Cass. 1re civ., 9 mars 2022, n° 19-19.392
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Défendeur :
Banque CIC Sud-Ouest (Sté), Compagnie Européenne de garanties et cautions (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Chauvin
Avocats :
SCP Zribi et Texier, SCP Caston, SARL Le Prado - Gilbert
1°/ M. [C] [W],
2°/ Mme [B] [M], épouse [W],
domiciliés tous deux [Adresse 3] (Australie),
ont formé le pourvoi n° W 19-19.392 contre l'arrêt rendu le 12 mars 2019 par la cour d'appel de Pau (1re chambre), dans le litige les opposant :
1°/ à Banque CIC Sud-Ouest, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à Compagnie européenne de garanties et cautions, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],
3°/ à SCP de Mandataires Judiciaires [Y], société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 4], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Foncière la Vénétie,
défenderesses à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Champ, conseiller référendaire, les observations de la SCP Zribi et Texier, avocat de M. et Mme [W], de la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de Compagnie européenne de garanties et cautions, de la SARL Le Prado Gilbert, avocat de Banque CIC Sud-Ouest, après débats en l'audience publique du 18 janvier 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Champ, conseiller référendaire rapporteur, M. Vigneau, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 12 mars 2019), suivant offre acceptée du 3 février 2011, la Banque CIC Sud-Ouest (la banque) a consenti à M. et Mme [W] (les acquéreurs) un prêt, garanti par la société Crédit logement (la caution), destiné à l'acquisition d'un bien immobilier en l'état futur d'achèvement vendu par la société foncière la Vénétie (le vendeur), bénéficiant de la garantie d'achèvement de la Compagnie européenne de garanties et cautions (le garant).
2. Invoquant un non-respect des délais d'achèvement, les acquéreurs ont assigné le vendeur, la banque et le garant en résolution de la vente en l'état futur d'achèvement et du contrat de prêt. Le vendeur ayant été placé en redressement, converti en liquidation judiciaire, son mandataire judiciaire, la SCP Dollet Collet, a été assigné en intervention forcée.
3. Par une décision devenue irrévocable, le premier juge a prononcé la résolution de la vente et du prêt.
Examen des moyens
Sur le second moyen, ci-après annexé
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. Les acquéreurs font grief à l'arrêt de les condamner solidairement à payer à la banque la somme de 116 330,05 euros, outre intérêts au taux légal pour chaque règlement intervenu à compter de sa date jusqu'à parfait règlement, alors « que le paiement effectué par la caution libère le débiteur et entraîne, de plein droit, sa subrogation dans les droits du créancier à l'encontre de ce dernier, qu'elle a dès lors seule qualité pour exercer ; qu'en condamnant toutefois solidairement les acquéreurs à rembourser à la banque la somme de 116 330,05 euros outre les intérêts au taux légal, « nonobstant le remboursement effectué par la caution pour le compte des acquéreurs à la banque de la somme de 141 180,45 euros, tel que cela résulte de la quittance du 20 juillet 2015, à raison des échéances impayées à compter du 15 août 2013 et jusqu'au 15 décembre 2014, outre les pénalités de retard », la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé, par refus d'application, l'article 122 du code de procédure civile, ensemble l'article 2306 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 2306 du code civil et l'article 122 du code de procédure civile :
6. Selon le second de ces textes, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. Selon le premier, la caution qui a payé la dette est subrogée à tous les droits qu'avait le créancier contre le débiteur.
7. Il s'en déduit que la caution, qui a payé la banque, est subrogée à tous ses droits et que celle-ci n'a plus intérêt à solliciter de l'emprunteur la restitution du capital prêté par suite de la résolution du prêt affecté, en conséquence de celle du contrat de vente.
8. Pour rejeter la fin de non-recevoir soulevée par les emprunteurs et condamner ceux-ci à payer à la banque la somme de 116 083,05 euros, l'arrêt retient que la résolution du contrat de crédit consécutive à la résolution de la vente emporte l'obligation pour les emprunteurs de rembourser à la banque le capital emprunté et relève que celle-ci justifie avoir versé cette somme auprès du vendeur à la suite des appels de fonds intervenus entre les 8 février 2011 et 29 mars 2012.
9. En statuant ainsi, après avoir constaté que la caution avait, selon quittance du 20 juillet 2015, payé à la banque la somme de 141 180,45 euros, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne solidairement M. et Mme [W] à rembourser à la société CIC du Sud-Ouest la somme de 116 330,05 euros, outre intérêts au taux légal pour chaque règlement intervenu à compter de sa date jusqu'à parfait règlement et déboute celle-ci de sa demande de compensation, l'arrêt rendu le 12 mars 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux.
Condamne la société CIC du Sud-Ouest aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par la Compagnie européenne de garanties et cautions et par la société CIC du Sud-Ouest et condamne celle-ci à payer à M. et Mme [W] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;