CA Nîmes, 5e ch. soc. ph, 29 septembre 2025, n° 22/01464
NÎMES
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 22/01464 - N° Portalis DBVH-V-B7G-INJB
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'ORANGE
04 mars 2022
RG :F 20/00150
[G] [Z]
C/
[N]
Etablissement Public UNEDIC DELEGATION AGS CGEA ILE-DE-FRANCE EST
Grosse délivrée le 29 SEPTEMBRE 2025 à :
- Me SERGENT
- Me COSTE
- Me MEFFRE
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 29 SEPTEMBRE 2025
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ORANGE en date du 04 Mars 2022, N°F 20/00150
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier à la 5ème chambre sociale, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉBATS :
A l'audience publique du 04 Juin 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 29 Septembre 2025.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANT :
Maître [H] [W] agissant es qualité de liquidateur de la Société FT DIFFUSION,
[Adresse 8]
[Localité 7]
Représenté par Me Sylvie SERGENT de la SELARL DELRAN-BARGETON DYENS-SERGENT- ALCALDE, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉS :
Monsieur [M] [N]
né le 17 Février 1962 à [Localité 9]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Thierry COSTE, avocat au barreau d'AVIGNON
Etablissement Public UNEDIC DELEGATION AGS CGEA ILE-DE-FRANCE EST Association déclarée, représentée par sa directrice nationale Madame [O] [C]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me Lisa MEFFRE de la SELARL MG, avocat au barreau de CARPENTRAS
S.C.P. BTSG en sa qualité de mandataire liquidateur de la SAS THE GOOD SHAPE
[Adresse 2]
[Localité 6]
n'ayant pas constitué avocat ou défenseur syndical
ARRÊT :
Arrêt réputé contradictoire, prononcé publiquement et signé par M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 29 Septembre 2025, par mise à disposition au greffe de la cour.
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
M. [N] a été engagé à compter du 1er juin 2005 en qualité de VRP multicartes sur la Suisse rémunéré exclusivement à la commission (10 %, frais compris) par la société FT Diffusion représentée par M. [U].
En septembre 2019, la société FT Diffusion a donné son fonds de commerce en location gérance à la SAS The Good Shape, représentée par M. [R].
Suivant jugement du tribunal de commerce Bobigny du 17 mars 2021, la société FT Diffusion
a été placée sous procédure de liquidation judiciaire.
Considérant qu'aucun transfert de son contrat de travail ne lui avait été notifié, et reprochant à la société FT Diffusion de le laisser sans travail, M. [N] a saisi le conseil de prud'hommes d'Orange par requête reçue le 29 octobre 2020 pour entendre prononcer la résiliation de son contrat de travail et obtenir diverses sommes, lequel, par jugement contradictoire du 04 mars 2022, a :
Prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur [M] [N] aux torts de la SA F.T Diffusion en date du 17 mars 2021 ;
Fixé la créance de Monsieur [M] [N] à la Liquidation Judiciaire de la SA F.T
Diffusion en liquidation judiciaire aux sommes suivantes :
- 42 105,35 € bruts à titre du manque à gagner de 2019 à 2021 ;
- 4 201,54 € bruts à titre des congés payés afférents ;
- 5 361,41 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
- 536,14 € bruts à titre de congés payés afférents ;
~ 7 148,56 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;
- 17 871,40 € à titre de réparation des préjudices économique, professionnel et moral ;
- 500,00 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Dit que l'AGS CGEA IDF devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L.3253-6 et L 3253-8 du Code du Travail dans les termes et les conditions résultant des dispositions des articles L 3253-19, 20 et 21 et L 3253-17 du Code du Travail ;
Déclaré la décision opposable a l'AGS CGEA IDF, es-qualité de gestionnaire de l'AGS, dans les limites prévues aux articles L 3253-6 et L 3253-8 du Code du Travail et les plafonds applicables prévus aux articles L 3253-17 et D 3253-5 du Contrat de Travail ;
Ordonné à la SA F.T Diffusion en liquidation judiciaire prise en la personne de son représentant judiciairement reconnu de délivrer un bulletin de salaire de régularisation afférent aux rappels de salaire et préavis pour la période du 1er octobre 2019 au 17 juin 2021 dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir sans qu'il n'y ait lieu à astreinte ;
Dit que les dépens de l'instance seront supportés par la liquidation judiciaire de la SA F.T
Diffusion.
Par acte du 22 avril 2022, Me [H] [W], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société FT Diffusion a fait appel du jugement qui lui a été notifié le 28 mars 2022.
Par ordonnance du 07 avril 2023, le conseiller de la mise en état a :
Dit que M. [M] [N], intimé sur l'appel principal de M. [H] [W], n'a pas valablement formé appel incident à l'encontre du jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Orange le 4 mars 2022,
Dit que ses demandes tendant à faire statuer la cour sur des prétentions déjà soumises aux premiers juges qui ont statué en réponse, et à l'égard desquelles il n'a pas valablement formé appel incident, sont irrecevables,
Laissé les dépens de l'incident à la charge de M. [M] [N],
Cette ordonnance a été déférée à la cour qui, par arrêt du 24 octobre 2023, a :
Confirmé l'ordonnance déférée, sauf à préciser que le présent contentieux sur incident ne concerne que les seules conclusions du 8 septembre 2022,
Renvoyé les parties devant le conseiller de la mise en état,
Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamné M. [N] aux dépens de la procédure sur incident.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 13 mai 2025, Me [H] [W], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société FT Diffusion demande à la cour de :
- infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'orange le 4 mars 2022 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté M. [N] du surplus de ses demandes et de sa demande d'astreinte ;
- statuant à nouveau,
vu les articles 542, 909 et 954 du code de procédure civile,
vu l'absence de demande d'infirmation du jugement de première instance présentée par M. [N] dans le dispositif de ses conclusions d'intimé,
- constater que la cour n'est pas saisie d'un appel incident de M. [N] à l'encontre du jugement de première instance ;
- prononcer la mise hors de cause de la société FT Diffusion et de Maître [W] ès-qualités et débouter en conséquence M. [N] de l'intégralité de ses demandes.
- subsidiairement ;
- déclarer irrecevable toute demande de condamnation au paiement ou de remise de documents sous astreinte ;
- débouter M. [N] de ses demandes de fixation de créance au passif de la liquidation judiciaire de FT Diffusion ou à tout le moins fixer la date d'effet de cette résiliation au 19 septembre 2019, date à compter de laquelle la collaboration a effectivement cessé entre les parties.
- condamner la société BTSG ès-qualités de liquidateur de la société The Good Shape à garantir Me [H] [W] ès-qualités de liquidateur de FT Diffusion de toute somme qui serait mise à la charge de ce dernier.
en toute hypothèse
- condamner M. [N] aux entiers dépens, tant de première instance que d'appel.
Il soutient que :
- le contrat de travail VRP de M. [N] a été transféré de plein droit à la société The Good Shape à compter du 19 septembre 2019, ce transfert est intervenu en application de l'article L 1224-1 du code du travail, suite au contrat de location gérance du fonds de commerce signé entre FT Diffusion et The Good Shape, l'article L 1224-1 s'applique à la location gérance car elle emporte transfert de l'activité, ces dispositions sont d'ordre public, le transfert des contrats de travail est automatique et s'opère de plein droit par l'effet de la loi,
- le contrat de location gérance lui-même prévoyait expressément le transfert de tous les salariés, y compris les VRP, et visait nommément le contrat de M. [N], aucun avenant n'était nécessaire à la signature du contrat de travail pour que le transfert s'opère,
- M. [N] a été informé de ce transfert et ses échanges ultérieurs concernant son emploi se sont déroulés avec la société The Good Shape,
- le conseil de prud'hommes a commis une erreur manifeste de droit en estimant que le contrat restait inchangé en l'absence d'avenant, ce qui est contraire à l'article L 1224-1 et à la jurisprudence,
- la société FT Diffusion n'était plus l'employeur au moment des faits reprochés : puisque le contrat de travail s'est poursuivi de plein droit avec The Good Shape à compter du 19 septembre 2019, les manquements allégués par M. [N] (défaut de paiement de salaire à partir d'octobre 2019) concernent la société The Good Shape, et non FT Diffusion,
- la société The Good Shape avait l'obligation de poursuivre le contrat de M. [N] en application de l'article L 1224-1, son refus de reprendre les salariés transférés s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- aucune faute n'est imputable à la société FT Diffusion,
- par conséquent, la résiliation judiciaire ne pouvait pas être prononcée aux torts de la société FT Diffusion,
- les demandes sont infondées (à titre subsidiaire) :
- si la cour ne prononçait pas la mise hors de cause de FT Diffusion, M. [N] ne produit aucune pièce justifiant de manquements par FT Diffusion ; ses pièces ne concernent que des échanges avec The Good Shape,
- la faute reprochée (absence de travail et de salaire) est imputable à The Good Shape,
- si la résiliation judiciaire devait être prononcée, sa date d'effet ne devrait pas être le 17 mars 2021 (date de liquidation de FT Diffusion) ni la date de l'arrêt, mais le 19 septembre 2019, date à laquelle la collaboration a effectivement cessé, selon la jurisprudence constante, si les parties ont cessé leur collaboration au jour du jugement, les effets de la résiliation judiciaire remontent à la date de cessation effective, il n'est pas contesté que M. [N] a cessé de travailler à compter du 19 septembre 2019,
- le conseil de prud'hommes a commis une erreur en appliquant les articles 35 et 37 de la convention collective du commerce de gros, M. [N] relève du régime des VRP défini par les articles L 7311-1 et suivants du Code du travail, et l'avenant III de la convention collective exclut l'application de ces articles pour les VRP bénéficiant de ce statut légal,
- M. [N] ne peut prétendre à un manque à gagner de septembre 2019 à mars 2021 (ou 2022) si la date d'effet de la résiliation est fixée au 19 septembre 2019,
- le cumul d'indemnités accordé par le conseil de prud'hommes (manque à gagner, congés payés, préavis, indemnité de licenciement, dommages intérêts pour préjudice) est contesté, un VRP ne peut bénéficier d'un tel cumul d'indemnisation,
- le jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire interdit toute action en justice tendant à la condamnation au paiement du débiteur, les actions prud'homales après l'ouverture d'une procédure collective ne peuvent avoir pour objet que de fixer la créance au passif, sans condamnation au paiement, de même, aucune remise sous astreinte ne peut être prononcée contre la liquidation judiciaire, toute demande de condamnation au paiement ou de remise de documents sous astreinte est donc irrecevable.
- à titre subsidiaire, il demande que la société The Good Shape (représentée par son liquidateur, la SCP BTSG) soit condamnée à garantir FT Diffusion (représentée par Maître [G]) de toute somme qui serait mise à sa charge sur le fondement de l'article 7 du contrat de location gérance qui stipule que The Good Shape a pris en charge tous les contrats de travail et que FT Diffusion a été déchargée de toute obligation à ce titre à compter du 19 septembre 2019.
En l'état de ses dernières écritures en date du 13 mai 2025, reprenant l'appel incident formé par conclusions du 8 septembre 2022 déclaré irrecevable, M. [N] demande à la cour de :
Confirmer le jugement déféré, excepté au sujet des salaires et indemnités allouées ;
Prononcer la résiliation du contrat de travail aux torts de la Société FT Diffusion et subsidiairement de la Société The Good Shape ;
Fixer ainsi la créance de Monsieur [N] sur la Société FT Diffusion et subsidiairement contre les sociétés FT Diffusion et The Good Shape à :
- 87.796,4 € bruts au titre du manque à gagner de 2019 ai 30/09/22 ;
- 8.779,64 € bruts à titre de rappel incident sur congés payés ;
- 6.268,78 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
- 626,78 € bruts à titre de rappel incident sur congés payés ;
- 7.000,12 € à titre d'indemnité de licenciement ;
- 29.232,05 € en réparation des préjudices économique, professionnel et moral causés par la rupture.
Dans l'hypothèse d'un transfert du contrat de travail, dire la Société FT Diffusion solidairement tenue avec la Société The Good Shape du paiement de ces créances ;
Faire injonction auxdites Sociétés d'établir et porter, sous astreinte de 15 € par document et par jour de retard un mois après la notification de la décision à intervenir un bulletin de régularisation ;
Il fait valoir que :
- son contrat de travail a été transféré à compter du 20 septembre 2019 à la SAS The Good Shape, il s'appuie sur les annonces faites en septembre 2019 par M. [U], président de FT Diffusion, d'un "accord de partenariat" et d'un transfert des contrats de travail, ainsi que sur les propos de M. [R], président de The Good Shape, se présentant comme le repreneur de Fox-trot, il note également que des "salariés sédentaires" ont reçu des bulletins de salaire et des documents de rupture au nom de The Good Shape, ce qui accréditerait le transfert,
- il sollicite la résiliation judiciaire du contrat aux torts de The Good Shape (principalement) ou FT Diffusion (subsidiairement) soutenant que l'inexécution de son contrat de travail par l'employeur justifie que la résiliation judiciaire soit prononcée à ses torts, il vise principalement la société The Good Shape en tant que nouvel employeur après le transfert allégué,
- il souligne qu'il n'a jamais été avisé formellement d'un transfert de contrat, il n'a reçu ni avenant, ni bulletin de salaire après septembre 2019, ni correspondance d'une nouvelle entité, dans les faits, le transfert n'a pas été mis en 'uvre à son égard, les propos de M. [R] sur le rachat de Foxtrot renvoient au rachat de parts sociales, ce qui n'implique qu'un changement de direction et non un changement d'employeur, l'"accord de partenariat" n'implique pas non plus usuellement un transfert, subsidiairement, il sollicite que la preuve de ce transfert ou son opposabilité ne soit pas rapportée par le liquidateur de FT Diffusion,
- les difficultés économiques de la société, débutées fin 2018 et persistantes après la reprise, ne justifiaient pas que l'employeur cesse de lui fournir du travail et de le payer, il s'est tenu à disposition, mais les commandes passées par les clients n'ont pas pu être honorées, et ses interpellations sont restées vaines, il a ainsi perdu 80% de ses revenus et tous ses clients suisses car ils ne voulaient plus travailler avec FT Diffusion, en raison des problèmes de la société (plus de bureau, secrétaires, fournisseurs, marchandises, transporteur), l'employeur n'a pas alerté les clients des problèmes en cours, l'employeur a l'obligation de fournir au salarié le travail convenu, et c'est à lui d'en apporter la preuve, or, les intimés n'offrent pas cette preuve, et le dossier démontre une défaillance continue et générale de l'employeur, l'impossibilité de travailler étant imputable à l'employeur, une réparation s'impose,
- il sollicite un rappel de manque à gagner basé sur la moyenne de ses rémunérations entre 2016 et 2018 (25.075,14 euros bruts annuels), il demande un montant de 87.796,4 euros bruts au titre du manque à gagner de 2019 au 30/09/22,
- il invoque l'article L 144-7 du code de commerce pour demander que la Société FT Diffusion soit jugée solidairement tenue avec la SAS The Good Shape du paiement des sommes demandées, cet article prévoit la solidarité du loueur de fonds (ici, FT Diffusion) avec le locataire-gérant (possiblement The Good Shape, si le contrat de location-gérance versé au dossier est avéré et applicable) pour les dettes contractées par ce dernier avant la publication du contrat. Le contrat de location-gérance produit semble ne pas avoir été publié,
- il fait valoir qu'il n'a jamais été licencié, ni par FT Diffusion, ni par The Good Shape, l'employeur lui avait indiqué qu'il ne licencierait personne et que les salariés devaient démissionner.
L'UNEDIC délégation AGS CGEA d'Ile -de -France EST, reprenant ses conclusions transmises le 07 octobre 2022, demande à la cour de :
A titre principal,
Déclarer irrecevable l'intervention forcée de la société The Good Shape et de son mandataire liquidateur, la SCP BTSG,
Débouter Monsieur [M] [N] de l'ensemble de ses demandes, y compris celles de fixation au passif de la société The Good Shape,
Déclarer les demandes de Monsieur [N] inopposables à l'UNEDIC Délégation AGS CGEA d'Ile de France Est,
Subsidiairement,
Réduire dans de notables proportions les demandes faites par Monsieur [N],
Dire et juger que l'UNEDIC Délégation AGS CGEA d'Ile de France Est ne devra procéder à
l'avance des créances visées aux articles L 3253-6 et L 3253-8 du Code du Travail que dans les
termes et les conditions résultant des dispositions des articles L 3253-19, 20 et 21 et L 3253-17 du Code du Travail,
Dire et juger que l'obligation de l'UNEDIC Délégation AGS CGEA d'Ile de France Est de faire
l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le Mandataire Judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,
Déclarer la décision opposable à l'UNEDIC Délégation AGS CGEA d'Ile de France Est, es-qualité de gestionnaire de l'AGS, dans les limites prévues aux articles L 3253-6 et L 3253-8 du Code du Travail et les plafonds prévus aux articles L 3253-17 et D 3253-5 du Code du Travail,
En tout état de cause,
Dire et juger que l'UNEDIC Délégation AGS CGEA d'Ile de France Est n'est pas tenu de garantir une condamnation éventuelle au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux frais de procédure.
Elle fait valoir que :
- M. [N] a mis en cause son nouvel employeur, la SAS The Good Shape, et son liquidateur (SCP BTSG) en cause d'appel par exploit d'huissier du 12 septembre 2022, cependant, selon l'article 555 du Code de procédure civile, la mise en cause d'un tiers en appel n'est possible que si l'évolution du litige le justifie, c'est-à-dire par la révélation d'une circonstance de fait ou de droit née du jugement ou postérieure à celui-ci modifiant les données juridiques du litige,
- M. [N] avait connaissance du transfert de son contrat de travail à The Good Shape au plus tard le 13 octobre 2019, il disposait donc, en première instance, de tous les éléments nécessaires pour appeler The Good Shape à la procédure devant le conseil de prud'hommes, par conséquent, l'intervention forcée de The Good Shape et de son liquidateur doit être déclarée irrecevable,
- le conseil de prud'hommes d'Orange a fixé la date de résiliation au 17 mars 2021, or M. [N] n'a pas été licencié et son contrat n'a pas été rompu avant le jugement, conformément à la jurisprudence constante et aux articles 1224 et suivants du code civil, la date d'effet de la résiliation judiciaire ne peut être fixée qu'au jour de la décision qui la prononce si le contrat n'a pas été rompu avant cette date, elle estime que le conseil de prud'hommes ne pouvait pas retenir une date antérieure à son jugement, la date de résiliation devrait être le 4 mars 2022, soit postérieurement au jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire de FT Diffusion,
- selon l'article L. 1224-1 du Code du travail, en cas de modification dans la situation juridique de l'employeur (comme une location-gérance), tous les contrats de travail en cours subsistent entre le nouvel employeur et le personnel, en l'espèce, le contrat de travail de M. [N] a été expressément transféré à la société The Good Shape, d'une part car cela répondait aux conditions de l'article L. 1224-1, et d'autre part car il était expressément visé dans l'annexe 2 du contrat de location-gérance entre FT Diffusion et The Good Shape, il ne fait aucun doute que le contrat de travail de M. [N] a été transféré de plein droit à la société The Good Shape,
- par conséquent, les créances fixées par le conseil de prud'hommes ne peuvent pas être fixées au passif de la société FT Diffusion,
- elle conteste spécifiquement les sommes fixées par le conseil de prud'hommes, notamment le manque à gagner, l'indemnité de préavis, l'indemnité de licenciement, et le préjudice économique, professionnel et financier :
- sur le manque à gagner de 2019 à 2021 (€42,015.35 + CP) : le contrat de M. [N] prévoit que les commissions sont dues sur le montant des marchandises livrées, non sur les commandes, M. [N] n'a versé que des commandes et ne démontre pas que les commandes aient été livrées, ne prouvant donc pas que les commissions lui soient dues, de plus, M. [N] est un VRP soumis à l'article L. 7311-1 du Code du travail. L'avenant TT de la convention collective n'applique que les articles 6 à 32 aux VRP statutaires, M. [N] ne peut prétendre à l'équivalent d'un salaire entre octobre 2019 et mars 2021. Il a perçu un salaire sans fournir de prestation, ne justifie pas s'être tenu à disposition, et était insistant pour obtenir un licenciement économique,
- sur l'indemnité de préavis (5,361.00 euros + CP) : le conseil de prud'hommes a appliqué l'article 35 de la convention collective, or cet article n'est pas applicable à M. [N] car, en tant que VRP statutaire, seuls les articles 6 à 32 de la convention lui sont applicables, et l'article 35 traite de la rupture et du préavis,
- sur l'indemnité de licenciement (7,148.56 euros ) : le conseil de prud'hommes a appliqué l'article 37 de la convention collective, or cet article n'est pas applicable à M. [N] car seuls les articles 6 à 32 de la convention lui sont applicables, et l'article 37 traite de l'indemnité de licenciement,
- sur le préjudice économique, professionnel et financier (17,871.40 euros ) : M. [N] ne peut percevoir d'équivalent salaire et n'a justifié d'aucun préjudice. Depuis 2016, le salarié doit prouver l'existence et le quantum de son préjudice. M. [N] n'a versé aucun élément le permettant. Enfin, cette demande de dommages et intérêts n'est pas directement fondée sur son contrat de travail, or l'AGS ne garantit que les créances s'y rattachant directement, selon la jurisprudence,
- elle invoque l'article L. 3253-8 - 2° c) du Code du travail, qui garantit les créances résultant de la rupture des contrats de travail intervenant dans les 15 jours suivant le jugement de liquidation judiciaire, elle soutient que si la date de résiliation judiciaire est fixée au jour de la décision d'appel (le 4 mars 2022), cette date est postérieure aux délais prévus par l'article L. 3253-8 du code du travail, de plus, les créances visées par cet article s'entendent d'une rupture à l'initiative de l'administrateur judiciaire ou du mandataire liquidateur. La résiliation judiciaire n'est pas une rupture à l'initiative du mandataire liquidateur, en conséquence, les indemnités de rupture devraient être déclarées inopposables à l'AGS.
La SCP BTSG, représentée par Maître [P] [F], ès qualités de mandataire liquidateur de SAS The Good Shape, mise en cause par acte du12 septembre 2022 à l'initiative de M. [N], remis à une personne habilitée à le recevoir, n'a pas constitué avocat.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.
Par ordonnance en date du 11 avril 2025, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 14 mai 2025.
L'affaire a été appelée le 4 juin 2025.
MOTIFS
Sur l'appel incident de M. [N]
M. [N] déclare maintenir la demande d'infirmation partielle du jugement déféré qu'il a formulée dans ses écritures du 8 décembre 2022, il considère que l'appel incident que contient ses écritures du 8 décembre 2022 est recevable indépendamment du sort de ses écritures du 8 septembre 2022, il précise que cet appel est recevable car l'AGS a formé un appel incident le 7 octobre 2022 qui lui a réouvert un délai de trois mois (ancien article 910 du CPC), que par ailleurs, l'actualisation des salaires et indemnités de rupture à laquelle il procède n'est que la conséquence des appels du liquidateur comme de l'AGS à l'encontre du jugement qui prononce la résiliation judiciaire du contrat, que la remise en cause de la résiliation donc de sa date (Soc. 4/02/19, n° 18-10541), autorise en effet cette réactualisation sans condition de délai : « L'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent » (article 562 du CPC).
Selon l'article 909 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable au litige, «L'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant prévues à l'article 908 pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué.»
L'article 910 prévoyait «L'intimé à un appel incident ou à un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui lui en est faite pour remettre ses conclusions au greffe.
L'intervenant forcé à l'instance d'appel dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle la demande d'intervention formée à son encontre lui a été notifiée pour remettre ses conclusions au greffe. L'intervenant volontaire dispose, sous la même sanction, du même délai à compter de son intervention volontaire».
M. [N] estime que ses conclusions du 8 décembre 2022 formalisent un appel incident suite à l'appel incident formé par l'Unedic délégation AGS CGEA d'Ile -de -France Est le 7 octobre 2022.
Or les conclusions de l'Unedic délégation AGS CGEA d'Ile -de -France Est ne comportaient aucun appel incident et sollicitaient, à titre principal de déclarer irrecevable l'intervention forcée de la société The Good Shape et de son mandataire liquidateur, la SCP BTSG, de débouter M. [M] [N] de l'ensemble de ses demandes, y compris celles de fixation au passif de la société The Good Shape, et de déclarer les demandes de M. [N] inopposables à l'UNEDIC Délégation AGS CGEA d'Ile de France Est et, subsidiairement, de réduire dans de notables proportions les demandes faites par M. [N].
Ainsi, en l'absence d'appel incident de la part d'un co-intimé, aucun nouveau délai pour former un appel provoqué ou incident n'était ouvert à M. [N] suite aux conclusions d'appelant.
L'appel incident formé par M. [N] est par conséquent irrecevable.
Par contre M. [N] est recevable à actualiser ses demandes en continuité de la décision de première instance exclusivement.
Sur la mise en cause de la SAS The Good Shape
Selon, l'article 554 du code de procédure civile 'Peuvent intervenir en cause d'appel dès lors qu'elles y ont intérêt les personnes qui n'ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité'.
L'article 555 du même code précise 'Ces mêmes personnes peuvent être appelées devant la cour, même aux fins de condamnation, quand l'évolution du litige implique leur mise en cause.'
Sur le fondement de ces textes l'association UNEDIC Délégation AGS CGEA d'Ile-de-France EST, conclut à l'irrecevabilité de la mise en cause de la SCP BTSG, représentée par Maître [P] [F], ès qualités de mandataire liquidateur de la SAS The Good Shape par M. [N] au motif que l'évolution du mitige ne justifie pas cette mise en cause.
Effectivement la SAS The Good Shape n'a pas été appelée en la cause devant le premier juge alors que M. [N] avait connaissance au plus tard le 13 octobre 2019, date à laquelle M. [R] l'a informé de la reprise du fonds et des contrats, du transfert de son contrat de travail au profit de cette dernière société. La circonstance que M. [N] conteste l'effectivité de ce transfert n'ôte pas la connaissance qu'il avait de l'éventualité d'un tel transfert en sorte qu'il lui appartenait lors de la saisine du conseil de prud'hommes en octobre 2020 de mettre en cause cette société.
M. [N] admet que les demandes formulées à l'encontre de la SAS The Good Shape sont nouvelles en appel et obéissent à un régime propre, celui de l'ancien article 910-4 du code de procédure civile : « À peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
« Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ».
Il estime que l'intervention forcée de la société The Good Shape est bien la réplique à la défense de l'appelant qui allègue un transfert de contrat et donc un changement d'employeur.
Cet argument est inopérant, la société FT Diffusion avait, déjà devant le premier juge, invoqué le transfert du contrat de travail de M. [N] au profit de la SAS The Good Shape, il appartenait alors à M. [N] d'appeler en cause ladite société.
Dès lors, aucune évolution du litige ne justifie la mise en cause en septembre 2022 de la SAS The Good Shape laquelle est par conséquent irrecevable.
Sur la demande de M. [N]
Il résulte des pièces produites que suivant acte sous seing privé du 19 septembre 2019, la société FT Diffusion a donné en location-gérance son fonds de commerce d'achat vente, commercialisation et exportation de tous articles se rapportant aux cadeaux gadgets à la maison et de produits manufacturés à la SAS The Good Shape. L'article 7 du contrat de location gérance indiquait expressément que l'ensemble des salariés, y compris les VRP, était repris par le locataire gérant conformément aux dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail et l'annexe 2 du contrat de location-gérance mentionnait expressément le contrat de M. [N].
Conformément aux dispositions de l'article L.1224-1 du code du travail selon lesquelles « S'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. » le transfert du contrat de travail de M. [N] au profit de la SAS The Good Shape opérait de plein droit et l'employeur n'était pas tenu de le notifier au salarié.
Le 13 octobre 2019, M. [R], représentant la SAS The Good Shape, prenait directement attache avec tous les salariés, parmi lesquels M. [N], afin de leur confirmer l'information précédemment transmise par la société FT Diffusion selon laquelle leur contrat était transféré à la SAS The Good Shape.
Le dernier bulletin de salaire établi par la société FT Diffusion au profit de M. [N] est celui du mois de septembre 2019, soldant tous les congés payés, et confirmant le transfert.
Il en résulte que M. [N] ne pouvait poursuivre la société FT Diffusion, qui n'était plus son employeur, en résiliation de son contrat de travail et en paiement des sommes en découlant lui reprochant de l'avoir laissé sans travail et sans salaire à compter de septembre 2019.
Ses demandes, mal dirigées, sont donc en voie de rejet.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Par arrêt réputé contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort
Juge irrecevable la mise en cause devant la cour d'appel de la SAS The Good Shape,
Juge irrecevable l'appel incident de M. [N],
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,
Déboute M. [N] de l'intégralité de ses prétentions,
Condamne M. [N] aux dépens de première instance et d'appel.
Arrêt signé par le président et par le greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 22/01464 - N° Portalis DBVH-V-B7G-INJB
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'ORANGE
04 mars 2022
RG :F 20/00150
[G] [Z]
C/
[N]
Etablissement Public UNEDIC DELEGATION AGS CGEA ILE-DE-FRANCE EST
Grosse délivrée le 29 SEPTEMBRE 2025 à :
- Me SERGENT
- Me COSTE
- Me MEFFRE
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 29 SEPTEMBRE 2025
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ORANGE en date du 04 Mars 2022, N°F 20/00150
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier à la 5ème chambre sociale, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉBATS :
A l'audience publique du 04 Juin 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 29 Septembre 2025.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANT :
Maître [H] [W] agissant es qualité de liquidateur de la Société FT DIFFUSION,
[Adresse 8]
[Localité 7]
Représenté par Me Sylvie SERGENT de la SELARL DELRAN-BARGETON DYENS-SERGENT- ALCALDE, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉS :
Monsieur [M] [N]
né le 17 Février 1962 à [Localité 9]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Thierry COSTE, avocat au barreau d'AVIGNON
Etablissement Public UNEDIC DELEGATION AGS CGEA ILE-DE-FRANCE EST Association déclarée, représentée par sa directrice nationale Madame [O] [C]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me Lisa MEFFRE de la SELARL MG, avocat au barreau de CARPENTRAS
S.C.P. BTSG en sa qualité de mandataire liquidateur de la SAS THE GOOD SHAPE
[Adresse 2]
[Localité 6]
n'ayant pas constitué avocat ou défenseur syndical
ARRÊT :
Arrêt réputé contradictoire, prononcé publiquement et signé par M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 29 Septembre 2025, par mise à disposition au greffe de la cour.
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
M. [N] a été engagé à compter du 1er juin 2005 en qualité de VRP multicartes sur la Suisse rémunéré exclusivement à la commission (10 %, frais compris) par la société FT Diffusion représentée par M. [U].
En septembre 2019, la société FT Diffusion a donné son fonds de commerce en location gérance à la SAS The Good Shape, représentée par M. [R].
Suivant jugement du tribunal de commerce Bobigny du 17 mars 2021, la société FT Diffusion
a été placée sous procédure de liquidation judiciaire.
Considérant qu'aucun transfert de son contrat de travail ne lui avait été notifié, et reprochant à la société FT Diffusion de le laisser sans travail, M. [N] a saisi le conseil de prud'hommes d'Orange par requête reçue le 29 octobre 2020 pour entendre prononcer la résiliation de son contrat de travail et obtenir diverses sommes, lequel, par jugement contradictoire du 04 mars 2022, a :
Prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur [M] [N] aux torts de la SA F.T Diffusion en date du 17 mars 2021 ;
Fixé la créance de Monsieur [M] [N] à la Liquidation Judiciaire de la SA F.T
Diffusion en liquidation judiciaire aux sommes suivantes :
- 42 105,35 € bruts à titre du manque à gagner de 2019 à 2021 ;
- 4 201,54 € bruts à titre des congés payés afférents ;
- 5 361,41 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
- 536,14 € bruts à titre de congés payés afférents ;
~ 7 148,56 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;
- 17 871,40 € à titre de réparation des préjudices économique, professionnel et moral ;
- 500,00 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Dit que l'AGS CGEA IDF devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L.3253-6 et L 3253-8 du Code du Travail dans les termes et les conditions résultant des dispositions des articles L 3253-19, 20 et 21 et L 3253-17 du Code du Travail ;
Déclaré la décision opposable a l'AGS CGEA IDF, es-qualité de gestionnaire de l'AGS, dans les limites prévues aux articles L 3253-6 et L 3253-8 du Code du Travail et les plafonds applicables prévus aux articles L 3253-17 et D 3253-5 du Contrat de Travail ;
Ordonné à la SA F.T Diffusion en liquidation judiciaire prise en la personne de son représentant judiciairement reconnu de délivrer un bulletin de salaire de régularisation afférent aux rappels de salaire et préavis pour la période du 1er octobre 2019 au 17 juin 2021 dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir sans qu'il n'y ait lieu à astreinte ;
Dit que les dépens de l'instance seront supportés par la liquidation judiciaire de la SA F.T
Diffusion.
Par acte du 22 avril 2022, Me [H] [W], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société FT Diffusion a fait appel du jugement qui lui a été notifié le 28 mars 2022.
Par ordonnance du 07 avril 2023, le conseiller de la mise en état a :
Dit que M. [M] [N], intimé sur l'appel principal de M. [H] [W], n'a pas valablement formé appel incident à l'encontre du jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Orange le 4 mars 2022,
Dit que ses demandes tendant à faire statuer la cour sur des prétentions déjà soumises aux premiers juges qui ont statué en réponse, et à l'égard desquelles il n'a pas valablement formé appel incident, sont irrecevables,
Laissé les dépens de l'incident à la charge de M. [M] [N],
Cette ordonnance a été déférée à la cour qui, par arrêt du 24 octobre 2023, a :
Confirmé l'ordonnance déférée, sauf à préciser que le présent contentieux sur incident ne concerne que les seules conclusions du 8 septembre 2022,
Renvoyé les parties devant le conseiller de la mise en état,
Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamné M. [N] aux dépens de la procédure sur incident.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 13 mai 2025, Me [H] [W], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société FT Diffusion demande à la cour de :
- infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'orange le 4 mars 2022 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté M. [N] du surplus de ses demandes et de sa demande d'astreinte ;
- statuant à nouveau,
vu les articles 542, 909 et 954 du code de procédure civile,
vu l'absence de demande d'infirmation du jugement de première instance présentée par M. [N] dans le dispositif de ses conclusions d'intimé,
- constater que la cour n'est pas saisie d'un appel incident de M. [N] à l'encontre du jugement de première instance ;
- prononcer la mise hors de cause de la société FT Diffusion et de Maître [W] ès-qualités et débouter en conséquence M. [N] de l'intégralité de ses demandes.
- subsidiairement ;
- déclarer irrecevable toute demande de condamnation au paiement ou de remise de documents sous astreinte ;
- débouter M. [N] de ses demandes de fixation de créance au passif de la liquidation judiciaire de FT Diffusion ou à tout le moins fixer la date d'effet de cette résiliation au 19 septembre 2019, date à compter de laquelle la collaboration a effectivement cessé entre les parties.
- condamner la société BTSG ès-qualités de liquidateur de la société The Good Shape à garantir Me [H] [W] ès-qualités de liquidateur de FT Diffusion de toute somme qui serait mise à la charge de ce dernier.
en toute hypothèse
- condamner M. [N] aux entiers dépens, tant de première instance que d'appel.
Il soutient que :
- le contrat de travail VRP de M. [N] a été transféré de plein droit à la société The Good Shape à compter du 19 septembre 2019, ce transfert est intervenu en application de l'article L 1224-1 du code du travail, suite au contrat de location gérance du fonds de commerce signé entre FT Diffusion et The Good Shape, l'article L 1224-1 s'applique à la location gérance car elle emporte transfert de l'activité, ces dispositions sont d'ordre public, le transfert des contrats de travail est automatique et s'opère de plein droit par l'effet de la loi,
- le contrat de location gérance lui-même prévoyait expressément le transfert de tous les salariés, y compris les VRP, et visait nommément le contrat de M. [N], aucun avenant n'était nécessaire à la signature du contrat de travail pour que le transfert s'opère,
- M. [N] a été informé de ce transfert et ses échanges ultérieurs concernant son emploi se sont déroulés avec la société The Good Shape,
- le conseil de prud'hommes a commis une erreur manifeste de droit en estimant que le contrat restait inchangé en l'absence d'avenant, ce qui est contraire à l'article L 1224-1 et à la jurisprudence,
- la société FT Diffusion n'était plus l'employeur au moment des faits reprochés : puisque le contrat de travail s'est poursuivi de plein droit avec The Good Shape à compter du 19 septembre 2019, les manquements allégués par M. [N] (défaut de paiement de salaire à partir d'octobre 2019) concernent la société The Good Shape, et non FT Diffusion,
- la société The Good Shape avait l'obligation de poursuivre le contrat de M. [N] en application de l'article L 1224-1, son refus de reprendre les salariés transférés s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- aucune faute n'est imputable à la société FT Diffusion,
- par conséquent, la résiliation judiciaire ne pouvait pas être prononcée aux torts de la société FT Diffusion,
- les demandes sont infondées (à titre subsidiaire) :
- si la cour ne prononçait pas la mise hors de cause de FT Diffusion, M. [N] ne produit aucune pièce justifiant de manquements par FT Diffusion ; ses pièces ne concernent que des échanges avec The Good Shape,
- la faute reprochée (absence de travail et de salaire) est imputable à The Good Shape,
- si la résiliation judiciaire devait être prononcée, sa date d'effet ne devrait pas être le 17 mars 2021 (date de liquidation de FT Diffusion) ni la date de l'arrêt, mais le 19 septembre 2019, date à laquelle la collaboration a effectivement cessé, selon la jurisprudence constante, si les parties ont cessé leur collaboration au jour du jugement, les effets de la résiliation judiciaire remontent à la date de cessation effective, il n'est pas contesté que M. [N] a cessé de travailler à compter du 19 septembre 2019,
- le conseil de prud'hommes a commis une erreur en appliquant les articles 35 et 37 de la convention collective du commerce de gros, M. [N] relève du régime des VRP défini par les articles L 7311-1 et suivants du Code du travail, et l'avenant III de la convention collective exclut l'application de ces articles pour les VRP bénéficiant de ce statut légal,
- M. [N] ne peut prétendre à un manque à gagner de septembre 2019 à mars 2021 (ou 2022) si la date d'effet de la résiliation est fixée au 19 septembre 2019,
- le cumul d'indemnités accordé par le conseil de prud'hommes (manque à gagner, congés payés, préavis, indemnité de licenciement, dommages intérêts pour préjudice) est contesté, un VRP ne peut bénéficier d'un tel cumul d'indemnisation,
- le jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire interdit toute action en justice tendant à la condamnation au paiement du débiteur, les actions prud'homales après l'ouverture d'une procédure collective ne peuvent avoir pour objet que de fixer la créance au passif, sans condamnation au paiement, de même, aucune remise sous astreinte ne peut être prononcée contre la liquidation judiciaire, toute demande de condamnation au paiement ou de remise de documents sous astreinte est donc irrecevable.
- à titre subsidiaire, il demande que la société The Good Shape (représentée par son liquidateur, la SCP BTSG) soit condamnée à garantir FT Diffusion (représentée par Maître [G]) de toute somme qui serait mise à sa charge sur le fondement de l'article 7 du contrat de location gérance qui stipule que The Good Shape a pris en charge tous les contrats de travail et que FT Diffusion a été déchargée de toute obligation à ce titre à compter du 19 septembre 2019.
En l'état de ses dernières écritures en date du 13 mai 2025, reprenant l'appel incident formé par conclusions du 8 septembre 2022 déclaré irrecevable, M. [N] demande à la cour de :
Confirmer le jugement déféré, excepté au sujet des salaires et indemnités allouées ;
Prononcer la résiliation du contrat de travail aux torts de la Société FT Diffusion et subsidiairement de la Société The Good Shape ;
Fixer ainsi la créance de Monsieur [N] sur la Société FT Diffusion et subsidiairement contre les sociétés FT Diffusion et The Good Shape à :
- 87.796,4 € bruts au titre du manque à gagner de 2019 ai 30/09/22 ;
- 8.779,64 € bruts à titre de rappel incident sur congés payés ;
- 6.268,78 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
- 626,78 € bruts à titre de rappel incident sur congés payés ;
- 7.000,12 € à titre d'indemnité de licenciement ;
- 29.232,05 € en réparation des préjudices économique, professionnel et moral causés par la rupture.
Dans l'hypothèse d'un transfert du contrat de travail, dire la Société FT Diffusion solidairement tenue avec la Société The Good Shape du paiement de ces créances ;
Faire injonction auxdites Sociétés d'établir et porter, sous astreinte de 15 € par document et par jour de retard un mois après la notification de la décision à intervenir un bulletin de régularisation ;
Il fait valoir que :
- son contrat de travail a été transféré à compter du 20 septembre 2019 à la SAS The Good Shape, il s'appuie sur les annonces faites en septembre 2019 par M. [U], président de FT Diffusion, d'un "accord de partenariat" et d'un transfert des contrats de travail, ainsi que sur les propos de M. [R], président de The Good Shape, se présentant comme le repreneur de Fox-trot, il note également que des "salariés sédentaires" ont reçu des bulletins de salaire et des documents de rupture au nom de The Good Shape, ce qui accréditerait le transfert,
- il sollicite la résiliation judiciaire du contrat aux torts de The Good Shape (principalement) ou FT Diffusion (subsidiairement) soutenant que l'inexécution de son contrat de travail par l'employeur justifie que la résiliation judiciaire soit prononcée à ses torts, il vise principalement la société The Good Shape en tant que nouvel employeur après le transfert allégué,
- il souligne qu'il n'a jamais été avisé formellement d'un transfert de contrat, il n'a reçu ni avenant, ni bulletin de salaire après septembre 2019, ni correspondance d'une nouvelle entité, dans les faits, le transfert n'a pas été mis en 'uvre à son égard, les propos de M. [R] sur le rachat de Foxtrot renvoient au rachat de parts sociales, ce qui n'implique qu'un changement de direction et non un changement d'employeur, l'"accord de partenariat" n'implique pas non plus usuellement un transfert, subsidiairement, il sollicite que la preuve de ce transfert ou son opposabilité ne soit pas rapportée par le liquidateur de FT Diffusion,
- les difficultés économiques de la société, débutées fin 2018 et persistantes après la reprise, ne justifiaient pas que l'employeur cesse de lui fournir du travail et de le payer, il s'est tenu à disposition, mais les commandes passées par les clients n'ont pas pu être honorées, et ses interpellations sont restées vaines, il a ainsi perdu 80% de ses revenus et tous ses clients suisses car ils ne voulaient plus travailler avec FT Diffusion, en raison des problèmes de la société (plus de bureau, secrétaires, fournisseurs, marchandises, transporteur), l'employeur n'a pas alerté les clients des problèmes en cours, l'employeur a l'obligation de fournir au salarié le travail convenu, et c'est à lui d'en apporter la preuve, or, les intimés n'offrent pas cette preuve, et le dossier démontre une défaillance continue et générale de l'employeur, l'impossibilité de travailler étant imputable à l'employeur, une réparation s'impose,
- il sollicite un rappel de manque à gagner basé sur la moyenne de ses rémunérations entre 2016 et 2018 (25.075,14 euros bruts annuels), il demande un montant de 87.796,4 euros bruts au titre du manque à gagner de 2019 au 30/09/22,
- il invoque l'article L 144-7 du code de commerce pour demander que la Société FT Diffusion soit jugée solidairement tenue avec la SAS The Good Shape du paiement des sommes demandées, cet article prévoit la solidarité du loueur de fonds (ici, FT Diffusion) avec le locataire-gérant (possiblement The Good Shape, si le contrat de location-gérance versé au dossier est avéré et applicable) pour les dettes contractées par ce dernier avant la publication du contrat. Le contrat de location-gérance produit semble ne pas avoir été publié,
- il fait valoir qu'il n'a jamais été licencié, ni par FT Diffusion, ni par The Good Shape, l'employeur lui avait indiqué qu'il ne licencierait personne et que les salariés devaient démissionner.
L'UNEDIC délégation AGS CGEA d'Ile -de -France EST, reprenant ses conclusions transmises le 07 octobre 2022, demande à la cour de :
A titre principal,
Déclarer irrecevable l'intervention forcée de la société The Good Shape et de son mandataire liquidateur, la SCP BTSG,
Débouter Monsieur [M] [N] de l'ensemble de ses demandes, y compris celles de fixation au passif de la société The Good Shape,
Déclarer les demandes de Monsieur [N] inopposables à l'UNEDIC Délégation AGS CGEA d'Ile de France Est,
Subsidiairement,
Réduire dans de notables proportions les demandes faites par Monsieur [N],
Dire et juger que l'UNEDIC Délégation AGS CGEA d'Ile de France Est ne devra procéder à
l'avance des créances visées aux articles L 3253-6 et L 3253-8 du Code du Travail que dans les
termes et les conditions résultant des dispositions des articles L 3253-19, 20 et 21 et L 3253-17 du Code du Travail,
Dire et juger que l'obligation de l'UNEDIC Délégation AGS CGEA d'Ile de France Est de faire
l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le Mandataire Judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,
Déclarer la décision opposable à l'UNEDIC Délégation AGS CGEA d'Ile de France Est, es-qualité de gestionnaire de l'AGS, dans les limites prévues aux articles L 3253-6 et L 3253-8 du Code du Travail et les plafonds prévus aux articles L 3253-17 et D 3253-5 du Code du Travail,
En tout état de cause,
Dire et juger que l'UNEDIC Délégation AGS CGEA d'Ile de France Est n'est pas tenu de garantir une condamnation éventuelle au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux frais de procédure.
Elle fait valoir que :
- M. [N] a mis en cause son nouvel employeur, la SAS The Good Shape, et son liquidateur (SCP BTSG) en cause d'appel par exploit d'huissier du 12 septembre 2022, cependant, selon l'article 555 du Code de procédure civile, la mise en cause d'un tiers en appel n'est possible que si l'évolution du litige le justifie, c'est-à-dire par la révélation d'une circonstance de fait ou de droit née du jugement ou postérieure à celui-ci modifiant les données juridiques du litige,
- M. [N] avait connaissance du transfert de son contrat de travail à The Good Shape au plus tard le 13 octobre 2019, il disposait donc, en première instance, de tous les éléments nécessaires pour appeler The Good Shape à la procédure devant le conseil de prud'hommes, par conséquent, l'intervention forcée de The Good Shape et de son liquidateur doit être déclarée irrecevable,
- le conseil de prud'hommes d'Orange a fixé la date de résiliation au 17 mars 2021, or M. [N] n'a pas été licencié et son contrat n'a pas été rompu avant le jugement, conformément à la jurisprudence constante et aux articles 1224 et suivants du code civil, la date d'effet de la résiliation judiciaire ne peut être fixée qu'au jour de la décision qui la prononce si le contrat n'a pas été rompu avant cette date, elle estime que le conseil de prud'hommes ne pouvait pas retenir une date antérieure à son jugement, la date de résiliation devrait être le 4 mars 2022, soit postérieurement au jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire de FT Diffusion,
- selon l'article L. 1224-1 du Code du travail, en cas de modification dans la situation juridique de l'employeur (comme une location-gérance), tous les contrats de travail en cours subsistent entre le nouvel employeur et le personnel, en l'espèce, le contrat de travail de M. [N] a été expressément transféré à la société The Good Shape, d'une part car cela répondait aux conditions de l'article L. 1224-1, et d'autre part car il était expressément visé dans l'annexe 2 du contrat de location-gérance entre FT Diffusion et The Good Shape, il ne fait aucun doute que le contrat de travail de M. [N] a été transféré de plein droit à la société The Good Shape,
- par conséquent, les créances fixées par le conseil de prud'hommes ne peuvent pas être fixées au passif de la société FT Diffusion,
- elle conteste spécifiquement les sommes fixées par le conseil de prud'hommes, notamment le manque à gagner, l'indemnité de préavis, l'indemnité de licenciement, et le préjudice économique, professionnel et financier :
- sur le manque à gagner de 2019 à 2021 (€42,015.35 + CP) : le contrat de M. [N] prévoit que les commissions sont dues sur le montant des marchandises livrées, non sur les commandes, M. [N] n'a versé que des commandes et ne démontre pas que les commandes aient été livrées, ne prouvant donc pas que les commissions lui soient dues, de plus, M. [N] est un VRP soumis à l'article L. 7311-1 du Code du travail. L'avenant TT de la convention collective n'applique que les articles 6 à 32 aux VRP statutaires, M. [N] ne peut prétendre à l'équivalent d'un salaire entre octobre 2019 et mars 2021. Il a perçu un salaire sans fournir de prestation, ne justifie pas s'être tenu à disposition, et était insistant pour obtenir un licenciement économique,
- sur l'indemnité de préavis (5,361.00 euros + CP) : le conseil de prud'hommes a appliqué l'article 35 de la convention collective, or cet article n'est pas applicable à M. [N] car, en tant que VRP statutaire, seuls les articles 6 à 32 de la convention lui sont applicables, et l'article 35 traite de la rupture et du préavis,
- sur l'indemnité de licenciement (7,148.56 euros ) : le conseil de prud'hommes a appliqué l'article 37 de la convention collective, or cet article n'est pas applicable à M. [N] car seuls les articles 6 à 32 de la convention lui sont applicables, et l'article 37 traite de l'indemnité de licenciement,
- sur le préjudice économique, professionnel et financier (17,871.40 euros ) : M. [N] ne peut percevoir d'équivalent salaire et n'a justifié d'aucun préjudice. Depuis 2016, le salarié doit prouver l'existence et le quantum de son préjudice. M. [N] n'a versé aucun élément le permettant. Enfin, cette demande de dommages et intérêts n'est pas directement fondée sur son contrat de travail, or l'AGS ne garantit que les créances s'y rattachant directement, selon la jurisprudence,
- elle invoque l'article L. 3253-8 - 2° c) du Code du travail, qui garantit les créances résultant de la rupture des contrats de travail intervenant dans les 15 jours suivant le jugement de liquidation judiciaire, elle soutient que si la date de résiliation judiciaire est fixée au jour de la décision d'appel (le 4 mars 2022), cette date est postérieure aux délais prévus par l'article L. 3253-8 du code du travail, de plus, les créances visées par cet article s'entendent d'une rupture à l'initiative de l'administrateur judiciaire ou du mandataire liquidateur. La résiliation judiciaire n'est pas une rupture à l'initiative du mandataire liquidateur, en conséquence, les indemnités de rupture devraient être déclarées inopposables à l'AGS.
La SCP BTSG, représentée par Maître [P] [F], ès qualités de mandataire liquidateur de SAS The Good Shape, mise en cause par acte du12 septembre 2022 à l'initiative de M. [N], remis à une personne habilitée à le recevoir, n'a pas constitué avocat.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.
Par ordonnance en date du 11 avril 2025, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 14 mai 2025.
L'affaire a été appelée le 4 juin 2025.
MOTIFS
Sur l'appel incident de M. [N]
M. [N] déclare maintenir la demande d'infirmation partielle du jugement déféré qu'il a formulée dans ses écritures du 8 décembre 2022, il considère que l'appel incident que contient ses écritures du 8 décembre 2022 est recevable indépendamment du sort de ses écritures du 8 septembre 2022, il précise que cet appel est recevable car l'AGS a formé un appel incident le 7 octobre 2022 qui lui a réouvert un délai de trois mois (ancien article 910 du CPC), que par ailleurs, l'actualisation des salaires et indemnités de rupture à laquelle il procède n'est que la conséquence des appels du liquidateur comme de l'AGS à l'encontre du jugement qui prononce la résiliation judiciaire du contrat, que la remise en cause de la résiliation donc de sa date (Soc. 4/02/19, n° 18-10541), autorise en effet cette réactualisation sans condition de délai : « L'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent » (article 562 du CPC).
Selon l'article 909 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable au litige, «L'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant prévues à l'article 908 pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué.»
L'article 910 prévoyait «L'intimé à un appel incident ou à un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui lui en est faite pour remettre ses conclusions au greffe.
L'intervenant forcé à l'instance d'appel dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle la demande d'intervention formée à son encontre lui a été notifiée pour remettre ses conclusions au greffe. L'intervenant volontaire dispose, sous la même sanction, du même délai à compter de son intervention volontaire».
M. [N] estime que ses conclusions du 8 décembre 2022 formalisent un appel incident suite à l'appel incident formé par l'Unedic délégation AGS CGEA d'Ile -de -France Est le 7 octobre 2022.
Or les conclusions de l'Unedic délégation AGS CGEA d'Ile -de -France Est ne comportaient aucun appel incident et sollicitaient, à titre principal de déclarer irrecevable l'intervention forcée de la société The Good Shape et de son mandataire liquidateur, la SCP BTSG, de débouter M. [M] [N] de l'ensemble de ses demandes, y compris celles de fixation au passif de la société The Good Shape, et de déclarer les demandes de M. [N] inopposables à l'UNEDIC Délégation AGS CGEA d'Ile de France Est et, subsidiairement, de réduire dans de notables proportions les demandes faites par M. [N].
Ainsi, en l'absence d'appel incident de la part d'un co-intimé, aucun nouveau délai pour former un appel provoqué ou incident n'était ouvert à M. [N] suite aux conclusions d'appelant.
L'appel incident formé par M. [N] est par conséquent irrecevable.
Par contre M. [N] est recevable à actualiser ses demandes en continuité de la décision de première instance exclusivement.
Sur la mise en cause de la SAS The Good Shape
Selon, l'article 554 du code de procédure civile 'Peuvent intervenir en cause d'appel dès lors qu'elles y ont intérêt les personnes qui n'ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité'.
L'article 555 du même code précise 'Ces mêmes personnes peuvent être appelées devant la cour, même aux fins de condamnation, quand l'évolution du litige implique leur mise en cause.'
Sur le fondement de ces textes l'association UNEDIC Délégation AGS CGEA d'Ile-de-France EST, conclut à l'irrecevabilité de la mise en cause de la SCP BTSG, représentée par Maître [P] [F], ès qualités de mandataire liquidateur de la SAS The Good Shape par M. [N] au motif que l'évolution du mitige ne justifie pas cette mise en cause.
Effectivement la SAS The Good Shape n'a pas été appelée en la cause devant le premier juge alors que M. [N] avait connaissance au plus tard le 13 octobre 2019, date à laquelle M. [R] l'a informé de la reprise du fonds et des contrats, du transfert de son contrat de travail au profit de cette dernière société. La circonstance que M. [N] conteste l'effectivité de ce transfert n'ôte pas la connaissance qu'il avait de l'éventualité d'un tel transfert en sorte qu'il lui appartenait lors de la saisine du conseil de prud'hommes en octobre 2020 de mettre en cause cette société.
M. [N] admet que les demandes formulées à l'encontre de la SAS The Good Shape sont nouvelles en appel et obéissent à un régime propre, celui de l'ancien article 910-4 du code de procédure civile : « À peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
« Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ».
Il estime que l'intervention forcée de la société The Good Shape est bien la réplique à la défense de l'appelant qui allègue un transfert de contrat et donc un changement d'employeur.
Cet argument est inopérant, la société FT Diffusion avait, déjà devant le premier juge, invoqué le transfert du contrat de travail de M. [N] au profit de la SAS The Good Shape, il appartenait alors à M. [N] d'appeler en cause ladite société.
Dès lors, aucune évolution du litige ne justifie la mise en cause en septembre 2022 de la SAS The Good Shape laquelle est par conséquent irrecevable.
Sur la demande de M. [N]
Il résulte des pièces produites que suivant acte sous seing privé du 19 septembre 2019, la société FT Diffusion a donné en location-gérance son fonds de commerce d'achat vente, commercialisation et exportation de tous articles se rapportant aux cadeaux gadgets à la maison et de produits manufacturés à la SAS The Good Shape. L'article 7 du contrat de location gérance indiquait expressément que l'ensemble des salariés, y compris les VRP, était repris par le locataire gérant conformément aux dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail et l'annexe 2 du contrat de location-gérance mentionnait expressément le contrat de M. [N].
Conformément aux dispositions de l'article L.1224-1 du code du travail selon lesquelles « S'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. » le transfert du contrat de travail de M. [N] au profit de la SAS The Good Shape opérait de plein droit et l'employeur n'était pas tenu de le notifier au salarié.
Le 13 octobre 2019, M. [R], représentant la SAS The Good Shape, prenait directement attache avec tous les salariés, parmi lesquels M. [N], afin de leur confirmer l'information précédemment transmise par la société FT Diffusion selon laquelle leur contrat était transféré à la SAS The Good Shape.
Le dernier bulletin de salaire établi par la société FT Diffusion au profit de M. [N] est celui du mois de septembre 2019, soldant tous les congés payés, et confirmant le transfert.
Il en résulte que M. [N] ne pouvait poursuivre la société FT Diffusion, qui n'était plus son employeur, en résiliation de son contrat de travail et en paiement des sommes en découlant lui reprochant de l'avoir laissé sans travail et sans salaire à compter de septembre 2019.
Ses demandes, mal dirigées, sont donc en voie de rejet.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Par arrêt réputé contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort
Juge irrecevable la mise en cause devant la cour d'appel de la SAS The Good Shape,
Juge irrecevable l'appel incident de M. [N],
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,
Déboute M. [N] de l'intégralité de ses prétentions,
Condamne M. [N] aux dépens de première instance et d'appel.
Arrêt signé par le président et par le greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT