CA Paris, Pôle 5 - ch. 8, 14 octobre 2025, n° 24/20712
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRET DU 14 OCTOBRE 2025
(n° / 2025 , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/20712 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CKQQ4
Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 décembre 2024 -Tribunal de commerce de Bobigny - RG n° 2024L04128
APPELANTE
LA SOCIÉTÉ HANAA GROUPE, société à responsabilité limitée, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de BOBIGNY sous le numéro 812 290 633,
Dont le siège social est situé [Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée et assistée de Me Imed KESSENTINI, avocat au barreau de PARIS, toque C 714,
INTIMÉE
S.E.L.A.R.L. BALLY MJ, ès qualités,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de BOBIGNY sous le numéro 821 325 941,
Dont le siège social est situé [Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Jean-Marie HYEST de la SCP HYEST et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0311,
Assistée de Me Frédéric DUBERNET, avocat au barreau de PARIS, toque : P311,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 906 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 9 septembre 2025, en audience publique, devant la cour, composée de :
Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,Madame Constance LACHEZE, conseillère,
Madame Isabelle ROHART, conseillère,
Qui en ont délibéré.
Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Constance LACHEZE dans le respect des conditions prévues à l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
ARRÊT :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
La société à responsabilité limitée Hanaa Groupe, fondée le 1er juin 2015, exploite un fonds de commerce d'épicerie situé [Adresse 1] à [Localité 5].
Sur assignation de l'URSSAF et par jugement du 10 octobre 2024, le tribunal de commerce de Bobigny a ouvert à son égard une procédure de redressement judiciaire, avec une période d'observation de six mois et nommé la SELARL Bally MJ en qualité de mandataire judiciaire.
Par requête du 12 novembre 2024, la SELARL Bally MJ ès qualités a sollicité la conversion des opérations de redressement judiciaire en liquidation judiciaire, faisant état du caractère manifestement impossible du redressement. Le 26 novembre 2024, le mandataire judiciaire a transmis une note complémentaire dans laquelle il maintenait sa demande de conversion des opérations de redressement judiciaire en liquidation judiciaire.
Par jugement du 12 décembre 2024, le tribunal de commerce de Bobigny a :
- prononcé la conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire, sans maintien de l'activité ;
- nommé la SELARL Bally MJ en qualité de liquidateur ;
- employé les dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Par déclaration du 22 décembre 2024, la société Hanaa Groupe a relevé appel de ce jugement.
La demande de suspension de l'exécution provisoire attachée à la décision déférée a été rejetée par ordonnance du 15 mai 2025.
Par dernières conclusions (n°3) remises au greffe et notifiées par RPVA le 27 août 2025, la société Hanaa Groupe demande à la cour :
- de la recevoir en ses demandes et conclusions et l'en dire bien fondée ;
- à titre principal, de constater qu'elle n'est pas en état de cessation des paiements ;
- de prononcer la nullité du jugement du 12 décembre 2024 en ce qu'il est intervenu en méconnaissance des éléments factuels et juridiques ;
- d'infirmer ledit jugement en ce qu'il a prononcé l'ouverture d'une liquidation judiciaire systématique et abusive ;
- d'annuler le jugement déféré ;
- à titre subsidiaire, d'infirmer le jugement et d'ouvrir une procédure de redressement judiciaire.
Elle expose :
- que son dirigeant est profane et n'a pas compris l'ampleur de ses engagements ;
- qu'elle n'est pas en état de cessation des paiements, que les créances déclarées au liquidateur sont très discutées et le montant du passif (87 648,99 euros) contestable, que le prêt garanti par l'Etat consenti par la banque LCL pour un montant à échoir de 25 927,82 euros n'est pas exigible en l'absence de déchéance du terme, que la créance de l'URSSAF n'est que de 12 168 euros, que la créance de [Y] [S] de [Adresse 4] déclarée pour 9 415 euros a été intégralement payée, que la créance de la société Orienco déclarée pour 3 000 euros a été intégralement payée, que la créance d'EDF de 8 467 euros ne concerne pas les locaux de la société, que la créance de LCL de 5 179,08 euros a été régularisée, portant le solde de son compte bancaire à la somme de 6 200 euros, montant de sa trésorerie, qu'après avoir retranché l'ensemble de ces sommes, elle chiffre le montant de son passif exigible à la somme de 25 659,92 euros, qu'un montant de 4 500 euros a été viré sur son compte bancaire ce qui porte le passif exigible à 20 599 euros, que ses associés ont consigné sur le compte CARPA de son conseil la somme de 22 520 euros,
- que le bilan prévisionnel qu'elle produit justifie du caractère sérieux et pérenne de son activité, en hausse de 15% chaque année, que le redressement n'est pas manifestement impossible, que le jugement est disproportionné et met en péril son activité, qu'il entraine la perte de sa clientèle et le licenciement de ses deux salariés.
Par dernières conclusions (n°1) remises au greffe et notifiées par RPVA le 18 avril 2025, la SELARL Bally MJ agissant en sa qualité de mandataire liquidateur demande à la cour de confirmer le jugement et d'ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective.
Le liquidateur judiciaire fait valoir :
- que de nouvelles dettes ont été créées au cours de la période d'observation (salaires des mois d'octobre et novembre 2024, cotisations URSSAF de septembre et octobre 2024, loyers postérieurs à l'ouverture de la procédure collective) ;
- que les prévisions d'exploitation sont dénuées de toute force probante, que la société Hanaa Groupe aurait mieux fait de produire ses résultats des mois de janvier à avril 2025 afin de permettre de comparer les prévisions au chiffre d'affaires réalisé, qu'elle ne dispose d'aucune comptabilité au titre des exercices 2019 à 2024, qu'il n'est pas justifié que le redressement soit possible, qu'au cours de la période d'observation, les documents demandés ne lui ont pas été remis par le dirigeant (bilans des exercices 2021, 2022 et 2023, grand livre 2024, relevés bancaires des 12 derniers mois, une attestation d'assurance du local commercial, une attestation d'assurance professionnelle, le dépôt de plainte pour vol d'un véhicule) et que la société n'a pas justifié de l'ouverture d'un compte bancaire auprès d'une banque judiciaire pour les besoins du redressement.
Dans son avis communiqué le 21 mai 2025, le ministère public s'est dit favorable à la confirmation du jugement pour les raisons suivantes :
- défaut de paiement des cotisations URSSAF pour les mois de septembre et octobre 2024,
- absence de justificatif de paiement des salaires et des loyers postérieurs au jugement d'ouverture,
- prévisionnel non probant, faute de tenue de comptabilité permettant la comparaison.
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 27 mai 2025, révoquée à l'audience du 17 juin 2025 afin d'admettre les dernières écritures de la société Hanaa Groupe puis à nouveau prononcée à l'audience du 9 septembre 2025.
Les parties autorisées par la cour en ce sens ont communiqué chacune une note en délibéré les 24 et 29 septembre 2025 dont il ressort en substance qu'à cette dernière date, la situation de la société Hanaa Groupe s'établissait comme suit :
- montant du passif déclaré : 83 897,29 euros, dont 57 969,47 euros à titre échu et 25 927,82 euros à échoir (PGE),
- montant de l'actif : 68 605 euros, dont 24 297 euros détenus entre les mains de la SELARL Bailly MJ ès qualités et 44 308 euros consignés en compte CARPA.
La société Hanaa Groupe en déduit qu'elle n'est pas en état de cessation des paiements et soutient un appel-nullité.
La SELARL Bally MJ conclut à l'infirmation du jugement de conversion.
SUR CE,
A titre liminaire, la cour est saisie, à la suite du tribunal, d'une demande de conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire et non d'un appel du jugement d'ouverture de la procédure collective. Il en résulte que l'ensemble des moyens tiré de l'absence d'état de cessation des paiements et des conséquences qu'en tire l'appelante dans ses écritures quant à l'infirmation ou l'annulation du jugement, ou dans sa note en délibéré quant à l'appel-nullité sont inopérants. Dès lors, il n'y a pas lieu d'annuler le jugement dont appel.
L'article L. 631-15, dans le premier alinéa du II., du code de commerce dispose : « II.-A tout moment de la période d'observation, le tribunal, à la demande du débiteur, de l'administrateur, du mandataire judiciaire, d'un contrôleur, du ministère public ou d'office, peut ordonner la cessation partielle de l'activité ou prononce la liquidation judiciaire si le redressement est manifestement impossible. »
En l'espèce, il ressort qu'en l'état des versements réalisés sur le compte CARPA du conseil de la société Hanaa Groupe, le montant de l'actif de 68 605 euros permet de faire face au passif échu de 57 969,47 euros comme l'indique le liquidateur judiciaire. Il convient d'en déduire qu'à tout le moins ces sommes permettront d'apurer les dettes créées au cours de la période d'observation. En outre, l'important investissement des associés ou du dirigeant (44 308 euros) démontre, en dépit de la capacité perfectible de ce dernier à gérer l'entreprise, que son redressement n'est pas manifestement impossible.
En conséquence, il convient d'infirmer le jugement ayant prononcé la conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire et, afin de permettre l'élaboration d'un plan de redressement, d'ouvrir une nouvelle période d'observation de trois mois.
Les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.
L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant publiquement et contradictoirement,
Rejette la demande d'annulation du jugement ;
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu de convertir le redressement judiciaire de la société Hanaa Groupe en liquidation judiciaire ;
Ouvre une nouvelle période d'observation de trois mois à compter du présent arrêt ;
Renvoie l'affaire et les parties devant le tribunal de commerce de Bobigny pour la poursuite de la procédure de redressement judiciaire conduite par les organes désignés par jugement du 10 octobre 2024 ;
Rappelle que le greffe du tribunal de commerce de Bobigny devra procéder aux mentions et publicités prévues par la loi ;
Ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.
Liselotte FENOUIL
Greffière
Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT
Présidente
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRET DU 14 OCTOBRE 2025
(n° / 2025 , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/20712 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CKQQ4
Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 décembre 2024 -Tribunal de commerce de Bobigny - RG n° 2024L04128
APPELANTE
LA SOCIÉTÉ HANAA GROUPE, société à responsabilité limitée, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de BOBIGNY sous le numéro 812 290 633,
Dont le siège social est situé [Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée et assistée de Me Imed KESSENTINI, avocat au barreau de PARIS, toque C 714,
INTIMÉE
S.E.L.A.R.L. BALLY MJ, ès qualités,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de BOBIGNY sous le numéro 821 325 941,
Dont le siège social est situé [Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Jean-Marie HYEST de la SCP HYEST et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0311,
Assistée de Me Frédéric DUBERNET, avocat au barreau de PARIS, toque : P311,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 906 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 9 septembre 2025, en audience publique, devant la cour, composée de :
Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,Madame Constance LACHEZE, conseillère,
Madame Isabelle ROHART, conseillère,
Qui en ont délibéré.
Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Constance LACHEZE dans le respect des conditions prévues à l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
ARRÊT :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
La société à responsabilité limitée Hanaa Groupe, fondée le 1er juin 2015, exploite un fonds de commerce d'épicerie situé [Adresse 1] à [Localité 5].
Sur assignation de l'URSSAF et par jugement du 10 octobre 2024, le tribunal de commerce de Bobigny a ouvert à son égard une procédure de redressement judiciaire, avec une période d'observation de six mois et nommé la SELARL Bally MJ en qualité de mandataire judiciaire.
Par requête du 12 novembre 2024, la SELARL Bally MJ ès qualités a sollicité la conversion des opérations de redressement judiciaire en liquidation judiciaire, faisant état du caractère manifestement impossible du redressement. Le 26 novembre 2024, le mandataire judiciaire a transmis une note complémentaire dans laquelle il maintenait sa demande de conversion des opérations de redressement judiciaire en liquidation judiciaire.
Par jugement du 12 décembre 2024, le tribunal de commerce de Bobigny a :
- prononcé la conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire, sans maintien de l'activité ;
- nommé la SELARL Bally MJ en qualité de liquidateur ;
- employé les dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Par déclaration du 22 décembre 2024, la société Hanaa Groupe a relevé appel de ce jugement.
La demande de suspension de l'exécution provisoire attachée à la décision déférée a été rejetée par ordonnance du 15 mai 2025.
Par dernières conclusions (n°3) remises au greffe et notifiées par RPVA le 27 août 2025, la société Hanaa Groupe demande à la cour :
- de la recevoir en ses demandes et conclusions et l'en dire bien fondée ;
- à titre principal, de constater qu'elle n'est pas en état de cessation des paiements ;
- de prononcer la nullité du jugement du 12 décembre 2024 en ce qu'il est intervenu en méconnaissance des éléments factuels et juridiques ;
- d'infirmer ledit jugement en ce qu'il a prononcé l'ouverture d'une liquidation judiciaire systématique et abusive ;
- d'annuler le jugement déféré ;
- à titre subsidiaire, d'infirmer le jugement et d'ouvrir une procédure de redressement judiciaire.
Elle expose :
- que son dirigeant est profane et n'a pas compris l'ampleur de ses engagements ;
- qu'elle n'est pas en état de cessation des paiements, que les créances déclarées au liquidateur sont très discutées et le montant du passif (87 648,99 euros) contestable, que le prêt garanti par l'Etat consenti par la banque LCL pour un montant à échoir de 25 927,82 euros n'est pas exigible en l'absence de déchéance du terme, que la créance de l'URSSAF n'est que de 12 168 euros, que la créance de [Y] [S] de [Adresse 4] déclarée pour 9 415 euros a été intégralement payée, que la créance de la société Orienco déclarée pour 3 000 euros a été intégralement payée, que la créance d'EDF de 8 467 euros ne concerne pas les locaux de la société, que la créance de LCL de 5 179,08 euros a été régularisée, portant le solde de son compte bancaire à la somme de 6 200 euros, montant de sa trésorerie, qu'après avoir retranché l'ensemble de ces sommes, elle chiffre le montant de son passif exigible à la somme de 25 659,92 euros, qu'un montant de 4 500 euros a été viré sur son compte bancaire ce qui porte le passif exigible à 20 599 euros, que ses associés ont consigné sur le compte CARPA de son conseil la somme de 22 520 euros,
- que le bilan prévisionnel qu'elle produit justifie du caractère sérieux et pérenne de son activité, en hausse de 15% chaque année, que le redressement n'est pas manifestement impossible, que le jugement est disproportionné et met en péril son activité, qu'il entraine la perte de sa clientèle et le licenciement de ses deux salariés.
Par dernières conclusions (n°1) remises au greffe et notifiées par RPVA le 18 avril 2025, la SELARL Bally MJ agissant en sa qualité de mandataire liquidateur demande à la cour de confirmer le jugement et d'ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective.
Le liquidateur judiciaire fait valoir :
- que de nouvelles dettes ont été créées au cours de la période d'observation (salaires des mois d'octobre et novembre 2024, cotisations URSSAF de septembre et octobre 2024, loyers postérieurs à l'ouverture de la procédure collective) ;
- que les prévisions d'exploitation sont dénuées de toute force probante, que la société Hanaa Groupe aurait mieux fait de produire ses résultats des mois de janvier à avril 2025 afin de permettre de comparer les prévisions au chiffre d'affaires réalisé, qu'elle ne dispose d'aucune comptabilité au titre des exercices 2019 à 2024, qu'il n'est pas justifié que le redressement soit possible, qu'au cours de la période d'observation, les documents demandés ne lui ont pas été remis par le dirigeant (bilans des exercices 2021, 2022 et 2023, grand livre 2024, relevés bancaires des 12 derniers mois, une attestation d'assurance du local commercial, une attestation d'assurance professionnelle, le dépôt de plainte pour vol d'un véhicule) et que la société n'a pas justifié de l'ouverture d'un compte bancaire auprès d'une banque judiciaire pour les besoins du redressement.
Dans son avis communiqué le 21 mai 2025, le ministère public s'est dit favorable à la confirmation du jugement pour les raisons suivantes :
- défaut de paiement des cotisations URSSAF pour les mois de septembre et octobre 2024,
- absence de justificatif de paiement des salaires et des loyers postérieurs au jugement d'ouverture,
- prévisionnel non probant, faute de tenue de comptabilité permettant la comparaison.
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 27 mai 2025, révoquée à l'audience du 17 juin 2025 afin d'admettre les dernières écritures de la société Hanaa Groupe puis à nouveau prononcée à l'audience du 9 septembre 2025.
Les parties autorisées par la cour en ce sens ont communiqué chacune une note en délibéré les 24 et 29 septembre 2025 dont il ressort en substance qu'à cette dernière date, la situation de la société Hanaa Groupe s'établissait comme suit :
- montant du passif déclaré : 83 897,29 euros, dont 57 969,47 euros à titre échu et 25 927,82 euros à échoir (PGE),
- montant de l'actif : 68 605 euros, dont 24 297 euros détenus entre les mains de la SELARL Bailly MJ ès qualités et 44 308 euros consignés en compte CARPA.
La société Hanaa Groupe en déduit qu'elle n'est pas en état de cessation des paiements et soutient un appel-nullité.
La SELARL Bally MJ conclut à l'infirmation du jugement de conversion.
SUR CE,
A titre liminaire, la cour est saisie, à la suite du tribunal, d'une demande de conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire et non d'un appel du jugement d'ouverture de la procédure collective. Il en résulte que l'ensemble des moyens tiré de l'absence d'état de cessation des paiements et des conséquences qu'en tire l'appelante dans ses écritures quant à l'infirmation ou l'annulation du jugement, ou dans sa note en délibéré quant à l'appel-nullité sont inopérants. Dès lors, il n'y a pas lieu d'annuler le jugement dont appel.
L'article L. 631-15, dans le premier alinéa du II., du code de commerce dispose : « II.-A tout moment de la période d'observation, le tribunal, à la demande du débiteur, de l'administrateur, du mandataire judiciaire, d'un contrôleur, du ministère public ou d'office, peut ordonner la cessation partielle de l'activité ou prononce la liquidation judiciaire si le redressement est manifestement impossible. »
En l'espèce, il ressort qu'en l'état des versements réalisés sur le compte CARPA du conseil de la société Hanaa Groupe, le montant de l'actif de 68 605 euros permet de faire face au passif échu de 57 969,47 euros comme l'indique le liquidateur judiciaire. Il convient d'en déduire qu'à tout le moins ces sommes permettront d'apurer les dettes créées au cours de la période d'observation. En outre, l'important investissement des associés ou du dirigeant (44 308 euros) démontre, en dépit de la capacité perfectible de ce dernier à gérer l'entreprise, que son redressement n'est pas manifestement impossible.
En conséquence, il convient d'infirmer le jugement ayant prononcé la conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire et, afin de permettre l'élaboration d'un plan de redressement, d'ouvrir une nouvelle période d'observation de trois mois.
Les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.
L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant publiquement et contradictoirement,
Rejette la demande d'annulation du jugement ;
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu de convertir le redressement judiciaire de la société Hanaa Groupe en liquidation judiciaire ;
Ouvre une nouvelle période d'observation de trois mois à compter du présent arrêt ;
Renvoie l'affaire et les parties devant le tribunal de commerce de Bobigny pour la poursuite de la procédure de redressement judiciaire conduite par les organes désignés par jugement du 10 octobre 2024 ;
Rappelle que le greffe du tribunal de commerce de Bobigny devra procéder aux mentions et publicités prévues par la loi ;
Ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.
Liselotte FENOUIL
Greffière
Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT
Présidente