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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-8, 15 octobre 2025, n° 23/13695

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 23/13695

15 octobre 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8

ARRÊT AU FOND

DU 15 OCTOBRE 2025

N°2025 / 258

N° RG 23/13695

N° Portalis DBVB-V-B7H-BMDR3

Syndicat des copropriétaires

de la résidence

[Adresse 6]

C/

[S] [E]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Emmanuel VOISIN-MONCHO

Me Annabelle DEGRADO

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal Judiciaire de GRASSE en date du 19 Septembre 2023 enregistrée au répertoire général sous le n° 21/05285.

APPELANTE

Syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] sis [Adresse 3]

pris en la personne de son syndic en exercice, le Cabinet TRIO SARL, dont le siège social est sis [Adresse 4], lui-même pris en la personne de son représentant légal en exercice audit siège,

représenté par Me Emmanuel VOISIN-MONCHO, membre de la SCP MONCHO - VOISIN-MONCHO, avocat au barreau de GRASSE

INTIME

Monsieur [S] [E]

né le 20 Août 1942 à [Localité 9], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Annabelle DEGRADO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, ayant pour avocat plaidant Me Laura FRITSCH, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 806 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Septembre 2025 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Madame Céline ROBIN-KARRER, conseillère, faisant fonction de présidente, chargés du rapport

et Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, conseiller,

qui en ont rendu compte dans le délibéré de la cour composée de :

Monsieur Pierre LAROQUE, Président

Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère

Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Maria FREDON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Octobre 2025.

ARRÊT

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Octobre 2025, signé par Monsieur Pierre LAROQUE, Président et Madame Maria FREDON, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*-*-*-*-*

M. [S] [E] est propriétaire des lots n°100, 151g et 189 au sein la résidence LE [Localité 7] LEO sise [Adresse 2], dont le syndic est le Cabinet TRIO.

Un litige s'est élevé entre M. [S] [E] et le syndicat, des copropriétaires de la Résidence Le [Adresse 8] au sujet de l'assemblée générale des copropriétaires du 8 septembre 2021, et notamment de la résolution n° 31.

Une copropriétaire dont l'installation de la climatisation et d'un store en façade n'avait pas été autorisée par l'assemblée générale des copropriétaires a fait inscrire la résolution 31 lors de l'AG du 8 septembre 2021 pour obtenir leur ratification, ce qu'elle a obtenu.

Par acte d'huissier de justice du 22 novembre 2021, M. [S] [E] a fait citer le [Adresse 11], sollicitant du tribunal judiciaire de GRASSE l'annulation de cette résolution.

Par jugement rendu le 19 septembre 2023, le Tribunal:

Annule la résolution n°3 1 de l'assemblée générale des copropriétaires du 8 septembre 2021 ;

Condamne le syndicat des copropriétaires de la Résidence Le [Localité 7] LEO à payer à M.[S] [E] la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne le [Adresse 11] aux entiers dépens;

Juge n'y avoir lieu d'écarter l'exécution provisoire du présent jugement.

Pour statuer en ce sens, le premier juge a relevé que cette résolution est nulle pour violation du règlement de copropriété.

Par déclaration au greffe en date du 6 novembre 2023, le syndicat des copropriétaires a interjeté appel de cette décision.

Aux termes des dernières conclusions notifiées par voie électronique le 5 août 2025, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé de ses moyens et prétentions il sollicite:

INFIRMER en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal Judiciaire de GRASSE du 19 septembre 2023,

REFORMER celui-ci,

DEBOUTER M. [S] [E] de l'ensemble de ses demandes visant à l'annulation de la résolution n°31 de l'Assemblée Générale du 8 septembre 2021,

LE CONDAMNER à rembourser toute somme perçue au titre de l'exécution provisoire de la décision de première instance,

LE CONDAMNER à 8.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

LE CONDAMNER aux entiers dépens de première instance et d'appel.

A l'appui de son recours, il fait valoir:

- que le règlement de copropriété n'interdit pas l'installation de climatiseur ni celle de store,

- que l'harmonie du bâti n'est absolument pas impactée par les installations litigieuses,

- que s'agissant du store il est de la couleur agréée par le syndic,

- que tous les stores de l'immeuble sont fixés sur la façade et non au droit des fenêtres,

- que le climatiseur est discret (intégré dans un cache, abrité par des jardinières) et n'impacte aucunement l'esthétisme du bâti, il n'est pas installé en façade mais sur une terrasse,

- qu'en tout état de cause dès lors que des modifications importantes ont été apportées à l'aspect extérieur de l'immeuble la rupture d'harmonie ne peut être caractérisée, et entrainerait une rupture d'égalité entre les copropriétaires,

- que le tribunal ne disposait d'aucun élément de nature à passer outre le vote des copropriétaires auquel il ne peut se substituer,

- que l'intimé soutient que la résolution aurait dû à peine de nullité être accompagnée de plans,

- que si l'article 10 du décret du 17 mars 1967 prévoit que le projet de résolution est accompagné d'un document précisant l'implantation et la consistance des travaux ce n'est pas à peine de nullité, d'autant que les copropriétaires connaissaient parfaitement la situation existante précédemment au vote, puisqu'il s'agit de régulariser des travaux déjà faits,

- qu'il n'existe pas d'irrégularité de forme susceptible d'entraîner la nullité sollicitée,

- que les irrégularités de forme affectant la feuille de présence ou le procès verbal n'entrainent la nullité des décisions adoptées que lorsque le résultat en est affecté.

Aux termes des dernières écritures notifiées par voie électronique le 6 août 2025, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé de ses moyens et prétentions M.[E] conclut:

CONFIRMER LE JUGEMENT DE PREMIERE INSTANCE EN CE QU'IL A :

- DEBOUTÉ le Syndicat des copropriétaires de la résidence [Localité 7] LEO de l'ensemble de ses demandes formulées à l'encontre de Monsieur [E]

- ORDONNÉ l'annulation de la résolution n°31prise par l'Assemblée générale des copropriétaires en date du 8 septembre 2021 ;

- CONDAMNÉ le [Adresse 12] à payer à M. [E] la somme de 1.500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile;

- CONDAMNÉ le Syndicat des copropriétaires de la résidence [Localité 7] LEO aux entiers dépens ;

Y AJOUTANT :

- CONDAMNER le [Adresse 12] à payer à M. [E] la somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile pour ce qui concerne la procédure d'appel ;

- CONDAMNER le Syndicat des copropriétaires de la résidence [Localité 7] LEO aux entiers dépens pour ce qui concerne la procédure d'appel.

Il soutient:

- que l'immeuble dont il s'agit est classé à l'inventaire des bâtiments remarquables de la ville de [Localité 5], de sorte que le règlement de copropriété contient des règles strictes quant à l'usage des parties communes et privatives,

- que lors de l'AG du 2 mai 2019 les précédents propriétaires du lot dont le climatiseur et le store sont en cause se sont engagés à déplacer le premier et à déposer le second, sans tenir leurs engagements, ces éléments étant en contradiction avec le règlement de copropriété,

- que le nouvel acquéreur a demandé en assemblée générale la ratification de ces éléments en contravention du règlement de copropriété,

- qu'un copropriétaire peut alléguer de l'inobservation d'une règle relative à l'organisation de l'assemblée générale ou la violation de formalités légales impératives pour solliciter l'annulation non pas de l'assemblée générale en son entier mais des seules résolutions auxquelles il s'est opposé,

- que la feuille de présence de l'assemblée générale en cause comporte plusieurs irrégularités, elle ne mentionne pas les noms et domiciles des mandataires désignés, de sorte qu'il est impossible de vérifier l'identité des mandataires ayant reçu des délégations de vote pour cette assemblée, elle n'est pas datée,

- qu'ainsi il n'est pas rapporté la preuve du pouvoir donné par Mme [K], de sorte que le vote effectué pour son compte est irrégulier et entache l'AG de nullité,

- que les pouvoirs octroyés par des SCI ne précisant pas qu'ils l'ont été par les gérants sont irréguliers également,

- que ces irrégularités ont pu avoir une influence sur le vote d'autant que le syndicat refuse de justifier de la régularité des votes par correspondance,

- qu'il n'est pas établi que les conditions d'inscription à l'ordre du jour de la résolution 31 soumise au vote quant à la forme et aux délais ont été respectées, de sorte que la demande d'inscription doit être considérée comme nulle ce qui affecte la régularité de la résolution 31,

- que la demande de résolution est imprécise et non accompagnée des justificatifs et plans nécessaires à sa validité, peu importe qu'il s'agisse de ratifier des travaux déjà exécutés dès lors qu'ils l'ont été sans autorisation, sinon cela reviendrait à favoriser les copropriétaires effectuant leurs travaux sans autorisation préalable,

- que l'irrégularité des installations a été constatée par le syndicat lors de l'AG du 2 mai 2019 puis du 8 septembre 2021,

- que le bloc climatisation n'a pas été déplacé, il est installé sur la partie jardin du lot en question en contravention avec les dispositions article 4-17 et 4-7 du règlement de copropriété,

- qu'en effet le bloc climatiseur intégré dans un cache au niveau du jardin terrasse constitue un édicule dont l'installation est prohibée par le règlement de copropriété,

- qu'il s'agit d'une interdiction stricte non soumise à l'appréciation de l'atteinte à l'aspect extérieur de l'immeuble ou à son harmonie,

- que les autres copropriétaires ont installé leur store en droit de la fenêtre, sous la dalle des terrasses supérieures et sans que les fixations ne dépassent sur la façade extérieure, contrairement à l'installation critiquée, qui porte atteinte à l'harmonie de l'immeuble et qui est en contradiction avec le règlement de copropriété article 4-8,

- que la simple tolérance d'un fait n'autorise pas l'AG à valider l'irrespect du règlement de copropriété,

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 août 2025.

L'affaire a été appelée à l'audience du 2 septembre 2025 et mise en délibéré au 15 octobre 2025.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande d'annulation de la résolution 31 adoptée par l'assemblée générale du 8 septembre 2021

Le règlement de copropriété prévu par l'article 8 de la loi du 10 juillet 1965 constitue la charte commune de la copropriété et s'impose aux copropriétaires avec force de loi.

L'assemblée générale des copropriétaires ne peut déroger au règlement de copropriété et ne peut donc autoriser des dérogations à un principe général d'interdiction posé par le règlement de copropriété sans modifier celui-ci.

S'agissant du bloc climatiseur

Il résulte de l'article 4 du règlement de copropriété:

7° Il ne pourra être mis sur les balcons, terrasses et fenêtres, aucune caisse, cage ou autre objet pouvant nuire à la propreté ou au bon aspect de l'immeuble,

17° Les parties du jardin, attribuées en jouissance aux appartements de parties sous sol; premier, deuxième, troisième niveau, devront être entretenues aux frais exclusifs des propriétaires, il ne pourra être édifié sur ces terrains aucune construction, même de caractère provisoire, ni édicule, ni débarras quelconque.

Le lot 94, dont l'installation du bloc climatiseur est contestée, dispose de la jouissance exclusive et particulière d'un jardin , qui prolonge sa terrasse, sur laquelle est installé ce bloc climatiseur, intégré dans un cache constituant un édicule.

Cet édicule et le bloc climatiseur qu'il cache sont implantés sur une jardin terrasse en contradiction avec les dispositions du règlement de copropriété citées ci dessus, de sorte que la résolution 31 ne pouvait ratifier cette installation prohibée par ce règlement.

S'agissant du store

Si l'article 3 du règlement de copropriété autorise l'installation aux fenêtres de stores extérieurs pourvu que ceux-ci ne gênent en aucune façon la visibilité des autres occupants, l'article 4-8 précise qu'il ne pourra être monté aucun appareil sur les façades de l'immeuble et l'article 4-12 que les copropriétaires ne devront apporter aucune modification aux portes d'entrée des appartements et autres locaux particuliers, aux fenêtres, aux volets, persiennes, garde corps de fenêtre, terrasses et balcons, ni aux autres parties visibles de la rue et qui ne font cependant pas partie des choses communes, cela même pour la peinture et généralement pour tout ce qui contribue à l'harmonie de l'immeuble.

Il résulte des pièces versées aux débats que le store litigieux du lot 94 a été fixé sur la façade de l'immeuble et non en recul de façade sous les dalles des terrasses supérieures, contrevenant ainsi à l'autorisation d'installation des stores aux fenêtres et à l'interdiction de monter aucun appareil sur les façades et de porter atteinte à l'harmonie de l'immeuble.

Il importe peu que d'autres copropriétaires aient des installations non conformes, dont il n'est pas établi qu'elles aient été autorisées. Cette simple tolérance n'autorise pas l'assemblée générale à valider l'irrespect du règlement de copropriété.

En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu'il a annulé la résolution 31 de l'assemblée générale du 8 septembre 2021, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués.

Sur les autres demandes

Le syndicat des copropriétaires est condamné à 2 000€ au titre d le'article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe, en dernier ressort,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 19 septembre 2023 par le Tribunal judiciaire de GRASSE,

Y ajoutant,

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,

CONDAMNE le [Adresse 10] [Adresse 6] représenté par son syndic en exercice le Cabinet TRIO à régler à M.[E] la somme de 2 000€ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure Civile,

CONDAMNE le [Adresse 10] [Adresse 6] représenté par son syndic en exercice le Cabinet TRIO aux entiers dépens de l'appel.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT

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