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Décisions

Cass. 1re civ., 16 juillet 1998, n° 96-17.476

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. LEMONTEY

Cass. 1re civ. n° 96-17.476

15 juillet 1998

Sur le pourvoi formé par M. Alain Y..., demeurant Bassin de Plaisance, 14150 Ouistreham, en cassation d'un arrêt rendu le 14 mai 1996 par la cour d'appel de Caen (1re chambre civile), au profit de M. Pierre Z..., demeurant ..., défendeur à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 16 juin 1998, où étaient présents : M. Lemontey, président, Mme Marc, conseiller rapporteur, M. Fouret, Mme Delaroche, MM. Sargos, Aubert, Cottin, Bouscharain, conseillers, Mmes Verdun, Catry, conseillers référendaires, M. Gaunet, avocat général, Mme Aydalot, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Marc, conseiller, les observations de Me Foussard, avocat de M. Y..., de la SCP Peignot et Garreau, avocat de M. Z..., les conclusions de M. Gaunet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches :

Vu l'article 1147 du Code civil ;

Attendu que, par acte du 17 janvier 1985, M. Z... a donné à bail aux époux X..., des locaux dans lesquels était exploité le fonds de commerce qui leur avait été vendu, le même jour, par M. Y...;

que, pour garantir le paiement des loyers, M. Y... s'est porté caution solidaire des preneurs;

que dès avril 1991 ceux-ci ont cessé de payer les loyers;

que, le 15 décembre 1992, M. Z... leur a fait délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée dans l'acte de bail;

que la liquidation judiciaire des époux X... a été prononcée le 20 janvier 1993;

qu'après avoir déclaré sa créance au passif de cette procédure collective, M. Z... a assigné le 22 mars 1993, M. Y..., pris en sa qualité de caution en paiement de loyers;

que ce dernier a soutenu qu'il était fondé, en application de l'article 2037 du Code civil, à se prévaloir de la décharge de son obligation, le créancier n'ayant pas exercé en temps utile l'action résolutoire et, subsidiairement, à rechercher la responsabilité du bailleur pour avoir laissé s'accumuler l'arriéré de loyers pendant 23 mois ;

Attendu que, pour condamner M. Y... à paiement, la cour d'appel, par motifs adoptés, après avoir relevé que les loyers dus par les époux X... l'étaient pour la période d'avril 1991 au 15 janvier 1993, "date de résiliation du bail", a retenu qu'en raison de l'insolvabilité des preneurs, ni l'exercice contre ceux-ci d'une action en paiement des loyers, ni celui d'une action en résolution du bail n'auraient pu aboutir à un recouvrement effectif des loyers et que, dès lors, même si M. Z... avait tardé à adresser aux époux X... un commandement de payer visant la clause résolutoire et, plus encore, à agir contre M. Y..., sa négligence n'avait pas été préjudiciable à ce dernier;

qu'ayant constaté par motifs propres, que M. Y... avait eu connaissance, dès 1991, de la situation financière désastreuse des époux X..., elle a relevé que non seulement l'insolvabilité de ces derniers depuis avril 1991, mais encore l'existence des nantissements grevant leur fonds de commerce et pris pour garantir le remboursement des prêts par eux obtenus pour l'acquisition dudit fonds privaient la caution de toute chance d'obtenir un quelconque remboursement, dans l'hypothèse où elle aurait règlé les loyers ;

Attendu, cependant, qu'il résultait des circonstances de la cause qu'en laissant s'accroître la dette de loyers des époux X... sans agir en temps utile ni contre eux, ni contre M. Y..., M. Z... avait privé ce dernier de la possibilité d'acquitter lui-même les sommes dues et d'exercer, en qualité de caution subrogée dans les droits du créancier désintéressé, l'action en résolution du bail qui lui eût permis, sinon de recouvrer les sommes versées, du moins d'éviter que les nouveaux loyers ne viennent à échéance et de limiter, ainsi, le montant de la dette cautionnée;

qu'en se déterminant comme elle a fait, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et énonciations et a, par suite, violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 mai 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Caen;

remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;

Condamne M. Z... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. Z... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

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