CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 17 octobre 2025, n° 24/10882
PARIS
Autre
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Trilogiq (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Renard
Conseiller :
M. Buffet
Avocats :
Me Grappotte-Benetreau, Me Thienot, Me Moisan, Me Carbasse
Vu le jugement rendu le 15 mai 2024 par le tribunal judiciaire de Paris,
Vu l'appel interjeté le 13 juin 2024 par la société Trilogiq,
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 7 mars 2025 par la société Trilogiq, appelante,
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 26 mars 2025 par la société Geolean Manufacturing System, intimée,
Vu l'ordonnance de clôture du 22 mai 2025.
SUR CE, LA COUR
La société Trilogiq a comme activité, d'après son extrait Kbis, le traitement thermochimique et le revêtement des métaux, notamment des tubes métalliques, la commercialisation de systèmes mécatroniques et la conception de système de stockage modulaires. Elle se présente comme une société leader dans le domaine de la fabrication et de la commercialisation de systèmes logistiques flexibles modulaires utilisés dans les usines et les entrepôts pour équiper les lignes de production, de maintenance, de manutention et de stockage.
Elle était titulaire des brevets français suivants, qui ont expiré :
- le brevet FR n°2872495 (FR 495), dit « brevet guide », déposé le 2 juillet 2004 portant sur un 'dispositif de déplacement et de guidage d'un conteneur destiné à être déplacé sur une structure de support modulable, ainsi qu'une structure de support modulable comprenant un tel dispositif',
- le brevet FR n°2858040 (FR 040), dit « brevet platine », déposé le 21 juillet 2003 portant sur un 'ensemble de liaison pour la réalisation des coins d'une structure tubulaire'.
La société Geolean Manufacturing System (ci-après désignée Géolean) a pour activité principale le conseil, l'assistance et la prestation de services en organisation et en optimisation des méthodes de production industrielle sur le modèle du 'lean management' ou 'lean manufacturing'.
Par acte d'huissier du 24 mai 2017, la société Trilogiq a fait assigner la société Géolean devant le tribunal judiciaire de Paris en contrefaçon de ses brevets FR 495 et FR 040 ainsi qu'en concurrence déloyale et parasitaire.
Par jugement du 7 juin 2019, le tribunal judiciaire de Paris a ;
- dit n'y avoir lieu à tentative de médiation,
- dit qu'en fabricant, offrant la livraison et livrant sur le territoire français des guides référencés G450, G450 ESD, G450-C et G450-C ESD, les moyens de fixation (« joints de connexion ») de la gamme GM (G-M1, G-M2, G-M3, G-M4, G-M5, G-M6R, G-M8, G-M10) et les rails de roulement référencés GR-400, la société GEOLEAN a commis des actes de contrefaçon de l'ensemble des revendications du brevet français FR 495 dont la société Trilogiq est titulaire,
- dit qu'en fabricant, en utilisant, en détenant, en offrant et en commercialisant les éléments tubulaires de la gamme « GT », les joints de structure (référencés G-A, G-A ESD, G-B, G-B ESD, etc... jusqu'à G-L 45 ESD et G-V1 et G-VI ESD) et les joints de connexion référencés G-M12, G-M 15 et G-M17 et les guides référencés G400 et G400 ESD, la société Géolan a commis des actes de contrefaçon des revendications 6 à 12 du brevet français FR 495 dont la société Trilogiq est titulaire,
- dit qu'en fabriquant, en détenant, en utilisant, en offrant à la vente les platines sous la référence RTS L-R et RTS L-R ESD. la société Géolan a commis et commet des actes de contrefaçon de l'ensemble des revendications du brevet français FR 040 dont la société Trilogiq est titulaire,
- dit qu'en fabricant, en utilisant, en détenant, en offrant et en mettant sur le marché, les platines RTS L-R et RTS L-R ESD et les éléments tubulaires référencés GT2-400, GT1-400, GT1-400 ESD et GT2 400 ESD, la société Géolan a commis des actes de contrefaçon des revendications 12, 13,15 et 16 du brevet français FR 040 dont la société Trilogiq est titulaire,
- dit qu'en commercialisant des pièces quasi-identiques aux produits sous des références et des désignations similaires voire identiques, la société Géolan a commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Trilogiq,
- rejeté la demande de la société Trilogiq au titre du parasitisme,
- fait interdiction à la société Géolan de poursuivre les actes de contrefaçon précités, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, passé le délai de 30 jours après la signification de sa décision,
- ordonné la destruction devant huissier, aux frais de la société Géolan, de l'ensemble des guides profilés sous les références G450 gris, 0450 blanc, G400 Gris, et 0400 blanc, des rails à galets « GR400 », des connecteurs de la gamme « G-M », des coins sous la référence RTS L-R qui sont encore en sa possession, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, passé le délai de 30 jours, après la signification du jugement,
- ordonné la destruction devant huissier aux frais de la société Géolan, de l'ensemble des documents et supports reproduisant les produits précités, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, passé le délai de 30 jours, après la signification du jugement,
- dit n'y avoir lieu à publication du jugement par voie de presse ou sur les sites de la société Géolan,
- condamné la société Géolan à payer à la société Trilogiq la somme provisionnelle de 100 000 euros à valoir sur l'indemnisation du préjudice économique subi du fait des actes de contrefaçon de ses brevets français FR 2 872 495 et FR 2 858 040,
- condamné la société Géolan à payer à la société Trilogiq la somme de 40 000 euros en réparation du préjudice moral subi généré par les actes de contrefaçon,
- condamné la société Géolan à payer à la société Trilogiq la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts du fait des actes de concurrence déloyale commis à son encontre,
- ordonné à Me [W], huissier instrumentaire, de communiquer à la société Trilogiq l'ensemble des pièces, et notamment les pièces comptables, appréhendées lors de la saisie contrefaçon réalisée le 24 avril 2017 et placées sous scellés,
- rejeté la demande d'expertise de tri de ces pièces,
- dit n'y avoir lieu à droit d'information,
- renvoyé les parties à la détermination amiable du préjudice patrimonial subi par la société Trilogiq sur la base des éléments comptables communiqués par la société Géolan et, à défaut, par voie judiciaire après assignation,
- dit qu'il se réservait la liquidation des astreintes,
- rejeté la demande de la société Géolan en dommages et intérêts pour procédure abusive,
- dit n'y avoir lieu à amende civile,
- condamné la société Géolan aux dépens,
- condamné la société Géolan à paver à la société Trilogiq la somme de 60 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire, à l'exception des mesures de destruction.
La société Géolean a interjeté appel de ce jugement.
Par arrêt définitif du 23 novembre 2021, la cour d'appel de Paris a :
Réformé le jugement en ce qu'il a :
- dit qu'en fabricant, offrant la livraison et livrant sur le territoire français des guides référencés G450, G450 ESD, G450-C et G450-C ESD, les moyens de fixation (« joints de connexion ») de la gamme GM (G-M1, G-M2, G-M3, G-M4, G-M5, G-M6R, G-M8, G-M10) et les rails de roulement référencés GR-400, la société Géolan a commis des actes de contrefaçon de l'ensemble des revendications du brevet français FR 495 dont la société Trilogiq est titulaire,
- dit qu'en fabriquant, en détenant, en utilisant, en offrant à la vente les platines sous la référence RTS L-R et RTS L-R ESD, la société Géolan a commis et commet des actes de contrefaçon de l'ensemble des revendications du brevet français FR 040 dont la société Trilogiq est titulaire,
Statuant à nouveau,
- dit qu'en fabricant, offrant la livraison et livrant sur le territoire français des guides référencés G450 et G450 ESD les moyens de fixation (« joints de connexion ») de la gamme GM (G-M1, G-M2, G-M3, G-M4, G-M5, G-M6R, G-M8, G-M10) et les rails de roulement référencés GR-400, la société Géolan a commis des actes de contrefaçon des revendications 1 à 5 du brevet français FR 495 dont la société Trilogiq est titulaire,
- dit qu'en fabriquant, en détenant, en utilisant, en offrant à la vente les platines sous la référence RTS L-R et RTS L-R ESD, la société Géolan a commis et commet des actes de contrefaçon des revendications 1 à 6 et 8 à 11 du brevet français FR 040 dont la société Trilogiq est titulaire,
Confirmé le jugement pour le surplus,
Y ajoutant,
- dit que les mesures d'interdiction et de destruction ordonnées devront être exécutées en considération du présent arrêt,
- condamné la société Géolan aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés par CMS Francis Lefebvre avocats conformément à l'article 699 code de procédure civile,
- condamné la société Géolan à payer à la société Trilogiq la somme de 40 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par acte d'huissier justice du 15 octobre 2020, la société Trilogiq a fait assigner la société Géolean devant le tribunal judiciaire de Paris pour voir son préjudice au titre de la contrefaçon des brevets français FR 495 et FR 040 indemnisé.
C'est dans ce contexte qu'a été rendu le jugement du tribunal judiciaire de Paris, dont appel, qui a :
- condamné la société Géolean à payer 301 775,92 euros à la société Trilogiq à titre de dommages et intérêts,
- condamné la société Géolean aux dépens,
- condamné la société Géolean à payer 30 000 euros à la société Trilogiq en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire.
Par ses dernières conclusions, remises au greffe et notifiées par voie électronique le 7 mars 2025, la société Trilogiq demande à la cour de :
- infirmer la décision du tribunal en ce qu'elle a limité la condamnation de la société Geolan MS Geolan Manufacturing System (anciennement Géolean SARL) à la somme de 301 775,92 euros à titre de dommages et intérêts,
- infirmer la décision du tribunal en ce qu'elle a limité la condamnation de la société Geolan MS Geolan Manufacturing System (anciennement Géolean SARL) à payer à la société Trilogiq la somme de 30 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- confirmer la décision du tribunal en ce qu'elle a condamné la société Geolan MS Geolan Manufacturing System (anciennement Géolean SARL) aux entiers dépens,
Jugeant à nouveau :
- condamner la société Geolan Manufacturing System à lui payer la somme de 4 200 000 euros au titre de la contrefaçon des brevets français FR 2 872 495 et FR 2 858 040,
- condamner la société Geolan Manufacturing System à lui payer la somme de 75 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Par ses dernières conclusions, remises au greffe et notifiées par voie électronique le 26 mars 2025, la société Geolean Manufacturing System demande à la cour de :
- infirmer le jugement du tribunal en ce qu'il l'a condamnée à payer 301 775,92 euros à la société Trilogiq à titre de dommages et intérêts,
- infirmer le jugement du tribunal en ce qu'il l'a condamnée aux entiers dépens,
- infirmer le jugement du tribunal en ce qu'il l'a condamnée à payer 30 000 euros à la société Trilogiq en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Et, statuant à nouveau :
A titre principal :
- juger que la société Trilogiq n'a souffert d'aucun préjudice du fait des produits litigieux commercialisés par Géolean,
En conséquence,
- débouter la société Trilogiq de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
A titre subsidiaire :
- juger que le montant du préjudice subi par la société Trilogiq ne saurait excéder la somme de 207 000 euros,
En conséquence,
- débouter la société Trilogiq de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
En tout état de cause :
- condamner la société Trilogiq à lui payer la somme de 30 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Trilogiq aux entiers dépens.
SUR CE
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu'elles ont transmises, telles que susvisées.
Sur la réparation du préjudice
En vertu de l'article L.615-7 du code de la propriété intellectuelle :
« Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :
1° Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;
3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d'investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.
Toutefois, la juridiction peut, à titre d'alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l'autorisation d'utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n'est pas exclusive de l'indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée ».
La société Trilogiq sollicite l'indemnisation de son préjudice sur la base de son gain manqué, évalué en appliquant la marge brute à la masse contrefaisante. Ce mode de calcul n'est pas contesté par la société Géolean.
Sur la masse contrefaisante
- Sur les pièces contrefaisantes retenues par le tribunal
La société Trilogiq fait valoir que le tribunal a exclu certaines références contrefaisantes qui figuraient dans le dispositif du jugement statuant sur la contrefaçon, confirmé par la cour.
La société Géolean n'a pas conclu sur ce point.
Le tribunal a considéré que les pièces contrefaisantes « sont celles listées dans le dispositif de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 23 novembre 2021. Ainsi, les éléments tubulaires, référencés GT, les joints de structure, référencés G-A et autres, et les guides référencés G400 et G400 ESD, en sont exclus ».
Or, les pièces contrefaisantes sont outre celles mentionnées dans l'arrêt de la cour, soit les guides référencés G450 et G450 ESD, les moyens de fixation (« joints de connexion ») de la gamme GM (G-M1, G-M2, G-M3, G-M4, G-M5, G-M6R, G-M8, G-M10), les rails de roulement référencés GR-400, les platines sous la référence RTS L-R et RTS L-R ESD, celles visées aux 4ème et 6ème paragraphe du dispositif du jugement qui ont fait l'objet de l'arrêt de confirmation, soit :
- les éléments tubulaires de la gamme « GT »,
- les joints de structure (référencés G-A, G-A ESD, G-B, G-B ESD, etc... jusqu'à G-L 45 ESD et G-V1 et G-VI ESD),
- les joints de connexion référencés G-M12, G-M 15 et G-M17,
- les guides référencés G400 et G400 ESD,
- les platines RTS L-R et RTS L-R ESD,
- et les éléments tubulaires référencés GT2-400, GT1-400, GT1-400 ESD et GT2 400 ESD.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a exclu de la masse contrefaisante les éléments tubulaires référencés GT, les joints de structure référencés G-A et autres et les guides référencés G400 et G400 ESD.
- Sur la détermination des pièces contrefaisantes fabriquées, détenues, utilisées et offertes à la vente par la société Géolean.
La société Géolean fait valoir que seules les ventes de projets contenant des guides ou des platines peuvent être pris en compte dans la masse contrefaisante car ces éléments de base sont indispensables dans les inventions brevetées et que les actes de contrefaçon ne sont caractérisés que si les produits visés sont destinés à être montés ensemble et en association. Elle ajoute que si le jugement et l'arrêt retiennent une liste de références, cela n'implique pas que chaque référence entre dans la masse contrefaisante en l'absence de combinaison complète des éléments essentiels permettant de reproduire les inventions brevetées car la contrefaçon n'est réalisée que si les produits litigieux comportent tous les moyens essentiels, non secondaires, constitutifs de l'invention protégée.
La société Trilogiq conteste cette analyse au motif que l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 23 novembre 2021 aurait jugé le contraire.
Le brevet français FR 495, dit brevet « guide », porte sur un dispositif de déplacement et de guidage d'un conteneur destiné à être déplacé sur une structure de support modulable et sur une structure modulable comprenant un tel dispositif, destinés au stockage et à la présentation des pièces détachées devant être assemblées sur une chaîne de montage.
Les revendications qui ont été jugées contrefaites sont ainsi rédigées.
- La revendication 1 vise un : « Dispositif de déplacement et de guidage d'un conteneur (2) destiné à être déplacé sur une structure de support modulable (1),
' ledit dispositif comprenant un élément de guidage latéral (9) comprenant un profilé pourvu d'une paroi d'appui (10), contre laquelle une paroi latérale (11) du conteneur (2) est destinée à prendre appui,
' ledit dispositif comprenant en outre des moyens de fixation serrables (12) à la structure de support (1), lesdits moyens permettant une association de façon réglable dudit dispositif de déplacement et de guidage à ladite structure de support,
' ledit dispositif de déplacement et de guidage (3) comprenant en outre un rail de roulement (14), sur lequel le conteneur (2) est destiné à se déplacer, ledit rail étant associé audit élément de guidage de sorte que la paroi d'appui (10) maintient le conteneur (2) sur le rail de roulement (14),
ledit dispositif étant caractérisé en ce que l'élément de guidage (9),
' comprend une cavité (13) pourvue d'une ouverture supérieure (16), le rail de roulement (14) étant logé dans ladite cavité,
' la surface supérieure du rail de roulement (14) s'étendant sensiblement au-dessus de ladite ouverture supérieure ».
- La revendication 2 porte sur un « dispositif selon la revendication 1, caractérisé en ce que la cavité (13) comprend une surface formant butée (21), ladite butée étant formée par un
décrochement pénétrant dans la cavité (13) à proximité de son ouverture supérieure (16), le rail de roulement (14) comprenant un décrochement (22) dans sa partie supérieure, ledit décrochement prenant appui contre la butée (21) afin de bloquer élément de guidage (9) par rapport au rail de roulement ».
- La revendication 3 porte sur un « Dispositif selon la revendication 1 ou 2, caractérisé en ce que l'élément de guidage (9) comprend une surface de liaison (15), ladite surface de liaison s'étendant sensiblement dans le prolongement de l'ouverture supérieure (16) de la cavité (13), ladite surface de liaison et la paroi d'appui (10) formant un angle sensiblement perpendiculaire ».
- La revendication 4 porte sur un « Dispositif selon l'une quelconque des revendications 1 à 3, caractérisé en ce que le rail de roulement (14) est un rail comprenant une pluralité de galets mobiles (14) en rotation, sur lesquels le conteneur (2) est destiné à se déplacer ».
- La revendication 5 décrit un 'Dispositif de guidage selon l'une quelconque des revendications 1 à 4, caractérisé en ce que la paroi d'appui (10) de l'élément de guidage (9) comprend une saillie (23) destinée à être en regard de la paroi latérale (11) du conteneur (2), ladite paroi latérale du conteneur (2) étant destinée à prendre appui contre ladite saillie'.
- La revendication 6 porte sur une « Structure de support modulable d'au moins un conteneur (2) sur laquelle le conteneur (2) est destiné à se déplacer de sorte à se trouver dans une position de présentation, ladite structure de support comprenant des éléments tubulaires (4) fixés les uns par rapport aux autres par des moyens d'association d'éléments tubulaires (5), au moins deux éléments tubulaires (6, 7) s'étendant sensiblement parallèlement l'un à l'autre et sensiblement horizontalement, ladite structure étant caractérisée en ce qu'elle comprend au moins un chemin de déplacement (8) du conteneur (2) entre les deux éléments tubulaires (6, 7), ledit chemin de déplacement étant formé par au moins un dispositif de déplacement et de guidage (3) selon l'une quelconque des revendications 1 à 5, ledit dispositif formant une première partie latérale du chemin de déplacement (8), ledit dispositif étant associé de façon réglable auxdits deux éléments tubulaires ».
- La revendication 7 vise une « structure de support selon la revendication 6, caractérisé en ce que le chemin de déplacement (8) comprend un autre élément de guidage (24) associé de façon réglable à la structure (1) formant une deuxième partie latérale d'un chemin de déplacement (8) ».
- La revendication 8 décrit une « structure de support selon la revendication 6 ou 7, caractérisé en ce que le chemin de déplacement (8) comprend un deuxième rail de roulement (14), associé de façon réglable à ladite structure (1), les deux rails de roulement (14) s'étendant sensiblement parallèlement l'un à l'autre ».
- La revendication 9 porte sur une « Structure de support selon la revendication 8 lorsqu'elle dépend de la revendication 7, caractérisé en ce que l'élément de guidage (24) et le deuxième rail de roulement (14) appartiennent à un dispositif de déplacement et de guidage (3) selon l'une quelconque des revendications 1 à 5 ».
- La revendication 10 porte sur une « structure de support selon la revendication 7, caractérisé en ce que l'autre élément de guidage (24) est un élément de guidage central (25), disposé entre deux dispositif de déplacement et de guidage (3), ledit élément de guidage central formant la première partie latérale d'un chemin de déplacement (8) et la deuxième partie latérale d'un autre chemin de déplacement (8), ledit élément central comprenant deux parois d'appui (26, 27) sensiblement parallèles l'une à l'autre et contre lesquelles deux parois latérales (11) de deux conteneurs (2), se déplaçant chacun sur un des chemins de déplacement (8), sont destinées à prendre appui ».
- La revendication 11 porte sur « Structure de support selon la revendication 10, caractérisé en ce que les deux parois d'appui (26, 27) comprennent chacune une saillie (28), les deux saillies (28) étant disposées en regard l'une de l'autre ».
- La revendication 12 porte sur une « Structure de support selon l'une quelconque des revendications 7 à 10, caractérisé en ce que les deux éléments tubulaires (6, 7) sensiblement horizontaux sont décalés en hauteur l'un par rapport à l'autre, le chemin de déplacement (8) étant en pente de sorte que le conteneur (2) est destiné à descendre sur le chemin de déplacement (8) ».
Il a été définitivement jugé que constituent la contrefaçon des revendications 1 à 5 les guides référencés G450 et G450 ESD, les moyens de fixation de la gamme GM et les rails de roulement référencés GR-400 et celle des revendications 6 à 12 les guides référencés G400 et G400 ESD, les éléments tubulaires de la gamme « GT », les joints de structure (référencés G-A, G-A ESD, G-B, G-B ESD, etc... jusqu'à G-L 45 ESD et G-V1 et G-VI ESD) et les joints de connexion référencés G-M12, G-M 15 et G-M17.
La société Géolean a été condamnée pour la contrefaçon des revendications 1 à 6, 8 à 13 et 15 et 16 du brevet FR 040, dit brevet « platine », qui porte sur un ensemble de liaison pour la réalisation des coins d'une structure tubulaire, permettant de connecter ensemble des tubes afin de former une structure tubulaire modulable pour réaliser des structures tubulaires modulables destinées au stockage et à la présentation de pièces détachées utilisées sur une chaîne de montage.
- La revendication 1 porte sur un « Ensemble de liaison destiné à être associé avec des éléments tubulaires (14), lesdits éléments comprenant un revêtement thermoplastique (16), pour la réalisation d'une structure tubulaire modulable, ledit ensemble (1, 10) étant destiné à former un coin de ladite structure tubulaire, ledit ensemble (1, 10) étant caractérisé en ce qu'il comprend,
' en premier lieu, une pièce de liaison (2) comprenant au moins deux premiers moyens de réception (4) d'une partie extrême d'un formant un angle l'un par rapport à l'autre et d'une partie extrême d'un élément tubulaire (14) sensiblement incliné par rapport au plan définit par les deux premiers moyens de réception,
' ledit ensemble comprenant, en deuxième lieu, des moyens de fixation (3) de la partie extrême d'un élément tubulaire (14) dans les moyens de réception (4, 5), lesdits moyens étant mobiles entre un état actif serré et un état inactif desserré, lesdits moyens de fixation étant montés dans des moyens de maintien (6) complémentaires prévus sur les moyens de réception (4, 5) de ladite pièce de liaison, lesdits moyens de fixation agissant par serrage transversal sur le revêtement thermoplastique (16) de la partie extrême d'un et assurant, une fois serrés, le maintien ferme de sur la pièce (2),
ledit ensemble de liaison permettant la réalisation d'une structure tubulaire de résistance adaptée pour le support de charges pouvant avoir une masse importante, telle que celle d'un ensemble de pièces d'usinage ».
- La revendications 2 vise un 'ensemble de liaison selon la revendication 1, caractérisé en ce que l'angle formé entre les deux premiers moyens de réception (4) est un angle droit et en ce que le deuxième moyen de réception (5) s'étend sensiblement perpendiculairement par rapport au plan formé par les deux premiers moyens de réception (4) ».
- La revendication 3 vise un 'ensemble de liaison selon la revendication 1 ou 2, caractérisé en ce que les moyens de fixation (3) sont une vis prévue pour coopérer avec un pas de vis, formant moyen de maintien (6) des moyens de réception (4, 5), les dimensions de la vis étant adaptées pour mordre dans le revêtement thermoplastique (16) d'un élément tubulaire (14) sans percer celui-ci ».
- La revendication 4 porte sur un 'ensemble de liaison selon la revendication 1 à 3, caractérisé en ce que les moyens de réception (4, 5) sont des manchons tubulaires sensiblement cylindriques, dont le diamètre est adapté pour recevoir et retenir une partie extrême d'un élément tubulaire (14), un pas de vis traversant étant prévue dans leur périphérie'.
- La revendication 5 porte sur un 'ensemble de liaison selon l'une quelconque des revendications 1 à 4, caractérisé en ce que le deuxième moyen de réception (5) est respectivement solidaire de chaque premier moyen de réception (4) par l'intermédiaire d'une aile de liaison'.
- La revendication 6 porte sur un 'ensemble de liaison selon la revendication 5, caractérisé en ce que les ailes de mission (7) forment des butées pour les éléments tubulaires (14) reçues dans les deux premiers moyens de réception (4)'.
- La revendication 8 vise un 'ensemble de liaison selon l'une quelconque des revendications 1 à 6, caractérisé en ce que les moyens de réception (4, 5) sont disposés sur une plaque de liaison (12), les deux premiers moyens de réception (4) s'étendant sensiblement parallèlement à ladite plaque et le deuxième moyen de réception (5) s'étendant à partir de ladite plaque dans une direction sensiblement inclinée par rapport à celle-ci, la pièce (2) comprenant en outre un troisième moyen de réception (11) d'une partie extrême d'un élément tubulaire (14), ledit moyen étant disposé sur la plaque (12) sensiblement parallèlement à l'un des deux premiers moyens de réception (4)'.
- La revendication 9 porte sur un 'ensemble de liaison selon la revendication 8, caractérisé en ce que ladite plaque comprend des moyens d'association (13) de roulettes sur lesquelles la structure tubulaire est destinée à reposer de façon à la rendre mobile'.
- La revendication 10 vise un 'ensemble de liaison selon l'une quelconque des revendications 7 à 9, caractérisé en ce que la plaque de liaison (9, 12) forme une butée pour un élément tubulaire (14) reçu dans le deuxième moyen de réception (5)'.
- La revendication 11 concerne un 'ensemble de liaison selon l'une quelconque des revendications 7 à 10, caractérisé en ce que les moyens de réception (4, 5, 11) sont fixés à la plaque de liaison (9, 12) par soudage autour d'une partie de la périphérie des moyens de réception (4, 5, 11) » et que « les ailes de liaison (7) sont soudées à la plaque de liaison (9, 12)'.
- La revendication 12 porte sur un « Système de construction comprenant un ensemble de liaison (1, 10) selon l'une quelconque des revendications 1 à 11 et au moins un élément tubulaire (14), ledit élément tubulaire comprenant une âme métallique (15) et un revêtement thermoplastique (16), une partie extrême dudit élément tubulaire étant logée dans un moyen de réception (4, 5, 11) de la pièce de liaison (1, 10), les moyens de fixation (3) étant montés dans les moyens de maintien complémentaires (6) des moyens de réception et serrés, dans leur état actif, de façon à mordre dans le revêtement thermoplastique (16) de l'élément tubulaire (14) sans percer celui-ci, ni endommager substantiellement son âme métallique (15), tout en assurant un maintien ferme de l'élément tubulaire (14) adapté aux masses des charges supportées par une structure tubulaire ».
- La revendication 13 porte sur une « Structure tubulaire modulable adaptée pour le support de charges, composée d'éléments tubulaires (14) fixés les uns par rapport aux autres par des moyens d'association d'éléments tubulaires, lesdits éléments tubulaires comprenant un revêtement thermoplastique (16), certains éléments formant piétements et d'autres formant assises, ladite structure étant caractérisée en ce que au moins une partie des moyens d'association permettant de réaliser les coins de celle-ci sont des systèmes de construction selon la revendication 12".
- La revendication 15 porte sur une « Structure tubulaire modulable selon la revendication 13 ou 14, caractérisée en ce que au moins une partie des moyens d'association permettant de réaliser les coins inférieurs de ladite structure tubulaire sont des systèmes de construction selon la revendication 12 lorsqu'elle dépend de la revendication 8".
- La revendication 16 vise une «Structure tubulaire modulable selon la revendication 15, caractérisée en ce qu'elle comprend des roulettes permettant de la rendre mobile, lesdites roulettes étant fixées aux pièces de liaison des ensemble de liaison (10) formant les coins inférieurs de ladite structure'.
Ainsi, les revendications 1 à 11 protègent un ensemble de liaison, la revendication 12 un système de construction comprenant un ensemble de liaison et au moins un élément tubulaire, et les revendications 13 à 16 la structure tubulaire d'ensemble avec l'ensemble de ces éléments.
Il a été définitivement jugé que constituent des actes de contrefaçon des revendications 1 à 6 et 8 à 11 les platines commercialisées par la société Géolean sous les références RTS L-R et RTS L-R ESD et des revendications 12, 13,15 et 16 les platines RTS L-R et RTS L-R ESD et les éléments tubulaires référencés GT2-400, GT1-400, GT1-400 ESD et GT2 400 ESD.
Il résulte du rapport d'expertise privée produit par la société Géolean que l'expert a retenu seulement les factures relatives aux pièces détachées quand elles portaient sur les guides et les platines (page 9 du rapport du 16 mars 2022). Il a établi son évaluation sur la base d'un tableau Excel réalisé par la société Géolean portant sur les factures sur lesquelles figurent les références G400, G400 ESD, G450, G450ESD, soit les guides jugés contrefaisants, et les références RTS L-R et RTS L-R ESD, soit les platines jugées contrefaisantes.
Il n'a donc pas pris en compte pour le brevet « guide » les factures portant sur les moyens de fixation (« joints de connexion ») de la gamme GM (G-M1, G-M2, G-M3, G-M4, G-M5, G-M6R, G-M8, G-M10), les joints de structure (référencés G-A, G-A ESD, G-B, G-B ESD, etc... jusqu'à G-L 45 ESD et G-V1 et G-VI ESD), les joints de connexion référencés G-M12, G-M 15 et G-M17, les rails de roulement référencés GR-400 et les éléments tubulaires de la gamme « GT » et pour le brevet « platine », les éléments tubulaires référencés GT2-400, GT1-400, GT1-400 ESD et GT2 400 ESD.
L'expert a estimé la quantité et le montant des ventes des rails GR 400 et des joints de connexion GM sur la base d'un rail par un guide et de six joints par rail.
Or, ces pièces peuvent faire l'objet d'achats plus importants en remplacement de celles qui se détériorent et des spécificités de chaque structure.
L'expert a écarté de la masse contrefaisante les éléments tubulaires car selon lui, les meubles en kit à éléments tubulaires étaient connus avant le dépôt des brevets et le brevet ne protège pas les éléments tubulaires mais les meubles en kit incorporant les éléments tubulaires. Ainsi, l'expert n'a pris en compte que les éléments vendus ou associés à des guides ou des platines.
Or, contrairement à ce qui est affirmé, les revendications qui ont été contrefaites ne visent pas uniquement les meubles en kit puisque pour le brevet « platine », la revendication 12 porte sur un système de construction comprenant un ensemble de liaison et au moins un élément tubulaire et protège donc l'association entre une platine et un élément tubulaire, ceux référencés GT2-400, GT1-400, GT1-400 ESD et GT2 400 ESD ayant été jugés contrefaisants.
Pour rejeter le moyen de la société Géolean selon lequel la référence à des pièces détachées est insuffisante pour caractériser une contrefaçon directe, la cour, dans son arrêt du 23 novembre 2021, a justement relevé que toutes les pièces détachées nécessaires à l'assemblage du produit contrefaisant sont offertes à la vente dans le même catalogue, présentées comme destinées à être montées ensemble pour former la structure modulable puisque le catalogue prévoit expressément que les platines et roulettes sont destinées à être utilisées avec les tubes, que les guides sont destinés à être utilisés avec les rails et joints de connexion, que les tubes sont destinés à être utilisés avec les joints de connexion, que les rails sont destinés à être utilisés avec les tubes et joints de connexion, que les monorails sont destinés à être utilisés avec les tubes et joints de connexion, que les joints de connexion sont destinés à être utilisés avec les tubes et rails guides, que les joints de structure sont destinés à être utilisés avec les tubes et que la société Géolean propose par ailleurs ses services pour assurer le montage.
Il s'ensuit que les éléments tubulaires ne peuvent être écartés de la masse contrefaisante puisqu'il sont protégés par les brevets en ce qu'ils sont nécessaires aux inventions et ont vocation à être intégrés aux autres éléments et que l'estimation du volume des autres pièces (joints de connexion, joints de structure et les rails de roulement) est sous-évaluée, l'ensemble de ces pièces appelées à former un tout devant être pris en compte dans la masse contrefaisante.
- Sur la durée de la contrefaçon
Les parties s'accordent sur la date de fin de la période de contrefaçon, soit le 7 juin 2019, date du jugement qui a interdit à la société Géolean la poursuite des actes de contrefaçon.
La société Trilogiq soutient que, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, le point de départ de la période contrefaisante doit être fixé antérieurement au 1er janvier 2016, soit à compter du 24 mai 2012, point de départ de la prescription quinquennale puisque l'assignation date du 24 mai 2017.
Elle fait valoir qu'il ressort du tableau que la société Géolean a remis à l'expert qu'elle a mandaté que des commandes de pièces contrefaisantes datent de 2013 et de 2015 et que les références contrefaisantes apparaissent dans le catalogue de la société Géolean de 2012, peu important que les références soient différentes dès lors que les caractéristiques techniques des produits sont les mêmes que celles brevetées.
La société Géolean répond que les produits contrefaisants n'ont commencé à être commercialisés qu'en 2016, comme l'a jugé le tribunal.
Elle indique que la date des commandes qui figure dans le tableau remis à l'expert n'est pas pertinente s'agissant de commandes de matériel qui peuvent durer plusieurs années dans le cadre de ses prestations de conseil.
Elle fait valoir, à la fois que pour son catalogue de 2012, les photographies de piètre qualité ne permettent pas d'apprécier l'identité avec les produits commercialisés après 2016, ni la reproduction des éléments essentiels des inventions protégées, et que les photographies et descriptions des produits des deux catalogues diffèrent ainsi que les références et les principaux éléments de chacun des deux brevets en cause.
Concernant le guide, la société Géolean indique que celui reproduit dans le catalogue ne constitue qu'un élément accessoire de l'invention dès lors qu'il n'est visé que parmi les revendications n°7 et 10 dépendantes de la revendication principale n°1 et qu'il ne peut y avoir contrefaçon de cette revendication dépendante non essentielle de l'invention.
Concernant la platine, elle fait valoir qu'aucune indication du catalogue ne permet de vérifier la fonction de l'invention et notamment la réalisation des moyens de réception, et de fixation visés dans la revendication n°1 du brevet FR 040.
La société Géolean ajoute qu'en tout état de cause, la preuve n'est pas établie qu'il s'agissait de produits non authentiques alors qu'elle se fournissait auprès de la société Trilogiq, de sorte qu'une partie des produits commercialisés au cours de la période 2012-2015 pouvait lui avoir été vendue par la société Trilogiq.
L'expert mandaté par la société Géolean a exclu la période 2012-2015 après avoir constaté qu'aucune des références des produits jugés contrefaisants ne figuraient dans les factures.
Cependant, font partie de la masse contrefaisante les produits identiques à ceux jugés contrefaisants, la seule différence de référence ne pouvant les en exclure.
Il apparaît dans le tableau figurant en annexe 1 du rapport de l'expert mandaté par la société Géolean portant sur les factures de vente de pièces en vrac, comportant des références « litigieuses » pour la période 2016-2019, des factures qui portent sur une commande datée de 2013 et des commandes datées de 2015.
Il s'ensuit que des pièces jugées contrefaisantes ont été commercialisées avant 2016, la société Géolean en s'abstenant de produire les factures en cause ne justifiant pas du contraire.
Les produits jugés contrefaisants sont représentés dans le catalogue 2016 de la société Géolean. Les photographies du catalogue 2012 de la société Géolean sous la marque Makitlean sont de bonne qualité et permettent une comparaison.
Concernant le brevet FR 040, il n'est ni allégué, ni justifié que le catalogue reproduit les guides jugés contrefaisants. En conséquence, la seule reproduction d'un moyen de fixation, en l'absence de guide auquel il s'associe, ne démontre pas l'existence d'actes de contrefaçon.
Concernant le brevet FR 495, les guides référencés G450 et G450 qui ont été jugés comme contrefaisant les revendications 1 à 5 du brevet ne sont pas reproduits dans le catalogue, si bien qu'il n'est pas justifié de la contrefaçon de ces revendications.
Il a été jugé que la société Géolean avait contrefait les revendications 6 à 12 du brevet en utilisant, en détenant, en offrant et en commercialisant les éléments tubulaires de la gamme « GT », les joints de structure (référencés G-A, G-A ESD, G-B, G-B ESD, etc... jusqu'à G-L 45 ESD et G-V1 et G-VI ESD) et les joints de connexion référencés G-M12, G-M 15 et G-M17 et les guides référencés G400 et G400 ESD.
Or, la pièce de guidage référencée PC-400 dans le catalogue 2012, qui est reproduite sur une page entière, est identique à celle référencée G400 dans le catalogue 2016 et reproduit les caractéristiques de l'élément de guidage définit à la revendication 1 du brevet. Elle assure la même fonction puisque le catalogue indique qu'elle assure le guidage du conditionnement et s'utilise avec des connections. Il s'agit de la seule pièce de guidage présentée par le catalogue.
Concernant les connections, les joints de connexions présentés comme contrefaisants par la société Trilogiq (G-M3 (référence catalogue 2012 TM3), G-M4 (référence catalogue 2012 TM4), G M8 (référence catalogue 2012 TM8) et G M10 (référence catalogue 2012 TM10)), ne font pas partie des pièces jugées contrefaisantes en association avec la pièce de guidage G400.
En revanche, figurent dans le catalogue 2012 le joint de connexion G-M12 sous la référence TM12 et G M15 sous la référence T M15. Ces joints de connexion ont la même fonction que ceux jugés contrefaisants.
Sont aussi reproduits dans le catalogue 2012 les joints de structure G-A, G-B jusqu'à G-L45 ESD et G-V1 sous les références T-A, T-B, jusqu'à T-L45 et T-V1 et les tubes en acier de la gamme GT (T1 400 pour GT 1 400 et T2-400 pour GT2-400) qui comportent la même épaisseur, le même diamètre et la même longueur.
La société Géolean ne démontre pas que ces produits ont été acquis auprès de la société Trilogiq dès lors que les factures qu'elle produit ne les visent pas.
En conséquence, ces éléments doivent être inclus dans la masse contrefaisante et le jugement doit être infirmé en qu'il fait débuter la contrefaçon en 2016 et non en 2012.
- Sur le calcul du chiffre d'affaires résultant de la vente des produits contrefaisants
Les parties ne contestent pas le montant du chiffre d'affaires portant sur la vente de pièces réalisé par la société Géolean sur la base de l'attestation de son commissaire aux comptes pour la période du 1er janvier 2016 au 7 juin 2019. Ce montant, qui a été retenu par le tribunal, s'élève à 8 195 204,50 euros.
Pour la période du 24 mai 2012 au 31 décembre 2015, la société Géolean ne fournit aucun élément sur son chiffre d'affaires. Ce chiffre d'affaires a été évalué par l'expert mandaté par la société Trilogiq à 7 885 792 euros. En l'absence d'éléments produits par la société Géolean de nature à remettre en cause ce montant, il sera retenu.
Il a été jugé que l'évaluation par la société Géolean des ventes contrefaisantes effectuée par l'expert sur la base des factures remises par cette société était erronée. Elle ne peut donc être prise en compte.
L'expert de la société Trilogiq s'est basé sur une étude statistique du service comptable de cette société, validée par le commissaire aux comptes, aux termes de laquelle 72% des projets vendus par la société Trilogiq entre 3 décembre 2020 et 30 juin 2022 contiennent des dispositifs avec des platines et des guides.
Si la société Géolean conteste ce mode de calcul, force est de constater qu'elle ne propose pas d'autre pourcentage.
Il résulte du catalogue 2019 de la société Géolean qu'une gamme de guides (G 410) et de platines (RTS M) n'est pas contrefaisante.
Il s'ensuit que le pourcentage retenu sera de 50%.
Ce pourcentage n'est pertinent que pour la période à compter du 1er décembre 2016 au regard de la masse contrefaisante.
Pour la période du 24 mai 2012 au 31 décembre 2015, compte tenu des seules pièces retenues comme contrefaisantes et de l'absence de contrefaçon du brevet « platine », le pourcentage doit être fixé à 20%.
Ainsi, les ventes contrefaisantes réalisées par la société Géolean s'élèvent :
- du 24 mai 2012 au 31 décembre 2015 à (20% de 7 885 792) à 1 577 158 euros
- et du 1er janvier 2016 au 7 juin 2019 à (50% de 8 195 204,50) à 4 097 602 euros.
En conséquence, le chiffre d'affaires portant sur la masse contrefaisante doit être fixé à 5 674 760 euros.
Sur le taux de marge
Le tribunal a retenu un taux de marge brute, destiné à obtenir le calcul du préjudice hors coût de fabrication des pièces contrefaisantes, de 50% qui avait été proposé par la société Trilogiq.
Si la société Géolean indique que ce taux est arbitraire et non justifié, force est de constater que dans le cadre de son expertise privée, ce taux a été retenu et qu'elle n'en propose pas d'autre.
En conséquence, ce taux sera retenu et la marge brute s'élève à (50% de 5 674 760) = 2 837 380 euros.
Sur le taux de report
La société Géolean fait valoir que le taux de report doit être fixé à 31% et non à 50%, comme retenu par le tribunal, puisque doivent en être exclues les ventes liées à ses activités de conseil et à ses filiales. Elle relève que la société Trilogiq a cessé de commercialiser les références litigieuses à partir de 2015, à la suite de l'abandon de sa gamme acier au profit d'une gamme en graphite qui n'a pas eu de succès, si bien qu'aucune vente de platine qu'elle a réalisée, qui portaient exclusivement sur des produits en acier, n'aurait pu se reporter sur la société Trilogiq car ses clients recherchaient des produits en acier et ne voulaient pas s'équiper en matériel en graphite, plus onéreux et dont la valeur ajoutée était nulle sur le plan technique. Elle conteste le fait que l'arrêt de la commercialisation de l'acier n'a duré que 7 mois.
Elle ajoute que l'activité de la société Trilogiq est très différente de la sienne puisqu'elle fournit des prestations de conseil auxquelles sont associées des ventes de matériel dans une proportion de 80% pour les prestations de conseil et de 20% pour les ventes de matériel et que seules étaient susceptibles de se reporter sur la société Trilogiq les ventes réalisées en France et qui n'étaient pas le corollaire de prestations de conseil puisqu'elle n'aurait jamais préconisé les produits de la société Trilogiq que ses filiales n'auraient pas acheté compte tenu du fait que la relation entre les deux entreprises a été rompue de manière conflictuelle et définitive à partir de 2012. Elle ajoute qu'elle aurait proposé des produits alternatifs, commercialisés par les concurrents à des prix inférieurs.
La société Trilogiq estime que le taux de report doit être fixé à 70% compte tenu de sa place de leader, de l'absence de « goulot d'étranglement » puisque les pièces contrefaisantes représentaient en volume moins de 10% de ses capacités de fabrication et de commercialisation et de la qualité de ses produits.
Elle relève que la société Géolean aurait pu fournir ses produits dans le cadre des ventes intervenant suite à ses missions de conseil. Elle soutient que l'arrêt de la gamme acier a duré uniquement 7 mois, entre septembre 2015 et avril 2016, que les brevets ne portent pas sur un matériau spécifique, qu'il n'y a pas eu de changement de matériau concernant l'élément de guidage objet du brevet FR 495 et que le changement de matériau d'acier en graphite, qui n'a concerné que certaines pièces de liaison du brevet platine, n'a entraîné aucun changement dans la structure de ces pièces.
Le taux de report définit les ventes additionnelles correspondant à tout ou partie de la masse contrefaisante que le titulaire du brevet aurait pu réaliser au regard, notamment, de sa capacité industrielle de production et sa capacité de commercialisation, de son positionnement sur le marché, de l'avantage concurrentiel apporté par le droit auquel il a été porté atteinte.
Il résulte de l'article figurant sur le site internet zonebourse.com que la société Trilogiq a procédé en janvier 2014 au lancement de sa nouvelle gamme Graphit de joints en composite appelée à remplacer la gamme en acier et de l'article du site bousredirect.fr publié le 16 janvier 2017 que l'arrêt de la gamme en acier a eu lieu en septembre 2015 suite à la défaillance d'un fournisseur et qu'à compter d'avril 2016, elle a trouvé un autre acteur, ce qui lui permet de proposer les deux gammes, acier et graphite. Cette reprise de la commercialisation de la gamme en acier en avril 2016 est aussi mentionnée dans le « flash valeur » Euroland Corporate du 27 janvier 2017. Cette information est corroborée par la lettre du 14 mars 2025 de M. [L] [Y], directeur administratif et financier du groupe Trilogiq depuis 2008, auquel est joint sa pièce d'identité. Le fait que l'attestation ne reproduise pas les mentions de l'article 202 du code de procédure civile ne lui ôte pas toute valeur probante d'autant que des factures sont jointes à cette attestation qui démontrent l'achat d'acier. Dès lors, le jugement est mal fondé en ce qu'il retient un arrêt de la vente des produits en acier entre 2016 et 2019, cet arrêt n'ayant duré que 8 mois.
Il ne peut être soutenu que du fait de l'arrêt temporaire de la gamme en acier, la société Trilogiq a cessé d'exploiter ses brevets puisque le brevet FR 495 « guide » ne mentionne aucun matériau.
Concernant le brevet FR 040 « platine », la revendication 1 définit les éléments tubulaires comme comprenant un revêtement thermoplastique.
Or, il n'est ni allégué, ni justifié que le fait d'utiliser le graphite exclut un revêtement en thermoplastique.
En tout état de cause, cet arrêt de la commercialisation pendant 8 mois a incité les clients à ne pas se reporter sur les produits en platine, plus onéreux.
Il convient aussi de tenir compte des éléments relevés par l'expert mandaté par la société Trilogiq, à savoir que les produits commercialisés par cette société sont 10 à 15% plus cher que ceux de ses concurrents et que le marché était en constante régression.
De plus, la société Géolean fait justement valoir qu'elle n'aurait pas proposé à ses clients ni vendu à ses filiales les produits de la société Trilogiq à compter de 2012, comme le démontre la fin des relations commerciales entre les sociétés. Cet arrêt est lié au fait que M. [F] [G], inventeur des deux brevets en cause qu'il avait cédés à la société Trilogiq dont il était salarié, directeur et associé, est devenu co-gérant de la société Géolean à compter de 2008.
Il s'ensuit que même si la société Trilogiq est leader sur le marché et avait la capacité de commercialiser les produits contrefaisants, le taux de report doit être fixé à 40%. Il s'élève donc à (40% de 2 837 380) = 1 134 952 euros.
Sur le taux de redevance indemnitaire
Les parties s'accordent sur le fait qu'il convient d'appliquer un taux de redevance sur la partie de la masse contrefaisante non reportable, soit un taux de 5% qui a été retenu par le tribunal.
Cette redevance s'élève donc à (5% de 2 837 380 - 1 134 952, soit de 1 702 428) = 85 121 euros.
Sur le montant total du préjudice
Au total, le préjudice de la société Trilogiq s'élève à (1 134 952+85 121=) 1 220 073 euros.
Le jugement sera en conséquence infirmé sur le montant des dommages intérêts alloués.
Sur les autres demandes
La solution du litige commande de confirmer les dispositions du jugement sur les dépens et les frais irrépétibles.
Partie perdante, la société Géolean sera condamnée aux dépens d'appel et à indemniser la société Trilogiq de ses frais irrépétibles dans le cadre du recours à hauteur de 25 000 euros.
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement sauf en ses dispositions sur les frais irrépétibles et les dépens,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Fixe le point de départ des actes de contrefaçon commis par la société Geolean Manufacturing System au 24 mai 2012,
Fixe le taux de report à 40%,
Condamne la société Geolean Manufacturing System à payer à la société Trilogiq la somme de 1 220 073 euros (un million deux cent vingt mille soixante treize) euros en réparation de son préjudice,
Condamne la société Geolean Manufacturing System aux dépens d'appel,
Condamne la société Geolean Manufacturing System à payer à la société Trilogiq la somme de 25 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.