CA Nîmes, 5e ch. soc. ph, 13 octobre 2025, n° 24/00978
NÎMES
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 24/00978 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JEGB
CRL/JLB
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NIMES
16 février 2024
RG :F 22/00211
[U] ÉPOUSE [Z]
C/
S.A.S. FONCIA [Localité 6]
Grosse délivrée le 13 OCTOBRE 2025 à :
- Me VAJOUR
- Me GUERINI
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 13 OCTOBRE 2025
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NIMES en date du 16 Février 2024, N°F 22/00211
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et Monsieur Julian LAUNAY BESTOSO, Greffier, lors du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 27 Mai 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 22 Septembre 2025 puis prorogée au 13 octobre 2025.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTE :
Madame [B] [U] ÉPOUSE [Z]
née le 06 Mai 1987 à [Localité 7] (30)
[Adresse 2]
[Adresse 9] [Adresse 5]
[Localité 3]
Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LX NIMES, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉE :
S.A.S. FONCIA [Localité 6]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Fabien GUERINI de la SELARL CONSULTIS AVOCATS, avocat au barreau de TOULON
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 13 octobre 2025, par mise à disposition au greffe de la cour.
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
Mme [B] [Z] a été employée à compter du 4 juillet 2011 suivant contrat à durée indéterminée par la SAS Foncia [Localité 6]. Par avenant du 1er février 2020, elle a été nommée responsable clientèle senior, collège cadre, niveau [4] pour une rémunération forfaitaire de 3 230,77 euros.
Le contrat de travail est soumis à la convention collective de l'immobilier.
Par courrier du 16 novembre 2021, la SAS Foncia a accusé réception de la démission de Mme [B] [Z] notifiée le 19 octobre 2021, précisant qu'il entendait faire application de la clause de non concurrence et de la clause de clientèle mentionnées dans l'avenant à son contrat de travail.
La rupture du contrat de travail est intervenue le 18 janvier 2022, à l'issue de son préavis de trois mois.
A compter du 24 janvier 2022, Mme [B] [Z] a été embauchée par la SARL Citya Peri [Localité 7], sur une fonction cadre niveau C1.
Par requête en date du 10 mars 2022, la SAS Foncia [Localité 6] a saisi le conseil de prud'hommes de Nîmes en sa formation de référé aux fins de voir condamner la salariée à cesser son activité concurrente et à rembourser les sommes qui lui ont été versées en exécution de la clause de non-concurrence et de la clause de clientèle, outre une provision pour indemnisation du préjudice subi.
Par ordonnance du 30 juin 2022, la formation de référé du conseil de prud'hommes de Nîmes a dit n'y avoir lieu à référé et invité la SAS Foncia [Localité 6] à mieux se pourvoir au fond. La SAS Foncia [Localité 6] a interjeté appel de cette décision.
Par arrêt du 20 décembre 2022, la cour d'appel de Nîmes a confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance déférée et, y ajoutant, a prononcé l'irrecevabilité de la demande de Mme [B] [Z] concernant la clause de clientèle ainsi que la condamnation de la SAS Foncia [Localité 6] au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En parallèle, Mme [B] [Z] a saisi le conseil de prud'hommes au fond aux fins de voir prononcer la nullité de la clause de non-concurrence et de la clause de clientèle après requalification, outre des demandes d'indemnités.
Par jugement en date du 16 février 2024, le conseil de prud'hommes de Nîmes a :
- dit que la clause de non concurrence de Mme [B] [Z] est conforme aux exigences de validité posée par la jurisprudence,
- constaté que Mme [B] [Z] a violé la clause de non concurrence,
- condamné Mme [B] [Z] à rembourser la somme de 4 801,98 euros correspond à l'indemnité spéciale versée par la SAS Foncia au titre de la clause de non concurrence,
- condamné Mme [B] [Z] à verser la somme de 1 000 euros à titre de DRI,
- condamné Mme [B] [Z] au règlement de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Mme [B] [Z] aux entiers dépens,
- débouté les parties de leurs autres demandes.
Par déclaration effectuée par voie électronique le 15 mars 2024, Mme [B] [Z] a régulièrement interjeté appel de la décision.
Par ordonnance en date du 6 février 2025, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 25 avril 2025. L'affaire a été fixée à l'audience du 27 mai 2025.
Aux termes de ses dernières écritures en date du 18 novembre 2024, Mme [B] [Z] demande à la cour de :
- statuer sur son appel à l'encontre de la décision rendue le 16 février 2024 par le conseil de prud'hommes de Nîmes,
- le déclarer recevable et bien fondé,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
- dit que la clause de non-concurrence de Mme [B] [Z] est conforme aux exigences de validité posées par la jurisprudence,
- constaté que Mme [B] [Z] viole la clause de non-concurrence,
- condamné Mme [B] [Z] à rembourser la somme de 4 801,98 euros correspondant à l'indemnité spéciale versée par la SAS Foncia au titre de la clause de non-concurrence,
- condamné Mme [B] [Z] à verser la somme de 1 000 euros à titre de DRI,
- condamné Mme [B] [Z] au règlement de 1 000 euros au titre de l'article 700 du CPC,
- condamné Mme [B] [Z] aux entiers dépens,
- débouté les parties de leurs autres demandes.
Sur la clause de non-concurrence,
- prononcer la nullité de la clause de non-concurrence ;
Sur la clause de clientèle,
- requalifier la clause de clientèle en clause de non-concurrence ;
- prononcer la nullité de la clause ainsi requalifiée ;
- condamner, en outre, la SAS Foncia [Localité 6] à lui payer une indemnité de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;
- condamner, encore, la SAS Foncia [Localité 6] à lui payer une indemnité de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouter la société foncia [Localité 6] de toutes ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires.
- la débouter de plus fort de son appel incident,
- condamner, enfin, la SAS Foncia [Localité 6] aux entiers dépens.
Au soutien de ses demandes, Mme [B] [Z] fait valoir que:
- la clause de non-concurrence porte une atteinte disproportionnée à sa liberté de travailler, en ne prenant pas en compte les spécificités de son emploi,
- les emplois disponibles en agence immobilière sont de trois natures distinctes : activité copropriété, activité gérance et activité transaction, et telle qu'elle est rédigée, la clause de non-concurrence lui interdit non seulement de travailler dans toute agence immobilière concurrente quelle qu'elle soit mais elle lui interdit, en outre, d'occuper quelque emploi que ce soit au sein de toute agence immobilière dans le secteur géographique prohibé et c'est précisément en cela que cette clause porte une atteinte disproportionnée à la liberté du travail,
- appliquer cette clause revient à l'obliger à rompre son nouveau contrat de travail, étant observé que la clause de non-concurrence qui y figure est proportionnée puisqu'elle lui interdit tout emploi identique ou similaire au sien,
- cette atteinte est d'autant plus disproportionnée que le contrat contient également une clause de clientèle,
- appliquer ces deux clauses revient à lui interdire d'exercer toute activité dans le domaine de l'immobilier qui est son domaine de formation et de compétence,
- dès lors que la clause de non-concurrence est entachée de nullité, il ne peut lui être reproché de la violer, mais s'agissant d'une nullité relative, seul le salarié peut s'en prévaloir et la SAS Foncia [Localité 6] ne peut demander le remboursement des indemnités mensuelles qu'elle a versées en application de cette clause,
- la demande de dommages et intérêts de la SAS Foncia [Localité 6] est infondée dès lors qu'elle ne démontre pas que dans son nouvel emploi, son ancienne salariée aurait détourné ou démarché sa clientèle, et donc la réalité du préjudice qu'elle invoque.
Aux termes de ses dernières écritures d'intimé en date du 30 août 2024, la SAS Foncia [Localité 6] demande à la cour de :
- confirmer le jugement ayant validé la clause de non concurrence,
- débouter Mme [B] [Z] de sa demande d'annulation de la clause de non concurrence, dès lors que celle-ci est conforme aux exigences de validité posée par la jurisprudence,
- débouter l'appelante de sa demande d'annulation de la clause de respect de clientèle, celle-ci n'étant pas une clause de non concurrence,
- constater que Mme [B] [Z] a violé la clause de non-concurrence,
- débouter Mme [B] [Z] de ses demandes
- confirmer le jugement et condamner Mme [B] [Z] à lui rembourser les contreparties financières qu'elle a perçues au titre de la clause de non concurrence alors qu'elle travaillait chez Citya Peri entre janvier et mai 2022 inclus soit 4.801,98 euros,
- confirmer le jugement ayant condamné la salariée à réparer son préjudice subi du fait de la violation de la clause de non concurrence
- reformer le jugement en ce qui concerne le quantum alloué et condamner Mme [B] [Z] sur le fondement de l'article 1240 du code civil à lui verser la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts suite à la violation de la clause de non-concurrence
- confirmer le jugement ayant condamné la salariée au titre de l'article 700 code de procédure civile de première instance,
- condamner Mme [B] [Z] à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile en cause d'appel.
Au soutien de ses demandes, la SAS Foncia [Localité 6] fait valoir que :
- il n'est absolument pas contesté ni contredit que dans les jours qui ont suivi son départ effectif de la société , Mme [B] [Z] a été embauchée pour travailler au sein d'une agence immobilière concurrente, à savoir CITYA PERI située à [Localité 7], à 850 mètres de son ancien lieu de travail pendant 10 ans,
- Mme [B] [Z] occupe chez son nouvel employeur des fonctions identiques ou très proches de celles qu'elle occupait précédemment, à savoir responsable de clientèle en gestion de copropriétés,
- contrairement à ce qui est soutenu par Mme [B] [Z], la clause de non-concurrence répond aux exigences jurisprudentielles en matière de validité, puisque prévue sur une période de 18 mois, dans un périmètre limité à 50 km autour de l'agence de [Localité 7], et la contrepartie financière prévue est de 30% de son salaire de référence,
- il n'en résulte par suite aucune atteinte disproportionnée à sa liberté de travailler, et Mme [B] [Z] ne démontre pas que pendant son préavis elle aurait candidaté sur des agences immobilières situées au-delà de 50 km de [Localité 7] et aurait essuyé de refus,
- Mme [B] [Z] considère par ailleurs que la clause de clientèle à laquelle elle est également soumise doit s'analyser en une clause de non-concurrence et qu'il ne s'agit pas d'une simple interdiction de détournement de la clientèle,
- pourtant, cette clause de respect de clientèle ne vise que la clientèle de l'agence nîmoise existante au cours de la dernière année, ce qui constitue une limitation géographique, qui correspond au portefeuille de l'agence de [Localité 7] ; elle prévoit une durée d'application de 14 mois à compter du départ et est assortie d'une compensation financière suffisante puisque justement elle n'interdit pas de travailler dans une agence concurrente,
- si cette clause devait subsidiairement être requalifiée en clause de non-concurrence, elle en respecte les conditions de validité, et aucune nullité n'est encourue.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.
MOTIFS
Conformément au principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle
et à l'article L.1121-1 du Code du travail, une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, si elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié, et si elle comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives.
Lorsqu'une clause de non-concurrence est annulée, le salarié qui a respecté une clause de
non-concurrence illicite peut prétendre au paiement d'une indemnité en réparation du fait que l'employeur lui a imposé une clause nulle portant atteinte à sa liberté d'exercer une activité professionnelle de sorte que l'employeur n'est pas fondé à solliciter la restitution des sommes versées au titre de la contrepartie financière de l'obligation qui a été respectée.
Toutefois, l'employeur qui prouve que le salarié a violé la clause de non-concurrence pendant la période au cours de laquelle elle s'est effectivement appliquée, est fondé à solliciter le remboursement de la contrepartie financière indûment versée à compter de la date à laquelle la violation est établie.
Le droit du salarié de conserver la contrepartie financière de la clause répare le préjudice causé par le fait d'avoir respecté une clause de non concurrence nulle. A contrario, la nullité de la clause de non-concurrence ne fait pas obstacle au remboursement par le salarié de la contrepartie, s'il n'a de toute façon pas respecté cette clause.
En l'espèce le contrat de travail de Mme [B] [Z] comprend une clause de non concurrence ainsi formulée :
' Clause de non-concurrence & clause de clientèle
La clientèle d'administration de biens ( copropriété, gérance, location et transaction ) de la société FONCIA [Localité 6] est constituée, développée, via d'une part, de la croissance externe ( rachat de sociétés ou de fonds de commerce ) et d'autre part, de la croissance interne grâce aux méthodes de la société et plus généralement à savoir-faire professionnel et à sa notoriété, ce que le salarié reconnait expressément.
En conséquence le salarié ne dispose d'aucun droit sur cette clientèle.
En tout état de cause, le salarié s'interdit, au terme de son contrat de travail, d'utiliser des procédures contraires aux usages loyaux du commerce, à savoir notamment démarcher la clientèle FONCIA dont il a été le contact privilégié pendant sa collaboration avec le Groupe FONCIA et /ou entretenir une quelconque confusion avec les structures du Groupe FONCIA et sa personne et/ou ses propres structures directes ou indirectes.
A. Clause de non concurrence
Au regard des contacts que le salarié sera amené à entretenir avec la clientèle de la société ainsi que les informations auxquelles le salarié a accès, il est indispensable à la protection des intérêts légitimes de la société qu'en cas de rupture du contrat de travail, quelle qu'en soit la cause, le salarié s'interdise cumulativement :
- expressément de créer, acquérir, prendre en location, exploiter, diriger, travailler directement ou indirectement, fût-ce notamment en qualité de salarié, un établissement ayant des activités d'Administration de Biens (Syndic de Copropriété et Gestion Locative) et/ou de Transaction immobilière.
- expressément de s'intéresser de quelque manière que ce soit ou d'apporter son concours directement ou indirectement, fût-ce, notamment, en qualité de salarié, bailleur de fonds, associé commanditaire, administrateur, détenteur de titres ou consultant, à des affaires similaires ou à des entreprises ayant des activités similaires à celles de la Société.
Cette interdiction est limitée à une durée de 18 mois à compter de la date de cessation effective de l'activité du salarié.
Cette interdiction porte sur un périmètre de 50 kilomètres autour de l'établissement sur lequel le salarié est affecté.
En contrepartie de cette clause de non-concurrence le salarié percevra, chaque mois, à compter de la cessation effective de son activité, et pendant toute la durée de l'interdiction, dans la mesure où celle-ci est respectée, une indemnité spéciale forfaitaire (intégrant l'indemnité compensatrice de congés payés) égale à 30 % de la moyenne mensuelle de la rémunération brute perçue par le salarié au cours des douze derniers mois d'activité dans la Société, rémunération variable incluse ; les primes exceptionnelles de toute nature, de même que le remboursement des frais professionnels sont exclus de l'assiette de l'indemnité.
La présente clause sera applicable à toute rupture du contrat de travail.
Dans un délai d'un mois à compter de la date de la notification de la rupture du contrat de travail, la Société pourra néanmoins par lettre recommandée avec avis de réception ou lettre remise en main propre manifester sa volonté de libérer le salarié de l'application de cette clause, en portant sa décision par écrit à sa connaissance. Dans ce cas, le salarié ne pourra prétendre à aucune contrepartie financière. »
B. Clause de clientèle
Au regard des contacts que le salarié sera amené à entretenir avec la clientèle de la Société, ainsi que des informations auxquelles le salarié a accès, il est indispensable à la protection des intérêts légitimes de la Société qu'en cas de rupture du contrat de travail, quelle qu'en soit la cause, le salarié s'interdise :
- d'entrer en contact directement ou indirectement, sous quelque forme et sous quelque mode que ce soit, avec les clients de la Société existants au jour de la notification de la rupture du contrat de travail ou ceux qui ont été clients de cette structure dans l'année précédent la rupture, et, de manière corollaire, de démarcher lesdits clients,
- d'exploiter, directement ou indirectement, la clientèle de la Société existante au jour de la notification de la rupture du contrat de travail ou la clientèle du portefeuille qui a été confiée au salarié au sein de la Société à titre personnel ou par l'intermédiaire de toute Société, association ou entité juridique quelconque dont le salarié serait l'associé, le membre, le salarié ou le collaborateur ou pour le compte de laquelle le salarié interviendrait ou serait rémunéré, directement ou indirectement, de quelque manière, à quelque titre et sous quelque statut que ce soit, dans une activité concurrente à celle exercée par FONCIA.
Cette interdiction est limité au secteur géographique couvert par la clientèle de la Société, soit le(s) département(s) où la société exerce son activité.
Cette interdiction est valable pendant une durée de 14 mois à compter de la date de sortie des effectifs du collaborateur.
En contrepartie de cette interdiction, le salarié percevra, chaque mois, à compter de la cessation effective de son activité, et pendant toute la durée de l'interdiction, dans la mesure où celle-ci est respectée, une indemnité forfaitaire spéciale égale à 5% de la moyenne mensuelle des salaires bruts perçus par le salarié au cours de douze derniers mois d'activité passés dans l'entreprise, étant entendu que les primes exceptionnelles de toute nature, de même que les frais professionnels en sont exclus.
Les parties reconnaissent le périmètre restreint de la présente clause qui ne concerne que les clients de la Société existants au jour de la notification de la rupture du contrat de travail ou ceux qui ont été clients de cette Société dans l'année précédent la rupture du contrat ( ou la clientèle figurant au jour de la notification de la rupture dans le portefeuille du salarié ).
La présente clause sera applicable à toute rupture du contrat de travail.
Dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la rupture du contrat de travail, la Société pourra néanmoins par lettre recommandée avec avis de réception ou lettre remise en main propre manifester sa volonté de :
- renoncer à l'application de cette clause, en portant sa décision par écrit à la connaissance du salarié . Dans ce cas, le salarié ne pourra prétendre à aucune contrepartie pécuniaire.
- réduire la durée de l'interdiction, l'indemnité due étant alors réduite dans les mêmes proportions.
L'indemnité forfaitaire spéciale cessera d'être versée en cas de violation de la part du salarié de la dite clause, sans préjudice du remboursement des indemnités mensuelles perçues indûment par ses soins, ainsi que du paiement des dommages et intérêts dus en réparation du préjudice subi par la Société du fait de la violation de la présente clause.
En outre, la Société se réserve le droit de faire ordonner, le cas échéant sous astreinte, la cessation dudit trouble'.
* sur la validité de la clause de non-concurrence
Il résulte de ce même contrat de travail et de ses avenants que les fonctions occupées par Mme [B] [Z] lui imposaient une relation régulière avec la clientèle et lui permettaient l'accès à des informations stratégiques et confidentielles de la société, en particulier le listing clients, les process, les tarifs pratiqués. La société intimée avait donc un intérêt légitime à l'insertion d'une clause de non-concurrence.
Par ailleurs, l'étendue géographique de la clause est de 50 km autour de l'établissement auquel la salariée était affectée. Elle est donc limitée dans l'espace, étendue nécessaire eu égard à l'activité de la SAS Foncia [Localité 6]. Cette limitation, quand bien même elle s'étend géographiquement sur plusieurs départements compte tenu de la situation géographique de [Localité 7], lui permettait notamment de travailler dans des villes situées à moins d'une heure de son ancien lieu de travail.
Elle était en outre limitée à 18 mois, ce qui est conforme aux dispositions conventionnelles qui permettent d'aller jusqu'à deux années pour l'interdiction d'emploi générée par une telle clause.
D'autre part, il a été tenu compte des spécificités de l'emploi de la salariée, qui rendaient nécessaire l'insertion d'une telle clause. Si son expérience professionnelle s'est entièrement déroulée au sein du groupe Foncia, sa formation initiale n'était pas limitée au secteur de l'immobilier. Il s'en déduit que sa formation initiale n'était pas en droit de l'immobilier mais qu'elle a su s'adapter à ce secteur.
Enfin, il était prévu une contrepartie financière évaluée à 30% de la rémunération de Mme [B] [Z], ce qui est loin d'être dérisoire comme elle l'affirme et est même supérieur à ce que prévoit la convention collective pour la clause de non-concurrence des négociateurs immobiliers.
En conséquence, il y a lieu de conclure que la clause de non-concurrence insérée dans le contrat de travail de Mme [B] [Z] était valide.
* sur la validité de la clause de respect de clientèle
Cette clause est limitée dans le temps ( 14 mois ) et dans l'espace ( le département du Gard ) et tient compte ainsi que cela a été rappelé supra des spécificités de l'emploi exercé par Mme [B] [Z]. Elle prévoit également une contrepartie financière.
Ces limitations permettent toutefois à la salariée d'exercer une activité professionnelle conforme à sa formation, à ses connaissances et à son expérience professionnelle et la clause ne se confond pas contrairement à ce qui est soutenu par Mme [B] [Z] avec la clause de non concurrence, puisqu'elle ne vise pas la nature de l'activité mais uniquement les contacts avec la clientèle de la SAS Foncia [Localité 6].
* sur les conséquences financières
S'agissant de la violation de la clause de non-concurrence, il résulte des éléments du dossier et des affirmations mêmes de la salariée que celle-ci a été engagée, dès le 24 janvier 2022, soit dès la fin de son préavis envers la SAS Foncia [Localité 6] intervenue le 18 janvier 2022, par la SARL Citya Peri en qualité de ' principale de copropriétés dans le cadre de son établissement sis à [Adresse 8]', avec un statut de cadre niveau C1.
Mme [B] [Z] était responsable clientèle senior copropriété lorsqu'elle était salariée de la SAS Foncia [Localité 6] et est devenue 'principale de copropriété' pour le compte de son nouvel employeur dans une agence située à 850 mètres de son ancien lieu de travail, pour effectuer donc une activité similaire de syndic de copropriété.
Il résulte de ces éléments que la violation de la clause de non concurrence par Mme [B] [Z] est donc avérée.
Elle doit en conséquence être condamnée à restituer les sommes perçues au titre de la contrepartie financière qu'elle a indûment perçues, en toute connaissance de cause, soit la somme de 4.801,98 euros euros non contestées dans son quantum à titre subsidiaire par Mme [B] [Z].
La SAS Foncia [Localité 6] sollicite par ailleurs la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice résultant de la violation par Mme [B] [Z] de la clause de non-concurrence.
De fait, la cour ne peut que constater que la SAS Foncia [Localité 6] n'apporte aucun élément pour justifier du préjudice dont elle se prévaut, et sera en conséquence déboutée de cette demande.
Par suite, la décision déférée sera confirmée sauf en ce qu'elle a alloué à la SAS Foncia [Localité 6] des dommages et intérêts pour violation de la clause de non-concurrence.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;
Confirme le jugement rendu le 16 février 2024par le conseil de prud'hommes de Nîmes sauf en ce qu'il a condamné Mme [B] [Z] à verser la somme de 1 000 euros à titre de DRI,
et statuant à nouveau sur l'élément infirmé,
Déboute la SAS Foncia [Localité 6] de sa demande de dommages et intérêts ,
Juge n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Laisse les dépens de la procédure d'appel à la charge de ceux qui les ont exposés.
Arrêt signé par le président et par le greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 24/00978 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JEGB
CRL/JLB
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NIMES
16 février 2024
RG :F 22/00211
[U] ÉPOUSE [Z]
C/
S.A.S. FONCIA [Localité 6]
Grosse délivrée le 13 OCTOBRE 2025 à :
- Me VAJOUR
- Me GUERINI
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 13 OCTOBRE 2025
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NIMES en date du 16 Février 2024, N°F 22/00211
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et Monsieur Julian LAUNAY BESTOSO, Greffier, lors du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 27 Mai 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 22 Septembre 2025 puis prorogée au 13 octobre 2025.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTE :
Madame [B] [U] ÉPOUSE [Z]
née le 06 Mai 1987 à [Localité 7] (30)
[Adresse 2]
[Adresse 9] [Adresse 5]
[Localité 3]
Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LX NIMES, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉE :
S.A.S. FONCIA [Localité 6]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Fabien GUERINI de la SELARL CONSULTIS AVOCATS, avocat au barreau de TOULON
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 13 octobre 2025, par mise à disposition au greffe de la cour.
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
Mme [B] [Z] a été employée à compter du 4 juillet 2011 suivant contrat à durée indéterminée par la SAS Foncia [Localité 6]. Par avenant du 1er février 2020, elle a été nommée responsable clientèle senior, collège cadre, niveau [4] pour une rémunération forfaitaire de 3 230,77 euros.
Le contrat de travail est soumis à la convention collective de l'immobilier.
Par courrier du 16 novembre 2021, la SAS Foncia a accusé réception de la démission de Mme [B] [Z] notifiée le 19 octobre 2021, précisant qu'il entendait faire application de la clause de non concurrence et de la clause de clientèle mentionnées dans l'avenant à son contrat de travail.
La rupture du contrat de travail est intervenue le 18 janvier 2022, à l'issue de son préavis de trois mois.
A compter du 24 janvier 2022, Mme [B] [Z] a été embauchée par la SARL Citya Peri [Localité 7], sur une fonction cadre niveau C1.
Par requête en date du 10 mars 2022, la SAS Foncia [Localité 6] a saisi le conseil de prud'hommes de Nîmes en sa formation de référé aux fins de voir condamner la salariée à cesser son activité concurrente et à rembourser les sommes qui lui ont été versées en exécution de la clause de non-concurrence et de la clause de clientèle, outre une provision pour indemnisation du préjudice subi.
Par ordonnance du 30 juin 2022, la formation de référé du conseil de prud'hommes de Nîmes a dit n'y avoir lieu à référé et invité la SAS Foncia [Localité 6] à mieux se pourvoir au fond. La SAS Foncia [Localité 6] a interjeté appel de cette décision.
Par arrêt du 20 décembre 2022, la cour d'appel de Nîmes a confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance déférée et, y ajoutant, a prononcé l'irrecevabilité de la demande de Mme [B] [Z] concernant la clause de clientèle ainsi que la condamnation de la SAS Foncia [Localité 6] au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En parallèle, Mme [B] [Z] a saisi le conseil de prud'hommes au fond aux fins de voir prononcer la nullité de la clause de non-concurrence et de la clause de clientèle après requalification, outre des demandes d'indemnités.
Par jugement en date du 16 février 2024, le conseil de prud'hommes de Nîmes a :
- dit que la clause de non concurrence de Mme [B] [Z] est conforme aux exigences de validité posée par la jurisprudence,
- constaté que Mme [B] [Z] a violé la clause de non concurrence,
- condamné Mme [B] [Z] à rembourser la somme de 4 801,98 euros correspond à l'indemnité spéciale versée par la SAS Foncia au titre de la clause de non concurrence,
- condamné Mme [B] [Z] à verser la somme de 1 000 euros à titre de DRI,
- condamné Mme [B] [Z] au règlement de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Mme [B] [Z] aux entiers dépens,
- débouté les parties de leurs autres demandes.
Par déclaration effectuée par voie électronique le 15 mars 2024, Mme [B] [Z] a régulièrement interjeté appel de la décision.
Par ordonnance en date du 6 février 2025, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 25 avril 2025. L'affaire a été fixée à l'audience du 27 mai 2025.
Aux termes de ses dernières écritures en date du 18 novembre 2024, Mme [B] [Z] demande à la cour de :
- statuer sur son appel à l'encontre de la décision rendue le 16 février 2024 par le conseil de prud'hommes de Nîmes,
- le déclarer recevable et bien fondé,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
- dit que la clause de non-concurrence de Mme [B] [Z] est conforme aux exigences de validité posées par la jurisprudence,
- constaté que Mme [B] [Z] viole la clause de non-concurrence,
- condamné Mme [B] [Z] à rembourser la somme de 4 801,98 euros correspondant à l'indemnité spéciale versée par la SAS Foncia au titre de la clause de non-concurrence,
- condamné Mme [B] [Z] à verser la somme de 1 000 euros à titre de DRI,
- condamné Mme [B] [Z] au règlement de 1 000 euros au titre de l'article 700 du CPC,
- condamné Mme [B] [Z] aux entiers dépens,
- débouté les parties de leurs autres demandes.
Sur la clause de non-concurrence,
- prononcer la nullité de la clause de non-concurrence ;
Sur la clause de clientèle,
- requalifier la clause de clientèle en clause de non-concurrence ;
- prononcer la nullité de la clause ainsi requalifiée ;
- condamner, en outre, la SAS Foncia [Localité 6] à lui payer une indemnité de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;
- condamner, encore, la SAS Foncia [Localité 6] à lui payer une indemnité de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouter la société foncia [Localité 6] de toutes ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires.
- la débouter de plus fort de son appel incident,
- condamner, enfin, la SAS Foncia [Localité 6] aux entiers dépens.
Au soutien de ses demandes, Mme [B] [Z] fait valoir que:
- la clause de non-concurrence porte une atteinte disproportionnée à sa liberté de travailler, en ne prenant pas en compte les spécificités de son emploi,
- les emplois disponibles en agence immobilière sont de trois natures distinctes : activité copropriété, activité gérance et activité transaction, et telle qu'elle est rédigée, la clause de non-concurrence lui interdit non seulement de travailler dans toute agence immobilière concurrente quelle qu'elle soit mais elle lui interdit, en outre, d'occuper quelque emploi que ce soit au sein de toute agence immobilière dans le secteur géographique prohibé et c'est précisément en cela que cette clause porte une atteinte disproportionnée à la liberté du travail,
- appliquer cette clause revient à l'obliger à rompre son nouveau contrat de travail, étant observé que la clause de non-concurrence qui y figure est proportionnée puisqu'elle lui interdit tout emploi identique ou similaire au sien,
- cette atteinte est d'autant plus disproportionnée que le contrat contient également une clause de clientèle,
- appliquer ces deux clauses revient à lui interdire d'exercer toute activité dans le domaine de l'immobilier qui est son domaine de formation et de compétence,
- dès lors que la clause de non-concurrence est entachée de nullité, il ne peut lui être reproché de la violer, mais s'agissant d'une nullité relative, seul le salarié peut s'en prévaloir et la SAS Foncia [Localité 6] ne peut demander le remboursement des indemnités mensuelles qu'elle a versées en application de cette clause,
- la demande de dommages et intérêts de la SAS Foncia [Localité 6] est infondée dès lors qu'elle ne démontre pas que dans son nouvel emploi, son ancienne salariée aurait détourné ou démarché sa clientèle, et donc la réalité du préjudice qu'elle invoque.
Aux termes de ses dernières écritures d'intimé en date du 30 août 2024, la SAS Foncia [Localité 6] demande à la cour de :
- confirmer le jugement ayant validé la clause de non concurrence,
- débouter Mme [B] [Z] de sa demande d'annulation de la clause de non concurrence, dès lors que celle-ci est conforme aux exigences de validité posée par la jurisprudence,
- débouter l'appelante de sa demande d'annulation de la clause de respect de clientèle, celle-ci n'étant pas une clause de non concurrence,
- constater que Mme [B] [Z] a violé la clause de non-concurrence,
- débouter Mme [B] [Z] de ses demandes
- confirmer le jugement et condamner Mme [B] [Z] à lui rembourser les contreparties financières qu'elle a perçues au titre de la clause de non concurrence alors qu'elle travaillait chez Citya Peri entre janvier et mai 2022 inclus soit 4.801,98 euros,
- confirmer le jugement ayant condamné la salariée à réparer son préjudice subi du fait de la violation de la clause de non concurrence
- reformer le jugement en ce qui concerne le quantum alloué et condamner Mme [B] [Z] sur le fondement de l'article 1240 du code civil à lui verser la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts suite à la violation de la clause de non-concurrence
- confirmer le jugement ayant condamné la salariée au titre de l'article 700 code de procédure civile de première instance,
- condamner Mme [B] [Z] à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile en cause d'appel.
Au soutien de ses demandes, la SAS Foncia [Localité 6] fait valoir que :
- il n'est absolument pas contesté ni contredit que dans les jours qui ont suivi son départ effectif de la société , Mme [B] [Z] a été embauchée pour travailler au sein d'une agence immobilière concurrente, à savoir CITYA PERI située à [Localité 7], à 850 mètres de son ancien lieu de travail pendant 10 ans,
- Mme [B] [Z] occupe chez son nouvel employeur des fonctions identiques ou très proches de celles qu'elle occupait précédemment, à savoir responsable de clientèle en gestion de copropriétés,
- contrairement à ce qui est soutenu par Mme [B] [Z], la clause de non-concurrence répond aux exigences jurisprudentielles en matière de validité, puisque prévue sur une période de 18 mois, dans un périmètre limité à 50 km autour de l'agence de [Localité 7], et la contrepartie financière prévue est de 30% de son salaire de référence,
- il n'en résulte par suite aucune atteinte disproportionnée à sa liberté de travailler, et Mme [B] [Z] ne démontre pas que pendant son préavis elle aurait candidaté sur des agences immobilières situées au-delà de 50 km de [Localité 7] et aurait essuyé de refus,
- Mme [B] [Z] considère par ailleurs que la clause de clientèle à laquelle elle est également soumise doit s'analyser en une clause de non-concurrence et qu'il ne s'agit pas d'une simple interdiction de détournement de la clientèle,
- pourtant, cette clause de respect de clientèle ne vise que la clientèle de l'agence nîmoise existante au cours de la dernière année, ce qui constitue une limitation géographique, qui correspond au portefeuille de l'agence de [Localité 7] ; elle prévoit une durée d'application de 14 mois à compter du départ et est assortie d'une compensation financière suffisante puisque justement elle n'interdit pas de travailler dans une agence concurrente,
- si cette clause devait subsidiairement être requalifiée en clause de non-concurrence, elle en respecte les conditions de validité, et aucune nullité n'est encourue.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.
MOTIFS
Conformément au principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle
et à l'article L.1121-1 du Code du travail, une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, si elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié, et si elle comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives.
Lorsqu'une clause de non-concurrence est annulée, le salarié qui a respecté une clause de
non-concurrence illicite peut prétendre au paiement d'une indemnité en réparation du fait que l'employeur lui a imposé une clause nulle portant atteinte à sa liberté d'exercer une activité professionnelle de sorte que l'employeur n'est pas fondé à solliciter la restitution des sommes versées au titre de la contrepartie financière de l'obligation qui a été respectée.
Toutefois, l'employeur qui prouve que le salarié a violé la clause de non-concurrence pendant la période au cours de laquelle elle s'est effectivement appliquée, est fondé à solliciter le remboursement de la contrepartie financière indûment versée à compter de la date à laquelle la violation est établie.
Le droit du salarié de conserver la contrepartie financière de la clause répare le préjudice causé par le fait d'avoir respecté une clause de non concurrence nulle. A contrario, la nullité de la clause de non-concurrence ne fait pas obstacle au remboursement par le salarié de la contrepartie, s'il n'a de toute façon pas respecté cette clause.
En l'espèce le contrat de travail de Mme [B] [Z] comprend une clause de non concurrence ainsi formulée :
' Clause de non-concurrence & clause de clientèle
La clientèle d'administration de biens ( copropriété, gérance, location et transaction ) de la société FONCIA [Localité 6] est constituée, développée, via d'une part, de la croissance externe ( rachat de sociétés ou de fonds de commerce ) et d'autre part, de la croissance interne grâce aux méthodes de la société et plus généralement à savoir-faire professionnel et à sa notoriété, ce que le salarié reconnait expressément.
En conséquence le salarié ne dispose d'aucun droit sur cette clientèle.
En tout état de cause, le salarié s'interdit, au terme de son contrat de travail, d'utiliser des procédures contraires aux usages loyaux du commerce, à savoir notamment démarcher la clientèle FONCIA dont il a été le contact privilégié pendant sa collaboration avec le Groupe FONCIA et /ou entretenir une quelconque confusion avec les structures du Groupe FONCIA et sa personne et/ou ses propres structures directes ou indirectes.
A. Clause de non concurrence
Au regard des contacts que le salarié sera amené à entretenir avec la clientèle de la société ainsi que les informations auxquelles le salarié a accès, il est indispensable à la protection des intérêts légitimes de la société qu'en cas de rupture du contrat de travail, quelle qu'en soit la cause, le salarié s'interdise cumulativement :
- expressément de créer, acquérir, prendre en location, exploiter, diriger, travailler directement ou indirectement, fût-ce notamment en qualité de salarié, un établissement ayant des activités d'Administration de Biens (Syndic de Copropriété et Gestion Locative) et/ou de Transaction immobilière.
- expressément de s'intéresser de quelque manière que ce soit ou d'apporter son concours directement ou indirectement, fût-ce, notamment, en qualité de salarié, bailleur de fonds, associé commanditaire, administrateur, détenteur de titres ou consultant, à des affaires similaires ou à des entreprises ayant des activités similaires à celles de la Société.
Cette interdiction est limitée à une durée de 18 mois à compter de la date de cessation effective de l'activité du salarié.
Cette interdiction porte sur un périmètre de 50 kilomètres autour de l'établissement sur lequel le salarié est affecté.
En contrepartie de cette clause de non-concurrence le salarié percevra, chaque mois, à compter de la cessation effective de son activité, et pendant toute la durée de l'interdiction, dans la mesure où celle-ci est respectée, une indemnité spéciale forfaitaire (intégrant l'indemnité compensatrice de congés payés) égale à 30 % de la moyenne mensuelle de la rémunération brute perçue par le salarié au cours des douze derniers mois d'activité dans la Société, rémunération variable incluse ; les primes exceptionnelles de toute nature, de même que le remboursement des frais professionnels sont exclus de l'assiette de l'indemnité.
La présente clause sera applicable à toute rupture du contrat de travail.
Dans un délai d'un mois à compter de la date de la notification de la rupture du contrat de travail, la Société pourra néanmoins par lettre recommandée avec avis de réception ou lettre remise en main propre manifester sa volonté de libérer le salarié de l'application de cette clause, en portant sa décision par écrit à sa connaissance. Dans ce cas, le salarié ne pourra prétendre à aucune contrepartie financière. »
B. Clause de clientèle
Au regard des contacts que le salarié sera amené à entretenir avec la clientèle de la Société, ainsi que des informations auxquelles le salarié a accès, il est indispensable à la protection des intérêts légitimes de la Société qu'en cas de rupture du contrat de travail, quelle qu'en soit la cause, le salarié s'interdise :
- d'entrer en contact directement ou indirectement, sous quelque forme et sous quelque mode que ce soit, avec les clients de la Société existants au jour de la notification de la rupture du contrat de travail ou ceux qui ont été clients de cette structure dans l'année précédent la rupture, et, de manière corollaire, de démarcher lesdits clients,
- d'exploiter, directement ou indirectement, la clientèle de la Société existante au jour de la notification de la rupture du contrat de travail ou la clientèle du portefeuille qui a été confiée au salarié au sein de la Société à titre personnel ou par l'intermédiaire de toute Société, association ou entité juridique quelconque dont le salarié serait l'associé, le membre, le salarié ou le collaborateur ou pour le compte de laquelle le salarié interviendrait ou serait rémunéré, directement ou indirectement, de quelque manière, à quelque titre et sous quelque statut que ce soit, dans une activité concurrente à celle exercée par FONCIA.
Cette interdiction est limité au secteur géographique couvert par la clientèle de la Société, soit le(s) département(s) où la société exerce son activité.
Cette interdiction est valable pendant une durée de 14 mois à compter de la date de sortie des effectifs du collaborateur.
En contrepartie de cette interdiction, le salarié percevra, chaque mois, à compter de la cessation effective de son activité, et pendant toute la durée de l'interdiction, dans la mesure où celle-ci est respectée, une indemnité forfaitaire spéciale égale à 5% de la moyenne mensuelle des salaires bruts perçus par le salarié au cours de douze derniers mois d'activité passés dans l'entreprise, étant entendu que les primes exceptionnelles de toute nature, de même que les frais professionnels en sont exclus.
Les parties reconnaissent le périmètre restreint de la présente clause qui ne concerne que les clients de la Société existants au jour de la notification de la rupture du contrat de travail ou ceux qui ont été clients de cette Société dans l'année précédent la rupture du contrat ( ou la clientèle figurant au jour de la notification de la rupture dans le portefeuille du salarié ).
La présente clause sera applicable à toute rupture du contrat de travail.
Dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la rupture du contrat de travail, la Société pourra néanmoins par lettre recommandée avec avis de réception ou lettre remise en main propre manifester sa volonté de :
- renoncer à l'application de cette clause, en portant sa décision par écrit à la connaissance du salarié . Dans ce cas, le salarié ne pourra prétendre à aucune contrepartie pécuniaire.
- réduire la durée de l'interdiction, l'indemnité due étant alors réduite dans les mêmes proportions.
L'indemnité forfaitaire spéciale cessera d'être versée en cas de violation de la part du salarié de la dite clause, sans préjudice du remboursement des indemnités mensuelles perçues indûment par ses soins, ainsi que du paiement des dommages et intérêts dus en réparation du préjudice subi par la Société du fait de la violation de la présente clause.
En outre, la Société se réserve le droit de faire ordonner, le cas échéant sous astreinte, la cessation dudit trouble'.
* sur la validité de la clause de non-concurrence
Il résulte de ce même contrat de travail et de ses avenants que les fonctions occupées par Mme [B] [Z] lui imposaient une relation régulière avec la clientèle et lui permettaient l'accès à des informations stratégiques et confidentielles de la société, en particulier le listing clients, les process, les tarifs pratiqués. La société intimée avait donc un intérêt légitime à l'insertion d'une clause de non-concurrence.
Par ailleurs, l'étendue géographique de la clause est de 50 km autour de l'établissement auquel la salariée était affectée. Elle est donc limitée dans l'espace, étendue nécessaire eu égard à l'activité de la SAS Foncia [Localité 6]. Cette limitation, quand bien même elle s'étend géographiquement sur plusieurs départements compte tenu de la situation géographique de [Localité 7], lui permettait notamment de travailler dans des villes situées à moins d'une heure de son ancien lieu de travail.
Elle était en outre limitée à 18 mois, ce qui est conforme aux dispositions conventionnelles qui permettent d'aller jusqu'à deux années pour l'interdiction d'emploi générée par une telle clause.
D'autre part, il a été tenu compte des spécificités de l'emploi de la salariée, qui rendaient nécessaire l'insertion d'une telle clause. Si son expérience professionnelle s'est entièrement déroulée au sein du groupe Foncia, sa formation initiale n'était pas limitée au secteur de l'immobilier. Il s'en déduit que sa formation initiale n'était pas en droit de l'immobilier mais qu'elle a su s'adapter à ce secteur.
Enfin, il était prévu une contrepartie financière évaluée à 30% de la rémunération de Mme [B] [Z], ce qui est loin d'être dérisoire comme elle l'affirme et est même supérieur à ce que prévoit la convention collective pour la clause de non-concurrence des négociateurs immobiliers.
En conséquence, il y a lieu de conclure que la clause de non-concurrence insérée dans le contrat de travail de Mme [B] [Z] était valide.
* sur la validité de la clause de respect de clientèle
Cette clause est limitée dans le temps ( 14 mois ) et dans l'espace ( le département du Gard ) et tient compte ainsi que cela a été rappelé supra des spécificités de l'emploi exercé par Mme [B] [Z]. Elle prévoit également une contrepartie financière.
Ces limitations permettent toutefois à la salariée d'exercer une activité professionnelle conforme à sa formation, à ses connaissances et à son expérience professionnelle et la clause ne se confond pas contrairement à ce qui est soutenu par Mme [B] [Z] avec la clause de non concurrence, puisqu'elle ne vise pas la nature de l'activité mais uniquement les contacts avec la clientèle de la SAS Foncia [Localité 6].
* sur les conséquences financières
S'agissant de la violation de la clause de non-concurrence, il résulte des éléments du dossier et des affirmations mêmes de la salariée que celle-ci a été engagée, dès le 24 janvier 2022, soit dès la fin de son préavis envers la SAS Foncia [Localité 6] intervenue le 18 janvier 2022, par la SARL Citya Peri en qualité de ' principale de copropriétés dans le cadre de son établissement sis à [Adresse 8]', avec un statut de cadre niveau C1.
Mme [B] [Z] était responsable clientèle senior copropriété lorsqu'elle était salariée de la SAS Foncia [Localité 6] et est devenue 'principale de copropriété' pour le compte de son nouvel employeur dans une agence située à 850 mètres de son ancien lieu de travail, pour effectuer donc une activité similaire de syndic de copropriété.
Il résulte de ces éléments que la violation de la clause de non concurrence par Mme [B] [Z] est donc avérée.
Elle doit en conséquence être condamnée à restituer les sommes perçues au titre de la contrepartie financière qu'elle a indûment perçues, en toute connaissance de cause, soit la somme de 4.801,98 euros euros non contestées dans son quantum à titre subsidiaire par Mme [B] [Z].
La SAS Foncia [Localité 6] sollicite par ailleurs la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice résultant de la violation par Mme [B] [Z] de la clause de non-concurrence.
De fait, la cour ne peut que constater que la SAS Foncia [Localité 6] n'apporte aucun élément pour justifier du préjudice dont elle se prévaut, et sera en conséquence déboutée de cette demande.
Par suite, la décision déférée sera confirmée sauf en ce qu'elle a alloué à la SAS Foncia [Localité 6] des dommages et intérêts pour violation de la clause de non-concurrence.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;
Confirme le jugement rendu le 16 février 2024par le conseil de prud'hommes de Nîmes sauf en ce qu'il a condamné Mme [B] [Z] à verser la somme de 1 000 euros à titre de DRI,
et statuant à nouveau sur l'élément infirmé,
Déboute la SAS Foncia [Localité 6] de sa demande de dommages et intérêts ,
Juge n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Laisse les dépens de la procédure d'appel à la charge de ceux qui les ont exposés.
Arrêt signé par le président et par le greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT