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Décisions

CA Nîmes, 4e ch. com., 17 octobre 2025, n° 23/03065

NÎMES

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CA Nîmes n° 23/03065

17 octobre 2025

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 23/03065 - N° Portalis DBVH-V-B7H-I6R3

CC

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'[Localité 6]

19 septembre 2023 RG :21/02521

[L]

C/

S.A.S.U. BAB MANSOUR

Copie exécutoire délivrée

le 17/10/2025

à :

Me Laurent BELFIORE Me Mohammed LAMRINI

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

4ème chambre commerciale

ARRÊT DU 17 OCTOBRE 2025

Décision déférée à la cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'[Localité 6] en date du 19 Septembre 2023, N°21/02521

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Christine CODOL, Présidente de Chambre

Agnès VAREILLES, Conseillère

Nathalie ROCCI, Présidente

GREFFIER :

Madame Isabelle DELOR, Greffière à la Chambre commerciale, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 08 Octobre 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 17 Octobre 2025.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANT :

M. [M] [L]

né le 13 Janvier 1943 à [Localité 7]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représenté par Me Laurent BELFIORE de la SCP ARTAUD BELFIORE CASTILLON GREBILLE-ROMAND, Plaidant, avocat au barreau de NICE

Représenté par Me Julien DUMAS LAIROLLE, Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉE :

S.A.S.U. BAB MANSOUR, SAS au capital de 1.000,00 €, immatriculée sous le numéro 828 043 158 d'[Localité 6], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège ;

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Mohammed LAMRINI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 25 Septembre 2025

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, le 17 Octobre 2025, par mise à disposition au greffe de la cour

EXPOSÉ

Vu l'appel interjeté le 29 septembre 2023 par Monsieur [M] [L] à l'encontre du jugement rendu le 19 septembre 2023 par le président et le vice-président du tribunal judiciaire d'Avignon dans l'instance n° RG 21/02521 ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 5 février 2024 par Monsieur [M] [L], appelant, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 16 janvier 2024 par la SASU Bab Mansour, intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu l'ordonnance du 11 mars 2025 de clôture de la procédure à effet différé au 25 septembre 2025.

***

Par acte sous seing privé du 17 mai 1999, Madame [I] [K] épouse [L], décédée et aux droits de laquelle vient Monsieur [M] [L], son fils et héritier, a donné à bail pour une durée de 9 années, avec effet à compter de la signature du contrat, à la société Barkane un local commercial situé [Adresse 3] à [Localité 6] (84), moyennant un loyer d'un montant annuel initial de 4 817,39 euros hors charges, payable trimestriellement.

Le bail a précisé que les locaux commerciaux sont à usage exclusif de restauration, débit de boissons et snack bar.

Ce bail contient une clause résolutoire prévoyant la résiliation de plein droit de la location en cas de défaut de paiement régulier des loyers et charges par le locataire ou d'inexécution par ce-dernier d'une seule des conditions du bail, un mois après un commandement de payer ou une sommation d'exécuter demeurés infructueux.

***

Par acte sous seing privé du 31 janvier 2017 ou du 21 février 2017, chacun des actes produits contenant une date différente, la société Bab Mansour a acquis le fonds de commerce de la société Mésopotamie, locataire en place suite à plusieurs cessions successives, et, par voie de conséquence, le droit au bail commercial contracté en 1999.

Un procès-verbal d'infraction aux dispositions du code de l'urbanisme a été dressé le 12 avril 2017 à l'encontre de Monsieur [L] pour travaux non autorisés dans le local commercial.

Puis Monsieur [M] [L] a fait délivrer à son locataire le 30 novembre 2020 un commandement visant la clause résolutoire, demeuré vain pendant le délai d'un mois.

Par exploit du 7 septembre 2021, Monsieur [M] [L] a fait assigner la société Bab Mansour, en constat de l'acquisition de la clause résolutoire stipulée dans le contrat de bail de 1999, subsidiairement en résiliation de plein droit du droit au bail, en expulsion de cette société, en paiement d'une somme au titre des indemnités d'occupation et provisions sur charges, et en tout état de cause, en paiement des frais irrépétibles et dépens, devant le tribunal judiciaire d'Avignon.

***

Par jugement du 19 septembre 2023, le président et le vice-président du tribunal judiciaire d'Avignon ont statué ainsi :

« Déboute Monsieur [M] [L] de l'intégralité de ses demandes,

Condamne Monsieur [M] [L] à payer à la SASU Bab Mansour la somme de deux mille euros (2000 euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne Monsieur [M] [L] aux dépens

Rappelle que la présente décision bénéficie de l'exécution provisoire de droit en application de l'article 514 du code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes. ».

***

Monsieur [M] [L] a relevé appel le 29 septembre 2023 de ce jugement pour le voir infirmer, annuler ou réformer en ce qu'il a :

- débouté Monsieur [M] [L] de l'intégralité de ses demandes,

- condamné Monsieur [M] [L] à payer à la société Bab Mansour la somme de deux mille euros (2000 euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Monsieur [M] [L] aux dépens.

***

Dans ses dernières conclusions, Monsieur [M] [L], appelant, demande à la cour, au visa de l'article R 221-3-26°11 du code de l'organisation judiciaire, des articles 1224, 1227 et 1229 du code civil et de l'article L.145-41 du code de commerce, de :

« Infirmer le jugement querellé en ce qu'il a :

débouté de Monsieur [M] [L] de l'intégralité de ses demandes,

condamné Monsieur [M] [L] au paiement de la somme de 2.000,00 euros au titre des frais irrépétibles outre les entiers dépens,

rejeté toutes autres demandes.

Et statuant à nouveau,

A titre principal :

- Constater l'acquisition de la clause résolutoire stipulée dans le contrat de bail du 17 mai 1999,

- Constater ainsi la résiliation de plein droit du bail au 30 décembre 2020,

- Autoriser Monsieur [M] [L] à faire procéder à l'expulsion immédiate et sans délai des locaux donnés à bail la SASU BAB Mansour, ainsi que celle de tous occupants de son chef, avec si besoin le concours de la force publique ;

- Condamner la SASU Bab Mansour au paiement de la somme de 717,85 euros par mois au titre des indemnités d'occupation et provisions sur charges dues à compter de la décision à venir.

A titre subsidiaire :

- Ordonner la résiliation judiciaire du bail à compter de l'ordonnance à venir.

- Autoriser Monsieur [M] [L] à faire procéder à l'expulsion immédiate et sans délai des locaux donnés à bail la SASU Bab Mansour, ainsi que celle de tous occupants de son chef, avec si besoin le concours de la force publique ;

- Condamner la SASU Bab Mansour au paiement de la somme de 717,85 euros par mois au titre des indemnités d'occupation et provisions sur charges dues à compter de la décision à venir.

En tout état de cause :

Condamner la SASU Bab Mansour au paiement de la somme de 5.000,00 euros au titre des frais irrépétibles, outre les entiers dépens de l'instance (ceux compris les frais de constat d'huissier et de sommation). ».

Au soutien de ses prétentions, Monsieur [M] [L], appelant, expose qu'en contravention avec les clauses du bail, le droit au bail a été cédé sans son accord, formalisé par acte sous seing privé et non par acte authentique. Il indique que la cession ne lui a été signifiée que le 22 avril 2021. Le bailleur ajoute que le preneur a réalisé sans son accord d'importants travaux d'agrandissement du local, en violation des règles d'urbanisme, ce qui a occasionné la rédaction d'un procès-verbal de violation des règles de l'urbanisme à la demande de la commune.

Il soutient que, si les travaux ont été initiés par le précédent preneur, comme le fait valoir l'intimée, il n'en a jamais été informé et que la responsabilité de la société Bab Mansour demeure entière.

Il prétend que les travaux dénoncés dans le procès-verbal d'infraction dressé le 12 avril 2017 ne sont pas régularisables, que l'agrandissement du local n'a pas été régularisé et qu'il encourt des poursuites pénales. Il conteste la valeur probatoire de la déclaration préalable de travaux qui a été obtenue de manière frauduleuse. Il considère que la réalisation illégale et sans l'accord du bailleur de la tourelle d'extraction est de nature à mettre en péril la solidité de l'immeuble car la toiture a été percée.

Il verse aux débats un constat du 5 octobre 2023 qui fait état de l'encombrement des parties communes par le locataire, ce qui constitue un trouble anormal de voisinage.

Monsieur [L], se fondant sur le commandement du 30 novembre 2020 de remettre les lieux dans leur état d'origine demeuré infructueux, conclut à l'application de la clause résolutoire du bail.

Subsidiairement, il fait valoir que les manquements graves du preneur justifient la résiliation judiciaire du bail.

***

Dans ses dernières conclusions, la société Bab Mansour, intimée, demande à la cour, au visa de l'article 1690 du code civil, de l'article 1224 du code civil, et de l'article 9 du code de procédure civile, de :

« - Statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'appel interjeté par Monsieur [M] [L] ;

- Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

- Débouter Monsieur [M] [L] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- Condamner Monsieur [M] [L] à payer à la SASU Bab Mansour la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner Monsieur [M] [L] aux entiers dépens d'instance. ».

Au soutien de ses prétentions, la société Bab Mansour, intimée, expose que le contrat de bail permet une cession libre du droit au bail si le successeur exerce la même activité, ce qui a été le cas en l'espèce. En outre le mandataire du bailleur (l'agence [J]) a été informé par lettre recommandée du 23 février 2017 de la cession du droit au bail et il a délivré ensuite des quittances de loyer. Enfin, le bailleur s'est vu délivrer un procès-verbal le 12 avril 2017 dressé à la Sasu Bab Mansour en tant que locataire. L'intimée prétend par ailleurs que la signification de la cession est opposable au bailleur même sans son acceptation et qu'elle n'est pas soumise à un quelconque délai. Et, en tout état de cause, le commandement d'exécuter ne porte pas sur ces points, ce qui ne peut donc entraîner le constat de l'acquisition de la clause résolutoire.

La société Bab Mansour reconnait avoir entrepris sans autorisation des travaux en février 2017 mais l'infraction a été régularisée. Elle réfute avoir procédé à un agrandissement des locaux qu'elle n'a fait que rénover.

Elle se prévaut des stipulations du bail pour faire valoir son droit à exécuter des travaux sans autorisation du bailleur dès lors qu'ils ne mettent pas en péril la solidité de l'immeuble. Or, le bailleur n'apporte aucune preuve d'une atteinte à la solidité de l'immeuble.

De même, la société Bab Mansour estime que la preuve de l'encombrement des parties communes provient de son fait et constate l'absence de plainte de la part des voisins.

Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

DISCUSSION

Sur l'acquisition de la clause résolutoire :

Le contrat de bail contient la clause résolutoire suivante :

« A défaut de ['] d'inexécution d'une seule des conditions du présent bail, et un mois après ['] une sommation d'exécuter, contenant déclaration par le « propriétaire » de son intention d'user de son bénéfice de la présente clause, demeuré infructueux, le présent bail sera résilié de plein droit si bon semble au propriétaire, même dans le cas de paiement ou d'exécution postérieurs à l'expiration du délai ci-dessous, sans qu'il soit besoin de former aucune demande judiciaire, et si dans ce cas « le Preneur » refusait de quitter les lieux loués, il suffirait pour l'y contraindre d'une simple ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de la situation de l'immeuble, exécutoire nonobstant opposition ou appel et sans caution. »

Par sommation de faire et d'exécuter du 30 novembre 2020 visant la clause de modification des lieux et celle relative aux améliorations, outre la clause résolutoire, le bailleur somme le preneur de remettre le local dans son état d'origine et notamment d'avoir à démolir les travaux illégaux entrepris sans autorisation ayant conduit à l'agrandissement du local commercial avec la création d'une pièce supplémentaire en tôle à usage de cuisine du restaurant en façade arrière Est, donnant sur la cour de l'immeuble, et ce dans le délai d'un mois.

La clause relative à la modification des lieux stipule que le preneur ne pourra faire dans les lieux loués aucune construction ou démolition, aucun percement de murs ou planchers, pouvant mettre en péril la solidité de l'immeuble.

S'il ressort des pièces produites et du constat d'huissier en particulier qu'il n'y a pas qu'une structure en bardage blanc et tôles mais aussi un bloc de climatisation ainsi qu'un système d'extraction de fumée et de hotte comprenant une tourelle d'extraction en béton longeant sur toute sa hauteur la façade et sortant en toiture par un percement de celle-ci, il n'est pas démontré par le bailleur que ces constructions mettent en péril la solidité de l'immeuble. En effet, la sortie de la tourelle d'extraction se situe sur le débord de la toiture, à l'extérieur de la façade et la tourelle est maintenue à la paroi par des brides métalliques.

C'est donc à bon droit que le premier juge a constaté que la clause de modification des lieux n'avait pas été violée.

La clause relative aux améliorations stipule en son dernier alinéa que, pour tous les travaux effectués sans autorisation, le propriétaire aura toujours le droit d'exiger le rétablissement des lieux dans leur état primitif, aux frais exclusifs du preneur.

Mais la clause de rétablissement doit être combinée avec l'alinéa 1 du même article en vertu duquel « tous travaux (') qui seraient faits dans les lieux loués par le preneur, même avec autorisation du bailleur resteront en fin des présentes, de quelque manière et à quelque époque qu'elle arrive, la propriété du bailleur, sans aucune indemnité ».

Par conséquent, le bailleur ne peut exiger le rétablissement des lieux loués avant la fin du contrat de bail.

Il s'ensuit qu'aucun manquement du preneur fondé sur les deux clauses du bail mentionnées dans le commandement n'est établi et qu'il ne peut être fait application de la clause résolutoire.

Les autres manquements invoqués par le bailleur ne sont pas visés dans le commandement et ne peuvent non plus conduire à l'acquisition de la clause résolutoire.

Sur la résiliation judiciaire du bail :

Il ne sera pas revenu sur l'application des clauses relatives à la modification des lieux et aux travaux d'amélioration qui n'ont pas été enfreintes et ne constituent pas une faute imputable au preneur.

Le bail stipule, en ce qui concerne la cession et la sous-location, que le preneur ne pourra céder son droit au bail sans le consentement exprès et écrit du bailleur. « Toutefois il pourra consentir librement une cession de bail à son successeur dans son activité ».

La société Bab Mansour exerçant la même activité que le cédant, le consentement du bailleur n'était pas requis lors de la cession.

Le bail stipule encore que « toute cession ou toute sous-location devra avoir lieu par acte notarié auquel le bailleur sera appelé. Les cessionnaires et sous-locataires devront s'obliger solidairement avec le preneur au paiement des loyers et à l'exécution des conditions du bail.

Quant au preneur, il reste garant et répondant solidairement de son successeur et de tous successeurs successifs, du paiement des loyers et de l'exécution des conditions du bail.

Une copie exécutoire de l'acte de cession ou de sous-location devra être remise au bailleur, sans frais pour lui, afin de servir de titre exécutoire contre les cessionnaires ou sous-locataires. »

Ainsi que relevé dans le jugement, la cession -qui n'a pas été conclue par acte notarié ' a été notifiée le 23 février 2017 à l'agence immobilière mandataire du bailleur. Cette agence a immédiatement encaissé des loyers et délivré des quittances. Mais cela ne vaut pas preuve de l'acceptation tacite du bailleur à une renonciation de l'exigence contractuelle, laquelle doit résulter d'actes positifs.

Cass. 3ème civ. 16 juillet 1975 n° 74-1149

La conséquence du défaut de signification consiste en l'inopposabilité de la cession au bailleur jusqu'à régularisation de la procédure de signification qui est en l'espèce intervenue le 22 avril 2021.

Elle peut être aussi une cause de résolution du bail mais ce manquement, régularisé par la signification de l'acte le 22 avril 2021, n'est pas suffisamment grave pour voir prononcer une résolution judiciaire.

Le bailleur invoque également le non-respect de la clause relative à la destination des lieux loués qui stipule que le preneur « devra se conformer rigoureusement aux prescriptions administratives et autres » concernant l'exploitation d'un fonds de commerce de restaurant, débit de boisson, snack, bar.

Un procès-verbal d'infractions au code de l'urbanisme a été établi par la Ville d'[Localité 6] le 12 avril 2017 et adressé au bailleur. Il est relevé l'aménagement intérieur du commerce de restauration au rez-de-chaussée, la modification d'ouvertures sur la partie arrière du local, l'agrandissement du local avec la création d'une pièce supplémentaire en tôle dans la partie Est donnant sur la cour de l'immeuble en vue d'y créer une cuisine, le remplacement des fenêtres pré-existantes par des fenêtres PVC, le tout sans autorisation préalable alors que la parcelle est située dans le périmètre de protection des monuments historiques.

La société Bab Mansour fait état de la régularisation de sa situation grâce à l'autorisation administrative accordée le 29 juin 2017. Cette autorisation régularise l'extension en tôle qui devait être couverte d'un bardage en bois mais il n'est pas fait mention de la tourelle d'extraction .

En tout état de cause, cette autorisation est donnée sans préjudice du recours des tiers pour des atteintes à leurs droits.

Or, le bailleur se réfère à la clause du contrat de bail qui prévoit que le preneur doit veiller à ne rien faire qui puisse apporter aucun trouble de jouissance aux voisins et doit satisfaire à toutes les charges de ville et de police, règlement sanitaire, voirie, salubrité, hygiène, sécurité et autres charges dont les occupants sont ordinairement tenus, pour soutenir que le preneur cause un trouble anormal de voisinage.

Le bail alloue au preneur des locaux situés au rez-de-chaussée. Il est établi, tant par le procès-verbal d'infraction du 12 avril 2017 que le constat d'huissier du 8 novembre 2019 qu'une pièce supplémentaire en tôle a été créée dans la cour de l'immeuble qui est commune. Alors que le premier étage est occupé par un tiers, une tourelle d'extraction a été montée le long de la façade arrière, à proximité de fenêtres et débouche au-dessus du toit par percement de son débord sans autorisation du propriétaire et selon une mise en 'uvre manifestement non conforme aux règles de l'art. Enfin, il ressort d'un constat d'huissier du 5 octobre 2023 que le hall d'entrée est encombré de vélos, de tables de restaurant pliées, chaises et autres mobiliers de restauration ; les deux étages supérieurs sont desservis par un escalier dont la cage est littéralement envahie d'objets, meubles, rebuts, décoration, vêtements, penderies, ustensiles de cuisine, appareils électroménagers ; le palier du dernier étage fait office de buanderie avec présence d'un séchoir et d'un étendage. L'huissier constate en conséquence que la circulation dans les parties communes en est d'autant réduite voire impossible.

La société Bab Mansour fait valoir que la preuve n'est pas rapportée de ce que les objets en cause lui appartiennent. Il est cependant évident que le local en tôle est destiné à la cuisine du restaurant, que la tourelle d'extraction est nécessaire dans toute activité de restauration, que le matériel de restauration entreposé dans le hall d'entrée est destiné à l'activité professionnelle de l'intimée.

En s'appropriant de la sorte les parties communes, le preneur cause un trouble anormal de voisinage, peu important que les autres occupants de l'immeuble n'aient pas fait de réclamation. Le bailleur n'est pas en mesure de leur assurer une jouissance paisible des lieux et cette appropriation de l'espace commun constitue un manquement suffisamment grave justifiant la résolution judiciaire du bail.

Dès lors, Monsieur [L] sera autorisé à faire procéder à l'expulsion des locaux donnés à bail la SASU Bab Mansour, ainsi que celle de tous occupants de son chef, avec si besoin le concours de la force publique et la SASU Bab Mansour sera condamnée au paiement de la somme de 717,85 euros par mois au titre des indemnités d'occupation et provisions sur charges dues à compter de la décision à venir. L'équité commande enfin d'allouer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au bailleur. Les dépens, qui ne peuvent comprendre les frais de sommation et de constat par application de l'article 695 du code de procédure civile, seront mis à la charge du preneur.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

Rejette la demande de constat de l'acquisition de la clause résolutoire,

Prononce la résiliation judiciaire du bail du 17 mai 1999,

Autorise Monsieur [M] [L] à faire procéder à l'expulsion des locaux donnés à bail la SASU Bab Mansour, ainsi que celle de tous occupants de son chef, avec si besoin le concours de la force publique ;

Condamne la SASU Bab Mansour au paiement de la somme de 717,85 euros par mois au titre des indemnités d'occupation et provisions sur charges dues à compter du présent arrêt,

Condamne la SASU Bab Mansour à payer à Monsieur [M] [L] la somme de 3.000,00 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SASU Bab Mansour aux dépens de première instance et d'appel.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

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