CA Orléans, ch. des retentions, 10 octobre 2025, n° 25/03005
ORLÉANS
Ordonnance
Autre
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL D'ORLÉANS
Rétention Administrative
des Ressortissants Étrangers
ORDONNANCE du 10 OCTOBRE 2025
Minute N° 989/2025
N° RG 25/03005 - N° Portalis DBVN-V-B7J-HJMK
(3 pages)
Décision déférée : ordonnance du tribunal judiciaire d'Orléans en date du 09 octobre 2025 à 12h01
Nous, Fanny CHENOT, conseiller à la cour d'appel d'Orléans, agissant par délégation de la première présidente de cette cour, assistée de Paul BARBIER, greffier placé, aux débats et au prononcé de l'ordonnance,
APPELANT :
Monsieur X se disant [S] [D]
né le 25 Janvier 1988 à [Localité 3] (ALGERIE), de nationalité algérienne,
actuellement en rétention administrative dans les locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire du centre de rétention administrative d'[Localité 1],
comparant par visioconférence, assisté de Maître Sylvie CELERIER, avocat au barreau d'ORLEANS,
assisté de Monsieur [X] [L], interprète en langue arabe, expert près la cour d'appel d'Orléans, qui a prêté son concours lors de l'audience et du prononcé ;
INTIMÉ :
Monsieur LE PRÉFET DE LA SEINE-MARITIME
non comparant, non représenté ;
MINISTÈRE PUBLIC : avisé de la date et de l'heure de l'audience ;
À notre audience publique tenue en visioconférence au Palais de Justice d'Orléans le 10 octobre 2025 à 14 H 00, conformément à l'article L. 743-7 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), aucune salle d'audience attribuée au ministère de la justice spécialement aménagée à proximité immédiate du lieu de rétention n'étant disponible pour l'audience de ce jour ;
Statuant en application des articles L. 743-21 à L. 743-23 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), et des articles R. 743-10 à R. 743-20 du même code ;
Vu l'ordonnance rendue le 09 octobre 2025 à 12h01 par le tribunal judiciaire d'Orléans ordonnant la jonction des procédures de demande de prolongation par la préfecture et de recours contre l'arrêté de placement en rétention administrative par le retenu, rejetant le recours formé contre l'arrêté de placement en rétention administrative et ordonnant la prolongation du maintien de Monsieur X se disant [S] [D] dans les locaux non pénitentiaires pour une durée de vingt six jours ;
Vu l'appel de ladite ordonnance interjeté le 09 octobre 2025 à 16h39 par Monsieur X se disant [S] [D] ;
Après avoir entendu :
- Maître Sylvie CELERIER en sa plaidoirie,
- Monsieur X se disant [S] [D] en ses observations, ayant eu la parole en dernier ;
AVONS RENDU ce jour l'ordonnance publique et réputée contradictoire suivante :
MOTIFS DE LA DECISION :
Il convient de rappeler à titre liminaire que selon l'article R. 743-18, la comparution des parties à l'audience est facultative de sorte qu'en l'absence du préfet, seuls peuvent être invoqués les moyens énoncés dans la déclaration d'appel (v. par ex. Civ. 1, 23 juin 2010 n°09-14.958), le cas échéant complétés par des écritures transmises jusqu'à l'expiration du délai de recours de 24 heures prévu à R. 743-10.
Sur les exceptions liées à la procédure préalable au placement en rétention
- sur la consultation du FAED
M. X se disant [S] [D] fait notamment valoir que le nom de la personne ayant consulté le fichier FAED et la preuve de son habilitation n'ont pas été transmis à la procédure, de sorte que rien ne permettrait de vérifier qu'il s'agit bien d'un agent habilité à cette fin.
La préfecture, qui n'a pas conclu ni comparu, est réputée s'approprier les motifs du premier juge.
L'article L.142-2 du CESEDA dispose qu'en vue de l'identification d'un étranger qui n'a pas présenté à l'autorité administrative compétente les documents de voyage permettant l'exécution d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, les données des traitements automatisés des empreintes digitales mis en 'uvre par le ministère de l'intérieur peuvent être consultées par les agents expressément habilités des services de ce ministère dans les conditions prévues par le règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données et par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.
L'article R. 40-38-1 du code de procédure pénale dispose que le ministre de l'intérieur est autorisé à mettre en 'uvre un traitement de données à caractère personnel dénommé fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) qui a notamment pour finalité de faciliter l'identification d'un étranger dans les conditions prévues à l'article L. 142-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
L'article R. 40-38-7, I. du code de procédure pénale dispose :
« Peuvent avoir accès, à raison de leurs attributions et dans la limite du besoin d'en connaître, à tout ou partie des données et informations mentionnées aux articles R. 40-38-2 et R. 40-38-3 :
1° Les personnels de la police nationale et ceux de la gendarmerie nationale individuellement désignés et dûment habilités, affectés dans les services chargés d'une mission de police judiciaire et spécialement chargés de la mise en 'uvre du traitement, aux fins de consultation, d'alimentation et d'identification des personnes ;
2° Les personnels de la police nationale, de la gendarmerie nationale et les agents des douanes et des services fiscaux habilités à effectuer des enquêtes judiciaires en application des articles 28-1 et 28-2, individuellement désignés et habilités aux seules fins de consultation et d'alimentation ;
3° Le magistrat chargé du service du casier judiciaire national automatisé et les agents de ce service habilités par lui ».
Il résulte de ces dispositions que la seule qualité de policier ou de gendarme ne permet pas d'accéder aux données du FAED, dès lors qu'il est exigé que l'agent soit pourvu d'une habilitation individuelle et spéciale aux fins de mise en 'uvre du traitement, aux fins de consultation, d'alimentation et d'identification des personnes.
L'article 15-5 du code de procédure pénale créé par la loi n° 2023-22 du janvier 2023 prévoit, dans le cadre des enquêtes et des contrôles d'identité, que seuls les personnels spécialement et individuellement habilités à cet effet peuvent procéder à la consultation de traitements au cours d'une enquête ou d'une instruction. Il précise que la réalité de cette habilitation spéciale et individuelle peut être contrôlée à tout moment par un magistrat, à son initiative ou à la demande d'une personne intéressée, mais que l'absence de la mention de cette habilitation sur les différentes pièces de procédure résultant de la consultation de ces traitements n'emporte pas, par elle-même, nullité de la procédure ».
Cette présomption d'habilitation a été déclarée conforme à la Constitution (Cons. Const.19 janvier 2023, DC n° 2022-846), au motif que les dispositions de ce texte n'ont ni pour objet ni pour effet de dispenser les agents de l'obligation de disposer d'une habilitation pour consulter des traitements de données, ou de faire obstacle à l'annulation d'un acte de procédure résultant d'une telle consultation par un agent dépourvu d'habilitation.
Au regard de l'ingérence dans le droit au respect de la vie privée que constituent, au sens de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la conservation dans un fichier automatisé des empreintes digitales d'un individu identifié ou identifiable et la consultation de ces données, l'habilitation des agents est une garantie institutionnelle édictée pour la protection des libertés individuelles (v. par ex. Civ.1, 14 octobre 2020, pourvoi n° 19-19.234).
Il s'ensuit que la preuve de l'habilitation à consulter le FAED est une garantie du respect des libertés publiques et que tout intéressé ayant fait l'objet d'une consultation de ses données peut exiger qu'il lui soit justifié de l'habilitation de l'agent ayant eu accès à ces données.
Dès lors, s'il ne résulte pas des pièces du dossier que l'agent ayant consulté les fichiers d'empreintes était expressément habilité à cet effet, la procédure se trouve entachée d'une nullité d'ordre public, sans que l'étranger qui l'invoque ait à démontrer l'existence d'une atteinte portée à ses droits, ainsi que l'a déjà jugé la Cour de cassation (1re Civ., 14 octobre 2020, préc.).
En matière de rétention administrative des étrangers, les délais très contraints impartis pour statuer ne permettent pas au juge de procéder à des investigations pour rechercher si les personnes ayant consulté les fichiers sécurisés y étaient habilitées.
Il s'en infère que, nonobstant la présomption établie par le nouvel article 15-5 du code de procédure pénale, lorsqu'il ne résulte pas des pièces du dossier que l'agent ayant consulté les fichiers d'empreintes était expressément habilité à cet effet, la procédure doit être annulée sans que l'étranger qui invoque la nullité ait à démontrer l'existence d'un grief si, durant le temps de l'instance devant le juge judiciaire, le cas échéant à hauteur d'appel seulement, le préfet ou le ministère public n'établit pas que la personne qui a procédé à la consultation du FAED était effectivement habilitée à cette fin.
En l'espèce, il est joint en procédure (pièce n° 1, p. 31 et s.) le rapport de consultation décadactylaire du FAED en date du 4 octobre 2025, dont il ressort que ce fichier a été consulté ce même jour par M. [H] [P], afin d'accéder aux données de M. X se disant [S] [D].
Si M. [H] [P] est effectivement un agent de la sous-direction des systèmes d'information et de la biométrie, elle-même rattachée au SNPS, cela ne le dispense pas de disposer d'une habilitation individuelle et spéciale aux fins de consultation, d'alimentation et d'identification du fichier.
Déduire l'existence de cette habilitation du grade et du service d'affectation de l'agent reviendrait, pour la cour, à se fonder sur des motifs hypothétiques.
Dès lors que l'intimé ne produit pas le justificatif de l'habilitation de M. [P] et qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier, notamment d'aucune mention d'un procès-verbal qui aurait pu faire foi (v. par ex. Crim., 3 avril 2024, pourvoi n° 23-85.513), que cet agent disposait d'une habilitation individuelle et spéciale, la cour ne peut que constater l'irrégularité de la consultation et, par voie subséquente, celle de la procédure administrative de rétention, ce qui commande la mainlevée immédiate de la mesure.
Par ces motifs,
DÉCLARONS recevable l'appel de M. X se disant [S] [D] ;
INFIRMONS l'ordonnance entreprise ;
Statuant à nouveau :
DÉCLARONS la procédure irrégulière ;
ORDONNONS la remise en liberté immédiate de M. X se disant [S] [D] ;
RAPPELONS à ce dernier qu'il a l'obligation de quitter le territoire par ses propres moyens ;
LAISSONS les dépens à la charge du Trésor ;
ORDONNONS la remise immédiate d'une expédition de la présente ordonnance à Monsieur LE PRÉFET DE LA SEINE-MARITIME, à Monsieur X se disant [S] [D] et son conseil et à Monsieur le procureur général près la cour d'appel d'Orléans ;
Et la présente ordonnance a été signée par Fanny CHENOT, conseiller, et Paul BARBIER, greffier placé présent lors du prononcé.
Fait à [Localité 2] le DIX OCTOBRE DEUX MILLE VINGT CINQ, à heures
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Paul BARBIER Fanny CHENOT
Pour information : l'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien la rétention et au ministère public. Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification. Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
NOTIFICATIONS, le 10 octobre 2025 :
Monsieur LE PRÉFET DE LA SEINE-MARITIME, par courriel
Monsieur X se disant [S] [D] , copie remise par transmission au greffe du CRA d'[Localité 1]
Maître Sylvie CELERIER, avocat au barreau d'ORLEANS, par PLEX
Monsieur le procureur général près la cour d'appel d'Orléans, par courriel
L'interprète
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL D'ORLÉANS
Rétention Administrative
des Ressortissants Étrangers
ORDONNANCE du 10 OCTOBRE 2025
Minute N° 989/2025
N° RG 25/03005 - N° Portalis DBVN-V-B7J-HJMK
(3 pages)
Décision déférée : ordonnance du tribunal judiciaire d'Orléans en date du 09 octobre 2025 à 12h01
Nous, Fanny CHENOT, conseiller à la cour d'appel d'Orléans, agissant par délégation de la première présidente de cette cour, assistée de Paul BARBIER, greffier placé, aux débats et au prononcé de l'ordonnance,
APPELANT :
Monsieur X se disant [S] [D]
né le 25 Janvier 1988 à [Localité 3] (ALGERIE), de nationalité algérienne,
actuellement en rétention administrative dans les locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire du centre de rétention administrative d'[Localité 1],
comparant par visioconférence, assisté de Maître Sylvie CELERIER, avocat au barreau d'ORLEANS,
assisté de Monsieur [X] [L], interprète en langue arabe, expert près la cour d'appel d'Orléans, qui a prêté son concours lors de l'audience et du prononcé ;
INTIMÉ :
Monsieur LE PRÉFET DE LA SEINE-MARITIME
non comparant, non représenté ;
MINISTÈRE PUBLIC : avisé de la date et de l'heure de l'audience ;
À notre audience publique tenue en visioconférence au Palais de Justice d'Orléans le 10 octobre 2025 à 14 H 00, conformément à l'article L. 743-7 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), aucune salle d'audience attribuée au ministère de la justice spécialement aménagée à proximité immédiate du lieu de rétention n'étant disponible pour l'audience de ce jour ;
Statuant en application des articles L. 743-21 à L. 743-23 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), et des articles R. 743-10 à R. 743-20 du même code ;
Vu l'ordonnance rendue le 09 octobre 2025 à 12h01 par le tribunal judiciaire d'Orléans ordonnant la jonction des procédures de demande de prolongation par la préfecture et de recours contre l'arrêté de placement en rétention administrative par le retenu, rejetant le recours formé contre l'arrêté de placement en rétention administrative et ordonnant la prolongation du maintien de Monsieur X se disant [S] [D] dans les locaux non pénitentiaires pour une durée de vingt six jours ;
Vu l'appel de ladite ordonnance interjeté le 09 octobre 2025 à 16h39 par Monsieur X se disant [S] [D] ;
Après avoir entendu :
- Maître Sylvie CELERIER en sa plaidoirie,
- Monsieur X se disant [S] [D] en ses observations, ayant eu la parole en dernier ;
AVONS RENDU ce jour l'ordonnance publique et réputée contradictoire suivante :
MOTIFS DE LA DECISION :
Il convient de rappeler à titre liminaire que selon l'article R. 743-18, la comparution des parties à l'audience est facultative de sorte qu'en l'absence du préfet, seuls peuvent être invoqués les moyens énoncés dans la déclaration d'appel (v. par ex. Civ. 1, 23 juin 2010 n°09-14.958), le cas échéant complétés par des écritures transmises jusqu'à l'expiration du délai de recours de 24 heures prévu à R. 743-10.
Sur les exceptions liées à la procédure préalable au placement en rétention
- sur la consultation du FAED
M. X se disant [S] [D] fait notamment valoir que le nom de la personne ayant consulté le fichier FAED et la preuve de son habilitation n'ont pas été transmis à la procédure, de sorte que rien ne permettrait de vérifier qu'il s'agit bien d'un agent habilité à cette fin.
La préfecture, qui n'a pas conclu ni comparu, est réputée s'approprier les motifs du premier juge.
L'article L.142-2 du CESEDA dispose qu'en vue de l'identification d'un étranger qui n'a pas présenté à l'autorité administrative compétente les documents de voyage permettant l'exécution d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, les données des traitements automatisés des empreintes digitales mis en 'uvre par le ministère de l'intérieur peuvent être consultées par les agents expressément habilités des services de ce ministère dans les conditions prévues par le règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données et par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.
L'article R. 40-38-1 du code de procédure pénale dispose que le ministre de l'intérieur est autorisé à mettre en 'uvre un traitement de données à caractère personnel dénommé fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) qui a notamment pour finalité de faciliter l'identification d'un étranger dans les conditions prévues à l'article L. 142-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
L'article R. 40-38-7, I. du code de procédure pénale dispose :
« Peuvent avoir accès, à raison de leurs attributions et dans la limite du besoin d'en connaître, à tout ou partie des données et informations mentionnées aux articles R. 40-38-2 et R. 40-38-3 :
1° Les personnels de la police nationale et ceux de la gendarmerie nationale individuellement désignés et dûment habilités, affectés dans les services chargés d'une mission de police judiciaire et spécialement chargés de la mise en 'uvre du traitement, aux fins de consultation, d'alimentation et d'identification des personnes ;
2° Les personnels de la police nationale, de la gendarmerie nationale et les agents des douanes et des services fiscaux habilités à effectuer des enquêtes judiciaires en application des articles 28-1 et 28-2, individuellement désignés et habilités aux seules fins de consultation et d'alimentation ;
3° Le magistrat chargé du service du casier judiciaire national automatisé et les agents de ce service habilités par lui ».
Il résulte de ces dispositions que la seule qualité de policier ou de gendarme ne permet pas d'accéder aux données du FAED, dès lors qu'il est exigé que l'agent soit pourvu d'une habilitation individuelle et spéciale aux fins de mise en 'uvre du traitement, aux fins de consultation, d'alimentation et d'identification des personnes.
L'article 15-5 du code de procédure pénale créé par la loi n° 2023-22 du janvier 2023 prévoit, dans le cadre des enquêtes et des contrôles d'identité, que seuls les personnels spécialement et individuellement habilités à cet effet peuvent procéder à la consultation de traitements au cours d'une enquête ou d'une instruction. Il précise que la réalité de cette habilitation spéciale et individuelle peut être contrôlée à tout moment par un magistrat, à son initiative ou à la demande d'une personne intéressée, mais que l'absence de la mention de cette habilitation sur les différentes pièces de procédure résultant de la consultation de ces traitements n'emporte pas, par elle-même, nullité de la procédure ».
Cette présomption d'habilitation a été déclarée conforme à la Constitution (Cons. Const.19 janvier 2023, DC n° 2022-846), au motif que les dispositions de ce texte n'ont ni pour objet ni pour effet de dispenser les agents de l'obligation de disposer d'une habilitation pour consulter des traitements de données, ou de faire obstacle à l'annulation d'un acte de procédure résultant d'une telle consultation par un agent dépourvu d'habilitation.
Au regard de l'ingérence dans le droit au respect de la vie privée que constituent, au sens de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la conservation dans un fichier automatisé des empreintes digitales d'un individu identifié ou identifiable et la consultation de ces données, l'habilitation des agents est une garantie institutionnelle édictée pour la protection des libertés individuelles (v. par ex. Civ.1, 14 octobre 2020, pourvoi n° 19-19.234).
Il s'ensuit que la preuve de l'habilitation à consulter le FAED est une garantie du respect des libertés publiques et que tout intéressé ayant fait l'objet d'une consultation de ses données peut exiger qu'il lui soit justifié de l'habilitation de l'agent ayant eu accès à ces données.
Dès lors, s'il ne résulte pas des pièces du dossier que l'agent ayant consulté les fichiers d'empreintes était expressément habilité à cet effet, la procédure se trouve entachée d'une nullité d'ordre public, sans que l'étranger qui l'invoque ait à démontrer l'existence d'une atteinte portée à ses droits, ainsi que l'a déjà jugé la Cour de cassation (1re Civ., 14 octobre 2020, préc.).
En matière de rétention administrative des étrangers, les délais très contraints impartis pour statuer ne permettent pas au juge de procéder à des investigations pour rechercher si les personnes ayant consulté les fichiers sécurisés y étaient habilitées.
Il s'en infère que, nonobstant la présomption établie par le nouvel article 15-5 du code de procédure pénale, lorsqu'il ne résulte pas des pièces du dossier que l'agent ayant consulté les fichiers d'empreintes était expressément habilité à cet effet, la procédure doit être annulée sans que l'étranger qui invoque la nullité ait à démontrer l'existence d'un grief si, durant le temps de l'instance devant le juge judiciaire, le cas échéant à hauteur d'appel seulement, le préfet ou le ministère public n'établit pas que la personne qui a procédé à la consultation du FAED était effectivement habilitée à cette fin.
En l'espèce, il est joint en procédure (pièce n° 1, p. 31 et s.) le rapport de consultation décadactylaire du FAED en date du 4 octobre 2025, dont il ressort que ce fichier a été consulté ce même jour par M. [H] [P], afin d'accéder aux données de M. X se disant [S] [D].
Si M. [H] [P] est effectivement un agent de la sous-direction des systèmes d'information et de la biométrie, elle-même rattachée au SNPS, cela ne le dispense pas de disposer d'une habilitation individuelle et spéciale aux fins de consultation, d'alimentation et d'identification du fichier.
Déduire l'existence de cette habilitation du grade et du service d'affectation de l'agent reviendrait, pour la cour, à se fonder sur des motifs hypothétiques.
Dès lors que l'intimé ne produit pas le justificatif de l'habilitation de M. [P] et qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier, notamment d'aucune mention d'un procès-verbal qui aurait pu faire foi (v. par ex. Crim., 3 avril 2024, pourvoi n° 23-85.513), que cet agent disposait d'une habilitation individuelle et spéciale, la cour ne peut que constater l'irrégularité de la consultation et, par voie subséquente, celle de la procédure administrative de rétention, ce qui commande la mainlevée immédiate de la mesure.
Par ces motifs,
DÉCLARONS recevable l'appel de M. X se disant [S] [D] ;
INFIRMONS l'ordonnance entreprise ;
Statuant à nouveau :
DÉCLARONS la procédure irrégulière ;
ORDONNONS la remise en liberté immédiate de M. X se disant [S] [D] ;
RAPPELONS à ce dernier qu'il a l'obligation de quitter le territoire par ses propres moyens ;
LAISSONS les dépens à la charge du Trésor ;
ORDONNONS la remise immédiate d'une expédition de la présente ordonnance à Monsieur LE PRÉFET DE LA SEINE-MARITIME, à Monsieur X se disant [S] [D] et son conseil et à Monsieur le procureur général près la cour d'appel d'Orléans ;
Et la présente ordonnance a été signée par Fanny CHENOT, conseiller, et Paul BARBIER, greffier placé présent lors du prononcé.
Fait à [Localité 2] le DIX OCTOBRE DEUX MILLE VINGT CINQ, à heures
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Paul BARBIER Fanny CHENOT
Pour information : l'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien la rétention et au ministère public. Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification. Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
NOTIFICATIONS, le 10 octobre 2025 :
Monsieur LE PRÉFET DE LA SEINE-MARITIME, par courriel
Monsieur X se disant [S] [D] , copie remise par transmission au greffe du CRA d'[Localité 1]
Maître Sylvie CELERIER, avocat au barreau d'ORLEANS, par PLEX
Monsieur le procureur général près la cour d'appel d'Orléans, par courriel
L'interprète