CA Aix-en-Provence, ch. 3-3, 9 octobre 2025, n° 21/02455
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-3
ARRÊT AU FOND
DU 09 OCTOBRE 2025
Rôle N° RG 21/02455 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG67N
S.A.R.L. VALPHOTON
C/
S.A.S. VALENERGIES
Copie exécutoire délivrée
le : 2/10/25
à :
Me Maud DAVAL-GUEDJ
Me Pierre-Yves IMPERATORE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de CANNES en date du 28 Janvier 2021 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 2019F00246.
APPELANTE
S.A.R.L. VALPHOTON, prise en la personne de son représentant légal,
dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me François FERRARI, avocat au barreau de BEZIERS, plaidant
INTIMEE
S.A.S. VALENERGIES, (anciennement dénommée VALSOLAR), prise en la personne de son président,
dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Me Pierre-Yves IMPERATORE de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Laurent LIMONI de la SELARL LIMONI AVOCATS, avocat au barreau de GRASSE, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 03 Juin 2025 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Mme VINCENT, conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président
Mme Claire OUGIER, Présidente de chambre
Mme Magali VINCENT, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe, après prorogation, le 09 Octobre 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Octobre 2025,
Signé par Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
La société Valénergies est spécialisée dans le domaine de l'efficacité énergétique et assure l'installation et la maintenance de panneaux photovoltaïques.
La société Valphoton a pour domaine d'activité le commerce d'électricité.
Le 25 mai 2012, la SCI Le Colisée, propriétaire de l'immeuble commercial situé au [Adresse 1] à Draguignan a donné à bail emphytéotique à la société Valphoton deux lots permettant l'installation de panneaux solaires sur le toit et un local permettant d'installer les onduleurs nécessaires au fonctionnement d'une centrale photovoltaïque.
Le 13 décembre 2012, la société Valsolar (aujourd'hui dénommée Valénergies) a conclu avec la société Valphoton un contrat de maintenance au titre duquel Valénergies s'engageait à effectuer des interventions de maintenance sur la centrale photovoltaïque située sur la toiture de l'immeuble précité.
Elles ont aussi conclu 4 autres contrats de maintenance portant sur les installations photovoltaïques installées sur divers sites de la société Valphoton, la centrale [Adresse 5], la centrale B BAIR, la centrale Equipe resto 2 et la centrale Ressouche.
Ces contrats de maintenance ont été conclus pour une première période d'un an, puis reconduits de façon tacite pour une période supplémentaire d'une année, la résiliation pouvant intervenir moyennant un préavis de 90 jours avant la date anniversaire.
Le 26 juillet 2013, la société Valénergies a conclu avec la société Phoventure un protocole de cession au titre duquel la société Valénergies a cédé à la société Phoventure l'intégralité des actions composant le capital de la société Valphoton.
Par courrier en date du 29 novembre 2016, la société Valénergies a informé la société Valphoton que, suite aux avis défavorables en date des 6 juin 2014 et 14 novembre 2014 émis par la Commission Communale de Sécurité de Draguignan concernant la mise en place de panneaux photovoltaïques en toiture du magasin Intersport, la SCI Le Colisée avait choisi de déplacer les panneaux photovoltaïques plutôt que de constituer un groupement d'établissements.
Dans ce même courrier, la société Valénergies a transmis à la société Valphoton un devis de modification de l'installation.
Par courrier en date du 16 décembre 2016, la société Valphoton a fait suite au courrier en date du 29 novembre 2016 de la société Valénergies et informé cette dernière qu'elle considérait que le choix de la SCI Le Colisée de déplacer les panneaux photovoltaïques ne lui était pas opposable et que les conséquences financières de ce choix devaient être supportées par la SCI Le Colisée en sa qualité de bailleur au titre du Bail Emphytéotique du 25 mai 2012.
Par courrier recommandé en date du 08 février 2019, la société Valphoton a résilié le contrat de maintenance d'installation photovoltaïque n°10024 portant sur la centrale photovoltaïque Colisee avec prise d'effet au 13 décembre 2019.
Le 29 mars 2019, la société Valénergies a adressé à la société Valphoton les trois factures suivantes :
- une facture n° 1944 d'un montant 844,62 euros HT, soit 1 013,54 euros TTC, au titre de la redevance semestrielle due pour la période de février 2019 à juillet 2019 en application du contrat de maintenance d'installation photovoltaïque n° 10028 ;
- une facture n° 1945 d'un montant de 828,06 euros HT, soit 993,67 euros TTC, au titre de la redevance semestrielle due pour la période de février 2019 à juillet 2019 en application du contrat de maintenance d'installation photovoltaïque n° 10034 :
- une facture n° 1946 d'un montant de 828,06 euros HT, soit 993,67 euros TTC, au titre de la redevance semestrielle due pour la période de février 2019 à juillet 2019, en application du contrat de maintenance d'installation photovoltaïque n° 10035
Le 28 mai 2019, la société Valénergies a adressé à la société Valphoton trois nouvelles factures.
Par courrier recommandé en date du 18 juin 2019, la société Valénergies a mis la société Valphoton en demeure de lui payer la somme de 5 418,90 euros au titre des six factures impayées.
Par requête en injonction de payer du 22 juillet 2019, la société Valénergies a saisi le président du tribunal de commerce de Cannes.
Par ordonnance en date du 16 août 2019, le Président du tribunal de commerce de Cannes a enjoint à la société Valphoton de payer à la société Valénergies les sommes suivantes :
' la somme de 5 418,90 euros en principal ;
' la somme de 240,00 euros accessoires (majorations de retard, clause pénale, intérêts de retard contractuels) ;
' les dépens : 35,21 euros.
La société Valphoton a formé opposition à ladite ordonnance.
Par jugement en date du 28 janvier 2021, le tribunal de commerce de Cannes a, avec exécution provisoire :
' Condamné la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 5 418,90 euros TTC en principal ;
' Condamné la SARLU Valphoton au paiement des pénalités de retard calculées sur la base de trois fois le taux de l'intérêt légal en vigueur, à compter du 1er mai 2019 pour les factures n° 1944, n° 1945 et n° 1946, à compter du 1er juillet 2019 pour les factures n° 1996 et n° 1997, et à compter du 29 mai 2019 pour la facture n° 2006 ;
' Condamné la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 240 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement des six factures litigieuses ;
' Débouté la SAS Valénergies de sa demande de dommages et intérêts évalués à 5 000 euros pour résistance abusive ;
' Rejeté la demande de dommages et intérêts de la SARLU Valphoton ;
' Condamné la SARLU Valphoton aux dépens, en ceux compris les frais d'injonction, d'opposition et de signification ;
' Condamné la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
' Dit que le présent jugement se substituera à l'Ordonnance portant injonction de payer rendue le 16 Août 2019.
Par déclaration du 17 février 2021, la société Valphoton a interjeté appel de la décision.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 mai 2025. L'affaire a été appelée à l'audience du 3 juin 2025 et a été mise en délibéré au 2 octobre 2025.
L'arrêt rendu sera contradictoire, conformément à l'article 467 du code de procédure civile.
PRETENTIONS ET MOYENS
Par conclusions n°3 signifiées par RPVA le 12 mai 2025, la SARL Valphoton demande à la cour de :
Infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :
- Condamné la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 5 418,90 euros TTC en principal
- Condamné la SARLU Valphoton au paiement des pénalités de retard calculées sur la base de trois fois le taux de l'intérêt légal en vigueur, à compter du 1 mai 2019 pour les factures n° 1944, n° 1945 et 1946, à compter du Juillet 2019 pour les factures n° 1996 et n° 1997 et à compter du 29 mai 2019 pour la facture no 2006
- Condamné la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 240 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement des six factures litigieuses
- Rejeté la demande de dommages et intérêts de la SARLU Valphoton
- Condamné la SARLU Valphoton aux dépens, en ceux compris les frais d'injonction, d'opposition et de signification
- Condamné la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile
Par voie de conséquence,
Débouter Valénergies de toutes ses fins et demandes,
Vu l'article 1792 du Code civil,
Condamner Valénergies au paiement à Valphoton de la somme de 44 325,60 euros TTC, outre intérêt au taux légal majoré,
Débouter Valénergies de son appel incident portant sur une prétendue résistance abusive,
Condamner Valénergies au paiement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre tous frais et dépens d'appel, ces derniers distraits au profit de la SCP Cohen Guedj ' Montero ' Daval-Guedj sur son offre de droit.
Par conclusions d'intimée et d'appelante incidente récapitulatives n°2 signifiées par RPVA le 2 mai 2025, la SAS Valénergies demande à la cour de :
' Juger que la société Valphoton n'a jamais contesté la réalité, ni la qualité des prestations de maintenance des installations photovoltaïques fournies par la société Valénergies ;
' Juger que la société Valphoton n'a jamais émis aucune réserve, ni contestation à réception des factures n° 1944, 1945, 1946, 1996, 1997, et 2006 émises par la société Valénergies ;
' Juger que la société Valphoton a fait preuve d'une résistance abusive et injustifiée à une demande en paiement fondée de la société Valénergies ;
En conséquence,
' Confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Cannes en date du 28 janvier 2021 en ce qu'il a :
' Condamné la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 5 418,90 euros TTC en principal ;
' Condamné la SARLU Valphoton au paiement des pénalités de retard calculées sur la base de trois fois le taux de l'intérêt légal en vigueur, à compter du 1er mai 2019 pour les factures n° 1944, n° 1945 et n° 1946, à compter du 1 er juillet 2019 pour les factures n° 1996 et n° 1997, et à compter du 29 mai 2019 pour la facture n° 2006 ;
' Condamné la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 240 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement des six factures litigieuses ;
' Rejeté la demande de dommages et intérêts de la SARLU Valphoton ;
' Condamné la SARLU Valphoton aux dépens, en ceux compris les frais d'injonction, d'opposition et de signification ;
' Condamné la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
' Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
' Infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Cannes en date du 28 janvier 2021 en ce qu'il a débouté la SAS Valénergies de sa demande de dommages et intérêts évalués à 5 000 euros pour résistance abusive ;
et statuant à nouveau :
' Condamner la société Valphoton à payer à la société Valénergies la somme de 5 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée à une demande en paiement fondée ;
' Débouter la société Valphoton de l'intégralité de ses demandes ;
' Condamner la société Valphoton à payer à la société Valénergies la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
' Condamner la société Valphoton aux dépens, aux dépens distraits au profit de Maître Pierre-Yves IMPERATORE de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, Avocats associés aux offres de droit.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est fait renvoi aux dernières écritures déposées pour l'exposé des moyens des parties.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande en paiement des factures
La société Valénergies soutient que la société Valphoton n'a jamais contesté la réalité ni la qualité des prestations de maintenance des installations qu'elle avait réalisées et que conformément au contrat, elle est tenue de s'acquitter du prix des prestations. Cette absence de réserve et de contestations des factures emporte selon elle acceptation de celles-ci.
A l'appui de sa demande, elle indique que dès le mois de janvier 2019, elle a effectué des prestations de maintenance préventive, ainsi qu'une intervention curative le 3 mai 2019 et qu'elle produit les bilans de maintenance qui mentionnent précisément la date d'intervention, la désignation des prestations, les lieux et durée des interventions et les préconisations formulées à la suite des interventions.
Enfin, la société Valénergies soutient que le financement des travaux de déplacement de la centrale photovoltaïque concerne exclusivement la relation entre le bailleur et le preneur et ne peut être mis à sa charge.
En réplique, l'appelante fait valoir que pour l'année 2019, la société Valénergies ne produit aucune preuve de l'accomplissement de ces opérations de maintenance. Or, en application de l'article 1353 du Code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Les rapports de maintenance qu'elle a produit en première instance sont insuffisants à justifier de l'accomplissement des prestations et ce, d'autant plus que depuis l'arrêt de principe de la Cour de cassation du 2 avril 1996, il est impossible de se fonder sur des éléments émanant de la partie elle-même.
En outre, elle fait valoir que la lecture des pièces permet de conclure que la maintenance préventive n'a pas été accomplie. Ainsi, l'appelante conteste les rapports d'intervention produits qu'elle estime avoir été fabriqués pour justifier les factures.
Concernant la facture de maintenance curative, elle soutient qu'elle n'a été causée que par la carence de l'application de la maintenance préventive.
L'article 1134 ancien du code civil prévoit que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits
Selon l'article 1353 du même code, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Il a été jugé que la preuve d'une prestation ne peut résulter exclusivement de la facture du prestataire (Civ 2e, 23 septembre 2004, n°02-20,497).
En l'espèce, la société Valénergies sollicite le paiement des redevances du 1er semestre 2019 pour les centrales [Adresse 5], B bair, équipe resto 2, le paiement des redevances de mai à octobre 2019 pour les centrales Le Colisée et Ressouche, ainsi que le coût de l'intervention du 3 mai 2019 sur un onduleur de la centrale Le colisée.
Les 5 contrats de maintenance conclus entre les parties prévoient en leur article 2.4 que la redevance annuelle due par la société Valphoton est de 1 500 euros HT, montant actualisé chaque année et réglé semestriellement.
L'article 5-1 précise : « Le CLIENT s'engage à payer à VALSOLAR SAS le montant des redevances dues au titre du présent contrat ou toutes les facturations pouvant en résulter.(...)
Dans le cas où une intervention d'un technicien de VALSOLAR SAS est rendue nécessaire sur le site spécifié aux conditions particulières afin de déterminer la nature d'une anomalie de fonctionnement, et si la nature de cette anomalie de fonctionnement est jugée par VALSOLAR SAS hors prestations du présent contrat, alors le CLIENT s'engage à régler la facture de service qui en résulte. La facture sera établie par VALSOLAR SAS et sera indexée sur le barème kilométrique et le coût d'un technicien définis ci-après.
Conditions particulières :
' Conditions tarifaires de déplacement : 1,5 EUR/kilomètres
' Forfait d'intervention d'un technicien : 450 EUR / jours (toute journée commencée est due)».
A l'appui de sa demande en paiement, la société Valénergies produit les bilans de maintenance préventive établis les 23 janvier 2019 des centrales B Bair et Colisée, les bilans de maintenance préventive des 26 septembre 2019 des centrales Ressouche et [Adresse 5] et le bilan de maintenance du 27 septembre 2019 de la centrale Equipe resto 2. Tous ces bilans sont accompagnés chacun des « rapports thermiques maintenance préventive » comprenant les mesures effectuées, les photographies datées et horodatées des installations contrôlées et des bons de travaux correspondants.
La société Valphoton allègue que ces pièces sont incohérentes, comme par exemple dans le rapport de la centrale B Bair, les préconisations indiquées ne sont pas appropriées. Toutefois, l'efficacité des préconisations est sans incidence sur le fait que la maintenance préventive ait été effectuée ou non. Il en est de même sur les différences d'heures entre le bon de travaux et le rapport thermique pour la centrale Colisée, celle-ci ne mettant pas en doute la réalité de l'intervention.
Elle soutient par ailleurs que ces rapports ne lui ont pas été communiqués avant l'émission des factures. Toutefois, les contrats ne prévoyaient pas cette notification préalablement au paiement des factures et cet élément n'est pas non plus de nature à remettre en doute l'effectivité des maintenances.
En conséquence, il résulte de ces pièces que la société Valénergies justifie avoir effectué ses opérations de maintenance préventive en 2019 sur toutes les centrales visées par les contrats.
Concernant la facture n°2006 relative à l'intervention du 3 mai 2019 sur l'onduleur de la centrale du Colisée, la société Valénergie produit les courriels de la société Valphoton l'avisant d'une panne le 30 avril, sa réponse indiquant qu'elle interviendrait au plus tard le 6 mai 2019 et le bon d'intervention du 3 mai 2019. La société Valphoton n'allègue pas que la panne ait continué postérieurement à cette date. Dès lors, il apparaît que la société Valénergies justifie de l'effectivité de sa prestation dont elle demande le paiement. En outre, il n'est pas rapporté la preuve que ce défaut ait été causé par une absence de maintenance préventive, aucun élément ne permettant d'établir qu'il ait été récurrent.
En conséquence, la société Valénergies est fondée à solliciter le paiement des factures à la société Valphoton et le jugement sera confirmé.
La société Valénergies sollicite le paiement des pénalités de retard afférentes aux factures impayées.
L'article L441-6 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige prévoit que « Les conditions de règlement doivent obligatoirement préciser les conditions d'application et le taux d'intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture ainsi que le montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier dans le cas où les sommes dues sont réglées après cette date. Sauf disposition contraire qui ne peut toutefois fixer un taux inférieur à trois fois le taux d'intérêt légal, ce taux est égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage. Dans ce cas, le taux applicable pendant le premier semestre de l'année concernée est le taux en vigueur au 1er janvier de l'année en question. Pour le second semestre de l'année concernée, il est le taux en vigueur au 1er juillet de l'année en question. »
En l'espèce, les factures impayées mentionnaient « En cas de retard de paiement seront exigibles, conformément à l'article L441-6 du code de commerce, des pénalités de retard calculées sur la base de trois fois le taux de l'intérêt légal en vigueur ainsi qu'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement de 40 euros. »
Les contrats de maintenance prévoyaient de même dans son article 5.2, ces pénalités.
Dès lors, la société Valénergies est fondée à en solliciter le paiement et le jugement sera donc confirmé sur ce point.
Sur la demande reconventionnelle au titre du coût du déplacement de la centrale
La société Valphoton soutient qu'elle a été contrainte d'engager des sommes importantes pour déplacer la centrale Colisée afin de répondre à une exigence administrative connue avant sa cession par la société Valénergies. Ainsi, cette dernière a engagé sa responsabilité auprès d'elle qui a dû débourser les frais nécessaires à la régularisation de la situation. Elle demande donc la condamnation de l'intimée sur le fondement de l'article 1792 du Code civil. En effet, la nature décennale du problème a été établie puisque des non-conformités sur le plan de la sécurité incendie ont été constatées. Ils entraînent donc une impropriété de l'ouvrage à sa destination.
En réplique, la société Valénergies fait valoir que la société Valphoton ne rapporte nullement la preuve des prétendus désordres de nature décennale qu'elle allègue et que par ailleurs, depuis 2016 la société Valphoton a toujours reconnu que le financement des travaux de déplacement de la centrale incombe au bailleur.
Concernant les non-conformités sur le plan de la sécurité incendie, il ne concerne que le magasin Intersport et non la centrale photovoltaïque installée en toiture de ce magasin.
L'article 1792 du code civil prévoit que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.
Il a été jugé que les désordres affectant des éléments d'équipement, dissociables ou non, d'origine ou installés sur existant, relèvent de la responsabilité décennale lorsqu'ils rendent l'ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination (Civ. 3e, 15 juin 2017, n° 15-19.640)
En l'espèce, la société Valphoton produit à l'appui de sa demande un courrier daté du 11 avril 2018 de la DDPP adressé au Maire de [Localité 4] l'informant que le magasin « Intersport » avait fait l'objet d'un avis défavorable à la poursuite d'exploitation depuis le 11 mars 2014 au motif que des non-conformités sur le plan de la sécurité incendie avaient été constatées.
La société Valénergies produit un procès-verbal de la commission de sécurité du 20 mars 2019 qui permet de comprendre que les panneaux photovoltaïques ont été installés sans étude préalable à l'origine et que cela a créé un groupement d'établissements. La commission relève qu'ils vont être déplacés pour restituer l'isolement entre les lots et qu'elle a émis un avis défavorable sur les autorisations de travaux qui lui ont été communiqués depuis lors, en raison de l'absence d'acrotère au niveau des panneaux et l'absence de prise en compte de ses prescriptions.
Par ailleurs, il résulte du bail emphytéotique conclu le 25 mai 2012 entre la SCI Le Colisée et la société Valphoton que des travaux d'aménagement du site et de construction d'un ensemble de panneaux photovoltaïques seront entièrement réalisés par la société Valsolar, le bailleur autorisant le preneur « à effectuer toutes les démarches complémentaires qui pourraient être nécessaires dans l'avenir concernant ce projet ». Il est enfin prévu que « le bailleur fera son affaire personnelle de la modification par avenant des baux commerciaux des occupants des bâtiments pour préciser la nature de l'utilisation des toitures et les conséquences qui pourront en découler. »
Ainsi, il n'est pas contesté que la société Valénergies a installé les panneaux photovoltaïques.
Il ne peut être nié que l'avis défavorable de la commission de sécurité peut être de nature à rendre impropre le bâtiment à sa destination en ne permettant pas de recevoir du public. Toutefois, force est de constater tout d'abord, qu'il n'est pas rapporté la preuve que le magasin ait été effectivement empêché d'ouvrir, l'avis datant de 2014. D'autre part, il n'est pas établi qu'à la date de l'installation le magasin Intersport était déjà existant et que la société Valénergies ait été informée du type de locataires commerciaux lors de la construction. Or, il ressort du contrat de bail qu'il appartenait au bailleur ou au preneur de solliciter toutes autorisations nécessaires à l'utilisation des panneaux. Il n'est d'ailleurs même pas établi que ces difficultés concernent tout l'ouvrage, aucune précision sur l'exploitation du bâtiment n'étant apportée.
En conséquence, la société Valphoton ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un désordre de nature décennale sur les panneaux photovoltaïques engageant la responsabilité de la société Valénergies.
La demande de la société Valphoton sera donc rejetée et le jugement confirmé.
Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive
La société Valénergies soutient que la société Valphoton a fait preuve d'une résistance abusive et injustifiée à sa demande en paiement.
Toutefois, elle ne rapporte pas la preuve que le comportement de la société Valphoton soit constitutive d'un abus de droit ou d'une intention de nuire. Par ailleurs, elle ne prouve pas avoir subi un préjudice distinct qui ne soit pas réparé par l'octroi des pénalités de retard.
Sa demande sera donc rejetée et le jugement confirmé.
Sur les demandes annexes
Les dispositions du jugement relatives aux dépens doivent être confirmées.
Les dépens d'appel seront mis à la charge de la société Valphoton.
La société Valphoton sera condamnée à payer à la société Valénergies la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement du tribunal de commerce de Cannes du 28 janvier 2021 en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles ;
Condamne la SARLU Valphoton aux dépens d'appel distraits au profit de Me Impératore de la Selarl LX Aix-en-Provence.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Chambre 3-3
ARRÊT AU FOND
DU 09 OCTOBRE 2025
Rôle N° RG 21/02455 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG67N
S.A.R.L. VALPHOTON
C/
S.A.S. VALENERGIES
Copie exécutoire délivrée
le : 2/10/25
à :
Me Maud DAVAL-GUEDJ
Me Pierre-Yves IMPERATORE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de CANNES en date du 28 Janvier 2021 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 2019F00246.
APPELANTE
S.A.R.L. VALPHOTON, prise en la personne de son représentant légal,
dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me François FERRARI, avocat au barreau de BEZIERS, plaidant
INTIMEE
S.A.S. VALENERGIES, (anciennement dénommée VALSOLAR), prise en la personne de son président,
dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Me Pierre-Yves IMPERATORE de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Laurent LIMONI de la SELARL LIMONI AVOCATS, avocat au barreau de GRASSE, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 03 Juin 2025 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Mme VINCENT, conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président
Mme Claire OUGIER, Présidente de chambre
Mme Magali VINCENT, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe, après prorogation, le 09 Octobre 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Octobre 2025,
Signé par Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
La société Valénergies est spécialisée dans le domaine de l'efficacité énergétique et assure l'installation et la maintenance de panneaux photovoltaïques.
La société Valphoton a pour domaine d'activité le commerce d'électricité.
Le 25 mai 2012, la SCI Le Colisée, propriétaire de l'immeuble commercial situé au [Adresse 1] à Draguignan a donné à bail emphytéotique à la société Valphoton deux lots permettant l'installation de panneaux solaires sur le toit et un local permettant d'installer les onduleurs nécessaires au fonctionnement d'une centrale photovoltaïque.
Le 13 décembre 2012, la société Valsolar (aujourd'hui dénommée Valénergies) a conclu avec la société Valphoton un contrat de maintenance au titre duquel Valénergies s'engageait à effectuer des interventions de maintenance sur la centrale photovoltaïque située sur la toiture de l'immeuble précité.
Elles ont aussi conclu 4 autres contrats de maintenance portant sur les installations photovoltaïques installées sur divers sites de la société Valphoton, la centrale [Adresse 5], la centrale B BAIR, la centrale Equipe resto 2 et la centrale Ressouche.
Ces contrats de maintenance ont été conclus pour une première période d'un an, puis reconduits de façon tacite pour une période supplémentaire d'une année, la résiliation pouvant intervenir moyennant un préavis de 90 jours avant la date anniversaire.
Le 26 juillet 2013, la société Valénergies a conclu avec la société Phoventure un protocole de cession au titre duquel la société Valénergies a cédé à la société Phoventure l'intégralité des actions composant le capital de la société Valphoton.
Par courrier en date du 29 novembre 2016, la société Valénergies a informé la société Valphoton que, suite aux avis défavorables en date des 6 juin 2014 et 14 novembre 2014 émis par la Commission Communale de Sécurité de Draguignan concernant la mise en place de panneaux photovoltaïques en toiture du magasin Intersport, la SCI Le Colisée avait choisi de déplacer les panneaux photovoltaïques plutôt que de constituer un groupement d'établissements.
Dans ce même courrier, la société Valénergies a transmis à la société Valphoton un devis de modification de l'installation.
Par courrier en date du 16 décembre 2016, la société Valphoton a fait suite au courrier en date du 29 novembre 2016 de la société Valénergies et informé cette dernière qu'elle considérait que le choix de la SCI Le Colisée de déplacer les panneaux photovoltaïques ne lui était pas opposable et que les conséquences financières de ce choix devaient être supportées par la SCI Le Colisée en sa qualité de bailleur au titre du Bail Emphytéotique du 25 mai 2012.
Par courrier recommandé en date du 08 février 2019, la société Valphoton a résilié le contrat de maintenance d'installation photovoltaïque n°10024 portant sur la centrale photovoltaïque Colisee avec prise d'effet au 13 décembre 2019.
Le 29 mars 2019, la société Valénergies a adressé à la société Valphoton les trois factures suivantes :
- une facture n° 1944 d'un montant 844,62 euros HT, soit 1 013,54 euros TTC, au titre de la redevance semestrielle due pour la période de février 2019 à juillet 2019 en application du contrat de maintenance d'installation photovoltaïque n° 10028 ;
- une facture n° 1945 d'un montant de 828,06 euros HT, soit 993,67 euros TTC, au titre de la redevance semestrielle due pour la période de février 2019 à juillet 2019 en application du contrat de maintenance d'installation photovoltaïque n° 10034 :
- une facture n° 1946 d'un montant de 828,06 euros HT, soit 993,67 euros TTC, au titre de la redevance semestrielle due pour la période de février 2019 à juillet 2019, en application du contrat de maintenance d'installation photovoltaïque n° 10035
Le 28 mai 2019, la société Valénergies a adressé à la société Valphoton trois nouvelles factures.
Par courrier recommandé en date du 18 juin 2019, la société Valénergies a mis la société Valphoton en demeure de lui payer la somme de 5 418,90 euros au titre des six factures impayées.
Par requête en injonction de payer du 22 juillet 2019, la société Valénergies a saisi le président du tribunal de commerce de Cannes.
Par ordonnance en date du 16 août 2019, le Président du tribunal de commerce de Cannes a enjoint à la société Valphoton de payer à la société Valénergies les sommes suivantes :
' la somme de 5 418,90 euros en principal ;
' la somme de 240,00 euros accessoires (majorations de retard, clause pénale, intérêts de retard contractuels) ;
' les dépens : 35,21 euros.
La société Valphoton a formé opposition à ladite ordonnance.
Par jugement en date du 28 janvier 2021, le tribunal de commerce de Cannes a, avec exécution provisoire :
' Condamné la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 5 418,90 euros TTC en principal ;
' Condamné la SARLU Valphoton au paiement des pénalités de retard calculées sur la base de trois fois le taux de l'intérêt légal en vigueur, à compter du 1er mai 2019 pour les factures n° 1944, n° 1945 et n° 1946, à compter du 1er juillet 2019 pour les factures n° 1996 et n° 1997, et à compter du 29 mai 2019 pour la facture n° 2006 ;
' Condamné la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 240 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement des six factures litigieuses ;
' Débouté la SAS Valénergies de sa demande de dommages et intérêts évalués à 5 000 euros pour résistance abusive ;
' Rejeté la demande de dommages et intérêts de la SARLU Valphoton ;
' Condamné la SARLU Valphoton aux dépens, en ceux compris les frais d'injonction, d'opposition et de signification ;
' Condamné la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
' Dit que le présent jugement se substituera à l'Ordonnance portant injonction de payer rendue le 16 Août 2019.
Par déclaration du 17 février 2021, la société Valphoton a interjeté appel de la décision.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 mai 2025. L'affaire a été appelée à l'audience du 3 juin 2025 et a été mise en délibéré au 2 octobre 2025.
L'arrêt rendu sera contradictoire, conformément à l'article 467 du code de procédure civile.
PRETENTIONS ET MOYENS
Par conclusions n°3 signifiées par RPVA le 12 mai 2025, la SARL Valphoton demande à la cour de :
Infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :
- Condamné la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 5 418,90 euros TTC en principal
- Condamné la SARLU Valphoton au paiement des pénalités de retard calculées sur la base de trois fois le taux de l'intérêt légal en vigueur, à compter du 1 mai 2019 pour les factures n° 1944, n° 1945 et 1946, à compter du Juillet 2019 pour les factures n° 1996 et n° 1997 et à compter du 29 mai 2019 pour la facture no 2006
- Condamné la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 240 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement des six factures litigieuses
- Rejeté la demande de dommages et intérêts de la SARLU Valphoton
- Condamné la SARLU Valphoton aux dépens, en ceux compris les frais d'injonction, d'opposition et de signification
- Condamné la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile
Par voie de conséquence,
Débouter Valénergies de toutes ses fins et demandes,
Vu l'article 1792 du Code civil,
Condamner Valénergies au paiement à Valphoton de la somme de 44 325,60 euros TTC, outre intérêt au taux légal majoré,
Débouter Valénergies de son appel incident portant sur une prétendue résistance abusive,
Condamner Valénergies au paiement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre tous frais et dépens d'appel, ces derniers distraits au profit de la SCP Cohen Guedj ' Montero ' Daval-Guedj sur son offre de droit.
Par conclusions d'intimée et d'appelante incidente récapitulatives n°2 signifiées par RPVA le 2 mai 2025, la SAS Valénergies demande à la cour de :
' Juger que la société Valphoton n'a jamais contesté la réalité, ni la qualité des prestations de maintenance des installations photovoltaïques fournies par la société Valénergies ;
' Juger que la société Valphoton n'a jamais émis aucune réserve, ni contestation à réception des factures n° 1944, 1945, 1946, 1996, 1997, et 2006 émises par la société Valénergies ;
' Juger que la société Valphoton a fait preuve d'une résistance abusive et injustifiée à une demande en paiement fondée de la société Valénergies ;
En conséquence,
' Confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Cannes en date du 28 janvier 2021 en ce qu'il a :
' Condamné la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 5 418,90 euros TTC en principal ;
' Condamné la SARLU Valphoton au paiement des pénalités de retard calculées sur la base de trois fois le taux de l'intérêt légal en vigueur, à compter du 1er mai 2019 pour les factures n° 1944, n° 1945 et n° 1946, à compter du 1 er juillet 2019 pour les factures n° 1996 et n° 1997, et à compter du 29 mai 2019 pour la facture n° 2006 ;
' Condamné la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 240 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement des six factures litigieuses ;
' Rejeté la demande de dommages et intérêts de la SARLU Valphoton ;
' Condamné la SARLU Valphoton aux dépens, en ceux compris les frais d'injonction, d'opposition et de signification ;
' Condamné la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
' Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
' Infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Cannes en date du 28 janvier 2021 en ce qu'il a débouté la SAS Valénergies de sa demande de dommages et intérêts évalués à 5 000 euros pour résistance abusive ;
et statuant à nouveau :
' Condamner la société Valphoton à payer à la société Valénergies la somme de 5 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée à une demande en paiement fondée ;
' Débouter la société Valphoton de l'intégralité de ses demandes ;
' Condamner la société Valphoton à payer à la société Valénergies la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
' Condamner la société Valphoton aux dépens, aux dépens distraits au profit de Maître Pierre-Yves IMPERATORE de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, Avocats associés aux offres de droit.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est fait renvoi aux dernières écritures déposées pour l'exposé des moyens des parties.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande en paiement des factures
La société Valénergies soutient que la société Valphoton n'a jamais contesté la réalité ni la qualité des prestations de maintenance des installations qu'elle avait réalisées et que conformément au contrat, elle est tenue de s'acquitter du prix des prestations. Cette absence de réserve et de contestations des factures emporte selon elle acceptation de celles-ci.
A l'appui de sa demande, elle indique que dès le mois de janvier 2019, elle a effectué des prestations de maintenance préventive, ainsi qu'une intervention curative le 3 mai 2019 et qu'elle produit les bilans de maintenance qui mentionnent précisément la date d'intervention, la désignation des prestations, les lieux et durée des interventions et les préconisations formulées à la suite des interventions.
Enfin, la société Valénergies soutient que le financement des travaux de déplacement de la centrale photovoltaïque concerne exclusivement la relation entre le bailleur et le preneur et ne peut être mis à sa charge.
En réplique, l'appelante fait valoir que pour l'année 2019, la société Valénergies ne produit aucune preuve de l'accomplissement de ces opérations de maintenance. Or, en application de l'article 1353 du Code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Les rapports de maintenance qu'elle a produit en première instance sont insuffisants à justifier de l'accomplissement des prestations et ce, d'autant plus que depuis l'arrêt de principe de la Cour de cassation du 2 avril 1996, il est impossible de se fonder sur des éléments émanant de la partie elle-même.
En outre, elle fait valoir que la lecture des pièces permet de conclure que la maintenance préventive n'a pas été accomplie. Ainsi, l'appelante conteste les rapports d'intervention produits qu'elle estime avoir été fabriqués pour justifier les factures.
Concernant la facture de maintenance curative, elle soutient qu'elle n'a été causée que par la carence de l'application de la maintenance préventive.
L'article 1134 ancien du code civil prévoit que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits
Selon l'article 1353 du même code, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Il a été jugé que la preuve d'une prestation ne peut résulter exclusivement de la facture du prestataire (Civ 2e, 23 septembre 2004, n°02-20,497).
En l'espèce, la société Valénergies sollicite le paiement des redevances du 1er semestre 2019 pour les centrales [Adresse 5], B bair, équipe resto 2, le paiement des redevances de mai à octobre 2019 pour les centrales Le Colisée et Ressouche, ainsi que le coût de l'intervention du 3 mai 2019 sur un onduleur de la centrale Le colisée.
Les 5 contrats de maintenance conclus entre les parties prévoient en leur article 2.4 que la redevance annuelle due par la société Valphoton est de 1 500 euros HT, montant actualisé chaque année et réglé semestriellement.
L'article 5-1 précise : « Le CLIENT s'engage à payer à VALSOLAR SAS le montant des redevances dues au titre du présent contrat ou toutes les facturations pouvant en résulter.(...)
Dans le cas où une intervention d'un technicien de VALSOLAR SAS est rendue nécessaire sur le site spécifié aux conditions particulières afin de déterminer la nature d'une anomalie de fonctionnement, et si la nature de cette anomalie de fonctionnement est jugée par VALSOLAR SAS hors prestations du présent contrat, alors le CLIENT s'engage à régler la facture de service qui en résulte. La facture sera établie par VALSOLAR SAS et sera indexée sur le barème kilométrique et le coût d'un technicien définis ci-après.
Conditions particulières :
' Conditions tarifaires de déplacement : 1,5 EUR/kilomètres
' Forfait d'intervention d'un technicien : 450 EUR / jours (toute journée commencée est due)».
A l'appui de sa demande en paiement, la société Valénergies produit les bilans de maintenance préventive établis les 23 janvier 2019 des centrales B Bair et Colisée, les bilans de maintenance préventive des 26 septembre 2019 des centrales Ressouche et [Adresse 5] et le bilan de maintenance du 27 septembre 2019 de la centrale Equipe resto 2. Tous ces bilans sont accompagnés chacun des « rapports thermiques maintenance préventive » comprenant les mesures effectuées, les photographies datées et horodatées des installations contrôlées et des bons de travaux correspondants.
La société Valphoton allègue que ces pièces sont incohérentes, comme par exemple dans le rapport de la centrale B Bair, les préconisations indiquées ne sont pas appropriées. Toutefois, l'efficacité des préconisations est sans incidence sur le fait que la maintenance préventive ait été effectuée ou non. Il en est de même sur les différences d'heures entre le bon de travaux et le rapport thermique pour la centrale Colisée, celle-ci ne mettant pas en doute la réalité de l'intervention.
Elle soutient par ailleurs que ces rapports ne lui ont pas été communiqués avant l'émission des factures. Toutefois, les contrats ne prévoyaient pas cette notification préalablement au paiement des factures et cet élément n'est pas non plus de nature à remettre en doute l'effectivité des maintenances.
En conséquence, il résulte de ces pièces que la société Valénergies justifie avoir effectué ses opérations de maintenance préventive en 2019 sur toutes les centrales visées par les contrats.
Concernant la facture n°2006 relative à l'intervention du 3 mai 2019 sur l'onduleur de la centrale du Colisée, la société Valénergie produit les courriels de la société Valphoton l'avisant d'une panne le 30 avril, sa réponse indiquant qu'elle interviendrait au plus tard le 6 mai 2019 et le bon d'intervention du 3 mai 2019. La société Valphoton n'allègue pas que la panne ait continué postérieurement à cette date. Dès lors, il apparaît que la société Valénergies justifie de l'effectivité de sa prestation dont elle demande le paiement. En outre, il n'est pas rapporté la preuve que ce défaut ait été causé par une absence de maintenance préventive, aucun élément ne permettant d'établir qu'il ait été récurrent.
En conséquence, la société Valénergies est fondée à solliciter le paiement des factures à la société Valphoton et le jugement sera confirmé.
La société Valénergies sollicite le paiement des pénalités de retard afférentes aux factures impayées.
L'article L441-6 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige prévoit que « Les conditions de règlement doivent obligatoirement préciser les conditions d'application et le taux d'intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture ainsi que le montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier dans le cas où les sommes dues sont réglées après cette date. Sauf disposition contraire qui ne peut toutefois fixer un taux inférieur à trois fois le taux d'intérêt légal, ce taux est égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage. Dans ce cas, le taux applicable pendant le premier semestre de l'année concernée est le taux en vigueur au 1er janvier de l'année en question. Pour le second semestre de l'année concernée, il est le taux en vigueur au 1er juillet de l'année en question. »
En l'espèce, les factures impayées mentionnaient « En cas de retard de paiement seront exigibles, conformément à l'article L441-6 du code de commerce, des pénalités de retard calculées sur la base de trois fois le taux de l'intérêt légal en vigueur ainsi qu'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement de 40 euros. »
Les contrats de maintenance prévoyaient de même dans son article 5.2, ces pénalités.
Dès lors, la société Valénergies est fondée à en solliciter le paiement et le jugement sera donc confirmé sur ce point.
Sur la demande reconventionnelle au titre du coût du déplacement de la centrale
La société Valphoton soutient qu'elle a été contrainte d'engager des sommes importantes pour déplacer la centrale Colisée afin de répondre à une exigence administrative connue avant sa cession par la société Valénergies. Ainsi, cette dernière a engagé sa responsabilité auprès d'elle qui a dû débourser les frais nécessaires à la régularisation de la situation. Elle demande donc la condamnation de l'intimée sur le fondement de l'article 1792 du Code civil. En effet, la nature décennale du problème a été établie puisque des non-conformités sur le plan de la sécurité incendie ont été constatées. Ils entraînent donc une impropriété de l'ouvrage à sa destination.
En réplique, la société Valénergies fait valoir que la société Valphoton ne rapporte nullement la preuve des prétendus désordres de nature décennale qu'elle allègue et que par ailleurs, depuis 2016 la société Valphoton a toujours reconnu que le financement des travaux de déplacement de la centrale incombe au bailleur.
Concernant les non-conformités sur le plan de la sécurité incendie, il ne concerne que le magasin Intersport et non la centrale photovoltaïque installée en toiture de ce magasin.
L'article 1792 du code civil prévoit que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.
Il a été jugé que les désordres affectant des éléments d'équipement, dissociables ou non, d'origine ou installés sur existant, relèvent de la responsabilité décennale lorsqu'ils rendent l'ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination (Civ. 3e, 15 juin 2017, n° 15-19.640)
En l'espèce, la société Valphoton produit à l'appui de sa demande un courrier daté du 11 avril 2018 de la DDPP adressé au Maire de [Localité 4] l'informant que le magasin « Intersport » avait fait l'objet d'un avis défavorable à la poursuite d'exploitation depuis le 11 mars 2014 au motif que des non-conformités sur le plan de la sécurité incendie avaient été constatées.
La société Valénergies produit un procès-verbal de la commission de sécurité du 20 mars 2019 qui permet de comprendre que les panneaux photovoltaïques ont été installés sans étude préalable à l'origine et que cela a créé un groupement d'établissements. La commission relève qu'ils vont être déplacés pour restituer l'isolement entre les lots et qu'elle a émis un avis défavorable sur les autorisations de travaux qui lui ont été communiqués depuis lors, en raison de l'absence d'acrotère au niveau des panneaux et l'absence de prise en compte de ses prescriptions.
Par ailleurs, il résulte du bail emphytéotique conclu le 25 mai 2012 entre la SCI Le Colisée et la société Valphoton que des travaux d'aménagement du site et de construction d'un ensemble de panneaux photovoltaïques seront entièrement réalisés par la société Valsolar, le bailleur autorisant le preneur « à effectuer toutes les démarches complémentaires qui pourraient être nécessaires dans l'avenir concernant ce projet ». Il est enfin prévu que « le bailleur fera son affaire personnelle de la modification par avenant des baux commerciaux des occupants des bâtiments pour préciser la nature de l'utilisation des toitures et les conséquences qui pourront en découler. »
Ainsi, il n'est pas contesté que la société Valénergies a installé les panneaux photovoltaïques.
Il ne peut être nié que l'avis défavorable de la commission de sécurité peut être de nature à rendre impropre le bâtiment à sa destination en ne permettant pas de recevoir du public. Toutefois, force est de constater tout d'abord, qu'il n'est pas rapporté la preuve que le magasin ait été effectivement empêché d'ouvrir, l'avis datant de 2014. D'autre part, il n'est pas établi qu'à la date de l'installation le magasin Intersport était déjà existant et que la société Valénergies ait été informée du type de locataires commerciaux lors de la construction. Or, il ressort du contrat de bail qu'il appartenait au bailleur ou au preneur de solliciter toutes autorisations nécessaires à l'utilisation des panneaux. Il n'est d'ailleurs même pas établi que ces difficultés concernent tout l'ouvrage, aucune précision sur l'exploitation du bâtiment n'étant apportée.
En conséquence, la société Valphoton ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un désordre de nature décennale sur les panneaux photovoltaïques engageant la responsabilité de la société Valénergies.
La demande de la société Valphoton sera donc rejetée et le jugement confirmé.
Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive
La société Valénergies soutient que la société Valphoton a fait preuve d'une résistance abusive et injustifiée à sa demande en paiement.
Toutefois, elle ne rapporte pas la preuve que le comportement de la société Valphoton soit constitutive d'un abus de droit ou d'une intention de nuire. Par ailleurs, elle ne prouve pas avoir subi un préjudice distinct qui ne soit pas réparé par l'octroi des pénalités de retard.
Sa demande sera donc rejetée et le jugement confirmé.
Sur les demandes annexes
Les dispositions du jugement relatives aux dépens doivent être confirmées.
Les dépens d'appel seront mis à la charge de la société Valphoton.
La société Valphoton sera condamnée à payer à la société Valénergies la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement du tribunal de commerce de Cannes du 28 janvier 2021 en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne la SARLU Valphoton à payer à la SAS Valénergies la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles ;
Condamne la SARLU Valphoton aux dépens d'appel distraits au profit de Me Impératore de la Selarl LX Aix-en-Provence.
LE GREFFIER LE PRESIDENT