CA Lyon, ch. soc. b, 10 octobre 2025, n° 22/06844
LYON
Arrêt
Autre
AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR
N° RG 22/06844 - N° Portalis DBVX-V-B7G-ORYV
[Y]
C/
S.A.S. ACTION FROID ET CLIMATISATION (AFC)
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de LYON
du 20 Septembre 2022
RG : 19/02645
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE B
ARRÊT DU 10 OCTOBRE 2025
APPELANT :
[O] [Y]
né le 16 Octobre 1981 à [Localité 5]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Me Arême TOUAHRIA, avocat au barreau de LYON
INTIMÉE :
S.A.S. ACTION FROID ET CLIMATISATION (AFC)
N° SIRET: 411 195 431 00035
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Carole GOUTAUDIER, avocat au barreau de LYON
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 19 Septembre 2025
Présidée par Catherine CHANEZ, Conseillère magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Mihaela BOGHIU, Greffière.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
- Béatrice REGNIER, présidente
- Catherine CHANEZ, conseillère
- Régis DEVAUX, conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 10 Octobre 2025 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Béatrice REGNIER, Présidente et par Mihaela BOGHIU, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
********************
EXPOSE DU LITIGE
La société Action Froid et Climatisation (ci-après, la société) est spécialisée dans l'installation d'équipements thermiques et de climatisation.
Elle applique la convention collective nationale des entreprises d'installation sans fabrication, y compris entretien, réparation et dépannage de matériel aéraulique, thermique et frigorifique et employait au moins 11 salariés au moment du licenciement.
Elle a recruté M. [O] [Y] à compter du 10 juin 2013, suivant contrat de travail à durée déterminée, en qualité de technicien de maintenance et SAV. La relation de travail s'est poursuivie par un contrat à durée indéterminée à compter du 20 décembre 2013.
Du 23 janvier au 12 février 2019, puis de nouveau à compter du 25 février suivant, M. [Y] a été placé en arrêt de travail pour maladie.
Lors de la visite de reprise du 13 mars 2019, le médecin du travail a déclaré M. [Y] inapte à son poste de travail avec dispense de l'obligation de reclassement, en précisant « Tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé. L'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».
Par courrier du 17 mai 2019, la société a notifié à M. [Y] son licenciement pour inaptitude dans les termes suivants :
« (') Nous vous informons par la présente que nous sommes dans l'obligation de vous notifier votre licenciement pour inaptitude à occuper votre poste, constatée le 13 mars 2019 par le médecin du travail et l'impossibilité de vous reclasser.
Les raisons qui nous amènent à prononcer votre licenciement sont les suivantes :
A l'issue de votre arrêt maladie, vous avez passé une visite médicale en date du 13 mars 2019. A l'issue de cette visite médicale, le médecin du travail a rendu un avis d'inaptitude définitive. Il a expressément mentionné sur l'avis d'inaptitude :
« Cas de dispense de reclassement (articles L1226-2 1, L1226-12 et L1226-20 du code du travail) Tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé.»
Nous avons immédiatement recherché toutes les solutions de reclassement afin de vous maintenir à un poste adapté aux préconisations du médecin du travail. Nous vous avons alors invité dans ce cadre à nous transmettre votre curriculum vitae actualisé et remplir un bilan de reclassement afin de connaître au mieux vos souhaits de reclassement. Nous avons bien réceptionné vos éléments et souhaits de reclassement et avons effectué une recherche de reclassement sur la base des informations en notre possession.
Compte tenu de la mention expresse portée par le médecin du travail dispensant la société AFC de l'obligation de reclassement indiquant que « Tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé », mais également de vos souhaits et l'absence de poste disponible compatible avec les préconisations du médecin du travail, votre reclassement est impossible au sein de notre Société. Ainsi, il s'avère qu'aucun poste approprié à vos capacités conformes aux conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur votre aptitude à exercer l'une des tâches existantes dans notre petite entreprise, au besoin, par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations ou transformations de poste de travail et conforme à vos souhaits, n'est actuellement disponible.
Nous avons cependant étendu nos recherches auprès des Sociétés du Groupe. Il a été identifié un poste d'opérateur en désamiantage au sein de la Société SET ENVIRONNEMENT mais sur la région parisienne et un poste d'ouvrier de chantier au sein de la Société GET MAINTENANCE, également basé en région parisienne. Nous avons pris connaissance de vos souhaits et notamment du fait que vous n'étiez pas mobile géographiquement et nous ne pouvons donc pas vous proposer ces postes.
La Société GREEN ACQUISITION nous a indiqué, quant à elle, ne pas avoir de poste à pourvoir.
Aussi, et après consultation des représentants du personnel, les raisons pour lesquels votre reclassement suite à votre inaptitude médicalement constatée est impossible ont été portées à votre connaissance par courrier du 29 avril 2019.
Compte tenu de la situation, nous sommes donc contraints de vous notifier votre licenciement du fait de votre inaptitude définitive médicalement constatée et l'impossibilité de procéder à votre reclassement. (') »
Par requête reçue au greffe le 15 octobre 2019, M. [Y] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon afin de contester le bien-fondé de son licenciement.
Par jugement du 20 septembre 2022, le conseil de prud'hommes, en sa formation de départage, a notamment :
Débouté M. [Y] de l'intégralité de ses demandes ;
Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné M. [Y] aux dépens.
Par déclaration du 11 octobre 2022, M. [Y] a interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées, déposées au greffe par voie électronique le 13 décembre 2022, il demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de :
- A titre principal, condamner la société à lui verser les sommes suivantes :
15 224,52 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;
4 367,33 euros à titre de rappel de salaire sur l'indemnité spéciale de licenciement ;
5 074,84 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 507,48 euros de congés payés afférents ;
30 449,04 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;
- A titre subsidiaire, condamner la société à lui verser les sommes suivantes :
7 612,26 euros à titre de dommages et intérêts du fait de la détérioration de son état de santé due à la faute de l'employeur ;
4 367,33 euros à titre de rappel de salaire sur l'indemnité spéciale de licenciement ;
5 074,84 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 507,48 euros de congés payés afférents ;
15 224,52 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- Condamner la société à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner la société aux dépens de l'instance.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées, déposées au greffe par voie électronique le 7 mars 2023, la société demande à la cour de confirmer le jugement querellé et, statuant à nouveau, de condamner M. [Y] à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à prendre en charge les dépens d'instance.
La clôture est intervenue le 24 juin 2025.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la cour rappelle qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de « constatations » ou de « dire » qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions dans la mesure où elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques ou qu'elles constituent en réalité des moyens.
1-Sur le harcèlement moral
Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L.1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
En l'espèce, M. [Y] soutient avoir été victime de faits de harcèlement moral de la part des dirigeants de la société suite à son audition le 21 janvier 2019 par la police dans le cadre d'une enquête diligentée après dépôt de plainte de l'employeur à l'encontre d'une autre salariée.
Il se prévaut de multiples appels téléphoniques destinés à faire pression sur lui pour qu'il revienne sur ses déclarations, de menaces et d'intimidations, notamment lors d'un entretien avec les dirigeants le 23 janvier, et même du chantage exercé sur lui après son licenciement, soit en dehors de tout lien contractuel. Il ne démontre toutefois pas la matérialité de tels agissements.
Le salarié indique avoir été placé en arrêt de travail car son état de santé aurait été largement affecté par le harcèlement moral. Dans les pièces médicales qu'il verse aux débats, sont relatées les circonstances qu'il expose à la cour, mais aucun médecin ne fait part de constatations cliniques qui établiraient un lien entre celles-ci et le mal être qu'il exprime.
A son retour, il aurait été privé en partie de ses outils de travail et un nouveau véhicule lui aurait été assigné. Alors qu'il travaillait habituellement seul, il aurait évolué en binôme. Ces faits ne sont pas contestés par l'employeur.
Ces circonstances, de même que le constat d'une brutale dégradation de l'état de santé du salarié alors qu'il évoluait au sein de l'entreprise sans difficulté particulière depuis plus de 5 ans, pris en leur ensemble, laissent supposer l'existence d'une situation de harcèlement moral au sens de l'article L.1152-1 du code du travail.
En réponse, sur la période postérieure au premier arrêt maladie, l'employeur expose que les véhicules ne sont pas attribués expressément aux salariés et qu'il en loue régulièrement. Il fait valoir que la photographie produite par M. [Y] du véhicule qu'il utilisait avant son arrêt maladie montre d'ailleurs une voiture différente de celle qui lui avait été attribuée en 2017 (pièce 52). Lors de son arrêt, le véhicule avait été remis à un autre salarié.
En tout état de cause, ainsi que l'employeur le fait remarquer, il n'apparaît pas que ce changement a été de nature à empêcher M. [Y] de travailler, ni à générer une quelconque difficulté pour lui.
Quant à l'outillage, la société argue avec pertinence que le salarié n'a pas sollicité qu'il soit complété. Une réclamation en ce sens apparaît en effet seulement dans un courrier que M. [Y] a adressé le 8 mars 2019 à la société SET Environnement, soit pendant son second arrêt pour maladie.
Enfin, la société verse aux débats l'attestation de M. [B], responsable technique maintenance dépannage. Celui-ci indique que, étant dans l'incertitude quant à la date de retour de M. [Y], il a recruté un salarié en contrat de travail à durée déterminée et a programmé un chantier nécessitant une intervention en équipe sur plusieurs jours pour son retour, afin de ne pas se trouver face à des clients insatisfaits s'il ne reprenait pas le 13 février comme prévu. M. [Y] ne conteste pas la nature du chantier qui lui a été confié le 13 février.
L'employeur justifie ainsi que les décisions qu'il a prises étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [Y] de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral.
2-Sur le licenciement
M. [Y] demande à la cour de juger que le licenciement est nul au motif qu'il a été victime de harcèlement moral.
Subsidiairement, il soutient que son inaptitude a une cause professionnelle puisqu'elle est la conséquence du harcèlement moral dont il a été victime, si bien que le licenciement serait sans cause réelle et sérieuse.
Il fait valoir également que son inaptitude résulterait du comportement fautif de l'employeur, à savoir le harcèlement moral dont il a fait preuve à son égard.
La cour n'ayant pas retenu l'existence de faits de harcèlement moral, M. [Y], qui ne développe aucun autre moyen à l'appui de ses prétentions, sera débouté de ses demandes relatives à la rupture, conformément au jugement.
3-Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Les dépens de première instance et d'appel seront laissés à la charge de M. [Y].
L'équité commande de le condamner à payer à la société la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour l'instance d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Laisse les dépens d'appel à la charge de M. [O] [Y] ;
Condamne M. [O] [Y] à payer à la société Action Froid et Climatisation la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel .
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
RAPPORTEUR
N° RG 22/06844 - N° Portalis DBVX-V-B7G-ORYV
[Y]
C/
S.A.S. ACTION FROID ET CLIMATISATION (AFC)
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de LYON
du 20 Septembre 2022
RG : 19/02645
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE B
ARRÊT DU 10 OCTOBRE 2025
APPELANT :
[O] [Y]
né le 16 Octobre 1981 à [Localité 5]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Me Arême TOUAHRIA, avocat au barreau de LYON
INTIMÉE :
S.A.S. ACTION FROID ET CLIMATISATION (AFC)
N° SIRET: 411 195 431 00035
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Carole GOUTAUDIER, avocat au barreau de LYON
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 19 Septembre 2025
Présidée par Catherine CHANEZ, Conseillère magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Mihaela BOGHIU, Greffière.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
- Béatrice REGNIER, présidente
- Catherine CHANEZ, conseillère
- Régis DEVAUX, conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 10 Octobre 2025 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Béatrice REGNIER, Présidente et par Mihaela BOGHIU, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
********************
EXPOSE DU LITIGE
La société Action Froid et Climatisation (ci-après, la société) est spécialisée dans l'installation d'équipements thermiques et de climatisation.
Elle applique la convention collective nationale des entreprises d'installation sans fabrication, y compris entretien, réparation et dépannage de matériel aéraulique, thermique et frigorifique et employait au moins 11 salariés au moment du licenciement.
Elle a recruté M. [O] [Y] à compter du 10 juin 2013, suivant contrat de travail à durée déterminée, en qualité de technicien de maintenance et SAV. La relation de travail s'est poursuivie par un contrat à durée indéterminée à compter du 20 décembre 2013.
Du 23 janvier au 12 février 2019, puis de nouveau à compter du 25 février suivant, M. [Y] a été placé en arrêt de travail pour maladie.
Lors de la visite de reprise du 13 mars 2019, le médecin du travail a déclaré M. [Y] inapte à son poste de travail avec dispense de l'obligation de reclassement, en précisant « Tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé. L'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».
Par courrier du 17 mai 2019, la société a notifié à M. [Y] son licenciement pour inaptitude dans les termes suivants :
« (') Nous vous informons par la présente que nous sommes dans l'obligation de vous notifier votre licenciement pour inaptitude à occuper votre poste, constatée le 13 mars 2019 par le médecin du travail et l'impossibilité de vous reclasser.
Les raisons qui nous amènent à prononcer votre licenciement sont les suivantes :
A l'issue de votre arrêt maladie, vous avez passé une visite médicale en date du 13 mars 2019. A l'issue de cette visite médicale, le médecin du travail a rendu un avis d'inaptitude définitive. Il a expressément mentionné sur l'avis d'inaptitude :
« Cas de dispense de reclassement (articles L1226-2 1, L1226-12 et L1226-20 du code du travail) Tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé.»
Nous avons immédiatement recherché toutes les solutions de reclassement afin de vous maintenir à un poste adapté aux préconisations du médecin du travail. Nous vous avons alors invité dans ce cadre à nous transmettre votre curriculum vitae actualisé et remplir un bilan de reclassement afin de connaître au mieux vos souhaits de reclassement. Nous avons bien réceptionné vos éléments et souhaits de reclassement et avons effectué une recherche de reclassement sur la base des informations en notre possession.
Compte tenu de la mention expresse portée par le médecin du travail dispensant la société AFC de l'obligation de reclassement indiquant que « Tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé », mais également de vos souhaits et l'absence de poste disponible compatible avec les préconisations du médecin du travail, votre reclassement est impossible au sein de notre Société. Ainsi, il s'avère qu'aucun poste approprié à vos capacités conformes aux conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur votre aptitude à exercer l'une des tâches existantes dans notre petite entreprise, au besoin, par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations ou transformations de poste de travail et conforme à vos souhaits, n'est actuellement disponible.
Nous avons cependant étendu nos recherches auprès des Sociétés du Groupe. Il a été identifié un poste d'opérateur en désamiantage au sein de la Société SET ENVIRONNEMENT mais sur la région parisienne et un poste d'ouvrier de chantier au sein de la Société GET MAINTENANCE, également basé en région parisienne. Nous avons pris connaissance de vos souhaits et notamment du fait que vous n'étiez pas mobile géographiquement et nous ne pouvons donc pas vous proposer ces postes.
La Société GREEN ACQUISITION nous a indiqué, quant à elle, ne pas avoir de poste à pourvoir.
Aussi, et après consultation des représentants du personnel, les raisons pour lesquels votre reclassement suite à votre inaptitude médicalement constatée est impossible ont été portées à votre connaissance par courrier du 29 avril 2019.
Compte tenu de la situation, nous sommes donc contraints de vous notifier votre licenciement du fait de votre inaptitude définitive médicalement constatée et l'impossibilité de procéder à votre reclassement. (') »
Par requête reçue au greffe le 15 octobre 2019, M. [Y] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon afin de contester le bien-fondé de son licenciement.
Par jugement du 20 septembre 2022, le conseil de prud'hommes, en sa formation de départage, a notamment :
Débouté M. [Y] de l'intégralité de ses demandes ;
Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné M. [Y] aux dépens.
Par déclaration du 11 octobre 2022, M. [Y] a interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées, déposées au greffe par voie électronique le 13 décembre 2022, il demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de :
- A titre principal, condamner la société à lui verser les sommes suivantes :
15 224,52 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;
4 367,33 euros à titre de rappel de salaire sur l'indemnité spéciale de licenciement ;
5 074,84 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 507,48 euros de congés payés afférents ;
30 449,04 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;
- A titre subsidiaire, condamner la société à lui verser les sommes suivantes :
7 612,26 euros à titre de dommages et intérêts du fait de la détérioration de son état de santé due à la faute de l'employeur ;
4 367,33 euros à titre de rappel de salaire sur l'indemnité spéciale de licenciement ;
5 074,84 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 507,48 euros de congés payés afférents ;
15 224,52 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- Condamner la société à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner la société aux dépens de l'instance.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées, déposées au greffe par voie électronique le 7 mars 2023, la société demande à la cour de confirmer le jugement querellé et, statuant à nouveau, de condamner M. [Y] à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à prendre en charge les dépens d'instance.
La clôture est intervenue le 24 juin 2025.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la cour rappelle qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de « constatations » ou de « dire » qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions dans la mesure où elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques ou qu'elles constituent en réalité des moyens.
1-Sur le harcèlement moral
Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L.1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
En l'espèce, M. [Y] soutient avoir été victime de faits de harcèlement moral de la part des dirigeants de la société suite à son audition le 21 janvier 2019 par la police dans le cadre d'une enquête diligentée après dépôt de plainte de l'employeur à l'encontre d'une autre salariée.
Il se prévaut de multiples appels téléphoniques destinés à faire pression sur lui pour qu'il revienne sur ses déclarations, de menaces et d'intimidations, notamment lors d'un entretien avec les dirigeants le 23 janvier, et même du chantage exercé sur lui après son licenciement, soit en dehors de tout lien contractuel. Il ne démontre toutefois pas la matérialité de tels agissements.
Le salarié indique avoir été placé en arrêt de travail car son état de santé aurait été largement affecté par le harcèlement moral. Dans les pièces médicales qu'il verse aux débats, sont relatées les circonstances qu'il expose à la cour, mais aucun médecin ne fait part de constatations cliniques qui établiraient un lien entre celles-ci et le mal être qu'il exprime.
A son retour, il aurait été privé en partie de ses outils de travail et un nouveau véhicule lui aurait été assigné. Alors qu'il travaillait habituellement seul, il aurait évolué en binôme. Ces faits ne sont pas contestés par l'employeur.
Ces circonstances, de même que le constat d'une brutale dégradation de l'état de santé du salarié alors qu'il évoluait au sein de l'entreprise sans difficulté particulière depuis plus de 5 ans, pris en leur ensemble, laissent supposer l'existence d'une situation de harcèlement moral au sens de l'article L.1152-1 du code du travail.
En réponse, sur la période postérieure au premier arrêt maladie, l'employeur expose que les véhicules ne sont pas attribués expressément aux salariés et qu'il en loue régulièrement. Il fait valoir que la photographie produite par M. [Y] du véhicule qu'il utilisait avant son arrêt maladie montre d'ailleurs une voiture différente de celle qui lui avait été attribuée en 2017 (pièce 52). Lors de son arrêt, le véhicule avait été remis à un autre salarié.
En tout état de cause, ainsi que l'employeur le fait remarquer, il n'apparaît pas que ce changement a été de nature à empêcher M. [Y] de travailler, ni à générer une quelconque difficulté pour lui.
Quant à l'outillage, la société argue avec pertinence que le salarié n'a pas sollicité qu'il soit complété. Une réclamation en ce sens apparaît en effet seulement dans un courrier que M. [Y] a adressé le 8 mars 2019 à la société SET Environnement, soit pendant son second arrêt pour maladie.
Enfin, la société verse aux débats l'attestation de M. [B], responsable technique maintenance dépannage. Celui-ci indique que, étant dans l'incertitude quant à la date de retour de M. [Y], il a recruté un salarié en contrat de travail à durée déterminée et a programmé un chantier nécessitant une intervention en équipe sur plusieurs jours pour son retour, afin de ne pas se trouver face à des clients insatisfaits s'il ne reprenait pas le 13 février comme prévu. M. [Y] ne conteste pas la nature du chantier qui lui a été confié le 13 février.
L'employeur justifie ainsi que les décisions qu'il a prises étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [Y] de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral.
2-Sur le licenciement
M. [Y] demande à la cour de juger que le licenciement est nul au motif qu'il a été victime de harcèlement moral.
Subsidiairement, il soutient que son inaptitude a une cause professionnelle puisqu'elle est la conséquence du harcèlement moral dont il a été victime, si bien que le licenciement serait sans cause réelle et sérieuse.
Il fait valoir également que son inaptitude résulterait du comportement fautif de l'employeur, à savoir le harcèlement moral dont il a fait preuve à son égard.
La cour n'ayant pas retenu l'existence de faits de harcèlement moral, M. [Y], qui ne développe aucun autre moyen à l'appui de ses prétentions, sera débouté de ses demandes relatives à la rupture, conformément au jugement.
3-Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Les dépens de première instance et d'appel seront laissés à la charge de M. [Y].
L'équité commande de le condamner à payer à la société la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour l'instance d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Laisse les dépens d'appel à la charge de M. [O] [Y] ;
Condamne M. [O] [Y] à payer à la société Action Froid et Climatisation la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel .
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,