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Décisions

CA Paris, Pôle 5 - ch. 8, 30 septembre 2025, n° 25/14946

PARIS

Ordonnance

Autre

CA Paris n° 25/14946

30 septembre 2025

Copies exécutoires République française

délivrées aux parties le : Au nom du peuple français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ORDONNANCE DU 30 SEPTEMBRE 2025

(n° / 2025 , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/14946 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CL5JF

Décision déférée à la Cour : Jugement du 1er Juillet 2025 - Tribunal des activités économiques de PARIS - RG n° 2024058244

Nature de la décision : Contradictoire

NOUS, Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre, agissant par délégation du Premier Président de cette cour, assistée de Liselotte FENOUIL, greffière.

Vu l'assignation en référé délivrée les 10 et 11septembre 2025 à la requête de :

DEMANDERESSE

S.A.R.L. DELAL, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 821 288 628,

Dont le siège social est situé [Adresse 3]

[Localité 7]

Représentée par Me Carole MESSECA, avocate au barreau de PARIS, toque : C1157,

à

DÉFENDEURS

S.E.L.A.R.L. BDR & ASSOCIES, prise en la personne de Me [E] [U], en qualité de liquidateur judiciaire de la société DELAL,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 844 765 487,

Dont le siège social est situé [Adresse 5]

[Localité 6]

Représentée par Me Victor THIERRY D'ARGENLIEU, avocat au barreau de PARIS, toque : E1719, substituant Me Vincent GALLET, avocat au barreau de PARIS, toque : E1719,

L'URSSAF

Située [Adresse 2]

[Localité 9]

Représentée par M. [R] [S], en qualité d'inspecteur contentieux, en vertu d'un pouvoir,

LE PROCUREUR GÉNÉRAL

SERVICE FINANCIER ET COMMERCIAL

[Adresse 4]

[Localité 8]

Et après avoir appelé les parties lors des débats de l'audience publique du 22 septembre 2025 :

ORDONNANCE rendue par Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre, assistée de Madame Liselotte FENOUIL, greffière présente lors de la mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

***

FAITS ET PROCÉDURE:

La SARL DELAL exploite un commerce de restauration rapide [Adresse 15] à [Localité 10].

Sur assignation de l'Urssaf invoquant une créance de 78.066,55 euros dont 36.562 euros de parts salariales, le tribunal des activités économiques de Paris a, par jugement du 1er juillet 2025 ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Delal, fixé la date de cessation des paiements au 11 janvier 2024 et désigné la SCP BDR et Associés, en la personne de Maître [U], en qualité de liquidateur judiciaire.

Le 16 juillet 2025, la société Delal a relevé appel de cette décision et par actes des 10 et 11 septembre 2025 a fait assigner le liquidateur judiciaire, ès qualités, l'Urssaf et le ministère public devant le délégataire du premier président pour voir suspendre l'exécution provisoire du jugement dont appel et dire que les dépens du référé suivront le sort de ceux de l'appel.

La SCP BDR et Associés, ès qualités, représentée par son conseil, s'oppose à l'arrêt de l'exécution provisoire en l'absence selon elle de moyen d'appel sérieux.

L'Urssaf s'oppose également à l'arrêt de l'exécution provisoire en l'absence d'éléments suffisants, soulignant qu'il existe un risque d'aggravation de la dette.

Dans son avis du 19 septembre 2025, le ministère public invite le délégataire du premier président à arrêter l'exécution provisoire, considérant que le jugement ne compare pas les deux composantes de la cessation des paiements, ce qui est une cause de nullité de la décision querellée.

La société Delal, ayant indiqué à l'audience,que son dirigeant avait obtenu des prêts de la part de proches lui permettant d'abonder son actif disponible, a été autorisée à justifier du versement des fonds par note en délibéré.

Le 29 septembre 2025, le conseil de la société Delal a transmis une note en délibéré pour justifier du versement des fonds.

Par note du 30 septembre 2025, le conseil du liquidateur judiciaire a confirmé la réception des deux virements pour un montant de 20.000 euros, mais a souligné qu'en revanche en dépit de plusieurs demandes le solde créditeur du compte LCL ne lui avait toujours pas été versé.

Vu l'article R.661-1 du code de commerce.

SUR CE,

Il résulte de l'article R.661-1 du code de commerce, dérogeant aux dispositions de l'article 514-3 du code de procédure civile, que seuls des moyens sérieux d'appel permettent de suspendre l'exécution provisoire attachée au jugement d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire.

Au soutien de sa demande la société Delal expose notamment que:

- le jugement dont appel n'a pas caractérisé les conditions d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire, se bornant à relever que l'entreprise étant dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible se trouvait en conséquence en cessation des paiements et qu'un redressement ne pouvait être envisagé,

- elle ne conteste pas être en cessation des paiements, mais que son redressement n'est pas manifestement impossible, dès lors qu'elle exploite une activité de petite restauration rapide dans un quartier à forte fréquentation, à proximité de la [Adresse 12], que ses difficultés financières s'expliquent par les dettes accumulées dans le temps de la location-gérance d'un second fonds qui était situé [Adresse 13] à [Adresse 11] [Localité 1] et que depuis mars 2023 elle n'exploite plus que le commerce de la [Adresse 14] des arts, ayant résilié le contrat de location-gérance de l'autre établissement,

- le premier semestre 2025 marque un relèvement de l'activité touristique et de ses résultats, que son prévisionnel d'activité est prudent et réaliste, d'autant que ses charges sont maitrisées,

- des proches se sont engagés à la soutenir financièrement au moyen de prêts.

Le liquidateur judiciaire relève que l'état de cessation des paiements n'est pas contesté, que le passif déclaré ressort à 544.683,66 euros, dont 79.372 euros à titre provisionnel, que le solde créditeur du compte bancaire n'est que de 5.000,45 euros et n'a pas été appréhendé par le liquidateur en dépit de ses demandes. Il souligne qu'il a dû procéder aux licenciements des trois salariés, qu'une reprise d'activité supposerait de procéder à de nouvelles embauches, d'apurer le passif lié aux licenciements, et de faire face au paiement du loyer mensuel de 4.920 euros, relevant à cet égard qu'il existe un risque de perte du droit au bail si la société ne régularise pas les trois mois de loyers échus depuis le jugement d'ouverture, soit un montant de 14.760 euros.Il considère qu'il n'est pas certain au regard des résultats passés de la société Delal qu'elle puisse dégager une capacité d'auto-financement suffisante pour apurer son passif sur 10 ans.

L'état de cessation des paiements n'est pas contesté.Le passif déclaré à titre échu s'élève à 465.311,66 euros. Suite au versement de la somme de 20.000 euros entre les mains du liquidateur, intervenu en cours de délibéré, l'actif disponible s'élève a minima à 20.000 euros. S'il est fait état d'un solde créditeur dans les livres du LCL, de l'ordre de 5.000 euros, cette somme n'a pas encore pu être appréhendée par le liquidateur.

S'agissant des possibilités de redressement, il ressort des pièces aux débats les éléments suivants:

- les comptes de l'exercice 2022 se sont soldés par une perte de -127.799 euros. Toutefois, la société Delal explique cette perte par les dettes générées par le second établissement qu'elle exploitait en location-gérance [Adresse 13], contrat qu'elle a résilié en 2023 pour se concentrer sur la gestion de l'établissement de la [Adresse 15].

- en 2023, la société Delal a réalisé un chiffre d'affaires moindre qu'en 2022 (376.777 euros contre 775.639 euros) puisqu'il n'y avait plus qu'un seul établissement exploité, mais toutefois son résultat a été nettement bénéficiaire à hauteur de 79.967 euros.

- en 2024, le chiffre d'affaires bien qu'en baisse ( 304.819 euros) a néanmoins permis à la société de de réaliser un bénéfice de 15.581 euros, les jeux olympiques pouvant avoir perturbé l'activité.

- au premier semestre 2025, le chiffre d'affaires s'est élevé à 146.528 euros et le résultat d'exploitation de 10.634 euros, soit une tendance à la reprise d'activité.

Le prévisionnel d'activité versé aux débats prend pour hypothèse sur les 12 mois à venir un chiffre d'affaires de 338.560 euros, hypothèse qui est certes optimiste, mais qui n'est cependant pas décorellée des résultats de l'exercice 2023.

Ainsi que le relève le liquidateur, le défaut de paiement des loyers postérieurs faisait courir un sérieux risque de perte du droit au bail et partant du fonds de commerce. Si la trésorie disponible de l'ordre de 5.000 euros ne permettait pas jusqu'alors de s'acquitter de l'arriéré locatif postérieur au jugement d'ouverture, la société Delal a justifié en cours de délibéré d'un virement de 17.000 euros le 26 septembre 2025, complété par un virement de 3.000 euros entre les mains du liquidateur judiciaire pour abonder la trésorerie de la société et notamment faire face au paiement des loyers postérieurs.

La société Delal, qui fonctionne en partie avec le recours à la famille, va pendant la période d'observation réduire ses charges salariales.

En cet état et à date, le moyen pris de ce que tout redressement n'est pas manifestement impossible n'apparait pas dépourvu de sérieux.

Il sera en conséquence fait droit à la demande de suspension de l'exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

Suspendons l'exécution provisoire du jugement dont appel,

Disons que les dépens du référé suivront le sort de ceux de l'appel.

Liselotte FENOUIL

Greffière

Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT

Présidente

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