CA Nîmes, 1re ch., 16 octobre 2025, n° 24/00068
NÎMES
Autre
Autre
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Selon acte en date du 16 avril 2021, M. [H] [D] et son épouse [C] née [X] ont vendu à Mme [K] [P] une maison à usage d'habitation [Adresse 3] à [Localité 7] au prix de 250 000 euros.
Par jugement du 8 mars 2023, le tribunal correctionnel de Nîmes a condamné les vendeurs chacun à une peine de 1 500 euros d'amende dont 500 euros avec sursis pour :
- exécution de travaux non autorisés par un permis de construire, commis entre août 2017 et avril 2021, en l'espèce transformation d'un garage en chambre, réalisation d'une terrasse le long de la façade ouest, installation d'une baie vitrée et création d'une piscine, travaux non prévus au permis de construire délivré le 30 août 2017,
- infraction aux dispositions du plan local d'urbanisme, commis entre février 2019 et le 18 juin 2021, en l'espèce réalisation d'une piscine à moins d'un mètre de la limite séparative.
Le tribunal les a également condamnés solidairement à payer à la partie civile, la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts outre la somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article 475-1 du code de procédure pénale.
Par acte du 28 avril 2022, Mme [P] avait assigné les vendeurs sur le fondement de la garantie des vices cachés devant le tribunal judiciaire de Nîmes qui par jugement contradictoire du 06 novembre 2023
- l'a déboutée de l'ensemble de ses prétentions,
- l'a condamnée à leur payer la somme totale de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Mme [K] [P] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 29 décembre 2023.
Par ordonnance du 07 mars 2025, la procédure a été clôturée le 04 septembre 2025 et l'affaire fixée à l'audience du 18 septembre 2025.
EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS
Au terme de ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 15 juillet 2025, Mme [K] [P], appelante, demande à la cour :
- de réformer la décision entreprise en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau
- de condamner les intimés à lui verser les sommes de
- 107 953 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice matériel,
- 20 000 euros au titre du préjudice moral
A titre subsidiaire
- de les condamner à lui verser les sommes de :
- 107 953 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice matériel,
- 20 000 euros au titre du préjudice moral
A titre infiniment subsidiaire
- de les condamner à lui verser les sommes de :
- 107 953 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice matériel subi,
- 20 000 euros au titre du préjudice moral
En tout état de cause
- de rejeter toutes demandes contraires,
- de condamner les intimés à lui verser les sommes de :
- 6 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance
- 6 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure en appel,
- de les condamner aux entiers dépens, comprenant :
- 1 800 euros au titre du rapport d'expertise,
- 110 euros au titre du diagnostic,
- 610 euros au titre du rapport DEA,
- 3 500 euros au titre de l'assistance Conseil2Pros.
Au terme de leurs dernières conclusions régulièrement notifiées le 25 août, M. et Mme [D], intimés, demandent à la cour :
- de confirmer le jugement en ce qu'il :
- a débouté l'appelante de l'ensemble de ses prétentions et moyens,
- l'a condamnée à leur payer la somme totale de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre sa condamnation aux entiers dépens,
Statuant à nouveau
- de déclarer la demande d'indemnisation au titre du préjudice moral irrecevable
- de débouter l'appelante de l'intégralité de ses demandes,
- de la condamner à leur verser la somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Il est expressément fait renvoi aux dernières écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens conformément aux dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile.
MOTIVATION
* garantie des vices cachés
Pour rejeter la demande sur ce fondement, le premier juge a retenu qu'aucun des désordres et malfaçons affectant l'immeuble ne remplissait les critères du vice caché et que si la dissimulation par les vendeurs de l'état de non-conformité administrative du bien vendu pouvait caractériser un tel vice, le préjudice résultant de cette dissimulation avait été réparé par leur condamnation par le tribunal correctionnel de Nîmes.
L'appelante soutient que le premier juge a reconnu que l'expertise réalisée peu après la date d'acquisition permettait de considérer que la maison était affectée de vices cachés relatifs à l'auvent d'entrée, aux menuiseries, aux volets roulants, à la terrasse extérieure, au portail et portillon, au placoplâtre, à la plomberie, à l'électricité, à la piscine, au terrassement et au puisard, désordres qui préexistaient à la vente et dont elle n'a pu s'apercevoir qu'en occupant le bien.
Les intimés répliquent qu'aucune preuve de vices cachés au sens de l'article 1641 du code civil n'est rapportée ; que l'antériorité des désordres, leur caractère caché au jour de la vente et leur imputabilité ne sont pas établis.
Ils ajoutent que le rapport [G], dressé unilatéralement et de manière non-contradictoire, doit être écarté des débats ; qu'en tout état de cause, il ne fait pas état de désordres rendant le bien impropre à sa destination ; que les devis produits sont relatifs à des travaux sans rapport avec les désordres allégués ; que les autres éléments sont non-contradictoires et non probants, comme établis trop longtemps après la vente et qu'une expertise judiciaire en l'état des travaux modificatifs réalisés par l'appelante n'est pas envisageable.
Aux termes de l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.
Il incombe à l'acquéreur de rapporter la preuve de l'existence d'un vice inhérent à la chose, non apparent au moment de la vente et antérieur à celle-ci, et suffisamment grave pour rendre la chose impropre à son usage.
Aux termes de l'article 1643 du même code le vendeur est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.
L'acte authentique de vente reçu le 16 avril 2021 mentionne page 9 concernant l'état du bien « l'acquéreur prend le bien dans l'état où il se trouve au jour de l'entrée en jouissance, sans recours contre le vendeur pour quelque cause que ce soit notamment en raison des vices apparents, des vices cachés.
S'agissant des vices cachés, il est précisé que cette exonération de garantie ne s'applique pas si le vendeur a la qualité de professionnel de l'immobilier ou de la construction, sauf si l'acquéreurs a également cette qualité, ou s'il est prouvé par l'acquéreur, dans les délais légaux, que les vices cachés étaient en réalité connus du vendeur ».
Aussi l'appelante doit-elle pour faire échec à cette clause de nongarantie des vices cachés démontrer outre que les quatre conditions nécessaires à la garantie des vices cachés sont réunies, que les vendeurs avaient connaissance des défauts invoqués
Il est rappelé que le juge ne peut fonder sa décision sur la seule communication d'une expertise amiable réalisée à la demande de l'une des parties si elle n'est corroborée par aucun autre élément.
Ainsi, le « rapport de consultation » réalisé par M. [G] à la demande de l'appelante sans que les vendeurs n'aient été invités aux opérations, s'il ne peut être écarté des débats dès lors qu'il a été contradictoirement débattu, ne peut à lui seul établir l'existence des vices allégués.
* existence de vices cachés
* auvent d'entrée
L'appelante produit des photographies de cet auvent, sous lesquelles figurent des annotations selon lesquelles celui-ci vibrait lors de l'ouverture et de la fermeture de la porte d'entrée, qu'elle a été contrainte de procéder à sa démolition et qu'à cette occasion, il s'est avéré que la dalle avait été percée pour accueillir la descente du ferraillage du poteau, ce ferraillage étant non scellé et non chaîné au ferraillage de la dalle, que des trous avaient été percés dans la brique au-dessus du linteau au lieu d'être positionnés dans un support chaîné, que les barres étaient des bouts de fer à béton introduits dans les trous sans aucun scellement chimique ni maintien mécanique, que la structure de l'auvent ne tenait que par gravité et effet de friction, et que le bac de rétention du dessus avait été réalisé sans pente pour l'évacuation de l'eau, créant une surcharge importante et des infiltrations.
Le rapport [G] indique concernant uniquement la « casquette sur porte d'entrée » 'qu'il existe des traces d'infiltrations au niveau de la cueillie , que le revêtement de sol est tâché et que ce défaut d'étanchéité est de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination.'
Quant au cabinet Conseil 2Pro, dans un « compte-rendu de constatation lors d'assistance au maître d'ouvrage pour le suivi de chantier » adressé à l'appelante le 9 mai 2025, il indique avoir constaté que « le porche en béton (toit plat) de l'entrée fut réalisé sur 2 piliers (posés sur le carrelage) de la terrasse et accolé à la façade. Les fixations étaient réalisées avec quelques mauvaises ferrailles plantées dans la brique rouge de la façade et dans le carrelage sans aucun produit chimique ni ancrage. L'étanchéité du toit plat était réalisée avec du goudron (une couche) et les remontées avec des sacs poubelles enduits d'un produit caoutchouteux. Ce porche était sûrement voué à s'effondrer. Nous avons été obligés de le faire démolir ».
Ces éléments concordants révèlent un problème d'étanchéité de l'auvent, ainsi qu'un problème de construction de ses piliers.
Néanmoins, l'expert ne fournit aucune explication, ni sur l'origine de ces problèmes d'étanchéité ni sur les raisons pour lesquelles ce problème rendrait l'auvent impropre à sa destination.
Quant au cabinet Conseil2Pro, il se contente d'émettre des suppositions sur la solidité et le risque d'effondrement, plusieurs années après sa démolition.
Il en résulte que si cet auvent était atteint d'un vice, il n'est pour autant pas démontré qu'il rendait la maison, impropre à sa destination.
* menuiseries
L'appelante fait état de défauts d'étanchéité à l'eau et à l'air des menuiseries, de défauts de pose, de l'absence de grilles de ventilation dans les pièces sèches et de défauts affectant les volets roulants.
Le rapport [G] constate :
- l'absence de grilles de ventilation dans les menuiseries extérieures, en non-conformité avec la réglementation en vigueur,
- que la poignée de la porte d'entrée a été remplacée deux fois, que la poignée de fermeture de la baie vitrée sud du séjour est hors service, de même que la poignée de man'uvre du coulissant droit au-dessus de l'évier,
- que les coulisses des volets roulants ne sont pas fixées et/ou sommairement
- que le désordre est généralisé « impropriété à destination »
- que les sous-faces des caissons de volets roulants ne sont pas posées, générant des entrées d'air parasites et la diminution des performances thermiques
- que l'ouvrant gauche de la fenêtre du dressing ne peut pas se développer, il est bloqué par le col du robinet mélangeur
- un dysfonctionnement de plusieurs poignées de man'uvre des châssis (« absence de réglage ' »)
- un défaut d'étanchéité à l'air des menuiseries extérieures, avec pénétration d'air à l'intérieur, ces défauts étant généralisés et caractérisant « une impropriété à destination généralisée pour les menuiseries extérieures).
Il s'est questionné sur la conformité des châssis à la réglementation RT 2012.
L'appelante verse aux débats des photographies des menuiseries et le compte-rendu de constatations réalisé par le cabinet Conseil2Pro duquel il ressort :
- que les quatre baies vitrées et la porte d'entrée sont posées dans des aplombs différents, ce qui compliquait l'ouverture et la fermeture ainsi que l'étanchéité à l'air,
- que les coulisses des volets roulant étaient fixées avec des chevilles à taper dans la brique creuse (conséquence : ils se sont envolés).
Elle produit également un rapport de « mesure de perméabilité à l'air » du cabinet DEA daté du mois de juillet 2023 dans le cadre de la nrome RT 2012 qui conclut que l'objectif de 0,60 en m3/(h.m²) n'est pas atteint, la mesure réalisée étant de 2,15 m3/(h.m²).
Ce rapport constate de multiples défauts d'étanchéité à l'air au niveau des menuiserie coulissantes. Certaines sifflent lorsque la maison est sous pression. Il existe des défauts de liaisons entre les dormants et le doublage, un défaut de compression des joints. Le joint entre les dormants et le doublage est absent.
Ces défauts sont quantifiés de moyen ou fort selon l'ouverture concernée.
L'appelante a également fait réaliser par ce même cabinet un diagnostic de performance énergétique qui reprend les déperditions de chaleur (à hauteur de 25% pour les portes et fenêtres), constate que la performance de l'isolation est bonne même si elle est moyenne au niveau des portes et fenêtres et conclut qu'en l'état actuel, la performance énergétique est bonne, le logement étant classé C sur une échelle de A à G.
Le changement des portes pour les remplacer par des menuiseries plus performantes et des fenêtres pour les remplacer par des fenêtres à double vitrage à isolation renforcée est recommandé dans les « travaux à envisager » pour améliorer la performance énergétique mais pas dans les « travaux essentiels ».
Plusieurs devis ont été réalisés, reprenant les désordres constatés par l'expert et le cabinet DEA sur les menuiseries et les volets roulants.
Néanmoins, les défauts de pose et l'absence de ventilation sur les menuiseries extérieures étaient des défauts apparents, les constatations de l'expert sur ce point étant simplement visuelles, sans investigations particulières, ce que vient corroborer l'attestation de M. [J].
L'acquéreuse pouvait dès lors, lors des visites préalables à la vente, tester l'ouverture et la fermeture des fenêtres, baies vitrées et porte d'entrée, et constater l'absence des ventilations ainsi que les problèmes d'aplomb des menuiseries.
L'expert n'a pas vérifié l'existence de problèmes d'étanchéité à l'eau, dont la preuve n'est pas rapportée, les photographies produites étant insuffisantes à les établir.
Les défauts d'étanchéité à l'air ressortent clairement de l'expertise et du rapport du cabinet DEA. Il est démontré que le bien immobilier ne respecte pas la norme RT 2012 sur ce point, mais non qu'une telle non-conformité rendrait le bien impropre à sa destination ou en diminuerait l'usage.
* terrasses extérieures
Le rapport [G] constate :
- concernant la terrasse sud : un défaut d'adhérence généralisé, des plinthes localement décollées et non adhérentes, des joints fortement dégradés, une pente non conforme ;
- concernant la terrasse ouest : une pente non conforme, des joints fortement dégradés, des carreaux fissurés et un carreau décollé avec désaffleurement très important, concluant à une impropriété à destination menaçant la sécurité des usagers ;
- que les nez de marches des escaliers ouest et sud, en profits plastique, sont non adhérents et en surépaisseur, ce qui porte atteinte à la sécurité des personnes.
Le rapport du cabinet Conseil2Pro constate que :
- la terrasse de l'entrée et du salon étaient réalisées pour l'une en mini treillis soudé posé sur du remblai de terre et dalle de béton, pour l'autre avec une chape maigre à même le sol sans aucune dalle béton et que le carrelage était posé avec des aléas de plots de colle ;
- que les marches extérieures d'accès à la maison étaient réalisées en agglos sans béton et recouvertes de carrelage sur plots de colle.
Les problèmes de pente relevés par l'expert, s'ils n'étaient pas visibles par un acheteur profane, ne rendent pas pour autant le bien impropre à sa destination.
Les carreaux fissurés et décollés, les joints dégradés, le défaut d'adhérence et les nez de marche sont des défauts apparents.
Concernant enfin le mode constructif des terrasses, ses caractères caché et antérieur à la vente sont avérés puisqu'ils n'ont été révélés que lors de travaux destructifs.
Néanmoins, ni l'expert ni le cabinet Conseil2Pro n'indiquent qu'il engendre une impropriété des terrasses à leur destination de ce fait.
* absence de fondation, zone portail et portillon
L'appelante produit :
- une attestation du gérant de la société SST, selon laquelle 'les fondations de la terrasse en zone ouest, du portillon et des portails n'étaient pas aux normes, très peu de béton » ;
- le rapport du cabinet Conseil2Pro selon lequel « il n'y avait pas de fondation, juste une liaison de 5 cm de mortier entre les 2 piliers du portail ».
S'il s'agit d'un vice de construction non apparent, l'appelante n'en tire aucune conséquence en termes d'impropriété de la maison à sa destination, et M. [G] n'en fait pas mention dans son rapport.
* placoplâtre
Le rapport [G] mentionne que les doublages et plafonds suspendus en plaques de plâtre cartonnées (placoplâtre) sont bâclés. « Les cueillies ne sont pas rectilignes, la planéité n'est pas acquise, les joints entre plaques de plâtre cartonnées sont sommairement poncés ». Il affirme que la réalisation du plafond surmontant le climatiseur côté ouest du séjour est inadmissible et inexcusable et que la pose des moulures d'angle, en cueillie de la salle de bains est bâclée.
Il ne fournit toutefois aucune explication sur les raisons pour lesquelles cette pose est « bâclée » et il ressort des photographies et de ces constatations visuelles que ces défauts étaient visibles lors de l'achat, ce que reconnaît l'appelante dans ses écritures.
L'expert ne conclut en outre pas que ces défauts rendraient le bien impropre à sa destination.
* plomberie
Le rapport [G] mentionne l'existence de plusieurs inachèvements et non-conformités affectant :
- le ballon thermo-dynamique (non installé, branchement à l'air libre)
- la baignoire de la salle de bains : la bonde ne fonctionne pas, rendant la baignoire inutilisable, l'affichage digital de la colonne de douche n'est pas branché et la pente du receveur est inversée,
- les siphons de l'évier de la cuisine et du dressing ont été remplacés par l'acheteuse
- la colonne d'alimentation de la baignoire de la chambre parentale est instable et présente un défaut de fixation
- la clarinette du dressing présente une fuite et les fixations des alimentations eau chaude et eau froide sont arrachées.
Le cabinet Conseil2Pro a constaté la présence d'une fuite dans la salle de bains partie bureau entre les PER et le raccordement du robinet de la baignoire, « fuite qui était sûrement depuis longtemps dans la chape du carrelage, conséquence décollement de tout le carrelage du sol du bureau et salle de bains ».
Un ouvrier du second 'uvre du bâtiment, salarié de la société Concept'in, a constaté lors de ses interventions en 2025 dans le bien litigieux :
- un grand nombre de tuyaux d'écoulement non fixés ayant créé des contrepentes avec des écoulements qui se sont bouchés dans le vide-sanitaire,
- une fuite d'eau dans la suite parentale due à une réalisation défectueuse des divers raccordements expliquant par l'engorgement de la chape le décollement de la quasi-totalité du carrelage de la pièce
- la pose de la baignoire et du receveur de douche sur des plots réalisés à l'aide chutes de carrelage et le tout en équilibre rendant le tout inutilisable.
Ce seul constat, postérieur de quatre ans à l'achat, ne suffit pas à démontrer que la fuite proviendrait d'une mauvaise réalisation de l'installation, et qu'elle était antérieure à la vente.
Les autres constats établissent que certains éléments de plomberie sont affectés de malfaçons non visibles par un acheteur profane et antérieures à la vente, malfaçons qui ne sont toutefois pas de nature à rendre le bien immobilier dans son ensemble impropre à sa destination.
*électricité
Le rapport [G] mentionne l'existence de circuits non repérés sur le tableau général, un dysfonctionnement électrique du four, un travail bâclé concernant les spots encastrés dans le dallage surélevé de la zone de cuisson, un dysfonctionnement des spots encastrés dans le plafond côté ouest de l'habitation et une absence de fonctionnement de la climatisation réversible.
Il fait état de "non-conformités flagrantes » concernant l'absence de protection dans le local dressing, des fils dénudés en plafond et le dysfonctionnement de plusieurs appareillages tels que spots et éclairages extérieurs.
Il conclut que « la vérification de l'intégralité de l'installation électrique par un organisme agréé s'impose dans les meilleurs délais ».
Le cabinet Conseil2Pro a constaté :
- des spots de lumière pour plafond encastrés dans la marche de la cuisine (au sol) entièrement rouillés, fils à nu,
- des spots non étanches à l'air posés dans l'ensemble du plafond (fils à nu).
M. [L] a attest' à ce propos que les spots n'étaient pas étanches, que de nombreux fils étaient à nu et que les spots de l'estrade étaient inadaptés.
Les vices relatifs aux fils à nu étaient des vices apparents, que l'appelante a pu constater lors de ses visites du bien préalablement à la vente.
En outre, l'électricité a fait l'objet d'un diagnostic technique fourni par les vendeurs et annexé à l'acte de vente. Aucune des parties ne produit ce diagnostic mais l'acte de vente indique en page 20, au paragraphe « information de l'acquéreur sur les anomalies relevées par les diagnostics techniques immobiliers obligatoires » que « l'acquéreur déclare ici avoir pris connaissance, préalablement à la signature, des anomalies révélées par les diagnostics techniques immobiliers obligatoires dont les rapports sont annexés ».
Les vices relevés ci-dessus ont donc nécessairement été relevés par le diagnostiqueur, et ainsi portés à la connaissance de l'appelante qui ne peut donc pas exciper de leur caractère caché.
* piscine
Le rapport [G] mentionne :
- une absence d'étanchéité sur les organes de sécurité
- que la liaison du liner sous les margelles n'est pas fixée et non étanche
- que la margelle sur la largeur du bassin côté est n'est pas parallèle au bassin.
Il conclut que « les défauts d'étanchéité sont de nature à porter atteinte à la solidité de l'ouvrage en cas d'évolution des infiltrations entre la structure du bassin et le liner ».
M. [O] indique dans son attestation que le dégagement des tuyaux de la piscine a permis de constater que ceux-ci étaient cassés et que la bonde de fond n'était plus fonctionnelle. Il n'est pas démontré que ce vice préexistait à la vente, ces constatations datant de 2025.
Le cabinet Conseil2Pro a constaté que la piscine était implantée plus basse que le terrain de sorte que toute l'eau de pluie va dans celle-ci, et qu'elle est construite en fausse équerre. Il ajoute que suite à l'affaissement de la terre remblayée autour, le réseau de filtration a dû être remplacé.
Une réhausse a été nécessaire.
Il n'est pas démontré que ce défaut d'implantation rendrait le bien impropre à sa destination, ni qu'il existerait un lien entre ce défaut et la nécessité de procéder au changement de réseau de filtration.
Il ressort de ces éléments que la piscine était atteinte d'un vice relatif à son étanchéité préexistant à la vente et non visible, rendant celle-ci impropre à son usage puisque portant atteinte à sa solidité.
* terrassement
Les constatations de M. [O], selon lesquelles le terrassement de la zone de parking a été réalisé sans pente pour l'évacuation des eaux pluie alors que cela était possible techniquement corroborées par des photographies et un devis, révèlent l'existence d'un vice non décelable à l''il nu par un acheteur profane.
Néanmoins, il ne ressort d'aucun élément du dossier que ce vice rendrait le bien impropre à sa destination.
* puisard
M. [O] atteste également que le puisard mentionné sur le plan de masse du permis de construire, nécessaire à la conformité de la maison, n'existe pas et qu'il a dû en réaliser un.
Là encore, il ne ressort d'aucun élément du dossier que ce vice rendrait le bien impropre à sa destination.
* connaissance des vices par les vendeurs
Il résulte de ce qui précède que la maison était affectée de vices cachés relatifs au défatu d'étanchéité de la piscine.
L'appelante verse aux débats une attestation de M. [J], qui l'a a ccompagnée lors des visites du bien avant la vente, aux termes de laquelle le vendeur aurait mis en avant « les éléments constructifs du bâtiment, précisant qu'il avait lui-même réalisé la construction ».
Cependant, l'acte de vente stipule clairement que les travaux de la piscine ont été effectués en 2018 par l'entreprise [D] Maçonnerie.
L'acte ne mentionne pas que certains travaux auraient été réalisés par les vendeurs eux-mêmes, qui ne peuvent par conséquent être réputés constructeurs.
L'entreprise [D] Maçonnerie a été immatriculée au répertoire SIRENE en 2017 par M. [E] [D] et il n'est pas établi que c'est le vendeur qui, sous couvert de son père, aurait réalisé la piscine.
L'appelante ne rapporte pas la preuve que les vendeurs avaient connaissance des vices cachés affectant cet élément, et est par conséquent déboutée de ses demandes sur ce fondement, par voie de confirmation du jugement.
* garantie décennale
L'appelante soutient, subsidiairement, que les désordres énumérés sont tous de nature décennale et que les vendeurs sont tenus de la garantir en vertu des dispositions de l'article 1792 du code civil.
Les intimés répliquent que les griefs exposés ne répondent pas aux critères nécessaires à la mise en jeu de la garantie décennale.
Aux termes de l'article 1792 du code civil, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
L'article 1792-1 2° dispose qu'est réputé constructeur de l'ouvrage toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire.
Ces dispositions sont reprises dans l'acte de vente et les époux [D], en leur qualité de constructeurs du bien immobilier vendus, sont tenus à cette garantie.
Le bien immobilier constitue un ouvrage au sens des dispositions susvisées.
Il convient de reprendre point par point les désordres listés par l'appelante, pour déterminer s'ils peuvent être qualifiés de désordres de nature décennale.
* auvent d'entrée
Le défaut d'étanchéité de l'auvent a été constaté par M. [G] qui ne fournit aucune explication, ni sur l'origine de ces problèmes d'étanchéité ni sur les raisons pour lesquelles ce problème rendrait l'auvent impropre à sa destination.
Quant aux défauts constructifs, il ne ressort d'aucune pièce qu'ils porteraient atteinte à la solidité de l'ouvrage, le cabinet Conseil2Pro se contentant de faire des suppositions sur ce point.
* menuiseries
Les défauts affectant les menuiseries intérieures et extérieures sont établis et M. [G] conclut que ces désordres, généralisés, caractérisent une impropriété à destination.
Il ne fournit encore une fois aucune explication sur ce point, et il ressort des développements qui précèdent que ces constatations sont contredites par le DPE qu'a fait réaliser l'appelante après la vente et par l'étude de perméabilité à l'air, qui n'ont mis en évidence qu'un non-respect de la norme RT 2012.
* terrasses extérieures
Les défauts d'adhérence, le décollement des plinthes, la dégradation des joints, les carreaux fissurés, le carreau décollé avec désaffleurement très important et les nez de marche non adhérents et en surépaisseur ne portent pas atteinte à la solidité de l'ouvrage mais le rendent impropre à sa destination, dès lors que la sécurité des personnes est menacée et leur évolution irréversible, aboutissant au décollement des carreaux sous l'effet du gel/dégel.
Néanmoins, M. [G] n'explique pas quelles sont les causes de ces désordres (erreur de conception, malfaçon dans la mise en 'uvre, négligence dans l'entretien ou l'utilisation) et leur imputabilité.
* absence de fondation, zone portail et portillon
Il n'est pas établi que ce désordre porterait atteinte à la solidité de l'ouvrage ou le rendrait impropre à sa destination.
* placoplâtre
Il s'agit de désordres esthétiques généralisés ne portant pas atteinte à la solidité de l'ouvrage ou le rendant impropre à sa destination.
* plomberie
L'installation de plomberie dans son entier n'est pas affectée de malfaçons et inachèvements. Les problèmes affectant la bonde de la baignoire, les siphons, la colonne d'alimentation de la baignoire et les clarinettes du dressing ne constituent pas des désordres rendant les éléments d'équipement impropres à leur destination.
Quant à la fuite, constatée plusieurs années après l'acquisition, il n'est pas établi qu'elle serait en lien avec une mauvaise réalisation de l'installation et qu'elle aurait pour conséquence de rendre l'installation dans son entier impropre à sa destination.
Enfin, l'expert n'apporte aucune explication sur le fait que selon lui, le défaut de pose du receveur de douche le rendrait impropre à sa destination.
*électricité
Ni M. [G] ni les intervenants ultérieurs ne font état d'une atteinte à la solidité de l'ouvrage ou d'une impropriété à sa destination de l'installation électrique.
* piscine
M. [G] a constaté que l'absence d'étanchéité sur les organes encastrés rendait l'ouvrage impropre à sa destination, précisant que les défauts d'étanchéité sont de nature à porter atteinte à la solidité de l'ouvrage en cas d'évolution des infiltrations entre la structure (non connue) du bassin et le liner.
M. [O] indique dans son attestation que le dégagement des tuyaux de la piscine a permis de constater que ceux-ci étaient cassés et que la bonde de fond n'était plus fonctionnelle.
Le cabinet Conseil2Pro a constaté que la piscine était implantée plus basse que le terrain de sorte que toute l'eau de pluie va dans celle-ci, et qu'elle est construite en fausse équerre. Il ajoute que suite à l'affaissement de la terre remblayée autour, le réseau de filtration a dû être remplacé.
Une réhausse a été nécessaire.
Il n'est pas possible de déterminer les causes qui ont produit la casse des tuyaux et l'absence de fonctionnement de la bonde de fond.
Il n'est pas davantage fourni d'explication sur le lien entre l'affaissement de la terre autour de la piscine et le remplacement du réseau de filtration.
Concernant le défaut d'étanchéité, M. [G] n'explique pas quelles en sont les causes (erreur de conception, malfaçon dans la mise en 'uvre, négligence dans l'entretien ou l'utilisation), son étendue et son imputabilité et aucun autre élément ne permet de l'établir.
* terrassement
Ce défaut allégué n'est pas de nature à porter atteinte à la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination.
* puisard
Il n'est pas établi que l'absence de puisard porterait atteinte à la solidité de l'ouvrage ou le rendrait impropre à sa destination.
L'appelante ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, de l'existence de désordres de nature décennale affectant l'ouvrage et sera déboutée de ses demande sur ce fondement.
* dol
L'appelante soutient, infiniment subsidiairement, que les vendeurs ont commis un dol en lui fournissant une fausse déclaration d'achèvement et de conformité des travaux dans le but de lui dissimuler l'existence de difficultés administratives, afin de l'amener à contracter, et que le préjudice occasionné est différent de celui qui a été réparé devant la juridiction pénale.
Les intimés répliquent que le dol allégué repose sur des difficultés urbanistiques qui ont été tranchées et entraîné une indemnisation de l'appelante.
Aux termes de l'article 1137 du code civil, le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des man'uvres ou des mensonges.
Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.
Le dol est défini comme étant une erreur provoquée intentionnellement par une partie ayant ainsi déterminé le consentement de son cocontractant.
Il ne se présume pas et doit être prouvé.
Il ressort des stipulations de l'acte de vente, concernant la construction de la piscine, qu'une déclaration préalable a été effectuée, et un récépissé déposé le 18 février 2021.
Figure ensuite la mention selon laquelle « une déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux a été déposée le 1er mars 2021. Le vendeur déclare ne pas avoir reçu aucune contestation à la conformité des travaux ce jour ».
Les vendeurs ont fourni à l'acheteuse le 13 mars 2021, par l'intermédiaire de l'agence immobilière, une déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux datée du 11 mars 2021.
Mme [P] a interrogé la mairie de [Localité 6] au sujet de cette [8] en juin 2021, qui lui a répondu qu'aucune DAACT n'avait été enregistrée en mairie pour cette déclaration préalable n°[9].
Le maire de la commune a au contraire pris le 3 mars 2021 une décision d'opposition à une déclaration préalable au motif que la piscine est implantée à une distance inférieure à 1,50 m par rapport à la voie, en violation des articles U6 et U7 du règlement du lotissement.
Les vendeurs ont été poursuivis pénalement pour cette infraction, ainsi que pour des faits d'exécution de travaux sans permis de construire (transformation d'un garage en chambre, réalisation d'une terrasse en façade ouest, installation d'une baie vitrée et création d'une piscine), et ont été condamnés à une peine d'amende, ainsi qu'à indemniser Mme [P], partie civile, de son préjudice causé par ces infractions à hauteur de 5000 euros.
Il est ainsi établi que les vendeurs ont fait une fausse déclaration, d'une part parce qu'ils savaient lors de la signature de l'acte de vente que leur déclaration préalable avait fait l'objet d'une opposition et d'autre part parce qu'aucune DAACT n'avait été déposée.
Néanmoins, l'appelante, qui a attendu près de quatre ans pour déposer plainte pour des faits d'escroquerie et usage de faux, ne rapporte pas la preuve que l'obtention d'une DAACT était déterminante de son consentement, étant relevé que la promesse de vente a été signée le 22 février 2021, et qu'elle ne démontre pas avoir fait entrer cet élément dans le champ contractuel lors des pourparlers.
En outre, elle a fait le choix de ne pas demander l'annulation du contrat sur ce fondement, et son préjudice matériel réparable ne peut constituer en l'octroi de dommages et intérêts dont le montant correspond au coût de l'intégralité des travaux qu'elle a engagé, travaux sans rapport avec le dol dont elle soutient avoir été victime. Ce préjudice ne pourrait être qu'une perte de chance de ne pas contracter à des conditions plus avantageuses.
Enfin, elle a d'ores et déjà obtenu réparation du préjudice causé par la non-conformité des travaux aux règles d'urbanisme, dans le cadre de l'instance pénale où elle s'est constituée partie civile.
Par conséquent, elle est déboutée de sa demande sur ce fondement.
* autres demandes
Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.
Mme [K] [P], qui succombe à l'instance d'appel doit en supporter les dépens.
Aucune considération d'équité ne justifie de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement rendu le 6 novembre 2023 par le tribunal judiciaire de Nîmes en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute Mme [K] [P] de sa demande de dommages et intérêts sur le fondement de la garantie décennale,
Déboute Mme [K] [P] de sa demande de dommages et intérêts sur le fondement du dol,
Condamne Mme [K] [P] aux dépens de la procédure d'appel,
Déboute les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.