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Décisions

CA Nîmes, 4e ch. com., 10 octobre 2025, n° 23/01918

NÎMES

Arrêt

Autre

CA Nîmes n° 23/01918

10 octobre 2025

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°227

N° RG 23/01918 - N° Portalis DBVH-V-B7H-I26Q

YM

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'[Localité 9]

18 avril 2023 RG :21/01488

S.C.I. ARC EN CIEL

C/

S.A.R.L. PAPILLON

Copie exécutoire délivrée

le 10/10/2025

à :

Me Guillaume DE PALMA

Me Maggy MANDEL-BLAISE

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

4ème chambre commerciale

ARRÊT DU 10 OCTOBRE 2025

Décision déférée à la cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'[Localité 9] en date du 18 Avril 2023, N°21/01488

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

M. Yan MAITRAL, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Christine CODOL, Présidente de Chambre

Agnès VAREILLES, Conseillère

Yan MAITRAL, Conseiller

GREFFIER :

Madame Isabelle DELOR, Greffière à la Chambre commerciale, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 08 Septembre 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 10 Octobre 2025.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

S.C.I. ARC EN CIEL société civile immobilière au capital de 1500 euros, dont le siège social est situé [Adresse 11], immatriculée au registre du commerce et des sociétés d'AVIGNON sous le numéro 534 022 751, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 10]

[Localité 7]

Représentée par Me Guillaume DE PALMA de la SCP D'AVOCATS INTER-BARREAUX DE PALMA-COUCHET, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON substitué par Me Me Alexia BERARD avocat au barreau D'AVIGNON

INTIMÉE :

S.A.R.L. PAPILLON, SARL au capital de 2000 euros, immatriculée sous le n° 793 020 496 du RCS de [Localité 17], prise en la personne de sa gérante en exercice, madame [P], y domiciliée en cette qualité,

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentée par Me Maggy MANDEL-BLAISE de la SARL S.P.E. ADEZIO LEGAL, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 28 Août 2025

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, le 10 Octobre 2025, par mise à disposition au greffe de la cour

EXPOSÉ

Vu l'appel interjeté le 6 juin 2023 par la SCI L'Arc en ciel à l'encontre du jugement rendu le 18 avril 2023 par le tribunal judiciaire d'Avignon dans l'instance n° RG 21/01488 ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 1er août 2025 par la SCI L'Arc en ciel, appelante à titre principal, intimée à titre incident, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 15 août 2025 par la SARL Papillon, intimée à titre principal, appelante à titre incident, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu l'ordonnance du 14 janvier 2025 de clôture de la procédure à effet différé au 28 août 2025.

***

Par acte sous seing privé du 22 février 2018, la société L'Arc en ciel a donné à bail commercial à la société Papillon des locaux situés [Adresse 15] à [Localité 16] [Adresse 1]) cadastré section BE n° [Cadastre 5] pour une durée de 9 ans à compter du 1er avril 2017 au loyer annuel de 9.900 euros ht payable en 4 termes égaux de 2.475 euros ht.

***

Par courrier du 11 février 2021, la société L'Arc en ciel, par l'intermédiaire de son assureur, a mis en demeure la société Papillon d'avoir à acquitter certaines sommes au titre des loyers, de la consommation d'eau et des taxes foncières.

***

Par acte du 26 mai 2021, la société L'Arc en ciel a fait assigner devant le tribunal de judiciaire d'Avignon la société Papillon en résiliation du contrat de bail commercial aux torts exclusifs de cette-dernière, en expulsion et en condamnation à lui payer une indemnité d'occupation ainsi qu'une somme au titre du solde des loyers, des charges de consommation d'eau, de la régularisation des loyers et de la taxe foncière, outre une somme au préjudice subi, et enfin des frais irrépétibles et dépens.

***

Par jugement du 18 avril 2023, le tribunal judiciaire d'Avignon a statué et :

« - Déclare irrecevable la demande de résiliation du bail commercial

- Condamne la société Arc en ciel aux dépens

- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile

- Déboute les parties du surplus de leurs demandes. »

***

La société L'Arc en ciel a relevé appel le 6 juin 2023 de ce jugement pour le voir infirmer, annuler, ou réformer en toutes ses dispositions.

***

Dans ses dernières conclusions, la société L' Arc en ciel, appelante principale, intimée incidente, demande à la cour, au visa des articles 1217, 1224, 1728, 1741 et suivants du code civil, de :

« Déclarer l'appel interjeté par la SCI L'arc-en-ciel recevable et bien fondé

Recevoir la SCI L'arc-en-ciel en toutes ses demandes, fins et conclusions

Débouter la SARL Papillon de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions

Y faisant droit,

Prononcer la résiliation judiciaire du bail commercial aux torts exclusifs de la SARL Papillon

Ordonner à défaut de restitution volontaire des lieux dans le mois de l'arrêt à venir, l'expulsion de la SARL Papillon et de tous occupants de son chef des lieux situés [Adresse 14] [Localité 16] ([Localité 18]) avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d'un serrurier

Condamner la SARL Papillon à payer à la SCI L'arc-en-ciel à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir et jusqu'à complète libération des lieux une indemnité d'occupation correspondant au montant du loyer contractuel, outre les taxes, charges et accessoires

Infirmer donc purement et simplement le jugement dont appel de ce chef

Condamner la SARL Papillon à payer à la SCI L'arc-en-ciel la somme de 1980 euros au titre des loyers impayés à ce jour, et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure en date du 11 février 2021

Infirmer donc purement et simplement le jugement dont appel de ce chef

Condamner la SARL Papillon à payer à la SCI L'arc-en-ciel la somme de 609,49 euros au titre de l'indexation des loyers

Infirmer donc purement et simplement le jugement dont appel de ce chef

Condamner la SARL Papillon à payer à la SCI L'arc-en-ciel les sommes de :

- 205,20 euros au titre des taxes foncières pour l'année 2018

- 240 euros au titre des taxes foncières pour l'année 2019

- 201 euros au titre des taxes foncières pour l'année 2020

- 248,40 euros au titre des taxes foncières pour l'année 2021

- 243,60 euros au titre des taxes foncières 2022

- 248,40 euros au titre des taxes foncières 2023

Infirmer donc purement et simplement le jugement dont appel de ce chef

Condamner la SARL Papillon à payer à la SCI L'arc-en-ciel la somme de 4341,44 euros, outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation

Infirmer donc purement et simplement le jugement dont appel de ce chef

Condamner la SARL Papillon à payer à la SCI L'arc-en-ciel la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des manquements contractuels

Infirmer donc purement et simplement le jugement dont appel de ce chef

Condamner la SARL Papillon à rembourser à la SCI L'arc-en-ciel la somme de 400 euros correspondant au coût des travaux réalisés le 28 avril 2021 de raccordement au compteur d'eau

Infirmer donc purement et simplement le jugement dont appel de ce chef

Condamner la SARL Papillon à payer à la SCI L'arc-en-ciel la somme de 4000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens de première instance et d'appel ».

Au soutien de ses prétentions, la société L'Arc en ciel, appelante principale, intimée incidente, expose que les loyers d'avril et mai 2020 soit la somme de 1 980 euros reste due outre l'indexation des loyers à compter d'avril 2020, dument réclamée par courrier du 12 avril 2021, soit la somme de 609,49 euros. Elle affirme également que l'intimée est redevable des taxes foncières pour les années 2018 à 2023, et ce, conformément au contrat de bail commercial et selon les justificatifs qu'elle produit notamment des services fiscaux. Enfin, selon elle, la société Papillon doit conformément aux dispositions contractuelles les consommations d'eau après dégrèvement et remboursement de 1 396,07 euros en raison de la surconsommation d'eau soit la somme de 2867. 83 euros pour la période du 1er décembre 2017 au 18 mars 2021 et celle de 689,92 euros pour la période du 18 mars 2021 au 4 novembre 2021 outre la tva.

Elle explique qu'au regard des articles 1224 et 1741 du code civil, elle peut se prévaloir de la résiliation du bail commercial en raison des graves manquements contractuels, et ce, sans faire jouer la clause résolutoire subordonnée à la délivrance d'une sommation ou d'un commandement de payer.

Elle souligne également que cette situation lui a fait perdre la somme de 25 000 euros dans sa trésorerie empêchant la création d'une nouvelle chambre d'hôtes et la chance de nouveaux revenus locatifs.

Elle estime enfin qu'elle est en droit d'obtenir le remboursement de la somme de 400 euros au titre du raccordement de l'eau au compteur en raison de la résistance abusive de l'intimée et que la SARL Papillon ne peut solliciter des dommages et intérêts résultant d'une situation qu'elle a elle-même contribuée à créer.

***

Dans ses dernières conclusions, la société Papillon, intimée principale, appelante incidente, demande à la cour, au visa des articles L 143-2 du code de commerce, R. 145-36 du code de commerce, des articles 1103, 1219, 1224 et 1728 du code civil, 809 du code de procédure civile, de :

« Confirmer le jugement rendu par le tribunal judicaire d'Avignon en date du 18 avril 2023 en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande de résiliation du bail commercial

Infirmer le jugement rendu par le tribunal judicaire d'Avignon en date du 18 avril 2023 en ce qu'il a :

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile

Débouté les parties du surplus de leurs demandes

Et, statuant à nouveau,

Condamner la SCI L'arc en ciel à payer à la société Papillon la somme de 15 000 euros au titre de l'ensemble des préjudices subis du fait des manquements et du comportement déloyal et brutal du bailleur

Débouter la SCI L'arc en ciel de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions

Subsidiairement,

Débouter la SCI L'arc en ciel de sa demande de résiliation judiciaire du bail commercial de la société Papillon, et, constatant la somme de 1980 euros versée en carpa, la débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions

Très subsidiairement,

Débouter la SCI L'arc en ciel de sa demande de résiliation judiciaire du bail commercial de la société Papillon

Réduire la créance de la SCI L'arc en ciel à la somme de 1132.55 euros, en tenant compte des sommes déjà versées par la société Papillon dont 1980 euros en CARPA et les sommes effectivement dues, TVA déjà comprise,

Prononcer la compensation entre les sommes dues par la société Papillon et les sommes correspondant aux condamnations de la SCI L'arc en ciel au bénéfice de la société Papillon

Reconventionnellement

Condamner la SCI L'arc en ciel à payer à la société Papillon la somme de 15 000 euros au titre de l'ensemble des préjudices subis du fait des manquements et du comportement déloyal et brutal du bailleur

En tout état de cause

Condamner la SCI L'arc en ciel à payer à la société Papillon une somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et tous les dépens de la présente instance et de ses suites ».

Au soutien de ses prétentions, la société Papillon, appelante principale, intimée incidente, expose que la demande en résiliation est irrecevable les parties n'ayant envisagé la résiliation judiciaire que dans le cas où le preneur connaitrait une procédure collective et qu'au visa de l'article 1224 du code civil la mise en demeure est une condition commune à la plupart des sanctions de l'inexécution du contrat sauf s'il résulte des circonstances qu'elle serait vaine, ce qui n'est pas établi en l'espèce puisque l'intimée n'a jamais refusé le principe d'une transaction.

Subsidiairement, elle sollicite le rejet de la demande, l'inexécution invoquée devant être suffisamment grave pour rompre définitivement les relations contractuelles. Or, sur ce point, la SARL Papillon affirme que le bailleur n'ayant pas opéré de régularisation de charges en bonne et due forme, elle est bien fondée à ne régler que les seules charges justifiées. Concernant les loyers, elle estime que tous les loyers à compter de juin 2020 ont été réglés, seul un reliquat de 1 980 euros restant pour les loyers de mars et avril 2020.

S'agissant des charges liées à la consommation d'eau, l'intimé explique que les sommes invoquées ne sont pas justifiées, et ce, sans avoir à tenir compte de la surconsommation d'eau, sauf à retenir subsidiairement la somme de 982.92 euros, pour la période 2017 à 2020.

Concernant les taxes foncières, la société indique que le calcul doit se faire conformément aux dispositions contractuelles à savoir le millième de copropriété et qu'il lui est donc dû, au regard des règlements déjà effectués, la somme de 149.63 euros étant précisé que la somme de 488.40 euros a déjà été versée.

Concernant la révision des loyers, l'intimée indique qu'elle a respecté l'indexation à compter de la demande qui lui en a été faite mais elle estime que la mesure ne peut être rétroactive et qu'il a été donné quittance au locataire des loyers postérieurs à avril 2020 pour la somme de 990 euros.

Elle explique que pour l'appelante le préjudice est inexistant, seuls deux mois de loyers étant dus ayant été laissés en dépôt de garantie sur son compte et le préjudice découlant d'une perte de chance de créer une nouvelle chambre d'hôtes n'est pas justifié au regard du coût des travaux à réaliser, l'enjeu du litige et l'absence de difficultés de trésorerie. S'agissant du remboursement des frais de pose du compteur, elle rappelle qu'il s'agit d'une obligation du bailleur à laquelle elle est étrangère.

Enfin, à titre reconventionnel, elle sollicite une indemnisation en raison de la déloyauté du bailleur au regard des modalités dont il a usées pour réclamer les deux mois d'arriérés de loyers et la régularisation des charges.

Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

DISCUSSION

Sur le fond :

- Sur la recevabilité de la demande en résiliation du bail commercial

Selon l'article 1227 du code civil « la résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice ».

En l'espèce, le contrat de bail commercial litigieux comporte une clause résolutoire (page 11) : « en cas de non-exécution, totale ou partielle, ou de non-respect, par le preneur de la clause de destination, du paiement à son échéance de l'un des termes du loyer, des charges et impôts récupérables par le bailleur, des travaux lui incombant ['] le présent bail sera résilié de plein droit un mois après une sommation d'exécuter ou un commandement de payer délivrés par acte extra-judiciaire ».

Par ailleurs, contrairement à ce qu'indique l'intimée, le contrat de bail commercial n'entend pas limiter expressément la résiliation judiciaire au cas d'une procédure collective (page 11) mais réglemente cette hypothèse en indiquant « que le bailleur pourra demander la résiliation judiciaire ou faire constater la résiliation de plein droit du bail : - pour des causes antérieures soit au jugement de liquidation judiciaire, soit au jugement d'ouverture d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire qui aurait précédé la liquidation judiciaire ' pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement de liquidation ['] ».

Enfin, il ressort de la demande du bailleur que celui-ci fonde sa demande non sur la clause résolutoire prévue au contrat mais sur une action en résiliation judicaire pour inexécution des obligations résultant du contrat de bail.

Or, le prononcé de la résiliation judiciaire d'un bail commercial n'est pas soumis à l'exigence d'une mise en demeure préalable (Civ. 3e, 4 mai 2000, n° 98-18.011).

Par conséquent, la demande en résiliation du bail commercial de la société L'Arc en ciel est recevable et la décision déférée sera infirmée.

- Sur la demande en résiliation judiciaire du bail commercial

Il sera rappelé que la résiliation du contrat ne peut être prononcée que lorsque le manquement invoqué est suffisamment grave pour justifier que le contrat soit interrompu pour l'avenir, le caractère de gravité étant apprécié souverainement par les juges du fond.

En l'espèce, le preneur a l'obligation de s'acquitter d'un loyer annuel de 9.900 euros ht payable en 4 termes égaux de 2.475 euros ht outre la consommation d'eau dont le bailleur relèvera une fois par an le compteur et la taxe foncière sur présentation par le bailleur de l'avis d'impôts et dont le montant sera calculé en fonction des millièmes de copropriété. Par ailleurs, il est prévu une révision légale du loyer indexée sur l'indice trimestriel des loyers commerciaux publié par l'Institut [13] et des Etudes Economiques.

La SCI L'Arc en ciel invoque une série de 4 manquements contractuels.

- Sur les loyers impayés

Concernant cette obligation, le bailleur indique que les loyers des mois d'avril et mai 2020, soit la somme de 1980 euros, n'ont pas été réglés.

Il sera relevé que le montant n'est pas contestée par la SARL Papillon qui justifie de son versement à la CARPA du barreau d'Avignon le 2 septembre 2021 soit quelque mois après l'assignation délivrée devant le tribunal judiciaire d'Avignon (26 mai 2021).

Ainsi, le manquement à l'obligation principale de s'acquitter du loyer est caractérisé.

- Sur les taxes foncières

Il est prévu aux termes du contrat (page 7), en plus du loyer, que le preneur remboursera au bailleur :

- les impôts et taxes afférents à l'immeuble, en ce compris les impôts fonciers les taxes additionnelles à la taxe foncière, ainsi que tous impôts, taxes et redevances liées à l'usage du local ou de l'immeuble ou à un service dont le preneur bénéficie directement ou indirectement ;

- les taxes municipales afférentes au bien loué, la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, la taxe de balayage, taxes locatives ;

- les fournitures et prestations individuelles ou collectives récupérables sur le locataire.

Il convient également de préciser que, selon les termes du contrat, le local commercial est situé à un rez-de-chaussée dans lequel on accède par la porte A situé au [Adresse 4].

Il sera constaté que la SARL Papillon ne conteste pas le principe de la taxe foncière mais en conteste les montants retenus par le bailleur et ses modalités de calculs.

Toutefois, il ressort du contrat de bail commercial que le montant de la taxe foncière est calculé en fonction des millièmes de copropriété (page 9), étant précisé que le local commercial forme les 67/1000èmes des parties communes générales (page 2). Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de mettre en 'uvre, comme le prétend l'intimée, une seconde répartition de 67/1000e sur le montant de la taxe retenue par l'administration fiscale qui fait déjà application de ce taux.

En vertu de ces dispositions contractuelles, le bailleur estime qui lui est dû :

- 205,20 euros au titre des taxes foncières pour l'année 2018

- 240 euros au titre des taxes foncières pour l'année 2019

- 201 euros au titre des taxes foncières pour l'année 2020

- 248,40 euros au titre des taxes foncières pour l'année 2021

- 243,60 euros au titre des taxes foncières 2022

- 248,40 euros au titre des taxes foncières 2023

Il produit à l'appui de ses demandes les avis d'impôt des taxes foncières des années 2018, 2019, 2020, 2021, 2022 et 2023 qui justifient du montant des sommes dues pour le bien situé [Adresse 4].

Cependant, s'agissant de l'année 2018, l'avis ne mentionne pas le n° [Adresse 4] mais le n° 9, et ce, pour un total de 1 205 euros. Il apparaît que cette pièce ne permet pas d'établir que cette somme s'applique bien au local commercial à hauteur des millièmes prévus au contrat. Surtout, les bases de calcul et les références mentionnés par l'administration fiscale sont différentes de celles retenues ultérieurement pour le bien immobilier. Par conséquent, la taxe foncière sera ramenée à la somme de 80.73 euros après application de 67/1000ème, conformément à la demande d'intimée.

De même, pour l'année 2019, l'avis d'imposition mentionne un bien immobilier situé [Adresse 8] et un autre immeuble situé [Adresse 2]. Néanmoins, contrairement à la situation précédente, il apparaît que les bases de calcul pour l'immeuble n° 9 sont identiques à celles retenues ultérieurement pour le bien situé [Adresse 12] indiquant ainsi qu'il s'agit bien du local dans lequel porte le bail commercial.

Par conséquent, la SARL Papillon est redevable de la somme totale de 1 262.13 euros au titre des taxes foncières 2018 à 2023.

S'agissant du règlement de la somme de 240 euros invoqués par le preneur, il est produit un relevé bancaire pour la période du 1er au 31 juillet 2020 mentionnant l'encaissement d'un chèque de 240 euros sans autre précision. Il sera noté que, dans ses conclusions, le propriétaire des locaux loués affirme qu'il n'a pas encaissé cette somme.

Par conséquent, la preuve n'est pas rapportée par la SARL Papillon que le paiement à hauteur de 240 euros a été fait au profit de la SCI L'arc en ciel.

En revanche, il est bien établi par le versement d'un relevé bancaire pour la période du 1er au 30 novembre 2023 que le locataire s'est acquitté de la somme de 248 euros par un virement au profit de la société propriétaire au titre, selon la mention portée sur le relevé, de la taxe foncière 2023.

Il s'ensuit que la SARL Papillon est redevable de la somme totale de 1 013.73 euros au titre de la taxe foncière.

Ainsi, le manquement du locataire à l'obligation de s'acquitter des charges est caractérisé.

- Sur l'indexation des loyers

Selon les stipulations contractuelles, « la révision légale du loyer est soumise aux dispositions des articles L 145-34 et suivants du Code de Commerce et R 145-20 du même code.

Elle prend effet à compter de la demande de révision.

Le loyer sera indexé sur l'indice trimestriel des loyers commerciaux publié par l'Institut [13] et des Etudes Economiques.

A cet effet, le réajustement tant à la hausse qu'à la baisse du loyer s'effectuera, conformément aux dispositions de l'article L 145-38 du Code de commerce, tous les trois ans à la date anniversaire de l'entrée en jouissance, le dernier indice connu à la date de l'indexation étant alors comparé au dernier indice connu lors de la précédente révision.

Il est précisé que le dernier indice connu à ce jour est celui du deuxième trimestre de l'année 2017.

L'application de cette clause d'indexation se fera dès la publication de l'indice.

La demande de réajustement doit être formée par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée avec accusé de réception (') ».

Il sera observé à titre liminaire que la SARL Papillon ne conteste pas le principe de l'indexation des loyers mais sa rétroactivité.

Pour justifier sa demande, la SCI L'Arc en ciel produit un courrier, non daté, dans lequel il est réclamé la somme de 1 036.88 euros « à partir du mois de mai 2021 » correspondant au nouveau loyer mensuel établi à partir du mois d'avril 2020.

Par ailleurs, la société appelante sollicite la condamnation de la SARL Papillon à lui verser la somme de 609.49 euros au titre de l'indexation des loyers, sans autre précision.

Cependant, en l'absence de tout décompte justifiant que les sommes réclamées sont celles dues à compter de la demande en révision, la SCI L'Arc en ciel verra sa demande rejetée tant en ce qui concerne le paiement de la somme de 609.49 euros que la caractérisation d'un manquement par le locataire de ses obligations sur ce fondement.

- Sur les charges relatives à la consommation d'eau

Il n'est pas contesté par les parties que le locataire doit rembourser, au titre des obligations contractuelles, la consommation d'eau qui lui est imputable.

Selon le procès-verbal de constat du 18 mars 2021, il existe un sous-compteur d'eau pour la SARL Papillon, la pose d'un compteur individuel étant intervenue le 28 avril 2021.

Il ressort des pièces fournies par les parties qu'elles s'accordent pour retenir une consommation totale de 1 165 m3 pour la période allant du 1er décembre 2017 au 18 mars 2021 avec application du prix de 3.66 euros par m3 soit 4 263.90 euros. En revanche, les parties ne s'accordent pas sur la hauteur du dégrèvement à appliquer.

Selon, le bailleur il convient de retrancher les dégrèvements sur les redevances d'assainissement à hauteur de 706.62 euros (357 m3) remboursés à la SCI L'Arc en ciel, selon courrier du 4 octobre 2018 et de de 689.45 euros (375 m3) selon le courrier du 4 novembre 2019 soit la somme totale de 1 396.07 euros.

Cependant, la SARL Papillon justifie que la SCI L'Arc en ciel a bénéficié, suite à une fuite d'eau, de deux dégrèvements consentis à la demande du locataire auprès des services compétents, et ce, pour la totalité des lots de l'immeuble sur l'abonnement bénéficiant au bailleur à savoir les avoirs de 1 541.61 euros (facture du 4 novembre 2019 pour la période d'avril à novembre 2018) et 1 739.37 euros (facture du 4 novembre 2019 pour la période d'avril à novembre 2018) soit la somme de 3 280.98 euros. La bailleresse ne peut donc revendiquer auprès de son locataire le paiement de sommes dont il est justifié qu'elle en a obtenu le dégrèvement.

Par conséquent, la SARL Papillon reste redevable de la somme de 982.92 euros pour la période allant du 1er décembre 2017 au 18 mars 2021.

Il est par ailleurs justifié par la société appelante, et non contesté par des éléments probants, que le compteur d'eau fait état pour la période postérieure au 18 mars 2021 d'une consommation d'eau de 176 m3 au prix de 3.92 m3.

Par conséquent, la SARL Papillon est redevable de la somme de 689.92 euros pour la période postérieure au 18 mars 2021. La demande d'application de la tva à hauteur de 20 % sera rejetée dès lors que l'application de ce taux n'est pas justifiée au regard de la facturation produite.

Il s'ensuit que la SARL Papillon est redevable de la somme de 1 619.84 euros au titre de la consommation d'eau outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation.

Ainsi, le manquement à l'obligation de s'acquitter des charges est caractérisé.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que le manquement aux obligations contractuelles par la SARL Papillon est établi en ce qui concerne le paiement des loyers, des taxes foncières et de la consommation d'eau.

Cependant, il sera relevé qu'en ce qui concerne les loyers, le locataire a versé les 2 loyers litigieux sur un compte de la Carpa.

De même, en ce qui concerne les taxes foncières il doit être noté qu'il s'agit d'une somme modeste et que, par ailleurs, le locataire s'est acquitté du dernier versement revendiqué.

Enfin, s'agissant de la consommation d'eau, il convient de noter que le refus de s'acquitter de la consommation d'eau est consécutif à un litige ayant opposé les parties suite à une fuite d'eau intervenue sur le réseau.

Par conséquent, la gravité des manquements de la SARL Papillon n'étant pas suffisamment caractérisée, la demande de résiliation du bail commercial et les demandes subséquentes seront rejetées et le locataire sera condamné à verser à la SCI L'Arc en ciel les sommes suivantes :

- 1 980 euros au titre des loyers d'avril et mai 2020

- 1 013.73 euros au titre des taxes foncières des années 2018 à 2023

- 1 619.84 euros au titre de la consommation d'eau outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation.

- Sur le coût de la pose du compteur individuel

Il ressort de la lecture du bail commercial que ce dernier règle la répartition des obligations des parties quant à l'immeuble en ce qui concerne les réparations et l'entretien, le garnissement, les transformations, les mises aux normes imposées par l'administration ainsi que les améliorations sans envisager la prise en charge de la pose d'un compteur d'eau individuel.

Il sera relevé que cette dépense est de la seule initiative du bailleur qui est intervenu suite à la difficulté d'évaluation de la consommation d'eau du locataire, et ce, après une fuite intervenue sur les réseaux et ne permettant pas au bailleur de justifier avec précision les sommes devant lui être remboursées.

Par conséquent, les frais de pose du compteur d'eau resteront à la charge du bailleur.

- Sur la demande en réparation du préjudice résultant des manquements contractuels de la SARL Papillon

Selon l'article 1217 du code civil « La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :

- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;

- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;

- obtenir une réduction du prix ;

- provoquer la résolution du contrat ;

- demander réparation des conséquences de l'inexécution.

Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter ».

En l'espèce, il sera préalablement observé que la SCI Papillon fonde sa demande indemnitaire sur la perte de chance d'avoir pu créer une troisième chambre d'hôtes suite à un « lourd préjudice » consécutif à un manque de trésorerie et en conséquence d'en tirer les revenus locatifs.

Cependant, il sera observé que s'il est justifié de deux devis pour des travaux de rénovation, il n'est pas établi que l'absence de concrétisation de ce projet résulte d'une perte de chance consécutive au non-paiement par le locataire de ses loyers et charges outre le fait qu'il n'est fourni aucun élément permettant d'évaluer le manque de trésorerie.

Par conséquent, la demande sera rejetée.

- Sur la demande de dommages et intérêts du locataire à l'encontre du bailleur en raison de sa déloyauté et sa brutalité

Selon l'article 1104 du code civil « les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

Cette disposition est d'ordre public ».

En l'espèce, il n'est pas établi par la SARL Papillon que la SCI L'Arc en ciel a agi avec déloyauté à l'égard de son locataire pendant plusieurs années dès lors qu'elle a poursuivi la résiliation du bail commercial et le paiement de sommes d'argent auprès de son locataire en raison de l'inexécution des obligations contractuelles mises à charge et qui est, pour la majorité d'entre elles, établie par la présente décision. De même le comportement brutal du bailleur dans le cadre des relations contractuelles n'est ni étayé ni démontré.

Par conséquent, le demande sera rejetée.

Il n'y a pas lieu de prononcer de compensation au vu des retranchements effectués dans le cadre des sommes dues par la SARL Papillon et le rejet des demandes indemnitaires.

Sur les frais de l'instance :

La SARL Papillon, qui succombe, devra supporter les dépens de l'instance et payer à la SCI L'Arc en ciel une somme équitablement arbitrée à 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions

Statuant à nouveau,

Déclare recevable la demande de la SCI L'Arc en ciel en résiliation judicaire du bail commercial ;

Rejette la demande en résiliation judicaire du bail commercial la gravité des manquements n'étant pas suffisamment caractérisée ;

Condamne la SARL Papillon à payer à la SCI L'Arc en ciel les sommes suivantes :

- 1 980 euros au titre des loyers de d'avril et mai 2020

- 1 013.73 euros au titre des taxes foncières des années 2018 à 2023

- 1 619.84 euros au titre de la consommation d'eau outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation.

Rejette l'intégralité des autres demandes ;

Dit n'y avoir lieu à compensation ;

Dit que la SARL Papillon supportera les dépens de première instance et d'appel et payera à la SCI L'Arc en ciel une somme de 2000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

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