deux aux droits de leur père, Monsieur [C] [N], intimé, décédé le [Date décès 5] 2025 à [Localité 18] (63)
Représentés à l'instance par Me Sophie DEBERNARD JULIEN substituée par Me Mehdi BENAMEUR de la SCP PALIES - DEBERNARD-JULIEN - MARTIN-VELEINE - CLAISE - PJDA, avocats au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 05 Juin 2025
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 JUIN 2025, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :
Mme Karine ANCELY, Conseillère faisant fonction de présidente de chambre
Mme Sandrine FEVRIER, Conseillère
M. Yoan COMBARET, Conseiller
qui en ont délibéré.
En présence de Mme [D] [P] et Mme [J] [S] [H], auditrices de justice
Greffier lors des débats : Mme Marion CIVALE
ARRET :
- contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Karine ANCELY, Conseillère faisant fonction de présidente de chambre, et par Mme Marion CIVALE, Greffier.
*
* *
EXPOSÉ DU LITIGE
Mme [E] [F] et M. [C] [N] ont contracté mariage le [Date mariage 12] 1991 devant l'officier d'état civil de la commune de [Localité 28] (12), en ayant précédemment conclu un contrat de mariage de séparation de biens devant Me [A], notaire à [Localité 28].
Aucun enfant n'est issu de cette union.
Selon requête reçue au greffe le 6 mai 2013, M. [N] a saisi le juge aux affaires familiales de [Localité 28] d'une demande en divorce.
Suivant ordonnance de non-conciliation rendue le 28 juin 2013, le juge a'notamment désigné Me [T] [U], notaire à [Localité 21] (12), en vue d'élaborer un projet de liquidation et de formation des lots à partager.
Par acte d'huissier de justice du 8 avril 2015, M. [N] a fait assigner son épouse en divorce sur le fondement de l'article 242 du code civil.
Suivant jugement rendu le 12 septembre 2017, le juge aux affaires familiales de [Localité 28] a':
- débouté M. [N] de sa demande en divorce sur le fondement de l'article 242 du code civil
- prononcé sur le fondement de l'article 238 du code civil le divorce de M. [N] et Mme [F]
- condamné M. [N] à verser à Mme [F] une prestation compensatoire en capital d'un montant de 70 000 €
- ordonné, en tant que besoin, la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux du divorce et désigné Me [U], notaire, pour procéder aux opérations de liquidation
- attribué à titre préférentiel à M. [N] les biens immobiliers sis [Adresse 3] et [Adresse 11] à charge de verser une soulte à Mme [F].
Un procès-verbal de difficultés a été dressé par Me [U] le 19 septembre 2018.
Par acte d'huissier de justice du 3 janvier 2019, M. [N] a fait assigner Mme [F] devant le tribunal de grande instance de Rodez aux fins de prononcer le partage des biens indivis existant entre eux.
Suivant ordonnance rendue le 9 mai 2019, le juge de la mise en état a déclaré le tribunal de grande instance de Rodez incompétent pour connaître de la demande en liquidation des intérêts patrimoniaux des parties et a renvoyé la cause et les parties devant le juge aux affaires familiales de Rodez, seul compétent pour en connaître.
En raison du défaut de diligence des parties, une ordonnance de radiation de l'affaire au rang des procédures en cours a été rendue le 18 juin 2020.
M. [N] a déposé des conclusions de réinscription au rang des procédures en cours le 14 septembre 2020.
Par jugement du 18 novembre 2021, le juge aux affaires familiales de [Localité 28] a :
- ordonné le partage de l'indivision existant entre Mme [F] et M. [N] à la suite de la rupture de leur vie commune,
Avant dire droit,
- renvoyé à l'audience de mise en état du 16 décembre 2021 aux fins de recueillir l'accord des parties sur l'opportunité d'ordonner une mesure de médiation civile ainsi qu'une mesure d'expertise,
- réservé les demandes,
- réservé les dépens.
Par jugement du 13 décembre 2022, le juge aux affaires familiales de [Localité 28] a :
- ordonné la réouverture des débats,
- invité les parties à produire la copie du second procès-verbal de difficultés établi le 19 septembre 2018 par Me [U], avec la participation de Me [R] [X], notaire,
- invité les parties à déposer des conclusions qui respectent scrupuleusement les dispositions de l'article 768 du code de procédure civile,
- renvoyé la cause et les parties à l'audience de mise en état électronique du 16 février 2022 à 9 heures,
- réservé les dépens.
Par jugement contradictoire du [Date décès 5] 2023, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Rodez, a :
- déclaré recevables les demandes de M. [N],
- constaté le refus des parties de mettre en place une mesure de médiation,
- dit que, compte-tenu de l'attribution préférentielle décidée dans le jugement de divorce du 12 septembre 2017, les appartements sis à [Localité 33] (94) et de [Localité 23] (94) seront attribués à M. [N] à charge pour lui de verser une soulte égale à la moitié de leur valeur à Mme [F],
- dit que Mme [F] est débitrice envers M. [N] d'une dette égale à la moitié de la valeur des appartements sis à [Localité 33] (94) et de [Localité 23] (94) au titre du financement de leurs acquisitions,
- fixé la valeur de l'appartement sis à [Localité 33] (94) à la somme de 690'000 €,
- fixé la valeur de l'appartement sis à [Localité 23] (94) à la somme de 305 000 €,
- dit que Mme [F] est débitrice envers M. [N] d'une dette d'un montant de 130 000 € pour le versement sur son contrat d'assurance-vie [17] numéro 90009222101688 d'une telle somme par le demandeur,
- commis le juge délégué aux affaires familiales chargé des liquidations au tribunal judiciaire de Rodez pour surveiller les opérations de partage,
- renvoyé les parties devant Me [U], notaire à [Localité 21] (12)
- condamné Mme [F] à payer à M. [N] la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté Mme [F] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de toute(s) éventuelle(s) autre(s) demande(s),
- condamné Mme [F] aux entiers dépens de la présente instance qui seront recouvrés directement par Me Pierrette Feloux-Teran, avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Par déclaration au greffe du 13 juillet 2023, Mme [F] a interjeté appel de la décision.
M. [N] est décédé le [Date décès 7] 2025.
Mme [F], dans ses conclusions du 3 juin 2025, demande à la cour de :
- infirmer le jugement rendu le [Date décès 5] 2023 par le juge aux affaires familiales de [Localité 28] en ce qu'il a dit que Mme [F] est débitrice envers M. [N] d'une dette égale à la moitié de la valeur de l'appartement sis à [Localité 33] (94),
- infirmer le jugement rendu le [Date décès 5] 2023 par le juge aux affaires familiales de [Localité 28] en ce qu'il a dit que Mme [F] est débitrice envers M. [N] d'une dette d'un montant de 130 000€ pour le versement sur son contrat d'assurance-vie [17] numéro 90009222101688 d'une telle somme par le demandeur,
- infirmer le jugement rendu le [Date décès 5] 2023 par le juge aux affaires familiales de [Localité 28] en ce qu'il a condamné Mme [F] à payer à M. [N] la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens,
- infirmer le jugement rendu le [Date décès 5] 2023 par le juge aux affaires familiales de [Localité 28] en ce qu'il a débouté Mme [F] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Statuant à nouveau,
- juger que les remboursements des crédits immobiliers contractés lors de l'acquisition de l'appartement sis à [Adresse 35] relèvent de la contribution aux charges du mariage,
- juger que M. [N] est débiteur d'une soulte à l'égard de Mme [F] à hauteur de 134 166,90 € s'agissant de l'appartement dont ils sont propriétaires indivis à [Localité 33] [Adresse 4],
En conséquence,
- condamner M. [N] à régler à Mme [F] la somme de 134 166,90 €,
- juger que l'abondement à hauteur de 130 000 € du contrat d'assurance vie [17] n° 90009222101688 de Mme [F] par M. [N] le 15 mars 2001 constitue une donation rémunératoire.
En conséquence,
- juger que Mme [F] n'est redevable d'aucune somme à l'égard de M. [N] au titre de l'abondement de son contrat d'assurance vie [17] n° 90009222101688,
- commettre le juge délégué aux affaires familiales charge des liquidations au tribunal judiciaire de Rodez pour surveiller les opérations de partage,
- renvoyer les parties devant Me [U], notaire à [Localité 21],
- condamner M. [N] à régler à Mme [F] la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [N] aux entiers dépens.
Mme [F] revient sur la procédure de divorce et le montant de la prestation compensatoire qui lui a été allouée faisant remarquer que le montant retenu par le juge aux affaires familiales a été apprécié en fonction du règlement des intérêts patrimoniaux, que M. [K] ne lui avait jamais versé la prestation compensatoire de sorte que les intérêts de retard courent.
Sur le bien indivis acquis en 1994 situé à [Localité 33], elle affirme que leur résidence principale a été fixée dans cet appartement acquis en l'état futur d'achèvement et livré en 1998. Elle fait également valoir une jurisprudence de la Cour de cassation faisant application de la notion de contribution aux charges du mariage à une résidence secondaire et sollicite l'application de cette notion au remboursement du crédit affecté sur ce bien par M. [K]. Elle reprend la clause relative à la contribution aux charges du mariage stipulé dans leur contrat de mariage signé le 6 août 1991 adoptant le régime de la séparation de biens, pour rappeler son caractère irréfragable. Si toutefois la cour retenait que cette clause bénéficie d'une présomption simple et non irréfragable, elle ajoute qu'il incomberait aux intimés de démontrer que le remboursement du crédit immobilier excède largement la part contributive qui était celle de M. [K]. Eu égard à la valeur de l'appartement non contesté par les intimés, et à l'attribution préférentielle, elle se considère dès lors titulaire d'une soulte à hauteur de 134'166,90 €.
Sur l'abondement du contrat d'assurance-vie ouverte à son nom, elle souligne la relaxe prononcée par le tribunal correctionnel de Rodez le 23 mars 2021 sur le prétendu faux et usage de faux avancés par M. [K] selon lequel elle aurait signé elle-même l'abondement. Elle explique le montant de la somme versée sur le contrat d'assurance-vie comme provenant de la vente d'un fonds de commerce dont M. [K] était propriétaire pour un prix de plus de 3 millions de francs en 1999 et dans lequel elle s'était beaucoup investie au-delà de ce qu'elle était rémunérée. La concomitance entre l'abondement et la vente est selon elle un indice sur la volonté de son ex-mari de la « rémunérer » pour son investissement constant et important à ses côtés dans l'exploitation du fonds. Elle ajoute que le choix de ce placement tend à considérer que M. [K] a voulu l'indemniser de l'absence de cotisations retraite, précisant qu'elle était rémunérée au [31] de l'époque pour un travail allant au-delà de la durée légale. Elle en déduit que la demande à hauteur de 130'000 € de son contrat d'assurance vie par son mari constitue une donation rémunératoire.
M. [L] [N] et Mme [I] [N], venant aux droits de leur père M. [C] [K], dans leurs conclusions du 30 mai 2025, demandent à la cour de :
- déclarer la reprise d'instance et d'action par les héritiers de M. [N]
Sur le fond,
- confirmer le jugement du [Date décès 5] 2023 en ce qu'il a :
- dit que Mme [F] est débitrice envers M. [N] d'une dette égale à la moitié de la valeur de l'appartement sis à [Localité 33] (94) au titre du financement de son acquisition,
- dit que Mme [F] est débitrice envers M. [N] d'une dette d'un montant de 130 000 € pour le versement sur le contrat d'assurance vie [17] numéro 90009222101688 d'une telle somme par le demandeur,
- condamné Mme [F] à payer à M. [N] la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens,
- débouté Mme [F] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En conséquence,
- débouter Mme [F] de ses demandes tendant à :
- juger que les remboursements des crédits immobiliers contractés lors de l'acquisition de l'appartement sis à [Adresse 34] relèvent de la contribution aux charges du mariage,
- juger que M. [N] est débiteur d'une soulte à l'égard de Mme [F] à hauteur de 134.166,90 € s'agissant de l'appartement dont ils sont propriétaires indivis à [Adresse 34],
- condamner M. [N] à régler à Mme [F] la somme de 134 166,90€
- juger que l'abondement à hauteur de 130 000 € du contrat d'assurance vie [17] n° 90009222101688 de Mme [F] par M. [N] le 15 mars 2001 constitue une donation rémunératoire,
- juger que Mme [F] n'est redevable d'aucune somme à l'égard de M. [N] au titre de l'abondement de son contrat d'assurance vie [17] n° 90009222101688
- condamner M. [N] à régler à Mme [F] la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [N] aux entiers dépens.
Y ajoutant,
- condamner Mme [F] aux intérêts au taux légal entre particuliers ayant couru depuis le 6 mars 2001 sur la somme de 130 000 € due à M. [N],
- la condamner à verser 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens.
M. et Mme [N] rappellent les modalités de financement de l'appartement situé à [Localité 33] à savoir exclusivement financé par leur père ce qui n'est pas contesté par la partie adverse. S'agissant du remboursement des trois prêts immobiliers d'un montant global de 700'000 Fr. (106'714,65 €) consenti par le [19] [Localité 27] [Localité 29] au seul nom de M. [N] dont les échéances étaient prélevées exclusivement sur le compte personnel de leur père, ils reconnaissent que le paiement par un seul des époux de l'intégralité du prix ayant permis l'acquisition d'un bien indivis pour moitié tel que figurant dans l'acte, constitue une donation en raison de l'intention libérale qui animait leur père lors de l'achat du bien mais ils ajoutent que conformément à l'ancien article 1096 du code civil, la donation était révocable ce que leur père a bien pris soin de faire avant même que le divorce ne soit prononcé. En réponse à l'argument adverse opposant l'obligation contributive, ils répliquent que l'appartement de [Localité 33] n'a jamais constitué la résidence principale des ex époux qui vivaient à [Localité 25]. Ils rappellent que la jurisprudence relative à la contribution aux charges du mariage écarte les apports réalisés par un des époux, de sorte que seuls les prêts remboursés entrent dans la discussion. Ils ajoutent que leur père a souscrit seuls les prêts, que son ex-épouse n'était pas engagée, qu'il n'a donc pas remboursé des échéances communes mais une dette personnelle, que cette dette trouve son origine dans le financement de la quotité du bien qu'il a donnée à son épouse, qu'il a donc uniquement réglé la quotité acquise par son épouse et qu'il s'agit incontestablement d'une donation révocable. S'agissant de l'hypothèse selon laquelle leur père aurait voulu rémunérer son épouse, ils expliquent que Mme [V] travaillait au sein du bar tabac de leur père en qualité de salarié, qu'elle a ainsi cotisé pleinement pour sa retraite. Ils excluent la qualification de donation rémunératoire pour l'appartement de [Localité 33].
Sur l'abondement par M. [K] à l'aide de fond personnel le 6 mars 2001 du contrat d'assurance-vie ouvert au nom de Mme [F], à hauteur de 130'000 €, ils soulignent que le tribunal correctionnel n'a pas condamné Mme [F] uniquement en raison de l'extinction de l'action publique pour prescription, et ajoutent que l'appelante n'apporte pas la démonstration du caractère rémunératoire de cette donation telle qu'elle la qualifie. Ils demandent la restitution de cette somme au visa des dispositions de l'article 1240 du code civil considérant que l'appelant a commis une faute par le faux en écriture, ou au visa des dispositions de l'article 955 du code civil pour ingratitude en l'état du délit grave commis par l'appelante, ou au visa de l'article 1096 ancien du code civil à défaut de justifier de sacrifice professionnel ou financier susceptible de conférer un caractère rémunératoire à cette donation.
Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 juin 2025.
SUR CE LA COUR
Sur la reprise d'instance par les héritiers de M. [K]
Selon l'article 370 alinéa 1er du code de procédure civile, à compter de la notification qui en est faite à l'autre partie, l'instance est interrompue par, le décès d'une partie dans les cas où l'action est transmissible.
Selon l'article 376 du code de procédure civile, l'interruption de l'instance ne dessaisit pas le juge.
Selon l'article 373 du même code, l'instance peut être volontairement reprise dans les formes prévues pour la présentation des moyens de défense.
A défaut de reprise volontaire, elle peut l'être par voie de citation.
En l'espèce, M. [C] [K] est décédé le [Date décès 7] 2025 en cours d'instance, laissant pour lui succéder ses deux enfants issus d'une première union (pièce 16 intimé attestation de dévolution successorale). La présente action étant une action transmissible, ses héritiers ont conclu afin que l'instance interrompue soit reprise.
Il convient donc de constater la reprise d'instance et d'action par les héritiers de M. [C] [K].
Sur l'appartement de [Localité 33]
Aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
En l'espèce, le premier juge a retenu, s'agissant des appartements de [Localité 33] mais également de [Localité 23], que':
- ces appartements avaient été acquis par les époux en indivision mais financés par l'époux seul, ce qui n'était pas contesté par les parties
- le financement intégral par M. [N] constitue à hauteur de la part financée une donation de biens présents
- ces donations ayant été consenties 1994 et 1999, elles sont révocables
- M. [N] les a révoquées dans le cadre de la procédure de divorce.
A hauteur d'appel, Mme [F] fait valoir un moyen nouveau s'agissant de l'appartement de [Localité 33] à savoir la contribution aux charges du mariage et la clause du contrat de mariage.
Il résulte des débats que l'appartement de [Localité 33] a été acquis le 3 mars 1994, en l'état futur d'achèvement au prix de 1'800'000 Fr. soit 274'408,60 €. L'acte de propriété fait ressortir que les deux époux sont désignés acquéreur sans précision des quotités respectives. Ils sont dès lors propriétaires pour moitié indivise chacun. Les modalités de financement sont les suivants': à la signature de l'acte notarié, M. [K] a versé comptant la somme de 630'000 Fr. (540'000 Fr. et 90'000 Fr. à la réservation), soit 96'042,88 €. Le solde a été réglé par un autre apport personnel de M. [K] et par le remboursement des trois prêts consentis par la banque au seul nom de M. [K] dont les échéances ont été exclusivement prélevées sur le compte personnel de M. [K].
En première instance, Mme [F] soutenait que l'acquisition en indivision des deux appartements, celui de [Localité 33] mais également de [Localité 23], était la marque de l'intention libérale de son mari. C'est en ce sens que les intimés concluent en cause d'appel.
Il est donc démontré l'obligation de restitution résultant de la preuve de l'intention libérale, et de la révocation de la donation conformément à l'article 1096 dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 2005, révocation figurant dans le jugement de divorce du 12 septembre 2017.
Il appartient donc à Mme [F] d'établir que son activité excédait la contribution aux charges du mariage intervenue au bénéfice de son conjoint, comme elle le prétend et que le paiement de la totalité des mensualité des crédits par le mari avait un caractère rémunératoire.
La cour relève qu'il n'est pas démontré que l'appartement de [Localité 33] a été la résidence principale des époux [F] [N]. En effet, aucunes pièces produites aux débats ne fait figurer comme adresse celle de [Localité 33]. Au contraire, les documents de financement du [19] en date du 21 mars 1995 sont adressés au « [Adresse 13] » qui était la résidence principale des ex époux selon les intimés. Néanmoins, il est désormais retenu en jurisprudence (Cass Civ, 18 décembre 2013) que le champ de l'obligation contributive peut être étendu à l'acquisition d'une résidence secondaire, comme le signale l'appelante.
Mais, la cour constate que cette dernière n'apporte également aucune démonstration de ce que son activité a excédé sa contribution aux charges du mariage. Les intimés font justement remarquer sur ce point que Mme [F] n'était pas femme au foyer, qu'elle travaillait au sein du bar tabac de son époux au titre de salariée, de sorte qu'elle a perçu un salaire correspondant à son activité et a cotisé pleinement pour sa retraite (pièce 7), qu'au moment de son divorce elle était propriétaire de son logement, qu'elle a bénéficié d'une prestation compensatoire à hauteur de 70'000 € alors même que leur père avait fait valoir dans la procédure de divorce qu'il entendait révoquer toute créance entre époux.
Dès lors, Mme [F] ne démontre pas que les sommes correspondant à la donation révoquée, auraient servi à rémunérer son activité qui aurait excédé sa contribution aux charges du mariage. Elle ne peut donc non pas se prévaloir de la clause du contrat de séparation de biens relatifs à la contribution aux charges du mariage qui n'a pas vocation à s'appliquer.
En conséquence, la décision dont appel doit être confirmée sur ce point.
Sur l'abondement par M. [N] de la somme de 130 000 euros sur le contrat d'assurance vie appartenant à Mme [F]
Pour retenir que Mme [F] était débitrice envers M. [N] de la somme de 130'000 € correspondant au versement par ce dernier sur le contrat d'assurance-vie de son épouse, le 6 mars 2001, de fonds provenant d'un contrat ouvert à son nom, le premier juge a repris le raisonnement relatif aux appartements de [Localité 33] et de [Localité 22] et a considéré qu'il s'agissait d'une donation de bien présent révocable pour avoir été consentie avant le 1er janvier 2005.
En cause d'appel, l'appelante soutient que cette donation à valeur rémunératoire pour tenir compte de l'investissement par elle fourni au sein du fonds de commerce de son mari dont elle a permis la valorisation et qu'il a ainsi voulu l'indemniser de l'absence de cotisations retraite correspondant à la réalité de son investissement. Pour apporter la preuve de ce qu'elle argue, elle produit ses pièces 8, 9 et 10 correspondant à ses notifications de droits à la retraite du 5 mai 2009, un décompte de paiement retraite du 20 avril 2009 et ses notifications de retraite principale du 13 février 2009. Il en résulte une période travail salarié entre le 1er septembre 1998 et le 14 septembre 1998 au «'[32] [Adresse 26]'», puis une période du 15 septembre au 10 janvier 1999 non validable et à partir du 11 janvier 1999, elle a bénéficié du régime général d'indemnisation du chômage, étant précisé qu'à compter de cette date M. [N] avait vendu son fonds de commerce. En outre, la donation a eu lieu le 6 mars 2001 et n'est dès lors pas concomitante, contrairement à ce qu'affirme l'appelante, à la période alléguée de «'sur investissement'» dans l'activité du fonds de commerce du mari.
Ainsi, Mme [F] est défaillante dans l'administration de la preuve qui lui incombe et la décision dont appel ayant considéré que le versement de cette somme était une donation révoquée doit être confirmée.
Il sera précisé que la condamnation à verser la somme de 130'000 € est assortie des intérêts au taux légal à compter de la décision du [Date décès 5] 2023 et non à compter du 6 mars 2001 comme le sollicite les intimés.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Constatant la succombance de Mme [F] en première instance, la première juridiction l'a condamnée aux dépens ainsi qu'à payer à M. [C] [N] la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Ces condamnations seront confirmées à cause d'appel.
Mme [F], qui succombe également en cause d'appel, sera condamnée à supporter les dépens d'appel et à payer la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
DIT la présente action et instance reprise par Mme [I] [N] et M. [L] [N], héritiers de M. [C] [K] ;
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions critiquées ;
Y ajoutant,
DIT que la condamnation de Mme [E] [F] à verser la somme de 130'000 euros est assortie des intérêts au taux légal à compter de la décision du [Date décès 5] 2023 ;
CONDAMNE Mme [E] [F] aux dépens de l'instance d'appel ;
CONDAMNE Mme [E] [F] à payer à Mme [I] [N] et M. [L] [N] venant aux droits de M. [C] [N], la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière La conseillère faisant fonction de présidente,