Livv
Décisions

CA Nîmes, 1re ch., 9 octobre 2025, n° 24/00266

NÎMES

Arrêt

Autre

CA Nîmes n° 24/00266

9 octobre 2025

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 24/00266 - N°Portalis DBVH-V-B7I-JCCN

AB

TJ D'[Localité 9]

05 décembre 2023

RG : 22/00026

[V]

[G] [P]

C/

[V]

[K] épouse [X] [M]

[T]

Copie exécutoire délivrée

le 09 octobre 2025

à :

Me Clotilde Lamy(2)

Me Philippe Pericchi

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

1ère chambre

ARRÊT DU 09 OCTOBRE 2025

Décision déférée à la cour : jugement du tribunal judiciaire d'Avignon en date du 05 décembre 2023, n°22/00026

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Alexandra Berger, conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre

Mme Alexandra Berger, conseillère

Mme Audrey Gentilini, conseillère

GREFFIER :

Mme Audrey Bachimont, greffière, lors des débats, et Mme Nadège Rodrigues, greffière, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 26 juin 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 18 septembre 2025 et prorogé au 09 octobre 2025.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTES :

Mme [R] [V]

née le 31 juillet 1979 à [Localité 13] (Roumanie)

[Adresse 7]

[Localité 6]

Représentée par Me Clotilde Lamy de la Selarl Cabinet Lamy Pomies-richaud Avocats Associes, postulante, avocate au barreau de Nîmes

Représentée par Me Jean-philippe Borel, plaidant, avocat au barreau d'Avignon

Mme [C] [K] épouse [X] [M]

née le 05 mai 1973 à [Localité 14] (31)

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Clotilde Lamy de la Selarl Cabinet Lamy Pomies-richaud Avocats Associés, postulante, avocate au barreau de Nîmes

Représentée par Me Stéphane Autard, plaidant, avocat au barreau de Marseille

INTIMÉES :

Mme [R] [V]

née le 31 juillet 1979 à [Localité 13] (Roumanie)

[Adresse 7]

[Localité 6]

Représentée par Me Clotilde Lamy de la Selarl Cabinet Lamy Pomies-richaud Avocats Associes, postulante, avocate au barreau de Nîmes

Représentée par Me Jean-philippe Borel, plaidant, avocat au barreau d'Avignon

Mme [C] [K] épouse [X] [M]

née le 05 mai 1973 à [Localité 14] (31)

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Clotilde Lamy de la Selarl Cabinet Lamy Pomies-Richaud Avocats Associés, postulante, avocate au barreau de Nîmes

Représentée par Me Stéphane Autard, plaidant, avocat au barreau de Marseille

La société [T]

RCS de [Localité 12] n°B 449 673 938

prise en la personne de son gérant en exercice domicilié en cette qualité

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Philippe Pericchi de la Selarl Avouepericchi, Postulant, avocat au barreau de Nîmes

Représentée par Me Arnaud Tribhou, plaidant, avocat au barreau d'Avignon

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre, le 09 octobre 2025, par mise à disposition au greffe de la cour

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

La société [T], propriétaire depuis le 28 mars 2019 de trois bâtiments [Adresse 8] à [Localité 11] ([Localité 5] a confié à la société CBRE-GDI un mandat pour la vente de ses locaux commerciaux situés au rez-de-chaussée du bâtiment C pour une surface de 680 m², divisibles, au prix de 1 600 euros HT le m².

Le 16 juin 2021, Mmes [R] [V] et [C] [K] épouse [X] [M] ont formalisé une offre d'achat d'une partie de ces locaux commerciaux, d'une superficie de 150 m², situé au rez-de-chaussée de l'immeuble au prix HT de 217 500 euros, aux termes de laquelle elles s'engageaient

'à acheter, en cas d'acceptation de la présente offre, de façon ferme et irrévocable le bien désigné ci-dessous. Le bien immobilier est le suivant : un local commercial situé au RDC d'un immeuble d'habitation.

La superficie loi Carrez de ce bien est de 150 m2, le prix demandé est de 1 600 euros HT/m² soit 240 000 euros HT (...). Nous précisons que l'achat : - peut-être financé par un prêt (x euros sur sept ans à 2,5% hors assurance) - doit être soumis aux autorisations administratives, - construction d'un mur de séparation des locaux.En l'absence d'acceptation de la présente offre d'achat, celle-ci s'éteindra le 1 er juillet 2021 à minuit (....) Bon pour accord sous condition de signature d'un compromis avant le 31/07/2021'.

Elles ont ensuite accepté le 22 juin 2021 la contre-proposition du 18 juin 2021 du vendeur au prix de 229 000 euros HT ainsi libellée : 'néanmoins, compte tenu des frais que nous allons devoir engager pour la découpe de l'espace disponible (mur et modification de la découpe copro) nous souhaiterions un petit effort sur le prix soit 1 500 euros HT du m² pour 153 m² pour un total de 229 000 euros HT net vendeur'. A été joint à cette contre-proposition un plan portant trois mentions 'bon pour accord pour la découpe des locaux commerciaux' signées des parties ne précisant pas toutefois les numéros de lots.

La date de signature du compromis a été fixée au 29 septembre 2021 en l'étude de la société Peytier et [D], notaires à [Localité 10].

Le 24 septembre 2021, les autrices de l'offre se sont pas présentées chez le notaire et par acte du 4 janvier 2022, la société [T] les a assignées devant le tribunal judiciaire d'Avignon qui, par jugement contradictoire du 5 décembre 2023 :

- a déclaré Mme [R] [V] irrecevable à soulever la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la société [T],

- a jugé parfaite la vente du local commercial,

- a rejeté la demande de nullité du contrat formé par Mme [C] [O],

- a condamné Mmes [C] [X] [M] et [R] [V] à signer en l'étude de Me [B], [U] et [E], notaires à [Localité 9]

l'acte authentique de vente du local commercial au prix de 229 000 euros HT sous astreinte provisoire de 300 euros par jour de retard commençant à courir le jour de la convocation des parties devant le notaire aux fins de signature de l'acte et pendant un délai de deux mois, passé lequel il sera à nouveau statué,

- a dit qu'à défaut de déférer à la convocation du notaire dans le mois qui suivra cette convocation et de signature de l'acte authentique à l'expiration du délai de deux mois ci-dessus, le jugement vaudra vente et sera publié au service de la publicité foncière d'[Localité 9] à la charge de la société [T],

- a débouté la société [T] de sa demande de dommages et intérêts au titre d'une perte de chance de louer le local,

- a dit que la demande subsidiaire de la société [T] aux fins de dommages et intérêts pour rupture abusive des pourparlers est devenue sans objet,

- a débouté Mme [R] [V] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- a débouté la société [T] de sa demande de condamnation solidaire de Mmes [C] [X] [M] et [R] [V],

- condamné Mmes [C] [X] [M] et [R] [V] aux dépens et à payer à la société [T] la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [C] [K] épouse [X] [M] a interjeté appel de cette décision le 18 janvier 2024 et Mme [R] [V] le 18 janvier 2024.

Les deux affaires ont été jointes par ordonnance du 21 mars 2024.

Par ordonnance de référé du 25 octobre 2024, le premier président de la cour d'appel de Nîmes a déclaré irrecevables les demandes de suspension de l'exécution provisoire de Mmes [R] [V] et [C] [K] épouse [X] [M].

Par ordonnance du 9 janvier 2025, le conseiller de la mise en état de cette cour a rejeté la demande de radiation de l'affaire du rôle présentée par la société [T], l'a condamnée aux dépens de l'incident et a débouté les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 21 janvier 2025, la procédure a été clôturée le 12 juin 2025 et l'affaire fixée à l'audience du 26 juin 2025 à laquelle elle a été mise en délibéré au 18 septembre 2025.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS :

Au terme de ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 26 mai 2025, Mme [R] [V] demande à la cour

- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

A titre principal

- de constater le caractère conditionnel de l'offre du 16 juin 2021,

- de juger que l'objet de la vente était soumis à la réalisation de conditions suspensives,

A titre subsidiaire

- de constater l'absence de détermination suffisante de l'objet de la vente,

- de constater l'imprécision de la chose vendue en raison non-respect des dispositions légales régissant la vente de lots de copropriété, et non réalisation des conditions de l'offre.

En conséquence

- de juger que l'offre du 16 juin 2021 n'était pas devenue, par son acceptation, une vente parfaite au sens de l'article 1583 du code civil mais un simple accord de principe organisant la conclusion du contrat de vente,

A titre subsidiaire

- de prononcer la nullité de la vente pour erreur sur les qualités substantielles de la chose vendue,

A titre infiniment subsidiaire

- de juger que l'erreur sur les qualités de la chose vendue a été déterminante dans le consentement de l'appelante,

En conséquence

- de prononcer la nullité de la vente pour erreur sur les qualités substantielles de la chose vendue,

En tout état de cause

- de débouter la société [T] de toutes ses demandes fins et conclusions,

- de la condamner au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens de la présente instance ainsi que d'appel.

Au terme de ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 12 juin 2025, Mme [C] [K] épouse [X] [M] demande à la cour

- de rejeter l'appel incident formé par la société [T],

- de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société [T] de sa demande au titre de la prétendue perte de chance de louer le local,

- d'infirmer le jugement en toutes ses autres dispositions,

Statuant à nouveau

A titre principal

- de juger que la vente n'est pas parfaite pour imprécision de la chose vendue, non-respect des dispositions légales régissant la vente de lots de copropriété, et non-réalisation des conditions de l'offre,

A titre subsidiaire

- de prononcer la nullité de la vente pour erreur sur les qualités substantielles de la chose vendue,

- de condamner la société [T] à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens pour la première instance et l'instance d'appel,

- de la débouter de sa demande subsidiaire de condamnation à des dommages et intérêts pour rupture abusive des pourparlers.

Au terme de ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 10 juin 2025, la société [T] demande à la cour

- de confirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts au titre de la perte de chance de louer le local commercial,

A titre subsidiaire

- de juger abusif le caractère de la rupture des pourparlers entre les parties,

- de juger que cette rupture abusive est imputable aux candidates à l'acquisition,

- de condamner solidairement les appelantes à lui verser une somme de 20 000 euros au titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice,

En tout état de cause

- de condamner solidairement les appelantes à lui payer la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens de l'instance qui comprendront les frais de publication de l'assignation du jugement dont appel, et de l'arrêt à intervenir.

Il est expressément fait renvoi aux dernières écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens conformément aux dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile.

MOTIVATION

* caractère parfait de la vente

Pour juger parfaite la vente entre les parties, le tribunal a jugé que le moyen tiré de l'absence de conformité du local n'était pas fondé, que la désignation du local était suffisamment précise dans l'offre d'achat des défenderesses et que celles-ci avaient signé un plan de découpe des locaux, que l'offre avait été acceptée avant la date de caducité prévue.

Les appelantes soutiennent :

- que l'obtention des autorisations administratives relatives à la modification de l'ouverture et de la façade était une condition suspensive qui n'a pas été satisfaite, et que leur obligation ne peut donc pas être considérée comme pure et simple,

- que la demande de conformité ayant été refusée le 25 juin 2020 par la mairie de [Localité 11], le bâtiment n'était pas conforme aux permis successifs au moment de la concrétisation de l'offre,

- que la vente n'est pas parfaite au sens de l'article 1583 du code civil car la chose vendue n'était pas clairement déterminable puisque l'offre d'achat ne mentionnait pas la désignation du bien telle qu'elle devait être précisée à l'acte de vente ; qu'ainsi elles n'avaient pas pu avoir connaissance de sa nature ni des droits et obligations qui y étaient attachés,

- que la décision d'achat étant soumise à la réunion de plusieurs conditions non remplies le jour de la rencontre des consentements puisque la vendeuse n'avait pas engagé les démarches nécessaires à leur satisfaction, leur consentement a été vicié pour erreur sur les qualités essentielles de la chose vendue,

- que les demandes de documents formulées tant par elles-mêmes que par le cabinet d'architecture mandaté par elles n'ont jamais obtenu de réponse de la part de la vendeuse et qu'une attestation délivrée par la mairie de [Localité 11] a confirmé que celle-ci n'avait pas déposé de déclaration préalable de travaux pour la division des locaux, pourtant nécessaire à leur projet,

- que leur demande de conformité du local déposée le 24 octobre 2019 directement auprès de la mairie de la commune a été rejetée le 25 juin 2020 et que le bâtiment n'était donc pas conforme aux permis successifs au moment de la concrétisation de l'offre,

- que la vente n'est pas parfaite au sens de l'article 1583 du code civil car la chose vendue n'était pas clairement déterminable,

- que le principe de la modification de l'état descriptif de division a été soumis à l'assemblée générale des copropriétaires du 24 avril 2025, ce qui démontre que, au moment de l'acte litigieux, l'appelante n'était pas en mesure d'identifier le lot de copropriété vendu puisqu'il n'était ni créé ni acté par l'assemblée générale.

A titre subsidiaire

- que la décision d'achat était soumise à la réunion de plusieurs conditions qui n'étaient pas réunies le jour de la rencontre des consentements. La vendeuse n'ayant pas engagé les démarches nécessaires à la satisfaction des conditions suspensives à la vente, leur consentement a été vicié pour erreur sur les qualités essentielles de la chose vendue.

L'intimée réplique :

- que le consentement des appelantes n'a pas été vicié car la rencontre des volontés sur la chose et le prix a été actée selon courriel en date du 22 juin 2021 portant mention de l'accord et la signature de chacune d'elles,

- que l'absence de conformité relevée par les services de l'urbanisme n'a trait qu'à des éléments extérieurs au local objet du présent différend et ne peut donc pas être un élément du contrat.

Aux termes de l'article 1583 du code civil, la vente est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé.

Le juge du fond dispose d'un pouvoir souverain pour apprécier l'existence de l'accord entre les parties.

Aux termes de l'article 1163 du code civil, l'obligation a pour objet une prestation présente ou future. Celle-ci doit être possible et déterminée ou déterminable.

La prestation est déterminable lorsqu'elle peut être déduite du contrat ou par référence aux usages ou aux relations antérieures des parties, sans qu'un nouvel accord des parties soit nécessaire.

Sur la désignation du bien, l'intimée produit :

- le plan de découpe approuvé par les appelantes,

- un document d'appel de provision par le syndic Foncia dans lequel est indiqué manuscritement que l'objet du compromis de vente à venir est constitué de 100% du lot n°3 et de 50% du lot n°4,

- une autorisation de construire et d'aménager accordé par la mairie concernant un commerce de coiffure dans le même immeuble,

- un procès-verbal de carence dressé par le notaire le 25 mars 2025 aux termes duquel il demeure dans l'attente de l'autorisation de l'assemblée générale de la copropriété pour la division du lot n°4,

- une partie du procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires du 24 avril 2024 aux termes duquel la division du lot n°4 est approuvée pour créer de nouveaux lots.

Il n'est pas contesté que le local commercial objet de la proposition d'achat des appelantes fait partie d'une copropriété.

Or, non seulement la désignation des lots n'apparaît pas dans les offres respectives des partiesdes 16 et 18 juin, mais aucune précision sur les droits qui y sont attachés concernant les parties communes n'y est apportée.

Enfin, comme le soulèvent les appelantes, une partie du local commercial objet de l'offre d'achat n'existait pas au moment de la vente puisque ce n'est que le 24 avril 2025 que l'assemblée générale des copropriétaires a autorisé la division du lot n°4.

L'objet du contrat n'était donc pas déterminé au moment de sa conclusion.

Sur l'existence de conditions suspensives, l'offre d'achat principale prévoit sans ambiguïté 'l'achat doit être soumis aux autorisations administratives et construction d'un mur de séparation des locaux'.

En outre, les signatures portées sur cette proposition par les appelantes encadrent la mention selon laquelle un compromis de vente doit être signé avant le 31 juillet 2021.

La contre-proposition acceptée par elles s'inscrit pleinement dans la continuité de l'offre émise le 16 juin 2021 puisqu'elle fait référence aux frais des travaux prévus à la première proposition.

Trois conditions étaient donc requises pour parfaire la vente, dont la preuve de la réalisation n'est pas rapportée par l'intimée.

Les travaux de découpe auxquels la société [T] fait référence dans sa contreproposition n'ont pas été entrepris, alors qu'ils justifiaient selon elle un effort sur le prix.

En conséquence, le jugement est infirmé et l'intimée déboutée de sa demande tendant à voir déclarer la vente parfaite.

* demandes de dommages et intérêts du vendeur

Pour rejeter sa demande de dommages et intérêts pour perte de chance de louer, le tribunal a jugé que la requérante ne rapportait pas la preuve de son préjudice.

L'intimée soutient que depuis le 29 septembre 2021, date à laquelle la signature du compromis était fixée, le local commercial aurait pu être loué au prix de 22 500 euros par an, selon les tarifs de location des commerces et qu'elle subit donc une perte de chance de l'avoir loué à ce prix, que le refus de conclure la vente est fautif et qu'elle est donc fondée à réclamer des dommages et intérêts.

Les appelantes répliquent que l'intimée ne peut se prévaloir d'une perte de chance d'avoir loué un local qui n'était pas offert à la location au moment des faits, qu'elle a fait le choix de poursuivre en vente forcée plutôt que de continuer sa commercialisation ou de le louer, que la rupture des pourparlers est intervenue en raison de l'absence de réponse à leurs interrogations quant aux autorisations administratives, qu'en définitive, elle n'est pas abusive mais résulte de la faute de l'intimée.

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Aux termes de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l'espèce, l'intimée ne démontre pas que le local était loué ou devait l'être au cas où il n'aurait pas été vendu aux appelantes.

De même, les conditions de la vente et son objet n'ayant pas été déterminés, il ne peut pas être reproché à celles-ci d'avoir mis un terme aux pourparlers, fût-ce cinq jours avant la date limite fixée pour la conclusion du compromis de vente.

En conséquence, le jugement est confirmé de ce chef.

* dépens et article 700 du code de procédure civile

Succombant à l'instance, l'intimée est condamnée à en supporter les entiers dépens de première instance et d'appel, en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

L'équité commande par ailleurs de la condamner à payer la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles à chacune des appelantes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement du tribunal judiciaire d'Avignon du 5 décembre 2023 en ce qu'il :

- a jugé parfaite la vente du local commercial appartenant à la société [T] à Mme [C] [K] épouse [X] [M] et Mme [R] [V],

- a condamné Mme [C] [K] épouse [X] [M] et Mme [R] [V] aux dépens d'appel et aux frais irrépétibles,

Statuant à nouveau,

Déboute la société [T] de sa demande de voir juger parfaite la vente entre elle et Mesdames [C] [K] épouse [X] [M] et [R] [V],

Confirme le jugement pour le surplus,

Y ajoutant

Condamne la société [T] aux entiers dépens de première instance et d'appel,

Condamne la société [T] à payer à Mme [C] [K] épouse [X] [M] et à Mme [R] [V] la somme de 1 500 euros chacune par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

© LIVV - 2025

 

[email protected]

CGUCGVMentions légalesPlan du site