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Décisions

CA Paris, Pôle 4 - ch. 5, 15 octobre 2025, n° 22/13501

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 22/13501

15 octobre 2025

RÉPUBLIQUE FRAN'AISE

AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2025

(n° /2025, 19 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/13501 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGGFE

Décision déférée à la Cour : jugement du 10 juin 2022 - tribunal judiciaire d'EVRY- RG n° 22/134

APPELANTS

Monsieur [F] [C] [V] [E]

[Adresse 2]

[Localité 10]

Représenté par Me Béatrice IRLANDE, avocat au barreau de PARIS, toque : E0100

Ayant pour avocat plaidant Me Stéphanie MANRY, avocat au barreau de CUSSET-VICHY, substituée à l'audience par Me Reda KOHEN, avocat au barreau de PARIS.

Madame [H] [X] [U] épouse [E]

[Adresse 2]

[Localité 10]

Représenté par Me Béatrice IRLANDE, avocat au barreau de PARIS, toque : E0100

Ayant pour avocat plaidant Me Stéphanie MANRY, avocat au barreau de CUSSET-VICHY, substituée à l'audience par Me Reda KOHEN, avocat au barreau de PARIS.

INTIMÉS

Monsieur [G] [W]

[Adresse 5]

[Localité 8]

Représenté par Me Ahmed ANTRI-BOUZAR de la SELEURL DEXTERIA AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : E1477

Madame [L] [P] épouse [W]

[Adresse 5]

[Localité 8]

Représentée par Me Ahmed ANTRI-BOUZAR de la SELEURL DEXTERIA AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : E1477

S.C.O.P.S.A. CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représentée par Me Bertrand CHAMBREUIL, avocat au barreau de PARIS, toque : B0230, substitué à l'audience par Me Emmanuelle LECRENAIS, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 09 septembre 2025, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Ludovic JARIEL, président de chambre

Mme Emmanuelle BOUTIE, conseillère

Mme Viviane SZLAMOVICZ, conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Ludovic JARIEL dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Mme Tiffany CASCIOLI

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Ludovic JARIEL, président de chambre et par Tiffany CASCIOLI, greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Par acte sous seing privé du 6 juin 2017, M. et Mme [W] ont conclu un marché de travaux portant sur la construction d'une " maison toiture, terrasse " avec la SAS DF ingénierie (la société DF ingénierie), représentée par son président, M. [E], moyennant le paiement d'un prix de 140 440 euros TTC. Audit contrat, il est mentionné que la maîtrise d''uvre d'exécution sera assurée par M. [E].

Par acte sous seing privé du même jour, M. et Mme [W] ont conclu un contrat de marché de travaux portant sur le seul lot " menuiseries extérieures " avec la SAS DN TCE ingénierie (la société DN TCE ingénierie), représentée par son président, M. [E], moyennant un prix de 19 560 euros TTC.

Par arrêté du 4 juillet 2017, la commune de [Localité 14] (95) a accordé à M. et Mme [W] un permis de construire portant sur la construction d'une maison individuelle sur un terrain sis [Adresse 4].

Le 1er août 2017, Mme [E] a été nommée en qualité de président de la société DF ingénierie en remplacement de M. [E].

Le 6 octobre 2017, M. et Mme [W] ont souscrit, auprès de la société Caisse d'épargne de prévoyance d'Ile-de-France (la Caisse d'épargne), un prêt d'un montant de 172 200 euros au taux fixe de 1,55 % l'an et un prêt PTZ de 120 000 euros destinés à financer l'acquisition du terrain et la construction de la maison.

Le 23 octobre 2017, la société DF ingénierie a émis une facture, au titre d'un acompte à la commande pour le marché de travaux hors lot " menuiseries extérieures ", s'élevant à la somme de 8 894 euros, et faisant état du paiement par chèque, le 22 septembre 2016, d'un précédent appel de fonds de 6 000 euros.

Le 31 octobre 2017, la société DF ingénierie a établi une facture de 29 788 euros TTC, correspondant à 20 % du marché de travaux hors lot " menuiseries extérieures " au stade " structures planchers [16] ", s'élevant à la somme de 29 788 euros TTC.

Par acte authentique du 16 novembre 2017, M. et Mme [W] ont acquis le terrain à bâtir moyennant un prix de 148 500 euros.

Le 27 novembre 2017, M. et Mme [W] ont effectué une déclaration d'ouverture de chantier auprès de la mairie.

Le 28 novembre 2017, la société DF ingénierie a établi une facture de 5 868 euros TTC correspondant à un acompte à la commande de 30 % au titre du marché de travaux portant sur le lot " menuiseries extérieures ".

Selon contrat du 10 décembre 2017, la société DF ingénierie, représentée par Mme [E], s'est substituée, pour la réalisation du lot " menuiseries extérieures ", à la société DN TCE ingénierie, qui sera placée en liquidation judiciaire par jugement du 22 janvier 2018.

Par avenant établi les 25 avril et 15 mai 2018 au marché de travaux, n'incluant pas le lot menuiseries extérieures, son montant a été porté à la somme de 148 939,99 euros.

Le 29 juin 2018, M. et Mme [W] ont effectué une nouvelle déclaration d'ouverture de chantier auprès de la mairie, remplaçant et annulant la précédente, aux termes de laquelle ils déclaraient une ouverture au 1er juin 2018.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 11 octobre 2018, M. et Mme [W], estimant que l'ensemble des contrats signés avec la société DF ingénierie était nul en l'absence de respect des dispositions d'ordre public relatives aux contrats de construction de maison individuelle avec fourniture de plan, ont mis en demeure cette société de leur restituer l'intégralité des fonds versés en exécution des marchés dans un délai de 8 jours et de leur payer une somme de 30 000 euros au titre des préjudices déjà constitués.

Par jugement du tribunal de commerce d'Evry du 26 novembre 2018, la société DF ingénierie, après l'avoir été en redressement le 17 septembre de la même année, a été placée en liquidation judiciaire et Mme [M] a été désignée en qualité de liquidateur judiciaire.

Par actes en dates des 7 décembre 2018, 2 et 3 janvier 2019, M. et Mme [W] ont assigné M. et Mme [E], la Caisse d'épargne et Mme [M], ès qualités, en requalification des contrats conclus avec la société DF ingénierie en contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan, en résolution judiciaire du contrat aux torts exclusifs de la société DF ingénierie et en réparation de leurs préjudices.

Par jugement du 10 juin 2022, le tribunal judiciaire d'Evry a statué en ces termes :

Déclare irrecevables les demandes en paiement des sommes de 44 682 euros et 30 000 euros formées par M. et Mme [W] à l'encontre de la société DF ingénierie ;

Requalifie le contrat de "marché de travaux construction d'une maison, portant sur la construction d'une maison toiture, terrasse RDC/R+1 de 107mª + cellier de 18m sur la base du devis n° 2017.06.163 du 6 juin 2017 modifié les 25 avril 2018 (contrat n° 2018-04.213) et 15 mai 2018 (avenant du contrat n° 2017.06.163) ainsi que le contrat de "marché de travaux lot menuiseries extérieures" du 6 juin 2017 modifie le 10 décembre 2017 (contrat n° 2017.12.188 bis) conclus entre M. et Mme [W] et la société DF ingénierie en contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plans soumis aux dispositions d'ordre public des articles L. 231-1 et suivants du code de ta construction et de l'habitation ;

Prononce la nullité du contrat de construction de maison individuelle conclu entre les parties ;

Condamne in solidum M. et Mme [E] à payer à M. et Mme [W] la somme de 49 682 euros à titre de dommages et intérêts ;

Ordonne avant-dire droit sur l'évaluation du préjudice relatif au surcoût de l'opération consécutif à la remise en état des lieux, une expertise judiciaire ;

Désigne à cet effet :

Monsieur [I] [O]

[Adresse 6]

[Localité 9]

Tel: [XXXXXXXX01]

Fax: 09.72.56.17.44

Port.: 06.59.61.87.63

Email : [Courriel 12]

avec pour mission de :

- décrire les travaux réalisés par la société DF ingénierie sur le terrain sis [Adresse 15] cadastrée section Al n° [Cadastre 11] lieu-dit [Localité 13] appartenant à M. et Mme [W] ;

- préciser si la construction d'une maison individuelle va nécessiter au préalable la remise en état du terrain ou des travaux spécifiques de démolition des travaux précédemment engagés par la société DF ingénierie ;

- donner son avis sur les travaux nécessaires pour la remise en état des lieux tel que le terrain était avant la signature du contrat et leur coût à partir de devis d'entreprise produit par les parties ;

Dit que pour procéder à sa mission l'expert devra :

- convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils et recueillir leurs observations à l'occasion de l'exécution des opérations ou de la tenue des réunions d'expertise ;

- se faire remettre toutes pièces utiles à l'accomplissement de sa mission, notamment, s'il le juge utile, les pièces définissant le marché, les plans d'exécution, le dossier des ouvrages exécutes ;

- se rendre sur les lieux et si nécessaire en faire la description, au besoin en constituant un album photographique et en dressant des croquis ;

- à l'issue de la première réunion d'expertise, ou dès que cela lui semble possible, et en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations ; l'actualiser ensuite dans le meilleur délai : en faisant définir une enveloppe financière pour les investigations à réaliser, de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations ;

- en les informant de l'évolution de l'estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant de la saisine du juge du contrôle des demandes de consignation complémentaire qui s'en déduisent en fixant aux parties un délai pour procéder aux interventions forcées : en les informant, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse ;

- au terme de ses opérations, adresser aux parties un document de synthèse, sauf exception dont il s'expliquera dans son rapport (par ex : réunion de synthèse ; communication d'un projet de rapport), et y arrêter le calendrier de la phase conclusive de ses opérations ;

- fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse ;

- rappelant aux parties, au visa de l'article 276 alinéa 2 du code de procédure civile, qu'il n'est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au-delà de ce délai.

Fixe à la somme de 2 500 euros la consignation sur frais d'expertise qui devra être consignée par M. et Mme [W] auprès du greffe du tribunal judiciaire d'Evry, régie d'avances et de recettes, dans un délai de deux mois au plus tard après la date de délivrance aux parties de la présente décision ;

Dit que faute de consignation de la provision dans ce délai impératif, ou demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l'expert sera caduque et de nul effet ;

Dit que l'expert sera saisi de sa mission par l'envoi d'une copie certifiée conforme de la présente décision et ne commencera ses opérations qu'après avis de la consignation qui lui sera adressée par le greffe ;

Dit que l'expert effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 248, 263 à 284-1 du code de procédure civile et qu'il déposera l'original de son rapport, auquel sera joint, le cas échéant, l'avis du technicien qu'il s'est adjoint, sous la forme d'un exemplaire papier et numérique (clé USB) au greffe du tribunal judiciaire dans un délai de 6 mois à compter de l'avis de la consignation effectuée qui lui sera adressée par le greffe, sauf prorogation de ce délai dûment sollicitée en temps utile de manière motivée auprès du juge du contrôle ;

Dit que dans le but de favoriser l'instauration d'échanges dématérialisés et de limiter les frais d'expertise, l'expert devra privilégier l'usage de la plateforme OPALEXE et qu'il proposera en ce cas à chacune des parties, au plus tard lors de la première réunion d'expertise, de recourir à ce procédé pour communiquer tous documents et notes par la voie dématérialisée dans les conditions de l'article 748-1 du code de procédure civile et de l'arrêté du 14 juin 2017 validant de tels échanges ;

Dit que l'expert judiciaire adressera un exemplaire de son rapport à chacune des parties sous la forme papier ou numérique en fonction du choix des parties et à défaut de précision sous la forme numérique et en fera mention dans son rapport ;

Dit que l'exécution de la mesure d'instruction sera suivie par le magistrat en charge du contrôle des expertises ;

Sur les demandes formées à l'égard de la Caisse d'épargne,

Condamne la Caisse d'épargne in solidum avec M. et Mme [E] à hauteur de la somme de 33 048,60 euros ;

Dit que dans les rapports entre co-obligés, le partage de responsabilité s'effectuera de la manière suivante :

M. et Mme [E] : 80 %,

la Caisse d'épargne : 20 %

Condamne in solidum M. et Mme [E] et la Caisse d'épargne aux dépens ;

Condamne in solidum M. et Mme [E] et la Caisse d'épargne à payer à M. et Mme [W] la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge des frais irrépétibles et dépens s'effectuera de la manière suivante :

M. et Mme [E] : 80 %,

la Caisse d'épargne : 20 %,

Ordonne l'exécution provisoire ;

Ordonne le sursis à statuer sur la seule demande relative à l'appréciation du surcoût de construction lié à la remise en état du terrain ;

Renvoie le dossier à l'audience de mise en état du 8 septembre 2022 9h30 uniquement en ce qu'il a sursis à statuer sur la demande relative à l'appréciation du surcoût de construction de M. et Mme [W].

Par déclaration en date du 13 juillet 2022, M. et Mme [E] ont interjeté appel du jugement, intimant devant la cour :

- M. et Mme [W],

- la Caisse d'épargne.

Par ordonnance du 8 décembre 2022, du juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Evry a prononcé, faute de consignation, la caducité de la mesure d'expertise.

Par ordonnance du 20 juin 2023, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevable l'incident aux fins de radiation présenté par M. et Mme [W].

Par ordonnance du 4 juin 2024, le conseiller de la mise en état a enjoint aux parties de rencontrer un médiateur chargé de les informer de l'objet et du déroulement d'une mesure de médiation, dont plusieurs d'entre elles n'ont toutefois pas souhaité bénéficier.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 10 octobre 2022, M. et Mme [E] demandent à la cour de :

Réformer comme suit le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Evry le 10/06/2022 (N° RG 19/00307) ;

A titre principal, sur l'irrecevabilité des demandes de M. et Mme [W] ;

Prononcer l'irrecevabilité de l'action diligentée par M. et Mme [W] à l'encontre de M. et Mme [E] ;

Pour défaut de qualité à agir des intimés du fait du monopole d'engagement des poursuites détenu par le liquidateur judiciaire de la société DF ingénierie en application des articles L. 622-20 et L. 641-4 du code de commerce ;

Et, en conséquence,

Débouter M. et Mme [W] de l'ensemble de leurs demandes ;

A titre subsidiaire,

Débouter M. et Mme [W] de l'ensemble de leurs demandes à l'encontre de M. et Mme [E], les marchés de travaux conclus entre la société DF ingénierie et M. et Mme [W], ne relevant pas des dispositions spécifiques au contrat de construction de maison individuelle ;

A titre plus subsidiaire,

Prononcer l'irrégularité et le caractère infondé du prononcé de la nullité des marchés de travaux, non sollicitée par M. et Mme [W] en première instance, la juridiction de première instance ayant statué ultra petita sur ce point ;

Débouter M. et Mme [W] de l'ensemble de leurs demandes à l'encontre de M. et Mme [E], les griefs reprochés par M. et Mme [W] ne pouvant en tout état de cause occasionner le prononcé de la nullité des contrats de marché de travaux, à la lumière des dispositions légales et factuelles ;

A titre infiniment subsidiaire,

Débouter M. et Mme [W] de l'intégralité de leurs demandes formulées à l'encontre de M. et Mme [E], M. et Mme [W] ne rapportant pas la preuve de fautes intentionnelles, d'une particulière gravité, détachables des fonctions des dirigeants sociaux ;

A titre infiniment subsidiaire,

Débouter M. et Mme [W] de toute demande indemnitaire à l'encontre de M. et Mme [E], ces derniers ne justifiant ni des préjudices qu'ils invoquent, ni de leur quantum ; le chiffrage de l'éventuel préjudice de M. et Mme [W] découlant, le cas échéant, des suites de l'annulation du marché de travaux conclu avec la société DF ingénierie devant être imputé au coût de la construction ;

A défaut,

Condamner la Caisse d'épargne à garantir M. et Mme [E] de toute condamnation qui serait prononcée à leur encontre à hauteur de 50 % ;

Débouter la CAISSE D'EPARGNE de l'intégralité de ses demandes et prétentions et notamment de son appel incident contraires aux prétentions de M. Et Mme [E], les demandes formulées par ces derniers étant parfaitement recevables

En tout état de cause,

Débouter M. et Mme [W] et la Caisse d'épargne de l'intégralité de leurs demandes et prétentions à l'encontre de M. et Mme [E] ;

Condamner solidairement M. et Mme [W] à régler à M. et Mme [E] la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner solidairement M. et Mme [W] aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Me Irlande sur son affirmation de droit ;

Condamner Caisse d'épargne à garantir M. et Mme [E] de toute condamnation qui serait prononcée à leur encontre à hauteur de 50 % au titre des frais irrépétibles et des dépens ;

Confirmer la décision de première instance pour le surplus.

Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 23 juin 2023, M. et Mme [W] demandent à la cour de :

Déclarer M. et Mme [W] recevables et bien fondés en toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

Et ce faisant,

Débouter M. et Mme [E] de la totalité de leur demande de réformation du jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Evry ;

Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Ajoutant,

Condamner solidairement M. et Mme [E] et la Caisse d'épargne à verser M. et Mme [W] la somme de 2 000 euros en réparation du refus d'exécuter spontanément le Jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Evry en date du 22 avril 2022 ;

Condamner solidairement M. et Mme [E] et la Caisse d'épargne à payer M. et Mme [W] la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner les défendeurs aux entiers dépens dont distraction au profit du cabinet Dexteria avocats, agissant par Maître Antri Bouzar, sur le fondement de l'article 696 et suivants du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 10 juin 2025, la Caisse d'épargne demande à la cour de :

Infirmer la décision déférée en ce qu'elle a :

Requalifié les contrats modifiés de marchés de travaux du 6 juin 2017 en contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan ;

Prononcé la nullité du contrat de construction de maison individuelle conclu entre les parties ;

Ordonné avant-dire droit sur l'évaluation du préjudice relatif au surcoût de la construction du fait de sa remise en état une expertise judiciaire ;

Condamné la Caisse d'épargne in solidum avec M. et Mme [E] à payer à M. et Mme [W] la somme de 33 048,60 euros ;

Dit que dans les rapports entre co-obligés, le partage de responsabilité s'effectuera de la manière suivante :

- M. et Mme [E] : 80 %,

- La Caisse d'épargne : 20 %,

Condamné in solidum M. et Mme [E] et la Caisse d'épargne aux dépens ainsi qu'à la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge des frais irrépétibles et des dépens s'effectuera de la manière suivante :

- M. et Mme [E] : 80 %,

- La Caisse d'épargne : 20 %,

Statuant à nouveau,

A titre principal, sur la requalification des contrats,

Dire et juger que les contrats conclus le 6 juin 2017 par M. et Mme [W] avec les Sociétés DF ingénierie et DN TCE ingénierie ne peuvent être requalifiés en un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan ;

En conséquence,

Débouter M. et Mme [W] de l'intégralité de leurs demandes formées à l'encontre de la Caisse d'épargne ;

A titre subsidiaire, sur l'absence de manquement,

Dire et juger que la Caisse d'épargne n'a commis aucun manquement au regard des dispositions de l'article L. 231-10 du code de la construction et de l'habitation ;

Dire et juger que la Caisse d'épargne n'a pas manqué à son obligation de renseignement et de conseil ;

En conséquence,

Débouter M. et Mme [W] de leurs demandes formées à l'encontre de Caisse d'épargne ;

Prononcer la mise hors de cause de la Caisse d'épargne des opérations d'expertise ;

A titre encore plus subsidiaire, sur le préjudice,

Dire et juger que l'existence de la perte de chance n'est pas démontrée ;

Débouter en conséquence M. et Mme [W] de leurs demandes de condamnation formées à l'encontre de la Caisse d'épargne ;

Prononcer la mise hors de cause de la Caisse d'épargne des opérations d'expertise ;

A titre infiniment subsidiaire,

Sur l'évaluation de la perte de chance ;

Limiter la condamnation de la Caisse d'épargne à de plus justes proportions qui ne sauraient excéder 30 % ;

Sur le quantum des préjudices,

Réserver le préjudice matériel dans l'attente de l'issue des opérations d'expertise ;

Débouter M. et Mme [W] de leur demande de condamnation formée à l'encontre de la Banque au titre de leur préjudice moral ;

En toutes hypothèses,

Déclarer irrecevable la demande de M. et Mme [E] visant à voir condamner la Caisse d'épargne à les garantir des condamnations prononcées à leur encontre à hauteur de 50 % ;

En tout état de cause, les en débouter. ;

Débouter M. et Mme [W] de leur demande visant à voir condamner la Caisse d'épargne à leur payer la somme de 2 000 euros en réparation du refus d'exécuter spontanément le jugement entrepris ;

Condamner in solidum M. et Mme [E] à relever et à garantir la Caisse d'épargne de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ;

Condamner in solidum tout succombant au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 ainsi qu'aux entiers dépens qui seront recouvrés par Me Chambreuil avocat au barreau de Paris dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile ;

La clôture a été prononcée par ordonnance du 1er juillet 2025 et l'affaire a été appelée à l'audience du 9 septembre 2025, à l'issue de laquelle elle a été mise en délibéré.

MOTIVATION

Sur la recevabilité de l'action de M. et Mme [W] à l'encontre de M. et Mme [E]

Moyens des parties

M. et Mme [E] soutiennent que l'action initiée à leur encontre par M. et Mme [W] est irrecevable en raison du monopole du liquidateur pour exercer les actions dans l'intérêt de la collectivité des créanciers.

Ils précisent que M. et Mme [W] ne justifient pas d'un préjudice personnel distinct de celui des autres créanciers de la société DF ingénierie.

En réponse, M. et Mme [W] font valoir que leur action est recevable pour tendre à voir engager la responsabilité personnelle de M. et Mme [E] sur le fondement de leur faute intentionnelle, constitutive d'une infraction pénale, séparable de leurs fonctions sociales.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article L. 622-20 du code commerce, le mandataire judiciaire désigné par le tribunal a seul qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers. Toutefois, en cas de carence du mandataire judiciaire, tout créancier nommé contrôleur peut agir dans cet intérêt dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Le mandataire judiciaire a qualité pour mettre en demeure un associé ou un actionnaire de verser les sommes restant dues sur le montant des parts et actions souscrites par lui. Le mandataire judiciaire communique au juge-commissaire et au ministère public les observations qui lui sont transmises à tout moment de la procédure par les contrôleurs. Les sommes recouvrées à l'issue des actions introduites par le mandataire judiciaire ou, à défaut, par le ou les créanciers nommés contrôleurs, entrent dans le patrimoine du débiteur et sont affectées en cas de continuation de l'entreprise selon les modalités prévues pour l'apurement du passif.

Aux termes de l'article L. 641-4 du même code, le liquidateur procède aux opérations de liquidation en même temps qu'à la vérification des créances. Il peut introduire ou poursuivre les actions qui relèvent de la compétence du mandataire judiciaire. Il n'est pas procédé à la vérification des créances chirographaires s'il apparaît que le produit de la réalisation de l'actif sera entièrement absorbé par les frais de justice et les créances privilégiées, à moins que, s'agissant d'une personne morale ou d'un entrepreneur individuel à responsabilité limitée, il n'y ait lieu de mettre à la charge des dirigeants sociaux de droit ou de fait ou de cet entrepreneur tout ou partie du passif conformément à l'article L. 651-2. Lorsqu'il apparaît nécessaire de reprendre la vérification des créances, le juge-commissaire fixe pour y procéder un délai supplémentaire qui ne peut excéder six mois. La fixation de ce délai supplémentaire a les mêmes conséquences que celle du délai prévu à l'article L. 624-1. Le liquidateur exerce les missions dévolues à l'administrateur et au mandataire judiciaire par les articles L. 622-6, L. 622-20, L. 622-22, L. 622-23, L. 625-3, L. 625-4 et L. 625-8. Les licenciements auxquels procède le liquidateur en application de la décision ouvrant ou prononçant la liquidation, le cas échéant au terme du maintien provisoire de l'activité autorisé par le tribunal, sont soumis aux dispositions de l'article L. 1233-58 du code du travail. L'avis du comité social et économique est rendu au plus tard dans les douze jours de la décision prononçant la liquidation, ou, si le maintien provisoire de l'activité a été autorisé par le tribunal, dans les douze jours suivant le terme de cette autorisation. L'absence de remise du rapport de l'expert mentionné aux articles L. 1233-34, L. 1233-35, L. 2325-35 ou L. 4614-12-1 du code du travail ne peut avoir pour effet de reporter ce délai.

Il est établi que la recevabilité d'une action en responsabilité personnelle engagée par un créancier à l'encontre du dirigeant d'une société mise en procédure collective, pour des faits antérieurs au jugement d'ouverture, est subordonnée à l'allégation d'un préjudice personnel distinct de celui des autres créanciers résultant d'une faute du dirigeant séparable de ses fonctions (Com., 7 mars 2006, pourvoi n° 04-16.536, Bull. 2006, IV, n° 61 ; Com., 29 novembre 2016, pourvoi n° 14-25.904 ; Com., 16 janvier 2019, pourvoi n° 17-17.210).

Au cas présent, M. et Mme [W] fondent leur action en réparation de leurs préjudices constitués, d'une part, des sommes indûment versées par eux à la société DF ingénierie, d'autre part, de l'atteinte morale ressentie de ce fait, soit sur des préjudices distincts de celui ressenti collectivement par les créanciers, sur les fautes personnelles commises par M. et Mme [E], qu'ils disent être d'une gravité telle qu'elles sont détachables de leurs fonctions.

Par suite, ajoutant au jugement, qui n'a pas statué sur ce point dans son dispositif bien qu'il l'ait examiné dans ses motifs, l'action de M. et Mme [W] à l'encontre de M. et Mme [E] sera déclarée recevable.

Sur la qualification et la validité du lien contractuel

Moyens des parties

M. et Mme [W] soutiennent que la société DF ingénierie s'est, moyennant un prix global et forfaitaire, engagée à construire une maison individuelle sur la base des plans qu'elle avait établis, de sorte que l'opération en cause doit être qualifiée de contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan.

Ils précisent que la société DF ingénierie ne leur a pas fourni de garantie de livraison et a perçu des règlements avant l'ouverture du chantier.

Ils en infèrent que, les règles méconnues par la société DF ingénierie étant d'ordre public, le marché de travaux est frappé de nullité.

En réponse, M. et Mme [E] font valoir que la société DF ingénierie, qui n'a pas élaboré les plans, qui l'ont été par la société Home D, un de ses partenaires, est intervenue à l'opération en qualité de maître d''uvre non soumis aux dispositions des articles L. 230-1 et s. du code de la construction et de l'habitation ; les travaux étant exécutés par des entreprises tierces, la mise hors d'air relevant, notamment, la société DN TCE ingénierie. Ils en infèrent que M. et Mme [W] avaient, ainsi, la pleine maîtrise du chantier.

Ils indiquent que M. et Mme [W] ont ratifié les clauses du contrat conclu avec la société DF ingénierie par l'effet de leur exécution volontaire, de sorte que l'absence de garantie d'achèvement est inopérante pour justifier le prononcé de la nullité de la convention.

Quant à la Caisse d'épargne, elle relève que le régime du contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan n'est pas applicable au cas présent, dès lors, d'abord, que la société DF ingénierie n'était pas en charge de l'établissement des plans, qui ont été réalisés par la société Home D, ensuite, que la maîtrise d''uvre d'exécution n'a pas été attribuée à la société DF ingénierie mais à M. [E], enfin, que la mise hors d'air a été confiée à une personne morale distincte, la société DN TCE ingénierie, peu important que le président, M. [E], en soit le même.

Réponse de la cour

Selon l'article L. 230-1 du code de la construction et de l'habitation, les règles prévues au titre III intitulé " Construction d'une maison individuelle " de ce code sont d'ordre public.

Aux termes de l'article L. 231-1 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2020-71 du 29 janvier 2020, toute personne qui se charge de la construction d'un immeuble à usage d'habitation ou d'un immeuble à usage professionnel et d'habitation ne comportant pas plus de deux logements destinés au même maître de l'ouvrage d'après un plan qu'elle a proposé ou fait proposer doit conclure avec le maître de l'ouvrage un contrat soumis aux dispositions de l'article L. 231-2. Cette obligation est également imposée :

a) A toute personne qui se charge de la construction d'un tel immeuble à partir d'un plan fourni par un tiers à la suite d'un démarchage à domicile ou d'une publicité faits pour le compte de cette personne ;

b) A toute personne qui réalise une partie des travaux de construction d'un tel immeuble dès lors que le plan de celui-ci a été fourni par cette personne ou, pour son compte, au moyen des procédés visés à l'alinéa précédent.

Cette personne est dénommée constructeur au sens du présent chapitre et réputée constructeur de l'ouvrage au sens de l'article 1792-1 du code civil reproduit à l'article L. 111-14.

Aux termes de l'article L. 231-2 de ce code, dans sa rédaction issue de la loi n° 90-1129 du 19 décembre 1990, le contrat de louage d'ouvrage n'entrant pas dans le champ d'application de l'article L. 231-1 et ayant au moins pour objet l'exécution des travaux de gros 'uvre, de mise hors d'eau et hors d'air d'un immeuble à usage d'habitation ou d'un immeuble à usage professionnel et d'habitation, ne comportant pas plus de deux logements destinés au même maître de l'ouvrage, doit être rédigé par écrit et préciser :

a) La désignation du terrain ;

b) La consistance et les caractéristiques techniques de l'ouvrage à réaliser ;

c) Le prix convenu forfaitaire et définitif, sous réserve, s'il y a lieu, de sa révision dans les conditions et limites convenues, ainsi que les modalités de son règlement au fur et à mesure de l'exécution des travaux ;

d) Le délai d'exécution des travaux et les pénalités applicables en cas de retard de livraison ;

e) La référence de l'assurance de dommages souscrite par le maître de l'ouvrage en application de l'article L. 242-1 du code des assurances ;

f) L'indication que le maître de l'ouvrage pourra se faire assister par un professionnel habilité en application de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 précitée ou des articles L. 111-23 et suivants lors de la réception ou par tout autre professionnel de la construction titulaire d'un contrat d'assurance couvrant les responsabilités pour ce type de mission ;

g) L'engagement de l'entrepreneur de fournir, au plus tard à la date d'ouverture du chantier, la justification de la garantie de livraison qu'il apporte au maître de l'ouvrage, l'attestation de cette garantie étant établie par le garant et annexée au contrat.

Il est établi que ces dispositions d'ordre public n'exigent pas pour être applicables que toutes les prestations destinées à l'édification de l'ouvrage soient intégralement exécutées par le constructeur (3e Civ., 7 décembre 2005, pourvoi n° 04-14.357, Bull. 2005, III, n° 237).

Il est jugé qu'encourt la cassation l'arrêt qui, pour affirmer l'existence d'un contrat de maîtrise d''uvre, retient que la mission comportait la conception architecturale de l''uvre, la direction générale de son exécution par les entreprises et l'assistance pour la réception et le paiement des travaux, du maître de l'ouvrage qui concluait lui-même les marchés, réglait les factures et était associé au choix des entrepreneurs, sans rechercher si le maître de l'ouvrage, comme il le soutenait, n'avait aucun pouvoir ni aucune liberté de choix dans l'exécution de la construction et si son cocontractant ne se chargeait pas en définitive de l'intégralité de la construction d'une maison individuelle d'habitation (3e Civ., 31 janvier 1990, pourvoi n° 88-18.056, Bulletin 1990 III N° 33).

Au cas d'espèce, comme l'a exactement retenu le premier juge, M. et Mme [E] ont, dès avant la signature du contrat de construction avec la société DF ingénierie, versé à celle-ci, le 20 septembre 2016, la somme de 6 000 euros.

Au vu de la concomitance de l'établissement des plans de construction, en septembre 2016, il y a lieu, en l'absence de production d'un contrat passé par M. et Mme [W] avec la société Home D, de présumer que ladite somme a été versée à la société DF ingénierie, dont le sigle, le nom et le siège social figurent sur chaque page desdits plans, en rémunération de leur fourniture, de sorte que ladite société a bien proposé aux maîtres de l'ouvrage un plan de construction d'une maison individuelle au sens de l'article L. 231-1 du code de la construction et de l'habitation précité.

Aussi, en l'absence de contrat de maîtrise d''uvre conclu entre M. [E] et M. et Mme [W], la société DF ingénierie, comme l'a exactement relevé le premier juge, était chargée de cette mission dont elle avait confié, en interne, la mise en 'uvre à son président de l'époque.

Il en résulte, qu'outre cette maîtrise d''uvre, ladite société était expressément chargée des travaux de construction d'une maison individuelle, à l'exception du seul lot " menuiseries extérieures ", de sorte, qu'au vu de la jurisprudence précitée, les dispositions du code de la construction de maison individuelle avec fourniture de plan étaient applicables.

Au surplus, il sera ajouté que c'est artificiellement que ledit lot a été retiré du marché principal pour être confié, par contrat du même jour, à la société DN TCE ingénierie, dès lors que celle-ci avait le même président que la société DN ingénierie, que la facture du 28 novembre 2017, correspondant à l'acompte de 30 % de ce marché, a été émise par la société DN ingénierie et que, par avenant du 10 décembre 2017, cette dernière société s'est substituée à la première dans l'exécution du marché.

Par suite, c'est à bon droit que le premier juge a requalifié le contrat conclu entre M. et Mme [W] et la société DF ingénierie en contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan soumis aux dispositions d'ordre public des articles L. 231-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation.

Par ailleurs, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme [E], ceux-ci ne rapportent aucunement la preuve que M. et Mme [W] auraient, en connaissance du vice l'affectant et avec intention de le réparer, voulu confirmer l'acte nul, aucun acte conforme aux prescriptions des articles L. 232-1 du code de la construction et de l'habitation n'ayant été régularisé.

Partant, c'est à bon droit que le premier juge a, tirant les conséquences de ses propres constatations, prononcé la nullité du contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan.

Le jugement sera confirmé de ces chefs.

Sur la responsabilité de M. et Mme [E]

Moyens des parties

M. et Mme [W] soutiennent que M. [E] a commis une faute séparable de ses fonctions sociales en omettant de conclure un contrat de construction de maison individuelle comportant en annexe la justification d'une garantie de livraison et en procédant à des appels de fonds irréguliers.

Ils relèvent que Mme [E] a également commis une faute incompatible avec ses fonctions sociales en, d'une part, omettant de régulariser la souscription d'une telle garantie, d'autre part, procédant à des appels de fonds illicites.

Ils précisent que lesdits manquements sont passibles de sanctions pénales.

Ils en infèrent qu'ils sont bien fondés à obtenir leur condamnation au paiement de dommages et intérêts en réparation des sommes indûment perçues et de leur préjudice moral.

En réponse, M. et Mme [E] font valoir que M. et Mme [W] ne rapportent pas la preuve qu'ils aient commis une faute intentionnelle, d'une particulière gravité et séparable de leurs fonctions sociales.

Ils énoncent que M. et Mme [W] n'ont pas souhaité qu'une garantie d'achèvement soit souscrite, de sorte que son absence ne peut leur être reprochée.

Ils soulignent que les règlements effectués ne l'ont pas été pour des montants supérieurs à ceux prévus à l'article R. 231-7 du code de la construction et de l'habitation.

Quant aux préjudices allégués, ils indiquent, s'agissant du préjudice matériel, que la somme de 6 000 euros a été réglée à la société DN TCE ingénierie et que le reste des versements faits à la société DF ingénierie a été employé, sans bénéfice pour elle, à la réalisation du chantier, et que, s'agissant du préjudice moral, celui-ci n'est nullement étayé.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Aux termes de l'article L. 225-251 du code de commerce, applicable aux sociétés par actions simplifiées, les administrateurs et le directeur général sont responsables individuellement ou solidairement selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés anonymes, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion.

Il est établi que la responsabilité personnelle d'un dirigeant à l'égard des tiers ne peut être retenue que s'il a commis une faute détachable de ses fonctions. Il en est ainsi lorsque le dirigeant commet intentionnellement une faute d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions (Com., 20 mai 2003, pourvoi n° 99-17.092, Bulletin civil 2003, IV, n° 84 ; Com., 4 juillet 2006, pourvoi n° 05-13.930, Bull. 2006, IV, n° 166).

A cet égard, il sera rappelé que, aux termes du II de l'article L. 231-4 du code de la construction et de l'habitation, aucun versement, aucun dépôt, aucune souscription ou acceptation d'effets de commerce ne peuvent être exigés ou acceptés avant la signature du contrat défini à l'article L. 231-1 ni avant la date à laquelle la créance est exigible.

Aux termes de l'article R* 231-7 du même code, dans sa rédaction issue du décret n° 91-1201 du 27 novembre 1991, I.-Le pourcentage maximum du prix convenu, exigible aux différents stades de la construction d'après l'état d'avancement des travaux, est fixé, par application du troisième alinéa de l'article L. 242-2, de la manière suivante :

15 % à l'ouverture du chantier, pourcentage incluant éventuellement celui du dépôt de garantie ;

25 % à l'achèvement des fondations ;

40 % à l'achèvement des murs ;

60 % à la mise hors d'eau ;

75 % à l'achèvement des cloisons et à la mise hors d'air ;

95 % à l'achèvement des travaux d'équipement, de plomberie, de menuiserie et de chauffage.

II.-Le solde du prix est payable dans les conditions suivantes :

1. Lorsque le maître de l'ouvrage se fait assister, lors de la réception, par un professionnel mentionné à l'article L. 231-8, à la levée des réserves qui ont été formulées à la réception ou, si aucune réserve n'a été formulée, à l'issue de la réception ;

2. Lorsque le maître de l'ouvrage ne se fait pas assister par un professionnel pour la réception, dans les huit jours qui suivent la remise des clés consécutive à la réception, si aucune réserve n'a été formulée, ou, si des réserves ont été formulées, à la levée de celles-ci.

Dans le cas où des réserves sont formulées, une somme au plus égale à 5 % du prix convenu est, jusqu'à la levée des réserves, consignée entre les mains d'un consignataire accepté par les deux parties ou, à défaut, désigné par le président du tribunal de grande instance.

Aux termes de l'article L. 241-1 de ce code, toute personne qui aura exigé ou accepté un versement, un dépôt de fonds, une souscription ou une acceptation d'effets de commerce en violation des dispositions des articles L. 212-10, L. 212-11, L. 213-9, L. 222-5 et du paragraphe II de l'article L. 231-4 sera punie d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 9 000 euros ou de l'une de ces deux peines seulement.

Aux termes de l'article L. 241-8 de ce code, sera puni d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende 300 000 euros quiconque, tenu à la conclusion d'un contrat par application de l'article L. 231-1 ou de l'article L. 232-1, aura entrepris l'exécution des travaux sans avoir conclu un contrat écrit conforme aux dispositions des articles L. 231-1, L. 231-2, L. 231-3, L. 231-9, L. 232-1 et L. 232-2, ou sans avoir obtenu la garantie de livraison définie à l'article L. 231-6.

Il est jugé que le dirigeant d'une société, qui aurait dû conclure un contrat de construction de maison individuelle et avait entrepris l'exécution des travaux sans avoir obtenu la garantie de livraison prévue à l'article L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation, a commis une faute intentionnelle, constitutive d'une infraction pénale, séparable de ses fonctions sociales et engageant sa responsabilité personnelle (3e Civ., 9 juillet 2020, pourvoi n° 18-21.552).

Au cas d'espèce, la cour observe, à titre liminaire que, contrairement à ce qu'allèguent M. et Mme [E], il ressort de la facture émise par la société DF ingénierie le 23 octobre 2017 qu'elle a perçu, par chèque de M. et Mme [W] en date du 22 septembre 2016, la somme de 6 000 euros, soit, avant la signature d'un contrat conforme aux dispositions de l'article L. 231-1 du code de la construction et de l'habitation précité.

M. [E], en tant que président de ladite société et de la société DN TCE ingénierie, a pour échapper aux dispositions d'ordre public du code de la construction et de l'habitation, artificiellement scindé le marché de construction de maison individuelle avec fourniture de plan en deux contrats de construction, dont la réalisation aura été entreprise en l'absence, d'une part, de signature d'un contrat conforme aux dispositions de l'article L. 231-1 du code de la construction et de l'habitation précité, d'autre part, de garantie de livraison.

Ce faisant il a commis des fautes intentionnelles, constitutives d'infractions pénales, séparables de ses fonctions sociales et engageant sa responsabilité personnelle.

Quant à Mme [E], elle a, en tant présidente de la société DF ingénierie, d'une part, poursuivi la réalisation du chantier sans procéder à sa régularisation ni à la fourniture d'une garantie de livraison, d'autre part, appelé et perçu, comme l'a constaté le premier juge, la somme de 44 682 euros, correspondant à 21 % du montant total des sommes dues au titre des marchés de travaux et ce avant même leur démarrage.

Ce faisant elle a commis des fautes intentionnelles, constitutives d'infractions pénales, séparables de ses fonctions sociales et engageant sa responsabilité personnelle.

Par ailleurs, c'est par d'exacts motifs, que la cour adopte, que le premier juge a fixé à la somme de 44 682 euros le préjudice matériel de M. et Mme [W] et à la somme de 5 000 euros leur préjudice moral et condamné in solidum M. et Mme [E] à leur payer la somme totale de 49 682 euros à titre de dommages et intérêts.

Le jugement sera confirmé de ces chefs.

Sur la responsabilité de la Caisse d'épargne

Moyens des parties

La Caisse d'épargne soutient que, non tenue de procéder à la requalification des contrats de marché de travaux, elle n'a pas manqué à ses obligations légales découlant de l'article L. 231-10 du code de la construction et de l'habitation.

Elle relève ainsi qu'elle n'était tenue qu'à un simple contrôle formel des documents qui lui ont été remis sans l'obliger à aller au-delà et à rechercher si la combinaison des différents contrats ne faisait pas entrer l'opération dans le champ d'application du contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan, de sorte, qu'en l'occurrence, elle pouvait légitimement considérer que la construction en cause échappait à ce régime juridique.

Elle énonce qu'elle a satisfait à son obligation de renseignement et de conseil en alertant M. et Mme [W], d'une part, quant aux conséquences et aux risques d'une construction réalisée hors cadre légal protecteur du contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan, d'autre part, sur le fait qu'il leur appartenait de vérifier l'existence d'une garantie de livraison à prix et délai convenu. Elle précise que la mention figurant en ce sens dans le document intitulé " explications adéquates " était très apparente et immédiatement suivie de la signature des emprunteurs.

En tout état de cause, elle souligne que l'existence de la perte de chance que M. et Mme [W] auraient eu, s'ils avaient été informés, de ne pas débloquer les fonds et de ne pas verser les sommes sans s'assurer de la souscription d'une garantie de livraison par le constructeur et du respect de ses obligations légales n'est pas démontrée par eux.

Elle ajoute, d'une part, que le pourcentage de ladite perte de chance retenue par le premier juge est, en tout état de cause, excessif et ne saurait excéder 30 %, d'autre part, que le préjudice moral de M. et Mme [W], ainsi, que le lien de causalité entre celui-ci et la faute alléguée de la banque, ne sont pas démontrés.

M. et Mme [W] n'ont pas conclu sur ce point, de sorte qu'ils se sont, en application de l'article 954 du code de procédure civile, appropriés les motifs du jugement.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article L. 231-10 du code de la construction et de l'habitation, aucun prêteur ne peut émettre une offre de prêt sans avoir vérifié que le contrat comporte celles des énonciations mentionnées à l'article L. 231-2 qui doivent y figurer au moment où l'acte lui est transmis et ne peut débloquer les fonds s'il n'a pas communication de l'attestation de garantie de livraison. Dans les cas de défaillance du constructeur visés au paragraphe II de l'article L. 231-6 et nonobstant l'accord du maître de l'ouvrage prévu au premier alinéa du paragraphe III de l'article L. 231-7, le prêteur est responsable des conséquences préjudiciables d'un versement excédant le pourcentage maximum du prix total exigible aux différents stades de la construction d'après l'état d'avancement des travaux dès lors que ce versement résulte de l'exécution d'une clause irrégulière du contrat.

Il est jugé que l'article L. 231-2 du code de la construction et de l'habitation ne met pas à la charge du prêteur l'obligation de requalifier le contrat qui lui est soumis (Com., 9 juillet 2002, pourvoi n° 99-15.650, Bulletin civil 2002, IV, n° 115 ; 3e Civ., 19 mai 2009, pourvoi n° 08-13.207).

Il est établi que si le prêteur ne peut ainsi s'immiscer dans la convention passée entre le constructeur et le maître de l'ouvrage, il n'en a pas moins un devoir de renseignement et de conseil à l'égard de son client dépourvu de connaissances juridiques sur le cadre contractuel du projet qu'il accepte de financer (3e Civ., 11 janvier 2012, pourvoi n° 10-19.714, Bull. 2012, III, n° 6 ; 3e Civ., 17 novembre 2004, pourvoi n° 03-16.305, Bull., 2004, III, n° 199).

A l'inverse, il est tout autant établi que le prêteur ne manque pas à son devoir de renseignement et de conseil dès lors qu'il pouvait légitimement penser que l'opération de construction ne ressortissait pas au champ d'application du contrat de construction de maison individuelle (3e Civ., 9 octobre 2013, pourvoi n° 12-24.900, Bull. 2013, III, n° 123 ; 3e Civ., 11 juillet 2019, pourvoi n° 18-10.368, publié au Bulletin).

Au cas d'espèce, comme l'a exactement relevé le premier juge, une banque, normalement diligente ne pouvait légitimement pas penser que l'opération de construction ne ressortissait pas au champ d'application du contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan, dès lors, d'abord, qu'il ressortait du dossier du permis de construire, transmis à la Caisse d'épargne, que les plans étaient au nom de la société DF ingénierie, qui avait le même président que la société DN TCE ingénierie, ensuite, que les marchés confiés à ces deux sociétés, dont elle disposait, étaient du même jour, enfin, qu'aucun contrat de maîtrise d''uvre ne lui avait été communiqué.

Par suite, il appartenait à la Caisse d'épargne de satisfaire à son devoir de renseignement et de conseil à l'égard de M. et Mme [W], profanes en matière de règlementation applicable à la construction de maison individuelle, en les alertant sur les conséquences et les risques ainsi encourus.

Pour justifier y avoir satisfait, la Caisse d'épargne produit un document intitulé " Explications adéquates ", dans lequel figure, en page 3, un paragraphe intitulé " Mise en garde ", dont le second alinéa est ainsi libellé :

" Je (nous) reconnais(sons) avoir été alerté(s) par le Prêteur quant aux conséquences et aux risques d'une construction réalisée hors cadre légal protecteur du contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan me(nous) privant des garanties légales, et sur le fait qu'il m'(nous) appartient de vérifier l'existence d'une garantie de livraison à prix et délai convenu ainsi que de la souscription d'une assurance dommages-ouvrage par le maître de l'ouvrage ou par moi(nous)-même en cette qualité. "

La cour observe que ce document élaboré en application de l'article L. 311-11 du code de la consommation a pour objet de fournir à l'emprunteur les explications adéquates lui permettant de déterminer si le ou les contrats de crédit proposés et les éventuels services accessoires sont adaptés à ses besoins et à sa situation financière, de sorte qu'il n'est pas spécifiquement destiné à le renseigner et à le conseiller sur le fait que le dispositif contractuel envisagé ne respectait pas la règlementation applicable.

A cet égard, la cour constate que les informations parcellaires données par la Caisse d'épargne ne sont pas détachées des autres informations sur les conditions du crédit par un dispositif visuel permettant d'appeler l'attention de M. et Mme [W] ni que ceux-ci ont, par une mention de leur main, indiqué avoir pris connaissance de celles-ci.

Aussi, lesdites mises en garde n'explicitent aucunement quel est le cadre légal du contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan, n'indiquent pas que les maîtres de l'ouvrage s'exposent à effectuer des paiements sans relation avec l'avancement effectif du chantier et donnent un conseil sans portée sur la vérification de l'existence d'une garantie de livraison qu'ils ne pouvaient obtenir hors du cadre légal.

Par suite, c'est à bon droit que le premier juge a retenu que la Caisse d'épargne ne démontrait pas avoir satisfait à son obligation de renseignement et de conseil.

De même, c'est exactement, par des motifs que la cour adopte, que le premier juge a, d'une part, retenu que la faute de la Caisse d'épargne avait causé à M. et Mme [W] une perte de chance, qu'il a justement fixé à 95 %, de conclure un contrat conforme au dispositif protecteur et de ne pas débloquer les fonds à hauteur de 29 788 euros, d'autre part, condamné la Caisse d'épargne, in solidum avec M. et Mme [E], au paiement de celle-ci ainsi que de celle de 5 000 euros correspond au préjudice moral en ayant résulté.

Le jugement sera confirmé de ces chefs.

Sur la contribution à la dette

Moyens des parties

M. et Mme [E] soutiennent que la Caisse d'épargne a failli à son obligation de renseignement et de conseil en n'alertant ni la société DF ingénierie ni M. et Mme [W] de la nécessité de conclure un contrat de construction de maison individuelle et n'a pas subordonné le déblocage des fonds à la production d'une garantie d'achèvement.

Ils sollicitent, en conséquence, que la part de responsabilité revenant à la Caisse d'épargne soit fixée à hauteur de 50 %.

En réponse, la Caisse d'épargne fait valoir que, en raison du rôle prépondérant de M. et Mme [E] et de la société DF ingénierie dans la survenance du préjudice subi par M. et Mme [W], la part de responsabilité leur revenant ne peut être fixée, comme l'a fait erronément le premier juge, à seulement 80 %.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Aux termes de l'article 1241 du même code, chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement pas son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.

Selon l'article 1317 de ce code, entre eux, les codébiteurs solidaires ne contribuent à la dette que chacun pour sa part. Celui qui a payé au-delà de sa part dispose d'un recours contre les autres à proportion de leur propre part.

Au cas d'espèce, c'est exactement que le premier juge, au vu des fautes retenues, a fixé le partage de responsabilité de la façon suivante :

- M. et Mme [E] : 80 %,

- la Caisse d'épargne : 20 %.

Par suite, le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la recevabilité de l'appel en garantie de M. et Mme [E]

Moyens des parties

La Caisse d'épargne soutient que l'appel en garantie formé à son encontre en cause d'appel par M. et Mme [E] est irrecevable pour être nouveau.

En réponse, M. et Mme [E] font valoir qu'une telle demande n'est pas irrecevable dès lors qu'elle tend à faire écarter les prétentions adverses, c'est-à-dire leur éviter de supporter seuls toute éventuelle condamnation financière qui serait prononcée à leur encontre.

Réponse de la cour

Aux termes du premier alinéa de l'article 547 du code de procédure civile, en matière contentieuse, l'appel ne peut être dirigé que contre ceux qui ont été parties en première instance. Tous ceux qui ont été parties peuvent être intimés.

Il est établi que le droit d'intimer n'implique pas le droit de former des prétentions à l'encontre d'une partie contre laquelle l'appelant n'a pas conclu en première instance (1re Civ., 18 mars 2003, pourvoi n° 01-01.073, Bull. 2003, I, n° 75 ; 2e Civ., 4 octobre 2018, pourvoi n° 17-15.500).

Au cas d'espèce, M. et Mme [E] n'ont, en première instance, formé aucune demande à l'encontre de la Caisse d'épargne.

Par suite, l'appel en garantie formé par M. et Mme [E] à son encontre sera déclaré irrecevable.

Sur l'appel en garantie de la Caisse d'épargne

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Au cas d'espèce, la Caisse d'épargne est bien fondée à solliciter d'être garantie par M. et Mme [E] de tout paiement qui serait fait excédant sa part de responsabilité telle que déterminée ci-dessus.

La cour ajoutera donc au jugement cette condamnation figurant dans ses motifs mais non reprise dans son dispositif.

Sur la résistance abusive de M. et Mme [E] et de la Caisse d'épargne

Moyens des parties

M. et Mme [W] soutiennent que le refus d'exécuter spontanément les condamnations prononcées par les premiers juges les ont empêchés de réaliser leur projet immobilier et leur ont causé, par suite, un nouveau préjudice, dont ils demandent réparation.

En réponse, la Caisse d'épargne relève que M. et Mme [W] ayant fait délivrer un commandement de payer le 14 décembre 2023, leur demande de dommages et intérêts complémentaires est, en tout état de cause, sans objet.

M. et Mme [E] n'ont pas conclu sur ce point.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Aux termes de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Au cas d'espèce, M. et Mme [W] ne justifient pas de l'existence du préjudice dont ils se prévalent et qui ne serait pas compensé par les intérêts courant de plein droit à compter du prononcé du jugement dont appel en application de l'article 1231-7 du code civil.

Par suite, leur demande en condamnation de M. et Mme [E] et de la Caisse d'épargne à leur payer des dommages et intérêts supplémentaires pour résistance abusive sera rejetée.

Sur les frais du procès

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer le jugement sur la condamnation aux dépens et sur celle au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En cause d'appel, M. et Mme [E] et la Caisse d'épargne, parties succombantes, seront condamnés in solidum aux dépens et à payer à M. et Mme [W], la somme globale de 6 000 euros, au titre des frais irrépétibles.

Le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile sera accordé aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

Déclare recevable l'action de M. et Mme [W] à l'encontre de M. et Mme [E] ;

Déclare irrecevable l'appel en garantie formé par M. et Mme [E] à l'encontre de la société Caisse d'épargne de prévoyance d'Ile-de-France ;

Condamne in solidum M. et Mme [E] à garantir la société Caisse d'épargne de prévoyance d'Ile-de-France à hauteur de 80 % des condamnations prononcées à son encontre ;

Rejette la demande de M. et Mme [W] en condamnation de M. et Mme [E] et de la société Caisse d'épargne de prévoyance d'Ile-de-France au paiement de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

Condamne in solidum la société Caisse d'épargne de prévoyance d'Ile-de-France et M. et Mme [E] aux dépens d'appel avec distraction au profit du cabinet Dexteria avocats, agissant par Maître Antri Bouzar ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme [E] et de la société Caisse d'épargne de prévoyance d'Ile-de-France et les condamne in solidum à payer à M. et Mme [W] la somme globale de 6 000 euros.

La greffière, Le président de chambre,

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