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Décisions

CA Montpellier, 1re ch. de la famille, 10 octobre 2025, n° 21/06540

MONTPELLIER

Arrêt

Autre

CA Montpellier n° 21/06540

10 octobre 2025

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1re chambre de la famille

ARRET DU 10 OCTOBRE 2025

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/06540 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PGOW

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 13 OCTOBRE 2021

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MONTPELLIER

N° RG 19/06710

APPELANT :

Monsieur [P] [E]

né le [Date naissance 9] 1950 à [Localité 16]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Andie FULACHIER substituant Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIME :

Monsieur [N] [G] [E]

né le [Date naissance 7] 1949 à [Localité 16]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représenté par Me Eve TRONEL-PEYROZ de la SCP SVA, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 28 novembre 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 juin 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente de chambre, et Madame Nathalie LECLERC-PETIT, Conseillère, chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente de chambre

Madame Nathalie LECLERC-PETIT, Conseillère

Monsieur Olivier GUIRAUD, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Séverine ROUGY

ARRET :

- Contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente de chambre, et par Madame Séverine ROUGY, Greffière.

*

* *

EXPOSÉ DU LITIGE

Du mariage de M. [OP] [E] et de Mme [T] [UI], qui n'a été précédé d'aucun contrat de mariage, sont issus deux enfants : [N] né le [Date naissance 7] 1949 et [P] né le [Date naissance 9] 1950.

Mme [T] [UI] et son époux, M. [OP] [E], sont respectivement décédés à [Localité 18] le [Date décès 4] 2010 et le [Date décès 8] 2015, à l'âge de 85 et 92 ans, en l'état d'une donation- partage en date du 22 avril 1996, et de deux contrats d'assurances-vie, souscrits pour le premier par les deux époux le 30 janvier 1991 auprès de la compagnie [12] avec stipulation d'un partage du capital à parts égales entre leurs deux fils, et pour le second dénommé 'Predica', souscrit par M. [OP] [E] le 2 juin 2014 auprès du [11] avec stipulation du partage du capital entre ses deux fils, tiers bénéficiaires, à hauteur de 65% pour [N] et de 35% pour [P].

Par ordonnance en date du 27 avril 2017, le juge des référés du tribunal judiciaire de Montpellier saisi par M. [P] [E] ordonnait une expertise et désignait M. [VX] [LL] [Z] pour y procéder afin de faire les comptes entre les parties.

L'expert déposait son rapport au greffe du juge des référés du tribunal le 6 juin 2019.

Après avoir adressé à M. [N] [E] le 4 novembre 2019, une mise en demeure de rembourser diverses sommes qu'il lui reproche d'avoir détournées ou dissimulées à l'expert, M. [P] [E] l'a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Montpellier par acte de commissaire de justice en date du 17 décembre 2019 aux fins de voir ordonner l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de feu M. [OP] [E] et de la communauté ayant existé entre ce dernier et feue son épouse, de le voir condamner à rapporter diverses sommes et primes d'assurances-vie perçues par lui, et enfin, de le voir déclarer coupable de recel successoral et privé de sa part sur l'actif successoral.

Par jugement contradictoire rendu le 13 octobre 2021, le tribunal judiciaire de Montpellier a :

ordonné le partage et la liquidation de la succession de feu M. [OP] [E], ainsi que le cas échéant, la liquidation du régime matrimonial ayant existé entre le défunt et son épouse,

désigné Maître [W] [A], notaire à [Localité 14], pour y procéder,

commis le juge de la mise en état en qualité de juge commis, pour surveiller les opérations et faire rapport en cas de difficulté,

dit que M. [N] [E] doit rapporter à la succession la somme de 22 700 euros,

dit que M. [P] [E] doit rapporter à la succession la somme totale de 32 790 euros,

débouté M. [P] [E] de ses demandes de recel successoral au titre des retraits d'espèces et des achats par carte bancaire,

débouté M. [P] [E] de sa demande relative aux primes du contrat d'assurance-vie et de sa demande de recel successoral à ce titre,

débouté M. [N] [E] de sa demande au titre d'une créance sur l'indivision successorale,

rejeté le surplus des demandes,

ordonné l'exécution provisoire du jugement,

dit que les dépens seront passés en frais privilégiés de partage.

Par déclaration au greffe en date du 10 novembre 2021, M. [P] [E] a relevé appel limité de ce jugement aux fins d'annulation ou à tout le moins de réformation des chefs relatifs :

- aux rapports dûs à la succession par lui et par son cohéritier des sommes respectives de 32 790 euros et de 22 700 euros,

- au rejet de ses demandes de recel successoral formées à l'encontre de M. [N] [E] au titre des retraits en espèces et des achats par carte bancaire,

- au rejet de sa demande au titre des primes d'assurance-vie et de sa demande de recel successoral les concernant,

- au rejet du surplus des demandes.

Les dernières conclusions de M. [P] [E] ont été déposées au greffe par communication électronique le 7 juillet 2022 et celles de M. [N] [E] le 12 avril 2022.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 novembre 2024.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans le dispositif de ses dernières conclusions, M. [P] [E] demande à la cour, au visa des articles 815, 856, 922, 860 et 778 et suivants du code civil, d'infirmer le jugement déféré des chefs visés dans sa déclaration d'appel, et statuant à nouveau, de :

débouter M. [N] [E] de l'intégralité de ses demandes,

constater que la masse à partager s'élève à la somme de 223 761,26 euros,

Sur la convention du 20 décembre 2010,

constater que M. [N] [E] produit un faux s'agissant de la convention établie le 20 décembre 2010,

constater que M. [N] [E] s'abstient de produire l'original malgré sommation,

dire et juger que l'intention frauduleuse est caractérisée,

dire et juger par conséquent que M. [N] [E] ne dispose d'aucune créance sur la succession,

Sur les donations reçues,

constater que M. [N] [E] détenait une procuration sur le compte de M. [OP] [E], son père,

constater que M. [N] [E] vivait chez M. [OP] [E] nourri, logé, blanchi,

constater que M. [OP] [E] percevait une retraite mensuelle d'un montant de 1 213 euros,

constater que M. [OP] [E], particulièrement âgé, ne pouvait plus se déplacer,

constater des retraits au DAB entre 2006 et 2015 à hauteur de 44 200 euros,

constater des retraits carte bleue entre 2009 et 2015 à hauteur de 2 936,65 euros,

constater que M. [N] [E] a reçu des donations de son père entre 2009 et 2015 à hauteur de 63 362 euros,

Par conséquent,

juger que M. [N] [E] devra rapporter à la succession les sommes de :

* 44 200 euros au titre des retraits DAB injustifiés malgré sa procuration sur les comptes de M. [OP] [E],

* 2 936,65 euros au titre des retraits par carte bleue,

* 63 362 euros au titre des donations consenties entre 2009 et 2015,

Sur l'assurance-vie,

constater que la répartition initiale du contrat d'assurance-vie était de 50/50 et ce pendant 21 ans,

constater que le changement de répartition s'est opéré quelques mois avant le décès de M. [OP] [E],

Par conséquent,

juger que les primes étaient manifestement exagérées,

juger que la somme de 109 722,27 euros devra être rapportée à la succession par M. [N] [E],

constater que ce comportement caractérise la volonté de s'approprier l'actif de M. [OP] [E] à son détriment,

condamner M. [N] [E] à lui verser la somme de 20 000 euros de dommages et intérêts,

ordonner l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de M. [OP] [E],

voir ordonner la réunion et la réintégration à la masse de calcul et le rapport à cette succession des éléments d'actifs suivants détournés par M. [N] [E],

dire et juger que l'élément moral de l'infraction de recel successoral est caractérisé dès lors que M. [N] [E] n'a pas fait mention de ses donations reçues de M. [OP] [E] à Monsieur l'Expert,

dire et juger que M. [N] [E] ne pourra prétendre à aucune part,

dire et juger que les sommes recelées porteront intérêt au taux légal,

condamner M. [N] [E] à la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans le dispositif de ses dernières conclusions, M. [N] [E] demande à la cour, de :

confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, sauf à rapporter sa créance, à savoir la somme de 47 400 euros,

confirmer le jugement dont appel sauf sur le rapport de la somme de 47 400 euros qui n'est pas une dette de succession mais une dette de M. [P] [E] sur son frère M. [N] [E],

dire et juger que M. [P] [E] devra rembourser à M. [N] [E] la somme de 47 397,27 euros, qui sera portée au passif,

Subsidiairement,

dire que cette somme sera portée au passif de la succession pour lui être payée,

ordonner pour le surplus l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de M. [OP] [E],

confirmer pour le surplus le jugement dont appel, sauf ce qui précède,

condamner M. [P] [E] à payer une somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures précitées pour l'exposé exhaustif des moyens des parties.

SUR QUOI LA COUR

Sur la dévolution et l'objet du litige

L'étendue de l'appel est déterminée par la déclaration d'appel et peut être élargie par l'appel incident ou provoqué (articles 562 et 901 4° du code de procédure civile) alors que l'objet du litige est déterminé par les conclusions des parties (article 910-4 du code de procédure civile). L'objet du litige ne peut s'inscrire que dans ce qui est dévolu à la cour et les conclusions ne peuvent étendre le champ de l'appel.

Les formules 'constater' mentionnées au dispositif des conclusions de M. [P] [E] n'étant pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile mais de simples déclarations d'intention, la cour n'a pas à y répondre comme n'étant saisie d'aucune demande.

Les chefs relatifs aux opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de feu M. [OP] [E] et du régime matrimonial ayant existé entre ce dernier et son épouse pré-décédée, Mme [T] [UI], à la désignation de Maître [W] [A] pour y procéder et du juge commissaire pour surveiller lesdites opérations ainsi qu'aux frais irrépétibles de première instance n'étant dévolus par aucune des parties, ils sont définitifs.

A défaut de prétention émise par M. [P] [E] dans le dispositif de ses dernières conclusions, tendant à voir déclarer M. [N] [E] coupable de recel et sanctionné au titre de retraits et achats par carte bleue débités sur le compte de leur défunt père qu'il lui impute au soutien de ses demandes de rapports, la cour n'est pas saisie de ce chef.

Pour ce même motif tiré de l'absence de prétention formée par M. [P] [E], la cour n'est pas saisie du chef d'un recel relatif à des primes d'assurance-vie.

De par les appels, principal et incident, des parties, et en l'état des seules prétentions qu'ils ont chacun expressément formulées dans le dispositif de leurs dernières conclusions, la cour est saisie des chef suivants :

les demandes de rapports au titre de donations reçues par M. [N] [E] entre 2009 et 2015, et au titre de sommes retirées par carte sur le compte de feu, M. [OP] [E],

la demande de recel successoral au titre de donations dont M. [N] [E] a été bénéficiaire de la part de feu, M. [OP] [E],

la demande de rapport par M. [N] [E] des primes d'assurance-vie,

la demande de fixation d'une créance de 47 397,27 € revendiquée par M. [N] [E] à titre principal à l'égard de son frère, M. [P] [E], et, sa demande subsidiaire de fixation d'une créance à son profit du même montant mais à inscrire au passif de la succession de feu, M. [OP] [E].

*****

* Sur les demandes de rapports et de recel au titre de donations de sommes dont M. [N] [E] aurait été gratifié par son père

'Les premiers juges ont considéré qu'en l'absence de pièce justificative qui permette d'étayer l'assertion selon laquelle M. [N] [E] aurait bénéficié d'une donation pour payer une dette de 11 000 euros comme l'a conclu l'expert, le montant des dons que ce dernier a reçu de son père de façon avérée ne représentent qu'une somme totale de 53 362 euros, et qu'au regard de l'assistance et du dévouement dont il a fait preuve quotidiennement auprès de ses parents affaiblis, au delà de la légitime dévotion filiale, il doit être considéré que ces sommes dont le défunt l'a gratifié à compter de l'année 2015, et qui correspondent à un montant mensuel de 365 euros, lui ont été données à titre rémunératoire, de sorte qu'il n'en doit pas rapport à la succession.

Le tribunal a donc décidé que M. [N] [E] ne doit rapporter à la succession que la somme de 22 700 euros que lui a versée son père le 7 décembre 2009 pour l'achat d'un véhicule, sans recel successoral pouvant être retenu à son encontre à défaut de tout élément objectif de nature à établir la volonté de M. [N] [E] de porter atteinte à l'égalité du partage, en l'absence de dissimulation faute de déclaration de succession.

' M. [P] [E] conclut à l'infirmation de ce chef, exposant que M. [N] [E] a bénéficié entre 2009 et 2015 de plusieurs virements sur son compte de la part de leur père, ainsi que de chèques tirés sur le compte de ce dernier, soit au total au titre de la seule année 2015, 40 662 euros, qui sont venus s'ajouter à la somme de 22 700 euros dont il avait déjà profité de la part de M. [OP] [E] le 7 décembre 2009 pour le financement d'un véhicule Toyota.

M. [P] [E] conteste que son frère ait été dévoué à leurs parents, affirmant qu'il n'est revenu vivre avec eux qu'après une rupture amoureuse et sans participer en aucune manière aux charges de la vie courante.

Il fait valoir que l'intimé dissimule l'intervention de professionnels de santé auprès de leurs parents, ainsi que l'assistance de Mme [LK] [O], comme ses propres interventions pour les avoir accompagnés aux courses ou à des rendez-vous médicaux, et encore que les attestations produites par M. [N] [E], qui sont censées établir la réalité de soins apportés par lui, ne sont pas circonstanciées.

Il soutient que le tribunal n'a pas apprécié équitablement les attestations que lui-même a produites, qu'il s'agisse de celle de Mme [V] [C] qu'il a au demeurant retenue de façon contradictoire, comme celle de [M], le propre fils de M. [N] [E], qui a été interprétée de façon erronée.

M. [P] [E] conclut que M. [N] [E] doit rapporter à la succession de leur défunt père une somme de 63 362 euros qu'il a reçue à titre de donations dont il conteste le caractère rémunératoire tel que le premier juge l'a retenu, ajoutant que son frère ne justifie pas en quoi son intervention a outrepassé l'obligation naturelle et le devoir moral d'un fils envers ses parents.

Enfin, l'appelant critique la décision déférée en ce qu'il a été considéré qu'aucun recel n'est constitué alors que M. [N] [E] n'a pas déclaré au notaire avoir bénéficié des sommes qu'il ne conteste pas avoir reçues.

' M. [N] [E] conclut pour sa part que l'ensemble des donations qu'il a reçues de leur père et qui ont représenté une somme de 53 362 euros, ont un caractère rémunératoire dans la mesure où elles ont eu vocation à récompenser son assistance dévouée auprès de leurs parents dont il s'est occupé durant six ans et demi nuit et jour. Il fait valoir que sa présence leur a permis d'économiser la somme totale de 105 037 euros qu'ils auraient dû exposer pour être accueillis et pris en charge en maison de retraite pendant la seule période au cours de laquelle il s'est occupé d'eux, sur la base d'un coût moyen mensuel de 2 200 €, alors que les sommes dont il a été gratifiées par ces derniers n'ont représenté que 714,14 euros par mois.

Il demande à la cour de confirmer la décision déférée de ce chef ainsi que du chef du recel à défaut de tout détournement qui lui soit imputable.

' Réponse de la cour

L'article 843 du code civil dispose que tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l'actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement , il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale.

Selon l'article 894, la donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donataire qui l'accepte.

Le don manuel suppose que soit rapportée la preuve par celui qui l'invoque d'une intention libérale, laquelle implique une absence de contrepartie qui ne peut se déduire du seul déséquilibre entre les engagements réciproques des co-contractants.

Par ailleurs, le délit civil du recel successoral se définit comme toute fraude ou manoeuvre dolosive commise sciemment par un héritier, au détriment de ses co-héritiers, dans le but de rompre l'égalité dans le partage.

Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l'héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part.

Pour être retenue, la qualification de recel suppose que soit rapportée la preuve par l'héritier qui l'invoque, à la fois d'actes matériels positifs caractérisant une rétention de biens dépendant de la succession postérieurement au décès, notamment un divertissement par appropriation indue des effets de la succession ou par une dissimulation de donation reçue, et également d'une intention frauduleuse qui a animé l'héritier auteur de cette rétention dans le but de rompre l'égalité du partage.

M. [P] [E] invoquant des donations dont son frère a été gratifié par leur père et qu'il aurait dissimulées à son détriment, il doit en premier lieu rapporter la preuve de l'existence des dons allégués au soutien de sa demande de rapport.

En l'espèce, M. [N] [E] reconnaît avoir reçu, à titre de don de son défunt père, une somme totale de 53 362 euros moyennant quatre versements au crédit de son compte, après débit de celui de feu M. [OP] [E], tels que l'expert les avait mis en évidence dans la conclusion de son pré-rapport (page 33), soit :

- le 7 décembre 2009 : 22 700 euros qui lui ont permis d'acheter un véhicule Toyota,

- le 23 septembre 2015 : 10 662 euros ayant permis le règlement d'honoraires de l'avocat de M. [N] [E] dans le cadre de sa procédure de divorce,

- le 9 octobre 2015 : 17 000 euros ayant permis l'achat d'un véhicule [T] pour son compte,

- le 6 novembre 2015 : une somme de 3 000 euros reçue par virement et ayant permis de créditer un compte d'épargne ' carré jaune ' ouvert au nom de M. [N] [E].

Par la suite, l'expert répondant au dire de l'avocat de M. [P] [E] (page 57 de son rapport) a proposé de rajouter une somme de 10 000 euros portant à 63 362 euros les dons manuels reçus par M. [N] [E], en se fondant sur le simple constat que le 19 janvier 2015 avait été débité du compte de M. [OP] [E] un chèque d'un montant de 10 000 euros qui n'avait pas servi à abonder le compte assurance-vie de ce dernier comme l'alléguait M. [N] [E], ce dont il a estimé pouvoir déduire que 'ce chèque n'avait pu que profiter à M. [N] [E]', sauf justificatif, dès lors que 'M. [OP] [E] devait être dans l'incapacité de gérer ses biens à cette époque'.

Or, d'une part, il n'est aucunement établi que M. [OP] [E] était déjà hors d'état de gérer ses comptes en janvier 2015.

D'autre part, sauf à renverser la charge de la preuve, l'existence d'un don manuel ne peut être déduite exclusivement d'un débit en l'absence de justificatif produit par M. [P] [E] de ce que le donataire prétendu a été effectivement gratifié sans contrepartie du montant correspondant.

La conclusion de l'expert qui a ajouté dans son rapport définitif le montant de ce chèque aux autres dons manuels qu'il avait déjà retenus, s'avère donc juridiquement contestable.

Le montant des dons dont il est démontré que M. [N] [E] a été gratifié de la part de son défunt père à titre de libéralité doit être fixé à la somme de 53 362 euros, telle que le tribunal l'a retenue à bon droit.

M. [N] [E], qui conteste que cette somme puisse donner lieu à rapport en faisant valoir le caractère rémunératoire de ces donations, supporte la charge de la preuve que l'assistance qu'il expose avoir apportée à ses parents a revêtu un caractère excessif dépassant la piété filiale et qu'elle a engendré pour ces derniers un enrichissement lié à l'économie d'aide qu'ils ont ainsi réalisée.

En l'espèce, il n'est pas contesté que M. [N] [E] s'est installé chez ses parents à partir de l'année 2009, alors que sa mère était déjà malade.

Plusieurs amis ou voisins de feu M. [OP] [E], tous domiciliés à [Localité 5] : [R] [L] et [LK], [FD] [S], [IH] [F] [Y], [I] [X] et [RE] [K] ont rédigé des attestations, versées au débat par M. [N] [E] par lesquelles ils attestent de façon concordante avoir personnellement constaté que celui-ci s'est occupé de ses parents jour et nuit, d'abord de sa mère atteinte de la maladie d'Alzheiner et très dépendante, qu'il a aidée, sur laquelle il a veillée en pourvoyant à tous ses besoins jusqu'à son décès en [Date décès 8] 2010, en restant ensuite auprès de son père auquel il s'est dévoué pour l'accompagner dans ses sorties, l'assister dans la gestion des tâches quotidiennes, puis en l'aidant également dans les actes de la vie courante, quand sa santé s'est dégradée en septembre 2015 et qu'il a été alité, jusqu'à son décès intervenu le [Date décès 8] 2015.

Mme [B] [J] qui atteste avoir exercé l'emploi d'aide à domicile pendant environ 2 ans chez feu M. [OP] [E] après le décès de son épouse, en tant que salariée de l'ADMR intervenant trois fois par semaine pour l'entretien de la maison, a décrit pour sa part de façon précise et circonstanciée le dévouement de M. [N] [E], son affection et sa présence au quotidien le jour comme la nuit auprès de son père qu'il prenait en charge sans compter sa peine, en faisant la comparaison avec les rares visites de son autre fils, M. [P] [E], qu'elle n'a vu que rarement.

C'est donc par une exacte appréciation des faits que les premiers juges ont retenu que M. [N] [E] rapporte amplement la preuve objective de sa présence assidue, de son dévouement, et de l'assistance qu'il a apportée au quotidien à chacun de ses parents à partir de 2009 jusqu'au décès de chacun, soit pendant plus de six ans et demi au-delà de la légitime dévotion filiale.

Pour contester l'ensemble de ces témoignages rédigés par des personnes qui ont directement assisté au vécu quotidien de feu M. [OP] [E] alors que son fils [N] vivait à ses côtés, M. [P] [E] verse au débat une attestation qu'a rédigée son neveu [M] [E], le propre fils de M. [N] [E] qui était alors domicilié à [Localité 13] et qui, sans rapporter le moindre fait dont il aurait été le témoin direct à défaut d'avoir vécu sur place, relate seulement ce qu'il dit avoir entendu de la bouche de gigeannais et au téléphone.

A l'instar de ce que les premiers juges ont relevé, la cour constate que ce témoin exprime également dans son attestation la rancoeur dont il est animé envers son père en relatant 'qu'il a toujours refusé toute aide à son endroit', et encore qu'il a 'pu constater ses absences pour convenances et occupations personnelles pendant son enfance', rendant ainsi son témoignage empreint d'un parti pris et d'une subjectivité qui le privent de valeur probante.

Les premier juges ont estimé également à juste titre que les témoignages des deux infirmières qui ne sont pas régulières en la forme, ne sont en tout état de cause pas de nature à contredire la réalité de l'assistance que M. [N] [E] a apportée à son père, ni même à amoindrir son importance, dès lors que leurs interventions étaient spécialisées, dédiées exclusivement à des soins, et donc totalement distinctes de la prise en charge que M. [N] [E] assurait en plus au quotidien.

Enfin, ni l'intervention d'une aide ménagère une heure 30 par jour en 2015 au domicile du défunt, telle que Madame [V] [C] atteste en avoir été chargée pour l'entretien de la maison, ni même l'attestation de Madame [O] selon laquelle elle a gardé M. [OP] [E] les après-midi de 14 à 16 heures, soit seulement deux heures pendant lesquelles des courses ou sorties étaient de cette façon rendues possible pour son fils M. [N] [E], ne sauraient permettre de fonder sérieusement une contestation de l'investissement de ce dernier pour pourvoir aux besoins de sa mère puis de son père le reste de la journée et la nuit, lorsque chacun d'eux en a eu besoin successivement, et ce pendant une durée totale de trois années, week-end inclus.

L'ensemble des éléments versés au débat par M. [N] [E] rapportent suffisamment la preuve, non seulement, comme l'ont estimé les premiers juges en lecture du rapport d'expertise, qu'il a fourni dès 2009 et jusqu'en [Date décès 8] 2010, à sa mère malade puis à son père de septembre 2009 à décembre 2015, la présence et l'aide que leur état a nécessité successivement, mais également que le quantum de son assistance a largement dépassé la simple obligation naturelle des enfants envers leurs parents telle que résultant de l'article 205 du code civil.

Concernant précisément feu M. [OP] [E], il s'évince des attestations des infirmières, aide à domicile et garde malade qui ont oeuvré auprès de lui, que son besoin résiduel d'assistance au cours des 15 derniers mois de sa vie s'élevait à plus de 45 heures par semaine, week-end compris, auquel M. [N] [E] a seul pourvu, soit près de 3 000 heures pour cette période.

Nonobstant l'absence de quantification par l'expert dans son rapport, la seule assistance prodiguée par M. [N] [E] à son père au cours de 15 derniers mois de sa vie, alors qu'il était diminué et qu'il avait un besoin constant d'aide et de présence, a ainsi représenté, sur la base d'un tarif horaire de 18,27 euros d'une employée assurant l'aide à la personne le jour, une économie de plus de 54 800 euros, à laquelle doit s'ajouter une économie bien supérieure pour l'aide qu'il a assumée jour et nuit auprès de sa mère malade de 2009 à [Date décès 8] 2010, sans qu'il ne soit justifié d'aucun élément établissant de droits éventuels à l'APA de cette dernière ni des conditions dans lesquelles étaient alors assurées des prestations extérieures de ménage ou de garde pour le soulager.

Dans ces conditions, la somme de 30 662 euros dont il a été gratifié par son père au titre de la seule année d'assistance 2015, déduction faite des 22 700 euros reçus et qui sont retenus comme correspondant à une donation rapportable, a bien eu un caractère rémunératoire, sans même entamer l'économie réalisée par la succession au titre des frais supplémentaires d'assistance qui auraient été nécessaires à leur père si son fils [N] n'y avait pas pourvu, tout en lui ayant offert le plaisir de profiter quotidiennement de sa présence et de son affection à la fin de sa vie.

Le jugement sera ainsi confirmé en ce que le rapport dû par M. [N] [E] à la succession de feu M. [OP] [E] a été fixé à la seule somme de 22 700 euros et également en ce que ce qu'il a été retenu à bon droit qu'il ne s'est rendu coupable d'aucun recel successoral à défaut d'élément objectif de nature à établir une volonté de sa part d'atteinte à l'égalité dans le partage.

* Sur les demandes de rapports au titre de retraits effectués sur le compte de feu M. [OP] [E] et d'achats effectués au moyen de sa carte bancaire

' Le premier juge a estimé que la seule existence d'une procuration consentie sur son compte par feu M. [OP] [E] à son fils [N] le 5 juin 2009, ne permet pas de lui imputer les retraits en espèces effectués de janvier 2006 à octobre 2015 à hauteur de 44 200 euros, alors que la preuve que ces sommes auraient exclusivement profité à ce dernier n'est pas rapportée par M. [P] [E] à laquelle elle incombe.

Pour ce même motif tiré d'une carence de M. [P] [E] dans la charge de la preuve, le premier juge a rejeté sa demande de rapport formée à l'encontre de son frère au titre des achats réalisés par carte de paiement et débités sur le compte du défunt entre le 11 août 2009 et le 2 décembre 2015 pour un montant de 2 936,65 euros, soit une dépense moyenne annuelle d'environ 450 euros par an, rien ne permettant d'affirmer que M. [N] [E] aurait bénéficié de ces dépenses.

' M. [P] [E] conclut à l'infirmation de ce chef et demande à la cour de dire que M. [N] [E] a bénéficié des retraits d'espèces opérés à partir de DAB et au débit du compte de leur défunt père à compter du 6 octobre 2006 pour un montant total de 44 200 euros pendant la période de 9 ans et demi précitée, faisant valoir d'une part que M. [OP] [E] ne retirait jamais au distributeur automatique, d'autre part, que sa propre procuration et celle de M. [H] [E] ayant été révoquées le 31 août 2011, les retraits depuis le compte du de cujus ne pouvaient être que le fait de l'intimé au bénéfice duquel ils sont intervenus, ajoutant que leur père était alité de 2014 jusqu'à son décès en 2015.

L'appelant expose qu'il justifie également de divers achats réalisés à l'aide de la carte bancaire de leur père pour un montant de 2936,65 euros entre le 11 août 2009 et le 2 décembre 2015 dont 1144,09 euros débités au cours des seules années 2014 et 2015 au titre de 28 opérations, affirmant qu'il s'agit de transactions effectuées pour la plupart dans des commerces de chasse pêche et randonnées que son père n'a pu faire et qui sont intervenues dans le seul intérêt de M. [N] [E].

Il conclut pour ce motif à la condamnation de M. [N] [E] à rapporter la somme de 2936,65 euros à la succession de leur défunt père.

' M. [N] [E] conclut à la confirmation du chef du rejet des demandes de rapport formées à son encontre par M. [P] [E] au titre des retraits d'espèces et achats intervenus au moyen de la carte bleue du défunt. Il fait valoir que l'appelant ne démontre pas que les sommes en cause auraient été dépensées à son profit.

' Réponse de la cour

Il est établi par les éléments versés au débat par les deux co-héritiers, tels que l'expert judiciaire les a analysés et les a rappelés en page 63 de son rapport, sans que ces parties ne le contestent, que M. [OP] [E] qui disposait en 2007 dans les livres du [11] de plusieurs comptes de dépôt et d'épargne, outre un carré jaune et un compte de dépôt PEA, a donné procuration à son fils, M. [N] [E], sur un seul compte chèques dépôt à vue N° [XXXXXXXXXX02] le 5 juin 2009, et que le 31 août 2011, il a révoqué les procurations qu'il avait précédemment données sur un autre compte chèques de dépôt à vue n°[XXXXXXXXXX01], d'une part à son fils, M. [P] [E], et d'autre part à son petit-fils, M. [H] [E].

En vertu de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de rapporter la preuve des faits qu'il invoque au soutient de sa prétention.

S'agissant des retraits d'espèces, si M. [P] [E] affirme que M. [OP] [E] ne procédait, lorsqu'il était valide, soit au moins jusqu'au début de l'année 2014, qu'à des retraits au guichet et jamais à des distributeurs automatiques, il n'en rapporte pour autant pas la preuve, divers témoins qui le côtoyaient régulièrement et dont les attestations sont produites au débat affirmant au contraire qu'il était particulièrement réactif intellectuellement et qu'il s'occupait de ses comptes.

La somme totale de 44 200 euros, retirée du compte de feu M. [OP] [E] en espèces en 9 ans et demi, équivaut en moyenne à 4652,63 euros par an, ou 387,72 par mois, ce qui ne témoigne de rien d'anormal pour pouvoir assurer le financement des petites dépenses du quotidien pour un couple de retraités comme l'étaient Mme [T] [UI] et M. [OP] [E] jusqu'en [Date décès 8] 2010, et ensuite pour pourvoir à ces mêmes dépenses pour M. [OP] [E], dont il a été démontré que M. [N] [E] s'occupait seul.

Ce que M. [P] [E] qualifie, sans l'illustrer comptablement, 'd'intensification des retraits à partir de 2009", époque à laquelle son frère s'est installé au domicile de leurs parents et leur a porté son assistance, s'avère inopérant quant à la preuve de ses imputations et de ses demandes de rapports à l'encontre de son frère alors que les dépenses d'alimentation du quotidien pour trois personnes au lieu de deux nécessitaient forcément de disposer de plus d'argent.

Par ailleurs, la période de janvier 2006 jusqu'au 13 octobre 2015, au cours de laquelle M. [P] [E] comptabilise ces retraits opérés à des DAB avec la carte bleue de son père, inclut plus de quatre années au cours desquelles il a disposé, comme son fils [H], d'une procuration de feu M. [OP] [E].

D'autre part, M. [P] [E] qui prétend que tous les divers achats réalisés à l'aide de la carte bancaire de M. [OP] [E] entre le 11 août 2009 et le 2 décembre 2015 pour un montant de 2936,65 euros, soit environ 39,16 par mois, n'ont pu être ni du fait de leur père, ni dans l'intérêt de ce dernier par leur nature, ne produit aucun justificatif quant à la nature des achats concernés avant 2014, époque au cours de laquelle il ne conteste pas que son père n'était pas encore alité, ce qui ne permet pas d'exclure que ce dernier ait été lui-même à l'origine des dépenses effectuées avec sa carte bancaire à l'instar de ce qui a été exposé pour les retraits d'espèces apparaissant au débit de son compte.

S'agissant des seules années 2014 et 2015 au cours desquelles M. [P] [E] affirme que M. [OP] [E] était alité, la cour observe que le seul examen des relevés de compte de ce dernier que l'appelant verse au débat, ne permet aucunement d'établir que les 28 opérations de débit auxquelles il se réfère et qui ont représenté, une dépense de 1144,09 euros, soit 47,67 euros par mois, auraient profité à son frère et à lui seul, alors que les libellés des achats en cause sont pour la quasi-totalité au nom des magasins Carrefour de [Localité 18], [Localité 10] ou [Localité 5], d'enseignes dédiées à la santé, voire quelques rares autres réalisées dans l'enseigne 'Monsieur Bricolage', renvoyant ainsi, surtout eu égard au faible montant qu'elles ont représenté à des dépenses alimentaires ou à des achats de tous les jours ou utilitaires effectués par M. [N] [E] pour les besoins du quotidien et en particulier dans l'intérêt de son père avec lequel il vivait depuis 2009, dont il s'occupait nuit et jour à partir de fin 2014 en raison de la dégradation de son état de santé, en pourvoyant à ses besoins, comme cela a été amplement démontré.

C'est donc à bon droit que le tribunal a retenu, après analyse scrupuleuse des éléments qui sont désormais soumis à la cour et en lecture de l'avis émis dans le même sens par l'expert judiciaire au terme de son rapport, qu'il n'est pas démontré par M. [P] [E] que les sommes correspondant aux retraits d'espèces et aux achats effectués au moyen de la carte bleue de M. [OP] [E] au débit de ses comptes pour des montants qui s'avèrent ni anormaux ni excessifs, auraient été effectués par M. [N] [E] dans son intérêt et à son profit exclusif.

Le jugement déféré sera confirmé en ce que M. [P] [E] a été débouté de sa demande formée à l'encontre de M. [N] [E] de rapport des sommes de 44 200 euros au titre de retraits d'espèces et de 2 936,65 euros au titre d'achats par carte bleue débités sur le compte de feu leur père.

* Sur la demande de rapport formée par M. [P] [E] concernant les primes d'assurance-vie

'Les premiers juges ont dit n'y avoir lieu à rapport des primes d'assurance-vie, après avoir constaté qu'elles avaient toutes été versées entre 1993 et 2011 au moyen essentiellement des produits des ventes des biens immobiliers ou des fonds de commerce des deux de cujus ainsi que de leurs économies communes, et considéré que M. [P] [E] ne rapporte pas la preuve de leur caractère manifestement exagéré, de sorte qu'elles n'ont pas à être intégrées dans la succession.

Ils ont rappelé que le contrat initial Prédica sur lequel M. [OP] [E] prélevait un montant trimestriel de 1160 euros pour ses besoins en complément de sa retraite, avait été clôturé et remplacé le 2 juin 2014 par un nouveau contrat Prédige Floriane sur lequel avait été versé le solde créditeur existant de 136 109,57 euros, et que deux rachats partiels y avaient été effectués en 2015 à concurrence de la somme de 27 972,21 euros, dont l'un ayant servi à gratifier M. [N] [E] à titre rémunératoire . Le tribunal a rejeté la demande de M. [P] [E], non sans avoir souligné qu'il ne pouvait solliciter le rapport de la somme de 163 800 euros au titre du contrat d'assurance-vie dans la mesure où le capital existant au décès de ce dernier ne s'élevait qu'à la somme de 109 722,27 euros qui a été partagée entre les deux héritiers désignés bénéficiaires à hauteur de 65 % pour M. [N] [E] et de 35 % pour lui-même qui a ainsi perçu 38 402,79 euros.

' M. [P] [E] qui conclut à l'infirmation de ce chef, demande à la cour de dire que les primes étaient manifestement exagérées et de juger que la somme de 109 722,27 euros devra être rapportée à la succession, faisant valoir qu'au 2 juin 2014 date de souscription du contrat d'assurance-vie Floriane en remplacement du précédent dont le solde s'élevait à 136 109,57, la répartition initiale égalitaire entre les bénéficiaires a été remplacée par une répartition favorisant M. [N] [E] qui vivait au domicile du souscripteur, feu M. [OP] [E], alors que ce dernier disposait d'une modeste retraite de 1 213 euros, était âgé de 91 ans, n'avait plus toute sa tête et était malade au point qu'il allait décéder un an plus tard.

Il soutient d'une part que le changement de répartition équitable pour une nouvelle qui ne l'était plus à son détriment, était contraire à l'équité et à l'état d'esprit du de cujus, d'autant que la clause bénéficiaire n'avait pas été modifiée depuis 21 ans ,et d'autre part que les deux rachats partiels qui sont intervenus par la suite la même année 2015 à concurrence de la somme totale de 27 972,21 euros se sont avérés exorbitants eu égard aux besoins de leur père tenant son âge avancé.

' M. [N] [E] conclut à la confirmation du jugement déféré de ce chef et au rejet de la demande de rapport de M. [P] [E] qui fait valoir confusément le caractère exagéré de la somme de 27 972 euros correspondant au montant des deux rachats opérés par feu M. [OP] [E] au cours de l'année 2015 et non à des primes seules susceptibles de rapport à condition que soit démontré leur caractère manifestement excessif, avant de solliciter en réalité le rapport du montant du capital qui existait sur le contrat.

' Réponse de la cour

L'article L. 132-13 du code des assurances dispose ' le capital ou la rente payable au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant.'

'Ces règles ne s'appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés.'

En l'espèce, après avoir, en lecture du rapport de l'expert judiciaire, fait un rappel exact et précis de la genèse du contrat d'assurance-vie Prédica Floriane dont le solde s'élevait à 109 722,27 euros au décès de M. [OP] [E], qui l'avait souscrit le 2 juin 2014 et alimenté exclusivement avec le solde de 136 109,57 € qui existait sur un précédent contrat Prédica souscrit en 1993 avec son épouse et sur lesquels ils avaient effectué, ensemble, puis lui seul, plusieurs rachats partiels entre 2006 et 2012, les premiers juges ont rappelé à bon droit que seules les primes manifestement exagérées peuvent donner lieu à rapport.

Pour débouter M. [P] [E], le tribunal a énoncé de façon tout à fait exacte et pertinente au plan juridique, conformément aux éléments factuels que l'expert judiciaire avait parfaitement détaillés dans son rapport, que les primes avaient été toutes versées en l'espèce entre 1993 et 2011 sur le contrat d'assurance-vie Prédica, devenu Floriane en 2014, qui avait été alimenté principalement par les parents [E] grâce aux produits de ventes d'immeubles et d'un fonds de commerce qui leur appartenaient et par les économies réalisées en commun.

Ils ont tout autant relevé à juste titre que M. [P] [E] sollicite en réalité le rapport du capital en faisant valoir le caractère excessif des deux retraits partiels que son père avait opérés, en ce compris celui par lequel il a consenti une donation rémunératoire au profit de M. [N] [E], et sans avoir aucunement rapporté la preuve du caractère manifestement exagéré des primes versées plusieurs auparavant par leurs parents.

Force est de constater qu'en cause d'appel, M. [P] [E] a réduit sa demande de rapport à la somme de 109 722,27 euros correspondant au montant du capital qui existait sur le contrat Floriane au décès de son père souscripteur, déduction faite des deux derniers rachats partiels qu'il avait effectués en 2015, sans pour autant nommer ce contrat dans le dispositif de ses dernières conclusions, mais surtout en se dispensant de toute critique utile de la motivation juridique parfaitement exacte des premiers juges, se contentant d'invoquer l'iniquité de la clause bénéficiaire inégale stipulée par son défunt père, et encore le caractère selon lui exorbitant des deux rachats partiels que ce dernier a effectués en 2015, autant d'arguments inopérants au soutien d'une demande de rapport concernant les primes d'un contrat d'assurance-vie.

Faute pour M. [P] [E] d'administrer la seule preuve utile et qui lui incombe d'un caractère manifestement exagéré des primes versées par son défunt père sur le contrat d'assurance-vie, la demande de rapport qu'il forme à concurrence de la somme représentant le capital qui existait alors sur ce contrat, dont il a perçu 30 %, est infondée en fait comme en droit.

La décision dont appel qui procède d'une parfaite appréciation des faits et d'une exacte application de la loi et qui n'est pas utilement ni valablement critiquée par M. [P] [E] sera donc confirmée de ce chef.

Sur la demande incidente de rapport formée par M. [N] [E] à l'encontre M. [P] [E]

' Faisant droit à la demande de M. [N] [E], le premier juge a ordonné le rapport à la succession par M. [P] [E] de la somme de 32 790 euros, en application de l'article 843 du code civil, au titre des donations dont il a été gratifié par ses parents entre mai 2000 et le 24 juillet 2013, telles que mises en évidence par l'expertise judiciaire, sans contestation de sa part.

' M. [P] [E] conclut à l'infirmation du jugement de ce chef, faisant valoir que la motivation selon laquelle il ne s'est pas opposé à cette demande de rapport formée à son encontre par son frère est très contestable.

Il soutient qu'il avait fait valoir le caractère rémunératoire de ces sommes reçues de ses parents, affirmant que comme en a témoigné son neveu [M] toutes les sommes qu'il a reçues correspondent soit à des soins, soit à des courses soit à des travaux nombreux qu'il a réalisés au cours des années 1999, 2001,2003, 2004 et 2005 pour le compte de ces derniers pour un total de 344 heures, ce dont il a justifié en produisant ses agendas qui portent mention de ses interventions pour le compte de son père à compter de 1999, certaines avec l'aide de son fils qu'il a rémunéré à ce titre.

' M. [N] [E] conclut à la confirmation, faisant valoir que les donations dont a bénéficié son frère, M. [P] [E], et qu'il a été condamné à rapporter pour un montant de 32 790 euros, n'ont eu aucun caractère rémunératoire, les copies de ses agendas ne pouvant constituer une preuve valable et les pièces qu'il a produites étant inexploitables car illisibles, de sorte que l'appelant ne rapporte aucune preuve de travaux qu'il prétend avoir réalisés en contrepartie de sommes ainsi reçues de ses parents.

' Réponse de la cour

L'expert judiciaire a parfaitement recensé en page 41 de son pré-rapport les sommes que M. [P] [E] a reçues de ses père et mère au cours des années 2000 à 2015 et qui ont représenté 32 790 euros au total, exposant qu'il n'avait alors invoqué aucune contre-partie et que ce n'est que suite à la remise de ce pré-rapport qu'il a mentionné avoir réalisé des travaux pour le compte de son père et s'être occupé de ses parents avant 2009.

En cause d'appel, M. [P] [E] ne fait valoir aucune contestation quant à la réalité et le montant des sommes qu'il a reçues de feus ses parents pour un montant de 32 790 €, tel que l'expert l'a exposé, mais conteste en devoir le rapport à leurs successions, soutenant qu'il s'agissait d'une rémunération au titre de travaux qu'il expose avoir réalisés pour son père de 1999 à 2013 pour un montant de 18 777 € en se prévalant de son agenda et d'un tableau dans lequel il expose les avoir répertoriés.

Toutefois, ni l'agenda personnel de M. [P] [E] qu'il a seul lui-même complété comme il l'entendait, ni le tableau au demeurant peu compréhensible qu'il a dressé de sa main ne constituent des preuves valables en vertu de l'article 1363 du code civil selon lequel nul ne peut se constituer de titre à soi-même.

Il a déjà été exposé que le caractère partisan et très subjectif de l'attestation que [M] [E] a écrite en faveur de son oncle, en étant manifestement mu par une rancoeur contre son père, et dans laquelle il ne rapporte pas de fait dont il a été personnellement témoin, ne permet pas d'y attacher une force probante suffisante, étant relevé qu'il évoque de façon vague des visites et services de M. [P] [E] pour son père avant 2009 mais sans aucun élément concret ni circonstancié permettant de retenir l'existence d'une contrepartie possible aux sommes reçues surtout eu égard à leur montant.

La cour observe en outre que le témoin [B] qui a attesté en tant qu'ancienne aide à domicile de feu M. [OP] [E] a affirmé ne pas avoir vu M. [P] [E] plus de deux ou trois fois auprès de son père pendant les deux années de présence au domicile de ce dernier, ni avoir constaté qu'il ait manifesté d'intérêt à l'égard de son père.

Force est de constater que M. [P] [E] ne rapporte pas valablement la preuve devant la cour d'une réelle contrepartie, sous quelque forme que ce soit : travaux, services, ou assistance , qu'il aurait fournie à son père ou à sa mère, en compensation des sommes dont il est démontré qu'ils l'ont gratifié pour un montant de 32 790 euros entre 1999 et 2013.

En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement en ce que M. [P] [E] a été condamné à rapporter la somme totale de 32 790 euros à la succession en application de l'article 843 du code civil.

* Sur la créance de 47 397,27 euros revendiquée par M. [N] [E]

' Le premier juge a débouté M. [N] [E] de sa demande de créance envers l'indivision successorale, après avoir retenu que la somme de 47 395 euros qu'il revendique au titre d'un trop perçu par le de cujus lors de la répartition du prix de vente de l'immeuble de [Localité 5] n'est pas due, estimant que le notaire a remis à M. [OP] [E] et à M. [N] [E] leurs parts respectives.

Il a en outre relevé que la preuve de cette créance n'est pas rapportée au vu de l'acte sous seing privé du 20 décembre 2010.

Le premier juge a écarté les copies de l'acte seules produites dans la mesure où elles étaient incompatibles sans qu'aucune des parties n'ai produit d'original.

' M. [N] [E] qui a formé appel incident, conclut à l'infirmation du jugement déféré du chef du rejet de sa demande de créance de 47 395 euros envers la succession de feu M. [OP] [E], et demande en cause d'appel à ce qu'il soit 'dit et jugé que la somme de 47 397,27 euros que doit lui rembourser M. [P] [E] soit portée au passif' et 'subsidiairement qu'elle soit portée au passif pour lui être payée'.

Il expose que les droits de son père n'étaient pas de la moitié de la valeur du bien immobilier qu'ils ont vendu selon acte du 17 mai 2010 alors que ce dernier était âgé de 87 ans, mais de seulement vingt pour-cent dans la mesure où il n'en disposait que de l'usufruit en vertu de la donation partage du 22 avril 1996. Faisant valoir qu'il n'a néanmoins reçu que la somme de 78 995,45 euros correspondant à la moitié du solde net du prix de vente, il conclut que le de cujus a indûment perçu, comme l'expert l'a retenu, la somme de 47 397,27 euros, qu'il est fondé à revendiquer à titre de créance envers sa succession.

Il soutient que l'acte sous seing privé du 20 décembre 2010, dont son conseil a transmis son propre original à l'expert de sorte qu'il n'a pu ni le produire, ni y apporter aucune modification, porte reconnaissance par les héritiers de son manque à gagner lors de la vente de l'immeuble en cause.

Il ajoute que les travaux effectués par le de cujus sur le bien de [Localité 5] n'ouvrent droit à aucune indemnité au profit de M. [P] [E].

' M. [P] [E] demande à la cour 'd'infirmer le jugement entre autres en ce que M. [N] [E] a été débouté de sa demande de créance envers l'indivision', avant de lui demander de statuer à nouveau, et de 'dire que l'intention frauduleuse de M. [N] [E] est caractérisée et qu'il ne dispose d'aucune créance sur le prix de vente de l'immeuble en cause' et qu'il n'y a aucune somme à porter au passif de la succession.

Il expose verser au débat en cause d'appel son propre exemplaire original de la convention du 20 décembre 2010 portant sur la répartition du prix de vente de l'immeuble sis à [Localité 5] qui a été dressée en deux originaux de sorte qu'ils peuvent présenter des différences matérielles quant au graphisme des signatures et à leur place exacte sur chaque original.

'Réponse de la cour

Nonobstant la contradiction qui affecte les prétentions de M. [P] [E] dans le dispositif de ses dernières conclusions, la cour entend statuer sur la demande d'infirmation et la prétention dont elle est valablement saisie par M. [N] [E] au titre de son appel incident.

L'article 621 du code civil en sa version applicable au litige entrée en vigueur le 1er janvier 2007, dispose en son premier alinéa qu'en cas de vente simultanée de l'usufruit et de la nue propriété d'un bien, le prix se répartit entre l'usufruit et la nue propriété selon la valeur respective de chacun de ces droits, sauf accord des parties pour reporter l'usufruit sur le prix.

Par ailleurs, l'article 1188 du code civil dispose : le contrat s'interprète d'après la commune intention des parties plutôt qu'en s'arrêtant au sens littéral des termes.

Lorsque cette intention ne peut être décelée, le contrat s'interprète selon le sens que lui donnerait une personne raisonnable placée dans la même situation.

La recherche de la commune intention des parties relève de l'appréciation souveraine des juges du fond.

En l'espèce, selon acte de donation partage passé le 22 avril 1996 par devant Maître [D], notaire à [Localité 17], par Mme [T] [UI], M. [OP] [E] et leurs deux fils, M. [N] [E] s'est vu attribuer un lot comprenant, entre autres, la nue-propriété d'un bien immobilier sis [Adresse 15] à [Localité 19] , bien propre de M. [OP] [E] qui s'en est réservé l'usufruit.

Par acte notarié en date du 17 mai 2010, M. [OP] [E] et son fils [N] ont vendu ce bien immobilier moyennant le prix de 170 000 €.

Il résulte des reçus datés du 18 mai 2010 émanant de l'étude de Maître [U], notaire à [Localité 5], et adressés respectivement à M. [N] [E] et à M. [OP] [E], que chacun d'eux a reçu par chèques tirés sur la caisse des dépôts et consignation, la même somme totale de 78 995,45 € à titre de solde net leur revenant sur le prix de vente de cet immeuble.

En application des dispositions précitées de l'article 621 du code civil et à défaut de toute allégation ni de preuve d'un accord des parties pour reporter l'usufruit sur le prix de vente, il devait revenir à M. [N] [E] un droit propre équivalent à la portion du prix correspondant à la valeur de sa nue-propriété sur ce bien reçue par donation partage du 22 avril 1996, et qui s'établissait à 80 % tenant l'âge de 87 ans de l'usufruitier à la date de la vente.

En ne percevant que la moitié du solde net du prix de vente du bien vendu, M. [N] [E] n'a donc pas été rempli intégralement de son droit.

La convention sous seing privée scindée en deux parties qui a été conclue le 20 décembre 2010, entre les deux co-héritiers, parties à la présente instance, stipule notamment en sa première partie à la fin de laquelle figure la signature chacun d'eux, que 'M. [P] [E] certifie donner son accord pour que son frère, [N] puisse recouvrer après la mort de leur père l'équivalent de la part qu'il aurait dû percevoir sur la vente du café de l'Europe [Adresse 15] à [Localité 5] considérant que ce bien a été vendu avant la disparition de [OP] et qu il a rapporté dans les faits 50% à [N] et 50 % à [OP] à qui il revenait légalement 20 %, il est convenu qu'il revient convient à [N], 80 % de la vente survenue le 17 mai 2010 à laquelle il a souscrit en signant l'acte permettant la réalisation de la vente '(..)

Il s'induit de cet acte sous seing privé une reconnaissance par M. [P] [E] du droit à créance de M. [N] [E] à concurrence des 30 % du solde net du prix de la vente du 17 mai 2010 qu'il n'a pas reçus, ce que l'expert judiciaire a calculé dans son rapport en page 68 comme représentant 47 400 euros (158 000 x 0,30).

Celui des deux originaux de cet acte sous seing privé versé au débat en pièce 46 visée au bordereau de M. [P] [E] est l'exemplaire de ce dernier qui est précisément celui auquel son co-héritier M. [N] [E] oppose sa demande de fixation de son droit à créance correspondant à la portion du prix de la vente du 17 mai 2010 qui a été encaissée en ses lieux et place par leur père.

Force est de constater que la signature de M. [P] [E] est apposée à côté de celle de M. [N] [E], au bas de cette première partie de cet original, ce qui suffit à ce que la créance se trouve reconnue par son cohéritier.

Le fait longuement débattu dans les écritures de M. [P] [E] selon lequel la seconde partie de cet acte dont il produit son exemplaire original, et qui est relative à' l'accord de M. [N] [E] pour que son frère [P] ait droit comme lui à la moitié des 20 % venus en augmentation du patrimoine de [OP] pour 31 600 €, soit 15 800 euros et d'autre part, toujours comme lui, à 15 245 euros représentant la moitié de l'emprunt contracté par [OP] (qui a amputé la somme de 30 490 euros sur ses liquidités bancaire ) 'soit la somme de 15800 euros', et qui ne porte qu'une seule signature que la cour reconnaît, après comparaison avec d'autres documents qui sont produits au débat notamment une lettre émanant de M. [N] [E] signée, comme étant objectivement celle de M. [N] [E], s'avère inopérant, dès lors que les sommes de 15 800 et 15 245 euros qui y sont visées représentent chacune la part de moitié de chacun d'eux de créances communes envers la succession de leur défunt père, de sorte qu'elles ne peuvent en tout état de cause avoir aucun impact sur les comptes de liquidation.

Indépendamment même de cet acte sous seing privé, la preuve est suffisamment rapportée que M. [N] [E] n'ayant pas été rempli totalement de ses droits au titre de l'encaissement du prix de la vente du bien immobilier sis à [Localité 5] qu'il a consentie le 17 mai 2010 avec son père usufruitier alors âgé de 87 ans, et qu'il détient une créance dans la proportion de la part complémentaire de 30 % du prix net que son père a seul perçue en ses lieu et place en encaissant la moitié de ce prix par chèques.

Il ne peut s'agir d'une créance envers M. [P] [E] dès lors que la partie du prix que M. [N] [E] n'a pas perçue l'a été par feu M. [OP] [E].

L'indivision successorale née à la date de son décès en est dès lors seule débitrice.

La cour devant statuer dans les limites des prétentions dont elle est saisie, il sera dit que M. [N] [E] détient une créance de 47 397, 27 euros à l'encontre de l'indivision successorale.

Le jugement sera donc infirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages et intérêts de M. [P] [E]

' Le premier juge a débouté M. [P] [E] de sa demande de dommages et intérêts en exposant qu'aucune procédure abusive n'était caractérisée dans le cadre de l'action exercée par un des co-héritiers aux fins de partage judiciaire des successions de feus Mme [T] [UI] et M. [OP] [E].

' M. [P] [E] ne fait valoir aucun moyen au soutien de sa demande tendant à la condamnation de M. [N] [E] à lui payer une somme de 20 000 euros de dommages et intérêts.

' M. [N] [E] ne formule aucune observation sur la demande de l'appelant.

' Réponse de la cour

L'article 1240 du code civil dispose que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Pour fonder une action en responsabilité et donner lieu à une dette de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1240 précité celui qui agit doit prouver la faute qu'il reproche à celui à l'encontre duquel il exerce l'action, ainsi que le préjudice qu'il a expose avoir subi et qui doit en résulter directement.

M. [P] [E] qui ne critique aucunement le jugement dont appel, ne fait valoir en outre devant la cour aucune faute ni aucun préjudice moral subi du fait de M. [N] [E], de sorte que son action en responsabilité est infondée.

Le jugement sera confirmé en ce que M. [P] [E] a été débouté de son action en responsabilité pour réticence abusive et conséquemment de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance et d'appel

Considérant la nature du présent litige relatif à un partage de succession, les dépens de première instance ont été considérés à juste titre comme frais privilégiés de partage.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

L'appelant succombant principalement en son recours, il sera condamné aux dépens d'appel, seuls les frais de l'expertise judiciaire de M. [VX] [LL] [Z] devant être employés en frais privilégiés de partage.

Il n'est pas inéquitable de condamner M. [P] [E] à payer à M. [N] [E] la somme de 2 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

CONSTATE que les chefs relatifs aux opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de feu M. [OP] [E] et du régime matrimonial ayant existé entre ce dernier et son épouse pré-décédée, Mme [T] [UI], à la désignation de Maître [W] [A] pour y procéder et du juge commissaire pour surveiller lesdites opérations ainsi qu'aux frais irrépétibles de première instance sont définitifs,

CONFIRME le jugement déféré rendu le 13 octobre 2021 par le tribunal judiciaire de Montpellier en toutes ses dispositions non définitives dévolues et critiquées, à l'exception de la créance revendiquée à titre incident par M. [N] [E],

STATUANT A NOUVEAU de ce seul chef infirmé,

dit que M. [N] [E] est créancier d'une somme de 47 397,27 euros (quarante- sept mille trois cent quatre vingt-dix-sept euros et vingt-sept centimes) envers l'indivision successorale,

Y AJOUTANT,

condamne M. [P] [E] à payer à M. [N] [E] la somme de 2 500 euros (deux mille cinq cents euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

dit que le coût de l'expertise judiciaire sera employé en frais privilégiés de partage,

condamne M. [P] [E] aux entiers dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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