CA Paris, Pôle 5 - ch. 8, 14 octobre 2025, n° 25/03596
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 14 OCTOBRE 2025
(n° / 2025, 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/03596 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CK36A
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 29 janvier 2025 -Juge commissaire du Tribunal des activités économiques de PARIS - RG n° P201100921
APPELANTE
S.A.S. ADAM, société par actions simplifiée, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
Immatriculée au registre du commerce et dessociétés de GUERET sous le numéro 322 344 649
Dont le siège social est situé [Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477,
INTIMÉS
Monsieur [G] [T]
Demeurant [Adresse 12]
[Localité 6]
Représenté par Me Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L34,
S.E.L.A.R.L. [O] [A]-[V], prise en la personne de Maître [C] [O], en qualité de mandataire judiciaire liquidateur de La S.A.R.L LES JARDINS D'OSIRIS, nommée à cette fonction par jugement rendu par le Tribunal de commerce de PARIS en date du 24 mars 2011,
Immatriculée au registre du commerce et dessociétés de PARIS sous le numéro 530 194 968,
Dont le siège social est situé [Adresse 15]
[Localité 14]
Représentée par Me Edouard TRICAUD de l'AARPI SAINT-LOUIS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque K0079,
S.A.R.L. LE JARDIN D'OSIRIS, prise en la personne de Maître [H] [B], en qualité de mandataire ad'hoc de la société LE JARDIN D'OSIRIS, demeurant [Adresse 9],
Immatriculée au registre du commerce et dessociétés de PARIS sous le numéro 479 125 676,
Dont le siège social est situé [Adresse 1]
[Localité 13]
LE TRÉSOR PUBLIC
Situé [Adresse 24]
[Adresse 23]
[Adresse 16]
[Localité 4]
La société [Adresse 20], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
Immatriculée au registre du commerce et dessociétés d'EVREUX sous le numéro 803 574 383,
Dont le siège social est situé [Adresse 8]
[Localité 5]
Monsieur [D] [W]
Demeurant [Adresse 7]
[Localité 11]
Non constitués
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 906 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 septembre 2025, en audience publique, devant la cour, composée de :
Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre, chargée du rapport,
Monsieur François VARICHON, conseiller,
Madame Isabelle ROHART, conseillère,
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
ARRÊT :
- rendu par défaut
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
FAITS ET PROCÉDURE:
Par jugement du 24 mars 2011, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Le Jardin d'Osiris, et a désigné la SELARL [O] [A] [V], prise en la personne de Me [O], en qualité de liquidateur judiciaire.
La société Le Jardin d'Osiris est propriétaire de biens et droits immobiliers composant une résidence de tourisme à [Localité 19], qui était gérée par la société [Adresse 20]. La société gestionnaire a été placée en liquidation judiciaire le 21 novembre 2024. A ce jour la résidence n'est plus exploitée et la totalité du mobilier a été vendue aux enchères publiques.
La dirigeante de la société Le Jardin d'Osiris, Mme [Z], est décédée le [Date décès 10] 2022 et Maître [B] a été désigné en qualité de mandataire ad hoc de cette société.
Par ordonnance du 21 novembre 2023, le juge-commissaire à la liquidation judiciaire de la société Le Jardin d'Osiris a désigné la société Adam comme contrôleur de la procédure collective de la société Le Jardin d'Osiris.
La SELARL [O] [A] [V], ès qualités, a recherché un acquéreur pour les lots détenus par la société Le Jardin d'Osiris dans la résidence de tourisme de [Localité 17].
Sur requête du 15 octobre 2024 de la SELARL [O] [A] [V], ès qualités, et par ordonnance du 29 janvier 2025, le juge-commissaire a autorisé la cession amiable des biens et droits immobiliers de la société Le Jardin d'Osiris, à savoir les lots 7, 23,28,33,82,207,223, 232,281,101,201,202 et 203 de la résidence de tourisme sise à [Adresse 18] au profit de M.[G] [T] avec faculté pour ce dernier de se substituer toute entité civile ou commerciale au sein de laquelle il sera associé, moyennant la somme de 83.533,34 euros, soit 53.533,24 euros pour les appartements et parkings qui représentent 542 tantièmes et une somme forfaitaire de 30.000 euros pour le lot 101, hors droit et frais en sus à la charge de l'acquéreur, payable au comptant le jour de la signature de l'acte de vente, autorisé la SELARL [O] [A] [V], ès qualités, à passer tous actes nécessaires à la réalisation de la vente, à encaisser le prix, en donner quittance, avec ou sans subrogation et dit que l'acquéreur devra faire son affaire personnelle de :
l'ensemble de tous les problèmes ou difficultés d'ordre divers, liés aux biens acquis ou à leur occupation dont il estime avoir eu connaissance suffisante et ce sans aucun recours à l'encontre du mandataire judiciaire,
l'état dans lequel se trouvent les biens dont s'agit,
des dispositions d'urbanisme applicables aux biens vendus,
des constructions, modifications ou changement d'affectation apportés à ces biens, n'ayant pas l'objet d'une autorisation administrative, de l'absence éventuelle de justificatifs de toute sorte (permis de construire, certificat de conformité, assurance dommages ' ouvrage ou décennales) de l'obtention de documents d'urbanisme et autorisations administratives nécessaires pour leur projet de construction, le tout sans recours contre le vendeur,
les frais et honoraires de rédaction d'acte, d'enregistrement, de purge et de formalités légales seront à la charge exclusive de l'acquéreur,
le transfert de propriétaire interviendra au jour de la signature de l'acte,
jusqu'à cette date et à compter du prononcé de l'ordonnance, l'acquéreur devra assurer à ses frais la surveillance et le bon entretien de la parcelle, objet de la présente cession.
Le 17 février 2025, la société Adam, d'une part et M. [T], d'autre part, ont relevé appel de cette ordonnance. Les deux appels ont été joints le 25 mars 2025.
Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 2 juillet 2025, la société Adam demande à la cour de déclarer recevable et bien fondé son appel, y faisant droit, infirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions, et, statuant à nouveau, juger que la vente sera au prix de 68.000 euros par appartement plus une place de parking, sauf le lot n°101 et ses parkings qui seront vendus à la somme de 30.000 euros, à titre subsidiaire, rejeter purement et simplement l'offre de M.[T] comme étant insuffisante, et statuer ce que de droit sur les dépens qui seront employés en frais de la procédure collective.
Par conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 2 mai 2025, M.[T] demande à la cour d'infirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau, rejeter la requête présentée par Me [O], l'autoriser à inscrire une créance de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au passif de la société Les Jardins d'Oasis.
Par conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 4 septembre 2025, la SELARL [O] [A] [V], ès qualités, demande à la cour de déclarer recevables et bien fondés les appels formés par M.[T] et la société Adam, y faisant droit, infirmer l'ordonnance rendue le « 5 janvier 2025 (R.G 2 : 01100921 », renvoyer les parties devant le juge commissaire de la procédure collective près le tribunal des activités économiques de Paris, lequel sera saisi par voie de requête afin qu'il puisse statuer sur une nouvelle fixation des modalités, après avoir entendu les parties en leurs observations, et dire que les dépens engagés dans le cadre de cette instance par chacune des parties resteront à leur charge.
La déclaration d'appel a été signifiée le 12 mars 2025, au Trésor Public (à personne morale), à la société [Adresse 22] selon les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, à la société Le Jardin d'Osiris ( à personne morale) et à M. [W], selon procès-verbal remis à étude. Ces parties n'ont pas constitué avocat.
SUR CE,
La société Adam soutient, en sa qualité de contrôleur, qu'elle aurait dû être pleinement informée des conditions de la vente, et ce préalablement à la requête soumise par le mandataire au juge-commissaire, qu'elle avait manifesté son opposition à la vente envisagée, sans que sa position soit prise en compte, que cette carence contrevient aux dispositions du code de commerce, qui imposent la transparence et la communication des actes de la procédure à l'égard du contrôleur.
Elle fait valoir que la vente a été ordonnée sans appel d'offres ni publicité, au profit d'un acquéreur unique, en violation manifeste des articles L.642-1 et suivants du code de commerce, et que le prix de cession est manifestement insuffisant, dès lors que chacun des appartements pourrait valoir 68.000 euros alors que l'offre prévoyait la vente de cinq appartements pour un prix total de 53.000 euros, soit environ 10.600 euros par lot, soit un écart considérable qui préjudicie à l'ensemble des créanciers. Elle souligne également que le défaut de répartition du prix par lot est particulièrement préjudiciable aux créanciers hypothécaires, dont elle- même titulaire d'une hypothèque sur les lots n°23 et n°82, et que ce défaut empêche toute identification des sommes susceptibles de revenir aux créanciers en fonction de leur rang, contrevenant ainsi aux principes d'égalité et de transparence de la procédure.
M.[T] expose quant à lui que:
- la cession a été autorisée à son profit alors qu'il n'est pas l'auteur de l'offre, qu'en effet, il n'a pas présenté l'offre en son nom propre mais seulement en tant que porte-parole d'un groupe d'investisseurs,
- l'offre présentée portait sur des biens immobiliers donnés à bail commercial, pour lesquels un loyer était réglé, or depuis la liquidation judiciaire du gestionnaire de la résidence, le liquidateur a mis fin au bail commercial et la totalité du mobilier a été vendue aux enchères publiques au début de l'année 2025, qu'ainsi les biens, et les droits qui lui étaient attachés au titre desquels l'offre a été présentée n'existaient plus au jour où l'ordonnance, que dès lors le juge commissaire ne pouvait pas autoriser cette cession,
- en outre, les modalités de cession présentées par Me [O] dans sa requête ne correspondent pas à l'offre des investisseurs qu'il était chargé de relayer, car celle-ci était subordonnée à l'obtention d'un concours bancaire nécessaire à l'acquisition et à la remise en état de l'ensemble immobilier, de sorte qu'aucune vente de gré à gré ne saurait intervenir alors que les parties ne se sont pas accordées sur les conditions de la vente.
Le liquidateur judiciaire convient de ce qu'il y a lieu d'infirmer l'ordonnance et de renvoyer les parties devant le juge-commissaire afin qu'il soit saisi par voie de requête sur la nouvelle fixation des modalités de la vente.
Sur ce la cour,
Les lots visés dans l'ordonnance dont appel correspondent à 5 studios d'une surface de 28,17 m² (lots 7, 23,28,33 et 82), à 8 parkings ( lots 201, 202, 203, 207, 223, 227, 232 et 281) et à des locaux divers situés au rez-de-chaussée du bâtiment A ( lot 101).
L'ordonnance a autorisé la cession au profit de M.[T] avec faculté de substitution au profit de toute entité civile ou commerciale au sein de laquelle il sera associé, alors que celui-ci n'était que le porte-parole d'un groupe de copropriétaires investisseurs au nom desquels il a proposé un prix d'achat de 850.000 euros pour l'ensemble des 83 appartements et parkings de la résidence représentant 8602 tantièmes outre un forfait de 30.000 euros pour le lot 101. Il ressort en effet de l'attestation des membres du conseil syndical représentant les copropriétaires de la résidence [Adresse 20], que M.[T] a toujours été l'intermédiaire des investisseurs potentiels, mais en aucun cas lui-même un investisseur ou un propriétaire de sorte qu'il n'est pas compréhensible qu'il ait désigné attributaire des lots appartenant à la société Jardins d'Osiris.
Par ailleurs, la société Adam, contrôleur, met en cause l'insuffisance du prix de cession en se référant à l'évaluation qui avait été faite des lots.
M.[I] a été désigné par le juge-commissaire en qualité d'expert à l'effet de procéder à la description et à l'estimation des biens et droits immobiliers de la résidence [Adresse 21] [Localité 17]. Aux termes de son rapport en date du 2 octobre 2019, l'expert a estimé les lots d'habitation associés à un parking entre 64.000 et 68.000 euros par lot et les lots 'de services' entre 400.000 et 420.000 euros, en précisant que n'ayant pu pénétrer dans les lots de copropriété, son expertise était le résultat de la visite effectuée à l'extérieur et de ses investigations administratives et juridiques.
S'il ressort des explications des parties que la résidence s'est dégradée depuis le rapport d'expertise, la résidence n'étant plus gérée, et que la totalité du mobilier a été vendu, il n'en reste pas moins que le prix de cession de 83.533,34 euros fixé par l'ordonnance du juge-commissaire, qui est un prix global puisque l'ordonnance précise qu'il se décompose en 53.533,24 euros pour les appartements et parkings, et 30.000 euros forfaitaire pour le lot 101, est extrêmement éloigné des estimations de l'expert et ce, sans qu'il soit, en l'état, versé aux débats d'éléments suffisants permettant d'entériner un prix de cession aussi bas.
Ces deux motifs justifient à eux seuls l'infirmation de l'ordonnance.
Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la société Adam tendant à voir fixer le prix de cession à 68.000 euros par appartement + sa place de parking et à 30.000 euros pour le lot 101 et ses parkings, aucune offre n'ayant été faite en ce sens. Ainsi, que le demande le liquidateur judiciaire, il y a lieu de renvoyer les parties devant le juge-commissaire, lequel sera le cas échéant saisi d'une nouvelle requête proposant de nouvelles modalités de cession.
Les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective. L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
Infirme l'ordonnance du juge-commissaire,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute la société Adam de sa demande tendant à voir juger que la vente se fera au prix de 68.000 euros par appartement avec une place de parking, et au prix de 30.000 euros le lot n°101 et ses parkings,
Renvoie les parties devant le juge-commissaire, lequel sera le cas échéant saisi d'une nouvelle requête par le liquidateur judiciaire pour fixer de nouvelles modalités de cession,
Ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective,
Déboute M.[T] de sa demande en paiement d'une indemnité procédurale.
Liselotte FENOUIL
Greffière
Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT
Présidente
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 14 OCTOBRE 2025
(n° / 2025, 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/03596 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CK36A
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 29 janvier 2025 -Juge commissaire du Tribunal des activités économiques de PARIS - RG n° P201100921
APPELANTE
S.A.S. ADAM, société par actions simplifiée, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
Immatriculée au registre du commerce et dessociétés de GUERET sous le numéro 322 344 649
Dont le siège social est situé [Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477,
INTIMÉS
Monsieur [G] [T]
Demeurant [Adresse 12]
[Localité 6]
Représenté par Me Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L34,
S.E.L.A.R.L. [O] [A]-[V], prise en la personne de Maître [C] [O], en qualité de mandataire judiciaire liquidateur de La S.A.R.L LES JARDINS D'OSIRIS, nommée à cette fonction par jugement rendu par le Tribunal de commerce de PARIS en date du 24 mars 2011,
Immatriculée au registre du commerce et dessociétés de PARIS sous le numéro 530 194 968,
Dont le siège social est situé [Adresse 15]
[Localité 14]
Représentée par Me Edouard TRICAUD de l'AARPI SAINT-LOUIS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque K0079,
S.A.R.L. LE JARDIN D'OSIRIS, prise en la personne de Maître [H] [B], en qualité de mandataire ad'hoc de la société LE JARDIN D'OSIRIS, demeurant [Adresse 9],
Immatriculée au registre du commerce et dessociétés de PARIS sous le numéro 479 125 676,
Dont le siège social est situé [Adresse 1]
[Localité 13]
LE TRÉSOR PUBLIC
Situé [Adresse 24]
[Adresse 23]
[Adresse 16]
[Localité 4]
La société [Adresse 20], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
Immatriculée au registre du commerce et dessociétés d'EVREUX sous le numéro 803 574 383,
Dont le siège social est situé [Adresse 8]
[Localité 5]
Monsieur [D] [W]
Demeurant [Adresse 7]
[Localité 11]
Non constitués
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 906 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 septembre 2025, en audience publique, devant la cour, composée de :
Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre, chargée du rapport,
Monsieur François VARICHON, conseiller,
Madame Isabelle ROHART, conseillère,
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
ARRÊT :
- rendu par défaut
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
FAITS ET PROCÉDURE:
Par jugement du 24 mars 2011, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Le Jardin d'Osiris, et a désigné la SELARL [O] [A] [V], prise en la personne de Me [O], en qualité de liquidateur judiciaire.
La société Le Jardin d'Osiris est propriétaire de biens et droits immobiliers composant une résidence de tourisme à [Localité 19], qui était gérée par la société [Adresse 20]. La société gestionnaire a été placée en liquidation judiciaire le 21 novembre 2024. A ce jour la résidence n'est plus exploitée et la totalité du mobilier a été vendue aux enchères publiques.
La dirigeante de la société Le Jardin d'Osiris, Mme [Z], est décédée le [Date décès 10] 2022 et Maître [B] a été désigné en qualité de mandataire ad hoc de cette société.
Par ordonnance du 21 novembre 2023, le juge-commissaire à la liquidation judiciaire de la société Le Jardin d'Osiris a désigné la société Adam comme contrôleur de la procédure collective de la société Le Jardin d'Osiris.
La SELARL [O] [A] [V], ès qualités, a recherché un acquéreur pour les lots détenus par la société Le Jardin d'Osiris dans la résidence de tourisme de [Localité 17].
Sur requête du 15 octobre 2024 de la SELARL [O] [A] [V], ès qualités, et par ordonnance du 29 janvier 2025, le juge-commissaire a autorisé la cession amiable des biens et droits immobiliers de la société Le Jardin d'Osiris, à savoir les lots 7, 23,28,33,82,207,223, 232,281,101,201,202 et 203 de la résidence de tourisme sise à [Adresse 18] au profit de M.[G] [T] avec faculté pour ce dernier de se substituer toute entité civile ou commerciale au sein de laquelle il sera associé, moyennant la somme de 83.533,34 euros, soit 53.533,24 euros pour les appartements et parkings qui représentent 542 tantièmes et une somme forfaitaire de 30.000 euros pour le lot 101, hors droit et frais en sus à la charge de l'acquéreur, payable au comptant le jour de la signature de l'acte de vente, autorisé la SELARL [O] [A] [V], ès qualités, à passer tous actes nécessaires à la réalisation de la vente, à encaisser le prix, en donner quittance, avec ou sans subrogation et dit que l'acquéreur devra faire son affaire personnelle de :
l'ensemble de tous les problèmes ou difficultés d'ordre divers, liés aux biens acquis ou à leur occupation dont il estime avoir eu connaissance suffisante et ce sans aucun recours à l'encontre du mandataire judiciaire,
l'état dans lequel se trouvent les biens dont s'agit,
des dispositions d'urbanisme applicables aux biens vendus,
des constructions, modifications ou changement d'affectation apportés à ces biens, n'ayant pas l'objet d'une autorisation administrative, de l'absence éventuelle de justificatifs de toute sorte (permis de construire, certificat de conformité, assurance dommages ' ouvrage ou décennales) de l'obtention de documents d'urbanisme et autorisations administratives nécessaires pour leur projet de construction, le tout sans recours contre le vendeur,
les frais et honoraires de rédaction d'acte, d'enregistrement, de purge et de formalités légales seront à la charge exclusive de l'acquéreur,
le transfert de propriétaire interviendra au jour de la signature de l'acte,
jusqu'à cette date et à compter du prononcé de l'ordonnance, l'acquéreur devra assurer à ses frais la surveillance et le bon entretien de la parcelle, objet de la présente cession.
Le 17 février 2025, la société Adam, d'une part et M. [T], d'autre part, ont relevé appel de cette ordonnance. Les deux appels ont été joints le 25 mars 2025.
Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 2 juillet 2025, la société Adam demande à la cour de déclarer recevable et bien fondé son appel, y faisant droit, infirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions, et, statuant à nouveau, juger que la vente sera au prix de 68.000 euros par appartement plus une place de parking, sauf le lot n°101 et ses parkings qui seront vendus à la somme de 30.000 euros, à titre subsidiaire, rejeter purement et simplement l'offre de M.[T] comme étant insuffisante, et statuer ce que de droit sur les dépens qui seront employés en frais de la procédure collective.
Par conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 2 mai 2025, M.[T] demande à la cour d'infirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau, rejeter la requête présentée par Me [O], l'autoriser à inscrire une créance de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au passif de la société Les Jardins d'Oasis.
Par conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 4 septembre 2025, la SELARL [O] [A] [V], ès qualités, demande à la cour de déclarer recevables et bien fondés les appels formés par M.[T] et la société Adam, y faisant droit, infirmer l'ordonnance rendue le « 5 janvier 2025 (R.G 2 : 01100921 », renvoyer les parties devant le juge commissaire de la procédure collective près le tribunal des activités économiques de Paris, lequel sera saisi par voie de requête afin qu'il puisse statuer sur une nouvelle fixation des modalités, après avoir entendu les parties en leurs observations, et dire que les dépens engagés dans le cadre de cette instance par chacune des parties resteront à leur charge.
La déclaration d'appel a été signifiée le 12 mars 2025, au Trésor Public (à personne morale), à la société [Adresse 22] selon les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, à la société Le Jardin d'Osiris ( à personne morale) et à M. [W], selon procès-verbal remis à étude. Ces parties n'ont pas constitué avocat.
SUR CE,
La société Adam soutient, en sa qualité de contrôleur, qu'elle aurait dû être pleinement informée des conditions de la vente, et ce préalablement à la requête soumise par le mandataire au juge-commissaire, qu'elle avait manifesté son opposition à la vente envisagée, sans que sa position soit prise en compte, que cette carence contrevient aux dispositions du code de commerce, qui imposent la transparence et la communication des actes de la procédure à l'égard du contrôleur.
Elle fait valoir que la vente a été ordonnée sans appel d'offres ni publicité, au profit d'un acquéreur unique, en violation manifeste des articles L.642-1 et suivants du code de commerce, et que le prix de cession est manifestement insuffisant, dès lors que chacun des appartements pourrait valoir 68.000 euros alors que l'offre prévoyait la vente de cinq appartements pour un prix total de 53.000 euros, soit environ 10.600 euros par lot, soit un écart considérable qui préjudicie à l'ensemble des créanciers. Elle souligne également que le défaut de répartition du prix par lot est particulièrement préjudiciable aux créanciers hypothécaires, dont elle- même titulaire d'une hypothèque sur les lots n°23 et n°82, et que ce défaut empêche toute identification des sommes susceptibles de revenir aux créanciers en fonction de leur rang, contrevenant ainsi aux principes d'égalité et de transparence de la procédure.
M.[T] expose quant à lui que:
- la cession a été autorisée à son profit alors qu'il n'est pas l'auteur de l'offre, qu'en effet, il n'a pas présenté l'offre en son nom propre mais seulement en tant que porte-parole d'un groupe d'investisseurs,
- l'offre présentée portait sur des biens immobiliers donnés à bail commercial, pour lesquels un loyer était réglé, or depuis la liquidation judiciaire du gestionnaire de la résidence, le liquidateur a mis fin au bail commercial et la totalité du mobilier a été vendue aux enchères publiques au début de l'année 2025, qu'ainsi les biens, et les droits qui lui étaient attachés au titre desquels l'offre a été présentée n'existaient plus au jour où l'ordonnance, que dès lors le juge commissaire ne pouvait pas autoriser cette cession,
- en outre, les modalités de cession présentées par Me [O] dans sa requête ne correspondent pas à l'offre des investisseurs qu'il était chargé de relayer, car celle-ci était subordonnée à l'obtention d'un concours bancaire nécessaire à l'acquisition et à la remise en état de l'ensemble immobilier, de sorte qu'aucune vente de gré à gré ne saurait intervenir alors que les parties ne se sont pas accordées sur les conditions de la vente.
Le liquidateur judiciaire convient de ce qu'il y a lieu d'infirmer l'ordonnance et de renvoyer les parties devant le juge-commissaire afin qu'il soit saisi par voie de requête sur la nouvelle fixation des modalités de la vente.
Sur ce la cour,
Les lots visés dans l'ordonnance dont appel correspondent à 5 studios d'une surface de 28,17 m² (lots 7, 23,28,33 et 82), à 8 parkings ( lots 201, 202, 203, 207, 223, 227, 232 et 281) et à des locaux divers situés au rez-de-chaussée du bâtiment A ( lot 101).
L'ordonnance a autorisé la cession au profit de M.[T] avec faculté de substitution au profit de toute entité civile ou commerciale au sein de laquelle il sera associé, alors que celui-ci n'était que le porte-parole d'un groupe de copropriétaires investisseurs au nom desquels il a proposé un prix d'achat de 850.000 euros pour l'ensemble des 83 appartements et parkings de la résidence représentant 8602 tantièmes outre un forfait de 30.000 euros pour le lot 101. Il ressort en effet de l'attestation des membres du conseil syndical représentant les copropriétaires de la résidence [Adresse 20], que M.[T] a toujours été l'intermédiaire des investisseurs potentiels, mais en aucun cas lui-même un investisseur ou un propriétaire de sorte qu'il n'est pas compréhensible qu'il ait désigné attributaire des lots appartenant à la société Jardins d'Osiris.
Par ailleurs, la société Adam, contrôleur, met en cause l'insuffisance du prix de cession en se référant à l'évaluation qui avait été faite des lots.
M.[I] a été désigné par le juge-commissaire en qualité d'expert à l'effet de procéder à la description et à l'estimation des biens et droits immobiliers de la résidence [Adresse 21] [Localité 17]. Aux termes de son rapport en date du 2 octobre 2019, l'expert a estimé les lots d'habitation associés à un parking entre 64.000 et 68.000 euros par lot et les lots 'de services' entre 400.000 et 420.000 euros, en précisant que n'ayant pu pénétrer dans les lots de copropriété, son expertise était le résultat de la visite effectuée à l'extérieur et de ses investigations administratives et juridiques.
S'il ressort des explications des parties que la résidence s'est dégradée depuis le rapport d'expertise, la résidence n'étant plus gérée, et que la totalité du mobilier a été vendu, il n'en reste pas moins que le prix de cession de 83.533,34 euros fixé par l'ordonnance du juge-commissaire, qui est un prix global puisque l'ordonnance précise qu'il se décompose en 53.533,24 euros pour les appartements et parkings, et 30.000 euros forfaitaire pour le lot 101, est extrêmement éloigné des estimations de l'expert et ce, sans qu'il soit, en l'état, versé aux débats d'éléments suffisants permettant d'entériner un prix de cession aussi bas.
Ces deux motifs justifient à eux seuls l'infirmation de l'ordonnance.
Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la société Adam tendant à voir fixer le prix de cession à 68.000 euros par appartement + sa place de parking et à 30.000 euros pour le lot 101 et ses parkings, aucune offre n'ayant été faite en ce sens. Ainsi, que le demande le liquidateur judiciaire, il y a lieu de renvoyer les parties devant le juge-commissaire, lequel sera le cas échéant saisi d'une nouvelle requête proposant de nouvelles modalités de cession.
Les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective. L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
Infirme l'ordonnance du juge-commissaire,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute la société Adam de sa demande tendant à voir juger que la vente se fera au prix de 68.000 euros par appartement avec une place de parking, et au prix de 30.000 euros le lot n°101 et ses parkings,
Renvoie les parties devant le juge-commissaire, lequel sera le cas échéant saisi d'une nouvelle requête par le liquidateur judiciaire pour fixer de nouvelles modalités de cession,
Ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective,
Déboute M.[T] de sa demande en paiement d'une indemnité procédurale.
Liselotte FENOUIL
Greffière
Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT
Présidente