CA Caen, 1re ch. civ., 14 octobre 2025, n° 21/03434
CAEN
Arrêt
Autre
AFFAIRE : N° RG 21/03434 -
N° Portalis DBVC-V-B7F-G4RP
ARRÊT N°
JB.
ORIGINE : Décision du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 10] du 18 Novembre 2021
RG n° 16/00186
COUR D'APPEL DE CAEN
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 14 OCTOBRE 2025
APPELANT :
Monsieur [Y] [T]
né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 21]
[Adresse 3]
[Localité 7]
représenté et assisté de Me Laurent MARIN, avocat au barreau de COUTANCES
INTIMÉES :
Le GAEC DE [Localité 17] [Adresse 14]
[Adresse 18]
[Localité 6]
pris en la personne de son représentant légal
représentée et assistée de Me Estelle DARDANNE, avocat au barreau de COUTANCES
La S.A.S. ETABLISSEMENTS MAILLARD exerçant sous l'enseigne commerciale [Adresse 11], venant aux droits de la Société DECELLE FEUILLY
N° SIRET : 096 820 097
[Adresse 20]
[Localité 8]
prise en la personne de son représentant légal
représentée et assistée de Me Bernard HOYE, avocat au barreau de LISIEUX
La S.A.S. SOCIETE THERMOR PACIFIC
N° SIRET : B 329 545 008
[Adresse 4]
[Localité 5]
pris en la personne de son représentant légal
représentée et assistée de Me Muriel LETAROUILLY-DOUCIN, avocat au barreau de COUTANCES
La S.A. MMA IARD
N° SIRET : 440 048 882
[Adresse 2]
[Localité 9]
pris en la personne de son représentant légal
La Compagnie d'assurance MMA ASSURANCES MUTUELLES
N° SIRET : 775 652 126
[Adresse 2]
[Localité 9]
pris en la personne de son représentant légal
représentées et assistées de Me Amélie MARCHAND-MILLIER, avocat au barreau de COUTANCES
DÉBATS : A l'audience publique du 24 avril 2025, sans opposition du ou des avocats, Mme GAUCI SCOTTE, Conseillère, a entendu seule les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré
GREFFIER : Mme COLLET
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme BARTHE-NARI, Président de chambre,
Mme DELAUBIER, Conseillère,
Mme GAUCI SCOTTE, Conseillère,
ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 14 Octobre 2025 par prorogations du délibéré initialement fixé au 8 Juillet 2025, 16 Septembre 2025 puis 30 Septembre 2025 et signé par Mme BARTHE-NARI, président, et Mme LE GALL, greffier
* * *
FAITS ET PROCEDURE
Le GAEC de [Localité 19] exerce une activité de production de veaux de boucherie sur deux bâtiments, et s'est rapproché de la SARL [Adresse 13] aux fins de vente et d'installation d'un équipement de production d'eau chaude comprenant notamment un ballon Thermor Pacific de 3 000 litres. L'eau chauffée était destinée à être mélangée à la poudre de lait constituant l'alimentation principale des veaux pendant les premiers mois.
La facture du 31 mars 2008 de 26 934,52 euros a été réglée intégralement le 10 avril 2008.
Ayant constaté début 2011 une dégradation de la couleur de la viande des veaux entraînant une reclassification dans une catégorie inférieure, des tests ont été menés pour évaluer la présence de fer dans les aliments.
La SARL [T] a pu constater que l'isolant habillant l'intérieur du chauffe-eau s'était décollé, entraînant une oxydation et ainsi la présence de fer dans l'eau.
Sur ce constat, une expertise amiable a été diligentée, concluant à la présence de fer du fait de l'oxydation du revêtement SECUREX recouvrant la cuve acier du chauffe-eau.
Suivant facture du 14 juin 2012, le GAEC de [Localité 19] a commandé et fait poser un nouveau ballon par la SARL [T].
Le GAEC de La Hersière a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Coutances qui, par ordonnance du 28 mars 2013, a ordonné une expertise judiciaire, étendue à la société Decelle Feuilly.
L'expert a déposé son rapport le 4 octobre 2015.
Sur la base de ce rapport, par actes des 25 et 26 janvier 2016, le GAEC de La Hersière a fait assigner la SARL [Adresse 13], la société Thermor Pacific et la société Etablissement Maillard devant le tribunal de grande instance de Coutances aux fins, à titre principal, de les voir condamner in solidum, sur le fondement des articles 1100, 1147 et 1382 du Code civil, au paiement de la somme de 333 674 euros au titre de la perte d'exploitation de 2011 à 2013 et de l'allongement du temps de croissance, et la somme de 100 000 euros de perte d'image pour l'éleveur.
Par acte du 30 janvier 2018, la SARL [Adresse 13] a fait assigner la société MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles aux fins de garantie.
Par jugement du 18 novembre 2021 auquel il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le tribunal judiciaire de Coutances a :
constaté que la SARL [Adresse 13] a été placée en liquidation amiable,
débouté le GAEC de [Localité 19] de ses demandes à l'encontre de la SARL [Adresse 13], des MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, de la société Thermor Pacific et de la société Etablissement Maillard,
condamné M. [Y] [T] à indemniser le GAEC de [Localité 19] pour la somme de 334 674 euros au titre de sa perte d'exploitation,
débouté le GAEC de [Localité 19] de ses demandes au titre du préjudice de perte d'image,
condamné M. [T] à payer au GAEC de [Localité 19] la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné le GAEC de [Localité 19] à payer à la société Etablissement Maillard et la société Thermor Pacific chacun la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné M. [T] aux dépens, comprenant les frais d'expertise, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
rejeté toutes autres demandes.
Par déclaration du 21 décembre 2021, M. [Y] [T] a formé appel de ce jugement, en ce qu'il l'a condamné à indemniser le GAEC de [Adresse 18] pour la somme de 334 674 euros au titre de la perte d'exploitation, qu'il a débouté le GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] de se demandes au titre du préjudice de perte d'image, qu'il a condamné M. [T] à payer au GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, a rejeté toutes autre demandes, et l'a condamné aux dépens.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 29 octobre 2024, M. [Y] [T] demande à la cour de :
infirmer la totalité du jugement rendu le 18 novembre 2021 par le tribunal judiciaire de Coutances,
En conséquence,
constater l'absence de faute de M. [T],
dire que le GAEC de [Localité 19] ne démontre pas le lien de causalité entre le préjudice subi et la faute de M. [T],
En conséquence,
débouter le GAEC de ses demandes présentées à son égard,
A titre subsidiaire,
dire que le préjudice subi par le GAEC n'est qu'une perte de chance,
réduire le montant des condamnations prononcées à l'égard de M. [T] à un dixième du préjudice retenu par la juridiction et déduction faite de la garantie des MMA IARD,
condamner le GAEC de [Adresse 18] à lui payer une somme de 4 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Marin.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 28 juillet 2022, la SAS Thermor Pacific demande à la cour de :
confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Coutances du 18 novembre 2021 en toutes ses dispositions,
En conséquence il est demandé à la cour de :
juger qu'elle n'a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité,
débouter le GAEC de [Localité 19] et toute autre partie à l'instance de toutes ses demandes, fins et conclusions dirigées contre elle,
juger que M. [T] a engagé sa responsabilité personnelle à l'égard du GAEC de [Localité 19] en procédant à la clôture des opérations de liquidation aimable de la société Le Terregatte ([Adresse 12] [T]),
débouter M. [T], le GAEC de [Localité 19] ainsi que, les MMA Assurances Mutuelles et la société Etablissement Maillard, venant aux droits de la société Decelle Feuilly de toutes leurs demandes, fins et conclusions dirigées contre elle,
condamner in solidum M. [T], les MMA Assurances Mutuelles et la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD dans les limites et conditions de la garantie souscrite, ainsi que la société Etablissement Maillard, venant aux droits de la société Decelle Feuilly, à la relever indemne et à la garantir de toutes les condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre tant en principal qu'en frais et accessoires,
confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Coutances du 18 novembre 2021 en ce qu'il a condamné le GAEC de [Adresse 16] Hersière à lui payer la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance,
confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Coutances du 18 novembre 2021 en ce qu'il a débouté le GAEC de [Adresse 18] de ses demandes au titre du préjudice de perte d'image,
condamner M. [T] ou toute autre partie succombante à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel,
condamner les mêmes aux entiers dépens, dont distraction au profit de la société Tannier-Letarouilly-Feres, Avocats, par application de l'article 699 du code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 7 novembre 2024, la SAS Etablissement Maillard demande à la cour de :
confirmer le jugement dont appel en ses dispositions en ce qu'il a :
constaté que la société [Adresse 13] a été placée en liquidation amiable,
débouté le GAEC de [Localité 19] de ses demandes à son encontre et à l'encontre de la société [Adresse 13], des MMA IARD et MMA Assurances Mutuelles, de la société Thermor Pacific,
condamné M. [T] à indemniser le GAEC de [Localité 19] pour la somme de 334 674 euros au titre de sa perte d'exploitation,
condamné le GAEC de [Localité 19] à lui payer ainsi qu'à la société Thermor Pacific chacun la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné M. [T] aux dépens, comprenant les frais d'expertise, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
Reconventionnellement,
débouter le GAEC de [Localité 19] et la société Thermor Pacific de leurs demandes,
condamner le GAEC de [Localité 19] solidairement avec la SARL [Adresse 13] et en tout état de cause, toute partie succombante, à lui payer la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner le GAEC de [Localité 19] solidairement avec la SARL [Adresse 13] et en tout état de cause, toute partie succombante, aux entiers dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de Me Hoye, Avocat, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Aux termes de leurs dernières écritures notifiées le 25 octobre 2024, les SA MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles demandent à la cour de :
A titre principal,
confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Coutances le 18 novembre 2021,
A titre subsidiaire,
constater que les 'désordres' ne relèvent pas de la garantie décennale,
dire et juger qu'elles ne doivent pas garantie,
En conséquence,
débouter M. [T], le GAEC de [Localité 19], la société Thermor Pacific et la société Etablissement Maillard de l'ensemble de leurs demandes formulées à leur encontre,
A titre infiniment subsidiaire, pour le cas où sa garantie serait consacrée, dire qu'elles ne seront tenues que dans la limite du plafond de garantie et sous déduction de la franchise, et réduire à de plus justes proportions les indemnités sollicitées par le GAEC de [Localité 19],
En tout état de cause,
condamner M. [T], le GAEC de [Localité 19] ou toute autre partie succombant à leur payer une indemnité de 8 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 29 octobre 2024, le GAEC de [Localité 19] demande à la cour de :
juger M. [T] infondé en son appel principal à l'encontre du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Coutances le 18 novembre 2021,
en conséquence, le débouter de l'ensemble de ses demandes,
débouter les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, la société Thermor Pacific et la société Etablissement Maillard de l'ensemble de leurs demandes,
au contraire, le juger pris en la personne de son représentant légal, recevable et bien fondé en toutes ses demandes et en son appel incident à l'encontre du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Coutances le 18 novembre 2021,
En conséquence et statuant à nouveau :
juger que la société [Adresse 13], la SAS Etablissement Maillard et la SAS Thermor Pacific prises en la personne de leur représentant légal ont engagé leur responsabilité et qu'elles sont responsables du préjudice subi,
juger que M. [T] a engagé sa responsabilité personnelle en sa qualité de liquidateur de la SARL [Adresse 13],
confirmer le jugement rendu en ce qu'il l'a déclaré recevable en ses demandes à l'encontre de M. [T] et a condamné M. [T] à lui payer la somme de 334 674 euros au titre de sa perte d'exploitation,
confirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. [T] aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise,
réformer le jugement dont appel en ce qu'il l'a débouté de ses demandes de condamnation de M. [T] au titre du préjudice de perte d'image à hauteur de 100 000 euros ainsi qu'au paiement de la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts et a condamné M. [T] au paiement de la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
réformer le jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes de condamnation in solidum des sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, de la société Thermor Pacific et de la société Etablissement Maillard au paiement de la somme de 334 674 euros au titre de sa perte d'exploitation, de celle de 100 000 euros au titre du préjudice de perte d'image, outre 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise,
réformer le jugement en ce qu'il l'a condamné à payer à la société Etablissement Maillard et la société Thermor Pacific chacune la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
en conséquence, condamner in solidum la SAS Etablissement Maillard, la SAS Thermor Pacific, M. [T], les sociétés MMA Assurances Mutuelles et MMA IARD à lui payer les sommes suivantes :
perte d'exploitation pour la période 2011 à 2013 : 333 674 euros (Perte de marge : 250 991 euros et allongement du temps de croissance : 77 683 euros),
perte d'image de l'éleveur : 100 000 euros
soit un total de : 433 674 euros
condamner en outre M. [T] au paiement de la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts,
condamner l'ensemble des parties défenderesses in solidum au paiement de la somme de 15 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance,
les condamner également in solidum aux entiers dépens de première instance, comprenant notamment les frais d'expertise judiciaire,
y additant, les condamner in solidum au paiement de la somme de 7 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, au titre de l'instance d'appel.
L'ordonnance de clôture de l'instruction a été prononcée le 6 novembre 2024.
Initialement fixée à l'audience collégiale du 12 novembre 2024 devant la cour autrement composée, l'affaire a été mise en délibéré au 4 février 2025. A cette date, à la suite du départ en retraite du président de la chambre, les débats ont été rouverts par mention au dossier et l'affaire de nouveau fixée à l'audience du 24 avril 2025 tenue par le magistrat rapporteur. A l'issue de cette audience le délibéré a été fixé au 8 juillet 2025 et prorogé au 16 septembre 2025.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la responsabilité de la SARL [Adresse 13] :
M. [Y] [T] forme appel du jugement déféré en ce qu'il a retenu la responsabilité contractuelle de la SARL Espace Motoculture [T] (ci-après dénommée SARL [T]).
Il affirme que le rapport d'expertise ne permet pas de déterminer le lien de causalité entre les travaux réalisés et les désordres constatés, et fait grief aux premiers juges d'avoir retenu la responsabilité de l'installateur au seul motif que celui-ci, lors de l'installation, ne justifiait pas avoir procédé à des tests de pression.
M. [T] fait valoir que l'expert judiciaire a émis trois hypothèses pour expliquer les désordres.
La première était un décollement du revêtement intérieur de la citerne. De ce chef, M. [T] relève que la SAS Thermor Pacific n'a jamais produit la fiche de production de la citerne qui aurait permis de préciser les conditions de fabrication de la cuve.
La deuxième hypothèse émise par l'expert était celle d'un problème de transport de la citerne, de sorte que, selon M. [T], c'est la responsabilité de la SAS Etablissement Maillard qui serait engagée puisque c'est elle qui a assuré la livraison de la cuve.
Enfin, la troisième hypothèse de l'expert était celle d'un problème de surpression. Pourtant, M. [T] soutient que la SARL [Adresse 13] a bien procédé à des tests de pression lors de l'installation de la citerne.
Il souligne également que l'expert n'a jamais indiqué que la pose d'une soupape de dimension différente de celle préconisée aurait eu une incidence dans le phénomène de surpression qu'il envisageait.
M. [T] précise par ailleurs que la SARL Espace Motoculture [T] n'a pas elle-même choisi le modèle de citerne, mais qu'elle a pour cela sollicité la SAS Etablissement Maillard, de sorte que sa responsabilité ne peut être retenue à ce titre.
M. [T] considère donc que la responsabilité de la SARL [Adresse 13] ne pouvait être retenue par les premiers juges, alors que l'expert faisait état de plusieurs causes possibles à l'origine du désordre, sans que ne puisse être établi un lien de causalité direct entre l'intervention du poseur et les dommages.
Il rappelle que le GAEC de [Adresse 18] avait également présenté des demandes de garantie à l'encontre du constructeur et du vendeur de matériel dans le cas où un défaut de fabrication aurait été retenu.
Le GAEC de [Adresse 18] sollicite que soit confirmée la responsabilité de la SARL [Adresse 13].
Il rappelle que l'expertise judiciaire a établi de manière incontestable que la présence de fer dans l'eau au sortir du chauffe-eau s'expliquait par la dégradation du revêtement minéral qui habillait l'intérieur de la cuve.
Le GAEC de [Adresse 18] constate par ailleurs que l'expert conclut en indiquant que l'installation du chauffe-eau réalisée par la SARL [Adresse 13] n'est ni conforme aux recommandations du constructeur, ni aux règles de l'art.
A ce titre, il estime donc que la responsabilité contractuelle de la SARL Espace Motoculture [T] est engagée, sur le fondement de l'article 1147 du Code civil (dans son ancienne rédaction), du fait d'un manquement à son obligation de résultat.
Pour retenir la responsabilité contractuelle de la SARL [Adresse 13], les premiers juges ont estimé que celle-ci engageait sa responsabilité contractuelle dès lors qu'il avait été établi par l'expertise judiciaire que l'installation réalisée par le professionnel n'était ni conforme aux recommandations du constructeur ni aux règles de l'art, et que l'installateur n'avait pas justifié des essais de pression que les normes imposent, ni des vérifications mensuelles des organes de sécurité du chauffe-eau préconisées par le constructeur.
Le tribunal a estimé démontré le lien de causalité entre l'oxydation de l'eau et la coloration de la viande, et ainsi établie la cause du préjudice de perte de marge et d'allongement de la période d'engraissement, et donc de la perte d'exploitation.
Si le GAEC de [Adresse 18] fonde son action en garantie à l'encontre de la SARL [T] sur la responsabilité contractuelle de droit commun, et que les premiers juges n'ont examiné que ce fondement, il apparaît toutefois que le GAEC invoque en parallèle le caractère décennal des désordres pour obtenir la garantie des sociétés MMA IARD, assureurs de responsabilité décennale de la SARL [T].
Il convient de rappeler que, de jurisprudence constante, les dommages qui relèvent d'une garantie légale ne peuvent donner lieu, contre les personnes tenues de cette garantie, à une action en réparation sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun.
A ce titre, les juges doivent rechercher, au besoin d'office, si l'action, exercée postérieurement à la réception de l'ouvrage, en réparation de désordres rendant l'ouvrage impropre à sa destination, n'est pas fondée sur l'article 1792 du Code civil.
La question de la nature décennale des désordres est au cas présent dans les débats, dès lors que le GAEC oppose ce fondement à l'assureur.
Aussi, il appartient à la cour d'examiner en premier lieu la responsabilité de la SARL [T] sous l'angle de la responsabilité décennale, avant d'envisager au besoin si sa responsabilité de droit commun peut être recherchée.
Sur la nature décennale des désordres :
En application de l'article 1792 du Code civil, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
La mise en 'uvre de la garantie légale décennale impose que soit constaté que le désordre affecte un ouvrage ou l'un de ses éléments d'équipement, et que ce désordre rende l'ouvrage impropre à sa destination.
L'article 1792-2 précise que la présomption de responsabilité établie par l'article 1792 s'étend également aux dommages qui affectent la solidité des éléments d'équipement d'un ouvrage, mais seulement lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert.
Un élément d'équipement est considéré comme formant indissociablement corps avec l'un des ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage.
M. [T] fait valoir que sa société a procédé à l'installation dans les locaux du GAEC de [Adresse 18] d'un système de production d'eau chaude comportant une chaudière et un ballon de 3 000 litres reliés par des canalisations souterraines dans plusieurs bâtiments de l'exploitation.
Ces caractéristiques font selon lui de l'installation un élément d'équipement indissociable des bâtiments, et permet de retenir la qualification d'ouvrage au sens de l'article 1792-6 du Code civil.
M. [T] rappelle également que cet ouvrage a fait l'objet d'une réception, et que le désordre apparu dans la citerne a eu pour effet de rendre l'installation impropre à sa destination.
Dès lors, M. [T] soutient que le désordre présente un caractère décennal.
Le GAEC de [Localité 19] invoque le caractère décennal du dommage qu'il subit, considérant que le chauffe-eau et la citerne ne sont pas de simples éléments d'équipement dissociables, mais doivent être considérés comme des ouvrages. Il se prévaut pour cela de l'importance des travaux réalisés.
Il souligne aussi que l'ouvrage a été réceptionné et le prix intégralement réglé, et que le désordre survenu dans la citerne rend l'installation impropre à sa destination, ce qui permet de mobiliser la garantie décennale.
Les MMA IARD contestent la qualification d'ouvrage des travaux réalisés par la SARL [T] au profit du GAEC de [Adresse 18]. Elles soulignent que la prestation fournie n'a consisté qu'à installer des éléments d'équipements dissociables tels qu'une cuve et un ballon d'eau chaude, sans que l'existence de canalisations souterraines ne permette d'entraîner la qualification d'ouvrage pour l'installation.
De plus, elles invoquent les dispositions de l'article 1792-7 qui excluent de la garantie décennale les éléments d'équipement exclusivement à usage professionnel, ce qui est le cas de l'installation en cause.
Il peut être admis en l'espèce, même en l'absence d'un procès-verbal de réception, que les travaux réalisés par la SARL [T] au profit du GAEC de [Adresse 18] ont fait l'objet d'une réception, dès lors que les travaux achevés en avril 2008 ont été intégralement réglés et que le GAEC en a pris possession sans aucune réserve dès cette date.
De même, il n'est pas contestable que le désordre affectant le ballon d'eau chaude posé par la SARL [T] a eu pour effet de rendre le ballon et l'installation d'eau chaude à laquelle il était relié impropre à son usage, la présence d'une grande concentration de fer dans l'eau étant incompatible avec les exigences d'un élevage de veaux de boucherie qui impose de limiter les apports en fer.
La qualification d'ouvrage des travaux réalisés est en revanche discutée par les parties.
La jurisprudence a été amenée à préciser la définition qu'il convenait de donner à la notion d'ouvrage. Elle a ainsi pu indiquer qu'un ouvrage au sens de l'article 1792 n'est pas nécessairement un bâtiment, et retenir pour critères de définition de l'ouvrage l'implantation au sol de la réalisation, ou la construction d'un ensemble (dans son intégralité ou par adjonction à l'existant).
Par ailleurs, il a été jugé que les désordres affectant un élément d'équipement adjoint à l'existant et rendant l'ouvrage impropre à sa destination ne relevaient de la responsabilité décennale des constructeurs que lorsqu'ils trouvaient leur siège dans un élément d'équipement au sens de l'article 1792-3 du Code civil, c'est-à-dire un élément destiné à fonctionner.
Récemment, la Cour de cassation a modifié son analyse pour considérer que si les éléments d'équipement installés en remplacement ou par adjonction sur un ouvrage existant ne constituent pas en eux-mêmes un ouvrage, ils ne relèvent ni de la garantie décennale ni de la garantie biennale de bon fonctionnement, quel que soit le degré de gravité des désordres, mais de la responsabilité contractuelle de droit commun, non soumise à l'assurance obligatoire des constructeurs.
Dans le cas d'espèce, il ressort de la facture établie le 31 mars 2008 par la SARL [T] que celle-ci a réalisé des travaux « d'équipement de production d'eau chaude, montage et raccordement », comprenant la fourniture et la pose d'un ballon d'eau chaude avec raccordement à l'installation électrique et à l'installation de plomberie déjà en place.
En décembre 2007, la SARL [T] avait déjà procédé au remplacement de la chaudière de l'installation.
Il ressort de ces factures que, si le système de production de chauffage et d'eau chaude de l'exploitation intègre des canalisations souterraines pour relier les différents équipements de l'installation, la SARL [T] n'a pas elle-même mis en place ces canalisations.
Elle n'est en réalité intervenue que sur les équipements qui sont connectés au réseau.
Ces équipements que sont la chaudière et le ballon d'eau chaude présentent indéniablement un caractère dissociable de l'ouvrage d'ensemble qu'est l'installation de chauffage de l'exploitation.
La preuve en est que lorsque la dégradation du ballon d'eau chaude a été identifiée en 2012, la SARL [T] a pu procéder au remplacement de ce ballon sans reprendre toute l'installation.
Par conséquent, les travaux réalisés en mars 2008 par la SARL [T] ne peuvent être qualifiés d'ouvrage et le ballon d'eau chaude, qui est un élément d'équipement dissociable de l'ouvrage, ne peut se voir appliquer le régime de garantie bienno-décennale prévu par les articles 1792 et suivants.
Dès lors, la responsabilité de la SARL [T] ne peut être recherchée sur ce fondement.
Sur la responsabilité contractuelle de droit commun :
Aux termes de l'article 1134 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, applicable au présent litige, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Elles doivent être exécutées de bonne foi.
L'article 1147 prévoit que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
En exécution de ces textes, quelle que soit la qualification du contrat, tout professionnel de la construction est tenu, avant réception, d'une obligation de conseil et de résultat envers le maître de l'ouvrage.
Cette obligation de résultat se définit pour le professionnel comme l'obligation de livrer des travaux conformes à la destination convenue, exécutés en respectant les règles de l'art et les normes en vigueur au jour de son intervention. Il ne peut s'exonérer de sa responsabilité qu'en établissant l'existence d'une cause étrangère ou d'un cas de force majeure.
Il résulte des opérations d'expertise, et sans que cela soit contesté par aucune des parties, que la dégradation de la qualité de la viande produite par le GAEC de [Adresse 18] a été causée par la présence trop importante de fer dans l'alimentation des animaux qui a causé un rougissement de la viande (critère dégradant de la viande).
Il a été établi que « l'intoxication » ferrique subie par les veaux a été générée par la dégradation de la cuve du chauffe-eau duquel était tirée l'eau servant au mélange avec la poudre de lait donnée aux animaux.
En effet, la cuve, initialement recouverte d'un film protecteur Securex, visant à isoler la cuve en acier de l'eau, a présenté un phénomène d'oxydation et de corrosion important, en suite de l'altération du revêtement Securex.
Pour expliquer la dégradation du revêtement Securex, l'expert judiciaire a émis trois hypothèses en clôture de son rapport du 4 octobre 2015.
Le Docteur [O] a en premier lieu envisagé l'hypothèse d'un défaut au sortir de l'usine du Securex, entraînant une altération anormale lors de la mise en service.
L'expert a indiqué qu'il ne lui était pas possible de trancher cette hypothèse en raison du défaut de production par le constructeur de la fiche de fabrication de la cuve. Mme [O] a cependant précisé qu'elle envisageait cette cause au regard des doutes instaurés par les constatations de l'huissier de justice mandaté le 31 mai 2012, qui a trouvé dans le fond de la cuve des débris de revêtement Securex présentant une épaisseur variable (de 1 à 8 mm), quand le constructeur indiquait que les cuves étaient enduites de deux couches uniformes de produit de 2 à 3 millimètres.
Dans un deuxième temps, l'expert judiciaire développe l'hypothèse selon laquelle le chauffe-eau aurait été endommagé durant le transport, ce qui aurait pu engendrer une dégradation de l'intégrité du Securex. Elle relève néanmoins qu'aucun bon de transport ou de livraison n'a été produit par les parties et qu'aucune trace de choc important n'est visible sur la cuve démontée.
Enfin, l'expert judiciaire expose l'hypothèse d'une surpression qui aurait endommagé le revêtement Securex. Il est rappelé que l'usage fait par le GAEC de [Localité 19] du chauffe-eau impliquait des montées en pression à répétition de la cuve (une eau montée en température à 90°C, puis un tirage de quantité importante d'eau par séries de 40 tirages dans un laps de temps de 2 heures).
Mme [O] précise que les essais de montées en pression de la cuve ont été réalisés de manière non contradictoire par la SAS Thermor Pacific.
Elle constate néanmoins que le système de sécurité monté sur le chauffe-eau par la SARL [T] n'est pas conforme aux recommandations du constructeur (une soupape de ¿ pouce au lieu de 2 soupapes de 1 pouce chacune), et que l'installateur n'a pas pu justifier des essais de pression qui auraient été réalisés au moment de la pose de la cuve. De même, l'experte souligne que les consignes de vérification mensuelle du système de sécurité n'ont pas été appliquées.
Enfin, la présence d'une vanne d'arrêt montée entre le ballon et la soupape de sécurité, en violation des recommandations du constructeur est relevée.
L'expert judiciaire conclut son rapport en exposant que « ces trois explications sont plausibles mais aucune ne peut totalement être tranchée car des pièces importantes ne sont pas accessibles » (la fiche de suivi sécurité de la cuve, le bon de réception du matériel suite à la livraison).
« Ce qui est avéré est que l'installation du chauffe-eau, à l'origine de tous les dégâts, n'est ni conforme aux recommandations du constructeur ni aux règles de l'art ».
La SARL [T] n'a pas contesté lors des opérations d'expertise que la soupape de sécurité qu'elle avait mise en place n'était pas conforme aux préconisations de montage du constructeur, par ailleurs produites lors de l'expertise.
De la même manière elle n'a pas contesté que la vanne d'arrêt mise en place entre le ballon et la soupape était contraire aux prescriptions de montage du fabricant.
En revanche, elle a affirmé avoir procédé à des essais de mise en pression de la cuve lors de la pose.
La SARL [T] a produit à l'occasion de l'instance une attestation en la forme civile rédigée par l'un de ses salariés attestant de la réalisation de ces tests, mais cette attestation se révèle insuffisante à faire la preuve de la réalité des tests exigés, et ne permet pas de connaître les résultats obtenus à l'issue de ces tests, qui pourraient certifiés que l'installation présentait un fonctionnement normal.
Les éléments retenus par l'expert judiciaire à l'encontre de la SARL [T], à savoir le non-respect des préconisations de montage du constructeur et l'absence de test de pression à la mise en place, sont constitutifs d'une faute de l'installateur dès lors qu'ils révèlent une non-conformité des travaux aux règles de l'art, et qu'ils caractérisent un manquement à l'obligation de résultat de l'installateur, défaillant à livrer un produit exempt de vices.
Ces manquements sont au surplus de nature à avoir participé à la survenance du dommage.
La SARL [T] est défaillante à faire la preuve que les désordres présentés par l'installation qu'elle a réalisée auraient pu être exclusivement provoqués par une cause étrangère à son intervention ou par un cas de force majeure.
En application du principe d'équivalence des causes, la SARL [T] doit donc être tenue pour responsable de l'intégralité des préjudices résultant des désordres affectant les travaux réalisés et sa responsabilité contractuelle doit être retenue.
Le jugement déféré sera en conséquence confirmé de ce chef.
Il sera de même confirmé en ce qu'il a constaté que, du fait de la liquidation et de la radiation de la SARL [T], aucune condamnation ne peut être prononcée à son encontre.
Sur la responsabilité des SAS Thermor Pacific et Etablissement Maillard :
Le GAEC de [Adresse 18] forme appel incident du jugement déféré en ce qu'il a rejeté ses demandes de condamnations dirigées contre la SAS Thermor Pacific et la SAS Etablissement Maillard.
Il poursuit la responsabilité du fabricant et du vendeur sur le fondement de l'article 1382 ancien du Code civil.
En réplique, la SAS Etablissement Maillard, vendeur à la SARL [T] du chauffe-eau, conteste sa responsabilité.
Elle rappelle que l'expert judiciaire a émis trois hypothèses quant aux causes de la dégradation du revêtement de la cuve du chauffe-eau.
Elle note qu'il n'a pu se prononcer définitivement sur le défaut du revêtement en sortie d'usine dans la mesure où le fabricant n'avait pas produit les fiches de suivi de fabrication.
S'agissant de la deuxième hypothèse de l'expert d'un dommage causé pendant le transport, la SAS Maillard relève que le chauffe-eau ne présentait aucune trace de chocs importants et précise qu'il n'est pas rapporté la preuve qu'elle a elle-même assuré le transport de l'appareil.
La SAS Thermor Pacific, fabricant du chauffe-eau, conclut elle aussi à la confirmation du jugement déféré et au rejet des demandes dirigées contre elle par le GAEC de [Adresse 16] [Localité 15].
Reprenant les conclusions de l'expertise judiciaire, la SAS Thermor Pacific entend préciser que les fiches de suivi de fabrication évoquées par l'expert, qu'elle n'avait pas conservées à la date où l'expertise a eu lieu, ne sont pas déterminantes en ce qu'elles n'ont pour seule finalité que de certifier que le produit qui sort d'usine est conforme aux exigences de qualité du groupe Atlantic. Pour autant, la SAS Thermor Pacific indique que par principe un produit qui sort d'usine est nécessairement conforme à ces exigences.
La SAS Thermor Pacific critique par ailleurs les constatations faites par huissier le 31 mai 2012, qui ont été commentées par l'expert judiciaire, en ce qu'elles mesuraient l'épaisseur du revêtement Securex du chauffe-eau litigieux.
La SAS Thermor Pacific affirme que cette épaisseur n'a aucune signification, dans un contexte de dégradation progressive du revêtement, et ne permettent pas de conclure à une défectuosité du produit lors de la fabrication.
Ensuite, la SAS Thermor Pacific fait valoir que l'absence de traces de choc sur la citerne ne permet pas d'exclure que celle-ci aurait pu être endommagée pendant le transport, de faibles chocs pouvant entraîner des microfissurations du revêtement Securex.
Elle conteste donc que sa responsabilité puisse être engagée d'une quelconque manière.
Pour rejeter les demandes du GAEC de [Adresse 16] [Localité 15] dirigées contre le fabricant et le vendeur du chauffe-eau, les premiers juges ont relevé que ce dernier ne motivait aucunement la responsabilité qu'il invoquait, se contentant de renvoyer aux conclusions de l'expert.
En application de l'article 1382 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance no2016-131 du 10 février 2016, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.
Il appartient au GAEC de [Adresse 18], qui recherche la responsabilité du fabricant et du vendeur, de rapporter la preuve d'une faute en lien direct avec le dommage qu'il subit.
Tout d'abord, s'agissant de la SAS Etablissement Maillard, il ne peut qu'être relevé que les conditions de livraison du chauffe-eau sont restées particulièrement floues, aucune des parties n'étant en mesure d'établir que c'est la société Maillard qui aurait assuré le transport du produit sur les lieux de l'installation.
De ce fait, aucune responsabilité ne peut être imputée à la société Maillard en raison d'une éventuelle dégradation du chauffe-eau durant le transport.
En outre, il n'a pas plus été démontré que la société Maillard aurait eu à assumer un rôle de conseil dans le choix du matériel à installer, la commande ayant été passée auprès d'elle directement par la SARL [T], sans qu'elle ait été consultée au préalable sur la conception de l'installation.
Par conséquent, aucune faute de nature extracontractuelle de la SAS Maillard à l'égard du GAEC de [Adresse 18] n'est caractérisée.
L'action en responsabilité dirigée contre elle ne peut donc qu'être rejetée.
Ensuite, à l'endroit de la SAS Thermor Pacific, l'expert judiciaire ne retient pas de manière affirmée l'existence d'un défaut de fabrication du chauffe-eau installé sur l'exploitation du GAEC de [Adresse 18], se bornant à regretter l'absence de production des fiches de fabrication, dont il n'explique pas clairement en quoi elles auraient permis de préciser l'existence d'un défaut en sortie d'usine.
En outre, la variation d'épaisseur des débris de revêtement recueillis par l'huissier de justice en mai 2012 n'apparaît pas probante pour établir que la fabrication de la cuve aurait été défectueuse.
En conséquence, aucune faute du fabricant n'étant établie, sa responsabilité ne pourra être retenue.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes du GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] dirigées contre la SAS Thermor Pacific et la SAS Etablissement Maillard.
Sur les demandes indemnitaires du GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] :
Les indemnisations octroyées au GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] par les premiers juges sont critiquées par l'ensemble des parties.
Le GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] sollicite la confirmation de l'indemnisation qui lui a été octroyée à hauteur de 333 674 euros au titre de la perte d'exploitation entre 2011 et 2013, mais sollicite également l'octroi d'une somme de 100 000 euros au titre de la perte d'image.
Il expose que l'intoxication au fer des veaux destinés à la boucherie qu'il élève a été la cause d'un changement de teinte de la viande vendue, devenue plus rouge, ce qui a entraîné un déclassement de son produit, mais également un retard de croissance des animaux.
Le GAEC de [Adresse 18] précise que, du fait du déclassement de la viande qu'il produisait, il a été contraint de modifier son circuit de commercialisation. Alors qu'auparavant il vendait sa viande aux abattoirs, il a dû passer par des grossistes, ce circuit provoquant une perte de marge à son préjudice.
Le GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] fait valoir que ses préjudices ont été chiffrés dans le cadre de l'expertise judiciaire, par l'intervention d'un sapiteur.
M. [T] conteste pour sa part la réalité du préjudice de perte d'image invoqué par le GAEC de [Adresse 18].
Enfin, les sociétés MMA concluent que les préjudices du GAEC ont été surestimés, puisqu'il n'a pas été tenu compte des ventes réalisées sur la période malgré le déclassement de la viande. Elles considèrent également que les demandes présentées par le GAEC au titre de la perte d'image ont déjà été indemnisées au titre de l'allongement de la durée de croissance.
Dans le cadre de l'expertise judiciaire, il a été fait appel à un sapiteur expert-comptable pour chiffrer les préjudices subis par le GAEC de [Adresse 18] en suite du déclassement de sa viande.
M. [V] a ainsi chiffré une perte de marge de 225 991 euros pour la période de 2011 à 2013, et un allongement du temps de croissance de 77 683 euros pour la même période, soit un préjudice total de 333 674 euros.
Pour parvenir à ces résultats, il a tenu compte du prix de revente de la viande effectivement obtenu par le GAEC, du coût exposé pour l'achat des animaux et de leur alimentation et des frais d'élevage pour calculer la marge réalisée par l'exploitant.
Pour calculer l'allongement du temps de croissance, l'expert a tenu compte du surcoût en alimentation généré par l'allongement de la durée d'engraissement des veaux avant de pouvoir les vendre.
L'expert n'a en revanche pas retenu de préjudice distinct au titre de la surmortalité un temps évoquée par le GAEC.
Les parties critiquent aujourd'hui ces résultats. Pour autant la méthodologie de calcul de l'expert a été discutée préalablement avec les parties durant l'expertise, et aucune étude n'est produite en contradiction pour remettre en cause ses conclusions.
Au regard de l'expertise réalisée, et des explications étayées qui la fondent, le préjudice du GAEC de la [Adresse 14] peut donc être fixé à la somme totale de 333 674 euros, se décomposant en 255 991 euros de perte de marge et 77 683 euros d'allongement de la durée de croissance.
Le GAEC de [Adresse 18] revendique par ailleurs un préjudice résultant de la dégradation de son image, qui l'a empêché de vendre sa viande aux abattoirs.
Toutefois, il ne fournit aucun élément permettant de chiffrer ce préjudice. En outre le calcul réalisé par l'expert au titre de l'allongement du temps de croissance tient compte du fait que le GAEC a connu plus de difficultés à vendre sa viande aux abattoirs, ce qui intègre donc pour partie le préjudice d'image allégué.
La demande de ce chef sera donc rejetée.
Sur la responsabilité personnelle de M. [Y] [T] :
M. [T] forme appel du jugement déféré en ce qu'il a retenu sa responsabilité personnelle, en qualité de liquidateur amiable de la SARL [Adresse 13].
Il soutient que pour pouvoir retenir sa responsabilité personnelle, le GAEC de [Adresse 18] devrait démontrer le principe d'une créance envers la SARL [Adresse 13].
Selon M. [T], le GAEC aurait dû saisir pour cela le tribunal de commerce pour voir désigner un mandataire ad'hoc à la SARL quand il a appris sa radiation, et voir ainsi reconnaître sa créance.
De plus, M. [T] affirme qu'il n'a pas mentionné l'existence de ce contentieux lors de la liquidation de la SARL, estimant qu'il était garanti par l'assureur.
En outre, M. [T] prétend que sa responsabilité personnelle ne pourrait être retenue pour l'entier préjudice du GAEC de [Adresse 18].
Sa responsabilité devrait être limitée au préjudice subi par le GAEC déduction faite des éventuelles indemnisations versées par l'assureur MMA IARD, ou subsidiairement à la perte de chance d'être indemnisé dans le cadre de la procédure de liquidation, qu'il estime à un dixième du préjudice revendiqué.
Le GAEC de [Adresse 18] conclut à la confirmation du jugement déféré qui a retenu la responsabilité personnelle de M. [T].
Il rappelle que la SARL [Adresse 12] [T] a fait l'objet d'une dissolution après liquidation amiable et que la clôture des opérations de liquidation a été prononcée le 26 juillet 2018 par M. [Y] [T], liquidateur amiable, donnant lieu à la radiation de la société. Le GAEC souligne qu'aucune des parties à la présente instance n'a été avisée de cette liquidation amiable, alors même que les procédures judiciaires étaient déjà engagées.
Le GAEC de [Adresse 18] affirme qu'il était de la responsabilité de M. [T], en qualité de liquidateur amiable de la SARL, d'informer ses créanciers des opérations de liquidation et de régler les créances dues avec l'actif disponible ou de provisionner les sommes nécessaires.
Le GAEC soutient qu'il ne lui appartenait pas de saisir le tribunal de commerce pour voir désigner un mandataire ad'hoc, d'autant plus que la SARL avait déjà été liquidée quand il a appris la situation, et qu'il n'existait donc plus aucun actif à distribuer aux créanciers.
Le GAEC de [Adresse 18] reproche donc à M. [T] d'avoir commis une faute engageant sa responsabilité personnelle en ne provisionnant pas les sommes nécessaires au paiement de la créance et en clôturant les opérations de liquidation malgré l'action en justice en cours.
Du fait de cette faute, le GAEC de [Adresse 18] considère que M. [T] est tenu personnellement d'indemniser le créancier de la totalité de ses préjudices, à hauteur des condamnations qui auraient dû intervenir à l'encontre de la société liquidée.
Le GAEC conteste que son indemnisation puisse être limitée à une perte de chance, d'autant que M. [T] n'apporte aucun élément qui permettrait de considérer que les actifs liquidés de la SARL [Adresse 12] [T] n'auraient pas permis de régler les condamnations prononcées.
Il indique au contraire avoir obtenu quelques éléments de comptabilité de la SARL, et notamment les comptes de clôture de la liquidation, faisant ressortir que la société disposait de fonds.
Ainsi, le GAEC de [Adresse 18] sollicite la condamnation de M. [T], à titre personnel, à lui régler la somme de 333 674 euros correspondant à la perte de marge, outre 100 000 euros au titre du préjudice de perte d'image.
Il sollicite au surplus la condamnation de M. [T] à lui payer une somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts complémentaires du fait des conséquences de ses agissements fautifs et du préjudice moral causé au GAEC.
Aux termes de l'article L237-12 du code de commerce, le liquidateur est responsable, à l'égard tant de la société que des tiers, des conséquences dommageables des fautes par lui commises dans l'exercice de ses fonctions.
La responsabilité personnelle du liquidateur s'entend, à l'égard des tiers, de toute faute qui prive ces derniers d'exercer un droit ou de recouvrer une créance qu'ils auraient détenus à l'égard de la société que le liquidateur représente.
Il n'est pas contesté que M. [Y] [T] a assumé les fonctions de gérant puis de liquidateur amiable de la SARL [T].
Il ressort des extraits K-bis produits par les parties que la dissolution amiable de la SARL [T] a été prononcée le 28 juin 2014, soit postérieurement aux premières contestations élevées par le GAEC de [Adresse 18] quant au bon fonctionnement de l'installation réalisée par l'entreprise.
La clôture de la liquidation amiable et la radiation de la société ont été prononcées le 26 juillet 2018.
M. [T] ne justifie pas, et ne prétend pas même, qu'il aurait informé ses créanciers, et plus particulièrement le GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] de l'ouverture des opérations de liquidation amiable de la SARL [T].
Il est de même constant que M. [T] n'a pas pris le soin de consigner les sommes nécessaires à l'éventuelle indemnisation du GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] dans le cadre de l'instance engagée par ce dernier, et ce alors que le rapport d'expertise avait été déposé en octobre 2015 et l'assignation au fond délivrée en janvier 2016, ces documents chiffrant les demandes présentées par le GAEC.
En agissant de la sorte, M. [Y] [T] a incontestablement porté atteinte aux droits de ses créanciers et commis une faute engageant sa responsabilité personnelle à l'égard du GAEC de [Adresse 18] qu'il a privé de tout recours à l'encontre de la personne morale dont la responsabilité contractuelle est consacrée.
En outre, il convient de rappeler que la responsabilité personnelle du liquidateur est indépendante de l'existence d'une créance au passif de la société en liquidation, de sorte que M. [T] n'est pas fondé à opposer au GAEC l'absence de déclaration de sa créance au passif de la société ou bien le défaut d'action à l'encontre de la personne morale.
En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a retenu la responsabilité personnelle de M. [T].
Toutefois, il est admis que le préjudice qui découle de la faute éventuellement commise par le liquidateur amiable s'analyse en une perte de chance.
Le GAEC n'est donc pas fondé à solliciter la condamnation de M. [T] à l'indemniser de l'intégralité de son préjudice.
Au regard des éléments comptables versés à la procédure, qui ne démontrent pas que la SARL [T] aurait pu disposer de l'intégralité des fonds nécessaires à l'indemnisation du GAEC de [Adresse 18], la perte de chance subie par le GAEC de pouvoir recouvrer sa créance sera évaluée à 40%.
Dès lors, M. [Y] [T] est condamné à payer au GAEC de [Adresse 16] [Adresse 14] la somme de 133 469,60 euros, après infirmation du jugement déféré quant au quantum des condamnations prononcées.
En revanche, le GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] ne fait pas la démonstration du préjudice moral qu'il invoque et qui résulterait de la faute personnelle de M. [T].
Il sera donc débouté de sa demande indemnitaire de ce chef.
Sur la garantie des SA MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles :
M. [T] forme appel des dispositions du jugement déféré qui ont rejeté l'appel en garantie formé par la SARL [Adresse 13] contre son assureur, la SA MMA.
Il soutient que la garantie des MMA IARD peut être mobilisée sur le fondement de la responsabilité civile professionnelle.
Le GAEC de [Adresse 18] conclut également à la mobilisation de la garantie de l'assureur.
Il fait valoir qu'il bénéficie d'une action directe à l'égard des sociétés MMA IARD.
Le GAEC de [Adresse 18] invoque la garantie de l'assureur au titre de la responsabilité civile professionnelle de la SARL [Adresse 13], et conteste que l'exclusion invoquée par les sociétés MMA IARD trouve à s'appliquer, alors que le dommage est causé par le bien fourni par l'assuré, et non subi par le bien fourni.
En réplique, les MMA IARD concluent au rejet des demandes de garanties dirigées contre elles.
Les MMA dénient leur garantie au titre de la responsabilité civile professionnelle, invoquant l'article 32 point 16 de la convention spéciale n°971 e) qui exclut de la garantie les dommages subis par les biens fournis par l'assuré dans le cadre d'un marché.
En tout état de cause, les MMA rappellent que M. [T] n'était pas assuré à titre personnel auprès de leur compagnie, et qu'il ne peut donc revendiquer aucune garantie du chef des condamnations prononcées à son encontre.
En application de l'article L124-3 du code des assurances, le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.
Le GAEC de [Adresse 18] est donc recevable à agir directement contre les MMA IARD, assureur de la SARL [T] dont la responsabilité contractuelle a été retenue.
Le GAEC entend voir mobiliser la garantie responsabilité civile professionnelle de la société.
Il n'est pas contesté que, à la date de la réalisation des travaux et de la réclamation formée par le GAEC de [Localité 17] [Adresse 14], la SARL [T] était assurée auprès des SA MMA IARD, tant au titre de sa responsabilité décennale que de sa responsabilité civile professionnelle.
Les conditions particulières du contrat d'assurance souscrit par la SARL [T] renvoient, s'agissant de la responsabilité civile de l'entreprise, aux conventions spéciales n°971 titre II.
Les conventions spéciales n°971 e) produites par les MMA précisent que la garantie de la responsabilité civile professionnelle accordée porte sur « les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile qui peut lui [l'assuré] incomber en raison :
Des dommages corporels,
Des dommages matériels,
Des dommages immatériels consécutifs à des dommages corporels et matériels garantis,
Subis par autrui et imputables à son activité professionnelle.
Sont exclus de la garantie, outre les exclusions de l'article 32 :
Les dommages subis par les existants et les biens confiés sous réserve de l'article 22,
Les dommages subis par les avoisinants, sous réserve de l'article 23 ».
Les MMA se prévalent de l'exclusion de garantie libellée à l'article 32-16-b), à savoir « les dommages subis par les biens fournis par l'assuré dans le cadre d'un même marché ».
Dans le cas d'espèce, le chauffe-eau installé par la SARL [T] sur l'exploitation du GAEC de [Adresse 18] doit être regardé comme un bien fourni par l'assuré dans la mesure où la SARL [T] a directement passé la commande du matériel auprès de la société Maillard avant d'en assurer la pose.
D'ailleurs, la SARL [T] a facturé la fourniture du chauffe-eau au GAEC de [Localité 17] [Adresse 14].
Toutefois, la lecture intégrale de la clause permet de comprendre que l'assureur a entendu exclure sa garantie s'agissant de la réparation des dommages affectant directement les biens fournis par l'assuré et qui nécessiteraient des réparations.
Cette clause n'apparaît donc pas applicable en l'espèce, les dommages dont il est demandé l'indemnisation étant des dommages immatériels résultant de la défaillance du chauffe-eau en question.
En revanche, l'article 32-19 de ces mêmes conditions spéciales prévoit l'exclusion de la garantie de l'assureur pour les dommages résultant :
De réclamations fondées sur le fait que les produits, marchandises ou matériels livrés ou les ouvrages et travaux exécutés ne remplissent pas les fonctions ou ne satisfont pas les besoins auxquels ils sont destinés,
De la non-conformité aux obligations contractuelles.
L'article 32-5 b) prévoit également l'exclusion de garantie des dommages résultant de l'inobservation volontaire ou inexcusable des règles de l'art telles qu'elles sont définies par les réglementations en vigueur, les documents techniques unifiés ou les normes établies par les organismes compétents à caractère officiel ou dans le marché des travaux concerné quand cette inobservation est imputable à l'assuré.
Or, la responsabilité de la SARL [T] a été retenue tant du fait de manquements aux règles de l'art que du fait de non-conformité aux obligations contractuelles.
Les MMA IARD sont par conséquent légitimes à opposer leur exclusion de garantie aux demandes de condamnation formées à leur encontre par le GAEC de [Adresse 18], sur la base de ces deux derniers articles.
Enfin, aucune garantie n'est due par les MMA IARD du chef de la faute personnelle de M. [Y] [T], qui n'était pas assuré à titre personnel auprès de cet assureur.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a débouté le GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] de ses demandes dirigées contre les SA MMA IARD.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Le jugement déféré étant confirmé s'agissant des responsabilités retenues, il sera également confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
L'équité ne justifie pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou de l'autre des parties à hauteur d'appel.
M. [Y] [T], qui succombe à l'instance, sera condamné aux dépens d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile au profit des conseils en ayant fait la demande.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, dans les limites de sa saisine, par décision contradictoire, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement prononcé le 18 novembre 2021 par le tribunal judiciaire de Coutances, sauf en ce qu'il a condamné M. [Y] [T] à indemniser le GAEC de [Adresse 18] pour la somme de 334 674 euros au titre de sa perte d'exploitation,
Infirme le jugement prononcé de ce seul chef,
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
Condamne M. [Y] [T] à indemniser le GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] de la somme de 133 469,60 euros au titre de la perte d'exploitation,
Déboute les parties de toutes autres demandes,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou l'autre des parties à hauteur d'appel,
Condamne M. [Y] [T] aux entiers dépens d'appel avec application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile au profit des conseils en ayant fait la demande.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
N. LE GALL Hélène BARTHE-NARI
N° Portalis DBVC-V-B7F-G4RP
ARRÊT N°
JB.
ORIGINE : Décision du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 10] du 18 Novembre 2021
RG n° 16/00186
COUR D'APPEL DE CAEN
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 14 OCTOBRE 2025
APPELANT :
Monsieur [Y] [T]
né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 21]
[Adresse 3]
[Localité 7]
représenté et assisté de Me Laurent MARIN, avocat au barreau de COUTANCES
INTIMÉES :
Le GAEC DE [Localité 17] [Adresse 14]
[Adresse 18]
[Localité 6]
pris en la personne de son représentant légal
représentée et assistée de Me Estelle DARDANNE, avocat au barreau de COUTANCES
La S.A.S. ETABLISSEMENTS MAILLARD exerçant sous l'enseigne commerciale [Adresse 11], venant aux droits de la Société DECELLE FEUILLY
N° SIRET : 096 820 097
[Adresse 20]
[Localité 8]
prise en la personne de son représentant légal
représentée et assistée de Me Bernard HOYE, avocat au barreau de LISIEUX
La S.A.S. SOCIETE THERMOR PACIFIC
N° SIRET : B 329 545 008
[Adresse 4]
[Localité 5]
pris en la personne de son représentant légal
représentée et assistée de Me Muriel LETAROUILLY-DOUCIN, avocat au barreau de COUTANCES
La S.A. MMA IARD
N° SIRET : 440 048 882
[Adresse 2]
[Localité 9]
pris en la personne de son représentant légal
La Compagnie d'assurance MMA ASSURANCES MUTUELLES
N° SIRET : 775 652 126
[Adresse 2]
[Localité 9]
pris en la personne de son représentant légal
représentées et assistées de Me Amélie MARCHAND-MILLIER, avocat au barreau de COUTANCES
DÉBATS : A l'audience publique du 24 avril 2025, sans opposition du ou des avocats, Mme GAUCI SCOTTE, Conseillère, a entendu seule les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré
GREFFIER : Mme COLLET
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme BARTHE-NARI, Président de chambre,
Mme DELAUBIER, Conseillère,
Mme GAUCI SCOTTE, Conseillère,
ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 14 Octobre 2025 par prorogations du délibéré initialement fixé au 8 Juillet 2025, 16 Septembre 2025 puis 30 Septembre 2025 et signé par Mme BARTHE-NARI, président, et Mme LE GALL, greffier
* * *
FAITS ET PROCEDURE
Le GAEC de [Localité 19] exerce une activité de production de veaux de boucherie sur deux bâtiments, et s'est rapproché de la SARL [Adresse 13] aux fins de vente et d'installation d'un équipement de production d'eau chaude comprenant notamment un ballon Thermor Pacific de 3 000 litres. L'eau chauffée était destinée à être mélangée à la poudre de lait constituant l'alimentation principale des veaux pendant les premiers mois.
La facture du 31 mars 2008 de 26 934,52 euros a été réglée intégralement le 10 avril 2008.
Ayant constaté début 2011 une dégradation de la couleur de la viande des veaux entraînant une reclassification dans une catégorie inférieure, des tests ont été menés pour évaluer la présence de fer dans les aliments.
La SARL [T] a pu constater que l'isolant habillant l'intérieur du chauffe-eau s'était décollé, entraînant une oxydation et ainsi la présence de fer dans l'eau.
Sur ce constat, une expertise amiable a été diligentée, concluant à la présence de fer du fait de l'oxydation du revêtement SECUREX recouvrant la cuve acier du chauffe-eau.
Suivant facture du 14 juin 2012, le GAEC de [Localité 19] a commandé et fait poser un nouveau ballon par la SARL [T].
Le GAEC de La Hersière a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Coutances qui, par ordonnance du 28 mars 2013, a ordonné une expertise judiciaire, étendue à la société Decelle Feuilly.
L'expert a déposé son rapport le 4 octobre 2015.
Sur la base de ce rapport, par actes des 25 et 26 janvier 2016, le GAEC de La Hersière a fait assigner la SARL [Adresse 13], la société Thermor Pacific et la société Etablissement Maillard devant le tribunal de grande instance de Coutances aux fins, à titre principal, de les voir condamner in solidum, sur le fondement des articles 1100, 1147 et 1382 du Code civil, au paiement de la somme de 333 674 euros au titre de la perte d'exploitation de 2011 à 2013 et de l'allongement du temps de croissance, et la somme de 100 000 euros de perte d'image pour l'éleveur.
Par acte du 30 janvier 2018, la SARL [Adresse 13] a fait assigner la société MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles aux fins de garantie.
Par jugement du 18 novembre 2021 auquel il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le tribunal judiciaire de Coutances a :
constaté que la SARL [Adresse 13] a été placée en liquidation amiable,
débouté le GAEC de [Localité 19] de ses demandes à l'encontre de la SARL [Adresse 13], des MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, de la société Thermor Pacific et de la société Etablissement Maillard,
condamné M. [Y] [T] à indemniser le GAEC de [Localité 19] pour la somme de 334 674 euros au titre de sa perte d'exploitation,
débouté le GAEC de [Localité 19] de ses demandes au titre du préjudice de perte d'image,
condamné M. [T] à payer au GAEC de [Localité 19] la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné le GAEC de [Localité 19] à payer à la société Etablissement Maillard et la société Thermor Pacific chacun la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné M. [T] aux dépens, comprenant les frais d'expertise, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
rejeté toutes autres demandes.
Par déclaration du 21 décembre 2021, M. [Y] [T] a formé appel de ce jugement, en ce qu'il l'a condamné à indemniser le GAEC de [Adresse 18] pour la somme de 334 674 euros au titre de la perte d'exploitation, qu'il a débouté le GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] de se demandes au titre du préjudice de perte d'image, qu'il a condamné M. [T] à payer au GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, a rejeté toutes autre demandes, et l'a condamné aux dépens.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 29 octobre 2024, M. [Y] [T] demande à la cour de :
infirmer la totalité du jugement rendu le 18 novembre 2021 par le tribunal judiciaire de Coutances,
En conséquence,
constater l'absence de faute de M. [T],
dire que le GAEC de [Localité 19] ne démontre pas le lien de causalité entre le préjudice subi et la faute de M. [T],
En conséquence,
débouter le GAEC de ses demandes présentées à son égard,
A titre subsidiaire,
dire que le préjudice subi par le GAEC n'est qu'une perte de chance,
réduire le montant des condamnations prononcées à l'égard de M. [T] à un dixième du préjudice retenu par la juridiction et déduction faite de la garantie des MMA IARD,
condamner le GAEC de [Adresse 18] à lui payer une somme de 4 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Marin.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 28 juillet 2022, la SAS Thermor Pacific demande à la cour de :
confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Coutances du 18 novembre 2021 en toutes ses dispositions,
En conséquence il est demandé à la cour de :
juger qu'elle n'a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité,
débouter le GAEC de [Localité 19] et toute autre partie à l'instance de toutes ses demandes, fins et conclusions dirigées contre elle,
juger que M. [T] a engagé sa responsabilité personnelle à l'égard du GAEC de [Localité 19] en procédant à la clôture des opérations de liquidation aimable de la société Le Terregatte ([Adresse 12] [T]),
débouter M. [T], le GAEC de [Localité 19] ainsi que, les MMA Assurances Mutuelles et la société Etablissement Maillard, venant aux droits de la société Decelle Feuilly de toutes leurs demandes, fins et conclusions dirigées contre elle,
condamner in solidum M. [T], les MMA Assurances Mutuelles et la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD dans les limites et conditions de la garantie souscrite, ainsi que la société Etablissement Maillard, venant aux droits de la société Decelle Feuilly, à la relever indemne et à la garantir de toutes les condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre tant en principal qu'en frais et accessoires,
confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Coutances du 18 novembre 2021 en ce qu'il a condamné le GAEC de [Adresse 16] Hersière à lui payer la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance,
confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Coutances du 18 novembre 2021 en ce qu'il a débouté le GAEC de [Adresse 18] de ses demandes au titre du préjudice de perte d'image,
condamner M. [T] ou toute autre partie succombante à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel,
condamner les mêmes aux entiers dépens, dont distraction au profit de la société Tannier-Letarouilly-Feres, Avocats, par application de l'article 699 du code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 7 novembre 2024, la SAS Etablissement Maillard demande à la cour de :
confirmer le jugement dont appel en ses dispositions en ce qu'il a :
constaté que la société [Adresse 13] a été placée en liquidation amiable,
débouté le GAEC de [Localité 19] de ses demandes à son encontre et à l'encontre de la société [Adresse 13], des MMA IARD et MMA Assurances Mutuelles, de la société Thermor Pacific,
condamné M. [T] à indemniser le GAEC de [Localité 19] pour la somme de 334 674 euros au titre de sa perte d'exploitation,
condamné le GAEC de [Localité 19] à lui payer ainsi qu'à la société Thermor Pacific chacun la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné M. [T] aux dépens, comprenant les frais d'expertise, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
Reconventionnellement,
débouter le GAEC de [Localité 19] et la société Thermor Pacific de leurs demandes,
condamner le GAEC de [Localité 19] solidairement avec la SARL [Adresse 13] et en tout état de cause, toute partie succombante, à lui payer la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner le GAEC de [Localité 19] solidairement avec la SARL [Adresse 13] et en tout état de cause, toute partie succombante, aux entiers dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de Me Hoye, Avocat, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Aux termes de leurs dernières écritures notifiées le 25 octobre 2024, les SA MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles demandent à la cour de :
A titre principal,
confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Coutances le 18 novembre 2021,
A titre subsidiaire,
constater que les 'désordres' ne relèvent pas de la garantie décennale,
dire et juger qu'elles ne doivent pas garantie,
En conséquence,
débouter M. [T], le GAEC de [Localité 19], la société Thermor Pacific et la société Etablissement Maillard de l'ensemble de leurs demandes formulées à leur encontre,
A titre infiniment subsidiaire, pour le cas où sa garantie serait consacrée, dire qu'elles ne seront tenues que dans la limite du plafond de garantie et sous déduction de la franchise, et réduire à de plus justes proportions les indemnités sollicitées par le GAEC de [Localité 19],
En tout état de cause,
condamner M. [T], le GAEC de [Localité 19] ou toute autre partie succombant à leur payer une indemnité de 8 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 29 octobre 2024, le GAEC de [Localité 19] demande à la cour de :
juger M. [T] infondé en son appel principal à l'encontre du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Coutances le 18 novembre 2021,
en conséquence, le débouter de l'ensemble de ses demandes,
débouter les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, la société Thermor Pacific et la société Etablissement Maillard de l'ensemble de leurs demandes,
au contraire, le juger pris en la personne de son représentant légal, recevable et bien fondé en toutes ses demandes et en son appel incident à l'encontre du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Coutances le 18 novembre 2021,
En conséquence et statuant à nouveau :
juger que la société [Adresse 13], la SAS Etablissement Maillard et la SAS Thermor Pacific prises en la personne de leur représentant légal ont engagé leur responsabilité et qu'elles sont responsables du préjudice subi,
juger que M. [T] a engagé sa responsabilité personnelle en sa qualité de liquidateur de la SARL [Adresse 13],
confirmer le jugement rendu en ce qu'il l'a déclaré recevable en ses demandes à l'encontre de M. [T] et a condamné M. [T] à lui payer la somme de 334 674 euros au titre de sa perte d'exploitation,
confirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. [T] aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise,
réformer le jugement dont appel en ce qu'il l'a débouté de ses demandes de condamnation de M. [T] au titre du préjudice de perte d'image à hauteur de 100 000 euros ainsi qu'au paiement de la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts et a condamné M. [T] au paiement de la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
réformer le jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes de condamnation in solidum des sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, de la société Thermor Pacific et de la société Etablissement Maillard au paiement de la somme de 334 674 euros au titre de sa perte d'exploitation, de celle de 100 000 euros au titre du préjudice de perte d'image, outre 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise,
réformer le jugement en ce qu'il l'a condamné à payer à la société Etablissement Maillard et la société Thermor Pacific chacune la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
en conséquence, condamner in solidum la SAS Etablissement Maillard, la SAS Thermor Pacific, M. [T], les sociétés MMA Assurances Mutuelles et MMA IARD à lui payer les sommes suivantes :
perte d'exploitation pour la période 2011 à 2013 : 333 674 euros (Perte de marge : 250 991 euros et allongement du temps de croissance : 77 683 euros),
perte d'image de l'éleveur : 100 000 euros
soit un total de : 433 674 euros
condamner en outre M. [T] au paiement de la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts,
condamner l'ensemble des parties défenderesses in solidum au paiement de la somme de 15 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance,
les condamner également in solidum aux entiers dépens de première instance, comprenant notamment les frais d'expertise judiciaire,
y additant, les condamner in solidum au paiement de la somme de 7 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, au titre de l'instance d'appel.
L'ordonnance de clôture de l'instruction a été prononcée le 6 novembre 2024.
Initialement fixée à l'audience collégiale du 12 novembre 2024 devant la cour autrement composée, l'affaire a été mise en délibéré au 4 février 2025. A cette date, à la suite du départ en retraite du président de la chambre, les débats ont été rouverts par mention au dossier et l'affaire de nouveau fixée à l'audience du 24 avril 2025 tenue par le magistrat rapporteur. A l'issue de cette audience le délibéré a été fixé au 8 juillet 2025 et prorogé au 16 septembre 2025.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la responsabilité de la SARL [Adresse 13] :
M. [Y] [T] forme appel du jugement déféré en ce qu'il a retenu la responsabilité contractuelle de la SARL Espace Motoculture [T] (ci-après dénommée SARL [T]).
Il affirme que le rapport d'expertise ne permet pas de déterminer le lien de causalité entre les travaux réalisés et les désordres constatés, et fait grief aux premiers juges d'avoir retenu la responsabilité de l'installateur au seul motif que celui-ci, lors de l'installation, ne justifiait pas avoir procédé à des tests de pression.
M. [T] fait valoir que l'expert judiciaire a émis trois hypothèses pour expliquer les désordres.
La première était un décollement du revêtement intérieur de la citerne. De ce chef, M. [T] relève que la SAS Thermor Pacific n'a jamais produit la fiche de production de la citerne qui aurait permis de préciser les conditions de fabrication de la cuve.
La deuxième hypothèse émise par l'expert était celle d'un problème de transport de la citerne, de sorte que, selon M. [T], c'est la responsabilité de la SAS Etablissement Maillard qui serait engagée puisque c'est elle qui a assuré la livraison de la cuve.
Enfin, la troisième hypothèse de l'expert était celle d'un problème de surpression. Pourtant, M. [T] soutient que la SARL [Adresse 13] a bien procédé à des tests de pression lors de l'installation de la citerne.
Il souligne également que l'expert n'a jamais indiqué que la pose d'une soupape de dimension différente de celle préconisée aurait eu une incidence dans le phénomène de surpression qu'il envisageait.
M. [T] précise par ailleurs que la SARL Espace Motoculture [T] n'a pas elle-même choisi le modèle de citerne, mais qu'elle a pour cela sollicité la SAS Etablissement Maillard, de sorte que sa responsabilité ne peut être retenue à ce titre.
M. [T] considère donc que la responsabilité de la SARL [Adresse 13] ne pouvait être retenue par les premiers juges, alors que l'expert faisait état de plusieurs causes possibles à l'origine du désordre, sans que ne puisse être établi un lien de causalité direct entre l'intervention du poseur et les dommages.
Il rappelle que le GAEC de [Adresse 18] avait également présenté des demandes de garantie à l'encontre du constructeur et du vendeur de matériel dans le cas où un défaut de fabrication aurait été retenu.
Le GAEC de [Adresse 18] sollicite que soit confirmée la responsabilité de la SARL [Adresse 13].
Il rappelle que l'expertise judiciaire a établi de manière incontestable que la présence de fer dans l'eau au sortir du chauffe-eau s'expliquait par la dégradation du revêtement minéral qui habillait l'intérieur de la cuve.
Le GAEC de [Adresse 18] constate par ailleurs que l'expert conclut en indiquant que l'installation du chauffe-eau réalisée par la SARL [Adresse 13] n'est ni conforme aux recommandations du constructeur, ni aux règles de l'art.
A ce titre, il estime donc que la responsabilité contractuelle de la SARL Espace Motoculture [T] est engagée, sur le fondement de l'article 1147 du Code civil (dans son ancienne rédaction), du fait d'un manquement à son obligation de résultat.
Pour retenir la responsabilité contractuelle de la SARL [Adresse 13], les premiers juges ont estimé que celle-ci engageait sa responsabilité contractuelle dès lors qu'il avait été établi par l'expertise judiciaire que l'installation réalisée par le professionnel n'était ni conforme aux recommandations du constructeur ni aux règles de l'art, et que l'installateur n'avait pas justifié des essais de pression que les normes imposent, ni des vérifications mensuelles des organes de sécurité du chauffe-eau préconisées par le constructeur.
Le tribunal a estimé démontré le lien de causalité entre l'oxydation de l'eau et la coloration de la viande, et ainsi établie la cause du préjudice de perte de marge et d'allongement de la période d'engraissement, et donc de la perte d'exploitation.
Si le GAEC de [Adresse 18] fonde son action en garantie à l'encontre de la SARL [T] sur la responsabilité contractuelle de droit commun, et que les premiers juges n'ont examiné que ce fondement, il apparaît toutefois que le GAEC invoque en parallèle le caractère décennal des désordres pour obtenir la garantie des sociétés MMA IARD, assureurs de responsabilité décennale de la SARL [T].
Il convient de rappeler que, de jurisprudence constante, les dommages qui relèvent d'une garantie légale ne peuvent donner lieu, contre les personnes tenues de cette garantie, à une action en réparation sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun.
A ce titre, les juges doivent rechercher, au besoin d'office, si l'action, exercée postérieurement à la réception de l'ouvrage, en réparation de désordres rendant l'ouvrage impropre à sa destination, n'est pas fondée sur l'article 1792 du Code civil.
La question de la nature décennale des désordres est au cas présent dans les débats, dès lors que le GAEC oppose ce fondement à l'assureur.
Aussi, il appartient à la cour d'examiner en premier lieu la responsabilité de la SARL [T] sous l'angle de la responsabilité décennale, avant d'envisager au besoin si sa responsabilité de droit commun peut être recherchée.
Sur la nature décennale des désordres :
En application de l'article 1792 du Code civil, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
La mise en 'uvre de la garantie légale décennale impose que soit constaté que le désordre affecte un ouvrage ou l'un de ses éléments d'équipement, et que ce désordre rende l'ouvrage impropre à sa destination.
L'article 1792-2 précise que la présomption de responsabilité établie par l'article 1792 s'étend également aux dommages qui affectent la solidité des éléments d'équipement d'un ouvrage, mais seulement lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert.
Un élément d'équipement est considéré comme formant indissociablement corps avec l'un des ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage.
M. [T] fait valoir que sa société a procédé à l'installation dans les locaux du GAEC de [Adresse 18] d'un système de production d'eau chaude comportant une chaudière et un ballon de 3 000 litres reliés par des canalisations souterraines dans plusieurs bâtiments de l'exploitation.
Ces caractéristiques font selon lui de l'installation un élément d'équipement indissociable des bâtiments, et permet de retenir la qualification d'ouvrage au sens de l'article 1792-6 du Code civil.
M. [T] rappelle également que cet ouvrage a fait l'objet d'une réception, et que le désordre apparu dans la citerne a eu pour effet de rendre l'installation impropre à sa destination.
Dès lors, M. [T] soutient que le désordre présente un caractère décennal.
Le GAEC de [Localité 19] invoque le caractère décennal du dommage qu'il subit, considérant que le chauffe-eau et la citerne ne sont pas de simples éléments d'équipement dissociables, mais doivent être considérés comme des ouvrages. Il se prévaut pour cela de l'importance des travaux réalisés.
Il souligne aussi que l'ouvrage a été réceptionné et le prix intégralement réglé, et que le désordre survenu dans la citerne rend l'installation impropre à sa destination, ce qui permet de mobiliser la garantie décennale.
Les MMA IARD contestent la qualification d'ouvrage des travaux réalisés par la SARL [T] au profit du GAEC de [Adresse 18]. Elles soulignent que la prestation fournie n'a consisté qu'à installer des éléments d'équipements dissociables tels qu'une cuve et un ballon d'eau chaude, sans que l'existence de canalisations souterraines ne permette d'entraîner la qualification d'ouvrage pour l'installation.
De plus, elles invoquent les dispositions de l'article 1792-7 qui excluent de la garantie décennale les éléments d'équipement exclusivement à usage professionnel, ce qui est le cas de l'installation en cause.
Il peut être admis en l'espèce, même en l'absence d'un procès-verbal de réception, que les travaux réalisés par la SARL [T] au profit du GAEC de [Adresse 18] ont fait l'objet d'une réception, dès lors que les travaux achevés en avril 2008 ont été intégralement réglés et que le GAEC en a pris possession sans aucune réserve dès cette date.
De même, il n'est pas contestable que le désordre affectant le ballon d'eau chaude posé par la SARL [T] a eu pour effet de rendre le ballon et l'installation d'eau chaude à laquelle il était relié impropre à son usage, la présence d'une grande concentration de fer dans l'eau étant incompatible avec les exigences d'un élevage de veaux de boucherie qui impose de limiter les apports en fer.
La qualification d'ouvrage des travaux réalisés est en revanche discutée par les parties.
La jurisprudence a été amenée à préciser la définition qu'il convenait de donner à la notion d'ouvrage. Elle a ainsi pu indiquer qu'un ouvrage au sens de l'article 1792 n'est pas nécessairement un bâtiment, et retenir pour critères de définition de l'ouvrage l'implantation au sol de la réalisation, ou la construction d'un ensemble (dans son intégralité ou par adjonction à l'existant).
Par ailleurs, il a été jugé que les désordres affectant un élément d'équipement adjoint à l'existant et rendant l'ouvrage impropre à sa destination ne relevaient de la responsabilité décennale des constructeurs que lorsqu'ils trouvaient leur siège dans un élément d'équipement au sens de l'article 1792-3 du Code civil, c'est-à-dire un élément destiné à fonctionner.
Récemment, la Cour de cassation a modifié son analyse pour considérer que si les éléments d'équipement installés en remplacement ou par adjonction sur un ouvrage existant ne constituent pas en eux-mêmes un ouvrage, ils ne relèvent ni de la garantie décennale ni de la garantie biennale de bon fonctionnement, quel que soit le degré de gravité des désordres, mais de la responsabilité contractuelle de droit commun, non soumise à l'assurance obligatoire des constructeurs.
Dans le cas d'espèce, il ressort de la facture établie le 31 mars 2008 par la SARL [T] que celle-ci a réalisé des travaux « d'équipement de production d'eau chaude, montage et raccordement », comprenant la fourniture et la pose d'un ballon d'eau chaude avec raccordement à l'installation électrique et à l'installation de plomberie déjà en place.
En décembre 2007, la SARL [T] avait déjà procédé au remplacement de la chaudière de l'installation.
Il ressort de ces factures que, si le système de production de chauffage et d'eau chaude de l'exploitation intègre des canalisations souterraines pour relier les différents équipements de l'installation, la SARL [T] n'a pas elle-même mis en place ces canalisations.
Elle n'est en réalité intervenue que sur les équipements qui sont connectés au réseau.
Ces équipements que sont la chaudière et le ballon d'eau chaude présentent indéniablement un caractère dissociable de l'ouvrage d'ensemble qu'est l'installation de chauffage de l'exploitation.
La preuve en est que lorsque la dégradation du ballon d'eau chaude a été identifiée en 2012, la SARL [T] a pu procéder au remplacement de ce ballon sans reprendre toute l'installation.
Par conséquent, les travaux réalisés en mars 2008 par la SARL [T] ne peuvent être qualifiés d'ouvrage et le ballon d'eau chaude, qui est un élément d'équipement dissociable de l'ouvrage, ne peut se voir appliquer le régime de garantie bienno-décennale prévu par les articles 1792 et suivants.
Dès lors, la responsabilité de la SARL [T] ne peut être recherchée sur ce fondement.
Sur la responsabilité contractuelle de droit commun :
Aux termes de l'article 1134 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, applicable au présent litige, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Elles doivent être exécutées de bonne foi.
L'article 1147 prévoit que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
En exécution de ces textes, quelle que soit la qualification du contrat, tout professionnel de la construction est tenu, avant réception, d'une obligation de conseil et de résultat envers le maître de l'ouvrage.
Cette obligation de résultat se définit pour le professionnel comme l'obligation de livrer des travaux conformes à la destination convenue, exécutés en respectant les règles de l'art et les normes en vigueur au jour de son intervention. Il ne peut s'exonérer de sa responsabilité qu'en établissant l'existence d'une cause étrangère ou d'un cas de force majeure.
Il résulte des opérations d'expertise, et sans que cela soit contesté par aucune des parties, que la dégradation de la qualité de la viande produite par le GAEC de [Adresse 18] a été causée par la présence trop importante de fer dans l'alimentation des animaux qui a causé un rougissement de la viande (critère dégradant de la viande).
Il a été établi que « l'intoxication » ferrique subie par les veaux a été générée par la dégradation de la cuve du chauffe-eau duquel était tirée l'eau servant au mélange avec la poudre de lait donnée aux animaux.
En effet, la cuve, initialement recouverte d'un film protecteur Securex, visant à isoler la cuve en acier de l'eau, a présenté un phénomène d'oxydation et de corrosion important, en suite de l'altération du revêtement Securex.
Pour expliquer la dégradation du revêtement Securex, l'expert judiciaire a émis trois hypothèses en clôture de son rapport du 4 octobre 2015.
Le Docteur [O] a en premier lieu envisagé l'hypothèse d'un défaut au sortir de l'usine du Securex, entraînant une altération anormale lors de la mise en service.
L'expert a indiqué qu'il ne lui était pas possible de trancher cette hypothèse en raison du défaut de production par le constructeur de la fiche de fabrication de la cuve. Mme [O] a cependant précisé qu'elle envisageait cette cause au regard des doutes instaurés par les constatations de l'huissier de justice mandaté le 31 mai 2012, qui a trouvé dans le fond de la cuve des débris de revêtement Securex présentant une épaisseur variable (de 1 à 8 mm), quand le constructeur indiquait que les cuves étaient enduites de deux couches uniformes de produit de 2 à 3 millimètres.
Dans un deuxième temps, l'expert judiciaire développe l'hypothèse selon laquelle le chauffe-eau aurait été endommagé durant le transport, ce qui aurait pu engendrer une dégradation de l'intégrité du Securex. Elle relève néanmoins qu'aucun bon de transport ou de livraison n'a été produit par les parties et qu'aucune trace de choc important n'est visible sur la cuve démontée.
Enfin, l'expert judiciaire expose l'hypothèse d'une surpression qui aurait endommagé le revêtement Securex. Il est rappelé que l'usage fait par le GAEC de [Localité 19] du chauffe-eau impliquait des montées en pression à répétition de la cuve (une eau montée en température à 90°C, puis un tirage de quantité importante d'eau par séries de 40 tirages dans un laps de temps de 2 heures).
Mme [O] précise que les essais de montées en pression de la cuve ont été réalisés de manière non contradictoire par la SAS Thermor Pacific.
Elle constate néanmoins que le système de sécurité monté sur le chauffe-eau par la SARL [T] n'est pas conforme aux recommandations du constructeur (une soupape de ¿ pouce au lieu de 2 soupapes de 1 pouce chacune), et que l'installateur n'a pas pu justifier des essais de pression qui auraient été réalisés au moment de la pose de la cuve. De même, l'experte souligne que les consignes de vérification mensuelle du système de sécurité n'ont pas été appliquées.
Enfin, la présence d'une vanne d'arrêt montée entre le ballon et la soupape de sécurité, en violation des recommandations du constructeur est relevée.
L'expert judiciaire conclut son rapport en exposant que « ces trois explications sont plausibles mais aucune ne peut totalement être tranchée car des pièces importantes ne sont pas accessibles » (la fiche de suivi sécurité de la cuve, le bon de réception du matériel suite à la livraison).
« Ce qui est avéré est que l'installation du chauffe-eau, à l'origine de tous les dégâts, n'est ni conforme aux recommandations du constructeur ni aux règles de l'art ».
La SARL [T] n'a pas contesté lors des opérations d'expertise que la soupape de sécurité qu'elle avait mise en place n'était pas conforme aux préconisations de montage du constructeur, par ailleurs produites lors de l'expertise.
De la même manière elle n'a pas contesté que la vanne d'arrêt mise en place entre le ballon et la soupape était contraire aux prescriptions de montage du fabricant.
En revanche, elle a affirmé avoir procédé à des essais de mise en pression de la cuve lors de la pose.
La SARL [T] a produit à l'occasion de l'instance une attestation en la forme civile rédigée par l'un de ses salariés attestant de la réalisation de ces tests, mais cette attestation se révèle insuffisante à faire la preuve de la réalité des tests exigés, et ne permet pas de connaître les résultats obtenus à l'issue de ces tests, qui pourraient certifiés que l'installation présentait un fonctionnement normal.
Les éléments retenus par l'expert judiciaire à l'encontre de la SARL [T], à savoir le non-respect des préconisations de montage du constructeur et l'absence de test de pression à la mise en place, sont constitutifs d'une faute de l'installateur dès lors qu'ils révèlent une non-conformité des travaux aux règles de l'art, et qu'ils caractérisent un manquement à l'obligation de résultat de l'installateur, défaillant à livrer un produit exempt de vices.
Ces manquements sont au surplus de nature à avoir participé à la survenance du dommage.
La SARL [T] est défaillante à faire la preuve que les désordres présentés par l'installation qu'elle a réalisée auraient pu être exclusivement provoqués par une cause étrangère à son intervention ou par un cas de force majeure.
En application du principe d'équivalence des causes, la SARL [T] doit donc être tenue pour responsable de l'intégralité des préjudices résultant des désordres affectant les travaux réalisés et sa responsabilité contractuelle doit être retenue.
Le jugement déféré sera en conséquence confirmé de ce chef.
Il sera de même confirmé en ce qu'il a constaté que, du fait de la liquidation et de la radiation de la SARL [T], aucune condamnation ne peut être prononcée à son encontre.
Sur la responsabilité des SAS Thermor Pacific et Etablissement Maillard :
Le GAEC de [Adresse 18] forme appel incident du jugement déféré en ce qu'il a rejeté ses demandes de condamnations dirigées contre la SAS Thermor Pacific et la SAS Etablissement Maillard.
Il poursuit la responsabilité du fabricant et du vendeur sur le fondement de l'article 1382 ancien du Code civil.
En réplique, la SAS Etablissement Maillard, vendeur à la SARL [T] du chauffe-eau, conteste sa responsabilité.
Elle rappelle que l'expert judiciaire a émis trois hypothèses quant aux causes de la dégradation du revêtement de la cuve du chauffe-eau.
Elle note qu'il n'a pu se prononcer définitivement sur le défaut du revêtement en sortie d'usine dans la mesure où le fabricant n'avait pas produit les fiches de suivi de fabrication.
S'agissant de la deuxième hypothèse de l'expert d'un dommage causé pendant le transport, la SAS Maillard relève que le chauffe-eau ne présentait aucune trace de chocs importants et précise qu'il n'est pas rapporté la preuve qu'elle a elle-même assuré le transport de l'appareil.
La SAS Thermor Pacific, fabricant du chauffe-eau, conclut elle aussi à la confirmation du jugement déféré et au rejet des demandes dirigées contre elle par le GAEC de [Adresse 16] [Localité 15].
Reprenant les conclusions de l'expertise judiciaire, la SAS Thermor Pacific entend préciser que les fiches de suivi de fabrication évoquées par l'expert, qu'elle n'avait pas conservées à la date où l'expertise a eu lieu, ne sont pas déterminantes en ce qu'elles n'ont pour seule finalité que de certifier que le produit qui sort d'usine est conforme aux exigences de qualité du groupe Atlantic. Pour autant, la SAS Thermor Pacific indique que par principe un produit qui sort d'usine est nécessairement conforme à ces exigences.
La SAS Thermor Pacific critique par ailleurs les constatations faites par huissier le 31 mai 2012, qui ont été commentées par l'expert judiciaire, en ce qu'elles mesuraient l'épaisseur du revêtement Securex du chauffe-eau litigieux.
La SAS Thermor Pacific affirme que cette épaisseur n'a aucune signification, dans un contexte de dégradation progressive du revêtement, et ne permettent pas de conclure à une défectuosité du produit lors de la fabrication.
Ensuite, la SAS Thermor Pacific fait valoir que l'absence de traces de choc sur la citerne ne permet pas d'exclure que celle-ci aurait pu être endommagée pendant le transport, de faibles chocs pouvant entraîner des microfissurations du revêtement Securex.
Elle conteste donc que sa responsabilité puisse être engagée d'une quelconque manière.
Pour rejeter les demandes du GAEC de [Adresse 16] [Localité 15] dirigées contre le fabricant et le vendeur du chauffe-eau, les premiers juges ont relevé que ce dernier ne motivait aucunement la responsabilité qu'il invoquait, se contentant de renvoyer aux conclusions de l'expert.
En application de l'article 1382 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance no2016-131 du 10 février 2016, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.
Il appartient au GAEC de [Adresse 18], qui recherche la responsabilité du fabricant et du vendeur, de rapporter la preuve d'une faute en lien direct avec le dommage qu'il subit.
Tout d'abord, s'agissant de la SAS Etablissement Maillard, il ne peut qu'être relevé que les conditions de livraison du chauffe-eau sont restées particulièrement floues, aucune des parties n'étant en mesure d'établir que c'est la société Maillard qui aurait assuré le transport du produit sur les lieux de l'installation.
De ce fait, aucune responsabilité ne peut être imputée à la société Maillard en raison d'une éventuelle dégradation du chauffe-eau durant le transport.
En outre, il n'a pas plus été démontré que la société Maillard aurait eu à assumer un rôle de conseil dans le choix du matériel à installer, la commande ayant été passée auprès d'elle directement par la SARL [T], sans qu'elle ait été consultée au préalable sur la conception de l'installation.
Par conséquent, aucune faute de nature extracontractuelle de la SAS Maillard à l'égard du GAEC de [Adresse 18] n'est caractérisée.
L'action en responsabilité dirigée contre elle ne peut donc qu'être rejetée.
Ensuite, à l'endroit de la SAS Thermor Pacific, l'expert judiciaire ne retient pas de manière affirmée l'existence d'un défaut de fabrication du chauffe-eau installé sur l'exploitation du GAEC de [Adresse 18], se bornant à regretter l'absence de production des fiches de fabrication, dont il n'explique pas clairement en quoi elles auraient permis de préciser l'existence d'un défaut en sortie d'usine.
En outre, la variation d'épaisseur des débris de revêtement recueillis par l'huissier de justice en mai 2012 n'apparaît pas probante pour établir que la fabrication de la cuve aurait été défectueuse.
En conséquence, aucune faute du fabricant n'étant établie, sa responsabilité ne pourra être retenue.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes du GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] dirigées contre la SAS Thermor Pacific et la SAS Etablissement Maillard.
Sur les demandes indemnitaires du GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] :
Les indemnisations octroyées au GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] par les premiers juges sont critiquées par l'ensemble des parties.
Le GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] sollicite la confirmation de l'indemnisation qui lui a été octroyée à hauteur de 333 674 euros au titre de la perte d'exploitation entre 2011 et 2013, mais sollicite également l'octroi d'une somme de 100 000 euros au titre de la perte d'image.
Il expose que l'intoxication au fer des veaux destinés à la boucherie qu'il élève a été la cause d'un changement de teinte de la viande vendue, devenue plus rouge, ce qui a entraîné un déclassement de son produit, mais également un retard de croissance des animaux.
Le GAEC de [Adresse 18] précise que, du fait du déclassement de la viande qu'il produisait, il a été contraint de modifier son circuit de commercialisation. Alors qu'auparavant il vendait sa viande aux abattoirs, il a dû passer par des grossistes, ce circuit provoquant une perte de marge à son préjudice.
Le GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] fait valoir que ses préjudices ont été chiffrés dans le cadre de l'expertise judiciaire, par l'intervention d'un sapiteur.
M. [T] conteste pour sa part la réalité du préjudice de perte d'image invoqué par le GAEC de [Adresse 18].
Enfin, les sociétés MMA concluent que les préjudices du GAEC ont été surestimés, puisqu'il n'a pas été tenu compte des ventes réalisées sur la période malgré le déclassement de la viande. Elles considèrent également que les demandes présentées par le GAEC au titre de la perte d'image ont déjà été indemnisées au titre de l'allongement de la durée de croissance.
Dans le cadre de l'expertise judiciaire, il a été fait appel à un sapiteur expert-comptable pour chiffrer les préjudices subis par le GAEC de [Adresse 18] en suite du déclassement de sa viande.
M. [V] a ainsi chiffré une perte de marge de 225 991 euros pour la période de 2011 à 2013, et un allongement du temps de croissance de 77 683 euros pour la même période, soit un préjudice total de 333 674 euros.
Pour parvenir à ces résultats, il a tenu compte du prix de revente de la viande effectivement obtenu par le GAEC, du coût exposé pour l'achat des animaux et de leur alimentation et des frais d'élevage pour calculer la marge réalisée par l'exploitant.
Pour calculer l'allongement du temps de croissance, l'expert a tenu compte du surcoût en alimentation généré par l'allongement de la durée d'engraissement des veaux avant de pouvoir les vendre.
L'expert n'a en revanche pas retenu de préjudice distinct au titre de la surmortalité un temps évoquée par le GAEC.
Les parties critiquent aujourd'hui ces résultats. Pour autant la méthodologie de calcul de l'expert a été discutée préalablement avec les parties durant l'expertise, et aucune étude n'est produite en contradiction pour remettre en cause ses conclusions.
Au regard de l'expertise réalisée, et des explications étayées qui la fondent, le préjudice du GAEC de la [Adresse 14] peut donc être fixé à la somme totale de 333 674 euros, se décomposant en 255 991 euros de perte de marge et 77 683 euros d'allongement de la durée de croissance.
Le GAEC de [Adresse 18] revendique par ailleurs un préjudice résultant de la dégradation de son image, qui l'a empêché de vendre sa viande aux abattoirs.
Toutefois, il ne fournit aucun élément permettant de chiffrer ce préjudice. En outre le calcul réalisé par l'expert au titre de l'allongement du temps de croissance tient compte du fait que le GAEC a connu plus de difficultés à vendre sa viande aux abattoirs, ce qui intègre donc pour partie le préjudice d'image allégué.
La demande de ce chef sera donc rejetée.
Sur la responsabilité personnelle de M. [Y] [T] :
M. [T] forme appel du jugement déféré en ce qu'il a retenu sa responsabilité personnelle, en qualité de liquidateur amiable de la SARL [Adresse 13].
Il soutient que pour pouvoir retenir sa responsabilité personnelle, le GAEC de [Adresse 18] devrait démontrer le principe d'une créance envers la SARL [Adresse 13].
Selon M. [T], le GAEC aurait dû saisir pour cela le tribunal de commerce pour voir désigner un mandataire ad'hoc à la SARL quand il a appris sa radiation, et voir ainsi reconnaître sa créance.
De plus, M. [T] affirme qu'il n'a pas mentionné l'existence de ce contentieux lors de la liquidation de la SARL, estimant qu'il était garanti par l'assureur.
En outre, M. [T] prétend que sa responsabilité personnelle ne pourrait être retenue pour l'entier préjudice du GAEC de [Adresse 18].
Sa responsabilité devrait être limitée au préjudice subi par le GAEC déduction faite des éventuelles indemnisations versées par l'assureur MMA IARD, ou subsidiairement à la perte de chance d'être indemnisé dans le cadre de la procédure de liquidation, qu'il estime à un dixième du préjudice revendiqué.
Le GAEC de [Adresse 18] conclut à la confirmation du jugement déféré qui a retenu la responsabilité personnelle de M. [T].
Il rappelle que la SARL [Adresse 12] [T] a fait l'objet d'une dissolution après liquidation amiable et que la clôture des opérations de liquidation a été prononcée le 26 juillet 2018 par M. [Y] [T], liquidateur amiable, donnant lieu à la radiation de la société. Le GAEC souligne qu'aucune des parties à la présente instance n'a été avisée de cette liquidation amiable, alors même que les procédures judiciaires étaient déjà engagées.
Le GAEC de [Adresse 18] affirme qu'il était de la responsabilité de M. [T], en qualité de liquidateur amiable de la SARL, d'informer ses créanciers des opérations de liquidation et de régler les créances dues avec l'actif disponible ou de provisionner les sommes nécessaires.
Le GAEC soutient qu'il ne lui appartenait pas de saisir le tribunal de commerce pour voir désigner un mandataire ad'hoc, d'autant plus que la SARL avait déjà été liquidée quand il a appris la situation, et qu'il n'existait donc plus aucun actif à distribuer aux créanciers.
Le GAEC de [Adresse 18] reproche donc à M. [T] d'avoir commis une faute engageant sa responsabilité personnelle en ne provisionnant pas les sommes nécessaires au paiement de la créance et en clôturant les opérations de liquidation malgré l'action en justice en cours.
Du fait de cette faute, le GAEC de [Adresse 18] considère que M. [T] est tenu personnellement d'indemniser le créancier de la totalité de ses préjudices, à hauteur des condamnations qui auraient dû intervenir à l'encontre de la société liquidée.
Le GAEC conteste que son indemnisation puisse être limitée à une perte de chance, d'autant que M. [T] n'apporte aucun élément qui permettrait de considérer que les actifs liquidés de la SARL [Adresse 12] [T] n'auraient pas permis de régler les condamnations prononcées.
Il indique au contraire avoir obtenu quelques éléments de comptabilité de la SARL, et notamment les comptes de clôture de la liquidation, faisant ressortir que la société disposait de fonds.
Ainsi, le GAEC de [Adresse 18] sollicite la condamnation de M. [T], à titre personnel, à lui régler la somme de 333 674 euros correspondant à la perte de marge, outre 100 000 euros au titre du préjudice de perte d'image.
Il sollicite au surplus la condamnation de M. [T] à lui payer une somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts complémentaires du fait des conséquences de ses agissements fautifs et du préjudice moral causé au GAEC.
Aux termes de l'article L237-12 du code de commerce, le liquidateur est responsable, à l'égard tant de la société que des tiers, des conséquences dommageables des fautes par lui commises dans l'exercice de ses fonctions.
La responsabilité personnelle du liquidateur s'entend, à l'égard des tiers, de toute faute qui prive ces derniers d'exercer un droit ou de recouvrer une créance qu'ils auraient détenus à l'égard de la société que le liquidateur représente.
Il n'est pas contesté que M. [Y] [T] a assumé les fonctions de gérant puis de liquidateur amiable de la SARL [T].
Il ressort des extraits K-bis produits par les parties que la dissolution amiable de la SARL [T] a été prononcée le 28 juin 2014, soit postérieurement aux premières contestations élevées par le GAEC de [Adresse 18] quant au bon fonctionnement de l'installation réalisée par l'entreprise.
La clôture de la liquidation amiable et la radiation de la société ont été prononcées le 26 juillet 2018.
M. [T] ne justifie pas, et ne prétend pas même, qu'il aurait informé ses créanciers, et plus particulièrement le GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] de l'ouverture des opérations de liquidation amiable de la SARL [T].
Il est de même constant que M. [T] n'a pas pris le soin de consigner les sommes nécessaires à l'éventuelle indemnisation du GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] dans le cadre de l'instance engagée par ce dernier, et ce alors que le rapport d'expertise avait été déposé en octobre 2015 et l'assignation au fond délivrée en janvier 2016, ces documents chiffrant les demandes présentées par le GAEC.
En agissant de la sorte, M. [Y] [T] a incontestablement porté atteinte aux droits de ses créanciers et commis une faute engageant sa responsabilité personnelle à l'égard du GAEC de [Adresse 18] qu'il a privé de tout recours à l'encontre de la personne morale dont la responsabilité contractuelle est consacrée.
En outre, il convient de rappeler que la responsabilité personnelle du liquidateur est indépendante de l'existence d'une créance au passif de la société en liquidation, de sorte que M. [T] n'est pas fondé à opposer au GAEC l'absence de déclaration de sa créance au passif de la société ou bien le défaut d'action à l'encontre de la personne morale.
En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a retenu la responsabilité personnelle de M. [T].
Toutefois, il est admis que le préjudice qui découle de la faute éventuellement commise par le liquidateur amiable s'analyse en une perte de chance.
Le GAEC n'est donc pas fondé à solliciter la condamnation de M. [T] à l'indemniser de l'intégralité de son préjudice.
Au regard des éléments comptables versés à la procédure, qui ne démontrent pas que la SARL [T] aurait pu disposer de l'intégralité des fonds nécessaires à l'indemnisation du GAEC de [Adresse 18], la perte de chance subie par le GAEC de pouvoir recouvrer sa créance sera évaluée à 40%.
Dès lors, M. [Y] [T] est condamné à payer au GAEC de [Adresse 16] [Adresse 14] la somme de 133 469,60 euros, après infirmation du jugement déféré quant au quantum des condamnations prononcées.
En revanche, le GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] ne fait pas la démonstration du préjudice moral qu'il invoque et qui résulterait de la faute personnelle de M. [T].
Il sera donc débouté de sa demande indemnitaire de ce chef.
Sur la garantie des SA MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles :
M. [T] forme appel des dispositions du jugement déféré qui ont rejeté l'appel en garantie formé par la SARL [Adresse 13] contre son assureur, la SA MMA.
Il soutient que la garantie des MMA IARD peut être mobilisée sur le fondement de la responsabilité civile professionnelle.
Le GAEC de [Adresse 18] conclut également à la mobilisation de la garantie de l'assureur.
Il fait valoir qu'il bénéficie d'une action directe à l'égard des sociétés MMA IARD.
Le GAEC de [Adresse 18] invoque la garantie de l'assureur au titre de la responsabilité civile professionnelle de la SARL [Adresse 13], et conteste que l'exclusion invoquée par les sociétés MMA IARD trouve à s'appliquer, alors que le dommage est causé par le bien fourni par l'assuré, et non subi par le bien fourni.
En réplique, les MMA IARD concluent au rejet des demandes de garanties dirigées contre elles.
Les MMA dénient leur garantie au titre de la responsabilité civile professionnelle, invoquant l'article 32 point 16 de la convention spéciale n°971 e) qui exclut de la garantie les dommages subis par les biens fournis par l'assuré dans le cadre d'un marché.
En tout état de cause, les MMA rappellent que M. [T] n'était pas assuré à titre personnel auprès de leur compagnie, et qu'il ne peut donc revendiquer aucune garantie du chef des condamnations prononcées à son encontre.
En application de l'article L124-3 du code des assurances, le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.
Le GAEC de [Adresse 18] est donc recevable à agir directement contre les MMA IARD, assureur de la SARL [T] dont la responsabilité contractuelle a été retenue.
Le GAEC entend voir mobiliser la garantie responsabilité civile professionnelle de la société.
Il n'est pas contesté que, à la date de la réalisation des travaux et de la réclamation formée par le GAEC de [Localité 17] [Adresse 14], la SARL [T] était assurée auprès des SA MMA IARD, tant au titre de sa responsabilité décennale que de sa responsabilité civile professionnelle.
Les conditions particulières du contrat d'assurance souscrit par la SARL [T] renvoient, s'agissant de la responsabilité civile de l'entreprise, aux conventions spéciales n°971 titre II.
Les conventions spéciales n°971 e) produites par les MMA précisent que la garantie de la responsabilité civile professionnelle accordée porte sur « les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile qui peut lui [l'assuré] incomber en raison :
Des dommages corporels,
Des dommages matériels,
Des dommages immatériels consécutifs à des dommages corporels et matériels garantis,
Subis par autrui et imputables à son activité professionnelle.
Sont exclus de la garantie, outre les exclusions de l'article 32 :
Les dommages subis par les existants et les biens confiés sous réserve de l'article 22,
Les dommages subis par les avoisinants, sous réserve de l'article 23 ».
Les MMA se prévalent de l'exclusion de garantie libellée à l'article 32-16-b), à savoir « les dommages subis par les biens fournis par l'assuré dans le cadre d'un même marché ».
Dans le cas d'espèce, le chauffe-eau installé par la SARL [T] sur l'exploitation du GAEC de [Adresse 18] doit être regardé comme un bien fourni par l'assuré dans la mesure où la SARL [T] a directement passé la commande du matériel auprès de la société Maillard avant d'en assurer la pose.
D'ailleurs, la SARL [T] a facturé la fourniture du chauffe-eau au GAEC de [Localité 17] [Adresse 14].
Toutefois, la lecture intégrale de la clause permet de comprendre que l'assureur a entendu exclure sa garantie s'agissant de la réparation des dommages affectant directement les biens fournis par l'assuré et qui nécessiteraient des réparations.
Cette clause n'apparaît donc pas applicable en l'espèce, les dommages dont il est demandé l'indemnisation étant des dommages immatériels résultant de la défaillance du chauffe-eau en question.
En revanche, l'article 32-19 de ces mêmes conditions spéciales prévoit l'exclusion de la garantie de l'assureur pour les dommages résultant :
De réclamations fondées sur le fait que les produits, marchandises ou matériels livrés ou les ouvrages et travaux exécutés ne remplissent pas les fonctions ou ne satisfont pas les besoins auxquels ils sont destinés,
De la non-conformité aux obligations contractuelles.
L'article 32-5 b) prévoit également l'exclusion de garantie des dommages résultant de l'inobservation volontaire ou inexcusable des règles de l'art telles qu'elles sont définies par les réglementations en vigueur, les documents techniques unifiés ou les normes établies par les organismes compétents à caractère officiel ou dans le marché des travaux concerné quand cette inobservation est imputable à l'assuré.
Or, la responsabilité de la SARL [T] a été retenue tant du fait de manquements aux règles de l'art que du fait de non-conformité aux obligations contractuelles.
Les MMA IARD sont par conséquent légitimes à opposer leur exclusion de garantie aux demandes de condamnation formées à leur encontre par le GAEC de [Adresse 18], sur la base de ces deux derniers articles.
Enfin, aucune garantie n'est due par les MMA IARD du chef de la faute personnelle de M. [Y] [T], qui n'était pas assuré à titre personnel auprès de cet assureur.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a débouté le GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] de ses demandes dirigées contre les SA MMA IARD.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Le jugement déféré étant confirmé s'agissant des responsabilités retenues, il sera également confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
L'équité ne justifie pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou de l'autre des parties à hauteur d'appel.
M. [Y] [T], qui succombe à l'instance, sera condamné aux dépens d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile au profit des conseils en ayant fait la demande.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, dans les limites de sa saisine, par décision contradictoire, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement prononcé le 18 novembre 2021 par le tribunal judiciaire de Coutances, sauf en ce qu'il a condamné M. [Y] [T] à indemniser le GAEC de [Adresse 18] pour la somme de 334 674 euros au titre de sa perte d'exploitation,
Infirme le jugement prononcé de ce seul chef,
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
Condamne M. [Y] [T] à indemniser le GAEC de [Localité 17] [Adresse 14] de la somme de 133 469,60 euros au titre de la perte d'exploitation,
Déboute les parties de toutes autres demandes,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou l'autre des parties à hauteur d'appel,
Condamne M. [Y] [T] aux entiers dépens d'appel avec application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile au profit des conseils en ayant fait la demande.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
N. LE GALL Hélène BARTHE-NARI