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Décisions

CA Angers, ch. prud'homale, 25 septembre 2025, n° 22/00582

ANGERS

Arrêt

Autre

CA Angers n° 22/00582

25 septembre 2025

COUR D'APPEL

d'[Localité 53]

Chambre Sociale

ARRÊT N°

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/00582 - N° Portalis DBVP-V-B7G-FCL2.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 05 Octobre 2022, enregistrée sous le n° 21/00340

ARRÊT DU 25 Septembre 2025

APPELANTS :

Madame [PP] [Y]

[Adresse 49]

[Localité 41]

Monsieur [V] [S]

[Adresse 6]

[Localité 40]

Monsieur [U] [D]

[Adresse 7]

[Localité 34]

Madame [PV] [Z]

[Adresse 54]

[Localité 36]

Monsieur [O] [H]

[Adresse 3]

[Localité 32]

Monsieur [DT] [X]

[Adresse 59]

[Localité 44]

Monsieur [DT] [F]

[Adresse 48]

[Localité 44]

Madame [CN] [CY]

[Adresse 2]

[Localité 19]

Monsieur [TA] [P]

[Adresse 4]

[Localité 27]

Monsieur [N] [A]

[Adresse 13]

[Localité 40]

Monsieur [FD] [I]

[Adresse 1]

[Localité 29]

Monsieur [G] [W]

[Adresse 17]

[Localité 31]

Madame [TF] [K]

[Adresse 16]

[Localité 37]

Monsieur [RP] [C]

[Adresse 10]

[Localité 42]

Monsieur [M] [B]

[Adresse 5]

[Localité 33]

Monsieur [DN] [DI]

[Adresse 24]

[Localité 27]

Monsieur [L] [RA]

[Adresse 23]

[Localité 30]

Monsieur [PK] [SA]

[Adresse 56]

[Localité 28]

Monsieur [DN] [RV]

[Adresse 20]

[Localité 35]

Monsieur [J] [RF]

[Adresse 22]

[Localité 46]

Monsieur [ET] [CT]

[Adresse 21]

[Localité 39]

Madame [DD] [SK]

[Adresse 11]

[Localité 34]

Monsieur [OF] [BA]

[Adresse 8]

[Localité 26]

Monsieur [SV] [DY]

[Adresse 58]

[Localité 38]

Monsieur [EI] [EN]

[Adresse 18]

[Localité 45]

Monsieur [T] [UA]

[Adresse 15]

[Localité 25]

Monsieur [EY] [RK]

[Adresse 55]

[Localité 33]

Monsieur [ED] [SF]

[Adresse 57]

[Localité 43]

représentés par Me Fiodor RILOV de la SCP SCP RILOV, avocat au barreau de PARIS

INTIMES :

Maître [EY] [OP] es qualité de mandataire liquidateur de la Société MORY DUCROS

[Adresse 14]

[Localité 51]

représenté par Me Hubert MARTIN DE FREMONT de la SELAS SIMON ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS - N° du dossier 1700492

S.A.S. ARCOLE INDUSTRIES

[Adresse 12]

[Localité 47]

représentée par Maître DE WAILLY, avocat substituant Maître Marie-Alice JOURDE, avocat au barreau de PARIS

DÉLÉGATION UNÉDIC [Adresse 52] (CGEA) D'ILE DE FRANCE EST

[Adresse 9]

[Localité 50]

non comparante - non représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Juin 2025 à 9 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Claire TRIQUIGNEAUX-MAUGARS, conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Madame Clarisse PORTMANN

Conseiller : Mme Claire TRIQUIGNEAUX-MAUGARS

Conseiller : Madame Rose CHAMBEAUD

Greffier lors des débats : Madame Viviane BODIN

ARRÊT :

prononcé le 25 Septembre 2025, par arrêt réputé contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Claire TRIQUIGNEAUX-MAUGARS, conseiller pour le président empêché, et par Madame Viviane BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

EXPOSE DU LITIGE

La société Mory Ducros issue de la fusion intervenue le 31 décembre 2012 avec un effet rétroactif au 1er janvier 2012 de la société Ducros Express et de la Sas Mory, exploitait un fonds de commerce de transport, entreposage de marchandises, commissionnaire de transport et location de matériel. Elle disposait d'un réseau de 85 agences dont 14 plate-formes régionales et 6 plate-formes internationales et employait 5000 salariés.

La société holding Arcole Industries, spécialisée dans la reprise et le redressement d'entreprises dont l'exploitation est déficitaire, était actionnaire de la société Mory Ducros.

Par jugement du 26 novembre 2013, le tribunal de commerce de Pontoise a ouvert à l'égard de la société Mory Ducros une procédure de redressement judiciaire, désigné Me [R] et Me [E] en qualité d'administrateurs judiciaires et Me [OP] en qualité de mandataire judiciaire.

Par jugement du 6 février 2014, ce tribunal a prononcé la liquidation judiciaire de la société Mory Ducros, avec poursuite de son activité pendant trois mois, et arrêté le plan de cession de cette société au profit de la société Arcole industries avec une faculté de substitution au profit d'une société en cours de constitution. Me [R] et Me [E] ont été maintenus en qualité d'administrateurs judiciaires pour passer les actes nécessaires à la réalisation de la cession et finaliser le volet social. Me [OP] a été désigné en qualité de liquidateur.

Par décision du 3 mars 2014, l'unité territoriale du Val d'Oise de la DIRECCTE d'Ile de France a homologué le document unilatéral élaboré par les administrateurs judiciaires fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Mory Ducros.

Mme [PP] [Y], M. [V] [S], M. [U] [D], Mme [PV] [Z], M. [O] [H], M. [DT] [X], M. [DT] [F], Mme [CN] [CY], M. [TA] [P], M. [N] [A], M. [FD] [I], M. [G] [W], Mme [TF] [K], M. [RP] [C], M. [M] [B], M. [DN] [DI], M. [L] [RA], M. [PK] [SA], M. [DN] [RV], M. [J] [RF], M. [ET] [CT], Mme [DD] [SK], M. [OF] [BA], M. [SV] [DY], M. [EI] [EN], M. [T] [UA], M. [EY] [RK] et M. [ED] [SF] étaient salariés de la société Mory Ducros, leur ancienneté ayant été reprise à compter du :

- Mme [PP] [Y] : 6 juin 1994, celle-ci occupant en son dernier état le poste de chauffeur ;

- M. [V] [S] : 4 juillet 1977, celui-ci occupant en son dernier état le poste de manutentionnaire pointeur ;

- M. [U] [D] : 1er septembre 1987, celui-ci occupant en son dernier état le poste de chef de quai ;

- Mme [PV] [Z] : 11 avril 2001, celle-ci occupant en son dernier état le poste de chauffeur ;

- M. [O] [H] : 22 avril 2002, celui-ci occupant en son dernier état le poste de chauffeur livreur ;

- M. [DT] [X] : 20 mai 1986, celui-ci occupant en son dernier état le poste de conducteur livreur PL ;

- M. [DT] [F] : 1er mai 1980, celui-ci occupant en son dernier état le poste de conducteur livreur PL ;

- Mme [CN] [CY] : 1er juillet 1976, celle-ci occupant en son dernier état le poste d'opérateur de saisie ;

- M. [TA] [P] : 7 février 1997, celui-ci occupant en son dernier état le poste de chef de quai ;

- M. [N] [A] : 17 octobre 2000, celui-ci occupant en son dernier état le poste de chef de secteur ;

- M. [FD] [I] : 3 septembre 2003, celui-ci occupant en son dernier état le poste d'agent de quai ;

- M. [G] [W] : 1er septembre 1980, celui-ci occupant en son dernier état le poste d'affréteur ;

- Mme [TF] [K] : 23 septembre 1996, celle-ci occupant en son dernier état le poste de responsable des services généraux ;

- M. [RP] [C] : 14 janvier 1997, celui-ci occupant en son dernier état le poste de conducteur livreur PL ;

- M. [M] [B] : 13 janvier 1989, celui-ci occupant en son dernier état le poste de responsable camionnage ;

- M. [DN] [DI] : 18 décembre 2000, celui-ci occupant en son dernier état le poste de conducteur livreur PL ;

- M. [L] [RA] : 21 janvier 2008, celui-ci occupant en son dernier état le poste de chauffeur livreur ;

- M. [PK] [SA] : 15 octobre 2001, celui-ci occupant en son dernier état le poste de chauffeur ;

- M. [DN] [RV] : 26 décembre 1997, celui-ci occupant en son dernier état le poste de conducteur livreur PL ;

- M. [J] [RF] : 2 juin 1980, celui-ci occupant en son dernier état le poste de responsable arrivages ;

- M. [ET] [CT] : 1er décembre 2000, celui-ci occupant en son dernier état le poste de responsable affrètement ;

- Mme [DD] [SK] : 1er août 1992, celle-ci occupant en son dernier état le poste de responsable d'exploitation adjoint ;

- M. [OF] [BA] : 12 novembre 1998, celui-ci occupant en son dernier état le poste de chauffeur ;

- M. [SV] [DY] : 21 mars 1996, celui-ci occupant en son dernier état le poste de conducteur livreur PL / manutentionnaire ;

- M. [EI] [EN] : 1er septembre 1996, celui-ci occupant en son dernier état le poste de responsable d'exploitation ;

- M. [T] [UA] : 9 septembre 1997, celui-ci occupant en son dernier état le poste de chef de quai étoile ;

- M. [EY] [RK] : 16 juillet 2001, celui-ci occupant en son dernier état le poste de chauffeur ;

- M. [ED] [SF] : 3 janvier 1983, celui-ci occupant en son dernier état le poste de chef d'équipe.

Ils ont tous été licenciés pour motif économique par courrier du 13 mars 2014, et ont adhéré au contrat de sécurisation professionnelle (CSP). Les contrats de travail ont pris fin le 4 avril 2014.

Par jugement du 7 juillet 2014, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision d'homologation de la DIRECCTE. Ce jugement a été confirmé par arrêt du 22 octobre 2014 de la cour administrative d'appel de [Localité 60], au motif que le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements devait être apprécié au niveau de l'entreprise et non de chaque agence. Cet arrêt est devenu définitif par suite de l'arrêt du Conseil d'État du 7 décembre 2015 ayant rejeté le pourvoi formé à son encontre.

Le 12 décembre 2014, et 13 février 2015 s'agissant de M. [CT], 54 salariés dont les 28 salariés précités ont saisi le conseil de prud'hommes du Mans aux fins de se voir allouer chacun, suite à l'annulation de la décision d'homologation du 3 mars 2014, une indemnité sur le fondement de l'article L.1233-58 du code du travail, et voir fixer cette créance au passif de la société Mory Ducros.

Ils sollicitaient également que la société Arcole Industries soit reconnue en qualité de co-employeur et que cette dernière soit condamnée à leur payer une indemnité d'un même montant.

Ils soutenaient enfin que le liquidateur judiciaire avait manqué à l'obligation de reclassement individuel prévue par l'article L.1233-4 du code du travail, et sollicitait de ce chef une indemnité toujours d'un même montant.

Me [OP] ès-qualités, la société Arcole Industries et le CGEA-IDF EST se sont opposés à leurs demandes.

Par jugement du 5 octobre 2022 auquel la cour renvoie pour l'exposé des demandes initiales et de la procédure antérieure, le conseil de prud'hommes du Mans a:

- dit n'y avoir lieu à situation de co-emploi entre les sociétés Mory Ducros et Arcole Industries, et en conséquence a mis hors de cause la société Arcole Industries ;

- condamné Me [OP] ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Mory Ducros à verser aux demandeurs, au visa de l'article L.1233-58 du code du travail, en raison de l'annulation devenue définitive de la décision ayant procédé à la validation du document unilatéral, les sommes suivantes :

- Mme [PP] [Y] : 15 232,80 euros

- M. [V] [S] : 14 274,42 euros

- M. [U] [D] : 18 310,32 euros

- Mme [PV] [Z] : 13 302,24 euros

- M. [O] [H] : 12 717,90 euros

- M. [DT] [X] : 13 588,68 euros

- M. [DT] [F] : 14 083,26 euros

- Mme [CN] [CY] : 11 301,60 euros

- M. [TA] [P] : 14 247 euros

- M. [N] [A] : 16 958,82 euros

- M. [FD] [I] : 14 676,18 euros

- M. [G] [W] : 17 212,80 euros

- Mme [TF] [K] : 13 818,64 euros

- M. [RP] [C] : 13 636,62 euros

- M. [M] [B] : 17 252,04 euros

- M. [DN] [DI] : 12 886,68 euros

- M. [L] [RA] : 10 930,26 euros

- M. [PK] [SA] : 13 753,13 euros

- M. [DN] [RV] : 13 025,42 euros

- M. [J] [RF] : 12 952,56 euros

- M. [ET] [CT] : 19 477,16 euros

- Mme [DD] [SK] : 13 849,77 euros

- M. [OF] [BA] : 14 076,58 euros

- M. [SV] [DY] : 12 196,80 euros

- M. [EI] [EN] : 17 070,85 euros

- M. [T] [UA] : 13 007,23 euros

- M. [EY] [RK] : 11 897,86 euros

- M. [ED] [SF] : 12 595,37 euros

- condamné Me [OP] ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Mory Ducros à verser à chacun des demandeurs la somme de 250 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit que ces sommes seront inscrites au passif de la liquidation judiciaire de la société Mory Ducros ;

- rappelé que les sommes accordées porteront intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement s'agissant de créances indemnitaires ;

- débouté les demandeurs de l'ensemble de leurs autres demandes ;

- débouté la société Arcole Industries de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- déclaré le jugement opposable au CGE Ile de France Est qui devra faire l'avance desdites créances dans les limites légales de sa garantie ;

- ordonné l'exécution provisoire du jugement sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile ;

- condamné Me [OP] ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Mory Ducros aux entiers dépens.

La cour précise que ce jugement a également fixé la créance des autres salariés demandeurs au passif de la liquidation judiciaire selon les mêmes modalités. Aucun appel relatif aux dispositions du jugement les concernant n'ayant été formé, il n'en sera pas fait état en détail, le jugement est définitif à leur égard.

Mme [PP] [Y], M. [V] [S], M. [U] [D], Mme [PV] [Z], M. [O] [H], M. [DT] [X], M. [DT] [F], Mme [CN] [CY], M. [TA] [P], M. [N] [A], M. [FD] [I], M. [G] [W], Mme [TF] [K], M. [RP] [C], M. [M] [B], M. [DN] [DI], M. [L] [RA], M. [PK] [SA], M. [DN] [RV], M. [J] [RF], M. [ET] [CT], Mme [DD] [SK], M. [OF] [BA], M. [SV] [DY], M. [EI] [EN], M. [T] [UA], M. [EY] [RK] et M. [ED] [SF] ont interjeté appel de cette décision par déclaration transmise par voie électronique au greffe de la cour d'appel le 5 novembre 2022, leur appel portant sur l'ensemble des dispositions leur faisant grief, énoncées dans leur déclaration.

La société Arcole Industries a constitué avocat en qualité d'intimée le 30 novembre 2022. Me [OP] ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Mory Ducros a fait de même le 1er décembre 2022.

Le CGEA d'Ile de France Est, unité déconcentrée de l'UNEDIC, association agissant en qualité de gestionnaire de l'AGS, n'a pas constitué avocat.

Mme [PP] [Y], M. [V] [S], M. [U] [D], Mme [PV] [Z], M. [O] [H], M. [DT] [X], M. [DT] [F], Mme [CN] [CY], M. [TA] [P], M. [N] [A], M. [FD] [I], M. [G] [W], Mme [TF] [K], M. [RP] [C], M. [M] [B], M. [DN] [DI], M. [L] [RA], M. [PK] [SA], M. [DN] [RV], M. [J] [RF], M. [ET] [CT], Mme [DD] [SK], M. [OF] [BA], M. [SV] [DY], M. [EI] [EN], M. [T] [UA], M. [EY] [RK] et M. [ED] [SF], dans leurs dernières conclusions régulièrement communiquées, transmises au greffe le 24 avril 2025 par voie électronique, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, demandent à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes du Mans en ce qui concerne le principe de l'indemnité prévue à l'article L.1233-58 du code du travail, l'inscription au passif de la condamnation, l'opposabilité du jugement au CGEA Ile de France Est ainsi qu'en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens;

- infirmer le jugement en ses dispositions relatives au quantum des condamnations relatives à l'indemnité de l'article L.1233-58 du code du travail et en celles relatives à l'absence de co-emploi entre la société Arcole Industries et la société Mory Ducros, ainsi qu'en ce qu'il les a déboutés de leurs autres demandes ;

Statuant à nouveau :

1) - condamner du fait de l'annulation de la décision d'homologation du 3 mars 2014 la société Mory Ducros sur le fondement de l'article L.1233-58 du code du travail et allouer 'au salarié appelant' les indemnités suivantes :

- Mme [PP] [Y] : 91 396,83 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [V] [S] : 142 744,35 euros, soit 5 ans de salaire

- M. [U] [D] : 146 482,72 euros, soit 4 ans de salaire

- Mme [PV] [Z] : 79 813,44 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [O] [H] : 76 307,40 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [DT] [X] : 108 709,76 euros, soit 4 ans de salaire

- M. [DT] [F] : 140 832,65 euros, soit 5 ans de salaire

- Mme [CN] [CY] : 113 016,25 euros, soit 5 ans de salaire

- M. [TA] [P] : 85 482,06 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [N] [A] : 101 753,22 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [FD] [I] : 80 857,20 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [G] [W] : 172 128,50 euros, soit 5 ans de salaire

- Mme [TF] [K] : 82 887,78 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [RP] [C] : 81 819,93 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [M] [B] : 103 512,51 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [DN] [DI] : 77 320,20 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [L] [RA] : 43 721 euros, soit 2 ans de salaire

- M. [PK] [SA] : 82 518,81 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [DN] [RV] : 78 152,55 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [J] [RF] : 129 525,60 euros, soit 5 ans de salaire

- M. [ET] [CT] : 116 862,99 euros, soit 3 ans de salaire

- Mme [DD] [SK] : 110 798,20 euros, soit 4 ans de salaire

- M. [OF] [BA] : 84,729,66 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [SV] [DY] : 73 180,77 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [EI] [EN] : 136 564,68 euros, soit 4 ans de salaire

- M. [T] [UA] : 78 043,41 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [EY] [RK] : 71,387,19 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [ED] [SF] : 125 953,75 euros, soit 5 ans de salaire

- fixer ces mêmes créances au passif de la société Mory Ducros ;

- dire le 'jugement' à intervenir opposable au CGEA d'Ile de France Est ;

2) - condamner in solidum du fait de la situation de co-emploi les sociétés Mory Ducros et Arcole Industries à verser 'à l'appelant' l'indemnité suivante pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

- Mme [PP] [Y] : 91 396,83 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [V] [S] : 142 744,35 euros, soit 5 ans de salaire

- M. [U] [D] : 146 482,72 euros, soit 4 ans de salaire

- Mme [PV] [Z] : 79 813,44 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [O] [H] : 76 307,40 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [DT] [X] : 108 709,76 euros, soit 4 ans de salaire

- M. [DT] [F] : 140 832,65 euros, soit 5 ans de salaire

- Mme [CN] [CY] : 113 016,25 euros, soit 5 ans de salaire

- M. [TA] [P] : 85 482,06 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [N] [A] : 101 753,22 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [FD] [I] : 80 857,20 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [G] [W] : 172 128,50 euros, soit 5 ans de salaire

- Mme [TF] [K] : 82 887,78 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [RP] [C] : 81 819,93 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [M] [B] : 103 512,51 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [DN] [DI] : 77 320,20 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [L] [RA] : 43 721 euros, soit 2 ans de salaire

- M. [PK] [SA] : 82 518,81 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [DN] [RV] : 78 152,55 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [J] [RF] : 129 525,60 euros, soit 5 ans de salaire

- M. [ET] [CT] : 116 862,99 euros, soit 3 ans de salaire

- Mme [DD] [SK] : 110 798,20 euros, soit 4 ans de salaire

- M. [OF] [BA] : 84,729,66 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [SV] [DY] : 73 180,77 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [EI] [EN] : 136 564,68 euros, soit 4 ans de salaire

- M. [T] [UA] : 78 043,41 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [EY] [RK] : 71,387,19 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [ED] [SF] : 125 953,75 euros, soit 5 ans de salaire

3) - condamner la société Mory Ducros du fait de la violation de l'obligation individuelle de reclassement à payer 'à l'appelant' l'indemnité suivante pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

- Mme [PP] [Y] : 91 396,83 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [V] [S] : 142 744,35 euros, soit 5 ans de salaire

- M. [U] [D] : 146 482,72 euros, soit 4 ans de salaire

- Mme [PV] [Z] : 79 813,44 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [O] [H] : 76 307,40 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [DT] [X] : 108 709,76 euros, soit 4 ans de salaire

- M. [DT] [F] : 140 832,65 euros, soit 5 ans de salaire

- Mme [CN] [CY] : 113 016,25 euros, soit 5 ans de salaire

- M. [TA] [P] : 85 482,06 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [N] [A] : 101 753,22 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [FD] [I] : 80 857,20 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [G] [W] : 172 128,50 euros, soit 5 ans de salaire

- Mme [TF] [K] : 82 887,78 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [RP] [C] : 81 819,93 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [M] [B] : 103 512,51 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [DN] [DI] : 77 320,20 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [L] [RA] : 43 721 euros, soit 2 ans de salaire

- M. [PK] [SA] : 82 518,81 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [DN] [RV] : 78 152,55 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [J] [RF] : 129 525,60 euros, soit 5 ans de salaire

- M. [ET] [CT] : 116 862,99 euros, soit 3 ans de salaire

- Mme [DD] [SK] : 110 798,20 euros, soit 4 ans de salaire

- M. [OF] [BA] : 84,729,66 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [SV] [DY] : 73 180,77 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [EI] [EN] : 136 564,68 euros, soit 4 ans de salaire

- M. [T] [UA] : 78 043,41 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [EY] [RK] : 71,387,19 euros, soit 3 ans de salaire

- M. [ED] [SF] : 125 953,75 euros, soit 5 ans de salaire

- fixer ces mêmes créances au passif de la société Mory Ducros

- dire le 'jugement' à intervenir opposable au CGEA d'Ile de France Est;

- condamner la société Mory Ducros et la société Arcole Industries à payer à 'la salariée appelante' une indemnité de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- assortir les condamnations à intervenir d'intérêts au taux légal ;

- condamner les sociétés Mory Ducros et Arcole Industries aux entiers dépens.

Les salariés prétendent d'abord avoir subi un préjudice supérieur à l'indemnité minimale correspondant à 6 mois de salaire prévue par l'article L.1233-58 du code du travail dont ils revendiquent l'application.

Ils soutiennent ensuite que la société Arcole Industries s'est immiscée dans la gestion économique et sociale de la société Mory Ducros, caractérisant une situation de co-emploi.

Enfin, ils prétendent que Me [OP] ès-qualités a manqué à son obligation de reclassement en se contentant d'envoyer une lettre circulaire aux filiales du groupe.

Maître [EY] [OP], ès-qualités de liquidateur de la Sas Mory Ducros, par conclusions régulièrement communiquées, transmises au greffe par voie électronique le 12 avril 2023, ici expressément visées, et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, demande à la cour de :

A titre principal :

- confirmer le jugement entrepris ;

A titre subsidiaire :

- dire et juger que les appelants ne peuvent prétendre qu'à l'indemnité prévue par l'article L.1233-58 II à l'exclusion de toutes autres indemnités qui pourraient être dues notamment au titre d'une violation de l'obligation individuelle de reclassement ;

- fixer cette indemnité à 6 mois de salaire ;

- débouter les appelants de leur demande au titre d'une indemnité pour violation de l'obligation individuelle de reclassement ;

En tout état de cause :

- débouter les appelants de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- statuer ce que de droit sur les dépens.

Me [OP] ès-qualités considère d'abord que les appelants sollicitent une majoration du quantum de l'indemnité prévue par l'article L.1233-58 du code du travail sans produire le moindre élément quant à leur préjudice.

Il affirme ensuite que les dommages et intérêts consécutifs à un manquement à l'obligation de reclassement ne peuvent se cumuler avec ceux fondés sur l'article L.1233-58, et s'attache ensuite à démontrer que l'obligation de reclassement a été respectée.

Enfin, il considère que les salariés ne rapportent pas la preuve du co-emploi qu'ils invoquent entre la société Arcole Industries et la société Mory Ducros.

La société Arcole Industries, par conclusions régulièrement communiquées, transmises au greffe par voie électronique le 21 mai 2025, ici expressément visées, et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, demande à la cour de :

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes du Mans en ce qu'il a débouté les appelants de leur demande de reconnaissance d'une situation de co-emploi entre Arcole Industries et Mory Ducros ;

Ce faisant, jugeant à nouveau :

- juger de l'absence de co-emploi entre les sociétés Mory Ducros et Arcole Industries ;

- juger de l'absence de lien contractuel entre les appelants et la société Arcole Industries;

En conséquence :

- la mettre hors de cause et ne pas lui rendre opposable l'arrêt qui serait rendu à l'encontre de Me [EY] [OP], mandataire liquidateur ;

- débouter les appelants de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

En tout état de cause, à titre reconventionnel :

- condamner les appelants à lui payer chacun la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Arcole Industries soutient pour l'essentiel qu'il n'existe aucun lien de subordination entre elle et les appelants, et qu'aucune des pièces qu'ils produisent ne vient démontrer l'existence d'une immixtion dans la gestion économique ou sociale de la société Mory Ducros.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 mai 2025 et le dossier a été fixé à l'audience du conseiller rapporteur du 3 juin 2025.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'à la décision déférée.

MOTIVATION

Sur l'indemnité prévue par l'article L.1233-58 du code du travail

Les salariés font valoir que l'article L.1233-58 du code du travail prévoit une sanction de plein droit en cas de licenciement pour motif économique en suite d'une annulation de la décision d'homologation du document unilatéral par le juge administratif, laquelle ne peut être inférieure à six mois de salaire. Ils affirment avoir subi un préjudice supérieur dont ils demandent réparation.

Me [OP] ès-qualités observe que les appelants ne produisent aucun élément justifiant de leur préjudice, alors qu'ils ont refusé plusieurs propositions de reclassement, ont tous bénéficié du CSP et n'ont donc subi aucune perte de salaire pendant a minima un an, ainsi que du dispositif d'accompagnement renforcé du PSE notamment d'une majoration de l'indemnité de licenciement et du financement de formations. Il ajoute qu'ils exercent dans un domaine d'activité connaissant une pénurie de salariés depuis de nombreuses années et que s'ils s'abstiennent de communiquer tout élément sur leur situation postérieure au licenciement, c'est qu'ils ont vraisemblablement retrouvé un emploi.

Selon l'alinéa 5 de l'article L.1233-58, II, du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, en vigueur du 1er juillet 2013 au 1er juillet 2014, en cas de licenciements intervenus dans une entreprise en redressement ou en liquidation judiciaire, en l'absence de toute décision relative à la validation ou à l'homologation, ou en cas d'annulation d'une décision ayant procédé à la validation de l'accord collectif ou à l'homologation du document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Cette indemnité est due quel que soit le motif d'annulation de la décision administrative ayant procédé à la validation de l'accord collectif ou à l'homologation du document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi établi dans une entreprise en redressement ou en liquidation judiciaire, laquelle ne prive pas les licenciements économiques intervenus à la suite de cette décision de cause réelle et sérieuse.

Cette indemnité, qui répare le préjudice résultant pour les salariés du caractère illicite de leur licenciement, ne se cumule pas avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, qui répare le même préjudice lié à la perte injustifiée de l'emploi.

Il résulte en outre de ce texte que la perte injustifiée de son emploi par le salarié licencié en l'absence de toute décision relative à la validation ou à l'homologation, ou en cas d'annulation d'une décision ayant procédé à la validation de l'accord collectif ou à l'homologation du document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, lui cause un préjudice dont il appartient au juge d'apprécier l'étendue. (Soc 16 février 2022, n°20-14969 et n°20-14970)

En l'espèce, Me [OP] ès-qualités ne conteste pas l'application aux appelants des dispositions de l'article L.1233-58 précité.

Pour rappel, par arrêt du 7 décembre 2015, le Conseil d'Etat a définitivement confirmé la nullité de la décision de la DIRECCTE homologuant le plan de sauvegarde de l'emploi de la société Mory Ducros.

Par courriers tous datés du 13 mars 2014, les appelants ont été licenciés pour motif économique sur la base du document élaboré par les administrateurs judiciaires. Compte tenu de l'annulation de la décision d'homologation de ce document, ils sont bien fondés à obtenir le paiement d'une indemnité qui ne peut être inférieure aux six derniers mois de salaire en vertu de l'article L.1233-58 précité.

Il n'est pas contesté qu'ils ont tous adhéré au CSP, et aucun ne communique d'élément sur sa situation professionnelle postérieure.

- Mme [PP] [Y] percevait un salaire moyen de 2 547,12 euros. Elle était âgée de 47 ans et avait 19 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 38 000 euros ;

- M. [V] [S] percevait un salaire moyen de 2 400 euros. Il était âgé de 52 ans et avait 36 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 43 000 euros ;

- M. [U] [D] percevait un salaire moyen de 2 953,35 euros. Il était âgé de 51 ans et avait 26 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 50 000 euros ;

- Mme [PV] [Z] percevait un salaire moyen de 2 299 euros. Elle était âgée de 37 ans et avait 13 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 27 000 euros ;

- M. [O] [H] percevait un salaire moyen de 2 134,27 euros. Il était âgé de 43 ans et avait 12 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 25 000 euros ;

- M. [DT] [X] percevait un salaire moyen de 2 127,91 euros. Il était âgé de 52 ans et avait 28 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 39 000 euros ;

- M. [DT] [F] percevait un salaire moyen de 2 276 euros. Il était âgé de 55 ans et avait 34 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 45 000 euros ;

- Mme [CN] [CY] percevait un salaire moyen de 1 895,44 euros. Elle était âgée de 56 ans et avait 37 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 38 000 euros ;

- M. [TA] [P] percevait un salaire moyen de 2 385,02 euros. Il était âgé de 37 ans et avait 17 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 29 000 euros ;

- M. [N] [A] percevait un salaire moyen de 2 873,47 euros. Il était âgé de 34 ans et avait 13 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 33 000 euros ;

- M. [FD] [I] percevait un salaire moyen de 2 105,75 euros. Il était âgé de 35 ans et avait 10 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 23 000 euros ;

- M. [G] [W] percevait un salaire moyen de 2 806,79 euros. Il était âgé de 53 ans et avait 33 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 50 000 euros ;

- Mme [TF] [K] percevait un salaire moyen de 2 305,63 euros. Elle était âgée de 59 ans et avait 17 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 34 000 euros ;

- M. [RP] [C] percevait un salaire moyen de 2 138 euros. Il était âgé de 57 ans et avait 17 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 32 000 euros ;

- M. [M] [B] percevait un salaire moyen de 2 864,51 euros. Il était âgé de 48 ans et avait 25 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 43 000 euros ;

- M. [DN] [DI] percevait un salaire moyen de 2 119,59 euros. Il était âgé de 37 ans et avait 13 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 23 000 euros ;

- M. [L] [RA] percevait un salaire moyen de 1 815,93 euros. Il était âgé de 43 ans et avait 6 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 14 000 euros ;

- M. [PK] [SA] percevait un salaire moyen de 2 304 euros. Il était âgé de 59 ans et avait 12 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 30 000 euros ;

- M. [DN] [RV] percevait un salaire moyen de 2 175 euros. Il était âgé de 43 ans et avait 16 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 26 000 euros ;

- M. [J] [RF] percevait un salaire moyen de 2 160 euros. Il était âgé de 54 ans et avait 33 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 38 000 euros ;

- M. [ET] [CT] percevait un salaire moyen de 3 155,75 euros. Il était âgé de 37 ans et avait 13 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 34 000 euros ;

- Mme [DD] [SK] percevait un salaire moyen de 2 856,54 euros. Elle était âgée de 43 ans et avait 21 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 40 000 euros ;

- M. [OF] [BA] percevait un salaire moyen de 2 346,10 euros. Il était âgé de 42 ans et avait 15 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 29 000 euros ;

- M. [SV] [DY] percevait un salaire moyen de 2 032,80 euros. Il était âgé de 40 ans et avait 18 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 24 000 euros ;

- M. [EI] [EN] percevait un salaire moyen de 2 935,83 euros. Il était âgé de 48 ans et avait 27 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 44 000 euros ;

- M. [T] [UA] percevait un salaire moyen de 2 167,87 euros. Il était âgé de 43 ans et avait 16 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 26 000 euros ;

- M. [EY] [RK] percevait un salaire moyen de 2 000,26 euros. Il était âgé de 51 ans et avait 12 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 26 000 euros ;

- M. [ED] [SF] percevait un salaire moyen de 2 083 euros. Il était âgé de 58 ans et avait 31 ans d'ancienneté au moment de son licenciement. Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice à la somme de 39 000 euros.

Par conséquent, ces sommes sont allouées aux appelants, chacun pour ce qui le concerne, à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article L.1233-58 du code du travail, et seront fixées au passif de la liquidation de la société Mory Ducros.

Le jugement est infirmé de ces chefs.

Sur le co-emploi

Les appelants allèguent que la société Arcole Industries a signé un certain nombre de conventions avec la société reprise lui transférant l'essentiel des prérogatives de gestion économique et sociale, lesquels ont donné lieu à des versements de sommes d'argent par les sociétés Mory et Ducros Express puis ensuite par la société Mory Ducros. Ils font valoir que M.[PA], directeur général de la société Arcole Industries, et son équipe soit 5 salariés au total, ont incontestablement géré la société Mory Ducros moyennant rémunération pendant toute son existence, privant cette dernière de toute autonomie réelle. S'agissant de l'immixtion dans la gestion sociale, ils relèvent que M. [PA] a été le signataire, cette fois en qualité de directeur général de la société Mory Ducros, de la lettre de sollicitation de postes de reclassement adressée à toutes les sociétés du groupe. Ils considèrent que cette relation dépasse toute relation normale entre une société mère et sa filiale et signe le fait que la société Arcole Industries était la seule décisionnaire. La société Arcole Industries n'ayant participé ni à l'élaboration ou à la présentation du plan de sauvegarde de l'emploi, ni à l'obligation de reclassement, ni à la confection de la lettre de licenciement, leur licenciement se trouve, selon eux, dénué de cause réelle et sérieuse.

La société Arcole Industries conteste tout co-emploi avec la société Mory Ducros. Si elle ne nie pas les liens capitalistiques l'ayant liée à cette société, elle prétend ne s'être immiscée à aucun moment dans sa gestion économique et sociale, soulignant qu'elle n'emploie que 5 salariés alors que la société Mory Ducros en comptait plus de 5 000, et que cette dernière était dotée de collaborateurs et de ressources lui permettant de gérer directement l'entreprise, notamment d'un directeur administratif et financier, une responsable juridique, une directrice des ressources humaines, un directeur comptable, un directeur commercial ou un directeur des opérations.

Me [OP] ès-qualités considère que les salariés se contentent d'affirmer l'existence d'une situation de co-emploi entre la société Arcole Industries et la société Mory Ducros sans étayer cette affirmation, de sorte que la preuve d'une immixtion

permanente de la première dans la gestion économique et sociale de la seconde conduisant à la perte totale d'autonomie de cette dernière n'est pas rapportée.

Il résulte de l'article L.1221-1 du code du travail que, hors l'existence d'un lien de subordination qui n'est pas invoqué en l'espèce, une société faisant partie d'un groupe peut être qualifiée de coemployeur du personnel employé par une autre s'il existe, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une immixtion permanente de cette société dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte totale d'autonomie d'action de cette dernière. (Soc 23 novembre 2022, n°20-23206)

Il incombe à celui qui l'invoque de prouver le co-emploi.

Pour justifier de l'existence d'un co-emploi, les appelants versent d'abord aux débats, un document intitulé en bas de page 'Mory Ducros - Analyse de la situation au 31 décembre 2012 et des perspectives 2013 - Confidentiel' (pièce 8). Il s'agit d'une page unique, numérotée 34, issue d'un document non communiqué dans son intégralité, élaboré par une société de conseil (Secafi), et manifestement confidentiel.

En outre, dans le cadre des montants facturés par la société Arcole Industries à la société Mory Ducros, seul un prévisionnel de 700 k€ pour l'année 2013 apparaît pour '[BY] [PA] et équipe Arcole' sans précision sur la nature de ce prévisionnel de sorte qu'on ne peut en déduire la mise à disposition de tous les salariés de la société Arcole Industries lesquels ne sont que cinq, et sans qu'il soit établi que ce montant ait été effectivement facturé. Dès lors, ce document tronqué, émanant d'un cabinet de conseil extérieur, et n'élaborant que des projections peu précises sans assurance que celles-ci aient été réalisées, est inopérant à démontrer une immixtion de la société Arcole Industries dans la gestion de la société Mory Ducros, encore moins de manière permanente.

Les salariés communiquent ensuite plusieurs courriers de recherche de reclassement en date du 6 février 2014, co-signés par Me [R], administrateur judiciaire, et par M. [PA] en qualité de directeur général de la société Mory Ducros (pièce 40). Pour autant, le seul fait que le dirigeant de la filiale est issu du groupe, que M. [PA] a exercé des fonctions tant au sein de la société Arcole Industries qu'auprès de la société Mory Ducros, et qu'il a co-signé ces courriers en sa qualité de directeur général de la société Mory Ducros, ne suffit pas à caractériser une immixtion permanente de la société Arcole Industries dans la gestion économique et sociale de la société Mory Ducros conduisant à la perte totale d'autonomie d'action de cette dernière.

Il s'en suit que les salariés ne démontrent pas l'existence d'un co-emploi impliquant la société Arcole Industries, étant précisé que cette dernière justifie de ce que la société Mory Ducros disposait d'un personnel qualifié à même de gérer directement l'entreprise dans tous ses aspects (administration et finances, comptabilité, ressources humaines, juridique, commercial, opérationnel, services informatiques) (pièces 6 à 16 Arcole Industries).

Le co-emploi n'étant pas retenu, les salariés doivent être déboutés de leurs demandes à l'encontre de la société Arcole Industries.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté l'existence d'un co-emploi et débouté les appelants de leurs demandes dirigées à son encontre.

Sur l'obligation de reclassement

Les appelants prétendent que Me [OP] ès-qualités a manqué à son obligation de reclassement en se contentant d'envoyer une lettre circulaire identique aux filiales du groupe, laquelle ne comporte aucun élément relatif à leur profil, leurs diplômes, leur qualification ou leur expérience. Ils considèrent que ce courrier ne caractérise pas

l'existence d'une recherche active, précise et sérieuse des possibilités de reclassement, et que ce manquement a pour effet de rendre leur licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Me [OP] ès-qualités fait valoir que l'indemnité sollicitée sur le fondement de l'article L.1233-58 du code du travail n'est pas cumulable avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en ce que ces deux indemnités réparent le même préjudice. En tout état de cause, il prétend que les recherches de reclassement ont été menées par les administrateurs judiciaires et non par lui, dans le respect des dispositions du code du travail, que des recherches actives ont été menées et que des offres de reclassement personnalisées ont été proposées aux salariés qui les ont au demeurant refusées. Il observe enfin que les appelants ne justifient d'aucun préjudice ni dans le principe ni dans le quantum. Il rappelle le fait qu'ils ont tous adhéré au CSP et qu'aucun d'eux ne donne d'élément quant à sa situation postérieure car ils ont vraisemblablement rapidement retrouvé un emploi.

Il est acquis que le manquement à l'obligation de reclassement prévue par l'article L.1233-4 du code du travail a pour effet de rendre le licenciement pour motif économique sans cause réelle et sérieuse, lequel ouvre droit, selon les dispositions de l'article L.1235-3 du même code, à la réparation du préjudice causé de ce fait, étant précisé que dans sa version applicable à la cause, l'article L.1235-3 prévoyait, à l'instar de l'article L.1233-58, l'octroi d'une indemnité ne pouvant être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Même si elles reposent sur des fondements juridiques différents, l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et l'indemnité pour licenciement malgré annulation de l'homologation du document unilatéral fixant le plan de sauvegarde de l'emploi ont le même objet, à savoir la réparation du dommage résultant de la perte injustifiée de l'emploi, et de ce fait, elles ne se cumulent pas. (Soc 16 février 2022 précité)

Le préjudice des salariés du fait de la perte illégitime de leur emploi ayant d'ores et déjà été réparé, ils ne sont pas fondés à solliciter des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse du fait d'un éventuel manquement à l'obligation de reclassement.

Par conséquent, sans qu'il soit nécessaire d'analyser le respect ou non par Me [OP] ès-qualités de son obligation de reclassement, les appelants doivent être déboutés de cette demande et le jugement confirmé de chef.

Sur les intérêts

En application des articles L.622-28 et L.641-3 du code de commerce, le jugement du tribunal de commerce qui a prononcé l'ouverture de la procédure collective à l'égard de la société Mory-Ducros a arrêté le cours des intérêts légaux.

Dès lors, les sommes allouées aux salariés, outre le fait qu'il ne s'agit pas d'une condamnation, ne peuvent porter intérêt au taux légal à compter du jugement du conseil des prud'hommes.

Le jugement est infirmé de ce chef.

Sur l'opposabilité de l'arrêt au CGEA-IDF EST

Le présent arrêt doit être déclaré commun et opposable au CGEA-IDF EST dans les limites de la garantie légale et des plafonds applicables prévus par les articles L.3253-8 et suivants et D.3253-5 du code du travail.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Arcole Industries, ni au profit des appelants pour leurs frais irrépétibles d'appel.

Me [OP] ès-qualités qui succombe à l'instance est condamné aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire, publiquement par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement rendu par le conseil de prud'hommes du Mans le 5 octobre 2022 sauf :

- sur le quantum des sommes allouées à Mme [PP] [Y], M. [V] [S], M. [U] [D], Mme [PV] [Z], M. [O] [H], M. [DT] [X], M. [DT] [F], Mme [CN] [CY], M. [TA] [P], M. [N] [A], M. [FD] [I], M. [G] [W], Mme [TF] [K], M. [RP] [C], M. [M] [B], M. [DN] [DI], M. [L] [RA], M. [PK] [SA], M. [DN] [RV], M. [J] [RF], M. [ET] [CT], Mme [DD] [SK], M. [OF] [BA], M. [SV] [DY], M. [EI] [EN], M. [T] [UA], M. [EY] [RK] et M. [ED] [SF] à titre de dommages et intérêts fondés sur l'article L.1233-58 du code du travail ;

- ses dispositions relatives aux intérêts ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

FIXE la créance de Mme [PP] [Y], M. [V] [S], M. [U] [D], Mme [PV] [Z], M. [O] [H], M. [DT] [X], M. [DT] [F], Mme [CN] [CY], M. [TA] [P], M. [N] [A], M. [FD] [I], M. [G] [W], Mme [TF] [K], M. [RP] [C], M. [M] [B], M. [DN] [DI], M. [L] [RA], M. [PK] [SA], M. [DN] [RV], M. [J] [RF], M. [ET] [CT], Mme [DD] [SK], M. [OF] [BA], M. [SV] [DY], M. [EI] [EN], M. [T] [UA], M. [EY] [RK] et M. [ED] [SF] au passif de la liquidation judiciaire de la Sas Mory Ducros à titre de dommages et intérêts fondés sur l'article L.1233-58 du code du travail, chacun pour ce qui le concerne, aux sommes suivantes :

- Mme [PP] [Y] : 38 000 euros

- M. [V] [S] : 43 000 euros

- M. [U] [D] : 50 000 euros

- Mme [PV] [Z] : 27 000 euros

- M. [O] [H] : 25 000 euros

- M. [DT] [X] : 39 000 euros

- M. [DT] [F] : 45 000 euros

- Mme [CN] [CY] : 38 000 euros

- M. [TA] [P] : 29 000 euros

- M. [N] [A] : 33 000 euros

- M. [FD] [I] : 23 000 euros

- M. [G] [W] : 50 000 euros

- Mme [TF] [K] : 34 000 euros

- M. [RP] [C] : 32 000 euros

- M. [M] [B] : 43 000 euros

- M. [DN] [DI] : 23 000 euros

- M. [L] [RA] : 14 000 euros

- M. [PK] [SA] : 30 000 euros

- M. [DN] [RV] : 26 000 euros

- M. [J] [RF] : 38 000 euros

- M. [ET] [CT] : 34 000 euros

- Mme [DD] [SK] : 40 000 euros

- M. [OF] [BA] : 29 000 euros

- M. [SV] [DY] : 24 000 euros

- M. [EI] [EN] : 44 000 euros

- M. [T] [UA] : 26 000 euros

- M. [EY] [RK] : 26 000 euros

- M. [ED] [SF] : 39 000 euros

RAPPELLE qu'en application des articles L.622-28 et L.641-3 du code de commerce le jugement d'ouverture d'une procédure collective arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels ;

DECLARE l'arrêt opposable au CGEA d'Ile de France Est, unité déconcentrée de l'UNEDIC, association agissant en qualité de gestionnaire de l'AGS, dans les limites de la garantie légale et des plafonds applicables prévus par les articles L.3253-8 et suivants et D.3253-5 du code du travail ;

DEBOUTE Mme [PP] [Y], M. [V] [S], M. [U] [D], Mme [PV] [Z], M. [O] [H], M. [DT] [X], M. [DT] [F], Mme [CN] [CY], M. [TA] [P], M. [N] [A], M. [FD] [I], M. [G] [W], Mme [TF] [K], M. [RP] [C], M. [M] [B], M. [DN] [DI], M. [L] [RA], M. [PK] [SA], M. [DN] [RV], M. [J] [RF], M. [ET] [CT], Mme [DD] [SK], M. [OF] [BA], M. [SV] [DY], M. [EI] [EN], M. [T] [UA], M. [EY] [RK] et M. [ED] [SF] de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile au titre de leurs frais irrépétibles d'appel ;

DEBOUTE la Sa Arcole Industries de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles d'appel ;

CONDAMNE Me [OP] ès-qualités de mandataire liquidateur de la Sas Mory Ducros aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, P/ LE PRÉSIDENT empêché,

Viviane BODIN Claire TRIQUIGNEAUX-MAUGARS

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