CA Rennes, 8e ch prud'homale, 15 octobre 2025, n° 21/07828
RENNES
Arrêt
Autre
8ème Ch Prud'homale
ARRÊT N°261
N° RG 21/07828 -
N° Portalis DBVL-V-B7F-SJUM
S.A.S. SERVICE REGIONAL DE NETTOYAGE - SERENET
C/
Mme [R] [RG]
Sur appel du jugement du C.P.H. de [Localité 8] du 10/11/2021
RG CPH : F 19/00891
Infirmation partielle
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Copie certifiée conforme délivrée
le:
à:
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2025
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Nadège BOSSARD, Présidente,
Madame Anne-Laure DELACOUR, Conseillère,
Madame Anne-Cécile MERIC, Conseillère,
GREFFIER :
Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 03 Juillet 2025
En présence de Madame [A] [U], médiatrice judiciaire,
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 15 Octobre 2025 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTE et intimée à titre incident :
La S.A.S. SERVICE REGIONAL DE NETTOYAGE - SERENET prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Cécile MERCIER substituant à l'audience Me Nicolas CARABIN de la SELARL CARABIN-STIERLEN AVOCATS, Avocats au Barreau de RENNES
INTIMÉE et appelante à titre incident :
Madame [R] [RG]
née le 19 Février 1990 à [Localité 5] (49)
demeurant [Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Johann ABRAS de la SARL ABRAS AVOCAT, Avocat au Barreau de NANTES
Mme [R] [RG] a été engagée par la société Serenet selon contrat de travail à durée déterminée à temps complet pour un motif de remplacement de salarié absent du 26 mai 2014 au 31 mai 2014 en qualité d'agent de service, AS3A de la classification conventionnelle de branche des entreprises de propreté.
Un nouveau contrat de travail à durée déterminée a été conclu du 1er juin au 30 juin 2014.
A compter du 1er juillet 2014, Mme [RG] et la société Serenet ont conclu un contrat d'apprentissage d'une durée d'un an pour la préparation du diplôme de Responsable des Services Hygiène et Propreté, sous la responsabilité de M. [P], responsable d'exploitation.
Du 1er juillet au 2 octobre 2015, Mme [RG] et la société ont conclu un contrat de travail à durée déterminée à temps complet en raison d'un surcroît temporaire d'activité lié à la réorganisation du service exploitation de l'agence de [Localité 8].
Par avenant du 21 septembre 2015, à effet au 2 octobre 2015, le contrat de travail de Mme [RG] s'est poursuivi dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée en qualité de chef d'équipe, classification CE2.
Mme [RG] a connu des difficultés de santé fin 2017, et le médecin du travail a préconisé un aménagement de poste, selon avis du 15 janvier 2018. (« Prévoir un poste sans port de charges de plus de 10 kilos, sans déplacements fréquents en voiture ni station assise prolongée »)
Mme [RG] a été placée en arrêt de travail du 04 juin 2018 au 17 août 2018 pour "épuisement physique et psychique".
Par courrier du 25 juin 2018, Mme [RG] a formulé une demande de rupture conventionnelle. Elle a été convoquée par la société Serenet à un entretien le 20 juillet 2018. Par courrier du 24 juillet 2018, Mme [RG] s'est vue notifier un compte-rendu d'entretien de mise au point contenant une série de griefs concernant la qualité de l'exécution de sa prestation de travail.
Une convention de rupture conventionnelle a été signée le 09 août 2018. Le contrat de travail a été rompu à l'issue du délai d'homologation de la DIRECCTE le 18 septembre 2018.
Le 16 septembre 2019, Mme [RG] a saisi le conseil de prud'hommes de Nantes aux fins de :
- Sur la reclassification et le rappel correspondant:
- Dire et juger que 1'emploi occupé par Mme [RG], correspondait à la classification MP3 selon la CC application propreté, statut agent de maîtrise
- Rappel de salaire par rapport au minima conventionnel applicable : 6 876,17 €
- Congés payés afférents: 687,61 €
- Subsidiairement, Dire et juger que l'emploi occupé par Mme [RG], correspondait à la classification MP2 selon la CC application propreté, statut agent de maîtrise
- Rappel de salaire par rapport au minima conventionnel applicable : 2 635,96 €
- Congés payés afférents : 263,59 €
- Sur le rappel d'heures supplémentaires :
- Dire et juger que Mme [RG] a accompli des heures supplémentaires dont elle n'a pas été payée
- Au titre de l'année 2017, en cas de reclassification MP3 5 277,11 €
- Congés payés afférents : 527,71 €
- Subsidiairement, en cas de reclassification MP2 : 4 757,39 €
- Congés payés afférents : 475,73 €
- Très subsidiairement : en l'absence de reclassification MP2 : 4 433,93 €
- Congés payés afférents : 443,93 €
- Au titre de l'année 2018,
- de la semaine 1 à la semaine 7,
- en cas de reclassification MP3 : 626,17 €
- Congés payés afférents : 62,62 €
- Subsidiairement, en cas de reclassification MP2 : 564,50 €
- Congés payés afférents :56,45 €
- Très subsidiairement : en l'absence de reclassification MP2 :526,12 €
- Congés payés afférents : 52,61 €
- De la semaine 10 à la semaine 12,
- en cas de reclassification MP3 : 1 146,88 €
- Congés payés afférents :114,68 €
- Subsidiairement, en cas de reclassifcation MP2 : 1 033,59 €
- Congés payés afférents : 103,35 €
- Très subsidiairement : en l'absence de reclassification MP2 : 964,84 €
- Congés payés afférents : 96,48 €
- Sur l'indemnité compensatrice de contrepartie obligatoire pour dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires
- Dire et juger que Mme [RG] a accompli des heures supplémentaires au-delà du contingent annuel d'heures supplémentaires sans bénéficier de contrepartie obligatoire en repos
- En cas de reclassification MP3 : 1 462,89 €
- Subsidiairement, en cas de reclassification MP2: 1 318,81 €
- Très subsidiairement : en l'absence de reclassification MP2 : 1 229,51 €
- Sur le travail dissimulé
- Dire et juger que l'activité salariée de Mme [RG] a été dissimulée
- En cas de reclassification MP3 Subsidiairement, en cas de reclassification MP2 : 13 359,06 €
- Très subsidiairement : en l'absence de reclassification MP2 :12 039,54 €
- Dommages-intérêts pour harcèlement moral : 11 238,72 €
- Dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat :
2 000,00 €
- Sur la requalification de la rupture : 2 000,00 €
- Dire et juger que la rupture conventionnelle est nulle,
- Dire et juger que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse
- lndemnité de licenciement en considération d'une ancienneté de 4 ans, 3 mois et 8 jours du 26 mai 2014 au 18 septembre 2018 : 2 044,69 €
- Indemnité compensatrice de préavis : 3 814,98 €
- Congés payés afférents : 381,49 €
- Dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 8 000,00 €
- Subsidiairement, rappel sur l'indemnité de rupture conventionnelle : 84,29 €
- Remise d'un certificat de travail, d'une attestation Pôle Emploi et de bulletins de salaire rectifiés mois par mois, conformes au jugement à intervenir
- Dire et juger irrecevables les attestations produites par la société Serenet en pièce 8 ([H] [P]) et en pièce 18 ([K] [TV]), en ce qu'elles ne respectent pas les exigences de l'article 202 du code civil
- Article 700 du code de procédure civile : 3 000,00 €
- Exécution provisoire du jugement à intervenir
- Condamner la partie défenderesse aux dépens
Par jugement en date du 10 novembre 2021, le conseil de prud'hommes de Nantes a :
- Déclaré recevables les pièces 8 et 18 produites par la société Serenet,
- Dit et jugé que l'emploi occupé par Mme [RG] correspond bien à la classification prévue à son contrat de travail, à savoir en qualité de Chef d'Equipe classification CE2, et rejette sa demande de reclassification au statut agent de maitrise MP3 et subsidiairement MP2,
- Dit et jugé que Mme [RG] a bien réalisé des heures supplémentaires, que ses demandes à ce titre sont justifiées,
- Dit et jugé que la S.A. Serenet s'est rendue coupable de travail dissimulé,
- Dit et jugé que la rupture conventionnelle du contrat de travail de Mme [RG] est nulle et s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- Dit et jugé que le harcèlement moral n'est pas caractérisé,
- Dit et jugé que la S.A. Serenet a manqué à son obligation de sécurité et de résultat,
- Condamné en conséquence la S.A. Serenet à verser à Mme [RG] les sommes suivantes correspondant aux rappels de salaires et indemnités :
- 4.433,93 € brut au titre des heures supplémentaires pour l'année 2017
- 443,39 € brut au titre des congés payés afférents
- 526,12 € brut au titre des heures supplémentaires pour l'année 2018 de la semaine 1 à la semaine 7.outre -52,61 € brut au titre des congés payés afférents.
- 964,84 € brut au titre des heures supplémentaires pour l'année 2018 de la semaine 10 à la semaine 22 outre 96,48 € brut au titre des congés payés afférents.
- 1.229,15 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de contrepartie obligatoire pour dépassement du contingent d'heures supplémentaires sans bénéficier de contrepartie obligatoire en repos.
- 11.238,72 € brut au titre de l'indemnité forfaitaire pour l'infraction de travail dissimulé.
- 1.000 € brut pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat
- 84,29 € net au titre de l'indemnité de licenciement, déduction faite de 1.960,40 € en restitution des sommes perçues au titre de la rupture conventionnelle.
- 3.814,98 € brut au titre de l'indemnité de préavis outre 381,49 € Brut au titre des congés payés afférents
- 5.700 € brut au titre des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
- 1.250 € net au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- Fixé la moyenne des salaires de Mme [RG] à 1 426,49 € Net.
Lesdites sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter de la date de la saisine du Conseil pour les sommes à caractère salarial, et à compter de la date de la notification du jugement pour les autres sommes, les intérêts produisant eux-mêmes des intérêts conformément à l'article 1 154 du code civil.
- Ordonné la remise d'un certificat de travail, d'une attestation pôle Emploi et de bulletins de salaire rectifiés mois par mois conforme au jugement.
- Ordonné l'exécution provisoire du jugement pour les sommes où elle est de droit.
- Débouté la partie défenderesse de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- Débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires.
- Ordonné le remboursement par la S.A. Serenet à Pôle Emploi les indemnités injustement versées à hauteur de 2 Mois.
- Condamné la S.A. Serenet à l'intégra1ité des dépens.
La société Serenet a interjeté appel le 15 décembre 2021.
Selon ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 23 août 2022, la société Serenet appelante sollicite :
- Réformer partiellement le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Nantes, le 10 novembre 2021
A titre principal
Sur les demandes de classification
- Confirmer le jugement rendu en ce qu'il a jugé que Mme [RG] n'apportait pas la preuve d'une classification MP2 ou MP3
En conséquence
- Débouter Mme [RG] de ses demandes de rappels de salaire et des congés payés y afférent au titre d'une reclassification en MP3 et à titre subsidiaire en MP2.
Sur les heures supplémentaires (et le travail dissimulé)
- Réformer le jugement rendu en ce qu'il a jugé que Mme [RG] réalisait des heures supplémentaires et a condamné la société Serenet au paiement des sommes suivantes :
- 4.433,93 € brut au titre des heures supplémentaires pour l'année 2017, outre 443,39 € brut au titre des congés payés afférents
- 526,12 € brut au titre des heures supplémentaires pour l'année 2018 de la semaine 1 à la semaine 7, outre 52,61 € brut au titre des congés payés afférents,
- 964,84 € brut au titre des heures supplémentaires pour l'année 2018 de la semaine 10 à la semaine 22, outre 96,48 € brut au titre des congés payés afférents,
- 1.229,15 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de contrepartie obligatoire
- Réformer le jugement rendu en ce que le conseil de prud'hommes de Nantes a dit et jugé que la S.A.S. Serenet s'est rendue coupable de travail dissimulé,
- Juger que Mme [RG] n'a pas réalisé d'heures supplémentaires.
- Juger que la société Serenet ne s'est pas rendue coupable de travail dissimulé.
Par Conséquent :
- Débouter Mme [RG] de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires prétendument réalisées et des congés payés y afférents ;
- Débouter Mme [RG] de sa demande indemnitaire au titre du repos compensateur légal ;
- Débouter Mme [RG] de sa demande indemnitaire au titre d'une dissimulation intentionnelle d'activité ;
Sur l'obligation de sécurité
- Réformer le jugement rendu en ce qu'il a jugé que la société Serenet avait manqué à son obligation de sécurité et l'a condamné au paiement de la somme de 2000,00 €.
- Débouter Mme [RG] de sa demande indemnitaire ;
Sur le harcèlement moral
- Confirmer le jugement rendu en ce qu'il a jugé que Mme [RG] n'apportait pas la preuve d'un harcèlement moral
- Débouter Mme [RG] de sa demande indemnitaire ;
Sur la nullité de la rupture conventionnelle
- Réformer le jugement rendu en ce qu'il a jugé que la rupture conventionnelle nulle.
Par Conséquent :
- Débouter Mme [RG] de sa demande de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
A titre subsidiaire
- Réduire le montant des rappels de salaires alloués au titre des supposées heures supplémentaires ;
- Confirmer la restitution par Mme [RG] de l'indemnité de rupture conventionnelle ;
- Débouter Mme [RG] de sa demande de rappel d'indemnité de licenciement.
- Réduire le montant des dommages-intérêts alloués au titre de supposé harcèlement moral, au titre du manquement à l'obligation de sécurité ainsi que des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En tout état de cause ;
- Réformer le jugement rendu en ce qu'il a alloué à Mme [RG] une indemnité de 1.250,00 € nets en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner Mme [RG] à verser à la société Serenet une indemnité de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Selon ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 22 novembre 2022, l'intimée et appelante à titre incident Mme [RG] sollicite :
- Débouter la société Serenet de toutes demandes fins et conclusions,
Sur la reclassification et le rappel correspondant
- Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [RG] de sa demande de reclassification et de rappel de salaire correspondant,
Et statuant à nouveau,
- Dire que l'emploi occupé par Mme [RG] correspondait à la classification MP3 selon la convention collective applicable propreté, statut agent de maîtrise,
- Condamner la SAS Serenet à lui payer 6 876,17€ à titre de rappel de salaire par rapport au minima conventionnel applicable, outre incidence congés payée pour 687,61€.
Subsidiairement,
- Dire que l'emploi occupé par Mme [RG] correspondait à la classification MP2 selon la convention collective applicable propreté, statut agent de maîtrise,
- Condamner la SAS Serenet à lui payer 2635,96 € à titre de rappel de salaire par rapport au minima conventionnel applicable, outre incidence congés payée pour 263,59 €.
Sur le rappel d'heures supplémentaires
- Confirmer le jugement en ce qu'il a dit que Mme [RG] a accompli des heures supplémentaires dont elle n'a pas été payée
- Réformer le jugement quant au quantum du rappel alloué au titre des heures supplémentaires réalisées,
Et statuant à nouveau,
- Condamner la SAS Serenet à lui payer :
Au titre de l'année 2017 :
En cas de reclassification MP3, 5277,11€ outre incidence congés payés pour 527,71 €
Subsidiairement, en cas de reclassification MP2, 4757,39 € outre incidence congés payés pour 475,73€
Très subsidiairement, en l'absence de classification MP2, 4433,93 € outre incidence congés payés pour 443,39 €
Au titre de l'année 2018 :
De la semaine 1 à la semaine 7 :
En cas de reclassification MP3, 626,17 € outre incidence congés payés pour 62,62 €
Subsidiairement, en cas de reclassification MP2, 564.50 € outre incidence congés payés pour 56,45 €
Très subsidiairement, en l'absence de classification MP2, 526.12€ outre incidence congés payés pour 52,61 €
De la semaine 10 à la semaine 22 :
En cas de reclassification MP3, 1146,88 € outre incidence congés payés pour 114,68 €
Subsidiairement, en cas de reclassification MP2 : 1033.59 € outre incidence congés payés pour 103.35 €
Très subsidiairement, en l'absence de classification MP2 : 964.84 € outre incidence congés payés pour 96.48 €
Sur l'indemnité compensatrice de contrepartie obligatoire en repos pour dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires
- Confirmer le jugement en ce qu'il a dit que Mme [RG] a accompli des heures supplémentaires au-delà du contingent annuel d'heures supplémentaires sans bénéficier de contrepartie obligatoire en repos,
- Réformer le jugement quant au quantum du rappel alloué au titre de l'indemnité de contrepartie obligatoire en repos pour dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires,
Et statuant à nouveau
- Condamner la SAS Serenet à lui payer :
- en cas de reclassification MP3 : 1462,89 €
- Subsidiairement, en cas de reclassification MP2 : 1318,81 €
- Très subsidiairement, en l'absence de classification MP2 : 1229,15 €
Sur le travail dissimulé
- Confirmer le jugement en ce qu'il a dit que l'activité salariée de Mme [RG] a été dissimulée,
- Réformer le jugement quant au quantum de l'indemnité allouée au titre du travail dissimulé,
Et statuant à nouveau
- Condamner la SAS Serenet à lui payer la somme de :
- 13 359,06 € en cas de reclassification MP3
- Subsidiairement, 12 039,54 € en cas de reclassification MP2,
- Très subsidiairement 11 238,72 € en l'absence de reclassification.
Sur le harcèlement moral
- Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [RG] de sa demande de condamnation au titre du harcèlement moral,
Et statuant à nouveau,
- Dire que Mme [RG] a subi des agissements de harcèlement moral,
- Condamner la SAS Serenet à lui payer 2000 € à titre de dommages et intérêts,
Sur le manquement à l'obligation de sécurité de résultat
- Confirmer le jugement en ce qu'il a dit que la société Serenet a manqué à son obligation de sécurité de résultat,
- Réformer le jugement quant au quantum de l'indemnité allouée pour manquement à l'obligation de sécurité,
Et statuant à nouveau
- Condamner la SAS Serenet à payer 2000 € à titre de dommages et intérêts,
Sur la requalification de la rupture,
- Confirmer le jugement en ce qu'il a dit que la rupture conventionnelle est nulle, et que la rupture du contrat de travail de Mme [RG] s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- Réformer le jugement quant au montant des sommes allouées au titre de l'indemnité de licenciement, du préavis, des dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Et statuant à nouveau
- Condamner la SAS Serenet à lui payer :
- 2044.69 € à titre d'indemnité de licenciement en considération d'une ancienneté de 4 ans, 3 mois et 8 jours du 26.05.2014 au 18.09.2018
- 3814.98 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre incidence congés payés pour 381.49 €,
- 8000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Subsidiairement, Condamner la SAS Serenet à payer 84.29 € à Mme [RG] à titre de rappel sur indemnité de rupture conventionnelle
Sur la remise des documents de fin de contrat
- Condamner la SAS Serenet à remettre à Mme [RG] un certificat de travail, une attestation Pole emploi et des bulletins de salariés rectifiés mois par mois, conformes au jugement à intervenir.
Sur l'irrecevabilité des attestations produites par la société SERENET
- Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [RG] de sa demande de voire dire irrecevables les attestations produites par la société Serenet en pièce 8 ([H] [P]) et en pièce 18 ([K] [TV]), en ce qu'elles ne respectent pas les exigences de l'articles 202 du code civil,
Et statuant à nouveau,
- Dire que les pièces Serenet 8 et 18 sont irrecevables,
- Condamner la SAS Serenet à payer 2000 € au titre des frais irrépétibles de première instance ainsi que 3000 € au titre des frais irrépétibles d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens.
- Condamner la SAS Serenet aux entiers frais de recouvrement,
- Débouter tout contestant de toutes demandes fins et conclusions,
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 05 juin 2025.
Par application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties à leurs dernières conclusions sus-visées.
MOTIFS DE LA DECISION
- sur la recevabilité des pièces communiquées par l'employeur (attestations) :
Mme [RG] demande à la cour d'infirmer le jugement rendu 'en ce qu'il a débouté Mme [RG] de sa demande de voire dire irrecevables les attestations produites par la société Serenet en pièce 8 et en pièce 18 en ce qu'elles ne respectent pas les exigences de l'article 202 du code de procédure civile'.
Il s'agit en l'occurrence des attestations de M. [E] [T], responsable d'exploitation de la société Serenet (pièce 8 de l'employeur) et de [TV] [K], ancienne salariée de la société Serenet (pièce 18 de l'employeur).
Toutefois Mme [RG] n'explicite plus sa demande d'irrecevabilité dans ses écritures devant la cour, si ce n'est que les attestations qu'elle conteste ne respectent pas les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile, lesquelles ne sont pas prescrites à peine de nullité.
En tout état de cause, le non respect textuel des dispositions de l'article 202 du code de procédure civile ne suffit pas à écarter des débats les attestations concernées dont la cour apprécie librement la valeur probante en considération de l'ensemble des autres éléments de preuve qui sont produits par les parties au soutien de leurs demandes, lesquels sont discutés contradictoirement.
Le jugement entrepris sera ainsi confirmé de ce chef.
- sur la demande de reclassification conventionnelle
La qualification d'un salarié se détermine relativement aux fonctions réellement exercées par celui-ci, qu'il appartient aux juges du fond de rechercher au regard de la grille de classification fixée par la convention collective.
La charge de la preuve pèse sur le salarié qui revendique une autre classification, à savoir qu'il appartient au salarié qui se prévaut d'une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail, de démontrer qu'il assure effectivement de façon habituelle, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique
Les fonctions réellement exercées, qui sont prises en compte pour déterminer la qualification d'un salarié, sont celles qui correspondent à son activité principale, et non celles qui sont exercées à titre accessoire ou occasionnel.
L'appréciation de la réalité des fonctions exercées ressort du pouvoir souverain des juges du fond.
En l'espèce, aux termes de l'avenant conclu le 21 septembre 2015, Mme [RG] était chef d'équipe classification CE2 (chef d'équipe échelon 2) en application de la convention collective des entreprises de propreté.
Les bulletins de salaire versés aux débats mentionnent également ce coefficient.
Selon la grille de classification versée aux débats, le chef d'équipe échelon 2 répond aux critères suivants :
- autonomie : 'il peut prendre des initiatives afin de résoudre les problèmes et rechercher les solutions'
- technicité : 'il peut participer aux travaux, connait et applique les méthodes de travail et procédés spécifiques propres à ses activités'
- responsabilité : 'il gère et adapte les moyens mis à sa disposition'
Mme [RG] sollicite sa reclassification dans les fonctions d'agent de maîtrise coefficient MP3 ou à défaut au coefficient MP2 et les rappels de salaire qui en découlent.
Au soutien de sa demande de reclassification, Mme [RG] soutient que ses fonctions relevaient d'une classification MP en affirmant :
- concernant le critère d'autonomie et d'initiative : elle participait à l'élaboration des programmes d'exécution et proposait des moyens à mettre en oeuvre pour réaliser le cahier des charges (MP1), elle prenait des initiatives pour modifier ces derniers et ajuster les programmes d'exécution (MP2), elle assurait les relations commerciales quant aux interventions réalisées, apportant une compétence technique et conseillant les clients pour définir leurs besoins et programmes d'exécution (MP3).
- concernant le critère de technicité, elle organisait et animait des rencontres avec les clients, elle savait comprendre des études complexes et diversifiées, elle possédait une expérience suffisante pour assurer la gestion des travaux et des interventions et elle recherchait les solutions compatibles pour que les travaux soient conformes aux objectifs définis ; elle contrôlait le budget.
- concernant le critère de responsabilité : elle organisait et contrôlait les travaux d'exécution sur plusieurs sites en assurant le respect des consignes de sécurité, elle veillait à l'efficacité des travaux et encadrait des équipes pour les opérations techniques, elle contrôlait le respect des objectifs.
Elle soutient également avoir recruté et embauché des remplaçants et collaborateurs qu'elle formait, et qu'elle était chef de site, encadrant les équipes et vérifiant le travail accompli.
Selon l'employeur, les missions réalisées par Mme [RG] relèvent bien toutes d'un chef d'équipe CE2 : coordonner une équipe d'agents de service et veiller à la bonne exécution des travaux (respect de la discipline et des consignes d'hygiène et de sécurité), animation d'une équipe, résolution des problèmes de clientèle et recherche de solutions, gestion et adaptation des moyens. Il indique que l'organisation des remplacements sur site, notamment en recrutant des salariés, n'est en revanche étayée par aucune pièce de la salariée.
La société Serenet considère que Mme [RG] animait une équipe de salariés classés AS1 à AS3 et qu'elle veillait à ce que ces derniers effectuent correctement leurs missions dans le respect de la discipline et des consignes d'hygiène et de sécurité.
La société considère qu'il n'y a pas lieu d'appliquer le coefficient MP2 dans la mesure où l'intimée n'apportait aucune modification, ni mesures ni actions préventives correctrices des programmes d'exécution ; qu'elle n'organisait et n'animait aucune réunion clients, ayant toujours été accompagnée de son supérieur, M. [P], ajoutant qu'une autre salariée, Mme [S] exerçait les fonctions de MP2 sur le même poste et le même secteur.
La société appelante considère également que les critères relatifs au coefficient MP3 sont cumulatifs et que l'intimée n'assurait pas les relations commerciales et n'effectuait pas de devis ni ne conseillait les clients ou les services concernés pour définir les besoins et les programmes d'exécution, dont la mission incombait à M. [P].
La classification 'agent de maîtrise' sollicitée par Mme [RG] nécessite un certain niveau d'autonomie (se conformer aux directives et prendre des décisions déléguées) ainsi que de technicité (exercer des fonctions techniques commerciales et/ou d'encadrement) et de responsabilité (organiser le travail, choisir les moyens et les matériels à utiliser ainsi que les coûts)
- Concernant le niveau MP2, la grille de classification prévoit les critières suivants :
- autonomie/initiative : 'il peut prendre des initiatives pour apporter des modifications ponctuelles ou des mesures ou actions préventives correctrices des programmes d'exécution, participe aux études',
- technicité : 'il organise et anime des rencontres client ',
- responsabilité : 'il fait respecter les objectifs pour atteindre les résultats et les normes qualitatives et quantitatives'.
- Concernant le niveau MP3, la grille de classification prévoit les critières suivants :
- autonomie/initiative : 'assure les relations commerciales avec le client quant aux interventions réalisées et/ou peut apporter une assistance technique et conseiller soit les clients soit les services concernés pour définir les besoins et les programmes d'exécution'
- technicité : ' sait comprendre des études complexes et diversifiées. Possède les connaissances et l'expérience pour assurer la gestion des travaux et interventions et/ou sait rechercher les solutions compatibles entre elles pour que les travaux soient conformes aux objectifs définis et aux résultats attendus'
- responsabilité : 'assure et veille à l'efficacité des travaux et moyens mis en place et/ou peut encadrer des équipes en cas d'opérations mettant en oeuvre des techniques particulières ou lors d'interventions spécifiques . Met en place les moyens de contrôle de qualité adaptés'
Les critères pour un échelon donné sont cumulatifs entre eux ainsi qu'avec les critères correspondants aux emplois de niveaux et échelons inférieurs.
Le modèle de fiche de poste type 'responsable de secteur' (agent de maîtrise MP3) est versé aux débats par l'employeur, faisant état de tâches d'encadrement de l'équipe (animation de l'équipe, contrôle des prestations, application des règles d'hygiène et de sécurité, formation du personnel), de gestion du chantier (organisation des chantiers, suivi de la rentabilité), des relations commerciales (vérification de la facturation, rédaction du cahier des charges et des devis, rédaction de certains documents) et de gestion administrative/RH (participation au recrutement des agents et déclarations d'embauche, contrats de travail, plannings, lien avec le service RH).
Afin d'établir la réalité des fonctions exercées, Mme [RG] verse aux débats les attestations de plusieurs clients de la société Serenet ainsi que des salariés agents de service nettoyage qui faisaient partie de son équipe, dont il résulte qu'elle était l'interlocutrice directe des clients, qu'elle supervisait les tâches réalisées par les salariés agents de service et réalisait le suivi et les visites de contrôle des prestations de nettoyage (en lien avec le cahier des charges), gérant également l'équipe des salariés dont elle avait la charge (présentation et formation des nouveaux intervenants, remplacements de salariés absents). (pièces 8-2-1 à 8-2-5 et pièce 43).
S'il résulte de ces attestations - rédigées le plus souvent en termes généraux - que Mme [RG] s'acquittait en autonomie des taches et des missions qui lui étaient dévolues en sa qualité de chef d'équipe, ces taches relèvent pour la plupart d'une mission de vérification et de contrôle de la bonne exécution des travaux des salariés que Mme [RG] supervisait.
C'est notamment le cas lorsque Mme [W] [B] (responsable administrative de la société [B] technology, cliente de la société Serenet) atteste de ce que Mme [RG] a pris certaines initiatives concernant le nettoyage du sol, qui relève de l'exécution de la prestation de nettoyage.
Le fait que Mme [RG] soit par ailleurs en contact direct avec la clientèle quant à la qualité des prestations ou aux adaptations nécessaires de celles-ci ne permet pas pour autant de considérer que Mme [RG] était en charge des relations commerciales, les quelques échanges de mail versés aux débats par la salariée (pièces 30 et 31) étant trop peu nombreux pour rapporter cette preuve, d'autant plus que le mail du 13 décembre 2017 a été initialement adressé par le client à M.[Y] [GD], qui a procédé au 'suivi' de ce mail à Mme [RG], et que le mail du 21 novembre 2018 a été adressé au 'secrétariat' de la société Sérenet.
L'intimée verse aux débats des fiches intitulées 'contrôle qualité' portant son nom ('controle réalisé par Mme [RG] [R]') en date du 9 février 2018 et du 9 mars 2018 pour deux clients différents, ainsi qu'un échange de mails relativement à une prestation relative à un 'contrôle qualité' sur site (pièce 19 de la salariée), lesquels ne suffisent toutefois pas à établir que Mme [RG] était en charge de manière habituelle et récurrente d'un 'contrôle qualité' permettant de répondre aux critères de technicité et de responsabilité du niveau MP3 au sens de la convention collective.
De même, les mails adressés par Mme [RG] à M. [G] en juin 2017, novembre 2017 puis mars 2018 sont relatifs à des propositions de dates d'intervention des équipes de nettoyage pour procéder à diverses prestations dans les locaux sans qu'il puisse en être déduit que la salariée assurait à ce titre une relation commerciale complète avec ce client.
La pièce 50 versée aux débats par l'employeur intitulée 'compte rendu de poste de chef d'équipe de Mme [RG]' consistant dans une fiche dactylographiée et non signée mentionnant plusieurs 'réclamations' de la part des clients n'apporte pas d'éléments spécifiques réellement probants sur la nature et la réalité des taches réalisées par Mme [RG].
Mme [RG] ne verse enfin aux débats aucune pièce permettant d'établir qu'elle était mandatée pour l'embauche des salariés et contrairement à ce qu'elle indique, le courrier du 24 juillet 2018 (compte-rendu de l'entretien de mise au point) n'évoque pas de telles fonctions mais uniquement le fait de devoir procéder au remplacement des agents absents.
L'attestation de M. [MB] (pièce 8-1-5) selon lequel 'Mme [RG] m'a embauché elle s'est occupée de mon recrutement' (...) 'Pour tous les départs en vacances elle validait mes congés', n'est ainsi corroborée par aucun élément objectif autre que ses déclarations.
Ainsi, après examen des pièces versées aux débats par les parties, la cour constate, à l'instar du conseil de prud'hommes, que s'il résulte des diverses attestations que Mme [RG] réalisait certaines tâches excédant son niveau de qualification, prenant des initiatives en lien avec l'exécution des prestations et la gestion des sites clients de la société Serenet (elle était en effet l'interlocuteur 'terrain' de la société Serenet), elle ne rapporte pas la preuve de ce qu'il s'agissait de ses missions habituelles qu'elle exerçait à titre principal et non de façon seulement occasionnelle.
En outre, si elle était en lien avec les clients pour l'organisation et la mise en place des prestations, ainsi que le contrôle de celles-ci, Mme [RG] n'établit pas le fait d''organiser et animer des rencontres client', de même qu'elle n'établit pas qu'elle était en charge de définir en amont les besoins des clients quant aux prestations devant être réalisées (dont elle contrôlait toutefois la bonne exécution).
En conséquence de ces éléments, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes formées au titre de la reclassification.
- sur le rappel d'heures supplémentaires :
Mme [RG] soutient avoir accompli des heures supplémentaires au delà de la durée légale de travail de 35 heures en raison de sa charge de travail conséquente dès lors qu'elle supervisait 130 sites de manière autonome.
Elle soutient avoir toujours refusé de signer le reçu pour solde de tout compte et avoir sollicité à plusieurs reprises le paiement des heures supplémentaires auprès de M. [C], dirigeant de la société, lequel refusait de la rémunérer au titre des temps de déplacement entre chaque chantier en cours de la journée.
Afin de s'opposer au paiement des heures supplémentaires sollicitées, l'employeur indique que la salariée n'a jamais rempli les relevés d'heures mis à sa disposition ; qu'elle n'a jamais alerté quant à la réalisation d'heures de dépassement de la durée de travail en cours de contrat et au moment de l'établissement de son solde de tout compte.
L'article L.3121-28 du code du travail précise que toute heure accomplie au delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent.
En application de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
Il n'est pas contesté que Mme [RG] était soumise à la durée légale de travail soit 35 heures hebdomadaires ou 151,67 heures par mois, comme cela résulte des dispositions figurant au sein des contrats de travail successivement conclus.
En l'espèce, à l'appui de sa demande, Mme [RG] produit :
- une copie de ses agendas pour les années 2017 et 2018 ainsi qu'un document récapitulatif établi par ses soins mentionnant le nombre d'heures de travail effectuées chaque semaine dont il résulte qu'elle a accompli 290,75 heures supplémentaires en 2017 et 97 heures en 2018.
- deux attestations de Mme [N] [S] du 29 septembre 2020 indiquant avoir 'repris le portefeuille' clients de Mme [RG] hormis quelques clients ([Localité 8] Metropole et la ville de Cordenais). Elle précise dans la première attestation que même en ayant une charge moins importante de travail il était difficile de gérer ce portefeuille compte tenu de la dispersion géographique et de la taille des sites, et dans la seconde attestation elle indique ne pas avoir été réglée des heures supplémentaires réalisées (de même que certains agents), en précisant que M. [T] sous-estimait le nombre d'heures de travail nécessaire et que M. [C] ne comptabilisait pas les temps de trajet entre les chantiers.
- des attestations d'autres salariés polyvalents faisant état d'un non paiement de leurs heures supplémentaires (pièces 40, 41 et 42).
- un mail de M. [WI] [C] du 11 avril 2016 mentionnant plusieurs dépassements d'heure par les salariés de la société et le fait de devoir 'trouver des solutions'.
La salariée présente ainsi des éléments suffisamment précis quant aux heures supplémentaires qu'elle dit avoir réalisées, permettant à l'employeur, qui assure le contrôle des heures effectuées, d'y répondre utilement.
Si l'employeur conteste le décompte produit par la salariée, et le nombre d'heures supplémentaires qu'elle dit avoir réalisées, il ne fournit aucune pièce de nature à justifier les horaires qui auraient réellement été suivis par Mme [RG] et ne produit aucun document de contrôle relatif au décompte de la durée de travail.
Ainsi, il est sans conséquence que Mme [RG] n'ait pas sollicité le paiement de ses heures supplémentaires pendant la durée de la relation contractuelle dès lors qu'il ne s'agit pas d'une condition préalable au paiement des heures supplémentaires, sachant en outre qu'elle n'a pas signé son solde de tout compte.
Quelle que soit l'obligation de production par l'employeur des décomptes d'heures de travail, la société Serenet ne peut s'exonérer de la rémunération des heures de travail effectuées au motif que Mme [RG] n'a pas rempli les 'relevés d'heure' fournis par la société, alors même qu'il lui appartient de procéder au contrôle des heures réalisées par les salariés qu'elle emploie, et qu'elle ne transmet aucun élément à ce titre.
Les attestations de salariés versés aux débats par la société Serenet, attestant de ce que l'employeur payait les heures supplémentaires (ainsi que les temps de déplacement entre les chantiers) ne permettent pas de justifier de la réalité des heures de travail accomplies par Mme [RG] et du paiement de ses heures supplémentaires, alors que les bulletins de salaire versés aux débats par la salariée ne mentionnent aucun paiement au titre des heures supplémentaires.
L'employeur conteste également la valeur probante des agendas personnels de l'intimée qui n'ont jamais été portés à sa connaissance, en ce qu'ils sont pour une partie illisible entraînant l'impossibilité de connaître si les inscriptions correspondent à des rendez-vous professionnels ou personnels, qui sont annotés de nombreux rendez-vous personnels qui n'ont pas été décomptés des heures réalisées (de même que les temps de pause), et qui ne sont enfin corroborés par aucun élément matériel (mails, attestations, courriers etc), mais il ne produit pour autant pas d'autres éléments permettant de vérifier la réalité des heures de travail réalisées par Mme [RG].
Enfin, c'est à bon droit que Mme [RG] indique que le temps de trajet entre deux sites de travail est considéré comme du temps de travail effectif, dès lors que l'employeur ne démontre pas qu'elle ne se tenait pas à sa disposition en se conformant à ses directives, et qu'elle pouvait ainsi vaquer à des occupations personnelles.
En conséquence de l'ensemble de ces éléments, la cour a la conviction que Mme [RG] a effectué des heures supplémentaires pour la période sollicitée (2017-2018), et retient, au regard des pièces communiquées, un quantum total de 387,75 heures supplémentaires, correspondant, conformément aux calculs réalisés par la salariée dans ses écritures, avec application d'une majoration de 25%, aux rappels de salaire suivants :
- 4 433,93 euros outre 443,39 euros de congés payés afférents au titre de l'année 2017
- 1 490,96 euros outre 149,09 euros de congés payés afférents au titre de l'année 2018
Soit la somme totale de 5 924,89 euros bruts outre 592,48 euros de congés payés afférents.
Le jugement déféré sera ainsi confirmé de ce chef.
- sur la contrepartie obligatoire en repos
Madame [RG] soutient qu'elle a droit à une indemnité compensatrice au titre du repos compensateur pour toutes les heures réalisées au delà du contingent annuel, soit 100, 75 heures en 2017.
La société Serenet s'y oppose en sollicitant l'infirmation du jugement.
Selon l'article L. 3121-30 du code du travail, 'Des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d'un contingent annuel. Les heures effectuées au delà de ce contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos.
Les heures prises en compte pour le calcul du contingent annuel d'heures supplémentaires sont celles accomplies au delà de la durée légale.
Les heures supplémentaires ouvrant droit au repos compensateur équivalent mentionné à l'article L. 3121-28 et celles accomplies dans les cas de travaux urgents énumérés à l'article L. 3132-4 ne s'imputent pas sur le contingent annuel d'heures supplémentaires.'
L'article L3121-33 du même code précise que 'I.-Une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche :
1° Prévoit le ou les taux de majoration des heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale ou de la durée considérée comme équivalente. Ce taux ne peut être inférieur à 10 % ;
2° Définit le contingent annuel prévu à l'article L. 3121-30 ;
3° Fixe l'ensemble des conditions d'accomplissement d'heures supplémentaires au-delà du contingent annuel ainsi que la durée, les caractéristiques et les conditions de prise de la contrepartie obligatoire sous forme de repos prévue au même article L. 3121-30. Cette contrepartie obligatoire ne peut être inférieure à 50 % des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel mentionné audit article L. 3121-30 pour les entreprises de vingt salariés au plus, et à 100 % de ces mêmes heures pour les entreprises de plus de vingt salariés.
Les heures supplémentaires sont accomplies, dans la limite du contingent annuel applicable dans l'entreprise, après information du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s'ils existent.
Les heures supplémentaires sont accomplies, au-delà du contingent annuel applicable dans l'entreprise, après avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s'ils existent.
II.-Une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut également :
1° Prévoir qu'une contrepartie sous forme de repos est accordée au titre des heures supplémentaires accomplies dans la limite du contingent ;
2° Prévoir le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires, ainsi que des majorations, par un repos compensateur équivalent.
III.-Une convention ou un accord d'entreprise peut adapter les conditions et les modalités d'attribution et de prise du repos compensateur de remplacement.'
En vertu de l'article L.3121-38 du code du travail, 'à défaut d'accord, la contrepartie obligatoire sous forme de repos mentionnée à l'article L. 3121-30 est fixée à 50 % des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel mentionné au même article L. 3121-30 pour les entreprises de vingt salariés au plus, et à 100 % de ces mêmes heures pour les entreprises de plus de vingt salariés.'
Le salarié, qui n'a pas été en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos compensateur, a droit à l'indemnisation du préjudice subi, laquelle comporte à la fois le montant de l'indemnité de repos compensateur et le montant de l'indemnité de congés payés afférents.
L'article D. 3121-14-1 devenu l'article D. 3121-24 fixe le contingent annuel à 220 heures.
L'article 4.7.2 de la convention collective applicable fixe le contingent annuel à 190 heures, seuil qui sera donc pris en considération.
En l'espèce Mme [RG] a effectué 100,75 heures supplémentaires au delà du contingent annuel en 2017, ce qui lui donnait droit au même nombre d'heures de contrepartie obligatoire en repos, la société Serenet employant plus de 20 salariés.
Ainsi, le préjudice subi de ce chef justifie que lui soit alloué, au titre de l'indemnité de repos compensateur, la somme de 1 352,06 euros nets qui comporte à la fois le montant de l'indemnité pour privation de repos compensateur et le montant de l'indemnité de congés payés afférents
Le jugement déféré sera donc infirmé en son quantum.
- sur le travail dissimulé
Selon l'article L. 8221-5 du code du travail,"Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales."
Selon l'article L. 8223-1, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
Mme [RG] considère que l'employeur était informé de la réalité de son temps de travail car elle lui remettait des rapports d'activité et d'intervention chez ses clients. Selon elle, connaissant également les adresses des différents chantiers, l'employeur connaissait le temps de déplacement nécessaire afin de s'y rendre.
L'employeur conteste toute intention de dissimulation laquelle n'est pas démontrée selon lui par Mme [RG].
Mme [RG] communique un mail rédigé par M. [C] le 11 avril 2016 adressé notamment à M. [E] [T] ainsi qu'à plusieurs responsables d'équipe dont Mme [RG], avec le 'service personnel' en copie (Pièce n°24) dans lequel il indique 'malgré le point fait en réunion d'exploitation on continu à faire faire au salarier des dépassement d'heure sur leur temps plein majoré à 25% lors du pointage des feuilles d'heure. Il faut trouver des solutions et passer les heures sur un membre de la famille ou autre ! Il y a toujours des solutions avant la validation des payes. Ce sont toujours les mêmes qui reviennent d'un mois sur l'autre. J'avais déjà interdit que des heures soient payées sans que je sois au courant (...)'
Dans son attestation du 1er octobre 2020, Mme [S], responsable de secteur, indique que l'employeur sous-estimait le nombre d'heures nécessaires pour réaliser les travaux de nettoyage sur un chantier, en précisant que 'pour certains salariés' le 'nombre d'heures supplémentaires n'étaient pas payés mais comptabilisés sur un 'compte heures' et reversés en prime', d'autres collaborateurs n'étant pas payés. Concernant le temps prévu pour les chantiers, Mme [S] indique que 'Mr [E] [P] arrachait les post-it afin qu'ils ne soient pas vus par les agents et notait sur le bon un nombre d'heures sous-estimé'. Elle ajoute 'Mr [C] disait tout fort et sans aucune retenue dans les bureaux d'exploitation que les temps de trajet entre les chantiers au cours de la journée de travail n'étaient pas payés du fait que les agents utilisaient les véhicules de l'entreprise alors que c'était du temps de travail'. (pièce 27 de la salariée)
De même, M. [SD], ancien salarié de la société Serenet atteste comme suit : 'en rendez vous avec M. [C] le mercredi 27/02/2019 à 17 heures dans son bureau de [Localité 8] (...) Celui-ci m'annonça qu'il était impossible à la société Sérenet de me régulariser les heures supplémentaires très importantes travaillées sous les ordres de Mme [LF] [I] ma responsable à cette époque. Monsieur [C] m'affirma que seul un 'faux contrat de travail' signé par ma femme pourrait me permettre d'être payé un minimum de ces heures travaillées par mes soins (...)', joignant à son attestation un contrat de travail à temps complet à durée déterminée établi le 1er mars 2019 entre la société Serenet et Mme [L] [SD] en qualité d'agent de service. Il précisait également avoir conclu avec la société Serenet un CDI de 9 heures par semaine alors qu'il travaillait 34 heures. (Pièce 45 de la salariée).
Madame [L] [X] épouse [SD] confirme les dires de son mari en indiquant 'il m'a été demandé par ce Monsieur (M. [C]) de signer un faux contrat de travail à mon nom pour permettre le paiement de ces heures que mon mari a effectués. J'ai été obligée de le signer sinon mon mari perdait environ 811 euros. N'ayant pas beaucoup d'argent pour vivre nous avons dû nous résoudre à le faire sous ce chantage'(attestation de Mme [SD], pièce 47 de la salariée).
La cour constate, à l'instar du conseil de prud'hommes, que ces éléments qui résultent tant du mail du 11 avril 2016 que des attestations rappelées ci-dessus manifestent le caractère intentionnel du non paiement des heures supplémentaires réalisées par certains salariés, l'employeur échouant notamment à justifier d'une raison objective à cette demande de 'passer les heures sur un membre de la famille ou autre'. Le fait que certains salariés étaient rémunérés des heures supplémentaires réalisées par eux ne suffit pas à démontrer l'absence de toute pratique frauduleuse.
La dissimulation des heures supplémentaires constituait un mode de gestion pour l'employeur afin de réduire ses coûts, ayant ainsi porté atteinte au droit de Mme [RG] au paiement majoré de ses heures supplémentaires.
En conséquence, en application de l'article L. 8223-1 du code du travail, et par confirmation du jugement déféré, la société Serenet est condamnée à payer à Mme [RG] la somme de 11 238, 72 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.
- sur le harcèlement moral :
Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
En application de l'article L. 1154-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, lorsque le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement, et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs, étrangers à tout harcèlement.
Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Mme [RG], qui sollicite l'infirmation du jugement à ce titre, prétend avoir été victime de faits de harcèlement moral aux motifs :
- qu'elle a subi des agressions d'une collègue, Mme [M], lui reprochant les difficultés physiques qu'elle rencontrait pendant l'exécution de ses fonctions, sans que l'employeur n'ait remédié à cette situation.
- que l'employeur a engagé un processus d'éviction à son égard suite au lancement d'une procédure de reconnaissance de statut de travailleur handicapé, en adressant successivement différents courriers recommandés lui imputant des griefs infondés notamment la perte du client Sterkelec pour ne pas avoir géré le remplacement d'un agent et le manque de disponibilité et de suivi du client Prej.
La société appelante conteste toute situation de harcèlement moral.
Mme [RG] verse aux débats le mail qu'elle a adressé à M. [C] le 25 mai 2018 dans lequel elle se plaint de 'l'état critique' dans lequel se trouve le service exploitation en indiquant que [J] [M] s'en est prise à elle sans raison et notamment la veille aux alentours de 16 heures : 'j'étais sur mon ordinateur en train de travailler, elle est arrivée furieuse car l'apprenti était en train de ranger trois cartons de 20 L et un carton de 12 L. Elle m'a crié dessus car ce n'était pas normal que l'apprenti range les cartons à ma place. Les témoins de cette scène sont [LF] [O] et [GZ] [D]. Cette demande avait été vu et validé par [E] [T] car je ne peux porter de charge lourde et actuellement demande de travailleur handicapé en cours (... ) je suis actuellement en attente d'opération pour fin juin malgré des douleurs chroniques et handicapantes 24h/24 due à une maladie et j'essaye d'ici là de faire mon travail correctement et dans de bonnes conditions' (...) 'Autre épisode marquant qui a été le 23 avril 2018, [J] s'en était pris à moi sans raison. [E] était là et témoin'.
Elle ajoutait 'à plusieurs reprises j'ai demandé à [E] [P] de réglé cette situation en vain. J'en appelle maintenant la direction pour qu'elle soit informé de cette situation qui n'est pas tenable. Cette situation ne peut plus continuer, on ne peut subir les sautes d'humeur de [J] [M] et un harcèlement moral ponctuel' en achevant par 'je vous prie de bien prendre en compte ma demande et que cette situation s'arrête car ce n'est pas vivable pour le bon fonctionnement du service exploitation'.
Elle établit ainsi avoir dénoncé auprès de son employeur le comportement agressif de sa collègue à son égard.
Mme [RG] justifie par ailleurs de sa demande de reconnaissance en qualité de travailleur handicapé transmise le 13 avril 2018 et de la décision de reconnaissance de cette qualité de travailleur handicapé pour la période du 28 octobre 2018 au 30 septembre 2020 selon courrier de la MDPH de Loire Atlantique du 26 octobre 2018.
Elle transmet en outre plusieurs courriers lui ayant été adressés par l'employeur:
- courrier du 12 juin 2018, alors qu'elle était en arrêt maladie et relatif à une 'mise au point' mentionnant, concernant l'arrêt maladie du 4 juin au 22 juin 2018 'il semblerait que votre arrêt maladie soit, à notre sens, prémédité', lui reprochant d'avoir quitté l'entreprise sans communiquer sur son état de santé et sa probable absence, et de ne pas avoir accepté de restituer les clés du véhicule de service.
Ce courrier faisait également état de sujets à discuter avec son responsable à son retour, dont les dégradations matérielles au sein des locaux du client BK Event.
- un courrier du 24 juillet 2018 intitulé 'compte-rendu de notre entretien de mise au point' faisant état de dysfonctionnements dans l'exercice de sa mission avant son arrêt de travail du 4 juin 2018, en lien avec des réclamations de clients, à savoir [Adresse 6] (contrôle qualité ayant mis en évidence des manquements ayant entraîné une pénalité), Demeco et déménagement Drouin (non respect du temps de travail défini par l'agent, qualité insuffisante des prestations, et absence de contrôle), Serkelec (non gestion du remplacement d'un agent démissionnaire), BK Event (manque de communication), hippodrome et complexe sportif (retards de livraison), Prej (demande du client non traitée, manque de communication, de disponibilité et d'écoute), résidence les [Localité 9] Blanches (manque de présence et d'accompagnement du nouvel agent, prestation non conforme). Ce courrier évoque également de manière plus générale une mauvaise gestion des remplacements et des livraisons non effectuées dans les délais.
Mme [RG] justifie enfin, selon l'attestation de son médecin traitant, de son arrêt de travail du 4 juin 2018 au 17 août 2018 pour 'épuisement physique et psychique' (pièce 13).
Pris dans leur ensemble, les faits ainsi établis et notamment les courriers adressés par l'employeur pendant l'arrêt maladie de la salariée, lui reprochant celui-ci ainsi que d'autres manquements, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral, et il incombe dès lors à l'employeur de démontrer que ses agissements sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral.
Concernant d'abord le mail adressé par Mme [RG] à M. [C] le 25 mai 2018 se plaignant des agissements de Mme [J] [M] à son encontre, l'employeur justifie en effet de ce que Mme [M], qui avait été recrutée le 15 mai 2017 comme inspecteur (agent de maîtrise) a démissionné de son poste par courrier du 23 juin 2018, de sorte qu'il n'a pas été possible de sanctionner cette dernière pour ces faits.
La société Serenet justifie également avoir adressé à Mme [M] le 23 mai 2018 un courrier faisant suite à un 'entretien de mise au point' reprochant à celle-ci, outre des dysfonctionnements dans l'exercice de sa mission, un 'comportement qui se doit d'être plus posé et moins agressif tant envers vos collègues qu'envers vos responsables', évoquant plusieurs altercations avec les collègues. L'employeur évoquait dans ce courrier une 'période d'observation sur les trois prochains mois à réception de ce courrier' afin de constater l'évolution attendue du comportement avant de prendre toute sanction 'qui pourrait aller jusqu'à la mise à pied disciplinaire'. (Pièce 32 de l'employeur)
Même si les faits dénoncés par Mme [RG] dans son mail du 25 mai 2018 qu'elle indique avoir subis la veille soit le 24 mai 2018 ne sont pas spécifiquement évoqués par la société Sérenet dans le courrier adressé à Mme [M] - dès lors qu'elle n'en avait pas encore connaissance à la date de ce courrier -, il s'en suit que l'employeur a pris des mesures à l'encontre de Mme [M] pour garantir l'absence de comportement 'harcelant'.
Concernant le 'processus d'éviction' de Mme [RG] suite à son arrêt maladie, par les deux courriers lui ayant été adressés le 12 juin 2018 et le 24 juillet 2018, l'employeur indique qu'il était en droit de lui faire part de remarques sur la qualité de son travail, y compris pendant son arrêt de travail, les griefs étant antérieurs à son arrêt de travail.
Toutefois, en l'espèce, l'employeur, qui ne verse aux débats aucune pièce permettant d'établir les griefs qu'il impute à Mme [RG] dans son courrier du 24 juillet 2018, ne justifie donc pas de la matérialité et de la réalité de ces derniers. Faute de ce faire, il n'apporte ainsi aucune justification objective à ce courrier de reproches ayant été adressé à la salariée alors qu'elle était en arrêt de travail.
Il en est de même du reproche mentionné dans le courrier du 12 juin 2018 concernant le 'caractère prémédité' de son arrêt de travail et le fait d'avoir quitté l'entreprise sans communiquer sur son état de santé et sa probable absence, et de ne pas avoir accepté de restituer les clés du véhicule de service.
Ainsi, à défaut pour l'employeur d'apporter une justification objective aux agissements identifiés qui soit étrangère à tout harcèlement moral, la cour a la conviction que Mme [RG] a subi une situation de harcèlement moral.
Le préjudice par elle subi de ce chef justifie que lui soit allouée la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts.
Le jugement sera infirmé de ces chefs.
- sur l'obligation de sécurité de l'employeur :
Selon l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent :
1°) des actions de prévention des risques professionnels ;
2°) des actions d'information et de formation ;
3°) la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.
L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.
L'article L. 4121-2 du même code, dans sa rédaction applicable à compter du 10 août 2016, prévoit que l'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :
1° Eviter les risques ;
2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;
3° Combattre les risques à la source ;
4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ;
5° Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ;
6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ;
7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1, ainsi que ceux liés aux agissements sexistes définis à l'article L. 1142-2-1 ;
8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ;
9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs.
Pour confirmation du jugement à ce titre, Mme [RG] soutient que la société Serenet n'a pas tenu compte des restrictions d'aptitude du médecin du travail dans son avis du 15 janvier 2018 ayant préconisé de ne pas réaliser des déplacements fréquents en voiture ni de station assise prolongée. Elle affirme avoir continué de réaliser tout au long de la journée, des déplacements en voiture entre les nombreux sites des clients et ne pas avoir bénéficié de siège ergonomique En outre, elle affirme avoir continué d'avoir porté des charges lourdes.
Pour infirmation du jugement rendu, la société Sérenet soutient ne pas avoir eu connaissance de la restriction médicale du médecin du travail en date du 15 janvier 2018 selon laquelle l'intimée ne pouvait effectuer des « déplacements fréquents en voiture en station assise prolongée », au regard de l'avis qui lui a été transmis par la médecine du travail, en date du même jour. Elle précise avoir mis à disposition de Mme [RG] un siège ergonomique. Elle ajoute que le certificat médical établi par le médecin traitant n'indique pas que l'épuisement physique et psychique de l'intimée était lié à son travail et enfin considère qu'il résulte du mail de l'intimée en date du 25 mai 2018 que la société avait mis en oeuvre les mesures spécifiques nécessaires compte-tenu de son état de santé.
Il résulte de l'attestation de suivi du médecin du travail réalisé à la suite de la visite médicale du 15 janvier 2018 (visite à la demande de la salariée) versée aux débats par la salariée (pièce 9) les préconisations suivantes (rédigées de manière manuscrite) : 'prévoir un poste sans port de charges de plus de 10 [7] sans déplacements fréquents en voiture ni station assise prolongée'.
L'employeur pour sa part verse aux débats l'attestation de suivi rédigée à la même date (15 janvier 2018) par le même médecin du travail dont les préconisations, dactylographiées, sont les suivantes : 'prévoir un poste en évitant le port de charges lourdes, la station debout prolongée et un siège ergonomique pour le travail administratif'. (pièce 14 de l'employeur)
Eu égard à ces éléments, la cour constate qu'il n'est pas établi que l'attestation du médecin du travail telle que remise à la salariée ait été portée à la connaissance de l'employeur.
Toutefois, comme l'a justement relevé le conseil de prud'hommes, eu égard à l'avis du médecin du travail communiqué par l'employeur préconisant plusieurs aménagements relativement au poste de travail de Mme [RG], il appartenait à celui-ci de réfléchir conjointement avec Mme [RG] et avec le médecin du travail - en interrogeant au besoin ce dernier - sur la nature et les modalités effectives et concrètes des aménagements de son poste de travail rendus nécessaires, notamment en ce qui concerne le port de charges lourdes.
Mme [RG] verse aux débats l'attestation de M. [V] [Z], 'directeur des opérations', lequel atteste avoir vu [R] [RG] 'à de nombreuses reprises' charger sa voiture Citroen C3 de produits (paquets d'essuie-main, papier toilette, bidons de produits...) en précisant qu'elle était 'remplie à bord' afin de livrer les clients. (Pièce 44).
Toutefois, cette attestation, rédigée de façon trop imprécise, ne permet pas de considérer que Mme [RG] était astreinte de porter des charges lourdes y compris postérieurement à l'avis établi par les médecin du travail le 15 janvier 2018, sachant qu'elle ne justifie pas avoir avisé son employeur de ses difficultés de santé antérieurement, et que sa première demande de reconnaissance du statut de travailleur handicapé date du 13 avril 2018 selon le courrier de la MDPH versé aux débats.
En outre dans son mail adressé à la société Serenet le 25 mai 2018, Mme [RG] indique, concernant le fait que l'apprenti range les cartons à sa place 'cette demande avait été vue en validée avec [E] [P] car je ne peux porter de charges lourdes', ce qui montre que l'employeur avait pris des mesures pour éviter à Mme [RG] de porter de charges lourdes.
Concernant le siège ergonomique, dont la remise est contestée par Mme [RG], la société Serenet verse aux débats :
- une 'étude de poste travail sur écran' émanant du service de santé au travail de la région nantaise dont il n'est toutefois pas justifié qu'il s'agisse du poste de travail de Mme [RG] dès lors en outre qu'elle est adressée à une entreprise dénommée CFHA (pièce 28)
- l'attestation de la société Arsilom indiquant avoir vendu à 'Mr [F] [WI] de la société SERENET des fauteuils STEELCASE modèle PLEASE 2 en décembre 2016 et septembre 2017", ajoutant que cet achat a été réalisé suite à la demande des salariés de l'entreprise et que le fauteuil 'Please 2" est adapté aux personnes passant beaucoup de temps derrière leur bureau ou souffrant de problèmes de dos. Cette attestation, faisant état d'achat de fauteuils en 2016 et 2017, soit avant l'avis émis par le médecin du travail, ne permet pas d'établir que Mme [RG] en ait bénéficié personnellement, de même que les factures afférentes à ces achats qui sont également versées aux débats par l'employeur (pièces 29 à 31)
Ainsi, en considération de ces éléments, la cour considère, à l'instar du conseil de prud'hommes, que l'employeur ne justifie pas avoir pris l'ensemble des mesures nécessaires et suffisantes afin de respecter les préconisations du médecin du travail, et de prévenir la dégradation de l'état de santé de la salariée laquelle a fait l'objet d'un arrêt de travail à compter du 4 juin 2018 soit moins de 5 mois après les recommandations du médecin du travail, et qui a été reconnue en qualité de travailleur handicapé selon décision de la MDPH du 26 octobre 2018 (suite à la demande déposée le 13 avril), la société ayant ainsi manqué de ce fait à son obligation de sécurité.
Le préjudice par elle subi en lien avec ce manquement de l'employeur affectant directement la santé de la salariée justifie que lui soit allouée la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts.
Le jugement sera infirmé de ce chef quant au quantum de l'indemnité allouée à la salariée à ce titre.
- sur la contestation de la rupture conventionnelle :
Mme [RG] soutient avoir été contrainte de consentir à une rupture conventionnelle dans un contexte de harcèlement moral, de surcharge de travail, de persistance fautive de l'employeur à ne pas respecter les préconisations médicales, d'usage abusif du pouvoir disciplinaire alors qu'elle était en arrêt de travail. Elle indique que l'entretien du 20 juillet 2020 ne consistait pas en un entretien préalable à une rupture conventionnelle mais à un entretien de recadrage.
La société soutient que l'intimée est à l'initiative de cette rupture ; qu'elle n'a jamais contesté l'avertissement notifié ; qu'elle a émis à plusieurs reprises le souhait d'endosser plus de responsabilités ; qu'elle ne précise pas quelle a été sa situation professionnelle postérieurement à sa rupture.
Concernant les entretiens, la société soutient qu'un premier échange a eu lieu le 20 juillet 2019 à l'occasion d'un entretien de recadrage, ce qui en soit ne vicie pas la procédure de rupture conventionnelle ; qu'après avoir échangé sur le principe, les parties ont fixé un entretien de signature le 9 août 2018, laissant à l'intimée le temps de se renseigner auprès des services de l'inspection du travail et de signer la rupture conventionnelle en connaissance de cause ; qu'elle a remis l'exemplaire de la rupture conventionnelle à la salariée au jour de la signature.
En application de l'article L. 1237-11 du code du travail, "l'employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat qui les lie", et "la rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties"
En outre, selon l'article L. 1237-12 du code du travail "Les parties au contrat conviennent du principe d'une rupture conventionnelle lors d'un ou plusieurs entretiens au cours desquels le salarié peut se faire assister (...)"
L'article L. 1237-13 à sa suite précise que : "La convention de rupture définit les conditions de celle-ci, notamment le montant de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle qui ne peut pas être inférieur à celui de l'indemnité prévue à l'article L.1234-9.
Elle fixe la date de rupture du contrat de travail, qui ne peut intervenir avant le lendemain du jour de l'homologation.
A compter de la date de sa signature par les deux parties, chacune d'entre elles dispose d'un délai de quinze jours calendaires pour exercer son droit de rétractation. Ce droit est exercé sous la forme d'une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l 'autre partie."
En vertu de l'article L. 1237-14 du même code, il est précisé que : "A l'issue du délai de rétractation, la partie la plus diligente adresse une demande d'homologation à l'autorité administrative, avec un exemplaire de la convention de rupture. Un arrêté du ministre chargé du travail fixe le modèle de cette demande.
L'autorité administrative dispose d'un délai d'instruction de quinze jours ouvrables, à compter de la réception de la demande, pour s'assurer du respect des conditions prévues à la présente section et de la liberté de consentement des parties. A défaut de notification dans ce délai, l'homologation est réputée acquise et l'autorité administrative est dessaisie."(...)
La convention de rupture conventionnelle, résultant d'une volonté commune des parties de rompre le contrat de travail, est nécessairement le fruit d'une concertation entre l'employeur et le salarié et suppose une discussion préalable.
Il est admis, au visa des articles L. 1237-12 du code du travail et 1315, devenu 1353, du code civil, que cette discussion doit prendre la forme d'au moins un entretien préalable à la signature, lequel garantit la liberté du consentement des parties, sous peine de nullité de la convention. C'est toutefois à celui qui invoque cette cause de nullité d'en établir l'existence. (Soc. 1er décembre 2016 n°15-21.609).
Si le législateur n'a pas défini la teneur de cet entretien, celui-ci doit donner lieu à une information du salarié afin de lui permettre de donner un consentement éclairé.
En l'espèce, l'employeur verse aux débats le courrier de Mme [RG] du 25 juin 2018 sollicitant une rupture conventionnelle 'afin de préparer de la meilleure façon possible mon départ pour la bonne organisation de l'entreprise comme pour la mienne'. (pièce 10). Il en résulte donc que la procédure de rupture conventionnelle a été initiée par la salariée.
En revanche, le courrier du 24 juillet 2018 adressé par la société Serenet à Mme [RG] fait expressément référence à un 'entretien de mise au point' qui s'est déroulé le 20 juillet 2018, à la suite de plusieurs réclamations de clients (rappelées au sein du courrier) ainsi que d'autres manquements reprochés à la salariée (mauvaise gestion des remplacements lors des absences estivales, et retard de livraisons). Le courrier s'achève en évoquant ainsi le manque de professionnalisme de la salariée et le rappel de la nécessité pour celle-ci de rétablir à son retour d'absence un comportement exemplaire.
La salariée justifie ainsi que l'entretien du 20 juillet 2018, lors duquel aucune des parties n'était assistée, ne consistait pas en un entretien préalable à la signature d'une possible rupture conventionnelle.
La rupture conventionnelle signée le 9 août 2018 mentionne comme seul entretien préalable celui du 20 juillet, et si l'employeur fait état d'un second entretien le 9 août, date de signature, celui-ci n'est pas mentionné sur le formulaire de rupture et ne saurait des lors valoir entretien pour ladite rupture conventionnelle (pièce 16 de la salariée).
Il résulte des éléments versés aux débats par Mme [RG] la preuve de l'absence de tout entretien préalable organisé entre l'employeur et Mme [RG] ayant pour objet la signature d'une rupture conventionnelle, laquelle a toutefois été signée par les deux parties le 9 août 2018, la nullité de la convention est donc encourue et doit être prononcée de ce fait.
Par confirmation du jugement déféré, la rupture intervenue à la date du 9 août 2018 doit ainsi s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
- sur les conséquences financières :
- sur l'indemnité de licenciement :
Aux termes de l'article L 1234-9 du code du travail, le salarié licencié alors qu'il compte une ancienneté d'au moins huit mois au service du même employeur a droit, sauf en cas de faute grave ou lourde, à une indemnité de licenciement calculée en fonction de la rémunération brute dont le salarié disposait antérieurement à la rupture du contrat de travail.
L'article R. 1234-1 du code du travail dispose que cette indemnité ne peut être inférieure à une somme calculée par année de service dans l'entreprise, tenant compte des durées de service accomplies au-delà des années pleine. En cas d'année incomplète, l'indemnité est calculée proportionnellement au nombre de mois complets.
Conformément à l'article R. 1234-2 du code du travail, dans sa rédaction issue du décret du 25 septembre 2017, l'indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un quart de mois de salaire par année d'ancienneté jusqu'à dix ans.
En l'espèce, eu égard au salaire moyen de la salariée qui s'élève à la somme de 1914,40 euros, et d'une ancienneté de 4 ans, 3 mois et 8 jours telle que retenue par le conseil de prud'hommes, Mme [RG] peut donc prétendre à la somme de 2 044,69 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement.
Il n'est pas contesté que Mme [RG] a perçu la somme de 1 960,40 euros au titre de la rupture conventionnelle, qu'il lui appartient de restituer, de sorte que la société Serenet reste devoir à Mme [RG] au titre de l'indemnité de licenciement la somme de 84,29 euros.
Par confirmation du jugement déféré, la société Serenet sera condamnée à payer cette somme à Mme [RG].
- sur l'indemnité compensatrice de préavis :
Aux termes de l'article L.1234-1 du code du travail, lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit à un préavis dont la durée est calculée en fonction de l'ancienneté de services continus dont il justifie chez le même employeur, à savoir deux mois pour une ancienneté d'au moins deux ans.
Selon l'article L.1234-5 du code du travail, lorsque le salarié n'exécute pas le préavis, il a droit, sauf s'il a commis une faute grave, ou si l'inexécution résulte du commun accord des parties, à une indemnité compensatrice.
En l'espèce, sans contestation sur le montant accordé en première instance, et par confirmation du jugement déféré, la société Serenet est condamnée à payer à Mme [RG] la somme de 3 814,98 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre celle de 381,49 euros au titre des congés payés afférents.
- sur les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Mme [RG] sollicite l'octroi de la somme de 8 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors que le jugement déféré a fait droit à sa demande en évaluant son préjudice à la somme de 5 700 euros.
Selon l'article L1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux, qui, pour une ancienneté de 4 années, s'élèvent entre 3 et 5 mois de salaire.
En l'espèce, au regard du salaire moyen perçu par la salariée, de son âge et de sa qualification, sachant qu'elle justifie avoir été inscrite comme demandeuse d'emploi auprès de Pole Emploi entre le 3 octobre 2018 et le 31 août 2019 avant de retrouver un emploi comme chef d'équipe au sein de l'entreprise Saprena, le préjudice par elle subi du fait de son licenciement sans cause réelle et sérieuse sera réparé par l'allocation de la somme de 7 000 euros.
Le jugement sera ainsi infirmé de ce chef.
- Sur le remboursement des allocations servies par Pôle emploi devenu France Travail :
L'article L1235-4 du code du travail prévoit que dans les cas où le licenciement est nul ou dénué de cause réelle et sérieuse, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé.
En l'espèce, la rupture s'analysant en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la société Serenet sera tenue au remboursement des allocations servies par Pôle emploi à Madame [RG] dans la limite de 2 mois d'allocations, par confirmation du jugement déféré.
Sur la remise des documents sociaux
La demande de remise de documents sociaux rectifiés conformes à la présente décision est fondée en son principe, et le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Le jugement sera confirmé de ce chef.
La société Serenet, qui succombe, sera condamnée aux dépens et au paiement de la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
* * *
* PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement par arrêt mis à la disposition des parties au greffe,
Confirme le jugement déféré, sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité pour privation du repos compensateur, la demande indemnitaire formée au titre du harcèlement moral, le montant de l'indemnité allouée au titre de l'obligation de sécurité, ainsi que de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
L'infirme de ces chefs,
Statuant de nouveau des chefs infirmés,
Condamne la SAS Serenet à payer à Mme [R] [RG] les sommes suivantes :
- 1 352, 06 euros au titre de l'indemnité pour privation de repos compensateur
- 1 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du harcèlement moral.
- 2 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité
- 7 000 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Rappelle que les sommes allouées porteront intérêts légaux à compter de la saisine du conseil de prud'hommes pour les sommes à caractère salarial et à compter du prononcé de l'arrêt pour les sommes à caractère indemnitaire.
Y ajoutant
Condamne la SAS Serenet à payer à Madame [R] [RG] la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la SAS Serenet aux dépens d'appel
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.
ARRÊT N°261
N° RG 21/07828 -
N° Portalis DBVL-V-B7F-SJUM
S.A.S. SERVICE REGIONAL DE NETTOYAGE - SERENET
C/
Mme [R] [RG]
Sur appel du jugement du C.P.H. de [Localité 8] du 10/11/2021
RG CPH : F 19/00891
Infirmation partielle
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Copie certifiée conforme délivrée
le:
à:
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2025
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Nadège BOSSARD, Présidente,
Madame Anne-Laure DELACOUR, Conseillère,
Madame Anne-Cécile MERIC, Conseillère,
GREFFIER :
Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 03 Juillet 2025
En présence de Madame [A] [U], médiatrice judiciaire,
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 15 Octobre 2025 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTE et intimée à titre incident :
La S.A.S. SERVICE REGIONAL DE NETTOYAGE - SERENET prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Cécile MERCIER substituant à l'audience Me Nicolas CARABIN de la SELARL CARABIN-STIERLEN AVOCATS, Avocats au Barreau de RENNES
INTIMÉE et appelante à titre incident :
Madame [R] [RG]
née le 19 Février 1990 à [Localité 5] (49)
demeurant [Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Johann ABRAS de la SARL ABRAS AVOCAT, Avocat au Barreau de NANTES
Mme [R] [RG] a été engagée par la société Serenet selon contrat de travail à durée déterminée à temps complet pour un motif de remplacement de salarié absent du 26 mai 2014 au 31 mai 2014 en qualité d'agent de service, AS3A de la classification conventionnelle de branche des entreprises de propreté.
Un nouveau contrat de travail à durée déterminée a été conclu du 1er juin au 30 juin 2014.
A compter du 1er juillet 2014, Mme [RG] et la société Serenet ont conclu un contrat d'apprentissage d'une durée d'un an pour la préparation du diplôme de Responsable des Services Hygiène et Propreté, sous la responsabilité de M. [P], responsable d'exploitation.
Du 1er juillet au 2 octobre 2015, Mme [RG] et la société ont conclu un contrat de travail à durée déterminée à temps complet en raison d'un surcroît temporaire d'activité lié à la réorganisation du service exploitation de l'agence de [Localité 8].
Par avenant du 21 septembre 2015, à effet au 2 octobre 2015, le contrat de travail de Mme [RG] s'est poursuivi dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée en qualité de chef d'équipe, classification CE2.
Mme [RG] a connu des difficultés de santé fin 2017, et le médecin du travail a préconisé un aménagement de poste, selon avis du 15 janvier 2018. (« Prévoir un poste sans port de charges de plus de 10 kilos, sans déplacements fréquents en voiture ni station assise prolongée »)
Mme [RG] a été placée en arrêt de travail du 04 juin 2018 au 17 août 2018 pour "épuisement physique et psychique".
Par courrier du 25 juin 2018, Mme [RG] a formulé une demande de rupture conventionnelle. Elle a été convoquée par la société Serenet à un entretien le 20 juillet 2018. Par courrier du 24 juillet 2018, Mme [RG] s'est vue notifier un compte-rendu d'entretien de mise au point contenant une série de griefs concernant la qualité de l'exécution de sa prestation de travail.
Une convention de rupture conventionnelle a été signée le 09 août 2018. Le contrat de travail a été rompu à l'issue du délai d'homologation de la DIRECCTE le 18 septembre 2018.
Le 16 septembre 2019, Mme [RG] a saisi le conseil de prud'hommes de Nantes aux fins de :
- Sur la reclassification et le rappel correspondant:
- Dire et juger que 1'emploi occupé par Mme [RG], correspondait à la classification MP3 selon la CC application propreté, statut agent de maîtrise
- Rappel de salaire par rapport au minima conventionnel applicable : 6 876,17 €
- Congés payés afférents: 687,61 €
- Subsidiairement, Dire et juger que l'emploi occupé par Mme [RG], correspondait à la classification MP2 selon la CC application propreté, statut agent de maîtrise
- Rappel de salaire par rapport au minima conventionnel applicable : 2 635,96 €
- Congés payés afférents : 263,59 €
- Sur le rappel d'heures supplémentaires :
- Dire et juger que Mme [RG] a accompli des heures supplémentaires dont elle n'a pas été payée
- Au titre de l'année 2017, en cas de reclassification MP3 5 277,11 €
- Congés payés afférents : 527,71 €
- Subsidiairement, en cas de reclassification MP2 : 4 757,39 €
- Congés payés afférents : 475,73 €
- Très subsidiairement : en l'absence de reclassification MP2 : 4 433,93 €
- Congés payés afférents : 443,93 €
- Au titre de l'année 2018,
- de la semaine 1 à la semaine 7,
- en cas de reclassification MP3 : 626,17 €
- Congés payés afférents : 62,62 €
- Subsidiairement, en cas de reclassification MP2 : 564,50 €
- Congés payés afférents :56,45 €
- Très subsidiairement : en l'absence de reclassification MP2 :526,12 €
- Congés payés afférents : 52,61 €
- De la semaine 10 à la semaine 12,
- en cas de reclassification MP3 : 1 146,88 €
- Congés payés afférents :114,68 €
- Subsidiairement, en cas de reclassifcation MP2 : 1 033,59 €
- Congés payés afférents : 103,35 €
- Très subsidiairement : en l'absence de reclassification MP2 : 964,84 €
- Congés payés afférents : 96,48 €
- Sur l'indemnité compensatrice de contrepartie obligatoire pour dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires
- Dire et juger que Mme [RG] a accompli des heures supplémentaires au-delà du contingent annuel d'heures supplémentaires sans bénéficier de contrepartie obligatoire en repos
- En cas de reclassification MP3 : 1 462,89 €
- Subsidiairement, en cas de reclassification MP2: 1 318,81 €
- Très subsidiairement : en l'absence de reclassification MP2 : 1 229,51 €
- Sur le travail dissimulé
- Dire et juger que l'activité salariée de Mme [RG] a été dissimulée
- En cas de reclassification MP3 Subsidiairement, en cas de reclassification MP2 : 13 359,06 €
- Très subsidiairement : en l'absence de reclassification MP2 :12 039,54 €
- Dommages-intérêts pour harcèlement moral : 11 238,72 €
- Dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat :
2 000,00 €
- Sur la requalification de la rupture : 2 000,00 €
- Dire et juger que la rupture conventionnelle est nulle,
- Dire et juger que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse
- lndemnité de licenciement en considération d'une ancienneté de 4 ans, 3 mois et 8 jours du 26 mai 2014 au 18 septembre 2018 : 2 044,69 €
- Indemnité compensatrice de préavis : 3 814,98 €
- Congés payés afférents : 381,49 €
- Dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 8 000,00 €
- Subsidiairement, rappel sur l'indemnité de rupture conventionnelle : 84,29 €
- Remise d'un certificat de travail, d'une attestation Pôle Emploi et de bulletins de salaire rectifiés mois par mois, conformes au jugement à intervenir
- Dire et juger irrecevables les attestations produites par la société Serenet en pièce 8 ([H] [P]) et en pièce 18 ([K] [TV]), en ce qu'elles ne respectent pas les exigences de l'article 202 du code civil
- Article 700 du code de procédure civile : 3 000,00 €
- Exécution provisoire du jugement à intervenir
- Condamner la partie défenderesse aux dépens
Par jugement en date du 10 novembre 2021, le conseil de prud'hommes de Nantes a :
- Déclaré recevables les pièces 8 et 18 produites par la société Serenet,
- Dit et jugé que l'emploi occupé par Mme [RG] correspond bien à la classification prévue à son contrat de travail, à savoir en qualité de Chef d'Equipe classification CE2, et rejette sa demande de reclassification au statut agent de maitrise MP3 et subsidiairement MP2,
- Dit et jugé que Mme [RG] a bien réalisé des heures supplémentaires, que ses demandes à ce titre sont justifiées,
- Dit et jugé que la S.A. Serenet s'est rendue coupable de travail dissimulé,
- Dit et jugé que la rupture conventionnelle du contrat de travail de Mme [RG] est nulle et s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- Dit et jugé que le harcèlement moral n'est pas caractérisé,
- Dit et jugé que la S.A. Serenet a manqué à son obligation de sécurité et de résultat,
- Condamné en conséquence la S.A. Serenet à verser à Mme [RG] les sommes suivantes correspondant aux rappels de salaires et indemnités :
- 4.433,93 € brut au titre des heures supplémentaires pour l'année 2017
- 443,39 € brut au titre des congés payés afférents
- 526,12 € brut au titre des heures supplémentaires pour l'année 2018 de la semaine 1 à la semaine 7.outre -52,61 € brut au titre des congés payés afférents.
- 964,84 € brut au titre des heures supplémentaires pour l'année 2018 de la semaine 10 à la semaine 22 outre 96,48 € brut au titre des congés payés afférents.
- 1.229,15 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de contrepartie obligatoire pour dépassement du contingent d'heures supplémentaires sans bénéficier de contrepartie obligatoire en repos.
- 11.238,72 € brut au titre de l'indemnité forfaitaire pour l'infraction de travail dissimulé.
- 1.000 € brut pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat
- 84,29 € net au titre de l'indemnité de licenciement, déduction faite de 1.960,40 € en restitution des sommes perçues au titre de la rupture conventionnelle.
- 3.814,98 € brut au titre de l'indemnité de préavis outre 381,49 € Brut au titre des congés payés afférents
- 5.700 € brut au titre des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
- 1.250 € net au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- Fixé la moyenne des salaires de Mme [RG] à 1 426,49 € Net.
Lesdites sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter de la date de la saisine du Conseil pour les sommes à caractère salarial, et à compter de la date de la notification du jugement pour les autres sommes, les intérêts produisant eux-mêmes des intérêts conformément à l'article 1 154 du code civil.
- Ordonné la remise d'un certificat de travail, d'une attestation pôle Emploi et de bulletins de salaire rectifiés mois par mois conforme au jugement.
- Ordonné l'exécution provisoire du jugement pour les sommes où elle est de droit.
- Débouté la partie défenderesse de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- Débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires.
- Ordonné le remboursement par la S.A. Serenet à Pôle Emploi les indemnités injustement versées à hauteur de 2 Mois.
- Condamné la S.A. Serenet à l'intégra1ité des dépens.
La société Serenet a interjeté appel le 15 décembre 2021.
Selon ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 23 août 2022, la société Serenet appelante sollicite :
- Réformer partiellement le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Nantes, le 10 novembre 2021
A titre principal
Sur les demandes de classification
- Confirmer le jugement rendu en ce qu'il a jugé que Mme [RG] n'apportait pas la preuve d'une classification MP2 ou MP3
En conséquence
- Débouter Mme [RG] de ses demandes de rappels de salaire et des congés payés y afférent au titre d'une reclassification en MP3 et à titre subsidiaire en MP2.
Sur les heures supplémentaires (et le travail dissimulé)
- Réformer le jugement rendu en ce qu'il a jugé que Mme [RG] réalisait des heures supplémentaires et a condamné la société Serenet au paiement des sommes suivantes :
- 4.433,93 € brut au titre des heures supplémentaires pour l'année 2017, outre 443,39 € brut au titre des congés payés afférents
- 526,12 € brut au titre des heures supplémentaires pour l'année 2018 de la semaine 1 à la semaine 7, outre 52,61 € brut au titre des congés payés afférents,
- 964,84 € brut au titre des heures supplémentaires pour l'année 2018 de la semaine 10 à la semaine 22, outre 96,48 € brut au titre des congés payés afférents,
- 1.229,15 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de contrepartie obligatoire
- Réformer le jugement rendu en ce que le conseil de prud'hommes de Nantes a dit et jugé que la S.A.S. Serenet s'est rendue coupable de travail dissimulé,
- Juger que Mme [RG] n'a pas réalisé d'heures supplémentaires.
- Juger que la société Serenet ne s'est pas rendue coupable de travail dissimulé.
Par Conséquent :
- Débouter Mme [RG] de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires prétendument réalisées et des congés payés y afférents ;
- Débouter Mme [RG] de sa demande indemnitaire au titre du repos compensateur légal ;
- Débouter Mme [RG] de sa demande indemnitaire au titre d'une dissimulation intentionnelle d'activité ;
Sur l'obligation de sécurité
- Réformer le jugement rendu en ce qu'il a jugé que la société Serenet avait manqué à son obligation de sécurité et l'a condamné au paiement de la somme de 2000,00 €.
- Débouter Mme [RG] de sa demande indemnitaire ;
Sur le harcèlement moral
- Confirmer le jugement rendu en ce qu'il a jugé que Mme [RG] n'apportait pas la preuve d'un harcèlement moral
- Débouter Mme [RG] de sa demande indemnitaire ;
Sur la nullité de la rupture conventionnelle
- Réformer le jugement rendu en ce qu'il a jugé que la rupture conventionnelle nulle.
Par Conséquent :
- Débouter Mme [RG] de sa demande de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
A titre subsidiaire
- Réduire le montant des rappels de salaires alloués au titre des supposées heures supplémentaires ;
- Confirmer la restitution par Mme [RG] de l'indemnité de rupture conventionnelle ;
- Débouter Mme [RG] de sa demande de rappel d'indemnité de licenciement.
- Réduire le montant des dommages-intérêts alloués au titre de supposé harcèlement moral, au titre du manquement à l'obligation de sécurité ainsi que des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En tout état de cause ;
- Réformer le jugement rendu en ce qu'il a alloué à Mme [RG] une indemnité de 1.250,00 € nets en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner Mme [RG] à verser à la société Serenet une indemnité de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Selon ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 22 novembre 2022, l'intimée et appelante à titre incident Mme [RG] sollicite :
- Débouter la société Serenet de toutes demandes fins et conclusions,
Sur la reclassification et le rappel correspondant
- Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [RG] de sa demande de reclassification et de rappel de salaire correspondant,
Et statuant à nouveau,
- Dire que l'emploi occupé par Mme [RG] correspondait à la classification MP3 selon la convention collective applicable propreté, statut agent de maîtrise,
- Condamner la SAS Serenet à lui payer 6 876,17€ à titre de rappel de salaire par rapport au minima conventionnel applicable, outre incidence congés payée pour 687,61€.
Subsidiairement,
- Dire que l'emploi occupé par Mme [RG] correspondait à la classification MP2 selon la convention collective applicable propreté, statut agent de maîtrise,
- Condamner la SAS Serenet à lui payer 2635,96 € à titre de rappel de salaire par rapport au minima conventionnel applicable, outre incidence congés payée pour 263,59 €.
Sur le rappel d'heures supplémentaires
- Confirmer le jugement en ce qu'il a dit que Mme [RG] a accompli des heures supplémentaires dont elle n'a pas été payée
- Réformer le jugement quant au quantum du rappel alloué au titre des heures supplémentaires réalisées,
Et statuant à nouveau,
- Condamner la SAS Serenet à lui payer :
Au titre de l'année 2017 :
En cas de reclassification MP3, 5277,11€ outre incidence congés payés pour 527,71 €
Subsidiairement, en cas de reclassification MP2, 4757,39 € outre incidence congés payés pour 475,73€
Très subsidiairement, en l'absence de classification MP2, 4433,93 € outre incidence congés payés pour 443,39 €
Au titre de l'année 2018 :
De la semaine 1 à la semaine 7 :
En cas de reclassification MP3, 626,17 € outre incidence congés payés pour 62,62 €
Subsidiairement, en cas de reclassification MP2, 564.50 € outre incidence congés payés pour 56,45 €
Très subsidiairement, en l'absence de classification MP2, 526.12€ outre incidence congés payés pour 52,61 €
De la semaine 10 à la semaine 22 :
En cas de reclassification MP3, 1146,88 € outre incidence congés payés pour 114,68 €
Subsidiairement, en cas de reclassification MP2 : 1033.59 € outre incidence congés payés pour 103.35 €
Très subsidiairement, en l'absence de classification MP2 : 964.84 € outre incidence congés payés pour 96.48 €
Sur l'indemnité compensatrice de contrepartie obligatoire en repos pour dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires
- Confirmer le jugement en ce qu'il a dit que Mme [RG] a accompli des heures supplémentaires au-delà du contingent annuel d'heures supplémentaires sans bénéficier de contrepartie obligatoire en repos,
- Réformer le jugement quant au quantum du rappel alloué au titre de l'indemnité de contrepartie obligatoire en repos pour dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires,
Et statuant à nouveau
- Condamner la SAS Serenet à lui payer :
- en cas de reclassification MP3 : 1462,89 €
- Subsidiairement, en cas de reclassification MP2 : 1318,81 €
- Très subsidiairement, en l'absence de classification MP2 : 1229,15 €
Sur le travail dissimulé
- Confirmer le jugement en ce qu'il a dit que l'activité salariée de Mme [RG] a été dissimulée,
- Réformer le jugement quant au quantum de l'indemnité allouée au titre du travail dissimulé,
Et statuant à nouveau
- Condamner la SAS Serenet à lui payer la somme de :
- 13 359,06 € en cas de reclassification MP3
- Subsidiairement, 12 039,54 € en cas de reclassification MP2,
- Très subsidiairement 11 238,72 € en l'absence de reclassification.
Sur le harcèlement moral
- Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [RG] de sa demande de condamnation au titre du harcèlement moral,
Et statuant à nouveau,
- Dire que Mme [RG] a subi des agissements de harcèlement moral,
- Condamner la SAS Serenet à lui payer 2000 € à titre de dommages et intérêts,
Sur le manquement à l'obligation de sécurité de résultat
- Confirmer le jugement en ce qu'il a dit que la société Serenet a manqué à son obligation de sécurité de résultat,
- Réformer le jugement quant au quantum de l'indemnité allouée pour manquement à l'obligation de sécurité,
Et statuant à nouveau
- Condamner la SAS Serenet à payer 2000 € à titre de dommages et intérêts,
Sur la requalification de la rupture,
- Confirmer le jugement en ce qu'il a dit que la rupture conventionnelle est nulle, et que la rupture du contrat de travail de Mme [RG] s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- Réformer le jugement quant au montant des sommes allouées au titre de l'indemnité de licenciement, du préavis, des dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Et statuant à nouveau
- Condamner la SAS Serenet à lui payer :
- 2044.69 € à titre d'indemnité de licenciement en considération d'une ancienneté de 4 ans, 3 mois et 8 jours du 26.05.2014 au 18.09.2018
- 3814.98 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre incidence congés payés pour 381.49 €,
- 8000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Subsidiairement, Condamner la SAS Serenet à payer 84.29 € à Mme [RG] à titre de rappel sur indemnité de rupture conventionnelle
Sur la remise des documents de fin de contrat
- Condamner la SAS Serenet à remettre à Mme [RG] un certificat de travail, une attestation Pole emploi et des bulletins de salariés rectifiés mois par mois, conformes au jugement à intervenir.
Sur l'irrecevabilité des attestations produites par la société SERENET
- Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [RG] de sa demande de voire dire irrecevables les attestations produites par la société Serenet en pièce 8 ([H] [P]) et en pièce 18 ([K] [TV]), en ce qu'elles ne respectent pas les exigences de l'articles 202 du code civil,
Et statuant à nouveau,
- Dire que les pièces Serenet 8 et 18 sont irrecevables,
- Condamner la SAS Serenet à payer 2000 € au titre des frais irrépétibles de première instance ainsi que 3000 € au titre des frais irrépétibles d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens.
- Condamner la SAS Serenet aux entiers frais de recouvrement,
- Débouter tout contestant de toutes demandes fins et conclusions,
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 05 juin 2025.
Par application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties à leurs dernières conclusions sus-visées.
MOTIFS DE LA DECISION
- sur la recevabilité des pièces communiquées par l'employeur (attestations) :
Mme [RG] demande à la cour d'infirmer le jugement rendu 'en ce qu'il a débouté Mme [RG] de sa demande de voire dire irrecevables les attestations produites par la société Serenet en pièce 8 et en pièce 18 en ce qu'elles ne respectent pas les exigences de l'article 202 du code de procédure civile'.
Il s'agit en l'occurrence des attestations de M. [E] [T], responsable d'exploitation de la société Serenet (pièce 8 de l'employeur) et de [TV] [K], ancienne salariée de la société Serenet (pièce 18 de l'employeur).
Toutefois Mme [RG] n'explicite plus sa demande d'irrecevabilité dans ses écritures devant la cour, si ce n'est que les attestations qu'elle conteste ne respectent pas les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile, lesquelles ne sont pas prescrites à peine de nullité.
En tout état de cause, le non respect textuel des dispositions de l'article 202 du code de procédure civile ne suffit pas à écarter des débats les attestations concernées dont la cour apprécie librement la valeur probante en considération de l'ensemble des autres éléments de preuve qui sont produits par les parties au soutien de leurs demandes, lesquels sont discutés contradictoirement.
Le jugement entrepris sera ainsi confirmé de ce chef.
- sur la demande de reclassification conventionnelle
La qualification d'un salarié se détermine relativement aux fonctions réellement exercées par celui-ci, qu'il appartient aux juges du fond de rechercher au regard de la grille de classification fixée par la convention collective.
La charge de la preuve pèse sur le salarié qui revendique une autre classification, à savoir qu'il appartient au salarié qui se prévaut d'une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail, de démontrer qu'il assure effectivement de façon habituelle, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique
Les fonctions réellement exercées, qui sont prises en compte pour déterminer la qualification d'un salarié, sont celles qui correspondent à son activité principale, et non celles qui sont exercées à titre accessoire ou occasionnel.
L'appréciation de la réalité des fonctions exercées ressort du pouvoir souverain des juges du fond.
En l'espèce, aux termes de l'avenant conclu le 21 septembre 2015, Mme [RG] était chef d'équipe classification CE2 (chef d'équipe échelon 2) en application de la convention collective des entreprises de propreté.
Les bulletins de salaire versés aux débats mentionnent également ce coefficient.
Selon la grille de classification versée aux débats, le chef d'équipe échelon 2 répond aux critères suivants :
- autonomie : 'il peut prendre des initiatives afin de résoudre les problèmes et rechercher les solutions'
- technicité : 'il peut participer aux travaux, connait et applique les méthodes de travail et procédés spécifiques propres à ses activités'
- responsabilité : 'il gère et adapte les moyens mis à sa disposition'
Mme [RG] sollicite sa reclassification dans les fonctions d'agent de maîtrise coefficient MP3 ou à défaut au coefficient MP2 et les rappels de salaire qui en découlent.
Au soutien de sa demande de reclassification, Mme [RG] soutient que ses fonctions relevaient d'une classification MP en affirmant :
- concernant le critère d'autonomie et d'initiative : elle participait à l'élaboration des programmes d'exécution et proposait des moyens à mettre en oeuvre pour réaliser le cahier des charges (MP1), elle prenait des initiatives pour modifier ces derniers et ajuster les programmes d'exécution (MP2), elle assurait les relations commerciales quant aux interventions réalisées, apportant une compétence technique et conseillant les clients pour définir leurs besoins et programmes d'exécution (MP3).
- concernant le critère de technicité, elle organisait et animait des rencontres avec les clients, elle savait comprendre des études complexes et diversifiées, elle possédait une expérience suffisante pour assurer la gestion des travaux et des interventions et elle recherchait les solutions compatibles pour que les travaux soient conformes aux objectifs définis ; elle contrôlait le budget.
- concernant le critère de responsabilité : elle organisait et contrôlait les travaux d'exécution sur plusieurs sites en assurant le respect des consignes de sécurité, elle veillait à l'efficacité des travaux et encadrait des équipes pour les opérations techniques, elle contrôlait le respect des objectifs.
Elle soutient également avoir recruté et embauché des remplaçants et collaborateurs qu'elle formait, et qu'elle était chef de site, encadrant les équipes et vérifiant le travail accompli.
Selon l'employeur, les missions réalisées par Mme [RG] relèvent bien toutes d'un chef d'équipe CE2 : coordonner une équipe d'agents de service et veiller à la bonne exécution des travaux (respect de la discipline et des consignes d'hygiène et de sécurité), animation d'une équipe, résolution des problèmes de clientèle et recherche de solutions, gestion et adaptation des moyens. Il indique que l'organisation des remplacements sur site, notamment en recrutant des salariés, n'est en revanche étayée par aucune pièce de la salariée.
La société Serenet considère que Mme [RG] animait une équipe de salariés classés AS1 à AS3 et qu'elle veillait à ce que ces derniers effectuent correctement leurs missions dans le respect de la discipline et des consignes d'hygiène et de sécurité.
La société considère qu'il n'y a pas lieu d'appliquer le coefficient MP2 dans la mesure où l'intimée n'apportait aucune modification, ni mesures ni actions préventives correctrices des programmes d'exécution ; qu'elle n'organisait et n'animait aucune réunion clients, ayant toujours été accompagnée de son supérieur, M. [P], ajoutant qu'une autre salariée, Mme [S] exerçait les fonctions de MP2 sur le même poste et le même secteur.
La société appelante considère également que les critères relatifs au coefficient MP3 sont cumulatifs et que l'intimée n'assurait pas les relations commerciales et n'effectuait pas de devis ni ne conseillait les clients ou les services concernés pour définir les besoins et les programmes d'exécution, dont la mission incombait à M. [P].
La classification 'agent de maîtrise' sollicitée par Mme [RG] nécessite un certain niveau d'autonomie (se conformer aux directives et prendre des décisions déléguées) ainsi que de technicité (exercer des fonctions techniques commerciales et/ou d'encadrement) et de responsabilité (organiser le travail, choisir les moyens et les matériels à utiliser ainsi que les coûts)
- Concernant le niveau MP2, la grille de classification prévoit les critières suivants :
- autonomie/initiative : 'il peut prendre des initiatives pour apporter des modifications ponctuelles ou des mesures ou actions préventives correctrices des programmes d'exécution, participe aux études',
- technicité : 'il organise et anime des rencontres client ',
- responsabilité : 'il fait respecter les objectifs pour atteindre les résultats et les normes qualitatives et quantitatives'.
- Concernant le niveau MP3, la grille de classification prévoit les critières suivants :
- autonomie/initiative : 'assure les relations commerciales avec le client quant aux interventions réalisées et/ou peut apporter une assistance technique et conseiller soit les clients soit les services concernés pour définir les besoins et les programmes d'exécution'
- technicité : ' sait comprendre des études complexes et diversifiées. Possède les connaissances et l'expérience pour assurer la gestion des travaux et interventions et/ou sait rechercher les solutions compatibles entre elles pour que les travaux soient conformes aux objectifs définis et aux résultats attendus'
- responsabilité : 'assure et veille à l'efficacité des travaux et moyens mis en place et/ou peut encadrer des équipes en cas d'opérations mettant en oeuvre des techniques particulières ou lors d'interventions spécifiques . Met en place les moyens de contrôle de qualité adaptés'
Les critères pour un échelon donné sont cumulatifs entre eux ainsi qu'avec les critères correspondants aux emplois de niveaux et échelons inférieurs.
Le modèle de fiche de poste type 'responsable de secteur' (agent de maîtrise MP3) est versé aux débats par l'employeur, faisant état de tâches d'encadrement de l'équipe (animation de l'équipe, contrôle des prestations, application des règles d'hygiène et de sécurité, formation du personnel), de gestion du chantier (organisation des chantiers, suivi de la rentabilité), des relations commerciales (vérification de la facturation, rédaction du cahier des charges et des devis, rédaction de certains documents) et de gestion administrative/RH (participation au recrutement des agents et déclarations d'embauche, contrats de travail, plannings, lien avec le service RH).
Afin d'établir la réalité des fonctions exercées, Mme [RG] verse aux débats les attestations de plusieurs clients de la société Serenet ainsi que des salariés agents de service nettoyage qui faisaient partie de son équipe, dont il résulte qu'elle était l'interlocutrice directe des clients, qu'elle supervisait les tâches réalisées par les salariés agents de service et réalisait le suivi et les visites de contrôle des prestations de nettoyage (en lien avec le cahier des charges), gérant également l'équipe des salariés dont elle avait la charge (présentation et formation des nouveaux intervenants, remplacements de salariés absents). (pièces 8-2-1 à 8-2-5 et pièce 43).
S'il résulte de ces attestations - rédigées le plus souvent en termes généraux - que Mme [RG] s'acquittait en autonomie des taches et des missions qui lui étaient dévolues en sa qualité de chef d'équipe, ces taches relèvent pour la plupart d'une mission de vérification et de contrôle de la bonne exécution des travaux des salariés que Mme [RG] supervisait.
C'est notamment le cas lorsque Mme [W] [B] (responsable administrative de la société [B] technology, cliente de la société Serenet) atteste de ce que Mme [RG] a pris certaines initiatives concernant le nettoyage du sol, qui relève de l'exécution de la prestation de nettoyage.
Le fait que Mme [RG] soit par ailleurs en contact direct avec la clientèle quant à la qualité des prestations ou aux adaptations nécessaires de celles-ci ne permet pas pour autant de considérer que Mme [RG] était en charge des relations commerciales, les quelques échanges de mail versés aux débats par la salariée (pièces 30 et 31) étant trop peu nombreux pour rapporter cette preuve, d'autant plus que le mail du 13 décembre 2017 a été initialement adressé par le client à M.[Y] [GD], qui a procédé au 'suivi' de ce mail à Mme [RG], et que le mail du 21 novembre 2018 a été adressé au 'secrétariat' de la société Sérenet.
L'intimée verse aux débats des fiches intitulées 'contrôle qualité' portant son nom ('controle réalisé par Mme [RG] [R]') en date du 9 février 2018 et du 9 mars 2018 pour deux clients différents, ainsi qu'un échange de mails relativement à une prestation relative à un 'contrôle qualité' sur site (pièce 19 de la salariée), lesquels ne suffisent toutefois pas à établir que Mme [RG] était en charge de manière habituelle et récurrente d'un 'contrôle qualité' permettant de répondre aux critères de technicité et de responsabilité du niveau MP3 au sens de la convention collective.
De même, les mails adressés par Mme [RG] à M. [G] en juin 2017, novembre 2017 puis mars 2018 sont relatifs à des propositions de dates d'intervention des équipes de nettoyage pour procéder à diverses prestations dans les locaux sans qu'il puisse en être déduit que la salariée assurait à ce titre une relation commerciale complète avec ce client.
La pièce 50 versée aux débats par l'employeur intitulée 'compte rendu de poste de chef d'équipe de Mme [RG]' consistant dans une fiche dactylographiée et non signée mentionnant plusieurs 'réclamations' de la part des clients n'apporte pas d'éléments spécifiques réellement probants sur la nature et la réalité des taches réalisées par Mme [RG].
Mme [RG] ne verse enfin aux débats aucune pièce permettant d'établir qu'elle était mandatée pour l'embauche des salariés et contrairement à ce qu'elle indique, le courrier du 24 juillet 2018 (compte-rendu de l'entretien de mise au point) n'évoque pas de telles fonctions mais uniquement le fait de devoir procéder au remplacement des agents absents.
L'attestation de M. [MB] (pièce 8-1-5) selon lequel 'Mme [RG] m'a embauché elle s'est occupée de mon recrutement' (...) 'Pour tous les départs en vacances elle validait mes congés', n'est ainsi corroborée par aucun élément objectif autre que ses déclarations.
Ainsi, après examen des pièces versées aux débats par les parties, la cour constate, à l'instar du conseil de prud'hommes, que s'il résulte des diverses attestations que Mme [RG] réalisait certaines tâches excédant son niveau de qualification, prenant des initiatives en lien avec l'exécution des prestations et la gestion des sites clients de la société Serenet (elle était en effet l'interlocuteur 'terrain' de la société Serenet), elle ne rapporte pas la preuve de ce qu'il s'agissait de ses missions habituelles qu'elle exerçait à titre principal et non de façon seulement occasionnelle.
En outre, si elle était en lien avec les clients pour l'organisation et la mise en place des prestations, ainsi que le contrôle de celles-ci, Mme [RG] n'établit pas le fait d''organiser et animer des rencontres client', de même qu'elle n'établit pas qu'elle était en charge de définir en amont les besoins des clients quant aux prestations devant être réalisées (dont elle contrôlait toutefois la bonne exécution).
En conséquence de ces éléments, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes formées au titre de la reclassification.
- sur le rappel d'heures supplémentaires :
Mme [RG] soutient avoir accompli des heures supplémentaires au delà de la durée légale de travail de 35 heures en raison de sa charge de travail conséquente dès lors qu'elle supervisait 130 sites de manière autonome.
Elle soutient avoir toujours refusé de signer le reçu pour solde de tout compte et avoir sollicité à plusieurs reprises le paiement des heures supplémentaires auprès de M. [C], dirigeant de la société, lequel refusait de la rémunérer au titre des temps de déplacement entre chaque chantier en cours de la journée.
Afin de s'opposer au paiement des heures supplémentaires sollicitées, l'employeur indique que la salariée n'a jamais rempli les relevés d'heures mis à sa disposition ; qu'elle n'a jamais alerté quant à la réalisation d'heures de dépassement de la durée de travail en cours de contrat et au moment de l'établissement de son solde de tout compte.
L'article L.3121-28 du code du travail précise que toute heure accomplie au delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent.
En application de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
Il n'est pas contesté que Mme [RG] était soumise à la durée légale de travail soit 35 heures hebdomadaires ou 151,67 heures par mois, comme cela résulte des dispositions figurant au sein des contrats de travail successivement conclus.
En l'espèce, à l'appui de sa demande, Mme [RG] produit :
- une copie de ses agendas pour les années 2017 et 2018 ainsi qu'un document récapitulatif établi par ses soins mentionnant le nombre d'heures de travail effectuées chaque semaine dont il résulte qu'elle a accompli 290,75 heures supplémentaires en 2017 et 97 heures en 2018.
- deux attestations de Mme [N] [S] du 29 septembre 2020 indiquant avoir 'repris le portefeuille' clients de Mme [RG] hormis quelques clients ([Localité 8] Metropole et la ville de Cordenais). Elle précise dans la première attestation que même en ayant une charge moins importante de travail il était difficile de gérer ce portefeuille compte tenu de la dispersion géographique et de la taille des sites, et dans la seconde attestation elle indique ne pas avoir été réglée des heures supplémentaires réalisées (de même que certains agents), en précisant que M. [T] sous-estimait le nombre d'heures de travail nécessaire et que M. [C] ne comptabilisait pas les temps de trajet entre les chantiers.
- des attestations d'autres salariés polyvalents faisant état d'un non paiement de leurs heures supplémentaires (pièces 40, 41 et 42).
- un mail de M. [WI] [C] du 11 avril 2016 mentionnant plusieurs dépassements d'heure par les salariés de la société et le fait de devoir 'trouver des solutions'.
La salariée présente ainsi des éléments suffisamment précis quant aux heures supplémentaires qu'elle dit avoir réalisées, permettant à l'employeur, qui assure le contrôle des heures effectuées, d'y répondre utilement.
Si l'employeur conteste le décompte produit par la salariée, et le nombre d'heures supplémentaires qu'elle dit avoir réalisées, il ne fournit aucune pièce de nature à justifier les horaires qui auraient réellement été suivis par Mme [RG] et ne produit aucun document de contrôle relatif au décompte de la durée de travail.
Ainsi, il est sans conséquence que Mme [RG] n'ait pas sollicité le paiement de ses heures supplémentaires pendant la durée de la relation contractuelle dès lors qu'il ne s'agit pas d'une condition préalable au paiement des heures supplémentaires, sachant en outre qu'elle n'a pas signé son solde de tout compte.
Quelle que soit l'obligation de production par l'employeur des décomptes d'heures de travail, la société Serenet ne peut s'exonérer de la rémunération des heures de travail effectuées au motif que Mme [RG] n'a pas rempli les 'relevés d'heure' fournis par la société, alors même qu'il lui appartient de procéder au contrôle des heures réalisées par les salariés qu'elle emploie, et qu'elle ne transmet aucun élément à ce titre.
Les attestations de salariés versés aux débats par la société Serenet, attestant de ce que l'employeur payait les heures supplémentaires (ainsi que les temps de déplacement entre les chantiers) ne permettent pas de justifier de la réalité des heures de travail accomplies par Mme [RG] et du paiement de ses heures supplémentaires, alors que les bulletins de salaire versés aux débats par la salariée ne mentionnent aucun paiement au titre des heures supplémentaires.
L'employeur conteste également la valeur probante des agendas personnels de l'intimée qui n'ont jamais été portés à sa connaissance, en ce qu'ils sont pour une partie illisible entraînant l'impossibilité de connaître si les inscriptions correspondent à des rendez-vous professionnels ou personnels, qui sont annotés de nombreux rendez-vous personnels qui n'ont pas été décomptés des heures réalisées (de même que les temps de pause), et qui ne sont enfin corroborés par aucun élément matériel (mails, attestations, courriers etc), mais il ne produit pour autant pas d'autres éléments permettant de vérifier la réalité des heures de travail réalisées par Mme [RG].
Enfin, c'est à bon droit que Mme [RG] indique que le temps de trajet entre deux sites de travail est considéré comme du temps de travail effectif, dès lors que l'employeur ne démontre pas qu'elle ne se tenait pas à sa disposition en se conformant à ses directives, et qu'elle pouvait ainsi vaquer à des occupations personnelles.
En conséquence de l'ensemble de ces éléments, la cour a la conviction que Mme [RG] a effectué des heures supplémentaires pour la période sollicitée (2017-2018), et retient, au regard des pièces communiquées, un quantum total de 387,75 heures supplémentaires, correspondant, conformément aux calculs réalisés par la salariée dans ses écritures, avec application d'une majoration de 25%, aux rappels de salaire suivants :
- 4 433,93 euros outre 443,39 euros de congés payés afférents au titre de l'année 2017
- 1 490,96 euros outre 149,09 euros de congés payés afférents au titre de l'année 2018
Soit la somme totale de 5 924,89 euros bruts outre 592,48 euros de congés payés afférents.
Le jugement déféré sera ainsi confirmé de ce chef.
- sur la contrepartie obligatoire en repos
Madame [RG] soutient qu'elle a droit à une indemnité compensatrice au titre du repos compensateur pour toutes les heures réalisées au delà du contingent annuel, soit 100, 75 heures en 2017.
La société Serenet s'y oppose en sollicitant l'infirmation du jugement.
Selon l'article L. 3121-30 du code du travail, 'Des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d'un contingent annuel. Les heures effectuées au delà de ce contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos.
Les heures prises en compte pour le calcul du contingent annuel d'heures supplémentaires sont celles accomplies au delà de la durée légale.
Les heures supplémentaires ouvrant droit au repos compensateur équivalent mentionné à l'article L. 3121-28 et celles accomplies dans les cas de travaux urgents énumérés à l'article L. 3132-4 ne s'imputent pas sur le contingent annuel d'heures supplémentaires.'
L'article L3121-33 du même code précise que 'I.-Une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche :
1° Prévoit le ou les taux de majoration des heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale ou de la durée considérée comme équivalente. Ce taux ne peut être inférieur à 10 % ;
2° Définit le contingent annuel prévu à l'article L. 3121-30 ;
3° Fixe l'ensemble des conditions d'accomplissement d'heures supplémentaires au-delà du contingent annuel ainsi que la durée, les caractéristiques et les conditions de prise de la contrepartie obligatoire sous forme de repos prévue au même article L. 3121-30. Cette contrepartie obligatoire ne peut être inférieure à 50 % des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel mentionné audit article L. 3121-30 pour les entreprises de vingt salariés au plus, et à 100 % de ces mêmes heures pour les entreprises de plus de vingt salariés.
Les heures supplémentaires sont accomplies, dans la limite du contingent annuel applicable dans l'entreprise, après information du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s'ils existent.
Les heures supplémentaires sont accomplies, au-delà du contingent annuel applicable dans l'entreprise, après avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s'ils existent.
II.-Une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut également :
1° Prévoir qu'une contrepartie sous forme de repos est accordée au titre des heures supplémentaires accomplies dans la limite du contingent ;
2° Prévoir le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires, ainsi que des majorations, par un repos compensateur équivalent.
III.-Une convention ou un accord d'entreprise peut adapter les conditions et les modalités d'attribution et de prise du repos compensateur de remplacement.'
En vertu de l'article L.3121-38 du code du travail, 'à défaut d'accord, la contrepartie obligatoire sous forme de repos mentionnée à l'article L. 3121-30 est fixée à 50 % des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel mentionné au même article L. 3121-30 pour les entreprises de vingt salariés au plus, et à 100 % de ces mêmes heures pour les entreprises de plus de vingt salariés.'
Le salarié, qui n'a pas été en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos compensateur, a droit à l'indemnisation du préjudice subi, laquelle comporte à la fois le montant de l'indemnité de repos compensateur et le montant de l'indemnité de congés payés afférents.
L'article D. 3121-14-1 devenu l'article D. 3121-24 fixe le contingent annuel à 220 heures.
L'article 4.7.2 de la convention collective applicable fixe le contingent annuel à 190 heures, seuil qui sera donc pris en considération.
En l'espèce Mme [RG] a effectué 100,75 heures supplémentaires au delà du contingent annuel en 2017, ce qui lui donnait droit au même nombre d'heures de contrepartie obligatoire en repos, la société Serenet employant plus de 20 salariés.
Ainsi, le préjudice subi de ce chef justifie que lui soit alloué, au titre de l'indemnité de repos compensateur, la somme de 1 352,06 euros nets qui comporte à la fois le montant de l'indemnité pour privation de repos compensateur et le montant de l'indemnité de congés payés afférents
Le jugement déféré sera donc infirmé en son quantum.
- sur le travail dissimulé
Selon l'article L. 8221-5 du code du travail,"Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales."
Selon l'article L. 8223-1, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
Mme [RG] considère que l'employeur était informé de la réalité de son temps de travail car elle lui remettait des rapports d'activité et d'intervention chez ses clients. Selon elle, connaissant également les adresses des différents chantiers, l'employeur connaissait le temps de déplacement nécessaire afin de s'y rendre.
L'employeur conteste toute intention de dissimulation laquelle n'est pas démontrée selon lui par Mme [RG].
Mme [RG] communique un mail rédigé par M. [C] le 11 avril 2016 adressé notamment à M. [E] [T] ainsi qu'à plusieurs responsables d'équipe dont Mme [RG], avec le 'service personnel' en copie (Pièce n°24) dans lequel il indique 'malgré le point fait en réunion d'exploitation on continu à faire faire au salarier des dépassement d'heure sur leur temps plein majoré à 25% lors du pointage des feuilles d'heure. Il faut trouver des solutions et passer les heures sur un membre de la famille ou autre ! Il y a toujours des solutions avant la validation des payes. Ce sont toujours les mêmes qui reviennent d'un mois sur l'autre. J'avais déjà interdit que des heures soient payées sans que je sois au courant (...)'
Dans son attestation du 1er octobre 2020, Mme [S], responsable de secteur, indique que l'employeur sous-estimait le nombre d'heures nécessaires pour réaliser les travaux de nettoyage sur un chantier, en précisant que 'pour certains salariés' le 'nombre d'heures supplémentaires n'étaient pas payés mais comptabilisés sur un 'compte heures' et reversés en prime', d'autres collaborateurs n'étant pas payés. Concernant le temps prévu pour les chantiers, Mme [S] indique que 'Mr [E] [P] arrachait les post-it afin qu'ils ne soient pas vus par les agents et notait sur le bon un nombre d'heures sous-estimé'. Elle ajoute 'Mr [C] disait tout fort et sans aucune retenue dans les bureaux d'exploitation que les temps de trajet entre les chantiers au cours de la journée de travail n'étaient pas payés du fait que les agents utilisaient les véhicules de l'entreprise alors que c'était du temps de travail'. (pièce 27 de la salariée)
De même, M. [SD], ancien salarié de la société Serenet atteste comme suit : 'en rendez vous avec M. [C] le mercredi 27/02/2019 à 17 heures dans son bureau de [Localité 8] (...) Celui-ci m'annonça qu'il était impossible à la société Sérenet de me régulariser les heures supplémentaires très importantes travaillées sous les ordres de Mme [LF] [I] ma responsable à cette époque. Monsieur [C] m'affirma que seul un 'faux contrat de travail' signé par ma femme pourrait me permettre d'être payé un minimum de ces heures travaillées par mes soins (...)', joignant à son attestation un contrat de travail à temps complet à durée déterminée établi le 1er mars 2019 entre la société Serenet et Mme [L] [SD] en qualité d'agent de service. Il précisait également avoir conclu avec la société Serenet un CDI de 9 heures par semaine alors qu'il travaillait 34 heures. (Pièce 45 de la salariée).
Madame [L] [X] épouse [SD] confirme les dires de son mari en indiquant 'il m'a été demandé par ce Monsieur (M. [C]) de signer un faux contrat de travail à mon nom pour permettre le paiement de ces heures que mon mari a effectués. J'ai été obligée de le signer sinon mon mari perdait environ 811 euros. N'ayant pas beaucoup d'argent pour vivre nous avons dû nous résoudre à le faire sous ce chantage'(attestation de Mme [SD], pièce 47 de la salariée).
La cour constate, à l'instar du conseil de prud'hommes, que ces éléments qui résultent tant du mail du 11 avril 2016 que des attestations rappelées ci-dessus manifestent le caractère intentionnel du non paiement des heures supplémentaires réalisées par certains salariés, l'employeur échouant notamment à justifier d'une raison objective à cette demande de 'passer les heures sur un membre de la famille ou autre'. Le fait que certains salariés étaient rémunérés des heures supplémentaires réalisées par eux ne suffit pas à démontrer l'absence de toute pratique frauduleuse.
La dissimulation des heures supplémentaires constituait un mode de gestion pour l'employeur afin de réduire ses coûts, ayant ainsi porté atteinte au droit de Mme [RG] au paiement majoré de ses heures supplémentaires.
En conséquence, en application de l'article L. 8223-1 du code du travail, et par confirmation du jugement déféré, la société Serenet est condamnée à payer à Mme [RG] la somme de 11 238, 72 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.
- sur le harcèlement moral :
Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
En application de l'article L. 1154-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, lorsque le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement, et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs, étrangers à tout harcèlement.
Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Mme [RG], qui sollicite l'infirmation du jugement à ce titre, prétend avoir été victime de faits de harcèlement moral aux motifs :
- qu'elle a subi des agressions d'une collègue, Mme [M], lui reprochant les difficultés physiques qu'elle rencontrait pendant l'exécution de ses fonctions, sans que l'employeur n'ait remédié à cette situation.
- que l'employeur a engagé un processus d'éviction à son égard suite au lancement d'une procédure de reconnaissance de statut de travailleur handicapé, en adressant successivement différents courriers recommandés lui imputant des griefs infondés notamment la perte du client Sterkelec pour ne pas avoir géré le remplacement d'un agent et le manque de disponibilité et de suivi du client Prej.
La société appelante conteste toute situation de harcèlement moral.
Mme [RG] verse aux débats le mail qu'elle a adressé à M. [C] le 25 mai 2018 dans lequel elle se plaint de 'l'état critique' dans lequel se trouve le service exploitation en indiquant que [J] [M] s'en est prise à elle sans raison et notamment la veille aux alentours de 16 heures : 'j'étais sur mon ordinateur en train de travailler, elle est arrivée furieuse car l'apprenti était en train de ranger trois cartons de 20 L et un carton de 12 L. Elle m'a crié dessus car ce n'était pas normal que l'apprenti range les cartons à ma place. Les témoins de cette scène sont [LF] [O] et [GZ] [D]. Cette demande avait été vu et validé par [E] [T] car je ne peux porter de charge lourde et actuellement demande de travailleur handicapé en cours (... ) je suis actuellement en attente d'opération pour fin juin malgré des douleurs chroniques et handicapantes 24h/24 due à une maladie et j'essaye d'ici là de faire mon travail correctement et dans de bonnes conditions' (...) 'Autre épisode marquant qui a été le 23 avril 2018, [J] s'en était pris à moi sans raison. [E] était là et témoin'.
Elle ajoutait 'à plusieurs reprises j'ai demandé à [E] [P] de réglé cette situation en vain. J'en appelle maintenant la direction pour qu'elle soit informé de cette situation qui n'est pas tenable. Cette situation ne peut plus continuer, on ne peut subir les sautes d'humeur de [J] [M] et un harcèlement moral ponctuel' en achevant par 'je vous prie de bien prendre en compte ma demande et que cette situation s'arrête car ce n'est pas vivable pour le bon fonctionnement du service exploitation'.
Elle établit ainsi avoir dénoncé auprès de son employeur le comportement agressif de sa collègue à son égard.
Mme [RG] justifie par ailleurs de sa demande de reconnaissance en qualité de travailleur handicapé transmise le 13 avril 2018 et de la décision de reconnaissance de cette qualité de travailleur handicapé pour la période du 28 octobre 2018 au 30 septembre 2020 selon courrier de la MDPH de Loire Atlantique du 26 octobre 2018.
Elle transmet en outre plusieurs courriers lui ayant été adressés par l'employeur:
- courrier du 12 juin 2018, alors qu'elle était en arrêt maladie et relatif à une 'mise au point' mentionnant, concernant l'arrêt maladie du 4 juin au 22 juin 2018 'il semblerait que votre arrêt maladie soit, à notre sens, prémédité', lui reprochant d'avoir quitté l'entreprise sans communiquer sur son état de santé et sa probable absence, et de ne pas avoir accepté de restituer les clés du véhicule de service.
Ce courrier faisait également état de sujets à discuter avec son responsable à son retour, dont les dégradations matérielles au sein des locaux du client BK Event.
- un courrier du 24 juillet 2018 intitulé 'compte-rendu de notre entretien de mise au point' faisant état de dysfonctionnements dans l'exercice de sa mission avant son arrêt de travail du 4 juin 2018, en lien avec des réclamations de clients, à savoir [Adresse 6] (contrôle qualité ayant mis en évidence des manquements ayant entraîné une pénalité), Demeco et déménagement Drouin (non respect du temps de travail défini par l'agent, qualité insuffisante des prestations, et absence de contrôle), Serkelec (non gestion du remplacement d'un agent démissionnaire), BK Event (manque de communication), hippodrome et complexe sportif (retards de livraison), Prej (demande du client non traitée, manque de communication, de disponibilité et d'écoute), résidence les [Localité 9] Blanches (manque de présence et d'accompagnement du nouvel agent, prestation non conforme). Ce courrier évoque également de manière plus générale une mauvaise gestion des remplacements et des livraisons non effectuées dans les délais.
Mme [RG] justifie enfin, selon l'attestation de son médecin traitant, de son arrêt de travail du 4 juin 2018 au 17 août 2018 pour 'épuisement physique et psychique' (pièce 13).
Pris dans leur ensemble, les faits ainsi établis et notamment les courriers adressés par l'employeur pendant l'arrêt maladie de la salariée, lui reprochant celui-ci ainsi que d'autres manquements, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral, et il incombe dès lors à l'employeur de démontrer que ses agissements sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral.
Concernant d'abord le mail adressé par Mme [RG] à M. [C] le 25 mai 2018 se plaignant des agissements de Mme [J] [M] à son encontre, l'employeur justifie en effet de ce que Mme [M], qui avait été recrutée le 15 mai 2017 comme inspecteur (agent de maîtrise) a démissionné de son poste par courrier du 23 juin 2018, de sorte qu'il n'a pas été possible de sanctionner cette dernière pour ces faits.
La société Serenet justifie également avoir adressé à Mme [M] le 23 mai 2018 un courrier faisant suite à un 'entretien de mise au point' reprochant à celle-ci, outre des dysfonctionnements dans l'exercice de sa mission, un 'comportement qui se doit d'être plus posé et moins agressif tant envers vos collègues qu'envers vos responsables', évoquant plusieurs altercations avec les collègues. L'employeur évoquait dans ce courrier une 'période d'observation sur les trois prochains mois à réception de ce courrier' afin de constater l'évolution attendue du comportement avant de prendre toute sanction 'qui pourrait aller jusqu'à la mise à pied disciplinaire'. (Pièce 32 de l'employeur)
Même si les faits dénoncés par Mme [RG] dans son mail du 25 mai 2018 qu'elle indique avoir subis la veille soit le 24 mai 2018 ne sont pas spécifiquement évoqués par la société Sérenet dans le courrier adressé à Mme [M] - dès lors qu'elle n'en avait pas encore connaissance à la date de ce courrier -, il s'en suit que l'employeur a pris des mesures à l'encontre de Mme [M] pour garantir l'absence de comportement 'harcelant'.
Concernant le 'processus d'éviction' de Mme [RG] suite à son arrêt maladie, par les deux courriers lui ayant été adressés le 12 juin 2018 et le 24 juillet 2018, l'employeur indique qu'il était en droit de lui faire part de remarques sur la qualité de son travail, y compris pendant son arrêt de travail, les griefs étant antérieurs à son arrêt de travail.
Toutefois, en l'espèce, l'employeur, qui ne verse aux débats aucune pièce permettant d'établir les griefs qu'il impute à Mme [RG] dans son courrier du 24 juillet 2018, ne justifie donc pas de la matérialité et de la réalité de ces derniers. Faute de ce faire, il n'apporte ainsi aucune justification objective à ce courrier de reproches ayant été adressé à la salariée alors qu'elle était en arrêt de travail.
Il en est de même du reproche mentionné dans le courrier du 12 juin 2018 concernant le 'caractère prémédité' de son arrêt de travail et le fait d'avoir quitté l'entreprise sans communiquer sur son état de santé et sa probable absence, et de ne pas avoir accepté de restituer les clés du véhicule de service.
Ainsi, à défaut pour l'employeur d'apporter une justification objective aux agissements identifiés qui soit étrangère à tout harcèlement moral, la cour a la conviction que Mme [RG] a subi une situation de harcèlement moral.
Le préjudice par elle subi de ce chef justifie que lui soit allouée la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts.
Le jugement sera infirmé de ces chefs.
- sur l'obligation de sécurité de l'employeur :
Selon l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent :
1°) des actions de prévention des risques professionnels ;
2°) des actions d'information et de formation ;
3°) la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.
L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.
L'article L. 4121-2 du même code, dans sa rédaction applicable à compter du 10 août 2016, prévoit que l'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :
1° Eviter les risques ;
2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;
3° Combattre les risques à la source ;
4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ;
5° Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ;
6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ;
7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1, ainsi que ceux liés aux agissements sexistes définis à l'article L. 1142-2-1 ;
8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ;
9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs.
Pour confirmation du jugement à ce titre, Mme [RG] soutient que la société Serenet n'a pas tenu compte des restrictions d'aptitude du médecin du travail dans son avis du 15 janvier 2018 ayant préconisé de ne pas réaliser des déplacements fréquents en voiture ni de station assise prolongée. Elle affirme avoir continué de réaliser tout au long de la journée, des déplacements en voiture entre les nombreux sites des clients et ne pas avoir bénéficié de siège ergonomique En outre, elle affirme avoir continué d'avoir porté des charges lourdes.
Pour infirmation du jugement rendu, la société Sérenet soutient ne pas avoir eu connaissance de la restriction médicale du médecin du travail en date du 15 janvier 2018 selon laquelle l'intimée ne pouvait effectuer des « déplacements fréquents en voiture en station assise prolongée », au regard de l'avis qui lui a été transmis par la médecine du travail, en date du même jour. Elle précise avoir mis à disposition de Mme [RG] un siège ergonomique. Elle ajoute que le certificat médical établi par le médecin traitant n'indique pas que l'épuisement physique et psychique de l'intimée était lié à son travail et enfin considère qu'il résulte du mail de l'intimée en date du 25 mai 2018 que la société avait mis en oeuvre les mesures spécifiques nécessaires compte-tenu de son état de santé.
Il résulte de l'attestation de suivi du médecin du travail réalisé à la suite de la visite médicale du 15 janvier 2018 (visite à la demande de la salariée) versée aux débats par la salariée (pièce 9) les préconisations suivantes (rédigées de manière manuscrite) : 'prévoir un poste sans port de charges de plus de 10 [7] sans déplacements fréquents en voiture ni station assise prolongée'.
L'employeur pour sa part verse aux débats l'attestation de suivi rédigée à la même date (15 janvier 2018) par le même médecin du travail dont les préconisations, dactylographiées, sont les suivantes : 'prévoir un poste en évitant le port de charges lourdes, la station debout prolongée et un siège ergonomique pour le travail administratif'. (pièce 14 de l'employeur)
Eu égard à ces éléments, la cour constate qu'il n'est pas établi que l'attestation du médecin du travail telle que remise à la salariée ait été portée à la connaissance de l'employeur.
Toutefois, comme l'a justement relevé le conseil de prud'hommes, eu égard à l'avis du médecin du travail communiqué par l'employeur préconisant plusieurs aménagements relativement au poste de travail de Mme [RG], il appartenait à celui-ci de réfléchir conjointement avec Mme [RG] et avec le médecin du travail - en interrogeant au besoin ce dernier - sur la nature et les modalités effectives et concrètes des aménagements de son poste de travail rendus nécessaires, notamment en ce qui concerne le port de charges lourdes.
Mme [RG] verse aux débats l'attestation de M. [V] [Z], 'directeur des opérations', lequel atteste avoir vu [R] [RG] 'à de nombreuses reprises' charger sa voiture Citroen C3 de produits (paquets d'essuie-main, papier toilette, bidons de produits...) en précisant qu'elle était 'remplie à bord' afin de livrer les clients. (Pièce 44).
Toutefois, cette attestation, rédigée de façon trop imprécise, ne permet pas de considérer que Mme [RG] était astreinte de porter des charges lourdes y compris postérieurement à l'avis établi par les médecin du travail le 15 janvier 2018, sachant qu'elle ne justifie pas avoir avisé son employeur de ses difficultés de santé antérieurement, et que sa première demande de reconnaissance du statut de travailleur handicapé date du 13 avril 2018 selon le courrier de la MDPH versé aux débats.
En outre dans son mail adressé à la société Serenet le 25 mai 2018, Mme [RG] indique, concernant le fait que l'apprenti range les cartons à sa place 'cette demande avait été vue en validée avec [E] [P] car je ne peux porter de charges lourdes', ce qui montre que l'employeur avait pris des mesures pour éviter à Mme [RG] de porter de charges lourdes.
Concernant le siège ergonomique, dont la remise est contestée par Mme [RG], la société Serenet verse aux débats :
- une 'étude de poste travail sur écran' émanant du service de santé au travail de la région nantaise dont il n'est toutefois pas justifié qu'il s'agisse du poste de travail de Mme [RG] dès lors en outre qu'elle est adressée à une entreprise dénommée CFHA (pièce 28)
- l'attestation de la société Arsilom indiquant avoir vendu à 'Mr [F] [WI] de la société SERENET des fauteuils STEELCASE modèle PLEASE 2 en décembre 2016 et septembre 2017", ajoutant que cet achat a été réalisé suite à la demande des salariés de l'entreprise et que le fauteuil 'Please 2" est adapté aux personnes passant beaucoup de temps derrière leur bureau ou souffrant de problèmes de dos. Cette attestation, faisant état d'achat de fauteuils en 2016 et 2017, soit avant l'avis émis par le médecin du travail, ne permet pas d'établir que Mme [RG] en ait bénéficié personnellement, de même que les factures afférentes à ces achats qui sont également versées aux débats par l'employeur (pièces 29 à 31)
Ainsi, en considération de ces éléments, la cour considère, à l'instar du conseil de prud'hommes, que l'employeur ne justifie pas avoir pris l'ensemble des mesures nécessaires et suffisantes afin de respecter les préconisations du médecin du travail, et de prévenir la dégradation de l'état de santé de la salariée laquelle a fait l'objet d'un arrêt de travail à compter du 4 juin 2018 soit moins de 5 mois après les recommandations du médecin du travail, et qui a été reconnue en qualité de travailleur handicapé selon décision de la MDPH du 26 octobre 2018 (suite à la demande déposée le 13 avril), la société ayant ainsi manqué de ce fait à son obligation de sécurité.
Le préjudice par elle subi en lien avec ce manquement de l'employeur affectant directement la santé de la salariée justifie que lui soit allouée la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts.
Le jugement sera infirmé de ce chef quant au quantum de l'indemnité allouée à la salariée à ce titre.
- sur la contestation de la rupture conventionnelle :
Mme [RG] soutient avoir été contrainte de consentir à une rupture conventionnelle dans un contexte de harcèlement moral, de surcharge de travail, de persistance fautive de l'employeur à ne pas respecter les préconisations médicales, d'usage abusif du pouvoir disciplinaire alors qu'elle était en arrêt de travail. Elle indique que l'entretien du 20 juillet 2020 ne consistait pas en un entretien préalable à une rupture conventionnelle mais à un entretien de recadrage.
La société soutient que l'intimée est à l'initiative de cette rupture ; qu'elle n'a jamais contesté l'avertissement notifié ; qu'elle a émis à plusieurs reprises le souhait d'endosser plus de responsabilités ; qu'elle ne précise pas quelle a été sa situation professionnelle postérieurement à sa rupture.
Concernant les entretiens, la société soutient qu'un premier échange a eu lieu le 20 juillet 2019 à l'occasion d'un entretien de recadrage, ce qui en soit ne vicie pas la procédure de rupture conventionnelle ; qu'après avoir échangé sur le principe, les parties ont fixé un entretien de signature le 9 août 2018, laissant à l'intimée le temps de se renseigner auprès des services de l'inspection du travail et de signer la rupture conventionnelle en connaissance de cause ; qu'elle a remis l'exemplaire de la rupture conventionnelle à la salariée au jour de la signature.
En application de l'article L. 1237-11 du code du travail, "l'employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat qui les lie", et "la rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties"
En outre, selon l'article L. 1237-12 du code du travail "Les parties au contrat conviennent du principe d'une rupture conventionnelle lors d'un ou plusieurs entretiens au cours desquels le salarié peut se faire assister (...)"
L'article L. 1237-13 à sa suite précise que : "La convention de rupture définit les conditions de celle-ci, notamment le montant de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle qui ne peut pas être inférieur à celui de l'indemnité prévue à l'article L.1234-9.
Elle fixe la date de rupture du contrat de travail, qui ne peut intervenir avant le lendemain du jour de l'homologation.
A compter de la date de sa signature par les deux parties, chacune d'entre elles dispose d'un délai de quinze jours calendaires pour exercer son droit de rétractation. Ce droit est exercé sous la forme d'une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l 'autre partie."
En vertu de l'article L. 1237-14 du même code, il est précisé que : "A l'issue du délai de rétractation, la partie la plus diligente adresse une demande d'homologation à l'autorité administrative, avec un exemplaire de la convention de rupture. Un arrêté du ministre chargé du travail fixe le modèle de cette demande.
L'autorité administrative dispose d'un délai d'instruction de quinze jours ouvrables, à compter de la réception de la demande, pour s'assurer du respect des conditions prévues à la présente section et de la liberté de consentement des parties. A défaut de notification dans ce délai, l'homologation est réputée acquise et l'autorité administrative est dessaisie."(...)
La convention de rupture conventionnelle, résultant d'une volonté commune des parties de rompre le contrat de travail, est nécessairement le fruit d'une concertation entre l'employeur et le salarié et suppose une discussion préalable.
Il est admis, au visa des articles L. 1237-12 du code du travail et 1315, devenu 1353, du code civil, que cette discussion doit prendre la forme d'au moins un entretien préalable à la signature, lequel garantit la liberté du consentement des parties, sous peine de nullité de la convention. C'est toutefois à celui qui invoque cette cause de nullité d'en établir l'existence. (Soc. 1er décembre 2016 n°15-21.609).
Si le législateur n'a pas défini la teneur de cet entretien, celui-ci doit donner lieu à une information du salarié afin de lui permettre de donner un consentement éclairé.
En l'espèce, l'employeur verse aux débats le courrier de Mme [RG] du 25 juin 2018 sollicitant une rupture conventionnelle 'afin de préparer de la meilleure façon possible mon départ pour la bonne organisation de l'entreprise comme pour la mienne'. (pièce 10). Il en résulte donc que la procédure de rupture conventionnelle a été initiée par la salariée.
En revanche, le courrier du 24 juillet 2018 adressé par la société Serenet à Mme [RG] fait expressément référence à un 'entretien de mise au point' qui s'est déroulé le 20 juillet 2018, à la suite de plusieurs réclamations de clients (rappelées au sein du courrier) ainsi que d'autres manquements reprochés à la salariée (mauvaise gestion des remplacements lors des absences estivales, et retard de livraisons). Le courrier s'achève en évoquant ainsi le manque de professionnalisme de la salariée et le rappel de la nécessité pour celle-ci de rétablir à son retour d'absence un comportement exemplaire.
La salariée justifie ainsi que l'entretien du 20 juillet 2018, lors duquel aucune des parties n'était assistée, ne consistait pas en un entretien préalable à la signature d'une possible rupture conventionnelle.
La rupture conventionnelle signée le 9 août 2018 mentionne comme seul entretien préalable celui du 20 juillet, et si l'employeur fait état d'un second entretien le 9 août, date de signature, celui-ci n'est pas mentionné sur le formulaire de rupture et ne saurait des lors valoir entretien pour ladite rupture conventionnelle (pièce 16 de la salariée).
Il résulte des éléments versés aux débats par Mme [RG] la preuve de l'absence de tout entretien préalable organisé entre l'employeur et Mme [RG] ayant pour objet la signature d'une rupture conventionnelle, laquelle a toutefois été signée par les deux parties le 9 août 2018, la nullité de la convention est donc encourue et doit être prononcée de ce fait.
Par confirmation du jugement déféré, la rupture intervenue à la date du 9 août 2018 doit ainsi s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
- sur les conséquences financières :
- sur l'indemnité de licenciement :
Aux termes de l'article L 1234-9 du code du travail, le salarié licencié alors qu'il compte une ancienneté d'au moins huit mois au service du même employeur a droit, sauf en cas de faute grave ou lourde, à une indemnité de licenciement calculée en fonction de la rémunération brute dont le salarié disposait antérieurement à la rupture du contrat de travail.
L'article R. 1234-1 du code du travail dispose que cette indemnité ne peut être inférieure à une somme calculée par année de service dans l'entreprise, tenant compte des durées de service accomplies au-delà des années pleine. En cas d'année incomplète, l'indemnité est calculée proportionnellement au nombre de mois complets.
Conformément à l'article R. 1234-2 du code du travail, dans sa rédaction issue du décret du 25 septembre 2017, l'indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un quart de mois de salaire par année d'ancienneté jusqu'à dix ans.
En l'espèce, eu égard au salaire moyen de la salariée qui s'élève à la somme de 1914,40 euros, et d'une ancienneté de 4 ans, 3 mois et 8 jours telle que retenue par le conseil de prud'hommes, Mme [RG] peut donc prétendre à la somme de 2 044,69 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement.
Il n'est pas contesté que Mme [RG] a perçu la somme de 1 960,40 euros au titre de la rupture conventionnelle, qu'il lui appartient de restituer, de sorte que la société Serenet reste devoir à Mme [RG] au titre de l'indemnité de licenciement la somme de 84,29 euros.
Par confirmation du jugement déféré, la société Serenet sera condamnée à payer cette somme à Mme [RG].
- sur l'indemnité compensatrice de préavis :
Aux termes de l'article L.1234-1 du code du travail, lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit à un préavis dont la durée est calculée en fonction de l'ancienneté de services continus dont il justifie chez le même employeur, à savoir deux mois pour une ancienneté d'au moins deux ans.
Selon l'article L.1234-5 du code du travail, lorsque le salarié n'exécute pas le préavis, il a droit, sauf s'il a commis une faute grave, ou si l'inexécution résulte du commun accord des parties, à une indemnité compensatrice.
En l'espèce, sans contestation sur le montant accordé en première instance, et par confirmation du jugement déféré, la société Serenet est condamnée à payer à Mme [RG] la somme de 3 814,98 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre celle de 381,49 euros au titre des congés payés afférents.
- sur les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Mme [RG] sollicite l'octroi de la somme de 8 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors que le jugement déféré a fait droit à sa demande en évaluant son préjudice à la somme de 5 700 euros.
Selon l'article L1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux, qui, pour une ancienneté de 4 années, s'élèvent entre 3 et 5 mois de salaire.
En l'espèce, au regard du salaire moyen perçu par la salariée, de son âge et de sa qualification, sachant qu'elle justifie avoir été inscrite comme demandeuse d'emploi auprès de Pole Emploi entre le 3 octobre 2018 et le 31 août 2019 avant de retrouver un emploi comme chef d'équipe au sein de l'entreprise Saprena, le préjudice par elle subi du fait de son licenciement sans cause réelle et sérieuse sera réparé par l'allocation de la somme de 7 000 euros.
Le jugement sera ainsi infirmé de ce chef.
- Sur le remboursement des allocations servies par Pôle emploi devenu France Travail :
L'article L1235-4 du code du travail prévoit que dans les cas où le licenciement est nul ou dénué de cause réelle et sérieuse, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé.
En l'espèce, la rupture s'analysant en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la société Serenet sera tenue au remboursement des allocations servies par Pôle emploi à Madame [RG] dans la limite de 2 mois d'allocations, par confirmation du jugement déféré.
Sur la remise des documents sociaux
La demande de remise de documents sociaux rectifiés conformes à la présente décision est fondée en son principe, et le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Le jugement sera confirmé de ce chef.
La société Serenet, qui succombe, sera condamnée aux dépens et au paiement de la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
* * *
* PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement par arrêt mis à la disposition des parties au greffe,
Confirme le jugement déféré, sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité pour privation du repos compensateur, la demande indemnitaire formée au titre du harcèlement moral, le montant de l'indemnité allouée au titre de l'obligation de sécurité, ainsi que de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
L'infirme de ces chefs,
Statuant de nouveau des chefs infirmés,
Condamne la SAS Serenet à payer à Mme [R] [RG] les sommes suivantes :
- 1 352, 06 euros au titre de l'indemnité pour privation de repos compensateur
- 1 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du harcèlement moral.
- 2 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité
- 7 000 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Rappelle que les sommes allouées porteront intérêts légaux à compter de la saisine du conseil de prud'hommes pour les sommes à caractère salarial et à compter du prononcé de l'arrêt pour les sommes à caractère indemnitaire.
Y ajoutant
Condamne la SAS Serenet à payer à Madame [R] [RG] la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la SAS Serenet aux dépens d'appel
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.