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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 3-4, 9 octobre 2025, n° 21/14845

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 21/14845

9 octobre 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-4

ARRÊT AU FOND

DU 9 OCTOBRE 2025

Rôle N° RG 21/14845 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BIIFA

[O] [U] [W]

S.A.S. L'AS DU POULET

C/

[G], [D], [I] [F]

Copie exécutoire délivrée

le : 9 Octobre 2025

à :

Me Alexandre ACQUAVIVA

Me Florence BOUYAC

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce d'AIX-EN-PROVENCE en date du 27 Septembre 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 2020 00495.

APPELANTS

Monsieur [O] [U] [W]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 8] (SRI LANKA), demeurant [Adresse 6]

représenté par Me Florence BOUYAC de la SELAS B & F, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

S.A.S. L'AS DU POULET

, demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Florence BOUYAC de la SELAS B & F, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

Madame [G], [D], [I] [F]

née le [Date naissance 3] 1984 à [Localité 7] (13), demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Alexandre ACQUAVIVA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 806 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Juin 2025 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président Rapporteur,

et Madame Gaëlle MARTIN, conseiller- rapporteur,

chargés du rapport qui en ont rendu compte dans le délibéré de la cour composée de :

Madame Anne-Laurence CHALBOS, Présidente

Madame Laetitia VIGNON, Conseillère

Madame Gaëlle MARTIN, Conseillère

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Octobre 2025, puis avisées par message le 2 Octobre 2025, que la décision était prorogée au 9 Octobre 2025.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 9 Octobre 2025.

Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

La SAS L'As du poulet a été immatriculée le 30 novembre 2016 pour l'exploitation d'un fonds de commerce de rôtisserie, snack et épicerie, situé [Adresse 5].

Par acte sous seing privé en date du 12 juillet 2018, Mme [G] [F] a cédé à M. [O], [E] [W] la totalité des actions composant le capital de la SAS L'As du poulet, pour un prix de 40 000 euros.

Conformément aux termes de l'acte de cession, la somme de 10 000 euros a été réglée comptant lors de la signature, le solde faisant l'objet d'un crédit-vendeur et devant être payé selon un échéancier prévoyant quatre versements mensuels de 1 500 euros chacun à compter du 5 septembre 2018 puis un dernier versement de 24 000 euros au 5 février 2019.

Dans le cadre de cette cession, Mme [F] a consenti à M. [W] une garantie de passif, d'un montant plafonné à 15 000 euros, avec un seuil de déclenchement fixé à 5000 euros.

M. [W] qui n'a procédé à aucun des versements convenus au titre du crédit-vendeur, a, par courrier en date du 29 octobre 2018, sollicité une révision du prix de vente des actions à hauteur d'au moins un tiers.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 30 octobre 2018, Mme [G] [F] a vainement mis en demeure M. [W] de s'acquitter des sommes dues.

Par acte du 12 mars 2019, Mme [G] [F] a fait assigner M. [W] en référé devant le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence, aux fins d'obtenir le paiement du solde du prix de vente. Elle s'est désistée de cette instance, désistement constaté par ordonnance du 28 mai 2019.

Par exploit d'huissier en date du 8 juillet 2020, M. [W] et la SAS L'As du poulet ont fait assigner Mme [G] [F] devant le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence, aux fins d'obtenir :

- la réduction du prix de cession des actions de 15 000 euros au titre de la garantie de passif,

- la condamnation de Mme [F] à payer à M. [W] les sommes de 42 000 euros à titre de dommages et intérêts pour dol, de 10 000 euros en réparation du préjudice financier, avec réduction corrélative du prix de cession à zéro euro, de 10 000 euros au titre du préjudice moral,

- la condamnation de Mme [F] à verser à la SAS L'as du poulet la somme de 9 750 euros en réparation du préjudice économique résultant de l'augmentation du loyer, la somme de 7 200 euros au titre des arriérés de loyer, et la somme de 3 000 euros au titre des frais d'avocat.

Mme [F] a conclu au rejet des demandes de M. [W] et à la condamnation de ce dernier au paiement de la somme de 30000 euros au titre du solde du prix de cession outre 10000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Par jugement du 27 septembre 2021, le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence a :

- débouté M. [O] [W] et la SAS L'As du poulet de l'ensemble de leurs demandes,

- condamné M. [O] [W] à payer la somme de 30 000 euros à Mme [G] [F] assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 novembre 2018, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, laquelle prendra effet 8 jours après signification du jugement,

- débouté Mme [G] [F] de sa demande en dommages et intérêts au titre d'une procédure abusive,

- débouté pour le surplus les parties de toutes leurs autres demandes, fins et conclusions,

- condamné M. [O] [W] à payer à Mme [G] [F] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que l'exécution provisoire du jugement est de droit,

- mis les dépens de l'instance, en ce compris les frais de greffe liquidés à la somme de 84,48 euros TTC dont TVA 14,08 euros, à la charge de M. [O] [W].

Pour statuer ainsi le tribunal a considéré :

- s'agissant de la garantie de passif, que si l'acte de cession contenait une déclaration de la cédante selon laquelle la société était à jour de ses dettes, et bien que certains chèques aient été rejetés pour défaut de provision entraînant une interdiction bancaire, toutes les dettes et incidents signalés avaient été intégralement régularisés par Mme [F],

- s'agissant du dol et de la responsabilité contractuelle, qu'il ressortait de l'acte de cession que la situation financière réelle de la société, notamment la perte d'exploitation et les comptes sociaux, avait été expressément portée à la connaissance de M. [W], qui avait reconnu avoir eu accès à l'ensemble des documents comptables, de même que l'abandon par la cédante de son compte courant d'associé, de sorte que M. [W] ne pouvait soutenir que le prix de vente fixé librement entre les parties n'avait pas tenu compte des difficultés de la société, que le dol allégué n'était donc pas constitué,

- s'agissant des manquements contractuels allégués, que la description du local commercial dans l'acte de cession correspondait parfaitement à celle du contrat de bail en vigueur, et que le cessionnaire avait reconnu avoir une parfaite connaissance du local tant dans sa consistance que dans l'état d'entretien pour l'avoir personnellement visité, en sorte qu'aucune négligence fautive ne pouvait être imputée à la cédante à ce titre,

- s'agissant de l'obligation de bonne foi, que Mme [F] avait communiqué tous les éléments nécessaires à l'appréciation de la situation de la société, tant financiers qu'administratifs et contractuels, satisfaisant ainsi à ses obligations,

- que M. [W] ne pouvait se prévaloir d'une exception d'inexécution, Mme [F] ayant respecté l'intégralité de ses engagements contractuels, et qu'il devait en conséquence être condamné au paiement du solde du prix de cession,

- qu'au regard de ce qui précède aucune faute délictuelle ne pouvait être imputée à Mme [F].

M. [O] [U] [W] et la SAS L'as du poulet ont relevé appel de cette décision par déclaration du 19 octobre 2021.

Par conclusions déposées et notifiées le 27 mars 2024, M. [O] [U] [W] et la SAS L'As du poulet demandent à la cour de :

- Déclarer M. [E] [W] et la SAS L'As du poulet recevables et bien fondés en leur appel,

En conséquence :

- Infirmer le jugement déféré, rendu par le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence le 27 septembre 2021, en ce qu'il a :

- débouté M. [W] et la SAS L'As du poulet de l'ensemble de leurs demandes,

- condamné M. [W] à payer la somme de 30 000 euros à Mme [F], assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 novembre 2018, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, laquelle prendra effet 8 jours après signification du jugement,

- condamné M. [W] à payer à Mme [F] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que l'exécution provisoire du jugement est de droit,

- mis les dépens de l'instance à la charge de M. [W].

Statuant à nouveau :

- Rejeter toutes fins, moyens et conclusions contraires,

- Dire et juger M. [O] [W] et la SAS L'As du poulet recevables et bien fondés en leurs demandes,

Au titre de la garantie de passif :

- Dire et juger que Mme [G] [F] a manqué à son obligation de sincérité au titre de la garantie de passif souscrite,

- En conséquence, dire et juger que le prix de cession des actions est réduit de 15 000 euros, en application de la garantie souscrite,

Au titre du dol et/ou de la responsabilité contractuelle :

- Dire et juger que Mme [G] [F] a dissimulé intentionnellement des informations déterminantes à M. [O] [W] et s'est rendue coupable de dol,

- Dire et juger que Mme [G] [F] a commis de graves manquements contractuels,

- En conséquence, condamner Mme [G] [F] à payer à M. [O] [W] les sommes suivantes :

- 10 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de l'excès ou de la réduction de prix,

- 10 000 euros en réparation du préjudice financier,

- Réduire et fixer le prix de cession à la somme de 0 euro,

Au titre de la bonne foi contractuelle :

- Dire et juger que Mme [G] [F] a manqué à son obligation de bonne foi vis-à-vis de M. [O] [W],

- En conséquence, condamner Mme [G] [F] à payer à M. [O] [W] la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral,

Au titre de l'exception d'inexécution :

- Dire et juger que M. [O] [W] est légitime à s'être prévalu de l'exception d'inexécution de son obligation de paiement du solde du prix dans le cadre du crédit vendeur,

Au titre de la faute délictuelle :

- Dire et juger que Mme [G] [F] a commis une faute délictuelle vis-à-vis de la société L'As du poulet,

- En conséquence, condamner Mme [G] [F] à payer à la société L'As du poulet les sommes suivantes :

- 9 750 euros en réparation du préjudice économique au titre du supplément de loyer réglé entre novembre 2018 et février 2020 pour la seconde partie du local,

- 7 200 euros au titre du préjudice subi correspondant au montant des arriérés de loyers payés par la société L'As du poulet pour le compte de La Cave de Saint-Cannat,

- 3 000 euros en réparation du préjudice économique au titre des frais d'avocat exposés dans la procédure contre son bailleur,

- Débouter Mme [G] [F] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- Condamner Mme [G] [F] à payer la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner Mme [G] [F] aux entiers dépens de première instance et de l'instance d'appel,

- Confirmer le jugement déféré, rendu par le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence le 27 septembre 2021, en ce qu'il a débouté Mme [F] de sa demande de dommages et intérêts au titre d'une procédure abusive et débouté, pour le surplus, les parties de toutes leurs autres demandes, fins et conclusions.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 20 mai 2025, Mme [G] [F] demande à la cour de :

- Recevoir Mme [F] en ses conclusions et la dire bien fondée.

- Confirmer le jugement querellé en ce qu'il a :

- débouté M. [W] et la SAS L'As du poulet de l'ensemble de leurs demandes ;

- condamné M. [W] à payer la somme de 30 000 euros à Mme [F], assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 novembre 2018, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, laquelle prendra effet 8 jours après signification du jugement ;

- condamné M. [W] à payer à Mme [F] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- mis les dépens de l'instance à la charge de M. [W].

- Réformer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [F] de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive et, statuant à nouveau :

- En application de l'article 32-1 du code de procédure civile, condamner M. [O] et [E] [W] à payer à Mme [G] [F] la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- Assortir cette condamnation d'une astreinte de 300 euros par jour de retard, laquelle prendra effet 8 jours après signification du jugement, sur une période de 30 jours,

En tout état :

- Condamner M. [O] et [E] [W] à payer à Mme [G] [F] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

L'instruction du dossier a été clôturée par une ordonnance du 27 mai 2025.

MOTIFS

M. [W] prétend qu'alors que la cédante avait déclaré dans l'acte de cession que la société cédée n'avait aucune dette, qu'elle avait été gérée de manière rigoureuse, que les déclarations fiscales et sociales avaient été déposées dans les délais, qu'elle n'était à l'origine d'aucun fait pouvant engager sa responsabilité, que les comptes et bilans remis au cessionnaire étaient sincères et donnaient une image fidèle, il avait découvert, très rapidement après la cession, de nombreux problèmes qui avaient été dissimulés par la cédante et auxquels il avait dû faire face, et en particulier:

- une absence de trésorerie et une situation proche de l'état de cessation des paiements,

- des factures impayées antérieures à la cession pour un montant total de 3203,32 euros, dont un arriéré de cotisations ayant entraîné la résiliation du contrat d'assurance par la société Allianz,

- le rejet de 6 chèques d'un montant total de 4502,81 euros, sanctionné par une interdiction bancaire de la société,

- une amende fiscale de 1200 euros afférente à la période antérieure à la cession, ayant donné lieu à un avis à tiers détenteur notifié après la cession,

- le non-dépôt des comptes sociaux annuels et l'impossibilité pour le nouvel expert comptable d'obtenir les documents comptables relatifs aux précédents exercices,

- l'arrêt de l'activité du fonds de commerce depuis plus de deux mois,

- la non-remise d'une rôtissoire d'une valeur de 3412 euros HT, mentionnée dans l'acte de cession.

Il prétend en outre avoir découvert plusieurs mois après la cession que le bail cédé ne portait pas sur la totalité des locaux exploités par la société l'As du poulet, dont une partie faisait l'objet d'un autre bail consenti à une autre société, la Cave de Saint-Cannat, également détenue par Mme [F], et qu'il existait un litige avec le bailleur concernant la destination du bail.

En considération de ces griefs, M. [W] sollicite diverses indemnisations en sa faveur et au profit de la société cédée, sur le fondement de la garantie de passif stipulée à l'acte de cession, d'un dol commis à son encontre par Mme [F], d'un manquement de la cédante à son obligation de bonne foi, d'une exception d'inexécution, d'une faute délictuelle commise à l'encontre de la société cédée.

Sur les demandes fondées sur la garantie de passif :

Aux termes de la garantie de passif stipulée à l'acte de cession, le cédant garantit au cessionnaire le remboursement de toute dette dont l'origine serait antérieure à la signature de l'acte de cession et dont le cessionnaire n'aurait pas eu connaissance.

L'acte prévoit que les sommes dues par le garant à l'acquéreur au titre de la garantie prendront la forme d'une réduction de prix entre les mains de l'acquéreur tant que le prix n'aura pas été intégralement payé et ensuite seront payées à titre de remboursement.

Il est également stipulé un seuil de déclenchement de la garantie d'un montant global de 5000 euros et un plafond de 15000 euros.

Il s'évince de l'essence même de la garantie de passif que cette garantie ne peut couvrir que les dettes non régularisées par la cédante, qui constituent un passif demeurant à la charge de la société.

D'autre part, la garantie de passif telle que définie au contrat liant les parties ne garantit pas la non-présentation d'actifs, comme la prétendue non-remise d'un matériel visé à l'acte de cession.

La prétendue insincérité des déclarations faites par le cédant à l'article du contrat consacré à la garantie de passif ne peut donner lieu à indemnisation sur ce fondement que dans la mesure où cette insincérité se traduit par la révélation d'un passif supporté par la société et ayant une origine antérieure à la cession.

S'agissant des chèques rejetés pour défaut de provision, les appelants reconnaissent en page 14 de leurs écritures que Mme [F] a régularisé l'ensemble des incidents de chèque le 12 octobre 2018.

S'agissant des factures impayées antérieures à la cession, les appelants justifient des dettes suivantes:

- suivant mise en demeure du 31 juillet 2018, arriéré de cotisations d'un montant de 1275,79 euros ayant donné lieu à la résiliation le 9 juillet 2018 par la compagnie Allianz du contrat d'assurance n°57385949,

- suivant mise en demeure du 13 septembre 2018 visant une facture du 28 mai 2018, arriéré de cotisations d'un montant de 386,13 euros au titre d'un autre contrat Allianz.

Mme [F] reconnaît par ailleurs dans ses écritures que la facture de la société LC équipement du 25 septembre 2017 d'un montant de 445,20 euros était 'restée en suspens'.

Aucun justificatif n'est produit concernant une dette de 1200 euros auprès d'un fournisseur de poulet, invoquée par les appelants sans autre précision.

Les appelants produisent par ailleurs un courrier de la société Engie en date du 24 juillet 2018 faisant état d'un prélèvement de 170,70 euros rejeté par l'établissement bancaire pour le motif 'compte clôturé'.

Il appartient à la société cédée qui poursuit les contrats en cours d'honorer les prélèvements du fournisseur d'énergie ordonnés postérieurement à la cession.

Il ne ressort pas de la pièce produite par les appelants que le prélèvement rejeté serait antérieur à la cession.

Il est enfin justifié d'une amende fiscale de 1200 euros ayant fait l'objet d'une mise en demeure du 31 octobre 2018 et d'un avis à tiers détenteur du 19 février 2019.

Il résulte de ces pièces que la pénalité, dont la cause n'est pas précisée, est afférente à la période de novembre 2016 à décembre 2017, de sorte qu'il s'agit bien d'une dette entrant dans le champ de la garantie de passif.

Le total des dettes justifiées susceptibles d'entrer dans le champ de la garantie de passif s'élève en conséquence à 3307,12 euros, détaillé comme suit :

- facture LC équipement : 445,20 euros

- mises en demeure Allianz : 1275,79 + 386,13 euro

- amende fiscale : 1200 euros.

Ce montant étant inférieur au seuil de déclenchement de la garantie de passif, M. [W] sera débouté de sa demande à ce titre.

Sur les demandes fondées sur le dol :

M. [W] affirme que Mme [F] a volontairement dissimulé des informations déterminantes sur la situation financière et sur la gestion de la société, ainsi que sur le contentieux relatif aux locaux loués, et s'est rendue coupable d'une réticence dolosive, sans laquelle il n'aurait pas acquis la totalité du capital social au prix de 40000 euros.

Il fait valoir qu'il est admis par la jurisprudence que la partie lésée par un dol peut demander l'indemnisation de son préjudice sans avoir à solliciter l'annulation de la cession et sollicite l'allocation d'une somme de 10000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice financier ainsi qu'une réduction du prix de cession à zéro euro justifiant la restitution de la somme de 10000 euros versée à ce titre.

Aux termes de l'article 1137 du code civil, le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des manoeuvres ou des mensonges.

Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.

Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation.

M. [W] prétend que la valeur de la société cédée était nulle compte tenu du fait qu'elle n'avait aucune antériorité, qu'au 31 décembre 2017 sa marge commerciale était extrêmement faible et son résultat négatif et que sa survie reposait sur un apport en compte courant de Mme [F] d'un montant de 16749 euros.

Ainsi que l'ont justement relevé les premiers juges, ces circonstances étaient parfaitement connues de M. [W] puisqu'expressément énoncées à l'acte de cession, qui mentionne que la société est propriétaire de son fonds de commerce de rôtisserie pour l'avoir créé lors de sa constitution en novembre 2016, que le bilan comptable clos au 31 décembre 2017 fait ressortir un chiffre d'affaires net de 59801 euros pour un total de charges d'exploitation de 78440 euros et que le résultat d'exploitation est une perte de 19095 euros.

Le cessionnaire était également informé de l'impossibilité pour la société de rembourser le compte courant d'associé de Mme [F], l'acte mentionnant l'abandon définitif par cette dernière de sa créance de compte courant d'un montant de 16749,25 euros.

La seule existence de quelques dettes antérieures impayées est insuffisante à caractériser une intention dolosive de Mme [F] destinée à dissimuler au cessionnaire la valeur réelle de la société.

M. [W] reproche à Mme [F] de lui avoir dissimulé 'le contentieux relatif aux locaux loués'.

Les pièces produites par les appelants font apparaître un litige apparu entre le bailleur et M. [W] postérieurement à la cession, lorsque la société l'As du poulet a souhaité changé la destination du local précédemment occupé par la société La Cave de Saint-Cannat, ce à quoi le bailleur s'est opposé par mail du 19 octobre 2018.

Il n'est justifié d'aucun litige né entre la société l'As du poulet et le bailleur, antérieurement à la cession, et qui aurait été sciemment dissimulé par Mme [F].

Les demandes fondées sur le dol seront en conséquence rejetées, le jugement étant confirmé sur ce point.

Sur le manquement à l'obligation de bonne foi :

M. [W] expose qu'au moment de la cession, la société l'As du poulet exploitait un local constitué de deux parties communicantes, l'une d'une superficie de 20 m² consacrée à l'activité de rôtisserie et l'autre d'une superficie de 30 m² utilisée comme espace de restauration pour la partie snack.

Il prétend avoir découvert postérieurement à la cession que, bien que communicantes, ces deux parties constituaient des locaux distincts faisant l'objet de deux baux différents, celui consenti à la société l'As du poulet ne portant que sur la partie rôtisserie tandis que le local de 30 m² attenant avait été donné à bail par le même bailleur à la société La Cave de Saint-Cannat, dont Mme [F] était également associée, et qui avait été mise en sommeil.

Il reproche à Mme [F] d'avoir manqué à son obligation de bonne foi en n'attirant pas son attention sur cette situation.

Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, la description du local commercial dans l'acte de cession correspond parfaitement à celle du contrat de bail en vigueur et mentionne bien une superficie de 20 m².

Il ressort en outre des échanges intervenus par mail le 4 juillet 2018, soit avant la cession, entre le rédacteur de l'acte de cession et M. [W], que ce dernier a interrogé le rédacteur sur le fait que le projet évoque un bail portant sur un local de 20 m² alors qu'il y a deux locaux dont l'un fait au moins 35 m², ce à quoi le rédacteur lui a répondu que ce qui figurait dans l'acte de vente avait été pris dans le bail commercial et que les vendeurs devaient vérifier qu'il s'agissait du bon bail.

Il apparaît ainsi que M. [W] avait bien connaissance de l'existence de deux locaux et de deux baux. Il évoque en outre dans cet échange un loyer mensuel de 1000 euros, qui correspond au loyer HT et HC dû pour les deux locaux, ce qui contredit l'affirmation des appelants selon laquelle M. [W] avait été entretenu dans la croyance qu'il avait la possibilité d'exploiter l'intégralité du local pour un loyer de 500 euros HT.

Ces échanges confirment l'allégation de Mme [F] selon laquelle l'acquéreur souhaitait reprendre le bail commercial du local attenant à celui mentionné dans l'acte de cession. Les appelants versent d'ailleurs aux débats le nouveau bail signé le 29 mai 2020 entre la société BMG et la société l'As du poulet, portant sur les deux locaux réunis, moyennant un loyer de 1000 euros par mois charges comprises.

Il a par ailleurs été vu précédemment que les litiges ayant opposé la société l'As du poulet au bailleur, et qui se sont résolus par un protocole d'accord et la signature du nouveau bail du 29 mai 2020, étaient nés postérieurement à la cession, qu'il n'était justifié d'aucune difficulté dans l'exécution du bail antérieurement à la cession, de sorte que le reproche fait par M. [W] à Mme [F] de ne pas l'avoir informé des difficultés rencontrées avec le bailleur s'agissant de la destination du bail, n'est pas justifié.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [W] de sa demande en dommages et intérêts fondée sur un prétendu manquement de la cédante à son obligation de bonne foi.

Sur l'exception d'inexécution :

Aux termes de l'article 1219 du code civil, une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.

Compte tenu des régularisations opérées par la cédante concernant les chèques impayés et la levée de l'interdiction bancaire, du montant des dettes antérieures impayées, inférieur au seuil de déclenchement de la garantie de passif, les seuls manquements retenus à l'encontre de la cédantes sont d'une gravité insuffisante pour légitimer l'exception d'inexécution invoquée par le cessionnaire.

M. [W] ne justifie par ailleurs d'aucune réclamation adressée à la cédante concernant la prétendue non-remise d'une rôtissoire, non évoquée dans son mail de récriminations adressé le 29 octobre 2018 au conseil de Mme [F].

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné M. [W] au paiement du solde du prix de cession sous astreinte.

Sur les demandes d'indemnisation de la société l'As du poulet :

Aucune faute n'ayant été retenue à l'encontre de Mme [F] concernant la situation locative, connue de M. [W] dès avant la cession, et concernant le litige relatif à la destination du bail, apparu plusieurs mois après la cession et non imputable à la cédante, c'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté les demandes de la société l'As du poulet en remboursement des loyers réglés pour le second local et des frais d'avocat.

Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive :

Mme [F] ne démontre pas que l'exercice par Mme [W] de son droit d'agir en justice aurait dégénéré en abus et sera déboutée de sa demande en dommages et intérêts à ce titre.

Partie succombante, M. [W] sera condamné aux dépens ainsi qu'au paiement d'une indemnité pour frais irrépétibles d'appel sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [O] [E] [W] à payer à Mme [G] [F] la somme de 3000 euros en application de dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [W] aux dépens.

Le Greffier, La Présidente,

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