CA Rennes, 5e ch., 8 octobre 2025, n° 22/04703
RENNES
Arrêt
Autre
5ème Chambre
ARRÊT N°-201
N° RG 22/04703 - N° Portalis DBVL-V-B7G-S7KV
(Réf 1ère instance : 18/01018)
M. [H] [C] [D] [W]
Mme [L] [I] [M] [B] épouse [W]
C/
S.A.R.L. C PERMIS
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 08 OCTOBRE 2025
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Virginie PARENT, Présidente,
Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,
Assesseur : Madame Marie-France DAUPS, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 02 Juillet 2025
devant Madame Virginie PARENT et Madame Virginie HAUET, magistrats rapporteurs, tenant seules l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui ont rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 08 Octobre 2025 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTS :
Monsieur [H] [C] [D] [W]
né le 13 Décembre 1977 à [Localité 4] (44)
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Joachim D'AUDIFFRET de la SCP ACTA JURIS SCP D'AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES
Madame [L] [I] [M] [B] épouse [W]
née le 11 Juillet 1979 à [Localité 4] (44)
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Joachim D'AUDIFFRET de la SCP ACTA JURIS SCP D'AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES
INTIMÉE :
S.A.R.L. C PERMIS immatriculée sous le numéro 811 989 805 du registre du commerce et des sociétés de NANTES, agissant poursuite et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Stéphanie PRENEUX de la SELARL BAZILLE, TESSIER, PRENEUX, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Camille MANDEVILLE de la SELARL GUEGUEN AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de NANTES
Le 27 août 2014, M. [H] [W] et Mme [L] [B] épouse [W], ont acquis auprès de M. [N] [Y], un local commercial au rez-de-chaussée d'un immeuble, avec accès voiture, accès piéton et un parking de cinq places, le tout sis [Adresse 2] à [Localité 4].
Par acte du 28 août 2014, les époux [W] ont donné à bail à M. [N] [Y], exploitant de l'entreprise individuelle C Permis, ledit local commercial.
M. [N] [Y] a cédé son fonds de commerce d'auto-école le 15 juin 2015 à la société C Permis.
L'intégralité des loyers et charges de l'année 2015 a été réglée par le nouveau locataire, ainsi que les loyers de 2016.
Les charges locatives de 2016 ont fait l'objet d'un conflit entre les parties.
Par courriel des 20 et 21 septembre 2017, les époux [W] ont sollicité le paiement de ces charges pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2016, à hauteur de 1 785,87 euros auprès de la société C Permis.
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 12 novembre 2017, les époux [W] ont mis la société C Permis en demeure de régler cette même somme, en visant la clause résolutoire figurant dans le contrat de bail.
Le même jour, ils ont envoyé un second courrier recommandé avec accusé de réception à la société C Permis afin d'officialiser les discussions relatives à la mise en place de compteurs électriques divisionnaires dans tous les locaux loués, notamment au regard des frais à supporter par l'ensemble des parties, et de l'interruption de l'activité que cela engendrerait pour le commerce.
Le 18 janvier 2018, les époux [W] ont fait délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire à la société C Permis aux fins de règlement des charges de l'année 2016.
Par acte du 15 février 2018, la société C Permis a fait assigner les époux [W] devant le tribunal judiciaire de Nantes.
Par jugement en date du 19 mai 2022, le tribunal judiciaire de Nantes a :
- jugé nul et de nul effet le commandement de payer visant la clause résolutoire en date du 18 janvier 2018 et dit qu'il n'y a pas lieu de constater l'acquisition de la clause résolutoire de ce commandement de payer et de prononcer une quelconque expulsion,
- condamné la société C Permis à payer aux époux [W], en derniers ou quittance, la somme de 1 860,11 euros au titre de l'intégralité des charges encore dues par ces derniers pour la période 2016 à 2020, soit 722,62 euros pour l'année 2016, 3,29 euros pour les années 2017 et 2018, 589,61 euros pour l'année 2019 et 544,59 euros pour l'année 2020,
- débouté les parties de toutes leurs autres demandes, plus amples ou contraires,
- condamné solidairement les époux [W] à payer à la société C Permis une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de l'instance, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement en toutes ses dispositions.
Le 22 juillet 2022, les époux [W] ont interjeté appel de cette décision et aux termes de leurs dernières écritures notifiées le 14 mars 2023, ils demandent à la cour de :
- réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nantes en date du 19 mai 2022 en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes de condamnation de la société C Permis à leur assurer le règlement de la somme de 2 539,46 euros au titre des loyers dus pour la période des mois de mars et avril 2020, et les a condamnés à verser à la société C Permis une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance,
- débouter la société C Permis de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Statuant à nouveau sur l'ensemble de ces points :
- condamner la société C Permis à leur payer la somme de 2 539,46 euros au titre des deux mois de loyer dus pour les mois de mars et avril 2020, outre les intérêts au taux légal à compter du 23 juin 2020, date de la mise en demeure,
- débouter la société C Permis de sa demande présentée en première instance au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens vis-à-vis d'eux,
- débouter la société C Permis de l'ensemble de ses demandes, plus amples ou contraires présentées à hauteur d'appel,
- condamner la société C Permis à leur payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel,
- condamner la société C Permis aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Par dernières conclusions notifiées le 16 janvier 2023, la société C Permis demande à la cour de :
- la dire tant recevable que bien fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
En conséquence,
- débouter les époux [W] de leur appel visant à réformer le jugement du tribunal judiciaire de Nantes en date du 19 mai 2022, en ce qu'il a :
* débouté les consorts [W] de leurs demandes de sa condamnation à leur assurer le règlement de la somme de 2 539,46 euros au titre de loyers dus pour la période des mois de mars et avril 2020,
* condamné les consorts [W] à lui verser une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,
- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Nantes en date du 19 mai 2022, en ce qu'il a :
* débouté les consorts [W] de leurs demandes de condamnation à leur assurer le règlement de la somme de 2 539,46 euros au titre de loyers dus pour la période des mois de mars et avril 2020,
* condamné les consorts [W] à lui verser une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,
- réformer le jugement du tribunal judiciaire de Nantes du 19 mai 2022 en ce qu'il l'a condamnée à payer aux époux [W], en deniers ou quittance, la somme de 722,62 euros pour l'année 2016 et 3,29 euros pour les années 2017 et 2018,
- condamner solidairement les époux [W] à lui payer une somme de 725,91 euros au titre du remboursement des sommes acquittées indûment par cette dernière dans le cadre de l'exécution provisoire du jugement de première instance,
- condamner solidairement les époux [W] à lui payer une somme de
3 140,19 euros, au titre des appels provisionnels de charges 2016, 2017 et 2018 devenus sans cause, faute de communication des avis récapitulatifs annuels de charges,
- confirmer pour le surplus le jugement dans l'ensemble de ses dispositions,
A titre subsidiaire, si par impossible la cour de céans venait à considérer que les loyers échus au titre des mois de mars et avril 2020 sont dus,
- prononcer un délai de règlement de 6 mois à son bénéfice pour s'acquitter de la somme de 2 539,46 euros en six mensualités égales, payables le 1er de chaque mois en sus du règlement des loyers et charges courantes, avec une prise d'effet dudit échéancier le 1er du mois suivant celui de l'arrêt d'appel à intervenir,
En tout état de cause et y ajoutant,
- condamner solidairement les époux [W] à lui payer une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de la présente procédure d'appel.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 juin 2025.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Les parties ne discutent pas des dispositions du jugement entrepris relatives à la nullité du commandement de payer délivré le 18 janvier 2018 ni ses conséquences. Le jugement sera confirmé sur ces points.
- Sur le paiement des loyers de mars et avril 2020
Les époux [W] sollicitent de voir réformer le jugement entrepris qui les a déboutés de leur demande de règlement des loyers de mars et avril 2020, soit la somme de 2 539,46 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure, en retenant qu'ils avaient manqué à leur obligation de délivrance. Ils font valoir que cette décision est contraire à la jurisprudence de la Cour de cassation qui, par plusieurs arrêts du 30 juin 2022, a retenu que les locataires ne pouvaient invoquer un manquement à une obligation de délivrance pendant la période de pandémie et que les bailleurs étaient parfaitement en droit de recouvrer l'ensemble des loyers échus pendant cette période, y compris pour les commerces concernés pendant les périodes de fermeture imposées par les pouvoirs publics.
Ils contestent être de mauvaise foi et rappellent que c'est la société C Permis qui leur a adressé un courrier recommandé le 28 avril 2020 pour leur indiquer unilatéralement qu'ils n'étaient plus en mesure d'assurer leur obligation de délivrance d'un local et que cela entraînait de fait la suspension du contrat de bail, et ce alors même que la société C Permis ne se trouvait pas dans l'impossibilité de disposer du bien loué.
Ils demandent de débouter la société C Permis de sa demande de délais de paiement en ce qu'elle a bénéficié des plus amples délais pour s'acquitter du règlement des loyers restant dus.
En réponse, la société C Permis rappelle que sur la période du 17 mars au 18 mai 2020, les auto-écoles ont été contraintes d'interrompre totalement leur activité de formation et affirme que durant cette période, l'obligation de délivrance, dont sont débiteurs les bailleurs, n'a pas été exécutée de sorte que le jugement entrepris les a justement déboutés de leur demande de paiement des loyers de mars et avril 2020.
Elle considère que la jurisprudence de la Cour de cassation invoquée par les époux [W] ne saurait conduire à une infirmation du jugement déféré au motif qu'ils n'ont pas respecté leur devoir de bonne foi prévue par les dispositions de l'article 1104 du code civil et imposé par la Cour de cassation pour faire droit à la demande de paiement des bailleurs. Elle expose avoir sollicité le soutien de son bailleur par LRAR du 28 avril 2020 pour envisager une renégociation du bail ou des mesures de report ou d'échelonnement et elle reproche aux époux [W] de ne pas avoir donné suite à sa demande et d'avoir réclamé avec fermeté le règlement des loyers de mars et avril 2020 au plus tard au 1er juin 2020.
La société C Permis demande la confirmation du jugement entrepris qui a débouté les époux [W] de leur demande de paiement des loyers de mars et avril 2020.
A titre subsidiaire, elle sollicite des délais de paiement sur le fondement de l'article 1343-5 du code civil pendant une durée de 6 mois pour s'acquitter de la somme de 2 539,46 euros en 6 mensualités payables le 1er de chaque mois en sus du règlement des loyers et charges courantes avec prise d'effet le 1er du mois suivant celui de l'arrêt à intervenir.
Il résulte de la lecture combinée des articles 1103 et 1104 du code civil que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi aux parties, lesquelles doivent l'exécuter de bonne foi.
Aux termes de l'article 1728 du même code, le preneur à bail est tenu de deux obligations principales dont celle de payer le prix du bail aux termes convenus.
Le bailleur est pour sa part, au regard des dispositions de l'article 1719, tenu, notamment, de délivrer au preneur la chose louée et de lui en garantir la jouissance paisible pendant la durée du bail.
L'article 1219 prévoit qu'une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre partie n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.
Il est constant que l'impossibilité pour le preneur d'exploiter les locaux loués selon leur destination contractuelle pendant la période de pandémie ne constitue pas un manquement du bailleur à son obligation de délivrance prévue à l'article 1719 du code civil. L'impossibilité d'exploiter suite à l'interdiction faite par les pouvoirs publics n'est pas imputable aux bailleurs en ce qu'elle ne résulte ni de leur fait, ni de leur volonté mais s'est imposée à eux et en ce que les bailleurs ne pouvaient par aucun acte positif y mettre un terme ou en limiter les effets. De plus, en l'absence de stipulations contractuelles, comme en l'espèce, les bailleurs ne sont pas tenus de garantir la commercialité des locaux.
S'agissant de la mauvaise foi des bailleurs invoquée par le preneur devant la cour, il sera simplement ajouté que la locataire s'est autorisée à suspendre unilatéralement le paiement des loyers sans jamais justifier sérieusement de la réalité de sa situation comptable et financière. En effet, la société C Permis s'est contentée d'adresser une LRAR aux bailleurs le 28 avril 2020 à laquelle ceux-ci lui ont répondu, par courrier du 22 mai 2020, qu'elle pouvait bénéficier d'une mesure de suspension de pénalités financières et intérêts de retard et qu'ils n'envisageaient nullement d'appliquer une quelconque pénalité ou de faire jouer la clause résolutoire de sorte que les bailleurs ont pris en considération les circonstances exceptionnelles de la pandémie.
Dès lors, il ne saurait être fait grief aux bailleurs d'avoir manqué à leur obligation de bonne foi dans l'exécution du contrat.
Le preneur n'est donc pas fondé à se prévaloir de l'exception d'inexécution visée à l'article 1219 du code civil de son obligation de payer le loyer. Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a dit que le preneur était bien fondé à opposer pour la période de mars et avril 2020 une exception d'inexécution en raison du manquement par les bailleurs à leur obligation de délivrance et en a déduit que les 2 mois de loyers échus pour cette période n'étaient pas dus.
La société C Permis sera donc condamnée à payer aux époux [W] la somme de 2 539,46 euros, dont le montant n'est pas contesté, au titre des loyers dus pour les mois de mars et avril 2020. Il sera également fait droit à la demande des bailleurs relative aux intérêts au taux légal à compter du 23 juin 2020, date de la mise en demeure.
S'agissant de la demande de délais de paiement sollicitée par la société C Permis, l'article 1343-5 du code civil dispose que le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
La cour relève que la société C Permis ne produit strictement aucune pièce à l'appui de sa demande de délais de paiement et notamment aucune pièce sur sa situation financière ou de nature à corroborer son affirmation selon laquelle le fait de décaisser les sommes dues serait susceptible de déstabiliser au moins temporairement l'équilibre entre les encaissements et décaissements réalisés par elle.
Dans ces conditions, la société C Permis sera déboutée de sa demande de délais de paiement.
- Sur les sommes dues au titre des charges locatives
La société C Permis sollicite la réformation du jugement qui l'a condamnée à payer aux bailleurs la somme de 722,62 euros au titre des charges 2016 et 3,29 euros pour les charges des années 2017 et 2018 et demande à la cour de condamner les bailleurs au paiement de la somme de 3 140,19 euros correspondant aux appels provisionnels de charges 2016, 2017 et 2018 qui seraient devenus sans cause, faute de communication des avis récapitulatifs annuels de charges et ce conformément à l'article 8 du bail. Elle reproche aux époux [W] de communiquer un bordereau récapitulatif de régularisation des charges afférentes uniquement aux années 2019 et 2020 et non celles afférents aux années 2016, 2017 et 2018.
Les époux [W] demandent de débouter la société C Permis de son appel incident et de confirmer le jugement entrepris qui a condamné la locataire à leur payer la somme de 1 860,11 euros au titre des charges dues pour la période de 2016 à 2020. Ils soutiennent qu'ils ont produit l'ensemble des pièces justificatives des charges dues et notamment l'ensemble des avis d'imposition et taxes foncières dont les premiers juges ont justement retenu que 40% du montant de la taxe foncière était due par la société C Permis conformément à l'article 2 du bail.
Aux termes des dispositions de l'article 1103 du code civil, les contrats légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont été faits.
L'article 8 du bail conclu le 28 août 2014 stipule en son article 8 'impôts, taxes, redevances, charges' :
'2°/ En sus du loyer ci-après fixé, le PRENEUR remboursera au BAILLEUR même à titre provisionnel en même temps que chaque terme du loyer :
- les charges lui incombant en contrepartie des services rendus liés à l'usage des différents éléments de la chose louée,
- les dépenses d'entretien courant et les menues réparations sur les éléments d'usage commun de la chose louée,
- les taxes municipales afférentes au BIEN loué (taxe d'enlèvement des ordures ménagères, taxe de balayage) et autres taxes de toute nature payables en contrepartie dont le PRENEUR profite directement, qui existante à ce jour et qui pourraient être crées ultérieurement,
- les charges locatives qui pourront faire l'objet d'une provision payable dans les mêmes conditions que le loyer,
- les taxes locatives qui auraient été payées pour son compte,
- la taxe foncière afférente au BIEN loué, soit 40% du montant total de la taxe foncière afférente au bâtiment dont dépend ledit BIEN compte tenu de la surface sur local objet des présentes.
Pour l'année en cours, les parties conviennent d'une répartition prorata temporis.
L'ensemble de ces charges fera l'objet d'une régularisation annuelle, le BAILLEUR s'engageant à produire à cette occasion toutes pièces justificatives.
3°/ Le PRENEUR acquittera en outre, directement, toutes consommations personnelles pouvant résulter d'abonnements individuels de manière que le BAILLEUR ne soit jamais inquiété à ce sujet'.
Ledit article rappelle l'obligation d'établissement d'un inventaire des charges locatives et impôts et de l'obligation, à compter du premier renouvellement du bail objet des présentes, de respecter les dispositions de l'article L.145-40-2 alinéa 1 du code de commerce.
Il résulte de l'article 8 2°/ du bail précité que le montant de 40% de la taxe foncière est à la charge du preneur. Les bailleurs produisent les avis d'imposition de 2016 à 2020 de sorte que le jugement a justement considéré que la part de la taxe foncière due par la société C Permis était de :
- 1 243,20 euros pour l'année 2016,
- 1 218 euros pour l'année 2017,
- 1 197,80 euros pour l'année 2018,
- 1 168,40 euros pour l'année 2019,
- 1 144 euros pour l'année 2020.
S'agissant des charges pour l'année 2016, le jugement a justement retenu que seules étaient dus :
- la facture d'eau de 31,07 euros que la société C Permis avait accepté de payer, et qu'elle ne conteste pas devant la cour,
- la part de taxe foncière de la locataire (1 243,20 euros),
les autres charges ayant été écartées par le jugement et cette disposition n'étant pas remise en cause par les bailleurs, ce qui représentait une somme encore due par la locataire, après les versements déjà effectués, de 722,62 euros. Ce calcul, comme ceux des années suivantes, n'est pas discuté par les parties.
S'agissant des charges pour l'année 2017 et 2018, le jugement a déduit, à bon droit, les charges d'électricité indûment réglées par la locataire, ce qui n'est pas contesté par les bailleurs. Il a également justement retenu le montant de la taxe foncière due par le locataire outre les factures d'eau dont les bailleurs ont justifié de sorte que la somme restant due par la locataire est de 3,29 euros.
S'agissant des charges pour l'année 2019, le jugement a déduit, à nouveau à bon droit, les charges d'électricité indûment réglées par la locataire, ce qui n'est pas contesté par les bailleurs. Il a justement retenu le montant de la taxe foncière due par le locataire outre la facture d'eau dont les bailleurs ont également justifié, ce qui représente une somme due par la locataire de 589,61 euros.
S'agissant des charges pour l'année 2020, le jugement a déduit, à nouveau à bon droit, les charges d'électricité indûment réglées par la locataire, ce qui n'est pas contesté par les bailleurs. Il a justement retenu le montant de la taxe foncière due par le locataire outre la facture d'eau dont les bailleurs ont également justifié, ce qui représente une somme due par la locataire de 544,59 euros.
Le jugement entrepris, qui a condamné la société C Permis à payer la somme de 1 860,11 euros aux époux [W] au titre de l'intégralité des charges dues y compris le montant des taxes foncières pour les années 2016 à 2020, sera confirmé.
- Sur les frais irrépétibles et les dépens
Succombante, la société C Permis sera condamnée à verser la somme de
2 000 euros aux époux [W] au titre des frais irrépétibles d'appel et aux entiers dépens de première instance et d'appel. Les dispositions du jugement entrepris relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront infirmées et la société C Permis sera déboutée de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition au greffe,
Statuant dans les limites de l'appel,
Confirme le jugement en ce qu'il a :
- jugé nul et de nul effet le commandement de payer visant la clause résolutoire en date du 18 janvier 2018 et dit qu'il n'y a pas lieu de constater l'acquisition de la clause résolutoire de ce commandement de payer et de prononcer une quelconque expulsion ;
- condamné la société C Permis à payer à Mme [L] [B] épouse [W] et à M. [H] [W], en derniers ou quittance, la somme de 1 860,11 euros au titre de l'intégralité des charges encore dues par ces derniers pour la période 2016 à 2020, soit 722,62 euros pour l'année 2016, 3,29 euros pour les années 2017 et 2018, 589,61 euros pour l'année 2019 et 544,59 euros pour l'année 2020 ;
L'infirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau,
Déboute la société C Permis de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
Condamne la société C Permis à payer à Mme [L] [B] épouse [W] et à M. [H] [W] la somme de 2 539,46 euros au titre des deux mois de loyer dus pour les mois de mars et avril 2020, outre les intérêts au taux légal à compter du 23 juin 2020, date de la mise en demeure ;
Condamne la société C Permis à payer à Mme [L] [B] épouse [W] et à M. [H] [W] la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;
Condamne la société C Permis aux dépens de première instance et en cause d'appel.
Le greffier, La présidente,
ARRÊT N°-201
N° RG 22/04703 - N° Portalis DBVL-V-B7G-S7KV
(Réf 1ère instance : 18/01018)
M. [H] [C] [D] [W]
Mme [L] [I] [M] [B] épouse [W]
C/
S.A.R.L. C PERMIS
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 08 OCTOBRE 2025
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Virginie PARENT, Présidente,
Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,
Assesseur : Madame Marie-France DAUPS, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 02 Juillet 2025
devant Madame Virginie PARENT et Madame Virginie HAUET, magistrats rapporteurs, tenant seules l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui ont rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 08 Octobre 2025 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTS :
Monsieur [H] [C] [D] [W]
né le 13 Décembre 1977 à [Localité 4] (44)
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Joachim D'AUDIFFRET de la SCP ACTA JURIS SCP D'AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES
Madame [L] [I] [M] [B] épouse [W]
née le 11 Juillet 1979 à [Localité 4] (44)
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Joachim D'AUDIFFRET de la SCP ACTA JURIS SCP D'AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES
INTIMÉE :
S.A.R.L. C PERMIS immatriculée sous le numéro 811 989 805 du registre du commerce et des sociétés de NANTES, agissant poursuite et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Stéphanie PRENEUX de la SELARL BAZILLE, TESSIER, PRENEUX, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Camille MANDEVILLE de la SELARL GUEGUEN AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de NANTES
Le 27 août 2014, M. [H] [W] et Mme [L] [B] épouse [W], ont acquis auprès de M. [N] [Y], un local commercial au rez-de-chaussée d'un immeuble, avec accès voiture, accès piéton et un parking de cinq places, le tout sis [Adresse 2] à [Localité 4].
Par acte du 28 août 2014, les époux [W] ont donné à bail à M. [N] [Y], exploitant de l'entreprise individuelle C Permis, ledit local commercial.
M. [N] [Y] a cédé son fonds de commerce d'auto-école le 15 juin 2015 à la société C Permis.
L'intégralité des loyers et charges de l'année 2015 a été réglée par le nouveau locataire, ainsi que les loyers de 2016.
Les charges locatives de 2016 ont fait l'objet d'un conflit entre les parties.
Par courriel des 20 et 21 septembre 2017, les époux [W] ont sollicité le paiement de ces charges pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2016, à hauteur de 1 785,87 euros auprès de la société C Permis.
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 12 novembre 2017, les époux [W] ont mis la société C Permis en demeure de régler cette même somme, en visant la clause résolutoire figurant dans le contrat de bail.
Le même jour, ils ont envoyé un second courrier recommandé avec accusé de réception à la société C Permis afin d'officialiser les discussions relatives à la mise en place de compteurs électriques divisionnaires dans tous les locaux loués, notamment au regard des frais à supporter par l'ensemble des parties, et de l'interruption de l'activité que cela engendrerait pour le commerce.
Le 18 janvier 2018, les époux [W] ont fait délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire à la société C Permis aux fins de règlement des charges de l'année 2016.
Par acte du 15 février 2018, la société C Permis a fait assigner les époux [W] devant le tribunal judiciaire de Nantes.
Par jugement en date du 19 mai 2022, le tribunal judiciaire de Nantes a :
- jugé nul et de nul effet le commandement de payer visant la clause résolutoire en date du 18 janvier 2018 et dit qu'il n'y a pas lieu de constater l'acquisition de la clause résolutoire de ce commandement de payer et de prononcer une quelconque expulsion,
- condamné la société C Permis à payer aux époux [W], en derniers ou quittance, la somme de 1 860,11 euros au titre de l'intégralité des charges encore dues par ces derniers pour la période 2016 à 2020, soit 722,62 euros pour l'année 2016, 3,29 euros pour les années 2017 et 2018, 589,61 euros pour l'année 2019 et 544,59 euros pour l'année 2020,
- débouté les parties de toutes leurs autres demandes, plus amples ou contraires,
- condamné solidairement les époux [W] à payer à la société C Permis une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de l'instance, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement en toutes ses dispositions.
Le 22 juillet 2022, les époux [W] ont interjeté appel de cette décision et aux termes de leurs dernières écritures notifiées le 14 mars 2023, ils demandent à la cour de :
- réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nantes en date du 19 mai 2022 en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes de condamnation de la société C Permis à leur assurer le règlement de la somme de 2 539,46 euros au titre des loyers dus pour la période des mois de mars et avril 2020, et les a condamnés à verser à la société C Permis une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance,
- débouter la société C Permis de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Statuant à nouveau sur l'ensemble de ces points :
- condamner la société C Permis à leur payer la somme de 2 539,46 euros au titre des deux mois de loyer dus pour les mois de mars et avril 2020, outre les intérêts au taux légal à compter du 23 juin 2020, date de la mise en demeure,
- débouter la société C Permis de sa demande présentée en première instance au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens vis-à-vis d'eux,
- débouter la société C Permis de l'ensemble de ses demandes, plus amples ou contraires présentées à hauteur d'appel,
- condamner la société C Permis à leur payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel,
- condamner la société C Permis aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Par dernières conclusions notifiées le 16 janvier 2023, la société C Permis demande à la cour de :
- la dire tant recevable que bien fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
En conséquence,
- débouter les époux [W] de leur appel visant à réformer le jugement du tribunal judiciaire de Nantes en date du 19 mai 2022, en ce qu'il a :
* débouté les consorts [W] de leurs demandes de sa condamnation à leur assurer le règlement de la somme de 2 539,46 euros au titre de loyers dus pour la période des mois de mars et avril 2020,
* condamné les consorts [W] à lui verser une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,
- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Nantes en date du 19 mai 2022, en ce qu'il a :
* débouté les consorts [W] de leurs demandes de condamnation à leur assurer le règlement de la somme de 2 539,46 euros au titre de loyers dus pour la période des mois de mars et avril 2020,
* condamné les consorts [W] à lui verser une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,
- réformer le jugement du tribunal judiciaire de Nantes du 19 mai 2022 en ce qu'il l'a condamnée à payer aux époux [W], en deniers ou quittance, la somme de 722,62 euros pour l'année 2016 et 3,29 euros pour les années 2017 et 2018,
- condamner solidairement les époux [W] à lui payer une somme de 725,91 euros au titre du remboursement des sommes acquittées indûment par cette dernière dans le cadre de l'exécution provisoire du jugement de première instance,
- condamner solidairement les époux [W] à lui payer une somme de
3 140,19 euros, au titre des appels provisionnels de charges 2016, 2017 et 2018 devenus sans cause, faute de communication des avis récapitulatifs annuels de charges,
- confirmer pour le surplus le jugement dans l'ensemble de ses dispositions,
A titre subsidiaire, si par impossible la cour de céans venait à considérer que les loyers échus au titre des mois de mars et avril 2020 sont dus,
- prononcer un délai de règlement de 6 mois à son bénéfice pour s'acquitter de la somme de 2 539,46 euros en six mensualités égales, payables le 1er de chaque mois en sus du règlement des loyers et charges courantes, avec une prise d'effet dudit échéancier le 1er du mois suivant celui de l'arrêt d'appel à intervenir,
En tout état de cause et y ajoutant,
- condamner solidairement les époux [W] à lui payer une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de la présente procédure d'appel.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 juin 2025.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Les parties ne discutent pas des dispositions du jugement entrepris relatives à la nullité du commandement de payer délivré le 18 janvier 2018 ni ses conséquences. Le jugement sera confirmé sur ces points.
- Sur le paiement des loyers de mars et avril 2020
Les époux [W] sollicitent de voir réformer le jugement entrepris qui les a déboutés de leur demande de règlement des loyers de mars et avril 2020, soit la somme de 2 539,46 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure, en retenant qu'ils avaient manqué à leur obligation de délivrance. Ils font valoir que cette décision est contraire à la jurisprudence de la Cour de cassation qui, par plusieurs arrêts du 30 juin 2022, a retenu que les locataires ne pouvaient invoquer un manquement à une obligation de délivrance pendant la période de pandémie et que les bailleurs étaient parfaitement en droit de recouvrer l'ensemble des loyers échus pendant cette période, y compris pour les commerces concernés pendant les périodes de fermeture imposées par les pouvoirs publics.
Ils contestent être de mauvaise foi et rappellent que c'est la société C Permis qui leur a adressé un courrier recommandé le 28 avril 2020 pour leur indiquer unilatéralement qu'ils n'étaient plus en mesure d'assurer leur obligation de délivrance d'un local et que cela entraînait de fait la suspension du contrat de bail, et ce alors même que la société C Permis ne se trouvait pas dans l'impossibilité de disposer du bien loué.
Ils demandent de débouter la société C Permis de sa demande de délais de paiement en ce qu'elle a bénéficié des plus amples délais pour s'acquitter du règlement des loyers restant dus.
En réponse, la société C Permis rappelle que sur la période du 17 mars au 18 mai 2020, les auto-écoles ont été contraintes d'interrompre totalement leur activité de formation et affirme que durant cette période, l'obligation de délivrance, dont sont débiteurs les bailleurs, n'a pas été exécutée de sorte que le jugement entrepris les a justement déboutés de leur demande de paiement des loyers de mars et avril 2020.
Elle considère que la jurisprudence de la Cour de cassation invoquée par les époux [W] ne saurait conduire à une infirmation du jugement déféré au motif qu'ils n'ont pas respecté leur devoir de bonne foi prévue par les dispositions de l'article 1104 du code civil et imposé par la Cour de cassation pour faire droit à la demande de paiement des bailleurs. Elle expose avoir sollicité le soutien de son bailleur par LRAR du 28 avril 2020 pour envisager une renégociation du bail ou des mesures de report ou d'échelonnement et elle reproche aux époux [W] de ne pas avoir donné suite à sa demande et d'avoir réclamé avec fermeté le règlement des loyers de mars et avril 2020 au plus tard au 1er juin 2020.
La société C Permis demande la confirmation du jugement entrepris qui a débouté les époux [W] de leur demande de paiement des loyers de mars et avril 2020.
A titre subsidiaire, elle sollicite des délais de paiement sur le fondement de l'article 1343-5 du code civil pendant une durée de 6 mois pour s'acquitter de la somme de 2 539,46 euros en 6 mensualités payables le 1er de chaque mois en sus du règlement des loyers et charges courantes avec prise d'effet le 1er du mois suivant celui de l'arrêt à intervenir.
Il résulte de la lecture combinée des articles 1103 et 1104 du code civil que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi aux parties, lesquelles doivent l'exécuter de bonne foi.
Aux termes de l'article 1728 du même code, le preneur à bail est tenu de deux obligations principales dont celle de payer le prix du bail aux termes convenus.
Le bailleur est pour sa part, au regard des dispositions de l'article 1719, tenu, notamment, de délivrer au preneur la chose louée et de lui en garantir la jouissance paisible pendant la durée du bail.
L'article 1219 prévoit qu'une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre partie n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.
Il est constant que l'impossibilité pour le preneur d'exploiter les locaux loués selon leur destination contractuelle pendant la période de pandémie ne constitue pas un manquement du bailleur à son obligation de délivrance prévue à l'article 1719 du code civil. L'impossibilité d'exploiter suite à l'interdiction faite par les pouvoirs publics n'est pas imputable aux bailleurs en ce qu'elle ne résulte ni de leur fait, ni de leur volonté mais s'est imposée à eux et en ce que les bailleurs ne pouvaient par aucun acte positif y mettre un terme ou en limiter les effets. De plus, en l'absence de stipulations contractuelles, comme en l'espèce, les bailleurs ne sont pas tenus de garantir la commercialité des locaux.
S'agissant de la mauvaise foi des bailleurs invoquée par le preneur devant la cour, il sera simplement ajouté que la locataire s'est autorisée à suspendre unilatéralement le paiement des loyers sans jamais justifier sérieusement de la réalité de sa situation comptable et financière. En effet, la société C Permis s'est contentée d'adresser une LRAR aux bailleurs le 28 avril 2020 à laquelle ceux-ci lui ont répondu, par courrier du 22 mai 2020, qu'elle pouvait bénéficier d'une mesure de suspension de pénalités financières et intérêts de retard et qu'ils n'envisageaient nullement d'appliquer une quelconque pénalité ou de faire jouer la clause résolutoire de sorte que les bailleurs ont pris en considération les circonstances exceptionnelles de la pandémie.
Dès lors, il ne saurait être fait grief aux bailleurs d'avoir manqué à leur obligation de bonne foi dans l'exécution du contrat.
Le preneur n'est donc pas fondé à se prévaloir de l'exception d'inexécution visée à l'article 1219 du code civil de son obligation de payer le loyer. Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a dit que le preneur était bien fondé à opposer pour la période de mars et avril 2020 une exception d'inexécution en raison du manquement par les bailleurs à leur obligation de délivrance et en a déduit que les 2 mois de loyers échus pour cette période n'étaient pas dus.
La société C Permis sera donc condamnée à payer aux époux [W] la somme de 2 539,46 euros, dont le montant n'est pas contesté, au titre des loyers dus pour les mois de mars et avril 2020. Il sera également fait droit à la demande des bailleurs relative aux intérêts au taux légal à compter du 23 juin 2020, date de la mise en demeure.
S'agissant de la demande de délais de paiement sollicitée par la société C Permis, l'article 1343-5 du code civil dispose que le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
La cour relève que la société C Permis ne produit strictement aucune pièce à l'appui de sa demande de délais de paiement et notamment aucune pièce sur sa situation financière ou de nature à corroborer son affirmation selon laquelle le fait de décaisser les sommes dues serait susceptible de déstabiliser au moins temporairement l'équilibre entre les encaissements et décaissements réalisés par elle.
Dans ces conditions, la société C Permis sera déboutée de sa demande de délais de paiement.
- Sur les sommes dues au titre des charges locatives
La société C Permis sollicite la réformation du jugement qui l'a condamnée à payer aux bailleurs la somme de 722,62 euros au titre des charges 2016 et 3,29 euros pour les charges des années 2017 et 2018 et demande à la cour de condamner les bailleurs au paiement de la somme de 3 140,19 euros correspondant aux appels provisionnels de charges 2016, 2017 et 2018 qui seraient devenus sans cause, faute de communication des avis récapitulatifs annuels de charges et ce conformément à l'article 8 du bail. Elle reproche aux époux [W] de communiquer un bordereau récapitulatif de régularisation des charges afférentes uniquement aux années 2019 et 2020 et non celles afférents aux années 2016, 2017 et 2018.
Les époux [W] demandent de débouter la société C Permis de son appel incident et de confirmer le jugement entrepris qui a condamné la locataire à leur payer la somme de 1 860,11 euros au titre des charges dues pour la période de 2016 à 2020. Ils soutiennent qu'ils ont produit l'ensemble des pièces justificatives des charges dues et notamment l'ensemble des avis d'imposition et taxes foncières dont les premiers juges ont justement retenu que 40% du montant de la taxe foncière était due par la société C Permis conformément à l'article 2 du bail.
Aux termes des dispositions de l'article 1103 du code civil, les contrats légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont été faits.
L'article 8 du bail conclu le 28 août 2014 stipule en son article 8 'impôts, taxes, redevances, charges' :
'2°/ En sus du loyer ci-après fixé, le PRENEUR remboursera au BAILLEUR même à titre provisionnel en même temps que chaque terme du loyer :
- les charges lui incombant en contrepartie des services rendus liés à l'usage des différents éléments de la chose louée,
- les dépenses d'entretien courant et les menues réparations sur les éléments d'usage commun de la chose louée,
- les taxes municipales afférentes au BIEN loué (taxe d'enlèvement des ordures ménagères, taxe de balayage) et autres taxes de toute nature payables en contrepartie dont le PRENEUR profite directement, qui existante à ce jour et qui pourraient être crées ultérieurement,
- les charges locatives qui pourront faire l'objet d'une provision payable dans les mêmes conditions que le loyer,
- les taxes locatives qui auraient été payées pour son compte,
- la taxe foncière afférente au BIEN loué, soit 40% du montant total de la taxe foncière afférente au bâtiment dont dépend ledit BIEN compte tenu de la surface sur local objet des présentes.
Pour l'année en cours, les parties conviennent d'une répartition prorata temporis.
L'ensemble de ces charges fera l'objet d'une régularisation annuelle, le BAILLEUR s'engageant à produire à cette occasion toutes pièces justificatives.
3°/ Le PRENEUR acquittera en outre, directement, toutes consommations personnelles pouvant résulter d'abonnements individuels de manière que le BAILLEUR ne soit jamais inquiété à ce sujet'.
Ledit article rappelle l'obligation d'établissement d'un inventaire des charges locatives et impôts et de l'obligation, à compter du premier renouvellement du bail objet des présentes, de respecter les dispositions de l'article L.145-40-2 alinéa 1 du code de commerce.
Il résulte de l'article 8 2°/ du bail précité que le montant de 40% de la taxe foncière est à la charge du preneur. Les bailleurs produisent les avis d'imposition de 2016 à 2020 de sorte que le jugement a justement considéré que la part de la taxe foncière due par la société C Permis était de :
- 1 243,20 euros pour l'année 2016,
- 1 218 euros pour l'année 2017,
- 1 197,80 euros pour l'année 2018,
- 1 168,40 euros pour l'année 2019,
- 1 144 euros pour l'année 2020.
S'agissant des charges pour l'année 2016, le jugement a justement retenu que seules étaient dus :
- la facture d'eau de 31,07 euros que la société C Permis avait accepté de payer, et qu'elle ne conteste pas devant la cour,
- la part de taxe foncière de la locataire (1 243,20 euros),
les autres charges ayant été écartées par le jugement et cette disposition n'étant pas remise en cause par les bailleurs, ce qui représentait une somme encore due par la locataire, après les versements déjà effectués, de 722,62 euros. Ce calcul, comme ceux des années suivantes, n'est pas discuté par les parties.
S'agissant des charges pour l'année 2017 et 2018, le jugement a déduit, à bon droit, les charges d'électricité indûment réglées par la locataire, ce qui n'est pas contesté par les bailleurs. Il a également justement retenu le montant de la taxe foncière due par le locataire outre les factures d'eau dont les bailleurs ont justifié de sorte que la somme restant due par la locataire est de 3,29 euros.
S'agissant des charges pour l'année 2019, le jugement a déduit, à nouveau à bon droit, les charges d'électricité indûment réglées par la locataire, ce qui n'est pas contesté par les bailleurs. Il a justement retenu le montant de la taxe foncière due par le locataire outre la facture d'eau dont les bailleurs ont également justifié, ce qui représente une somme due par la locataire de 589,61 euros.
S'agissant des charges pour l'année 2020, le jugement a déduit, à nouveau à bon droit, les charges d'électricité indûment réglées par la locataire, ce qui n'est pas contesté par les bailleurs. Il a justement retenu le montant de la taxe foncière due par le locataire outre la facture d'eau dont les bailleurs ont également justifié, ce qui représente une somme due par la locataire de 544,59 euros.
Le jugement entrepris, qui a condamné la société C Permis à payer la somme de 1 860,11 euros aux époux [W] au titre de l'intégralité des charges dues y compris le montant des taxes foncières pour les années 2016 à 2020, sera confirmé.
- Sur les frais irrépétibles et les dépens
Succombante, la société C Permis sera condamnée à verser la somme de
2 000 euros aux époux [W] au titre des frais irrépétibles d'appel et aux entiers dépens de première instance et d'appel. Les dispositions du jugement entrepris relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront infirmées et la société C Permis sera déboutée de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition au greffe,
Statuant dans les limites de l'appel,
Confirme le jugement en ce qu'il a :
- jugé nul et de nul effet le commandement de payer visant la clause résolutoire en date du 18 janvier 2018 et dit qu'il n'y a pas lieu de constater l'acquisition de la clause résolutoire de ce commandement de payer et de prononcer une quelconque expulsion ;
- condamné la société C Permis à payer à Mme [L] [B] épouse [W] et à M. [H] [W], en derniers ou quittance, la somme de 1 860,11 euros au titre de l'intégralité des charges encore dues par ces derniers pour la période 2016 à 2020, soit 722,62 euros pour l'année 2016, 3,29 euros pour les années 2017 et 2018, 589,61 euros pour l'année 2019 et 544,59 euros pour l'année 2020 ;
L'infirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau,
Déboute la société C Permis de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
Condamne la société C Permis à payer à Mme [L] [B] épouse [W] et à M. [H] [W] la somme de 2 539,46 euros au titre des deux mois de loyer dus pour les mois de mars et avril 2020, outre les intérêts au taux légal à compter du 23 juin 2020, date de la mise en demeure ;
Condamne la société C Permis à payer à Mme [L] [B] épouse [W] et à M. [H] [W] la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;
Condamne la société C Permis aux dépens de première instance et en cause d'appel.
Le greffier, La présidente,