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CA Paris, Pôle 1 - ch. 8, 19 septembre 2025, n° 24/20307

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 24/20307

19 septembre 2025

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 8

ARRÊT DU 19 SEPTEMBRE 2025

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/20307 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CKPI4

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 06 Novembre 2024 -Tribunal de Commerce de CRETEIL - RG n° 2024R00356

APPELANTE

S.A.S. [Adresse 8], RCS de [Localité 6] sous le n°984 413 567 agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Christina DIRAKIS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1872

INTIMÉE

S.A.R.L. BJOINVILLE, RCS de [Localité 6] sous le n°490 826 468 agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Georges-Henri CHARPENTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : E1395

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue 26 juin 2025, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Florence LAGEMI, Présidente de chambre.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Florence LAGEMI, Président de chambre

Marie-Catherine GAFFINEL, Conseiller

Patrick BIROLLEAU, Magistrat Honoraire

Greffier, lors des débats : Lydia BEZZOU

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Florence LAGEMI, Président de chambre et par Catherine CHARLES présent lors de la mise à disposition.

Le 5 février 2024, la société Bjoinville a donné en location-gérance à la société [Adresse 8], pour une durée de vingt-six mois, un fonds de commerce de boulangerie pâtisserie, situé et exploité [Adresse 4]), moyennant le paiement d'une redevance annuelle de 138.600 euros HT, payable mensuellement à terme échu outre le paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle de 6.000 euros hors charges et hors taxes, correspondant au montant du loyer des locaux.

Le même jour, une promesse synallagmatique de cession dudit fonds de commerce a été signée entre ces sociétés pour un montant de 1.050.000 euros, déduction faite de la somme de 105.000 euros correspondant au dépôt de garantie versé au titre du contrat de location-gérance, sous réserve que le locataire-gérant soit à jour de la redevance et des loyers. La promesse a été consentie et acceptée jusqu'au 7 avril 2026.

La société Maison Trois Fils n'ayant pas respecté ses obligations contractuelles et, notamment, celles relatives au paiement des échéances du dépôt de garantie, de la redevance et des loyers, la société Bjoinville lui a fait délivrer, le 23 mai 2024, un commandement de payer, visant la clause résolutoire, pour la somme en principal de 29.884,38 euros avec sommation de communiquer les chiffres d'affaires depuis le 8 février 2024 et les justificatifs des déclarations fiscales réalisées.

Par acte du 23 juillet 2024, la société Bjoinville a assigné la société [Adresse 8], devant le juge des référés du tribunal de commerce de Créteil, aux fins, notamment, de résiliation du contrat de location-gérance, expulsion de la défenderesse et condamnation de cette dernière au paiement d'une indemnité d'occupation et de l'arriéré des redevances.

Par ordonnance du 6 novembre 2024, le premier juge a :

' constaté à compter du 24 juin 2024, l'acquisition, de plein droit, de la clause résolutoire du contrat de location-gérance conclu entre la société Bjoinville et la société [Adresse 8] en date du 5 février 2024 concernant le fonds de commerce situé [Adresse 3] à [Localité 7] ;

' ordonné l'expulsion de la société Maison Trois Fils et de tous occupants de son chef des lieux loués, avec au besoin l'assistance de la force publique et d'un serrurier, sous peine d'une astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de deux mois suivant la signification de l'ordonnance et ce jusqu'à la libération effective des lieux par la remise des clefs, après l'établissement d'un état des lieux de sortie ;

' ordonné à la société [Adresse 8] de laisser tout le matériel et tout le mobilier mis à sa disposition pour l'exploitation du fonds de commerce ;

' condamné la société Maison Trois Fils à payer, par provision, à la société Bjoinville les sommes de :

' 6.000 euros hors taxes et hors charges, par mois, au titre de l'indemnité d'occupation, outre l'ensemble des charges à compter de l'ordonnance à intervenir et jusqu'à la libération effective des lieux et la remise des clés,

' 30.130,05 euros, montant arrêté à la date du commandement de payer du 24 mai 2024, somme à parfaire jusqu'à la date de l'ordonnance, outre les intérêts de retard au taux légal à compter du 23 juillet 2024 ;

' condamné la partie défenderesse au paiement de la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

' rejeté toute autre demande.

Par déclaration du 30 novembre 2024, la société [Adresse 8] a relevé appel de cette décision en critiquant l'ensemble de ses chefs de dispositif.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 10 juin 2025, la société Maison Trois Fils demande à la cour de :

' infirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

' rejeter les demandes de la société Bjoinville ;

' dire n'y avoir lieu de constater l'acquisition de la clause résolutoire à la date du 24 juin 2024 ;

' dire n'y avoir lieu à l'expulsion ;

' dire n'y avoir lieu à toute condamnation à paiement ;

' condamner la société Bjoinville à lui payer la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés par Maître Dirakis conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses uniques conclusions remises et notifiées le 21 mars 2025, la société Bjoinville demande à la cour de :

' rejeter les demandes de la société [Adresse 8] ;

' confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise ;

' condamner la société Maison Trois Fils à lui payer la somme de 15.000 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens.

La clôture de la procédure a été prononcée le 18 juin 2025.

Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée ainsi qu'aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Sur la violation des droits de la défense et du principe de la contradiction

Dans les motifs de ses conclusions, la société [Adresse 8] invoque, sans toutefois en tirer de conséquence dans le dispositif de ses conclusions, la violation par le premier juge des droits de la défense et du principe de la contradiction en soutenant que l'ordonnance critiquée, qui ne se fonde que sur l'assignation et les pièces communiquées par la société Bjoinville, a été prononcée sans que soit ordonnée la réouverture des débats et qu'il lui soit permis de conclure, de produire de pièces ou de note en délibéré et alors que les parties étaient en cours de négociation.

Mais, il sera relevé que la société [Adresse 8] a été assignée le 23 juillet 2024 pour une audience du 11 septembre 2024 lors de laquelle l'affaire a été, à sa demande, renvoyée au 9 octobre suivant ; qu'à cette audience, la société Maison Trois Fils a formé une nouvelle demande de renvoi en faisant état d'un accord transactionnel en cours de finalisation ; que la société Bjoinville s'est opposée à ce renvoi réfutant toute transaction en cours ; que l'affaire a été retenue.

Il apparaît ainsi, que représentée dès le début de la procédure par un conseil, la société [Adresse 8] avait la faculté de développer par écrit ou oralement des moyens utiles à sa défense et de produire toutes pièces nécessaires à celle-ci d'autant qu'assignée en référé depuis le mois de juillet 2024 et ne pouvant ignorer l'échec de la tentative de négociation, elle a disposé d'un temps suffisant pour organiser sa défense.

Il en résulte qu'aucune violation des droits de la défense ou du principe de la contradiction n'est caractérisée et qu'en tout état de cause, à la supposer établie, elle ne pourrait que conduire à l'annulation de l'ordonnance entreprise non sollicitée dans le dispositif des conclusions.

Sur le non-respect des articles 4 et 5 du code de procédure civile

Selon ces textes, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties et le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.

La société Maison Trois Fils soutient que le premier juge a statué ultra petita en constatant l'acquisition de la clause résolutoire alors qu'il lui avait été demandé par la société Bjoinville de prononcer la résiliation du contrat de location-gérance, demande excédant ses pouvoirs.

L'intimée réplique que lors de la première audience, elle a modifié oralement sa demande en sollicitant le constat de l'acquisition de la clause résolutoire.

Si la modification de cette demande ne résulte pas de l'ordonnance entreprise qui ne vise que la demande de résiliation formée dans l'acte introductif d'instance, il apparaît toutefois que le constat de l'acquisition des effets de la clause résolutoire est nécessairement contenu dans la demande de résiliation et qu'en constatant l'acquisition de cette clause, le premier juge a statué dans les limites de ses pouvoirs sans dépasser la demande de la société Bjoinville.

Sur le constat de la résiliation du contrat de location-gérance

Selon l'article 872 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

En application de l'article 873 du même code, le président du tribunal de commerce peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

En application de ces textes, il est possible, en référé, de constater la résiliation de plein droit d'un contrat de location-gérance en application d'une clause résolutoire lorsque celle-ci est mise en oeuvre régulièrement.

Au cas présent, il est constant que la société Bjoinville a fait délivrer à la société [Adresse 8], le 23 mai 2024, un commandement de payer visant la clause résolutoire stipulée dans le contrat de location gérance, pour paiement de la somme en principal de 29.884,38 euros, somme correspondant, d'une part, à quatre mensualités (février, mars, avril et mai) venant en paiement du dépôt de garantie défini à l'article IX (p. 32) du contrat de location-gérance pour la somme totale de 16.156 euros et, d'autre part, à la redevance de gérance et de l'indemnité d'occupation du mois d'avril 2024 pour la somme de 13.728,38 euros.

Pour s'opposer aux effets de ce commandement, la société Maison Trois Fils soutient qu'il serait nul en raison du caractère imprécis et erroné du décompte joint à cet acte, précisant que celui-ci ne détaille pas les loyers et les redevances dus ni même la TVA. Elle indique que la somme de 13.728,38 euros réclamée à ce titre est inexpliquée et ne lui permet pas de connaître avec certitude sa nature. Elle ajoute qu'à la date du commandement de payer, elle n'était pas débitrice puisqu'elle avait réglé la somme 83.974,53 euros et qu'à la fin du mois de mai 2024, la société Bjoinville avait perçu en trop la somme de 3.278,25 euros.

Enfin, elle indique que le commandement de payer vise la somme de 16.156 euros au titre des échéances du dépôt de garantie alors que la clause résolutoire ne mentionne pas le non-paiement du dépôt de garantie.

Le commandement de payer, qui porte sur la somme en principal de 29.884,38 euros, ainsi qu'il a été précédemment indiqué, contient un décompte précis des sommes réclamées soit:

' 16.156 euros au titre des quatre échéances du dépôt de garantie de février à mai 2024 (4.039 euros x 4),

' 13.728,38 euros au titre de la redevance et de l'indemnité d'occupation du mois d'avril 2024.

Au vu du détail des éléments de créance, la société [Adresse 8] a été en capacité de déterminer le montant dû, d'en vérifier l'exigibilité et, le cas échéant, de contester les sommes réclamées, ainsi d'ailleurs qu'elle le fait dans ses conclusions.

Cet acte reproduit la clause résolutoire stipulée dans le contrat de location-gérance ainsi rédigée :

A défaut de paiement à son échéance exacte d'un seul terme de redevance, d'indemnité d'occupation définis à l'article VIII des présentes, des charges ou de tous autres accessoires (notamment des taxes, droits, impôts et contributions), à défaut de paiement à son échéance exacte d'une fraction de terme de redevance, d'une fraction d'indemnité d'occupation, d'une fraction de charges et accessoires, comme de tout complément de loyer découlant d'une décision judiciaire ou d'un accord commun entre les parties, ou de tout remboursement de frais, droits, contributions, taxes, charges ou prestations qui en constituent l'accessoire, à défaut de paiement de rappel de loyers, comme à défaut de paiement de toute somme due en vertu des présentes et/ou à défaut d'exécution de l'une ou l'autre des clauses, charges et conditions du contrat de location-gérance, et 30 (trente) jours après un simple commandement de payer ou une sommation d'exécuter, resté infructueux et exprimant la volonté du bailleur de fonds de se prévaloir de la présente clause, le contrat de location-gérance sera résilié immédiatement et de plein droit, sans qu'il soit besoin de remplir aucune formalité judiciaire et nonobstant toutes offres ou consignations ultérieures (...) et rappelle expressément le délai de trente jours laissé au preneur de fonds pour exécuter son obligation de paiement et faire échec à l'acquisition de la clause résolutoire.

Ainsi, cette clause en ce qu'elle mentionne le défaut de paiement de toute somme due en vertu du contrat de location-gérance, vise nécessairement le défaut de paiement des échéances du dépôt de garantie. A cet égard, il est rappelé qu'il a été mis à la charge du locataire-gérant le paiement d'un dépôt de garantie d'un montant de 105.000 euros payable en 26 mensualités de 4.039 euros, devant être versées le 1er jour de chaque mois et pour la première fois le 8 février 2024, de sorte qu'à la date du commandement de payer, l'appelante était débitrice de la somme de 16.156 euros à ce titre qu'elle ne justifie pas avoir réglé dans les trente jours de cet acte.

S'agissant des sommes dues par la société Maison Trois Fils au titre des redevances et loyers, le contrat de location-gérance prévoit le paiement d'une redevance annuelle de 138.600 euros HT, payable mensuellement, soit la somme de 11.550 euros HT par mois, majorée de la TVA, par virement. Il a également été stipulé qu'à cette somme s'ajoutera celle mensuelle de 6.000 euros hors taxes et hors charges à titre d'indemnité d'occupation, laquelle correspond au montant des loyers.

Il en résulte que la société [Adresse 8] est débitrice de la somme mensuelle de 17.550 euros hors taxes et hors charges, soit la somme mensuelle globale de 21.060 euros TTC ainsi qu'elle le reconnaît dans ses conclusions.

Contrairement à ce qu'elle soutient, la société Maison Trois Fils ne démontre pas s'être acquittée, à la date du commandement de payer, de la somme globale de 83.974,53 euros et avoir versé en trop la somme de 3.278,25 euros. En effet, les pièces qu'elle produit pour justifier des paiements allégués sont totalement inexploitables s'agissant de relevés TPE, au demeurant, difficilement lisibles, et à eux seuls insuffisants pour établir que la société Bjoinville aurait perçu les sommes y figurant.

En revanche, au titre de l'échéance d'avril 2024, seule concernée par le commandement de payer, dont le montant s'élève ainsi que précédemment indiqué à la somme de 21.060 euros TTC, l'appelante justifie par un virement du 5 avril 2024 avoir réglé à la société Bjoinville la redevance du mois d'avril 2024 à hauteur de 15.894,62 euros. Elle ne démontre pas s'être acquittée du solde, soit la somme de 5.165,38 euros, au cours de ce mois ni dans les trente jours du commandement de payer et la société Bjoinville ne produit aucun décompte permettant d'établir que le virement susvisé ne concernerait pas les sommes dues au titre de la redevance et de l'indemnité d'occupation (loyer) du mois d'avril 2024.

Il apparaît ainsi qu'aucune irrégularité n'affecte le commandement de payer du 23 mai 2024, étant rappelé que sa délivrance pour une somme supérieure au montant réel de la dette demeure valable à concurrence de celle-ci.

La société [Adresse 8] soulève en outre la nullité de l'assignation, sans en tirer de conséquence dans le dispositif de ses conclusions puisqu'elle ne sollicite pas l'annulation de l'ordonnance entreprise, au motif que cet acte, faisant suite à un commandement nul, serait affecté par cette nullité. Mais, ce commandement n'étant pas irrégulier et aucune cause de nullité de l'acte introductif d'instance n'étant démontrée ni même alléguée, le moyen soulevé est sans pertinence.

Enfin, la société Maison Trois Fils invoque l'exception d'inexécution en soutenant que dès son entrée dans les lieux, le 8 février 2024, elle s'est aperçue de la vétusté du matériel ainsi que de dysfonctionnements et de non-conformités aux règles d'hygiène et de sécurité, de l'existence d'un laboratoire totalement détruit au [Adresse 1], d'une procédure pendante devant la cour en fixation du loyer commercial, de l'installation extérieure des moteurs de refroidissement sans l'accord des copropriétaires ou des bailleurs et de l'absence depuis de nombreux mois du seul boulanger de la boutique du fait de sa détention au Portugal que la société Bjoinville a volontairement omis de porter à sa connaissance. Elle indique être toujours dans l'attente de l'inventaire du matériel, de la remise aux normes des locaux et précise avoir effectué de nombreuses réparations urgentes et nécessaires pour une somme de 15.407,16 euros.

Mais, il ressort du contrat de location-gérance que le locataire-gérant a déclaré connaître l'état des locaux ainsi que l'état de fonctionnement du matériel, du mobilier, des agencements et des installations se trouvant dans le fonds de commerce et le prendre avec tous ses éléments en dépendant dans leur état actuel, sans pouvoir prétendre à aucune indemnité, ni diminution du montant de la redevance, pour quelque cause que ce soit, notamment pour vétusté, usure, dégradation ou mauvais fonctionnement du mobilier, du matériel, des agencements et des installations (...). En outre, le contrat précise expressément que le boulanger salarié est en absence injustifiée depuis le 23 janvier 2024 et qu'un avertissement lui a été adressé le 5 février 2024.

Si le contrat ne précise pas qu'une procédure d'appel était en cours à la date de sa signature, relative à un jugement du juge des loyers commerciaux ayant fixé le montant du loyer des locaux du [Adresse 2] à la somme annuelle de 43.660 euros, portée, après indexation, à la date du contrat, à celle de 45.916,80 euros, telle que mentionnée dans celui-ci, il n'est nullement établi que ce défaut d'information doit avoir pour effet de dispenser la société [Adresse 8] de l'exécution de son obligation de paiement telle que prévue au contrat.

Par ailleurs, la société Maison Trois Fils ne démontre pas que les anomalies et non-conformités, qui ont été relevées postérieurement à son entrée dans les lieux, sont de nature à remettre en cause l'équilibre contractuel et l'ont totalement privée de la jouissance du fonds de commerce, celle-ci ne produisant d'ailleurs aucune pièce pour justifier d'une impossibilité d'exploitation.

Dans ces conditions, la société [Adresse 8] ne justifie d'aucune contestation sérieuse permettant d'écarter le commandement de payer et de faire obstacle à ses effets.

Il apparaît des pièces produites que la société Maison Trois Fils était débitrice, à la date de cet acte, de la somme globale de 21.321,38 euros correspondant aux échéances impayées du dépôt de garantie à hauteur de 16.156 euros et de la redevance et de l'indemnité d'occupation du mois d'avril 2024 à hauteur de 5.165,38 euros, qu'elle ne démontre pas avoir réglée dans les trente jours du commandement, de sorte que la cour ne peut que constater l'acquisition de la clause résolutoire à la date du 24 juin 2024. L'ordonnance sera donc confirmée de ce chef ainsi qu'en ses dispositions relatives, d'une part, à l'expulsion de la société appelante, mesure justifiée par la constatation de la résiliation du contrat et le maintien de cette dernière sans droit ni titre dans les lieux, et, d'autre part, au maintien dans les lieux du matériel et mobilier mis à sa disposition pour l'exploitation du fonds.

Sur la provision

Selon l'article 873, alinéa 2, du code de procédure civile, dans les cas où l'existence d'une obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal de commerce peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Au regard des motifs qui précèdent, l'obligation de la société [Adresse 8] n'est pas sérieusement contestable à hauteur de la somme de 21.321,38 euros, montant des sommes dues en principal à la date du commandement de payer, à laquelle s'ajoutera celle de 245,67 euros au titre du coût de cet acte qui avait été incluse par le premier juge dans le montant de la provision allouée. Ainsi, infirmant l'ordonnance entreprise de ce chef, la société Maison Trois Fils sera condamnée, par provision, au paiement de la somme de 21.567,05 euros outre intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2024.

L'ordonnance sera confirmée en ce qu'elle a condamné, conformément à la demande de la société Bjoinville, la société [Adresse 8] à lui payer une indemnité d'occupation mensuelle de 6.000 euros hors taxes, majorée des charges jusqu'à la libération effective des lieux.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le sort des dépens de première instance et l'application de l'article 700 du code de procédure civile ont été exactement appréciés par le premier juge.

Succombant en l'essentiel de ses prétentions, la société Maison Trois Fils supportera les dépens d'appel et sera condamnée à payer à la société Bjoinville la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance entreprise sauf en ses dispositions relatives au montant de la provision allouée au titre des sommes dues à la date du commandement de payer ;

Statuant à nouveau de ce seul chef,

Condamne la société [Adresse 8] à payer à la société Bjoinville la somme de 21.567,05 euros montant arrêté à la date du commandement de payer du 23 mai 2024, avec intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2024 ;

Condamne la société [Adresse 8] aux dépens d'appel et à payer à la société Bjoinville la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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