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Décisions

CA Reims, ch.-1 civ. et com., 7 octobre 2025, n° 25/00190

REIMS

Arrêt

Autre

CA Reims n° 25/00190

7 octobre 2025

R.G. : N° RG 25/00190 - N° Portalis DBVQ-V-B7J-FTIL

ARRÊT N°

du : 07 octobre 2025

Formule exécutoire le :

à :

Me Pascal GUILLAUME

Me Mélanie CAULIER-RICHARD

Me Florence SIX

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 07 OCTOBRE 2025

APPELANTS :

d'une ordonnance de mise en état rendue le 10 décembre 2024 par le Juge de la mise en état de [Localité 32] (RG 23/00664)

Madame [U] [S]

[Adresse 14]

[Localité 4]

Représentée par Me Pascal GUILLAUME, avocat au barreau de REIMS, et Me David VATEL & Benjamin POTIER, avocat au barreau de PARIS

Madame [Y] [S]

[Adresse 8]

[Localité 15]

Représentée par Me Pascal GUILLAUME, avocat au barreau de REIMS, et Me David VATEL & Benjamin POTIER, avocat au barreau de PARIS

Madame [V] [S]

[Adresse 2]

[Localité 10]

Représentée par Me Pascal GUILLAUME, avocat au barreau de REIMS, et Me David VATEL & Benjamin POTIER, avocat au barreau de PARIS

Madame [K] [S]

[Adresse 14]

[Localité 4]

Représentée par Me Pascal GUILLAUME, avocat au barreau de REIMS, et Me David VATEL & Benjamin POTIER, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [L] [I]

[Adresse 17]

[Localité 3]

Représenté par Me Pascal GUILLAUME, avocat au barreau de REIMS, et Me David VATEL & Benjamin POTIER, avocat au barreau de PARIS

Madame [A] [I]

[Adresse 17]

[Localité 3]

Représentée par Me Pascal GUILLAUME, avocat au barreau de REIMS, et Me David VATEL & Benjamin POTIER, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS :

Monsieur [Z] [J]

[Adresse 11]

[Localité 6]

Représenté par Me Mélanie CAULIER-RICHARD, avocat au barreau de REIMS, et Me Morgane HANVIC, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [M] [H]

[Adresse 9]

[Localité 5]

Représenté par Me Mélanie CAULIER-RICHARD, avocat au barreau de REIMS et Me Morgane HANVIC, avocat au barreau de PARIS

S.A.M.C.V. [25]

[Adresse 7]

[Localité 16]

Représentée par Me Florence SIX de la SCP HERMINE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS, et Me Arnaud PERICARD, avocat au barreau de PARIS

S.A.R.L. [22]

[Adresse 12]

[Localité 1]

Représentée par Me Florence SIX de la SCP HERMINE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS, et Me Arnaud PERICARD, avocat au barreau de PARIS

S.A.R.L. [20] au capital de 1 000 euros, inscrite au RCS DE [Localité 32] sous le n° [N° SIREN/SIRET 18], prise en la persone de ses représentants légaux domicilés de droit audit siège

[Adresse 13]

[Localité 5]

Représentée par Me Mélanie CAULIER-RICHARD, avocat au barreau de REIMS et Me Morgane HANVIC, avocat au barreau de PARIS

DÉBATS :

A l'audience publique du 02 septembre 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 07 octobre 2025, sans opposition de la part des conseils des parties et en application de l'article 805 du code de procédure civile, Mme Christina DIAS DA SILVA, présidente de chambre, et M. Kevin LECLERE VUE, conseiller, ont entendu les conseils des parties en leurs conclusions et explications, puis ces magistrat en ont rendu compte à la cour dans son délibéré

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Christina DIAS DA SILVA, présidente de chambre

Mme Sandrine PILON, conseiller

M. Kevin LECLERE VUE, conseiller,

GREFFIER D'AUDIENCE :

Madame Lucie NICLOT, greffier

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Mme Christina DIAS DA SILVA, présidente de chambre, et par Mme Lucie NICLOT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

MM. [J] et [H] exerçaient une activité de conseil en gestion de patrimoine et étaient associés dans une société en participation.

Le 27 mai 2016, par l'intermédiaire de leur société en participation Cabinet [J] [H], Mme [U] [S] a souscrit 900 parts de la société en commandite simple à capital variable SCS [27] pour un montant de 99 000 euros. Le même jour Mme [Y] [S] et Mme [V] [S] ont chacune souscrit 400 parts de cette société pour un montant de 40 000 euros.

Ces investissements s'inscrivaient dans le cadre d'opérations initiées par la société [28] qui détenait 80 % du capital de sociétés supports dont l'objet social était l'acquisition et la location de locaux commerciaux.

Le 13 avril 2018 la société Cabinet [J] [H] a cédé à la société [26] ( la société [21]) la totalité de son portefeuille en cours chez [28].

Le 19 mars 2018 Mme [K] [S] a souscrit, par l'intermédiaire de la société [21] 500 parts de la société en commandite simple à capital variable SCS [30] pour un montant de 50 000 euros. Le 14 mai 2019 Mme [U] [S] a souscrit par le même intermédiaire 750 parts de la même société pour un montant de 75 000 euros.

Le 12 septembre 2022 la société [28] a été placée en redressement judiciaire lequel a été converti en liquidation judiciaire le 5 décembre 2023.

Les consorts [S] ont déclaré leurs créances au passif du redressement judiciaire de cette société en novembre 2022.

Le 21 décembre 2022 la société en participation Cabinet [J] [H] a été dissoute, MM. [J] et [H] cessant leur activité d'agent général. Ces derniers ont le 28 décembre 2022 créé la SARL Cabinet [J] [H].

Suivant exploits des 15 février, 2 et 10 mars 2023, les consorts [S] ont fait assigner la SARL Cabinet [J] [H], la société [21] et la société d'assurance mutuelle [25] devant le tribunal judiciaire aux fins de voir engager leur responsabilité en raison notamment du non respect du devoir de mise en garde, de conseil et d'information dans le cadre de la souscription d'un produit hautement spéculatif proposé à des investisseurs non avertis et condamner à les indemniser de leur préjudice subi.

Suivant exploits des 22 avril et 23 novembre 2023 les consorts [S] ont fait assigner MM. [M] [H] et [Z] [J] aux fins de jonction et de condamnation solidaire de ces derniers avec la société Cabinet [J]-[H] à les indemniser de leur préjudice subi du fait de la perte de chance de ne pas avoir investi dans les produits [29].

M. [L] [I] et Mme [A] [I] sont intervenus volontairement à l'instance principale initiée à l'encontre des sociétés [19] [J] [H], [21] et [25].

La SARL Cabinet [J]-[H] a saisi le juge de la mise en état de plusieurs fins de non recevoir.

Par ordonnance du 10 décembre 2024 le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Troyes a :

- ordonné la jonction des deux procédures,

- jugé irrecevable l'intervention volontaire des consorts [I],

- jugé irrecevable les demandes formées par les consorts [S] à l'encontre de la SARL Cabinet [J] [H] et mis cette dernière hors de cause,

- jugé irrecevables les demandes formées par les consorts [S] à l'encontre de la société [21] et son assureur [25] en raison du défaut de qualité à défendre de la société [21] s'agissant des investissements de 2016,

- déclaré non prescrites les demandes des consorts [S] au titre des investissements souscrits au cours de l'année 2016 à l'encontre de M. [J] et de M. [H],

- jugé recevables les consorts [S] en toutes leurs autres demandes,

- fait injonction à M. [J] et M. [H] de communiquer leur police d'assurance ayant couvert leur activité professionnelle au titre de leur activité de conseil en gestion de patrimoine de 2016 à 2022,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes y compris de celle fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens au titre de l'incident,

- renvoyé l'examen de l'affaire à l'audience de mise en état du 4 février 2025.

Par déclaration du 11 février 2025, les consorts [S] et les consorts [I] ont interjeté appel de cette décision.

Aux termes de leurs conclusions communiquées par voie électronique le 26 mai 2025, ils demandent à la cour de :

- constater le désistement d'appel des consorts [I],

- infirmer l'ordonnance en ce qu'elle a considéré que l'acquisition par [21] le 13 avril 2018 des contrats [28] détenus par le cabinet [J]-[H] s'analysait en une cession de fonds de commerce,

- statuant à nouveau,

- juger que cette cession s'analysait en une cession de contrats et non en une cession de fonds de commerce,

- infirmer l'ordonnance en ce qu'elle a dit irrecevables les demandes formulées par les consorts [S] à l'encontre de la société [21] et son assureur [25] en raison du défait de qualité à défendre de la société [21] s'agissant des investissements de 2016,

- condamner in solidum les intimés au paiement de la somme de 5 000 euros à chacune des demanderesses au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Ils font valoir qu'en déclarant leurs demandes à l'encontre de la société [21] irrecevables le juge de la mise en état n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations ; que la cession d'un portefeuille d'assurance n'est pas une cession de fonds de commerce mais une cession de contrats et qu'en tel cas à défaut de clause expresse dans l'acte de cession le cédant et le cessionnaire restent solidairement tenus conformément à l'article 1216-1 du code civil ; que l'acte de cession des clients [29] par MM. [J] et [H] au cabinet [21] n'était en aucun cas une cession de fonds de commerce.

Ils ajoutent qu'aucun actif n'a été cédé à cette occasion à la société [21] ni une clientèle significative, aucune des formalités prévues par le code de commerce en matière de cession de fonds de commerce n'ayant été respectée ; que MM. [J] et [H] ont continué leur activité et conservé la majeure partie de leur clientèle d'assurés.

Aux termes de leurs conclusions communiquées par voie électronique le 16 juillet 2025 MM. [J] et [H] ainsi que la SARL Cabinet [J] [H] demandent à la cour de :

- constater le désistement des consorts [I],

- débouter les consorts [I] de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- constater que MM. [J] et [H] et le Cabinet [J] [H] s'en rapportent à justice s'agissant de l'appel des consorts [S] concernant la qualification de la cession intervenue en 2018 et des conséquences su la recevabilité de leurs demandes,

- débouter les consorts [S] de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum les consorts [S] et les consorts [I] à leur verser la somme de 1 500 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner tout succombant aux dépens sous le bénéfice des dispositions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.

Ils font valoir que le cabinet [J] [H] a déjà indiqué devant le tribunal que la cession intervenue en 2018 était une simple cession de portefeuille à titre gratuit emportant un transfert des obligations de suivi à compter de la date de cession ; qu'ils ne sont pas concernés par les demandes des appelants en cause d'appel.

Aux termes de leurs conclusions notifiées par voie électronique le 22 juillet 2025, les sociétés [21] et [25] demandent à la cour de :

- déclarer parfait le désistement d'appel des consorts [I],

- confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a jugé irrecevable l'action engagée par les consorts [S] à leur encontre en raison du défaut de qualité à défendre de la société [21] s'agissant des investissements de 2016,

- en conséquence,

- débouter les consorts [S] de l'ensemble de leurs demandes formées à leur encontre,

- condamner les consorts [C] à leur payer chacune la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Elles font valoir que la société [21] n'a pas qualité à défendre au titre des investissements réalisés en 2016 ; que son rachat du portefeuille de clientèle n'a pas transféré le passif de responsabilité du cessionnaire ; que le cabinet [J] [H] est la seule entité à être intervenue auprès des consorts [S] pour les investissements souscrits en 2016.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 août 2025 et l'affaire a été renvoyée pour être plaidée à l'audience du 2 septembre suivant.

Motifs de la décision

Il a lieu de constater le désistement d'appel des consorts [I] lequel est accepté par les intimés.

Ainsi qu'il ressort de la déclaration d'appel et des conclusions des parties la cour n'est saisie que de la disposition de l'ordonnance querellée ayant 'jugé irrecevables les demandes formées par les consorts [S] à l'encontre de la société [21] et son assureur [25] en raison du défaut de qualité à défendre de la société [21] s'agissant des investissements de 2016'.

Dans le dispositif de leurs conclusions les appelants demandent aussi d'infirmer l'ordonnance en ce qu'elle a considéré que l'acquisition par [21] le 13 avril 2018 des contrats [28] détenus par le Cabinet [31] s'analysait en une cession de fonds de commerce. Cependant le dispositif de la décision dont appel, qui seul est revêtu de l'autorité de chose jugée, ne tranche nullement la question de la qualification de l'acquisition le 13 avril 2018 par la société [21] des contrats [28]. Cette question ne peut donc être soumise à la cour.

Ainsi que l'a rappelé à juste titre le premier juge, il résulte des articles 32 et 122 du code de procédure civile qu'est irrecevable toute prétention formée contre une partie n'ayant pas qualité à défendre.

Il ressort des éléments produits et notamment la pièce 6 des appelants que le 13 avril 2018 MM. [J] et [H], associés du Cabinet [J] [H] ont donné leur accord pour le transfert de la totalité de leur portefeuille en cours chez [28] à la société [21] 'en vue du suivi des clients grâce au statut de la société [24]. La cession du portefeuille d'actifs à la société [21] n'emporte cependant pas de plein droit la cession à la charge de l'acquéreur du passif des obligations dont le vendeur pouvait être tenu en vertu d'engagements initialement souscrits par lui.

Il n'est par ailleurs nullement établi qu'en reprenant le portefeuille en cours chez [28] détenu par le Cabinet [J] [H] la société [21] a aussi pris à sa charge le passif dudit cabinet de conseil en gestion de patrimoine.

Il s'ensuit que la société [23], cessionnaire du portefeuille appartenant originairement au cabinet [J] [H] est fondée à soutenir qu'elle ne peut être tenue d'une dette indemnitaire qui pourrait résulter d'une faute éventuellement commise par le Cabinet [J] [H], société cédante. C'est donc à bon droit que le juge de la mise en état a prononcé l'irrecevabilité des demandes des consorts [S] à l'encontre de la société [21] et de son assureur la [25] s'agissant des investissements de 2016 et l'ordonnance entreprise doit être confirmée en ses dispositions soumises à la cour.

Les consorts [S] qui succombent doivent être condamnés aux dépens d'appel et à verser une indemnité de procédure selon les modalités fixées au dispositif de la présente décision.

Par ces motifs

La cour, statuant par arrêt contradictoire, dans les limites de sa saisine,

Constate le désistement d'appel de M. [L] [I] et de Mme [A] [I] ;

Confirme l'ordonnance en ses dispositions soumises à la cour ;

Condamne Mmes [U] [S], [Y] [S], [V] [S] et [K] [S] aux dépens d'appel ;

Condamne Mmes [U] [S], [Y] [S], [V] [S] et [K] [S] à payer à la société [21] et à la société [25] la somme totale de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette les demandes des autres parties fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier La présidente

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